La réunion est ouverte à 17 heures.
Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de M. le Premier ministre, une commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte s'est réunie à l'Assemblée nationale, le 10 mars 2015.
Elle a procédé à la désignation de son bureau constitué de : M. François Brottes, député, président, M. Jean Claude Lenoir, sénateur, vice-président, Mme Marie-Noëlle Battistel, Mme Sabine Buis et M. Philippe Plisson, députés, rapporteurs pour l'Assemblée nationale, et M. Ladislas Poniatowski et M. Louis Nègre, sénateurs, rapporteurs pour le Sénat.
La commission a ensuite procédé à l'examen des dispositions restant en discussion.
a souligné la qualité des travaux menés au Sénat sur ce projet de loi et s'est félicité que des dispositions aient été précisées. Toutefois, il constate que de nombreux sujets séparent encore l'Assemblée nationale et le Sénat, en particulier ceux relevant du titre Ier portant sur des engagements du Président de la République et sur lesquels portera probablement l'essentiel des discussions de la commission mixte paritaire.
a indiqué que le Sénat s'était donné le temps et les moyens d'examiner ce projet de loi et qu'il avait fourni un travail sérieux. Cet examen a été utile pour tous. Le projet de loi se situe dans le prolongement des lois Grenelle que la précédente majorité avait initiées. Mme la ministre de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie en soulignant le vote magnifique intervenu au Sénat a reconnu que l'examen par la Haute assemblée avait été l'occasion d'une véritable co-construction. La meilleure façon de poursuivre cette co-construction est d'examiner le texte. Il a donc proposé que l'attention de la commission mixte paritaire ne se limite pas au seul titre Ier, que celle-ci parte du dernier texte voté, c'est-à-dire celui du Sénat, et qu'elle prenne le temps nécessaire pour obtenir une large approbation, ce qui lui semble possible.
a indiqué qu'il ne retenait pas cette proposition. Les fondamentaux doivent tout de suite être abordés car les autres dispositions du texte en dépendent.
a souhaité un vote sur la volonté de cette commission de trouver un texte de compromis.
a rappelé que ce n'était pas l'usage et qu'il était de la responsabilité du président de la commission mixte paritaire de voir si un accord était possible après un débat.
a reconnu l'excellent travail du Sénat. Peu de choses séparent l'Assemblée nationale et le Sénat. Toutefois, un point dur existe : l'objectif de réduction de la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50 % d'ici 2025. Le Sénat a déjà fait un effort pour accepter l'objectif de 50 %. Mais il lui reste un pas supplémentaire à faire : accepter la date de 2025. Il s'agit d'un engagement du Président de la République et de la majorité de l'Assemblée nationale. Il est nécessaire de débattre de la question du mix énergétique mais à défaut d'accord sur ce point, il ne sera pas possible d'aboutir.
a considéré que le Sénat avait effectué un travail approfondi à travers la répartition de l'examen des articles entre les deux commissions compétentes - la commission des affaires économiques et la commission du développement durable -, dans un esprit constructif, qui avait conforté celui engagé par l'Assemblée nationale tout en permettant un certain rééquilibrage. Il a cité, à titre d'exemple, les sujets sur lesquels l'apport du Sénat lui apparaissait important : rénovation des bâtiments, dispositions relatives aux énergies renouvelables, sûreté nucléaire, régulation des réseaux et des marchés de l'électricité - s'agissant notamment de la question des électro-intensifs -, effacement de consommation électrique, réforme de la contribution au service public de l'électricité (CSPE), lutte contre la précarité énergétique. Il s'est interrogé sur le sort réservé à ces dispositions en cas d'échec de la commission mixte paritaire.
a rappelé que si tel devait être le cas, l'Assemblée nationale aurait à examiner en nouvelle lecture le texte adopté par le Sénat.
s'est réjouie que des points de convergence apparaissent sur plusieurs sujets comme les dispositifs de participation du public au financement des énergies renouvelables, l'hydroélectricité. Toutefois, elle a regretté que le Sénat ait opéré d'importantes modifications sur le titre Ier, s'agissant de l'échéance permettant de ramener la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50 %, ainsi que sur le plafonnement de la puissance du parc.
a estimé que peu de choses séparaient les deux assemblées. Rappelant qu'il a été rapporteur de la loi « Grenelle 2 », il a qualifié ce texte de « Grenelle 3 » et souligné l'urgence qu'il présente. Sur le titre III relatif à la mobilité, le Sénat a essentiellement modifié la date d'entrée en vigueur des dispositions sur l'obligation pour l'État et les établissements publics d'acquérir des poids lourds « propres », élargi la stratégie nationale pour les véhicules propres à l'ensemble de la mobilité - un bel exemple de co-construction - et, s'agissant du covoiturage, poursuivant dans la même direction que l'Assemblée nationale, le Sénat a précisé sa définition et renforcé le dispositif relatif à la création d'aires de covoiturage. Un juste équilibre a été trouvé sur les servitudes de marchepied.
Sur le titre IV, le Sénat a supprimé l'obligation d'affichage de la durée de vie des produits, qui paraît prématurée, préférant une logique incitatrice. Un ajustement a été opéré sur la définition de l'obsolescence programmée. Sur l'interdiction des sacs plastiques, un compromis a été trouvé en séance avec la ministre. De manière générale, le Sénat a cherché à faire en sorte que l'industrie française soit dynamisée et non gênée par ce texte. Une disposition, qui est peut être une innovation au niveau mondial, a enfin été ajoutée pour établir une hiérarchie dans l'utilisation des ressources.
Il a enfin estimé que sur l'article premier et l'objectif de réduction de la part du nucléaire, le Sénat avait fait un pas significatif et que c'était au tour de l'Assemblée nationale d'en faire un.
a estimé que l'article premier, alinéa 29, est bien le coeur du problème. Les députés UMP saluent eux aussi la qualité du travail du Sénat. Deux questions fondamentales se posent : voulons-nous un texte bipartisan sur l'énergie ? Pour élaborer un texte bipartisan, l'UMP avait fait dix propositions. Aucune d'elles n'a été reprise par le Gouvernement. Si le Parlement adopte un texte partisan, il risque d'être remis en question dès la prochaine alternance. Sur l'objectif de 50 %, la droite a fait un pas. La majorité de l'Assemblée nationale considère-t-elle que la date est le coeur du sujet ? Sur la capacité nucléaire, la différence entre les deux chiffres représente 2,6 % de la capacité nucléaire française : c'est l'épaisseur du trait ! Est aussi en jeu l'avenir de la filière nucléaire française, avec une de ses composantes qui est en grande difficulté. Il a demandé que l'objectif de 50 % à horizon 2025 fasse l'objet d'un vote.
a souligné la grande liberté des débats au Sénat et les nombreuses avancées, notamment en matière de rénovation thermique des bâtiments. La seule question sur laquelle le Sénat a retrouvé ses clivages habituels est celle du nucléaire. Avec cette loi, l'État reprend la main, avec une volonté de planifier la transition énergétique par une programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) de trois ans puis une PPE à horizon 2023. Il est donc très important de fixer dès à présent une date, celle de 2025, pour savoir ce qui devra se passer après 2023. Il n'y a pas de consensus possible sur ce point, il faut soutenir la position du Président de la République.
Le plafond implique la fermeture d'une centrale, probablement Fessenheim. S'agissant de l'avenir de la filière nucléaire et notamment d'Areva, plus vite la France aura une capacité technique de démantèlement d'une grande centrale, plus vite ces entreprises auront des capacités de développement sur les marchés. Fixer cette échéance est favorable aux entreprises françaises.
Le texte du Sénat est un bon point de départ, mais il faudra aussi revoir la disposition relative à la distance minimale pour l'implantation des éoliennes : il serait sage de revenir au droit actuel.
a souligné la très grande qualité des travaux du Sénat qui a, comme l'Assemblée nationale, significativement amélioré le texte du Gouvernement. Il a néanmoins observé que des désaccords majeurs existaient sur les objectifs, en particulier sur la date de 2025 et sur le développement de l'éolien, indispensable corollaire de la réduction de la part du nucléaire dans le mix énergétique.
s'est également félicité de la très grande qualité des débats au Sénat et de l'écoute dont avait fait preuve le Gouvernement. Il a néanmoins mis en avant le fait que le groupe CRC dont il est membre avait finalement voté contre le texte compte tenu de la menace d'une privatisation de l'hydroélectricité, de la mise en cause de l'égalité de traitement entre territoires et du recul que constitue le rétablissement des coupures d'eau. Il a souligné que son groupe, considérant que la date de 2025 n'était pas réaliste, avait voté le titre Ier tel que modifié par le Sénat et a regretté que l'on ne puisse pas discuter de l'ensemble du texte.
a salué la grande qualité des travaux du Sénat, en particulier sur les titres II et IV dont elle avait la responsabilité. Elle s'est félicité que le Sénat ait ainsi prolongé et approfondi un certain nombre de sujets, par exemple sur la dimension environnementale des bâtiments, sur les matériaux biosourcés ou encore sur la réduction de la précarité énergétique. Elle a néanmoins souligné que la suppression de la date de 2025 et l'abandon de l'objectif de diminution de 50 % de la consommation énergétique finale d'ici 2050 constituaient des points durs empêchant tout accord.
s'est félicitée du travail constructif du Sénat, soulignant que des accords transpartisans avaient pu être trouvés sur bien des points. Elle a ensuite estimé inutile de se focaliser sur la date de 2025, soulignant que le texte élaboré par le Sénat n'était, même sur ce point, pas si éloigné que cela des objectifs poursuivis par le texte de l'Assemblée nationale dès lors que l'objectif de 40 % d'énergies renouvelables dans la production en 2030 avait été confirmé. Elle a enfin souligné le problème qui pourrait se poser en cas d'alternance politique. Faute de consensus en commission mixte paritaire, une nouvelle majorité, ne se sentant pas tenue par une loi ainsi élaborée, pourrait en effet revenir sur ses principales dispositions.
a salué l'esprit de co-construction qui a prévalu lors des travaux parlementaires, contribuant à améliorer le texte. Il a rappelé le contexte particulier de la prochaine conférence climatique se tenant à Paris et pour laquelle la France se devait d'être exemplaire. Il a également insisté sur le fait que la date de 2025 se retrouvait dans les engagements européens et que l'éloignement de cette perspective enverrait un mauvais signal. Il a néanmoins conclu que l'échec de la commission mixte paritaire n'était pas une fin en soi, qu'il ne s'agissait que d'une étape avant de poursuivre le travail d'amélioration du texte.
a également salué le travail de co-construction et d'amélioration de ce texte. Il a tenu à rappeler les améliorations sensibles apportées au texte par la commission du développement durable du Sénat en matière d'économie circulaire, de responsabilité élargie du producteur (REP) et également d'énergies renouvelables. Il a conclu en encourageant à l'adoption de l'horizon 2025 pour démontrer la volonté de la France d'avancer rapidement sur ce sujet primordial.
a tenu à rappeler les réalités que couvre le plafonnement à 63,2 GW de la capacité de production d'origine nucléaire lequel menacerait directement 2 000 emplois avec la fermeture de la centrale de Fessenheim tout en rappelant l'absence de projet concret de substitution à ce jour. Il a conclu en déclarant que l'objectif de 2025 n'était pas tenable, notes et rapports à l'appui.
s'est félicité du consensus entre les deux assemblées quant à la perspective d'une réduction à 50 % de la part de l'électricité d'origine nucléaire. Il n'en demeure pas moins important de se fixer un objectif précis et daté. Une échéance ambitieuse, comme celle de 2025, permet de mobiliser l'ensemble des parties prenantes, qu'il s'agisse de l'État ou des énergéticiens, tout en conservant une place stratégique au nucléaire. Accroître la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique sera créateur d'emploi : ce constat justifie pleinement la réintroduction d'une date dans le texte du projet de loi.
s'est dit convaincu que le texte aboutira et que la poursuite de la navette parlementaire permettra d'affiner encore les contributions de chacune des assemblées. S'agissant de la part occupée par le nucléaire dans quelques années, la rédaction de l'Assemblée nationale est simple et claire, alors que la rédaction adoptée par le Sénat supprime toute référence calendaire et affaiblit l'objectif par une multitude de réserves. Il a estimé que le débat entre les deux assemblées était normal et que la procédure parlementaire permettra de le trancher, le cas échéant, et il s'est dit convaincu qu'en dépit des alternances politiques, les principes fondamentaux du projet de loi seront maintenus.
a estimé que le projet de loi comprenait au moins deux chiffres symboliquement forts. Celui relatif à la baisse de la consommation d'énergie d'ici 2050 a été maintenu par le Sénat, en dépit de son caractère irréaliste et dans une volonté d'ouverture et de conciliation. Il s'est dit convaincu, à titre personnel, que l'on assistera plutôt à une stagnation voire à une croissance de cette consommation, qui peut être le symbole positif d'une croissance économique retrouvée et d'une démographie dynamique. L'autre chiffre clé est celui de la baisse de la part du nucléaire de 75 % à 50 % d'ici 2025, date butoir que le Sénat a supprimée. La part importante du nucléaire dans le mix électrique français permet d'assurer l'indépendance énergétique de notre pays et d'assurer aux consommateurs un prix du kilowattheure de 50 % inférieur à celui qui prévaut outre-Rhin. Elle explique également, avec l'hydroélectricité, que la France soit aujourd'hui le deuxième plus faible émetteur de gaz à effet de serre en Europe derrière la Suède.
Le rapporteur a estimé que la perspective d'un échec dans laquelle la majorité de l'Assemblée nationale s'inscrivait délibérément s'expliquait par sa volonté de mettre en oeuvre, à la lettre, les engagements du Président de la République et de ne pas mécontenter ses alliés écologistes, dans la perspective de prochaines élections. Or, le respect de l'objectif assigné en2025 signifierait la fermeture de 20 à 22 réacteurs à cette date, ce qui est techniquement et économiquement intenable. Supprimer cette date rendrait service à cette majorité et au Gouvernement. Le Sénat est donc venu à la présente commission mixte paritaire avec l'espoir d'un accord et constate avec regret que cet esprit constructif se heurte à des consignes politiques données en haut lieu.
a souligné que la courbe de consommation de l'électricité pouvait évoluer, et qu'il était nécessaire de prendre en compte les exportations.
en réponse à une intervention de M. Jean-Yves Caullet, a indiqué que la majorité issue des prochaines élections législatives, quelle qu'elle soit, pourrait être amenée à revenir sur l'objectif de réduction de la part du nucléaire à 50 % en 2025, si celui-ci figurait dans la loi. Dès lors qu'il apparaîtrait intenable, la modification de la loi serait alors nécessaire et rien ne garantit qu'il s'agirait du seul changement apporté. Il a ainsi souligné combien il pouvait être stratégique pour la majorité actuelle d'accepter un compromis dès aujourd'hui.
a rappelé que les sénateurs s'étaient rendus en commission mixte paritaire dans l'espoir de trouver un accord, malgré les commentaires parfois peu judicieux publiés dans la presse. Il a par ailleurs souligné qu'eu égard aux propos tenus après le vote par Mme la ministre de l'Écologie, du développement durable et de l'énergie, le Sénat avait pensé, de bonne foi, que le texte qu'il avait adopté emportait l'assentiment du Gouvernement. En ce sens, il s'est étonné que plusieurs parlementaires puissent estimer que quelques sénateurs soient en faveur de ce que certains appellent encore « le tout-nucléaire ».
Alors qu'aucune des personnes entendues par les commissions ou les rapporteurs du Sénat n'a jugé possible le scénario d'une réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique national d'ici 2025, il lui semble particulièrement surprenant que des parlementaires puissent vouloir, pour des raisons de crédibilité par rapport à des annonces passées, inscrire dans la loi des dispositions qu'ils savent ne pas pouvoir être appliquées. D'après lui, l'enjeu est, bien au contraire, de parvenir à mettre en adéquation les souhaits politiques et ce qu'il est possible de réaliser. Alors que le Sénat a préservé l'objectif sous-jacent du projet de loi - à savoir l'atteinte des objectifs fixés lors des différents sommets internationaux - il est regrettable de ne pas tenter d'obtenir un consensus. Dans tous les cas, il a indiqué que l'exemple allemand, consistant en la substitution de sources d'énergies polluantes à l'énergie nucléaire, ne lui paraissait pas pertinent, tant du point de vue industriel qu'au regard du réchauffement climatique.
Enfin, il a rappelé sa demande de procéder à un vote sur l'article 1er et considéré que, s'il n'y était pas fait droit, le constat d'un échec de la commission mixte paritaire s'apparenterait à un véritable coup de force.
a conclu la réunion de la commission mixte paritaire par l'exposé de plusieurs constats.
Premièrement, il a rappelé que chacun reconnaissait la qualité du travail mené par le Sénat sur le projet de loi.
Deuxièmement, il a relevé que les échanges entre les parlementaires avaient souligné, selon lui, la nécessité de continuer le travail sur un certain nombre de points, rappelant que c'est sur le fondement du texte adopté par le Sénat que ce travail se poursuivrait.
Troisièmement, il a indiqué qu'il y avait un désaccord patent entre les majorités de chacune des deux parties à la commission mixte paritaire, s'agissant notamment des objectifs de la politique énergétique française. Il a enfin estimé qu'il serait dommage qu'un accord en commission mixte paritaire aboutisse à un texte qui ne serait pas voté par l'Assemblée nationale, rappelant que dans ce cas une place plus grande est faite au texte de l'Assemblée nationale dans la suite de la procédure législative.