Nous poursuivons ce matin les auditions organisées dans le cadre de la préparation à l'examen du projet de loi de règlement pour 2014, en abordant le sujet de l'hébergement d'urgence. Pour cela, nous accueillons Luc Derepas, directeur général des étrangers en France, responsable du programme 303 « Immigration et asile » et Virginie Magnant, cheffe du service des politiques d'appui et adjointe à la directrice générale de la cohésion sociale au sein du ministère des affaires sociales, de la santé et du droit des femmes, concernant le programme 177 « Prévention de l'exclusion et insertion des personnes vulnérables » et qui est déjà venue devant nous le 3 juin dernier pour une réunion de commission consacrée à l'exécution des crédits du programme 304 relatifs au RSA « activité ». Comme précédemment, cette audition est ouverte à la presse.
Je souhaite saluer la présence parmi nous de nos collègues Dominique Estrosi Sassone et Jean-Marie Morisset, rapporteurs pour avis de la mission « Égalité des territoires et logement » au nom respectivement de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires sociales ainsi que de François-Noël Buffet, rapporteur pour avis de la mission « Immigration, asile et intégration » au nom de la commission des lois.
En guise d'introduction, je rappellerai simplement que, selon le principe de l'hébergement inconditionnel des personnes en situation de détresse, posé par l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles, « toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d'hébergement d'urgence ».
Le financement de l'hébergement d'urgence, sous tension depuis plusieurs années, est un sujet qui nous revient année après année au fil des décrets d'avances et des ouvertures de crédits en cours d'exercice. Il est assuré à partir des deux programmes dont les responsables sont présents ce matin et vont être dès à présent interrogés par nos deux rapporteurs spéciaux compétents pour ces programmes, Philippe Dallier et Roger Karoutchi.
Depuis plusieurs années, le programme 177 connaît une surexécution de ses crédits. En 2014, la loi de finances initiale avait ainsi prévu 1,32 milliard d'euros et la dépense s'est finalement élevée à 1,47 milliard d'euros au 31 décembre. Le budget a donc été abondé, en cours d'exercice, de 153,8 millions d'euros, par deux décrets d'avance de respectivement 56 millions d'euros en octobre 2014 et 54 millions d'euros en décembre 2014, ainsi que par la loi de finances rectificative de fin d'année pour 43,8 millions d'euros.
Ce dépassement s'explique essentiellement par l'hébergement d'urgence, poste budgétaire particulièrement sollicité ayant engendré une dépense de 475,2 millions d'euros en crédits de paiement en 2014, correspondant à un écart de 48 %, soit plus de de 153 millions d'euros, par rapport à la prévision initiale et une hausse d'environ 16 % par rapport à la dépense constatée en 2013.
Entre 2011 et 2014, la dépense liée à l'hébergement d'urgence « généraliste », qui se distingue de l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile financé par le programme 303, a augmenté de plus de 70 % !
En outre, on assiste à une sous-budgétisation récurrente de la ligne budgétaire, avec une prévision initiale largement inférieure à la dépense enregistrée l'année précédente et souvent tout juste équivalente à celle de l'année n-2.
Compte tenu de ces constats, quelles sont les hypothèses sur lesquelles repose la détermination de l'enveloppe budgétaire pour la loi de finances initiale ? Comment la prévision de la dépense a-t-elle été élaborée pour 2014 ? Des évolutions sont-elles prévues afin d'éviter cette sous-budgétisation systématique pour les prochains exercices, sachant qu'en 2015, j'ai déjà mis en évidence dans mon rapport spécial le fait que le programme 177 serait une nouvelle fois, à n'en pas douter, en surexécution, en raison des dépenses d'hébergement d'urgence et de veille sociale ?
Ensuite, malgré l'augmentation indéniable du nombre de places d'hébergement d'urgence, celui des places d'hôtel explose, avec notamment une hausse de 18 % en six mois entre le 31 décembre 2013 et le 30 juin 2014. Le niveau des dépenses est lui-même très élevé puisque les nuitées d'hôtel représentent 45 % des dépenses liées à l'hébergement d'urgence hors places d'urgence en centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) et une augmentation de 33 % par rapport à 2013. Le développement du recours aux nuitées d'hôtel, dernière solution, s'expliquerait principalement par la hausse des demandeurs d'asile, qu'ils aient ou non été déboutés, ainsi que par le nombre croissant de famille avec enfants devant être hébergées. Confirmez-vous cette analyse ? Savez-vous quelle est la proportion de familles avec enfants parmi les personnes ayant demandé un hébergement d'urgence au cours de l'année et parmi les populations hébergées ? De même, êtes-vous capable de mesurer l'impact de l'augmentation du nombre de demandeurs d'asile ou, plus largement, des étrangers ayant des « titres de séjour incomplets » ?
Pour une meilleure appréhension de la dépense et améliorer la mesure de la performance du programme 177, où en sont les travaux annoncés afin d'améliorer votre connaissance du nombre de demandes d'hébergement d'urgence ainsi que la nature des réponses qui y ont été apportées, à partir d'un système d'information unique et plus efficace pour tous les services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) ?
Enfin, les difficultés de financement rencontrées en cours d'année, en raison notamment de la sous-budgétisation, ont-elles eu un impact au niveau local sur la gestion des centres d'hébergement d'urgence ? Les gestionnaires ont-ils rencontré des difficultés pour mener à bien leurs missions comme cela a pu être le cas par le passé ?
Les chiffres de l'exécution pour 2014 ont effectivement été présentés avec précision par le rapporteur spécial, avec une surexécution qui caractérise le programme 177 cette année comme les précédentes. Les hypothèses avancées pour expliquer cette situation sont également exacts, la progression de la dépense liée à l'hébergement d'urgence étant très importante. Quelques années auparavant, les CHRS représentaient plus des deux tiers de la dépense, cette part relative n'a cessé de diminuer depuis.
Le principal déterminant de la dépense du programme est constitué par le parc d'hébergement qui inclut à la fois les CHRS, les centres d'hébergement et, comme vous l'avez souligné, le recours à des nuitées d'hôtel. Les autres types de dépenses sont plus modestes, à l'instar de la veille sociale, l'accompagnement vers et dans le logement et les dispositifs de logement adapté.
L'évaluation du budget de l'année n se fonde principalement, au cours de l'année n-1, sur le nombre de places d'hébergement existant, à partir de l'enquête menée semestriellement permettant de mesurer l'évolution du parc ainsi que par le suivi de la mise en oeuvre du plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale dans le cadre desquels des crédits ont été accordés pour créer de nouvelles places d'hébergement d'urgence. En 2014, le rebasage des crédits visait ainsi à créer ou pérenniser 3 600 places supplémentaires, soit 500 places déjà prévues dans la programmation triennale et 3 100 places résultant du plan pluriannuel précité. Le budget initial prévoyait également la pérennisation de 1 400 places passées de places subventionnées à des places autorisées au sens de l'article du code de l'action sociale et des familles. Ce changement de statut ne change en rien les modalités d'accueil ou d'accompagnement des publics concernés mais permet aux opérateurs de disposer d'une visibilité pluriannuelle de leur parc puisque ces places sont autorisées pour quinze ans et financées par douzième dans le cadre d'une tarification annuelle. Au contraire, les associations subventionnées critiquent parfois les retards de conventionnement et les difficultés rencontrées pour obtenir les paiements correspondant aux engagements souscrits avec l'État. Le recours à ces places autorisées peut également permettre une meilleure régulation, en créant des parcs d'hébergement plus grands, garantir une évaluation de la qualité de l'accompagnement puisqu'elles sont soumises à l'obligation d'évaluation préalable lors du renouvellement de l'autorisation et s'inscrire dans une trajectoire pluriannuelle en intégrant des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens.
La dépense du programme 177 se caractérise également par une très grande maîtrise des coûts. Alors que le nombre de places n'a cessé d'augmenter au cours des cinq dernières années, le coût unitaire a, quant à lui, baissé. La contractualisation opérée avec les CHRS a notamment permis une convergence de ces coûts. L'enquête nationale des coûts, qui est désormais annuelle, permet de suivre cette tendance et d'objectiver les différences de coûts entre les structures.
Les nuitées hôtelières constituent une solution à la fois souple, en permettant d'accueillir dans l'urgence des personnes dont la situation le justifie, et économique puisqu'elles constituent le mode d'hébergement le moins onéreux. En revanche, elles ne sont pas adaptées socialement car elles ne permettent pas de développer un confort et un accompagnement satisfaisant, d'autant que ces places d'hôtel sont majoritairement occupées par des familles avec enfants. C'est la raison pour laquelle la ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité a engagé un plan de réduction des nuitées hôtelières pour la période 2015-2017. Pour les familles avec enfants, il est prévu de développer en particulier l'intermédiation locative et les pensions de famille, plus adaptées à leur situation.
En Seine Saint Denis, une solution, soi-disant plus économique, a été trouvée, en mettant à disposition de familles hébergées par la Croix Rouge, des appartements de deux pièces pour 2 000 euros par mois ! Comment est-ce possible ? Pour la femme avec ses cinq enfants que j'ai rencontrée, en tenant compte du versement des aides personnelles au logement auxquelles elle pouvait prétendre, d'une allocation de l'aide sociale à l'enfance et de ses revenus. Lorsque j'ai appelé les services du département pour leur signaler cette situation, il m'a été répondu que cette solution était mieux pour les familles, ce que je ne peux contester, et moins onéreuse que l'hôtel ! Le département a finalement arrêté de procéder ainsi mais désormais c'est la Croix-Rouge du Val-de-Marne qui installe des familles en Seine-Saint-Denis, et dans les mêmes conditions... Je suis sidéré... On contribue ainsi à enrichir les propriétaires de ces logements alors que l'argent public manque ! Comment développer des dispositifs d'intermédiation locative efficaces ?
Les dispositifs que vous mentionnez ne sont pas financés par des crédits du programme 177 et résultent du cumul d'un certain nombre d'aides sociales comme les aides personnelles au logement.
S'agissant de l'intermédiation locative, elle est en cours de développement. Le coût annuel d'un tel dispositif se situe à environ 3 000 euros, contre 8 000 euros pour une prise en charge en CHRS.
Elle se développe, pour le moment, prioritairement en Île-de-France. Les places proposées dans ce cadre, bien que significatives, restent inférieures à celles proposées par d'autres dispositifs d'hébergement. Les dernières données de décembre 2014 montrent qu'il existe 32 000 places d'hébergement en hôtel, 30 000 places d'hébergement hors CHRS, 40 600 places d'hébergement en CHRS et 21 000 places en intermédiation locative.
Ces dispositifs ont du sens pour orienter plus rapidement certaines personnes vers le logement ordinaire, afin d'éviter le passage par l'hébergement d'urgence ou les CHRS, ou pour permettre une transition en cas de sortie du dispositif d'urgence. Ils sont pertinents et doivent être soutenus. Toutefois, nous sommes évidemment très attentifs au coût qu'ils représentent.
Ne soyez pas défaitiste de bon matin mon cher collègue ! Je donne la parole à Roger Karoutchi, rapporteur spécial de la mission « Immigration, asile et intégration ».
Nous sommes désespérés, pas défaitistes !
J'aimerais faire trois remarques.
Tout d'abord, sur le plan budgétaire et sur l'exécution du programme 303, nous dénonçons depuis des années la sous-budgétisation des crédits prévus, et pourtant celle-ci continue. L'hébergement d'urgence représente annuellement une dépense d'environ 140 à 150 millions d'euros. Or le Gouvernement continue d'inscrire 110 millions d'euros en loi de finances. Comme cette pratique existe par ailleurs sur d'autres postes de dépense de l'asile, comme par exemple l'allocation temporaire d'attente, il y a une sous-évaluation systématique du coût réel du droit d'asile !
Pourquoi, alors que l'on fait le constat année après année de ce que coûtent réellement ces dispositifs, inscrit-on l'année suivante 40 % de moins que ce qui a été dépensé précédemment, alors même que l'on sait que la dépense ne va pas baisser ?
Deuxièmement, on ne comprend pas bien comment la dépense est suivie. Des instructions sont-elles données aux préfets en cours d'exécution ? Par exemple, lorsque l'on s'aperçoit, dès le mois d'avril, que 40 % des crédits prévus ont déjà été consommés dans un département, que se passe-t-il ?
Ma troisième remarque porte sur la concentration géographique. Il existe à Paris des dizaines d'hôtels insalubres, qui devraient être fermés, mais qui ne vivent que parce que l'on y loge d'office des demandeurs d'asile. J'entends dire que certaines mairies d'arrondissement demandent la création de centres d'accueil dans Paris, mais 87 % des demandeurs d'asile hébergés à l'hôtel le sont déjà en Île-de-France ! Où en est-on du soi-disant rééquilibrage territorial que le Gouvernement a annoncé ?
Les nuitées hôtelières devaient être exceptionnelles, pour des cas d'urgence absolue, mais elles deviennent la règle. Elles coûtent plus de 200 millions d'euros par an. D'année en année le système dérape, mais on persiste dans la même voie. Il ne reste que la prière...
Je commencerai par expliquer rapidement le schéma d'ensemble de l'accueil des demandeurs d'asile en France. Il existe deux types de structures d'accueil financées par le programme 303 : les centres d'accueil de demandeurs d'asile (CADA) et l'hébergement d'urgence dédié aux demandeurs d'asile. Il existe 25 000 places en CADA, et il y en aura 29 000 à la fin de cette année puisque nous sommes en train de créer 4 000 places supplémentaires, et 25 000 places d'hébergement d'urgence.
L'hébergement d'urgence pour les demandeurs d'asile avait initialement vocation à être résiduel et était destiné aux demandeurs d'asiles placés dans une procédure juridique particulière, appelée « procédure prioritaire », devant conduire à un traitement rapide de leur demande d'asile. Mais du fait de l'explosion de la demande d'asile ces dix dernières années, ce qui était résiduel a tendu à devenir un complément aux CADA, de sorte qu'aujourd'hui l'hébergement d'urgence représente le même nombre de places que les CADA.
Le poste budgétaire associé à cet hébergement a augmenté sans que nous l'anticipions et sans que nous ayons mis en place les mécanismes permettant de prévoir et de réguler la dépense. Cela se traduit par une sous-évaluation systématique, en loi de finances, des dépenses dédiées à l'asile. Ainsi, en 2014, 115 millions d'euros de crédits étaient prévus ; or, en exécution, ce sont 142 millions d'euros qui ont été dépensés. L'écart a dû être comblé par des abondements en cours d'année.
Nous essayons de réduire ce problème par plusieurs moyens. Le Gouvernement s'est engagé à créer davantage de places en CADA et à diminuer corrélativement le nombre de places d'hébergement d'urgence. Actuellement, dans le cadre de la programmation budgétaire triennale, l'objectif est de créer 10 000 places en CADA et de supprimer 7 500 places d'hébergement d'urgence. Nous souhaitons donc conforter les dispositifs permettant un prix de journée prévisible et un accompagnement social et juridique. Au sein de ce processus de destruction de places d'hébergement d'urgence, nous privilégions la destruction des places d'hôtel, qui sont les moins adaptées pour les demandeurs d'asile et les moins faciles à contrôler.
Ces efforts commencent à porter leurs fruits et se sont traduits par une moindre hausse de la dépense associée aux places d'hébergement d'urgence. Depuis deux ans, le nombre de demandeurs d'asile diminue, de même que le coût unitaire moyen des places d'hébergement d'urgence, ce qui a permis une baisse des dépenses d'hébergement d'urgence de 5 % de 2014.
Dans sa note d'exécution budgétaire, la Cour de comptes a soulevé la nécessité de poursuivre le conventionnement avec les structures d'accueil afin de permettre une convergence tarifaire qui soit basée sur une analyse précise des coûts. Pourquoi ce processus n'est-il pas accéléré ?
Par ailleurs, le préfet des Alpes-Maritimes a récemment indiqué la mise en place d'un diagnostic territorial associant l'État, les collectivités territoriales et les bailleurs sociaux, afin de faire un repérage des lieux potentiels d'accueil. Des dispositifs similaires semblent avoir été expérimentés dans une dizaine de départements. Quel retour d'expérience avez-vous sur ces expérimentations ?
Nous partageons les observations de la Cour des comptes sur la pertinence du conventionnement avec les structures d'accueil et d'hébergement. Il s'agit d'un des leviers d'action prioritaires pour le ministère. D'ailleurs, la contractualisation entre les opérateurs et l'État fait l'objet d'un indicateur de performance au sein du programme 177. Le conventionnement permet, d'une part, de s'assurer que la prestation d'hébergement correspond bien aux besoins des publics, qui sont divers, si l'on pense par exemple aux personnes sortant de prison, aux femmes victimes de violence, ou aux personnes ayant des difficultés psychiatriques. Il permet, d'autre part, de s'assurer que le coût de la prise en charge est calculé au plus juste.
Le taux de contractualisation suivi dans le cadre du rapport annuel de performance progresse, en s'établissant à 26 %, ce qui est bien supérieur à la cible de 16 % fixée en loi de finances initiale.
Toutefois, il est difficile de conventionner, pour deux raisons principales. D'une part, les fédérations et organismes, en particulier ceux gestionnaires de CHRS, étaient au départ réticents à conclure des conventions avec les services déconcentrés car ils estimaient que celles-ci n'étaient pas en mesure de leur offrir une visibilité pluriannuelle suffisante. Il est vrai qu'elles ne sont pas aisément conciliables avec le principe de l'annualité budgétaire. D'autre part, certains opérateurs ont ponctuellement eu, pour des questions de principe, une opposition à la signature des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens. Pour les services déconcentrés de l'État, la signature de telles conventions est une opération difficile, qui implique de s'accorder avec l'opérateur sur un constat de départ, en particulier s'agissant du service assuré et du coût de la prise en charge.
En lien avec la contractualisation, il y a la programmation de l'offre et l'analyse des besoins. Le conventionnement avec les gestionnaires permet de décliner des engagements pour satisfaire la demande et réguler l'offre. C'est le sens du diagnostic 360 dont vous avez parlé, qui permet de faire une photographie des besoins d'hébergement et de logement d'un département et des hébergements disponibles. Ce diagnostic est réalisé en concertation avec l'ensemble des acteurs, y compris les services de la cohésion sociale et les services du logement, afin d'orienter les personnes vers le logement ordinaire chaque fois que cela est possible. Dès 2014, le « diagnostic 360 » a été mis en place dans six départements pilotes et permet de mieux réguler le dispositif et de mieux coordonner les acteurs. Nous faisons actuellement une première consolidation de ces diagnostics à l'échelle régionale et nous aurons normalement une vision complète à l'échelle nationale à la fin de cette année.
Comme cela a été déjà dit, je suis moi aussi frappé par l'écart, année après année, entre la prévision budgétaire et la consommation effectivement constatée. 100 millions d'euros sont ainsi ajoutés environ tous les trois à quatre ans ; j'espère que, cette année, une actualisation de ce type sera opérée et que les crédits prévus correspondront au moins au montant de la dépense constatée en 2014.
Je ne suis pas d'accord avec Virginie Magnant pour dire que les places en hôtel sont une solution économique et adaptée. En tout cas, ce n'est pas une solution sociale, puisqu'il n'y a pas d'accompagnement adéquat.
L'an passé, lors des auditions, il nous avait été dit que la situation devrait s'améliorer grâce à plusieurs outils qui se mettaient en place et qui devaient permettre de mieux planifier : l'étude nationale de coûts, qu'on attend avec impatience ; les diagnostics territoriaux à 360 degrés, sur lesquels j'ai quelques réserves étant donné le nombre des acteurs autour de la table et leur renouvellement à la faveur des élections en 2014 et 2015 ; enfin, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (loi ALUR) qui consacre juridiquement les services intégrés d'accueil et d'orientation. Va-t-on vraiment, grâce à ces outils, mieux planifier et mieux budgéter ?
Comme je l'ai indiqué précédemment, nous nous basons sur l'analyse et le suivi du parc d'hébergement. Celui-ci est en progression et le point de fuite est constitué par les nuitées d'hôtel et l'hébergement d'urgence. Je ne crois pas avoir dit que les nuitées d'hôtel étaient une solution adaptée, mais budgétairement c'est une solution de prise en charge apparemment économe. Elles ont pu sembler adaptées à un moment donné, de façon résiduelle, alors que le parc généraliste avait été constitué principalement pour l'accueil collectif d'hommes isolés. Ces places d'hébergement d'urgence ne sont donc pas adaptées pour la mise à l'abri de familles avec enfants. C'est la raison pour laquelle le recours à l'hôtel a pu être développé, lequel n'est toutefois pas adapté lorsque ce mode d'hébergement se prolonge. D'autres solutions doivent être trouvées et c'est le sens du plan de réduction des nuitées hôtelières.
S'agissant du programme 177, le sens de notre effort pour le projet de loi de finances pour 2016 est effectivement de parvenir à une budgétisation plus proche du niveau d'exécution.
Concernant les outils de pilotage, l'étude nationale de coûts a bien été réalisée ; nous pourrons vous en adresser les conclusions, qui permettront d'opérer une tarification plus adéquate des structures. Nous mettons la dernière main au décret sur les SIAO, pour définir leurs missions et faire converger les structures existantes dans des structures uniques lorsque ce n'est pas déjà le cas. Ces instruments ne vont certainement pas concourir à une meilleure prévision budgétaire, mais ils doivent favoriser une meilleure régulation entre l'offre et la demande pour diriger les personnes concernées vers les structures les plus adaptées, avec un accompagnement adéquat.
Le programme est marqué par l'accueil inconditionnel et la continuité de prise en charge, ce qui est le principal obstacle à une maîtrise de la dépense ; mais le SIAO permettra une régulation efficace, en assurant que le meilleur service soit rendu au plus juste coût.
Quel est le coût moyen par jour en CADA et en centre d'hébergement ? Quelle est la taille moyenne des familles hébergées ? Les familles peuvent-elles percevoir les allocations familiales, même lorsque les enfants sont pris en charge par les collectivités ? Roger Karoutchi a parlé de la répartition géographique : est-ce prévu, comme cela a été le cas pour les mineurs isolés étrangers (MIE), dont le nombre a considérablement augmenté ? Je rappelle que le coût mensuel d'un MIE est de 7 000 euros. Enfin, il a été décidé il y a quelques années que les femmes avec des enfants de moins de trois ans seraient prises en charge par les départements dans les maisons de l'enfance : a-t-on l'intention de continuer à faire supporter cette charge croissante par les départements ?
Je peux répondre pour ce qui concerne l'hébergement des demandeurs d'asile. Le coût journalier est de 24 euros dans les CADA et de 16 euros en hébergement d'urgence. Le différentiel est lié à l'accompagnement qui existe en CADA, et à l'allocation versée, qui est incluse dans le prix de journée des CADA.
Les familles hébergées dans les structures d'hébergement pour les demandeurs d'asile n'ont pas droit aux allocations familiales ni à aucune prestation sociale, à l'exception de la couverture maladie universelle.
S'agissant de la répartition géographique, la demande d'asile est fortement concentrée aujourd'hui en Île-de-France et en Rhône-Alpes. Nous avons augmenté le nombre de places d'hébergement dans les autres régions ; par ailleurs, la loi sur l'asile en cours de discussion au Parlement prévoit un système d'hébergement directif qui permettra de mieux orienter sur l'ensemble du territoire les demandeurs d'asile.
S'agissant des MIE, la politique mise en place vise à une répartition des mineurs sur l'ensemble du territoire pour que la charge qu'ils représentent ne pèse pas seulement sur les services d'aide sociale à l'enfance de quelques départements.
La commission des finances s'est saisie pour avis du projet de loi actualisant la programmation militaire pour les années 2015 à 2019 et portant diverses dispositions concernant la défense. Ce projet de loi vise à procéder à l'actualisation de la loi de programmation militaire (LPM) 2014-2019 du 18 décembre 2013. Le rapport pour avis que je vous présente porte essentiellement sur les cinq premiers articles, y compris le rapport annexé à l'article premier, car ce sont ceux qui concernent la programmation financière et la trajectoire des ressources humaines.
Les éléments essentiels de cette actualisation ont été annoncés par le Président de la République à la suite du conseil de défense du 29 avril dernier.
Il s'agit notamment de tenir compte de l'évolution de la situation internationale et de la menace terroriste sur notre territoire.
L'actualisation permet également de tirer les conséquences, sur le plan programmatique, de la réalité du calendrier de cession de la bande des fréquences « 700 MHz » et de l'abandon des sociétés de projet.
Concrètement, ce projet de loi d'actualisation comporte, sur le plan de la programmation financière et de l'évolution des effectifs, trois décisions d'importance majeure.
Premièrement, les recettes exceptionnelles (REX) prévues par la LPM pour la période 2015-2019 sont, dans une très large mesure, remplacées par des crédits budgétaires : ce sont plus de 5 milliards d'euros de recettes exceptionnelles qui seront remplacés par des crédits budgétaires.
Le projet de loi répond ainsi à la principale objection qui nous avait conduits à ne pas adopter le budget de la défense pour 2015 : celui-ci prévoyait 2,2 milliards d'euros de recettes de cession de fréquences dont on savait qu'ils ne seraient pas perçus en 2015.
On peut regretter que cette question n'ait pas été tranchée plus tôt malgré les signaux d'alarme qui ont été tirés, notamment par notre commission, et que le Gouvernement se soit entêté à mettre en oeuvre un « plan B » consistant en la fameuse opération de cession-relocation de matériel militaire à travers des sociétés de projet.
Comme notre rapporteur général, j'ai d'ailleurs posé au ministre de la défense la question, pour l'instant sans réponse, du coût de cette obstination : quel est le montant des frais d'avocats et autres conseils qui ont été engagés pour étudier la faisabilité de ce projet, alors qu'un rapport réalisé par l'inspection générale des finances (IGF), le contrôle général des armées (CGA) et la direction générale de l'armement (DGA) - fort opportunément classifié confidentiel-défense - indiquait dès juillet 2014 que la vente des fréquences ne serait pas au rendez-vous et émettait de fortes réserves sur les sociétés de projet ? Je vous proposerai d'ailleurs un amendement visant à permettre aux commissions parlementaires de demander la déclassification d'informations secrètes.
Toujours est-il que la raison a finalement prévalu : les REX, rebaptisées « recettes de cession », ne s'élèvent plus qu'à 930 millions d'euros au total de 2015 à 2019 et ne sont plus composées que de cessions immobilières, pour 630 millions d'euros, et de cession de matériels militaires, pour le solde.
Deuxièmement, le présent projet de loi prévoit d'augmenter les ressources totales du ministère de la défense pour la période allant de 2016 à 2019. Ce sont ainsi 3,8 milliards de crédits budgétaires supplémentaires qui seront répartis sur ces quatre années, dont 2,5 milliards d'euros après 2017.
Enfin, 18 750 équivalents temps plein (ETP) seront maintenus sur les 33 675 suppressions initialement prévues dans la LPM, ce qui permettra une redéfinition du contrat opérationnel des forces terrestres. Celles-ci devront être capables de déployer 7 000 hommes durant une année sur le territoire national, avec la possibilité de monter jusqu'à 10 000 hommes pendant un mois. En conséquence, le format de la force opérationnelle terrestre (FOT) sera porté de 66 000 hommes à 77 000 hommes.
La réduction nette des effectifs du ministère de la défense s'élèvera à 6 918 ETP sur la période 2015-2019.
Le coût de cette moindre déflation des effectifs représente 2,8 milliards d'euros sur les 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires dont bénéficie la défense.
Le milliard d'euros restant sera affecté pour moitié à l'entretien programmé des matériels (EPM) et pour l'autre moitié aux programmes d'équipement majeurs. Les programmes d'armement bénéficieront également du redéploiement de 1 milliard d'euros de crédits, grâce la baisse du coût des facteurs et des indices économiques sur lesquels se basent les clauses d'indexation des contrats d'armement passés par le ministère.
Le risque aurait été que le constat de gains de pouvoirs d'achat du ministère de la défense conduise à des annulations de crédits. Le projet de loi prévoit au contraire que ces gains sont conservés par le ministère et consacrés à des dépenses d'équipement.
Vous le voyez, le projet de loi d'actualisation de la LPM va de mon point de vue dans le bon sens, celui d'un renforcement et d'une sécurisation des moyens de la défense, ce que nous avions réclamé lors de l'examen de la loi de finances pour 2015.
Il remédie aux principaux reproches que l'on pouvait adresser à la LPM et au budget 2015. Lors de l'examen de ce budget par notre commission puis par le Sénat, je l'avais qualifié d'insincère. Cela m'avait d'ailleurs valu quelques reproches. Pour autant, tout le monde savait que les recettes prévues ne seraient pas au rendez-vous. Je suis au regret de dire que les décisions annoncées par le Président de la République et ce projet de loi ne font que conforter cette analyse.
Notre vote représentait un appel solennel adressé au Président de la République et au Gouvernement et je me réjouis qu'il ait été entendu.
Pour autant, ce projet de loi n'est pas parfait et il nous faudra maintenir notre vigilance pour que la défense bénéficie effectivement des ressources prévues dans le cadre de cette programmation actualisée.
C'est d'ailleurs le sens de trois amendements que je vous proposerai, visant à mieux sanctuariser les crédits de la défense.
Le premier porte sur les opérations extérieures (OPEX). Le projet de loi prévoit de maintenir la provision OPEX à 450 millions d'euros. C'est évidemment très en-dessous du coût prévisible des OPEX pour les années à venir. En 2014, leur coût a représenté 1,12 milliard d'euros, soit un dépassement de 650 millions d'euros. Le principe d'un financement interministériel demeure, mais dans la mesure où ce financement s'effectue dans le cadre de la solidarité interministérielle, le ministère de la défense y contribue largement : 400 millions d'euros en 2014, dont près de 120 millions d'euros pour les seules OPEX. Je constate pour le regretter que toutes les missions ne contribuent pas à ce financement interministériel. Le manque à gagner pour la défense s'élève à 79 millions d'euros selon la Cour des comptes et à 54 millions d'euros selon un mode de calcul plus favorable. Ce point n'a pas été contesté par le ministre de la défense lors de son audition.
On aboutit à un mécanisme qui rogne les moyens de nos armées lorsque celles-ci sont engagées sur des théâtres extérieurs.
Cela est d'autant plus dommageable que s'ajoute désormais le coût des opérations intérieures - et en particulier celui de la fameuse opération Sentinelle - qui pèsent entièrement sur la mission « Défense ».
Je rappelle que le ministère de la défense est également en auto-assurance pour les surcoûts liés aux dysfonctionnements du système de paie Louvois.
C'est pourquoi je vous présenterai tout à l'heure un amendement visant à ce que le ministère de la défense ne contribue pas au financement du dépassement de la provision OPEX.
Les deux autres amendements visent les cessions immobilières.
Il s'agit, tout d'abord, de rétablir la clause de sauvegarde prévue par l'actuelle LPM et supprimée par le projet de loi et, ensuite, de parer au risque présenté par la loi « Duflot ». La plus grande part des recettes viendra de la cession des emprises parisiennes. Si la décote « Duflot » s'applique, les recettes prévues ne seront pas aux rendez-vous.
Au-delà de ces amendements, je voudrai appeler l'attention de notre commission sur deux points qui méritent une vigilance particulière.
Premièrement, l'entretien des matériels : les équipements de nos forces engagées en opération extérieure s'usent de manière accélérée, notamment dans la bande sahélo-saharienne en raison de conditions d'usage extrêmement abrasives. Un effort important doit être fait pour leur régénération. Sinon les forces armées ne pourront maintenir leur niveau d'engagement actuel. Le présent projet de loi y affecte 500 millions d'euros supplémentaires, alors que les besoins sont chiffrés à plus de 800 millions d'euros par l'État-major des armées.
Il conviendra de suivre cette question avec attention, car l'usure des matériels ne se voit pas sur le plan budgétaire tant que les réparations ne sont pas effectuées, mais représente bien une consommation des ressources de l'État. Indolore sur le coup pour le budget de l'État, cette usure constitue en réalité un passif qui s'accumule, et donc une dépense différée, car il faudra bien reconstituer ces ressources matérielles si l'on souhaite maintenir les capacités opérationnelles de nos troupes.
Le second point de vigilance concerne les ressources dégagées par redéploiement des crédits, soit un milliard d'euros. Elles reposent sur l'hypothèse que les indices économiques (taux de change, inflation, etc.) se maintiendront à un niveau bas durant le reste de la période de programmation. Il faudra surveiller leur évolution réelle et en tirer éventuellement les conséquences le moment venu.
Pour finir, je vous rappelle que la LPM n'a qu'une valeur programmatique, les décisions normatives dans le domaine budgétaire relevant exclusivement des lois de finances, et que ces dispositions devront donc être traduites concrètement au moment des discussions budgétaires à venir.
Malgré ces réserves et sous le bénéfice des amendements que je vais vous présenter, je vous propose de donner un avis favorable au projet de loi, notamment pour ce qui concerne les articles 1er, 2, 3, 4 et 4 bis qui ont trait à la programmation financière et la trajectoire des ressources humaines.
J'ai écouté avec intérêt notre rapporteur et j'ai noté le changement considérable de tonalité de son discours, entre aujourd'hui et le débat en loi de finances initiale. Vous avez souligné la difficulté que nous avions tous relevée alors, qui concernait les recettes issues de la vente des fréquences. Nous avions, les uns et les autres, des interrogations sur ce sujet. Le ministre a lui-même évoqué cette question et nous a répondu en déclarant que, quoi qu'il arrive, le budget de la défense serait conforme au vote de la loi de finances. On en a la confirmation aujourd'hui. Les engagements annoncés sont donc tenus.
Je voudrais à cette occasion revenir sur la passe d'armes qui nous avait opposés au cours du débat budgétaire, quand les présidents du Sénat et de la commission des affaires étrangères et de la défense ont écrit conjointement au Président de la République pour l'interroger sur les recettes exceptionnelles du budget de la défense. Celui-ci avait immédiatement répondu à ce courrier, en leur garantissant qu'en tout état de cause, les recettes seraient au rendez-vous, et que le budget de la défense serait tenu. Je pense que cette réponse constituait un engagement majeur. Encore une fois, on en a aujourd'hui la confirmation avec la révision de la loi de programmation militaire qui nous est soumise.
En tant que sénateur nouvellement élu, j'avais été particulièrement choqué que la parole du Président de la République donnée au président du Sénat n'entraîne pas le vote des crédits de la mission « Défense » par la majorité sénatoriale. Ce refus de voter les crédits, sur la base d'une remise en cause de la parole présidentielle, constituait une position très grave, ce que vous aviez d'ailleurs souligné en rappelant que c'était la première fois qu'il n'y avait pas de consensus républicain sur ce budget.
Le projet de loi que nous examinons ce matin constitue une réponse en actes des engagements annoncés en loi de finances. Cela souligne la maladresse qui a été la vôtre en refusant de voter le budget de la défense. D'ailleurs, en préconisant aujourd'hui un avis favorable à l'adoption de ce projet de loi d'actualisation de la loi de programmation militaire, vous confirmez d'une certaine façon que nous avions raison et que la position que vous aviez adoptée alors était purement politicienne.
Pour ma part, je vais poser une question. Je croyais que le ministère de la défense était mis à contribution dans le cadre du plan d'économies annoncé par le Gouvernement. J'aimerais connaître l'impact des dispositions qui nous sont proposées aujourd'hui sur ce plan d'économies. En effet, on y limite la réduction des effectifs de façon conséquente. À chaque fois que l'on nous a proposé des plans de réduction des effectifs de l'État, la variable était le ministère de la défense. À partir du moment où celle-ci n'est plus utilisée, quels sont les leviers de réduction des dépenses, et avec quel impact ?
En outre, je constate à l'article 2 du projet de loi une hausse sensible des ressources prévues à l'horizon 2019. Certes, ce type d'évolution consistant à augmenter les recettes en fin de période dans le cadre d'une loi pluriannuelle est assez classique. Pour autant, pourriez-vous nous expliquer pourquoi l'on passera de 32,77 milliards d'euros en 2018 à 34,02 milliards d'euros en 2019 ? Quels facteurs expliquent une croissance aussi dynamique des ressources ?
Je ne partage pas tout à fait la posture de Claude Raynal. En effet, au moment de l'identification des missions prioritaires destinées à recevoir des moyens supplémentaires et des missions appelées à faire davantage d'efforts, la situation du ministère de la défense a été mal évaluée, et son budget mal calibré. J'estime donc que l'attitude de la majorité sénatoriale a permis d'appeler l'attention du Gouvernement et de « rectifier le tir ».
Ma question porte sur l'évolution de la masse salariale, en lien avec les annonces de la ministre de la décentralisation et de la fonction publique relatives à l'évolution de la rémunération des fonctionnaires, qui ne manqueront pas d'avoir des conséquences sur le budget de nos collectivités territoriales et des hôpitaux. Je souhaiterais savoir quelles ont été les hypothèses d'évolution des salaires prises dans la loi de programmation militaire, et si les mesures annoncées sont compatibles avec les hypothèses prévues dans le cadre de cette LPM.
La France prend une part très active dans la lutte contre le terrorisme et les groupes extrémistes à travers le monde. Elle est même probablement l'un des seuls pays européens à être aussi engagée sur le terrain. Les engagements extérieurs de l'Europe au sol reposent exclusivement sur notre pays. Cela implique des dépenses et nécessite énormément de moyens.
Cette situation n'est pas sans conséquences sur nos finances publiques, alors que nous nous sommes engagés dans une démarche d'assainissement budgétaire, en suivant d'ailleurs les injonctions européennes. Dès lors, peut-on évaluer précisément, d'un point de vue budgétaire, ce que représente l'engagement de la France dans les opérations extérieures ? Compte tenu du contexte, cet engagement budgétaire est-il pris en compte par l'Europe s'agissant de l'effort de maîtrise de nos dépenses publiques ?
Je salue le travail effectué par notre rapporteur en loi de finances, et sa clairvoyance. Je crois qu'il est important de savoir alerter quand il y a des doutes sur la sincérité des inscriptions budgétaires, ce qui peut parfois aller jusqu'à refuser de voter des crédits.
Pour autant, lorsque des correctifs sont apportés et qu'ils vont dans le bon sens, comme on a pu le constater la semaine dernière avec l'audition du ministre de la défense, il faut savoir se réunir pour plaider en faveur d'un niveau de crédits réellement consommables supérieur à ce qui était prévu jusqu'ici. Il me semble également que ce qu'a exposé le rapporteur est de nature à sécuriser les options pour l'avenir, en introduisant un certain nombre de cliquets qui me paraissent très utiles - on le verra dans la discussion des amendements.
Il me semble que le ministre nous a parlé la semaine dernière de la disparition des ressources exceptionnelles, mais je constate que le projet de loi les mentionne, pour un montant de 930 millions d'euros. N'y-a-t-il pas là une contradiction entre ce qui nous a été indiqué par le ministre et ce projet de loi ?
Pour ma part, je souhaiterais insister sur la question des recettes immobilières, comme je l'ai fait devant le ministre. Je rappelle que le ministère de la défense bénéficie d'une exception, dans la mesure où les recettes de cession issues de son patrimoine immobilier lui sont reversées et n'abondent donc pas le budget général. C'est une composante essentielle du budget des armées. Le ministère mène actuellement d'importantes opérations de restructurations dans Paris, avec Balard notamment, dont l'équilibre budgétaire repose en partie sur de telles cessions immobilières. Il fut question pendant un temps de céder l'hôtel de la Marine place de la Concorde, un des rares bâtiments qui n'a jamais été privé en tant que garde-meuble royal, mais ce n'est plus le cas. Il n'y a donc plus de produit de cession à en attendre.
L'Îlot Saint-Germain, énorme bâtiment situé au coeur du 7ème arrondissement de Paris, d'une valeur de cession très élevée, doit notamment alimenter le budget de la défense et contribuer à assurer l'équilibre d'autres opérations immobilières. Dès lors, comment s'assurer que ces recettes iront bien au ministère de la défense et que d'autres finalités, telles que la construction de logements sociaux avec les décrets « Duflot », n'induiront pas un prélèvement sur ces ressources ? Cela remettrait en cause l'équilibre des opérations précitées. Comment garantir concrètement, à travers la LPM, que les recettes exceptionnelles immobilières abonderont bel et bien le budget de la défense, car c'est un élément d'équilibre essentiel de son budget ? Je crois que le rapporteur va nous présenter un amendement sur ce sujet.
Je remercie Claude Raynal d'avoir remarqué le changement du ton de mon rapport sur l'actualisation de la LPM par rapport au projet de loi de finances pour 2015, mais vous noterez également que le ton du projet de loi lui-même a changé !
Je souhaiterais formuler deux observations : notre interpellation a peut-être contribué au changement de position du Gouvernement et je crois que le débat parlementaire, de ce point de vue, est utile. Le Sénat a dit les choses clairement et, de temps en temps, le Gouvernement l'écoute. Je veux donc rendre hommage au Gouvernement, mais aussi rendre au Sénat l'hommage qui lui revient.
Jusqu'à preuve du contraire, la parole du Président de la République ne se traduit pas par des crédits.
A l'heure où je vous parle, sont toujours inscrites des recettes exceptionnelles dans le budget de la défense pour 2015 car aucune loi de finances rectificative n'est intervenue. Le projet de loi que nous examinons indique certes que le budget du ministère de la défense va augmenter grâce à des crédits budgétaires et que les recettes exceptionnelles vont être supprimées, mais aujourd'hui techniquement, juridiquement, ce n'est pas traduit dans une loi de finances.
Le Président de la République, le Premier ministre et le ministre de la défense ont pris acte du fait que ces recettes exceptionnelles ne seront pas au rendez-vous et nous promettent, à la faveur de la loi de programmation militaire, qu'elles seront transformées grâce à l'apparition de crédits budgétaires. Mais pour l'instant, il n'y a rien de tel dans la loi de finances. Je me réjouis donc de l'évolution du discours mais si vous me poussez dans mes retranchements, je vous dirais que pour l'instant, c'est bien la seule chose qui a changé !
Elle vaut peut-être de l'or mais je me souviens de la parole du Président de la République sur les collectivités territoriales : je constate qu'elle ne vaut pas grand-chose !
« Un pacte de confiance et de solidarité » ! « Garantie du niveau des dotations des collectivités territoriales à leur niveau actuel » !
En ce qui concerne les mesures d'économies et la contribution à la solidarité interministérielle - qui ne s'effectuent pas dans la plus grande transparence - j'ai noté que le budget de la défense était ponctionné dans une proportion supérieure à sa part dans le budget général. J'en conclus donc qu'il y a peut-être certains ministères qui sont moins mis à contribution que celui de la défense et j'aimerais qu'on y voie un peu plus clair sur les critères qui sont retenus.
Sur les 3,8 milliards d'euros de crédits supplémentaires, 2,8 milliards d'euros financent, à partir de 2016, la moindre baisse des effectifs. Le milliard d'euros restant est affecté pour moitié à l'entretien du matériel et pour moitié au renforcement de nos crédits de paiement pour des investissements.
L'augmentation du budget prévue en fin de période s'explique par la décision du Gouvernement de dégager des crédits de paiement pour satisfaire les commandes en cours et nouvelles. C'est du moins l'explication qui nous est donnée.
Les annonces de la ministre Marylise Lebranchu sur les salaires des agents publics n'entraînent pas de conséquences automatiques pour les militaires qui ont leurs propres grilles indiciaires. Sur les 25 articles du projet de loi, les articles 9 à 16, soit un tiers des articles, ont trait au personnel : le ministère de la défense a constaté que le dépyramidage ne fonctionne pas assez bien, d'où les incitations supplémentaires prévues par ces articles.
Le coût des OPEX s'élève à 1,120 milliard d'euros et il est intégré dans le déficit maastrichtien. Aujourd'hui, nos partenaires européens participent en nature, en apportant quelques concours ponctuels notamment en matière de transport. Je serais tenté de dire que nos opérations extérieures étant, pour la plupart, engagées dans le cadre d'un consensus européen, il ne serait pas anormal que nos partenaires européens participent, non pas au financement de nos armées, mais au moins au surcoût des OPEX qui, à un moment ou un autre, participent de leur propre sécurité.
Le terme de recettes exceptionnelles disparait et il reste 930 millions d'euros correspondant uniquement à des cessions immobilières - les biens sont identifiés - et pour le complément, à des cessions de matériel militaire. À ce stade, il existe peut-être un risque sur le calendrier de ces cessions mais pas sur la réalité et la faisabilité de celles-ci. Je vous présenterai d'ailleurs tout à l'heure un amendement qui va également dans le sens de la remarque de notre rapporteur général pour que ces recettes de cessions immobilières bénéficient bien au ministère de la défense et que leur valorisation corresponde effectivement au prix du marché - et non à des arrangements tenant compte de politiques publiques justifiées mais étrangères au budget de la défense.
EXAMEN DES AMENDEMENTS
L'amendement n° FINC-1 rétablit la clause de sauvegarde qui figure à l'article 3 de la loi de programmation militaire. C'était l'aveu de deux faiblesses : l'aveu d'une part, que l'équilibre de la loi de finances initiale reposait de façon substantielle sur les recettes exceptionnelles ; d'autre part, qu'il existait un risque que ces recettes exceptionnelles ne soient pas au rendez-vous. Aujourd'hui, si les recettes sont plus fiables et plus raisonnables, le risque sur la tenue du calendrier demeure. Cet amendement prévoit donc que si le calendrier des cessions n'est pas tenu, cette clause de sauvegarde jouerait grâce à un mécanisme d'avance permettant au ministère de la défense de ne pas être pénalisé par des retards dans les ventes.
A priori, nous n'avons pas besoin de cet amendement. Les recettes exceptionnelles seraient désormais de 930 millions d'euros, contre un niveau très élevé, de plus de 6 milliards d'euros prévus par la loi de finances initiale. Aujourd'hui, ces 930 millions d'euros correspondent, si j'ose dire, à l'épaisseur du trait budgétaire. Il me semble donc qu'il n'est pas nécessaire de prévoir cette clause de sauvegarde.
Il y a quand même de grandes incertitudes s'agissant des opérations immobilières. Lorsque j'étais au Conseil de l'immobilier de l'État, j'avais interrogé France Domaine : avec une application totale de la loi « Duflot » avec une décote qui peut atteindre jusqu'à 100 % dans la pratique, l'îlot Saint-Germain pourrait être cédé pour un euro. Cet amendement met en place une garantie nécessaire et répond à une réalité et non à un fantasme. Il est nécessaire de construire des logements sociaux, sans doute, mais eu égard aux incertitudes, cet amendement me paraît bienvenu.
Je souhaiterais apporter trois précisions. D'abord, cet amendement s'inscrit dans une logique de sanctuarisation des crédits de la défense que je croyais que nous partagions tous, ainsi que le ministre chargé de la défense.
En outre, il s'agit d'un milliard d'euros : je vous rappelle que le seul report de charges s'élève à 3,4 milliards d'euros. On ne peut pas prendre le risque d'un nouveau report de charges ; celui-ci doit rester à un niveau raisonnable, et je me permets de rappeler que 3,4 milliards d'euros correspondent à 11 % du budget hors pensions.
Enfin, l'une des recettes majeures attendues correspond à la vente de l'îlot Saint-Germain : cette vente ne se réalisera pas en trois mois ni même en un an. Il faudra également, sans doute, tenir compte du prix du marché : il ne s'agit pas de brader un bien. La mesure que je vous propose affirme notre détermination et notre volonté à tous de sanctuariser les crédits et de ne pas faire dépendre l'équilibre et les moyens de la défense du marché immobilier.
Je crois qu'il est démontré par cette loi de programmation militaire que l'on peut récupérer 5,2 milliards d'euros lorsqu'il y a un objectif partagé par tous de sanctuarisation des crédits du ministère de la défense. Si l'on a été capable de trouver 5,2 milliards d'euros, nul doute que nous parviendrons également à trouver ces 930 millions d'euros supplémentaires si nécessaire.
En réalité, il me semble que vous restez sur une position de défiance alors même que la nécessité de sanctuariser les crédits du ministère de la défense a été affirmée tant par le Président de la République que par le ministère de la défense et le ministère du budget. Nul besoin de marteler de nouveau ce message.
Pour avoir vécu des cessions de terrains militaires, le délai constitue souvent un problème : France Domaine avance une évaluation mais la vente n'est souvent réalisée que quatre ou cinq ans après. Bien valoriser un bien suppose du temps en raison des problèmes de dépollution, de sol, de voisinage ou encore de la nécessité d'obtenir des permis. Il me semble donc utile de sécuriser ce volume de cessions face aux nombreuses incertitudes.
L'amendement n° FINC-1 est adopté.
L'amendement n° FINC-2 porte sur la loi « Duflot », qui autorise la cession de l'immobilier de l'État avec une décote pouvant atteindre 100 % pour la construction de logements sociaux. Or, une telle décote, si elle s'appliquait par exemple au montant de la vente de l'Îlot Saint-Germain, fragiliserait le budget du ministère de la défense.
Nous avons déjà un dispositif plus général qui consiste à permettre les cessions à l'euro symbolique des biens immobiliers du ministère de la défense au bénéfice des collectivités territoriales les plus durement frappées par les restructurations militaires.
En la matière, deux cas de figure doivent être distingués. Les collectivités territoriales qui voient des équipements et des régiments quitter leur territoire doivent être soutenues. En revanche, dans les autres situations, les biens immobiliers du ministère de la défense ne doivent pas être cédés à vil prix.
Je suis défavorable à cet amendement. Les opérations concernées sont décisives pour assurer la contribution de l'État au développement du logement social. En conséquence, il ne semble pas opportun de retirer ces biens du patrimoine cessible dans les conditions prévues par la loi « Duflot ».
Il appartient au Gouvernement - qui souhaite à la fois développer le logement social et bénéficier de recettes immobilières pour le ministère de la défense - de juger de l'opportunité des projets. Nous ne sommes pas dans notre rôle.
Je pense que ce n'est tout simplement pas au ministère de la défense de financer le logement social.
Je pourrais presque comprendre votre position si vous aviez voté en faveur de l'amendement précédent. On ne peut pas expliquer à la fois qu'il n'y a pas besoin de garantie s'agissant de la sanctuarisation des crédits du ministère de la défense et que ce n'est pas gênant si un bien n'est pas vendu à sa valeur réelle. Je ne parviens pas à suivre votre raisonnement.
Je ne voudrais pas que vous restiez sur une incompréhension. Il s'agit simplement de séparer ce qui relève du législatif de ce qui relève de l'exécutif. En la matière, il me semble que le Gouvernement doit garder une marge de manoeuvre. Il ne nous appartient pas, en tant que législateur, de procéder à cet arbitrage.
Nous avons travaillé sur ces questions avec Philippe Dallier lorsque nous étions rapporteurs spéciaux du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
Si on applique la loi « Duflot », c'est à la collectivité d'implantation des biens - et non au Gouvernement - de demander ou non la décote. Nous avions abordé ce sujet à l'occasion d'une audition de France Domaine, qui nous avait clairement indiqué que si la collectivité entre dans le champ de la loi « Duflot » et demande l'application de la décote, elle en bénéficie de droit dès lors qu'il s'agit de construire des logements sociaux.
Il existe certainement des combats entre Bercy et certains ministères, comme nous avions pu le constater à l'occasion de la publication de la liste des logements cessibles. Compte tenu de ces différentes d'approches, je préfère avoir une clause de sauvegarde.
Pour avoir vécu un exemple concret concernant une demande de décote, je vous confirme que son obtention n'est pas de droit. Pour une opération importante, nous avions obtenu une décote qui frisait à peine les 10 %.
Votre amendement me semble problématique car vous proposez que la décote ne s'applique pas aux cessions d'immeubles domaniaux, ce qui inclut les casernes. Avec cet amendement, il ne sera donc plus possible d'obtenir de décote pour des casernes.
Un jour, en tant que rapporteur spécial des crédits de la mission « Égalité des territoires et logement », je comptabiliserai les centaines de millions d'euros dépensés pour développer le logement social dans des quartiers où le prix du mètre carré est exorbitant.
Chacun au sein de cette commission sait bien que je ne plaide pas pour que tout le logement social soit concentré en Seine-Saint-Denis mais cela ne doit pas conduire à faire des acquisitions à prix d'or dans les beaux quartiers - car c'est bien ce qui est en train de se passer à Paris - pour des raisons d'affichage politique.
Au moment où l'on se préoccupe tant de l'efficacité de la dépense publique, cela me laisse sans voix.
Je voudrais répondre Daniel Raoul. Il existe un dispositif antérieur à la loi « Duflot » qui précise que les cessions de biens immobiliers militaires peuvent se faire à l'euro symbolique en cas de restructuration. Avec cet amendement, nous souhaitons simplement revenir à ce dispositif.
En cas de fermeture de caserne ou de restructuration, la possibilité de cession à l'euro symbolique subsisterait. Sous cette condition, je suis favorable à cet amendement.
L'amendement n° FINC-2 est adopté.
L'amendement n° FINC-3 a pour objectif de prévoir que le ministère de la défense ne contribue pas au financement interministériel du dépassement de la dotation annuelle au titre des opérations extérieures.
Je suis parfaitement conscient qu'il s'agit d'une évolution importante par rapport à la situation actuelle. Je souhaite que cet amendement soit adopté pour ouvrir le débat : on ne peut pas continuer à parler de sanctuarisation du budget de la défense tout en rognant chaque année les moyens matériels et financiers de nos armées.
À ce stade, il s'agit d'un amendement d'appel, qui pourrait être retiré selon la réponse du Gouvernement.
L'amendement n° FINC-3 est adopté.
L'amendement n° FINC-4 vise à remédier aux difficultés rencontrées dans l'affaire du « rapport Charpin » sur les sociétés de projet. Avec cet amendement, nous proposons d'ouvrir aux commissions permanentes la procédure qui permet aujourd'hui aux juridictions françaises de demander la déclassification et la communication d'informations protégées au titre du secret de la défense nationale.
L'aménagement proposé fait d'ailleurs écho à un amendement adopté par le Sénat en 1998 à l'initiative de nos anciens collègues Nicolas About et Jean-Paul Amoudry, rapporteurs au nom de la commission des affaires étrangères et de la commission des lois.
Ce qui est possible pour l'institution judiciaire doit l'être également pour le Parlement. Il ne s'agit pas de créer un droit de communication mais de permettre une saisine de la commission consultative du secret de la défense nationale, qui rend des avis qui ne lient pas l'autorité administrative ayant procédé à la classification.
Lorsqu'il s'agit des droits du Parlement, je pense que nous pouvons tous nous retrouver.
L'amendement n° FINC-4 est adopté.
À l'issue de ce débat, la commission émet un avis favorable aux articles 1er, 2, 3, 4 et 4 bis, sous réserve des amendements qu'elle a adoptés. Elle autorise le rapporteur pour avis à déposer en vue de la séance publique les amendements que la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, saisie au fond, n'aurait pas intégrés à son texte.
Le moment est venu de désigner un sénateur pour siéger à compter du 15 juillet au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.
Je souhaite préciser que cette désignation est importante pour la commission des finances, qui compte au sein de la commission de surveillance deux sénateurs - un de la majorité et un de l'opposition.
Il s'agit d'un travail assez conséquent et très intéressant car il permet d'informer nos collègues de la commission des finances sur de nombreux sujets.
C'est une fonction qui doit aussi faire l'objet de l'application du « tourniquet », comme nous en avons l'habitude au sein de notre groupe politique.
Pour ma part, j'aspire à me concentrer sur les missions de contrôle budgétaire qui me sont confiées et sur mon travail au sein de la commission des affaires européennes.
Je remercie François Marc pour son action dans ce domaine pendant toutes ces années.
Puis la commission nomme M. Maurice Vincent pour siéger au sein de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations.
Nous accueillons avec grand plaisir le secrétaire d'État chargé du budget, Christian Eckert, dont le retard s'explique par le fait qu'il a dû se rendre au conseil de ministres pour traiter d'un sujet qui va sans doute nous occuper dans les mois qui viennent.
L'ordre du jour initial portait sur le projet de loi de règlement pour 2014 que nous examinerons en commission le 8 juillet, et en séance publique le 9 juillet dans l'après-midi, ainsi que la mise en oeuvre de la recommandation adressée à la France par le Conseil de l'Union européenne le 10 mars, en application de laquelle des informations supplémentaires devaient être transmise à la Commission avant le 10 juin.
Je suis persuadée que le ministre souhaitera également revenir sur le sujet d'actualité du moment ; je lui cède donc sans plus tarder la parole.
Je vous prie d'accepter mes excuses. Le conseil des ministres a commencé tardivement, le conseil de défense qui le précédait ayant duré plus longtemps que prévu ; en outre, le dossier concernant les migrants a retenu l'attention du Président de la République et du conseil des ministres. Ce n'est donc pas le sujet consacré au prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu qui est donc la seule cause de ce retard !
Traditionnellement, nous évoquons lors de cette séance la loi de règlement pour 2014 ; elle est l'occasion de parler également de 2015, voire de 2016. Nous sommes aujourd'hui dans une phase très active de la préparation de la loi de finances pour 2016 et, très souvent, les questions portent sur ces points. Je suis prêt à y répondre.
La loi de règlement est soumise à votre approbation. Vous en connaissez les grandes lignes : le 28 janvier dernier, nous avons échangé à ce sujet, ainsi que le 15 avril, lors de la présentation du programme de stabilité. C'est l'occasion de montrer que, parfois, le passé éclaire l'avenir.
Je sais que le rapport de la Cour des comptes a fait l'objet de nombreux commentaires. Je rappelle que la France est le seul État de la zone euro à présenter des comptes certifiés. C'est un gage de crédibilité et de qualité de l'information pour les finances de l'État.
Les comptes de l'État, ce sont les opérations budgétaires bien sûr, ce sont les dettes et autres passifs, mais aussi les actifs détenus par l'État, qui représentent un montant considérable. Je reviendrai le cas échéant sur la question du patrimoine immobilier et de la politique immobilière de l'État, qui fait souvent l'objet de commentaires qui méritent une réaction.
Il faut saluer l'amélioration continue de la qualité des comptes que l'on constate depuis 2006. La démarche de qualité comptable est d'ailleurs transversale dans l'ensemble des administrations publiques, aussi bien dans les hôpitaux que dans les universités, même si des progrès restent à réaliser.
J'en viens aux résultats obtenus en 2014 sur la maîtrise de la dépense de l'État. Dans le budget de l'État, les indicateurs les plus élémentaires, ceux qui structurent notre gestion budgétaire, ce sont les normes de dépenses. Or, la Cour des comptes n'a de cesse que de modifier les périmètres. Les interprétations sur ce qui entre dans la norme de dépenses peuvent être différentes : programme d'investissements d'avenir (PIA), prélèvements, etc.
Ce sont des débats qui ne datent pas d'aujourd'hui ; toujours est-il que la norme en vigueur que le Gouvernement utilise a été créée lors de la loi de finances pour 2011 - la date est importante - et exclut la charge de la dette et des pensions. Il serait donc faux de dire que la présentation que nous en faisons « surfe » sur la diminution de la charge de la dette, puisqu'elle est en est exclue.
Sur ce périmètre, la dépense passe de 280 milliards d'euros en 2013 à 276,7 milliards d'euros en 2014, soit une baisse en exécution de 3,3 milliards d'euros. On peut toujours décider de changer la norme si on le souhaite ! C'est bien sur cette base que le Gouvernement a présenté le budget.
Le déficit de l'État s'élève pour sa part à 85,6 milliards d'euros en 2014. Comme c'était prévu dès la loi de finances initiale, il augmente par rapport à 2013, du fait du lancement du PIA.
Le déficit de l'ensemble des administrations publiques, quant à lui, est évalué par l'INSEE - et non par le Gouvernement - à 4 % du PIB en 2014, contre 4,1 % en 2013. C'est son niveau le plus bas depuis 2008. Les dépenses publiques ont augmenté dans une proportion limitée de 0,9 %, hors crédit d'impôt, ce qui est le plus faible chiffre enregistré depuis des lustres - auraient dit nos prédécesseurs !
Le déficit structurel enfin, qui a fait l'objet de l'article liminaire, s'établit à 2,1 %. Cet effort, nous allons le poursuivre. La baisse continuera en 2015 et 2016.
Madame la présidente, vous faisiez allusion aux mesures déjà prises pour 2015 ; un récent décret d'annulation de près de 700 millions d'euros de crédits vous a été transmis pour information. Il vient très récemment de matérialiser les mesures complémentaires pour 2015, conformément à ce que nous avons annoncé dans la transmission du programme de stabilité que nous avons déjà évoqué ensemble.
En parallèle, nous avons engagé plusieurs dépenses nouvelles depuis le début de l'année. Un premier décret d'avance a été pris en avril dernier : des crédits supplémentaires ont été ouverts, en particulier pour soutenir la lutte contre le terrorisme, et des économies ont été dégagées sur les autres ministères pour gager ces dépenses.
Le Gouvernement a également annoncé des moyens supplémentaires en faveur de l'emploi : là encore, nous ferons les économies nécessaires pour compenser le coût de ces nouvelles mesures.
Enfin, le débat d'orientation des finances publiques, début juillet, sera la prochaine étape pour évoquer les premières orientations sur la dépense de l'État en 2016.
Vous savez, à cet égard, que certaines dépenses nouvelles seront à financer l'an prochain : nous prenons évidemment en compte ces mesures dans la construction du budget pour 2016, et elles devront s'intégrer dans la trajectoire fixée par le programme de stabilité.
Je vous remercie de votre attention.
On peut indéfiniment discuter des divergences d'appréciation avec la Cour des comptes, mais vous venez de citer le même chiffre que la Cour des comptes, celui du déficit budgétaire de l'État en 2014, soit 85,6 milliards d'euros, en augmentation d'environ 10 milliards d'euros par rapport à 2013.
Il est vrai que l'on retrouve dans ce déficit l'impact des dépenses du PIA ; cependant, la Cour des comptes affirme que si l'on neutralise celles-ci, le déficit s'est aggravé en 2014 de 5,5 milliards d'euros par rapport à 2013. Peut-on s'accorder sur ce point ?
Ma première question portera sur les risques. Il existe aujourd'hui un certain nombre de contentieux dont on parle régulièrement. Où en est-on ? Je pense au contentieux agricole avec l'Europe, au contentieux concernant la contribution sociale généralisée (CSG) pour les non-résidents. Quels en sont les montants ? Si j'ai bien compris, on attend une décision du Conseil d'État sur ce dernier point mi-juillet. À quel niveau ce risque se situe-t-il ? Il existe aussi un certain nombre d'autres contentieux. Peut-on en avoir une idée ?
Par ailleurs, la montée en puissance du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) étant moins importante que prévue, ne risque-t-on pas de connaître un report de la créance sur les années à venir ?
Une question sur la procédure de déficit excessif : vous avez adressé à la Commission le détail à propos des 4 milliards d'euros. Je vois qu'on annonce même 5 milliards d'euros. Ce détail a-t-il été porté à la connaissance des institutions européennes ? Le Parlement va-t-il en être informé ? À quel moment ?
Enfin, une communication vient d'intervenir devant le conseil des ministres à propos du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Le Gouvernement semble vouloir inscrire un certain nombre de principes dans le projet de loi de finances pour 2016. Confirmez-vous le fait que, si ce système devait être mis en place, les contribuables paieraient en 2017 sur les revenus de l'année n - 1 et, en 2018, sur les revenus de 2018 ? Il n'y aurait donc pas, pour le contribuable, d'année sans impôt ; en revanche, il y aurait bien une année blanche pour l'État. Est-il possible de clarifier ce principe ?
Cette réforme est certainement utile, mais elle est aussi complexe, notamment du fait que la France recourt à un système de barème familialisé et une imposition par foyer fiscal.
Vous m'interrogez sur les contentieux en cours ou à venir. Commençons par les contentieux passés. Vous avez fait allusion au contentieux agricole. Je suis preneur d'une réunion avec votre commission entièrement consacrée à ce sujet, sur lequel il est nécessaire d'informer le Parlement quand nous aurons un peu plus de temps.
On a parlé à ce sujet de 4 milliards d'euros de risques. C'était la position initiale de la Commission européenne. Nous sommes arrivés à un accord avec la Commission sur environ 1,1 milliard d'euros. Le paiement est étalé sur trois ans. Il s'agit d'un sujet qui part avec un « handicap » d'environ 360 millions d'euros, dont ce Gouvernement n'est en rien responsable.
Vous évoquez la question de la CSG des non-résidents et l'arrêt « de Ruyter ». Le risque est actuellement évalué à environ 500 millions d'euros. Prenez ce chiffre avec prudence, tout n'étant pas terminé. Nous attendons la décision du Conseil d'État. Nous travaillons beaucoup sur la question de la dérégularisation envisagée pour le passé, ainsi que sur l'attitude à avoir pour le présent et pour l'avenir. Nous sommes mobilisés sur ce sujet très complexe et très technique.
S'agissant du CICE, nous ne sommes pas très loin du chiffre annoncé au moment de sa mise en place - certes un peu en-dessous, mais pas très loin - puisqu'on est autour de 10,8 milliards d'euros, alors qu'une douzaine de milliards étaient prévus en termes de dépenses fiscales. Il faut en outre tenir compte du fait que les demandes de versement pour les grandes entreprises s'étalent sur les trois années à venir. Elles sont bien entendu incluses dans notre trajectoire : les créances déjà établies par les entreprises sont prises en compte dans nos prévisions budgétaires. Il n'y a donc pas de surprise à craindre de ce côté.
Votre deuxième question portait sur la déclinaison des différentes mesures que nous avons transmises à Bruxelles pour 2015. Les 4 milliards d'euros ont fait l'objet d'une communication le 10 juin à la Commission. Elles ont été matérialisées par les décrets qui vous ont été transmis. Elles sont également parfaitement documentées concernant les autres secteurs de la dépense publique.
Nous attendons l'analyse de la Commission européenne sur cette transmission, qui doit intervenir d'ici une quinzaine de jour si mes informations sont bonnes, même si c'est le ministre des finances qui se charge de ces questions.
En ce qui concerne les 5 milliards, je pense que vous évoquez ce qui est prévu pour 2016 ; nous aurons l'occasion, lors du débat d'orientation sur les finances publiques, d'en voir la déclinaison encore plus concrètement que ce que vous en connaissez déjà. Nous avions indiqué une ventilation par secteur. Nous travaillons sur ce sujet dans le cadre de la préparation de la loi de finances. Je ne sais à quelle date le débat d'orientation des finances publiques (DOFP) a lieu au Sénat.
C'est donc le même jour à l'Assemblée nationale et au Sénat. Nous le ferons avec plaisir, et avec le maximum de précisions possibles.
Troisième élément concernant la retenue à la source, qui fait l'objet de nombreux commentaires ou interrogations légitimes. C'est un débat qui agite la classe politico-fiscale depuis quarante ans et qui a donné lieu à la production de beaucoup d'ouvrages ou de rapports, comme celui du Conseil des prélèvements obligatoires (CPO). Didier Migaud s'est également livré à cet exercice en son temps. Beaucoup y ont contribué.
Le conseil des ministres de ce matin a adopté la mise en place de la retenue à la source au 1er janvier 2018. Pourquoi aussi tard ? La question n'est pas aussi simple qu'on pourrait le penser, vous le savez. Il existe quelques difficultés techniques sur lesquelles je reviendrai.
Cela change-t-il le mode de calcul de l'impôt ? Cela remet-il en cause le principe de la familialisation, le quotient familial, les crédits d'impôt ? La réponse est non ! Il s'agit d'un changement du moment où l'on prélève l'impôt, ou on le paie. Les Français sont assez allants à ce sujet. Pourquoi ?
Prenons quelqu'un qui part à la retraite ou qui son emploi : il se retrouve, l'année durant laquelle il perçoit moins, à payer l'impôt sur l'année précédente, qui a généré un impôt important. C'est là une source de difficultés, chacun peut le comprendre.
À l'inverse quelqu'un qui entre dans l'emploi ou dans la vie active pense la première année que ses revenus bruts sont égaux à ses revenus nets, s'y habitue et, l'année suivante, découvre que l'on doit payer des impôts.
On rapproche le moment où l'on paie l'impôt du moment où l'on perçoit ses revenus. Il existe déjà des moyens de le faire. Aujourd'hui, si l'on télédéclare, on connaît immédiatement, dans la majorité des cas, l'impôt qui sera notifié en septembre ou en octobre, et l'on peut adapter ses mensualités. Que constate-t-on ? Seuls un peu moins de 40 % des Français télédéclarent ! Si 60 % d'entre eux sont mensualisés, une petite minorité modifie ces mensualités. On peut le faire en ligne, en deux clics, mais très peu de personnes le font, même s'ils savent qu'ils auront moins d'impôt à payer l'année suivante. Ils se privent ainsi d'un revenu pourtant disponible immédiatement.
En outre, les contribuables qui utilisent la télédéclaration peuvent prétendre à des remboursements plus rapides que ceux qui ne télédéclarent pas. Il faut donc encourager la télédéclaration pour ces raisons-là, ainsi que la mensualisation. Ce sont des choses que nous essayerons de faire assez rapidement.
J'entends parler de cadeau, d'année blanche ou d'année à risque pour l'État, qui se priverait de recettes pendant un an. Soyons clairs sur ce point : si, par hypothèse, nous mettons en oeuvre la retenue à la source le 1er janvier 2018, cela signifie qu'en 2017, les contribuables paieront comme d'habitude leur impôt sur le revenu sur la base de leurs revenus 2016. Le 1er janvier 2018, ils paieront toujours des impôts, mais sur la base de leurs revenus perçus en 2018.
Certains nous reprochent de faire cadeau de l'année 2017. Il s'agit en fait d'une sorte de report d'une année ou de décalage à l'infini. C'est l'année de référence qui va disparaître, non l'année de paiement ! Conclusion : les contribuables paieront tous les ans leur impôt sur le revenu, et l'État encaissera tous les ans une année d'impôt sur le revenu. C'est le cas le plus simple pour les salariés dont la situation n'aurait pas changé, ou peu changé. Cela permettra une continuité parfaite.
Se poseront quelques difficultés, à propos desquelles nous vous proposons de travailler avec nous : il se peut qu'en 2017, certains décident de percevoir des revenus exceptionnels. Lesquels ? Pas les plus-values des valeurs immobilières, celles-ci faisant l'objet d'une retenue à la source calculée et perçue par les notaires sur le produit de la vente. Il peut s'agir de plus-values de valeurs mobilières, de la perception de rentes ou de produits capitalisés. Nous devrons travailler pour éviter les effets d'aubaine ou d'optimisation. Il nous faudra bien sûr élaborer des dispositifs pour éviter ce genre de difficultés.
Une autre question se pose à propos des revenus non-salariés, bénéfices industriels et commerciaux (BIC) ou revenus des professions libérales. Il faudra mettre en place un dispositif pour que nous puissions prévoir, au fil de l'eau, une modalité de paiement. Ce ne sera pas nouveau que de faire payer des acomptes, des dixièmes, des douzièmes, ni qu'une régularisation intervienne en fin d'année.
Pour maintenir les principes généraux - quotient familial, familialisation, mode de calcul de l'impôt -, chaque contribuable sera conduit à faire une déclaration annuelle, ne serait-ce que pour agréger l'ensemble des questions touchant à sa fiscalité.
L'attente est aujourd'hui très vive. J'ai d'ailleurs renoncé à un certain nombre de communications sur des chaînes de télévision ou des stations de radio pour vous rejoindre mais, si vous avez d'autres questions, je suis prêt à y répondre.
On aura un débat de fond en séance, mais j'aimerais savoir si vous avez une vue globale des reports de charge pour 2014. A-t-on la comparaison avec 2013 ?
Par ailleurs, la Cour des comptes a réalisé une évaluation des dépenses de personnel, qui augmentent de 1 %, alors qu'on nous avait annoncé qu'elles n'augmenteraient pas. Cela étant, je ne suis pas étonné : je n'y croyais pas.
Parmi les augmentations figure l'évaluation des jours de grève, qui présente un surcoût de 75 millions d'euros. De quelle base part-on pour évaluer les retenus sur les jours de grève ?
Parmi les économies proposées, pouvez-vous nous communiquer la décomposition des 670 millions d'euros, entre les mesures qui l'on peut considérer comme structurelles, qui vont avoir des effets sur plusieurs exercices, et celles qui n'ont d'effet que sur 2015 ?
Je me permets de revenir sur le prélèvement à la source. Il y a quelques semaines était apparue dans la presse l'idée d'une transition en sifflet entre le système actuel et le prélèvement à la source. Des chiffrages de 15 %, 40 %, 60 % avaient été évoqués. Cette hypothèse est-elle écartée ou est-elle encore à l'étude ?
Deuxièmement, des baisses d'impôt pour la même année ont été annoncées par Michel Sapin en même temps que le prélèvement à la source. Pouvez nous communiquer des éléments factuels à ce sujet ?
Je crois qu'on peut se réjouir collectivement de la démarche de certification engagée avec la mise en place de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), à laquelle le Premier président Philippe Séguin s'était beaucoup consacré.
Au-delà, je voudrais revenir sur la dette. L'annuité de la dette bénéficie de la baisse des taux d'intérêt et de la faiblesse de l'inflation, qui représentent 3,5 milliards d'euros de moins que ce qui était inscrit dans la loi de finances initiale. Certes, on peut s'en réjouir, et sans modifier la norme de dépenses à l'infini, comme vous l'évoquez, on peut néanmoins s'inquiéter du fait que l'on ait parallèlement une dette dont le stock continue de s'accroître et surtout, depuis 2008, un effet boule de neige.
En clair, la croissance du stock de dettes et les intérêts liés à cette croissance sont plus rapides que la croissance du PIB du pays. C'est ce qu'il y a de plus inquiétant. Le seul moyen d'enrayer cette situation serait d'avoir un excédent budgétaire primaire, ce qui est loin d'être le cas, moyennant quoi nous allons atteindre 95 % du PIB en termes d'endettement.
Sans parler du respect de la norme de dépenses et de la problématique de l'annuité de la dette qui lui est liée, considérez-vous qu'il existe une vraie menace ? Doit-on prendre des mesures radicales à cet effet boule de neige ?
Enfin, je fais partie de ceux qui ont soutenu la création du PIA en son temps. Je n'ai donc pas d'état d'âme à ce sujet. Force est de constater que le PIA est devenu, au fil des années, un outil de débudgétisation d'une partie de l'investissement. C'était déjà le cas au départ, et cela s'est accru. Pour autant, on ne doit pas s'en satisfaire, et la norme de dépenses a peut-être eu le tort de ne pas prendre suffisamment les choses en compte.
Pouvez-vous indiquer les mesures qui sont prises pour éviter l'emploi de ces outils de débudgétisation, surtout quand on en voit d'autres poindre à l'horizon ? Je suis à moitié rassuré de ce qui figure dans la loi de transition énergétique concernant le mode de financement du fonds de financement de la transition énergétique, dont je découvre qu'il serait alimenté par un prélèvement amont sur le reversement de la Caisse des dépôts et consignations à l'État qui, en toute logique, devrait partir vers le budget général.
L'imagination est sans limite en matière de débudgétisation. Ce n'est pas de votre fait et ce n'est pas nouveau, mais que fait-on pour arriver à ferme les sabords qui ne font que s'ouvrir ?
Voici un moment qui est devenu un classique : en tant que ministre, vous êtes dans votre rôle en regardant le verre à moitié plein, et l'opposition dans le sien en vous interrogeant et en considérant le verre à moitié vide. Cela ne changera pas !
J'ai connu des époques où il était complètement vide !
En tous cas, cette loi de règlement est marquée - et la Cour des comptes le souligne - par un événement particulier qui n'était pas arrivé depuis 2010 : le déficit s'est en effet accru d'environ 10 milliards d'euros ! Même sans tenir compte des sommes relevant du PIA, on est à plus de 5 milliards d'euros.
En outre, un certain nombre de dettes de l'État sont en train de se reconstituer dans les différentes missions : 173 millions d'euros en matière de logement sur l'aide personnalisée au logement (APL) qui, nous dit-on, s'élèveront à 300 millions d'euros à la fin de l'année ! Un certain nombre de chiffres ne figurent pas dans l'exécution. Si l'on en faisait la somme, il y aurait sans doute plusieurs centaines de millions d'euros, voire plus d'un milliard d'euros à y rajouter. On ne peut donc vous décerner de satisfecit aujourd'hui.
Combien manquerait-il s'il fallait jouer le jeu de la vérité des chiffres ? La Cour des comptes a également relevé le fait que l'État ne verse pas les pénalités qu'il doit au fameux Fonds national d'accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL) lorsqu'il a été condamné par le tribunal administratif pour défaut de relogement, dans le cadre de la loi sur le droit au logement opposable (DALO). On pourrait multiplier ainsi les exemples. Il serait donc intéressant de connaître le chiffre global.
La Cour des comptes évoque d'ailleurs la légalité de la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS), qui permet de financer les aides à la pierre par la mutualisation.
La CGLLS dispose pourtant de réserves !
Je partage votre point de vue : j'ai toujours été favorable à cette mutualisation des moyens, mais si les aides à la pierre figuraient auparavant dans le budget de l'État, il n'en existe aujourd'hui quasiment plus, et l'on va piocher l'argent ailleurs. C'est pourquoi la Cour des comptes s'interroge sur la légalité de ce moyen.
Un mot sur le prélèvement à la source. Nos concitoyens y sont en effet favorables, mais je ne suis pas sûr qu'ils aient tous compris ce qui allait se passer. Certains pensent qu'il y aura une année blanche durant laquelle on ne paiera pas d'impôts. On a bien vu que ce ne serait pas le cas. Tout le monde n'a pas compris qu'on devra quand même faire une déclaration en fin d'année. Pour certains, un reliquat sera probablement à verser ou un chèque à percevoir du Trésor public. C'est la même mécanique qu'aujourd'hui !
Pourquoi se lancer dans cette opération, qui va être extrêmement compliquée et qui présente un autre inconvénient, celui de devoir demander à toutes les entreprises, petites, moyennes ou grandes, de jouer au percepteur, avec les difficultés que cela va engendrer ? On a développé la déclaration par Internet, qui commence à donner de bons résultats. Elle va monter en puissance. C'était déjà une simplification. On peut être prélevé mensuellement. On n'était donc pas très loin de ce qui va être proposé, mais l'inconvénient de ce système, c'est que l'on va transformer les entreprises et les collectivités locales en percepteurs. En tant que maire, je m'inquiète quelque peu !
La commission des finances du Sénat travaille sur la TVA et l'évaporation des bases fiscales. On a en effet demandé aux entreprises de jouer ce rôle : elles prélèvent et compensent, mais l'on voit les difficultés que cela pose en matière de recouvrement. On est en train de travailler sur une logique inverse, qui ferait que l'on prélèverait la TVA à la source au moment des paiements, afin d'alléger le travail des entreprises et de vous rendre le contrôle plus simple.
En matière d'impôt sur le revenu, on va mettre en place un système complexe qui n'en vaut pas la peine ! Existe-t-il une évaluation du coût de la mise en place de cette affaire ? Il va falloir adapter tous les systèmes informatiques : cela va être d'une certaine complexité ! A-t-on une étude comparative pour s'en faire au moins une idée ?
La retenue de l'impôt à la source est un grand sujet de débat chez nos concitoyens : il suffit de prendre le taxi ou un café le matin au comptoir pour être interpellé sur ce sujet.
Que peut-on répondre à nos concitoyens qui craignent la perte de la confidentialité, à laquelle ils tiennent particulièrement, que pourrait provoquer la retenue à la source, puisqu'il appartiendra en effet à l'employeur de collecter l'impôt ?
En second lieu, on met souvent en avant le fait qu'en l'état actuel 47 % de nos concitoyens échappent à l'imposition sur le revenu : est-il envisagé un élargissement de la base des contributeurs ?
Je pense que les choses sont relativement claires et transparentes à propos de la loi de règlement. En France, la certification des comptes constitue une garantie. Si, dans d'autres pays, aujourd'hui en situation délicate, cette certification avait existé au cours des décennies passées, on n'aurait peut-être pas connu les crises que nous traversons !
Par ailleurs, vous avez souligné que la dépense publique était maîtrisée pour la première fois depuis nombre d'années. C'est une évolution qu'on ne peut que saluer.
Vous indiquez également que, s'agissant du déficit des comptes, vous avez transmis avant le 10 juin les éléments nécessaires à Bruxelles. Il n'y a pas de contestation sur ce point, la France respectant ses engagements. Je crois donc qu'il faut vous décerner un satisfecit, sinon sur le niveau du déficit, que tout le monde déplore, du moins sur la façon dont la tenue des comptes et le budget sont maîtrisés.
S'agissant du prélèvement à la source, la modification que l'on veut introduire en France est tout à fait légitime. On ne peut pas vraiment la contester. Parmi les 47 % de Français qui paient l'impôt, beaucoup ont des trajectoires professionnelles qui les conduisent dans des pays étrangers à un moment ou un autre de leur carrière. Il n'est pas maladroit de rapprocher nos dispositifs de ce qui est en vigueur dans les autres pays. C'est une forme de standardisation des modes de prélèvement de l'impôt qui paraît légitime. La France est l'un des trois pays au monde, avec Singapour, qui n'a pas encore adopté ce mode de fonctionnement.
Une question sur l'organisation de cette réforme, tant en ce qui concerne la préparation du budget 2016 que du budget 2017 : on sait que celle-ci entrera en application le 1er janvier 2018, mais quelles dispositions va-t-on déjà introduire dans la loi de finances pour 2016 ? Je pense en particulier à la télédéclaration et à la mensualisation. Je sais que cela soulève un problème constitutionnel, mais ne pourrait-on, dès le budget 2016, obliger tout le monde à s'inscrire dans un mode de fonctionnement qui facilite les choses ? Si on n'introduit pas de garde-fous, de contraintes, et si on ne manifeste pas d'exigences du point de vue réglementaire, peut-être les choses seront-elles plus difficiles à mettre en place. Dès lors quelles dispositions verra-t-on apparaître dans la loi de finances initiale pour 2016 ? Qu'est-il prévu pour 2017 ?
Un contribuable mensualisé qui utilise la télédéclaration a la possibilité de demander la modification de ses prélèvements, voire leur interruption, si ses revenus changent. Qu'est-ce que cela va apporter concrètement ? Il est vrai que si l'on se trompe de plus de 10 %, on risque des pénalités. C'est peut-être ce qui explique le peu de recours à ce système...
Or, aujourd'hui, si les contribuables utilisent beaucoup la mensualisation, peu ont recours à la télédéclaration, alors que le système fonctionne objectivement bien. Il faut rendre hommage à la DGFiP sur ce point.
François Marc m'a interrogé sur les méthodes de retenue de l'impôt à la source et les méthodes de travail. Nous aurons à y travailler. Dès septembre, le Gouvernement lancera un débat avec l'ensemble des partenaires. Nous aurons jusqu'au premier semestre 2016 pour mettre noir sur blanc les principes, les difficultés, les méthodes qui pourraient faire consensus. Quelles pourraient être les premières mesures ? Nous travaillerons ensemble sur ces sujets...
Vous souhaitez que l'on incite le contribuable à télédéclarer et à se mensualiser. La meilleure incitation, c'est d'en faire la promotion et d'expliquer, comme vient de le faire à l'instant le rapporteur général, qu'elles fonctionnent bien.
J'ai par exemple été surpris que ceux qui utilisent le chèque emploi service universel (CESU) trouvent préremplis les montants de leurs dépenses au titre de l'emploi de salariés à domicile, ainsi que le nom et l'adresse de ceux-ci.
Tout cela s'améliore régulièrement, tous les ans, grâce au travail de nos équipes. Certains pensent que c'est facile : or on compte 37 millions de foyers fiscaux et 150 millions d'informations transmises aux services fiscaux d'origine diverses - banques, employeurs, CESU, etc. ! Tout est vérifié, et il faut saluer ce travail.
Qu'est-ce qui va changer ? Principalement le fait que l'impôt à payer concernera l'année des revenus que l'on percevra : cela évitera les décalages temporels que j'évoquais tout à l'heure. Ce sont des difficultés que vous rencontrez dans vos permanences : on demande des délais, des facilités de paiement, etc. L'un des objectifs est de rapprocher le moment où l'on paie l'impôt de celui où l'on perçoit le revenu : c'est essentiel !
Nous n'avons pas l'intention d'obliger l'ensemble des contribuables à télédéclarer. Un certain nombre de personnes ne sont en effet pas en mesure de le faire, et ce pour diverses raisons - raisons personnelles, idéologiques, matérielles, du fait d'une mauvaise connexion à Internet, par exemple. Il faut continuer à travailler sur ces sujets.
Vincent Delahaye s'interroge sur les reports de charges. C'est très clair dans les comptes de l'État, même s'il est vrai qu'on ne le voit pas dans la comptabilité budgétaire. Fin 2013, l'État devait 6,7 milliards d'euros à ses fournisseurs ; fin 2014, l'État doit 7 milliards d'euros, hors effet des apurements communautaires, soit une très légère augmentation de 300 millions d'euros. On a donc contenu les choses. Tous les rapporteurs spéciaux ont accès à toutes les informations concernant les comptes détaillés de chacun de leur secteur.
Pour ce qui est des jours de grève, je n'ai pas de réponse, j'en suis désolé. La question est précise.
Parmi les économies réalisées en 2015, lesquelles sont structurelles, lesquelles sont conjoncturelles ? Je vous propose d'ouvrir le débat ce soir et, peut-être, d'y passer la nuit ! J'entends souvent le mot « structurel » répété quinze de fois de suite dans certaines interventions - je n'ai pas dit que c'était le cas ici, mais cela arrive... Je préférerais que ceux qui appellent sans cesse de leurs voeux des réformes structurelles en proposent seulement quatre. C'est un bon débat, mais il est difficile à trancher. Le débat d'orientation des finances publiques, j'imagine, nous permettra d'y revenir.
Fabienne Keller a posé deux questions. En premier lieu, a-t-on conservé l'idée d'un règlement en sifflet de la retenue à la source, avec une répartition de l'année que certains qualifient un peu à tort de « blanche » les années suivantes ? C'est une proposition qui circule. J'ai dit clairement ce qu'il en était pour les revenus salariés : il n'est pas question de reporter l'impôt dû en 2017 sur les années suivantes, et de le cumuler avec l'impôt dû au titre de 2018.
Nous aurons à traiter le cas des revenus exceptionnels, ponctuels - plus-values mobilières perçues ou réalisées en 2017. Cela ne change rien : un revenu exceptionnel, en 2017, aurait de toute façon donné lieu à un impôt exceptionnel en 2017 ! Si l'impôt exceptionnel est réparti sur les années suivantes, en quoi cela pénaliserait-il le contribuable ? J'ai même le sentiment qu'il peut en tirer un avantage. ! Cela fait partie des points que nous aurons à traiter dans le cadre de nos travaux.
Vous évoquez en second lieu des baisses d'impôt. Vous avez raison, madame la sénatrice, il existe des baisses d'impôt : avec la suppression de la première tranche, 9 millions de foyers vont voir leur impôt diminuer dès 2015. Nous le vérifierons ensemble. Y en aura-t-il d'autres en 2016 et 2017 ? Nous sommes en train de travailler sur la loi de finances initiale. Nous verrons bien dans quelle mesure les propositions du Gouvernement ou les propositions parlementaires pourront modifier la structuration. Le Gouvernement n'acceptera en tout cas aucune hausse d'impôt supplémentaire, même si elles sont proposées par les parlementaires. Il ne vous en proposera pas non plus, et il tentera de s'y opposer, même si le Parlement décide en dernier ressort.
Michel Bouvard a évoqué la question de la dette et des taux d'intérêt, question régulièrement posée à juste titre, parfois sous forme de risque. J'ai failli anticiper ma réponse tout à l'heure...
Les documents et les trajectoires budgétaires ont été élaborés suivant des prévisions concernant le taux des obligations assimilables du Trésor (OAT) qui sont les suivantes : le taux des OAT devrait s'élever à 1,2 % en 2015, 2,1 % en 2016, 3 % en 2017, et 3,5 % en 2018. Aujourd'hui, le taux des OAT, qui vient d'augmenter, tourne entre 1,1 % et 1,2 %. Ces OAT ont dix ans, et un spread qui a assez peu varié par rapport à nos voisins. À ce stade de l'année, nos émissions couvrent déjà une large part de nos besoins. Nous avons essayé de profiter des taux faibles, qui sont en train de légèrement remonter - je pense que l'incertitude que peut engendrer la situation grecque n'y est pas complètement étrangère. Nous l'avons évoquée en conseil des ministres il y a deux heures.
Les taux d'OAT inclus dans nos trajectoires budgétaires sont particulièrement prudents, puisqu'il faudrait un doublement de l'OAT pour que cela ait des conséquences en 2016.
Il existe un autre impact, celui de l'inflation. Beaucoup de nos produits sont indexés sur l'inflation. À ce stade, nous en avons assez généreusement profité. L'inflation, semble-t-il, connaît un regain de hausse selon les dernières prévisions. Comme le disait Pierre Dac : « Les prévisions sont toujours difficiles, surtout quand elles concernent l'avenir. » !
Il disait aussi que les économistes avaient été inventés pour que les météorologues se sentent moins seuls !
Vous m'interrogez également sur le PIA et les possibilités de débudgétisation, et vous vous inquiétez à propos du fonds de financement de la transition énergétique. Je crois reconnaître là des propos du commissaire-surveillant de la Caisse des dépôts, que vous fûtes !
C'est une interrogation traditionnelle. Nous essayons, avec le Commissariat général à l'investissement (CGI), de piloter au mieux les dépenses du PIA, qui sont bien qualifiées de « dépenses publiques », et sont prises en compte dans le champ des dépenses de l'État. Nous en suivons les décaissements. Ils sont souvent très progressifs, et nous faisons régulièrement le point à ce sujet.
Quant aux questions concernant la transition énergétique, je reçois ce soir Ségolène Royal pour travailler sur la loi de finances initiale. Nous aurons l'occasion d'en reparler.
Pour répondre à Philippe Dallier, combien manque-t-il ? Il n'y a pas de poussière sous le tapis ! Vous dites que la CGLLS a été critiquée par la Cour des comptes. On demande aux organismes sociaux de se garantir contre un risque bancaire par une cotisation à la CGLLS, qui n'a d'ailleurs été que très rarement appelée en recours comme garantie d'emprunt, sauf une fois, je crois, à hauteur de 400 000 euros, ce qui est sans rapport avec les centaines de millions d'euros actuellement capitalisés dans la CGLLS.
Un travail est mené sur la mutualisation ; nous aurons peut-être l'occasion de l'évoquer avec le sénateur Georges Patient au sujet d'une difficulté que connaît son département. Nous travaillons sur ce sujet avec Alain Cacheux, qui préside le conseil d'administration et Jean-Louis Dumont, au titre de l'Union sociale pour l'habitat (USH), pour optimiser les fonds de la CGLLS.
Vous dites qu'il s'agit d'un transfert des aides à la pierre : l'important est qu'elles puissent être mises en oeuvre pour accompagner les opérations de construction de logements. Pourquoi immobiliser de l'argent ? Cela a été le cas très longtemps. Pourquoi ne pas les mettre au service du logement social ? C'est ce que nous nous employons à faire.
Vous avez posé une question très précise et légitime sur les charges que pourrait occasionner la retenue à la source aux entreprises. Nous travaillons sur plusieurs pistes en ce qui concerne celui qui prélèvera l'impôt. Vous craignez que les entreprises ne se transforment en percepteurs. C'est déjà assez largement le cas : le bulletin de paye comporte ainsi plusieurs lignes concernant la TVA, la CSG, etc. Nous travaillons d'ailleurs sur une simplification du bulletin de paye. Si on enlève cinq lignes et qu'on en ajoute une, on en aura néanmoins supprimé quatre !
Des réunions ont lieu tous les quinze jours avec les concepteurs de logiciels de paye, avec les entreprises, les organisations professionnelles. Si c'est l'entreprise qui joue le rôle de collecteur, il faudra veiller que cela respecte certains principes.
D'autres pistes sont explorées : on parle d'une interface qui permettrait, dès que le salaire est versé sur le compte bancaire, d'effectuer immédiatement le prélèvement. Cela fait partie de ce qui sera mis au débat et des choix qui devront être faits dans le cadre du Livre blanc.
Se pose également la question de la confidentialité. Il faudra bien qu'à un moment donné, quelqu'un utilise un taux d'imposition : l'employeur, le banquier, ou celui qui se trouve entre les deux. Que va révéler ce taux d'imposition ? Pas grand-chose ! En effet, un grand nombre de facteurs interviennent dans le calcul de celui-ci, comme la structure familiale, l'ampleur des revenus des uns et des autres, la présence ou non de revenus exceptionnels ou d'autres revenus. Un taux s'explique par un grand nombre de choses. Il y a donc déjà là une protection. Nous aurons l'occasion d'en débattre avec l'ensemble des acteurs du secteur.
J'ajoute que nous disposons d'un outil qui se développe, celui de la déclaration sociale nominative (DSN), qui va progressivement devenir obligatoire dans toutes les entreprises. C'est un facteur très important. Cela va grandement simplifier la vie des entreprises, qui n'auront plus à renseigner les états qu'elles doivent remplir, mais pourront directement avoir communication des montants versés.
C'est un facteur de simplification très important pour les entreprises. Pour la sphère publique, cela permet d'avoir connaissance, au fil de l'eau, des revenus dans leur détail et dans leur répartition.
L'année dernière, le Parlement nous a suivis en instaurant le versement d'une prime aux retraités destinée à compenser la non-revalorisation des pensions. Nous avons eu des difficultés à mettre en place ce dispositif. Pourquoi ? Aujourd'hui, nous n'avons pas connaissance de l'ensemble des revenus que touchent les retraités - retraite principale ou retraites complémentaires. On est parvenu à le faire en croisant les données issues de plusieurs systèmes informatiques, mais cela n'a pas été simple. Avec la DSN, je pense que nous aurons davantage de facilités pour le faire. Cela nous donnera des informations statistiques.
L'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), par exemple, vient d'annoncer que la masse salariale, au premier trimestre, a augmenté de 0,9 %. Nous pourrons ainsi, mois par mois, suivre l'évolution de la masse salariale ce qui, dans le suivi de nos prévisions de recettes, ou en matière de cotisations sociales, nous permettra d'améliorer nos connaissances. Nous pourrions même accélérer le calendrier, mais je sais que cela pose quelques difficultés.
François Marc a rappelé que nous étions l'un des rares pays à ne pas pratiquer la retenue à la source, avec la Suisse et Singapour. Par ailleurs, nous ne sommes pas seuls à tenir compte de la situation familiale : c'est également le cas du Grand-Duché du Luxembourg. Ce principe n'est pas remis en cause. J'entends dire que l'on va vers une individualisation de l'impôt : non !
La déclaration annuelle continuera d'être de mise. La plupart des pays qui pratiquent la retenue à la source continuent d'en avoir une, qu'il s'agisse de l'Allemagne, des États-Unis, ou des pays du nord. En Allemagne, elle n'est pas obligatoire, ce pays prélevant systématiquement plus que l'impôt qui est dû. Beaucoup de contribuables allemands, si les sommes sont faibles ou si la complexité est trop grande, renoncent même à leur déclaration finale. On dit que quelques milliards d'euros par an sont ainsi conservés par l'État. Ce n'est pas le but : le but est que l'impôt soit juste et corresponde à ce qui est dû. Ce système sera consolidé en fin d'année par une déclaration annuelle préremplie : c'est mieux, plus rapide et plus efficace.
Aujourd'hui, comment peut-on encore gâcher des tonnes de papier, alors que la télédéclaration apparaît très efficace ? Elle est souhaitée par les entreprises, qui ont parfois un tour d'avance sur la sphère administrative en ce qui concerne les évolutions technologiques. Je pense donc que nous devons accompagner ce mouvement.
Voilà quelques éléments de réponse. Comme d'habitude, nous aurons l'occasion d'y revenir.
Merci pour votre disponibilité et vos réponses. Nous aurons en effet l'occasion d'y revenir.
La réunion est levée 13 h 15.