Madame la Présidente, mes chers collègues, la Cour des comptes a publié, en novembre 2013, un rapport public thématique consacré à « l'accueil des enfants de moins de 3 ans ». Bien qu'aucune collectivité territoriale n'ait de compétence explicite en ce domaine, il m'a semblé opportun de faire le point sur les responsabilités qu'elles assument néanmoins pour soutenir les familles souhaitant faire garder leurs enfants en bas âge.
La Délégation a bien voulu me confier, au mois de janvier 2014, la réalisation d'un rapport sur ce sujet, dont je vous présente aujourd'hui les conclusions.
Pour y parvenir, j'ai consulté des représentants des principales associations d'élus : Assemblée des départements de France, Association des maires de France, Association des maires ruraux de France. J'ai aussi consulté des représentants de l'Union nationale des associations familiales, des assistants maternels, une ancienne responsable de la petite enfance ayant exercé en région Alsace, et le directeur de la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF).
Vous trouverez dans mon rapport une description détaillée des différents modes de garde des jeunes enfants. Ceux-ci étaient en France au nombre de 2,5 millions au 1er janvier 2012, dont 1,27 million étaient confiés, pour 60 %, à des assistantes maternelles, pour 30 % à des crèches, les 10 % restant étant préscolarisés ou gardés au domicile des parents.
Le coût global de cet accueil s'élevait, en 2011, à la somme considérable de 14 milliards d'euros, qui représente 0,7 % du PIB de l'année 2011. 73 % de ce total étaient à la charge de la branche famille de la Sécurité sociale, 17 % à la charge des collectivités territoriales et 10 % à celle de l'Etat.
Cet important effort vise un triple objectif : de soutien à la natalité, d'encouragement au travail des femmes, et de développement de l'enfant.
Si l'Etat en fixe les orientations générales, le financement de cette politique est en grande partie assuré par la branche famille de la Sécurité sociale, et sa mise en oeuvre relève principalement des collectivités territoriales. Or il apparaît clairement - et cela a également été souligné par la Cour des comptes - que ces dernières sont réduites à un rôle marginal dans la prise de décision, qui est essentiellement assurée par l'Etat et la Sécurité sociale.
Par ailleurs, le service offert aux familles est perfectible, car les besoins de ces dernières ne sont pas clairement connus.
De plus, les gestionnaires d'établissements d'accueil collectif rencontrent des difficultés croissantes à recruter du personnel qualifié alors que, dans le même temps, le vivier des assistantes maternelles peine à se renouveler.
L'offre de modes de garde est très disparate selon les territoires. Au total, et en moyenne nationale, il existe un potentiel de 52 places de garde pour 100 enfants de moins de 3 ans. Cette moyenne recouvre cependant de fortes disparités, car les capacités d'accueil varient, selon les départements de France métropolitaine, de 1 à 3. Les départements les mieux dotés se situent dans l'ouest de la France et dans les zones urbaines disposant d'un fort potentiel fiscal, comme Paris ou les Hauts-de-Seine. À l'inverse, les départements ruraux situés sur un axe allant de l'Eure aux Ardennes, et les zones urbaines défavorisées, comme la Seine-Saint-Denis ou le Val-d'Oise, disposent des offres les plus réduites. Ces inégalités sont le résultat de facteurs multiples et complexes : difficultés pour les familles démunies socialement et financièrement de recourir à un mode de garde extérieur, dispersion de l'habitat dans les zones rurales ou manque de personnels qualifiés.
Selon la Cour des comptes, « l'accès des familles à un mode de garde reste largement dépendant du niveau de leurs revenus. Ainsi, 64 % des ménages les plus aisés font garder leur enfant, contre 8 % pour les familles les plus modestes ».
Une enquête réalisée en 2012 par la CNAF souligne que les parents gardant leur enfant sont deux fois plus nombreux que ceux qui l'ont expressément souhaité. La CNAF a donc intégré, dans la convention d'objectifs et de gestion (COG) qu'elle a conclue avec l'Etat pour la période 2013-2017, la nécessité de « cibler les dépenses sur les territoires prioritaires au sein des bassins de vie ». Vous savez que l'INSEE définit le « bassin de vie » comme : « le plus petit territoire sur lequel les habitants ont accès aux équipements et services les plus courants ». Ce sont ainsi 120 millions d'euros qui seront affectés aux crèches situées dans les territoires prioritaires.
Par ailleurs, les trois-quarts des 100 000 nouvelles solutions d'accueil seront créés dans les territoires où la tension entre l'offre et la demande est forte.
Il faut relever que la capacité d'accueil des jeunes enfants, même si elle reste insuffisante, a été notablement renforcée de 2006 à 2011, avec une offre supplémentaire de 132 000 places. Ainsi, les enfants de moins de 3 ans bénéficiant d'une place d'accueil sont passés, durant cette période, de 48 % à 52 %. Cette croissance de l'offre est prioritairement due à l'accroissement des places offertes par les assistants maternels (+ 160 000) et par les crèches (+ 53 000).
Dans son rapport thématique, la Cour des comptes relève que « quelle que soit la tranche de revenu de la famille, le taux d'effort et le reste à charge sont toujours moins élevés en établissement d'accueil collectif (EAJE : établissement d'accueil des jeunes enfants), alors qu'il est le plus coûteux pour la collectivité, le moins coûteux étant l'accueil par les assistants maternels ».
Cette distorsion entre les coûts pesant sur les familles et ceux pesant sur la collectivité est préoccupante. Ses causes sont connues : elles découlent des fortes exigences requises des personnels qui sont employés dans les crèches.
Ce haut niveau de qualité explique que le choix prioritaire des familles se porte sur ce type d'accueil, mais ce choix ne peut être satisfait que pour une minorité de demandes, et selon des critères qui ne sont pas toujours transparents. Ainsi, ce sont les assistantes maternelles qui assurent le plus fort taux d'accueil, avec 60 % du total, soit près de 740 000 places. 50 000 enfants sont gardés par des salariés à domicile, et 95 000 vont à l'école maternelle.
Les objectifs et les modalités de la garde des jeunes enfants relèvent sans conteste de l'Etat, seul à même de les définir pour l'ensemble du territoire, ainsi que de déterminer et fournir le financement de cette politique.
Cette évidence ne doit cependant pas conduire à méconnaître le rôle important assuré par les collectivités territoriales, en l'occurrence le bloc communal et les départements, dans son application. Ceci est d'autant plus crucial que de nombreuses améliorations des modes d'accueil pourraient être réalisées par une approche pragmatique issue du territoire, comme le constate le rapport de la Cour des comptes. Celui-ci souligne, en effet, que : « l'éclatement des compétences entre la CAF, le département et le niveau communal en matière d'initiative, d'autorisations, d'agréments et de financement des projets nuit à leur cohérence.
La coordination des différents acteurs est insuffisante, notamment au sein des commissions départementales d'accueil du jeune enfant (CDAJE) ». Ces commissions, créées en 2002 et placées sous l'autorité du président du conseil général, visaient à recueillir les avis de tous les acteurs impliqués : collectivités territoriales, services de l'Etat, CAF, gestionnaires et professionnels de la petite enfance et usagers de ces modes d'accueil.
Au total, ces commissions se sont révélées utiles à la confrontation des points de vue, mais n'ont que marginalement joué le rôle d'aide à la décision. Elles ont été remplacées, le 7 février 2014, par les commissions départementales des services aux familles, réunissant les mêmes acteurs. Ces nouvelles instances ont pour mission de mettre en place les schémas territoriaux des services aux familles, visant à définir l'offre et à réduire les inégalités territoriales dans son accès. Ces schémas sont actuellement expérimentés dans 17 départements pilotes (16 en métropole, plus La Réunion). Leur achèvement, prévu à l'été 2014, engagera les départements impliqués pour 4 ans. Ces schémas doivent s'appuyer sur « un diagnostic territorial local », et ont vocation à être généralisés d'ici à la fin 2014.
Cette initiative est doublement opportune, puisqu'elle donne à ces nouvelles commissions départementales une mission et un cadre précis, et implique une programmation sur 4 ans. Elle conforte le département dans son rôle de chef de file de la cohésion sociale. Il l'exerce notamment dans la mise en place de maisons d'assistantes maternelles (MAM), locaux où ces personnels accueillent des enfants - y compris ceux qui sont peu gravement malades - à des horaires atypiques.
Cette formule comporte de nombreux avantages : elle répond à un souhait de nombreuses assistantes maternelles d'accueillir des enfants hors de leur domicile et de partager leurs expériences. Elle permet également d'apporter des services très demandés par les familles en matière d'accueil : horaires souples et accueil d'enfants légèrement souffrants, ce qui évite à l'un des deux parents de devoir s'absenter de son travail. Le conseil général accorde également les agréments, après avis du maire, aux micro-crèches et aux assistantes maternelles, en fonction des besoins.
Enfin, s'agissant de la scolarisation des enfants à l'âge de 2 ans, les élus locaux soulignent qu'elle a l'avantage d'offrir un mode d'accueil gratuit à tous les parents, mais que ce service a un coût élevé pour la collectivité, comprenant le salaire des enseignants et, en milieu rural, le coût du transport scolaire.
Les représentants des communes rurales ont souligné combien la petite enfance est un service de proximité immédiate, particulièrement pour ses modalités pratiques d'organisation. La souplesse des modes de garde doit prévaloir, comme le pragmatisme dans leur choix. Les maires ruraux sont particulièrement attentifs à la présence sur leur territoire de modes d'accueil diversifiés des enfants, qui constituent un élément fort d'attractivité pour les jeunes couples dont la présence est vivement souhaitée pour dynamiser ces zones.
L'ensemble des maires s'accordent sur la nécessité de recenser les offres d'accueil des jeunes enfants, qui prennent des formes très diverses. Les communes disposent, grâce aux centres communaux d'action sociale (CCAS), d'éléments concrets sur les offres.
De même, le taux d'activité de la population féminine est connu, à un niveau fin, des mairies ou des intercommunalités, qui sont en mesure de juger de l'opportunité d'ouvrir ou non de nouvelles structures.
Les élus émettent une vive crique envers la tarification à l'heure imposée par la CNAF aux crèches. En effet, elle fragilise le bien-être des enfants, des parents et des professionnels en suscitant l'existence de crèches s'apparentant à des « halls de gare », à cause des allers et venues incessantes des parents venant confier ou reprendre leur enfant. Par ailleurs, cette tarification renforce le comportement consumériste des familles, qui respectent de moins en moins les horaires de garde pour lesquels ils s'étaient engagés, ce qui complique la tâche des gestionnaires.
Sur ce point, il me semblerait souhaitable que les familles confiant leurs enfants à des crèches, et plus encore à des assistantes maternelles, paient ces services à l'avance, comme cela s'est imposé pour les cantines scolaires, après des expériences malheureuses. La réglementation de la CNAF ne le permet pas aujourd'hui, mais il m'apparaît nécessaire de la faire évoluer sur ce point : il est choquant que des assistantes maternelles soient conduites à accueillir des enfants sans être payées en temps et en heure. La plupart d'entre elles, en effet, ne refusent pas les enfants, pour ne pas leur porter préjudice. Il conviendrait de responsabiliser les parents défaillants, qui sont loin d'être tous dans des situations financières difficiles. La CNAF m'a d'ailleurs indiqué qu'une expérimentation permettant le paiement en tiers payant d'une fraction de l'aide accordée aux parents allait débuter.
Une meilleure connaissance de l'offre de garde devrait s'accompagner d'une appréciation plus fine de la demande, qui n'est pas toujours formulée, notamment faute de connaissance des modes d'accueil existants.
En conclusion, et avant de vous présenter quelques propositions, je tiens à souligner la qualité du modèle français d'accueil des jeunes enfants, qui est certes perfectible, mais qui nous est envié par nombre de pays voisins.
La première recommandation consisterait à mieux associer les élus locaux (maires et présidents de conseil général) à la mise en oeuvre de la politique définie par l'Etat et la CNAF en matière d'accueil de la petite enfance. Si la définition relève bien du niveau étatique, sa mise en oeuvre gagnerait beaucoup en efficacité en prenant en compte les connaissances de terrain que possèdent les élus, qui ressentent avec regret et une certaine amertume que leur rôle soit souvent réduit à l'exécution, voire au financement, de décisions qui ne leur semblent pas toujours adaptées
Il conviendrait également de distinguer fonctions administratives et pédagogiques au sein des crèches, et de mutualiser les premières au sein des intercommunalités. En effet, autant l'accueil et le suivi des enfants doivent relever de chaque établissement, autant la gestion administrative et financière pourrait utilement relever d'une personne spécifiquement formée, en mesure de mutualiser et d'harmoniser les modes de gestion des différents établissements d'accueil, aujourd'hui disparates. Ce gestionnaire unique permettrait notamment de globaliser les achats et d'en réduire le coût.
Il faudrait également décentraliser le plus possible l'offre d'accueil, dont la gestion concrète dépend des territoires de vie.
Il apparaît prioritaire de renforcer la formation des assistantes maternelles, qui est financée par les conseils généraux, pour valoriser leurs fonctions et en faire un vrai métier.
Enfin, il faudrait instaurer le paiement à l'avance par les parents des frais liés à l'accueil de leurs enfants, et faire verser directement aux assistantes maternelles, en cas de nécessité, les aides versées aux parents.
Je vous remercie pour ce rapport qui aborde un sujet très concret pour les élus locaux que nous sommes.
Je souhaite vous faire part d'une expérience intéressante menée dans ma commune. Nous avons mis en place un partenariat avec une entreprise privée qui a fait construire une crèche pour son personnel. La mairie a pu réserver des berceaux pour les habitants dans la commune dans cette dernière.
Nous avons mené la même expérience dans ma commune. Nous avons acquis 25 places de crèches d'entreprise, ce qui revient beaucoup moins cher à la collectivité que si nous avions réalisé la crèche nous-mêmes en raison des coûts d'investissement et de gestion que cela représente.
Il est intéressant de rappeler la grande diversité des modes de garde qui fait aussi la richesse de notre système. Ce dernier fonctionne d'ailleurs pas mal du tout.
Les conclusions de ce rapport sont pertinentes et posent un diagnostic pragmatique et réaliste. En effet, on peut certes souhaiter, comme Mme Bertinotti, la mise en place d'un grand service universel de la petite enfance mais, dans l'état actuel des finances publiques, cela est inaccessible.
Par ailleurs, je souhaite rappeler que le système est en deçà de la demande, que ce soit à la ville ou à la campagne. Déjà dans les années 2000, à un moment où la situation budgétaire du pays était meilleure, il apparaissait impossible aux collectivités territoriales de construire un nombre suffisant de places de crèche pour répondre à la demande. Le modèle français a souhaité se rapprocher de la perfection, avec un infirmier diplômé d'État par structure. Cela implique des coûts inabordables. Dans ma ville, nous avons développé 30 places de crèches supplémentaires, ce qui coûte 5 000 euros par an et par place.
En ce qui concerne les assistantes maternelles, l'accent doit être mis sur la formation. En outre, pour des raisons de sécurité, notamment parce qu'une assistante maternelle ne peut en permanence surveiller l'enfant, le développement de maisons d'assistantes maternelles (MAM), où plusieurs assistantes peuvent se retrouver, est intéressant. Initialement, un grand nombre de personnes, notamment la PMI de mon département ainsi que les crèches étaient réservées à l'égard du développement de ces MAM. Elles les voyaient comme une forme de concurrence. Mais si le réseau des assistantes maternelles a vocation à se développer, la formation doit être renforcée. Il existe en effet aujourd'hui un écart trop important entre le niveau qualitatif des structures multi-accueil et les assistantes maternelles. De même, il est nécessaire de prendre des mesures afin de responsabiliser les parents.
À titre personnel, je suis sceptique vis-à-vis du schéma départemental. Autant le département a un rôle dans le niveau qualitatif ainsi que sur une vision d'ensemble de l'accueil de la petite enfance, autant il appartient à chaque commune de définir où doit être installée une crèche. En effet, cette dernière doit répondre à un besoin réel. La mise en oeuvre va dépendre au final du bloc communal.
Enfin, pour revenir sur la scolarisation précoce, nous le faisons en zone urbaine sensible. Or, le critère de la zone d'éducation prioritaire pour scolariser les enfants avant 3 ans est arbitraire. Il y a, en effet, en zones rurales, des familles pour lesquelles la scolarisation précoce de l'enfant apporterait un vrai plus. Peut-être des structures collectives d'accueil pré-maternel mais n'ayant pas les coûts et taux d'encadrement des crèches multi-accueil pourraient-elles être imaginées ? Car les maisons d'assistants maternels répondent surtout au besoin des plus petits.
Il est urgent de prévoir la relève pour les assistantes maternelles. En effet, beaucoup d'entre elles vont prendre leur retraite. C'est une génération passionnée par son travail, qui a exercé cette profession tout au long de sa vie. Or, de plus en plus de nouvelles assistantes maternelles exercent maintenant cette profession pour se procurer un revenu, un emploi temporaire, par exemple, alors qu'elles ont elles-mêmes leurs jeunes enfants à garder. Il faut leur donner un lieu où elles peuvent se réunir à plusieurs pour échanger et qui soit sécurisé pour les enfants.
Serait-il possible d'inclure en annexe au rapport la liste des départements qui interviennent financièrement, non pas via des investissements, mais directement dans le fonctionnement des crèches ? À titre d'exemple, le conseil général des Hautes-Pyrénées, dont je suis le président, intervenait financièrement dans le fonctionnement des crèches. Il a décidé de supprimer toutes les dépenses de fonctionnement, sauf pour les enfants handicapés et les familles très pauvres. Cette mesure a provoqué un tollé. Or, cette participation financière du département à la gestion courante de ces structures d'accueil cache leur coût réel.
La petite enfance fait écho au débat que nous avons eu la semaine dernière en séance publique sur la répartition des compétences. L'État est très présent via les CAF, le département joue un rôle de donneur d'ordre, et ce sont les communes ou intercommunalités qui construisent et gèrent ces structures d'accueil au quotidien. Tous ces étages sont-ils nécessaires ? Faut-il simplifier le système ? Ou, au contraire, faut-il le maintenir ainsi car il fonctionne bien ?
De même, lorsque l'on entend que le gouvernement va construire 1 000 crèches, on se demande comment il va faire, car au final cela relève des collectivités locales, qui, concrètement, doivent faire face à de nouvelles dépenses.
La CNAF va faire redescendre des financements supplémentaires sur tel ou tel territoire, mais c'est la seule intervention possible.
Les annonces faites par l'Etat ne clarifient pas le débat pour le citoyen. En ce qui concerne les maisons d'assistantes maternelles, j'en avais une dans mon département, mais initialement cela ne fonctionnait pas bien. Un temps d'adaptation a été nécessaire. En état de cause, dans le domaine social le département ne demande aucune nouvelle compétence. Les dépenses sociales représentent plus de la moitié du budget du département, et l'annonce de l'augmentation de 2% du RSA a lieu sans que des financements supplémentaires soient accordés à cette collectivité.
Que pensez-vous de la proposition de faire payer les parents à l'avance ? Cela existe déjà dans certaines cantines scolaires.
Nous avons souhaité mettre en place ce système, mais la CAF nous en a empêché. Or, cela permettrait d'avoir une meilleure gestion. Aujourd'hui, nous sommes obligés de faire du « surbooking » car nous savons qu'au final un certain nombre de parents ne mettront pas leurs enfants dans les structures mais, de ce fait, nous risquons de nous retrouver à l'occasion au-dessus du ratio réglementaire.
Chère collègue, je vous remercie pour ce travail.
Le rapport est adopté.
Madame la Présidente, mes chers Collègues, vous savez que la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2013 a entraîné d'importantes modifications en matière de protection sociale des élus locaux, puisqu'elle les a rattachés d'office au régime général de la sécurité sociale pour l'ensemble des risques.
Une nette insuffisance d'informations venant des administrations compétentes à destination des associations d'élus sur les conséquences, positives et négatives, de ce rattachement, a caractérisé la période allant de la promulgation de la loi, le 17 décembre 2012, à la publication, le 26 avril 2013, du décret relatif « aux conditions d'affiliation des élus locaux au régime général de la sécurité sociale ». Cette carence a suscité de nombreuses incompréhensions parmi les élus. Celles-ci se sont exprimées lors de la table ronde organisée par notre Délégation le 5 novembre 2013, qui a réuni des représentants de l'Association des maires de France, de l'Association des maires ruraux de France, de l'Association des régions de France et, pour l'administration, le sous-directeur des élus locaux à la Direction générale des collectivités territoriales (DGCL), relevant du ministère de l'Intérieur, et le responsable de la législation financière de la Direction de la sécurité sociale (DSS) au ministère des Affaires sociales.
À la suite de cette table ronde, notre Délégation a décidé de créer un groupe de travail pour tenter de dissiper les malentendus qui s'étaient alors exprimés, et m'en a confié la responsabilité.
Ce groupe de travail devait initialement associer à ses travaux les services de Mme Lebranchu, ministre de la Décentralisation et de la Fonction publique, mais cette perspective a été abandonnée du fait de la lenteur de sa prise en compte par ce ministère.
J'ai donc réuni, le 15 mai dernier, des responsables de la DGCL, des responsables de la Direction de la sécurité sociale (DSS), et la directrice juridique de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM).
Vous trouverez dans mon rapport écrit le compte rendu de cette réunion, dont les éléments majeurs sont les suivants :
- l'objectif principal des modifications introduites est de renforcer la solidarité nationale entre les élus locaux et leurs concitoyens ;
- l'amélioration des prestations en espèces et en nature allouées aux élus locaux, souvent présentée par le gouvernement comme la priorité des modifications introduites par la LFSS pour 2013, n'en constituait donc qu'un objectif accessoire ;
Les éclaircissements apportés par les fonctionnaires chargés de ce dossier ont permis une meilleure compréhension de l'assiette retenue pour les cotisations dont les élus doivent désormais s'acquitter, et notamment l'intégration de la fraction représentative des frais d'emploi (FRFE) qui y est faite. Le seuil à partir duquel les cotisations sont réclamées (1 543 euros en 2013 ; 1 565 euros en 2014), ainsi que les conditions dans lesquelles pourra s'effectuer un éventuel cumul emploi retraite ont également fait l'objet d'explications.
De nombreux problèmes techniques restant à éclaircir à l'issue de cette réunion, j'ai demandé que soit établi un tableau récapitulatif de la situation des élus locaux, avant et après les modifications introduites par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, accompagné d'exemples concrets d'évolution, et en distinguant bien selon que les élus sont en activité professionnelle, sans activité professionnelle ou retraités.
Ce tableau m'a été adressé un peu tardivement, le 1er juillet dernier, mais il constitue un travail de grande qualité, et permet d'avoir une vue globale de l'évolution de la situation des élus locaux induite par la LFSS pour 2013. Il en ressort que ce texte n'a pas que des implications négatives pour les intéressés, mais que certains de ceux-ci sont effectivement soumis à de nouvelles cotisations, alors qu'ils perçoivent des prestations identiques à celles dont ils bénéficiaient antérieurement.
Vous trouverez ce tableau dans mon rapport écrit. Je vous présenterai donc ici ses apports les plus notables. Il récapitule tout d'abord les textes législatifs qui se sont succédés depuis la loi relative aux conditions d'exercice des mandats locaux de février 1992 qui, pour la première fois, comportait des éléments sur les indemnités de fonction, la retraite des élus, et ouvrait à ceux-ci un droit à la formation. Ce texte ouvrait également un droit aux prestations maladie en nature, et aux prestations vieillesse pour les élus ayant cessé d'exercer leur activité professionnelle afin d'exercer leur mandat.
La loi relative à la limitation du cumul des mandats électoraux, d'avril 2000, ne modifie, de ce point de vue, que la définition des bénéficiaires s'agissant des mandats municipaux, et y ajoute les présidents et vice-présidents des EPCI de plus de 20 000 habitants.
La loi de février 2002 relative à la démocratie de proximité alloue, à ces mêmes élus, des prestations maladie en espèce.
Enfin, les dispositions contenues dans la loi de décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 sont clairement décrites :
1) Affiliation de principe de tous les élus des collectivités territoriales et des EPCI (à l'exception des fonctionnaires détachés) au régime général de la sécurité sociale pour l'ensemble des risques ;
2) Lorsque l'indemnité versée à l'élu est supérieure à la moitié du plafond de la sécurité sociale (1 543 euros en 2013 ; 1 565 euros en 2014), cette indemnité est assujettie aux cotisations de sécurité sociale à partir du premier euro, à compter du 1er janvier 2013.
3) Les élus ayant cessé leur activité professionnelle pour exercer leur mandat se trouvent également affiliés au régime général.
Les éléments ayant suscité le plus d'incompréhension tenaient :
a) au caractère optiquement rétroactif de la cotisation à la charge des élus, puisqu'elle a été mise en oeuvre par un décret du 26 avril 2013, pour une prise d'effet dès le 1er janvier de la même année ;
b) à l'inclusion de la fraction représentative des frais d'emploi (FRFE) dans l'assiette de la cotisation, qui a semblé affirmer l'idée que l'indemnité versée aux élus locaux s'apparentait désormais à un salaire, ce qui modifiait profondément le principe de non-rétribution des mandats locaux ;
c) au caractère tardif des informations données aux élus sur les nouvelles prestations que leur ouvrait leur affiliation d'office, qui a fait naître le sentiment que les cotisations auxquelles ils étaient désormais assujettis ne leur ouvraient aucun droit supplémentaire.
Quant à la possibilité pour les élus de compléter leurs droits à retraite auprès du régime général de la sécurité sociale, elle n'a été précisée qu'ultérieurement, lors de la promulgation de la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraite.
Enfin, les collectivités territoriales ont été appelées à verser des cotisations « employeur » qu'elles n'avaient pas provisionnées dans leur budget pour 2013.
La conjugaison de tous ces éléments ne pouvait que susciter incompréhension et hostilité envers ce nouveau régime de protection sociale de la part des élus locaux, qui ont considéré, pas toujours à tort, qu'il leur était imposé sans véritable contrepartie.
L'intérêt de ce tableau, établi par les services compétents du ministère des Affaires sociales, réside dans l'analyse détaillée des implications de la loi de décembre 2012 sur les différentes catégories d'élus, et pour chacun des types de risques.
Je vais maintenant vous présenter les éléments principaux d'information contenus dans ce tableau. La première page retrace l'historique des différents textes qui ont organisé la protection sociale des élus locaux. Il faut y ajouter la loi du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice du système de retraite. Il résulte des éléments contenus dans le tableau qu'entre la loi de 1992 et l'entrée en application de celle du 18 décembre 2012, les élus disposaient d'une sécurité sociale « à la carte », c'est-à-dire différente selon le type de mandats exercés, et l'exercice ou non d'une activité professionnelle.
C'est en 1992 qu'ont été instaurés les droits aux prestations maladie et vieillesse, les premières se limitant à des prestations en nature, c'est-à-dire au remboursement total ou partiel des dépenses médicales, paramédicales, et des frais d'hospitalisation. En 2002 a été instauré le droit aux prestations maladie en espèces, c'est-à-dire aux revenus de substitution versés à un assuré qui se trouve privé de son revenu professionnel : indemnités journalières et pension d'invalidité.
La loi de 2012 touche tous les élus mentionnés à l'article 72 de la Constitution, et leur ouvre des droits aux prestations maladie, vieillesse, accidents du travail et maladies professionnelles (ATMP) et famille. Les conditions d'assujettissement varient selon que l'indemnité mensuelle de l'élu est inférieure ou supérieure à la somme de 1 543 euros en 2013, représentant la moitié du plafond de la sécurité sociale.
Les deuxième et troisième pages du tableau décrivent la couverture des risques selon que les titulaires de mandats locaux sont non assujettis à cotisations, en fonction du montant mensuel de leur indemnité.
La couverture du risque vieillesse comporte des évolutions positives et négatives. Parmi les premières, les élus assujettis aux cotisations peuvent désormais acquérir des droits pour leur future retraite. En revanche, ceux dont l'indemnité mensuelle les dispense de cotisations, et qui n'ont pas d'autre activité professionnelle, ne peuvent acquérir ni trimestres de retraite dans le régime de base, ni points dans le régime complémentaire. Ceci constitue une faille dans un dispositif présenté comme couvrant les élus locaux pour la totalité des risques.
Les quatrième, cinquième et sixième pages décrivent, en fonction de la situation des élus, les risques couverts avant et après la loi du 18 décembre 2012 qui diffèrent, suivant qu'ils exercent ou non une activité professionnel à temps plein ou partiel, ou qu'ils se trouvent sans emploi, ou enfin qu'ils soient retraités.
La dernière page du tableau rappelle les conditions de droit commun d'ouverture de droits aux principales prestations au sein du régime général.
L'appréciation d'ensemble que l'on peut porter les modifications induites par la loi de 2012 est plutôt positive ; on peut en effet estimer que les nouveaux droits ouverts par cette loi l'emportent en importance sur les points négatifs.
L'émotion créée parmi les élus locaux par ces dispositions nouvelles aurait, sans aucun doute, été moindre si le gouvernement avait clairement affiché que l'objectif principal était de faire mieux participer les élus locaux à la solidarité nationale. Or, la communication a essentiellement porté sur les droits nouveaux, qui sont minimes, passant sous silence que certains élus sont amenés à verser des cotisations nouvelles sans pour autant bénéficier d'avantages nouveaux. Cette ambiguïté de départ a suscité une incompréhension sur le but poursuivi par la réforme, et de nombreux élus ont mal ressenti le fait qu'on leur réclame des cotisations qui ne leur ouvraient aucun nouveau droit.
En résumé, la seule évolution clairement positive réside dans la possibilité, pour les élus assujettis à cotisations, d'acquérir de nouveaux droits à la retraite au régime général de la sécurité sociale. Ces élus peuvent ainsi - et cela est nouveau - cumuler les trimestres acquis en qualité d'élu et ceux acquis au titre de leur activité professionnelle principale.
Ainsi que notre rapporteur l'a souligné, l'objectif premier du texte était que les élus contribuent à la solidarité nationale, mais il a été dissimulé au profit d'une présentation exagérément positive des avantages conférés par la loi de 2012.
Il serait très utile de savoir combien ce nouveau dispositif rapporte au régime général de la sécurité sociale, et à combien s'élèvent les nouvelles dépenses qui en découlent en faveur des élus. En un mot, quel est le gain net de cette mesure pour le régime général ?
J'ai posé cette question lors de la réunion du 15 mai dernier, et il m'a été répondu qu'il n'était pas possible d'isoler le groupe constitué par les élus de l'ensemble des assurés. Je formulerai à nouveau cette question, car il semble légitime que nous puissions obtenir des éléments chiffrés sur les conséquences de la loi de 2012.
D'autres questions restent en suspens :
- il semble que des élus exonérés de cotisations, car se trouvant sous le seuil, et qui se sont démis de leur activité professionnelle au profit de leur mandat ne bénéficient en rien de la réforme ;
- les collectivités territoriales qui maintiennent, comme c'est toujours le cas en pratique, leurs indemnités aux élus en arrêt maladie devraient pouvoir se faire rembourser par le régime général les indemnités journalières qui ne sont pas perçues par leurs bénéficiaires.
Pour être équitable, le nouveau dispositif devrait permettre d'ouvrir le droit de cotiser aux élus percevant une indemnité inférieure à 1 565 euros.
Je comprends la volonté du gouvernement d'associer les élus au redressement du régime général de la sécurité sociale, mais je déplore l'absence de communication claire sur les motifs fondamentaux de la loi de 2012 visant à mettre un terme à une affiliation au régime général de la sécurité sociale qualifiée d'« à la carte » et, de ce fait, contraire aux principes généraux de notre sécurité sociale.
Je suggère donc au rapporteur de reprendre contact avec ses interlocuteurs au ministère de la Solidarité afin de leur signaler les failles que nous venons d'identifier dans le dispositif découlant de la loi de 2012, et examiner les modifications de nature à les atténuer. Il est essentiel, également, d'obtenir les éléments chiffrés qui nous sont nécessaires pour évaluer la pertinence de cette réforme.
Sans attendre, je vous propose de publier les informations recueillies par notre rapporteur sous forme de rapport d'information.
La proposition est adoptée.