Commission d'enquête Autorités administratives indépendantes

Réunion du 21 juillet 2015 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • indépendance

La réunion

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La réunion est ouverte à 14 h 40

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Nous recevons M. Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires (Araf), créée par la loi du 8 décembre 2009 en tant « qu'autorité publique indépendante, dotée de la personnalité morale, qui concourt au bon fonctionnement du service public et des activités concurrentielles de transports ferroviaire, au bénéfice des usagers et clients des services de transport ferroviaire. » Ses compétences ont été renforcées par la loi du 4 août 2014 et par la transposition de la directive du 21 novembre 2012. Le projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances a étendu de façon considérable ses compétences, en la transformant en Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer) : elle disposera de pouvoirs d'investigations, d'un pouvoir réglementaire, d'un pouvoir de sanction étendu, puisqu'elle pourra prononcer des amendes allant jusqu'à 5 % du chiffre d'affaires du contrevenant.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Pierre Cardo prête serment.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

La loi du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires (ORTF) a confié la personnalité morale à l'Araf, qui constitue une autorité publique - et non administrative - indépendante. Un régulateur indépendant était en effet nécessaire avec l'ouverture à la concurrence. Les débats parlementaires le montrent : cette indépendance était considérée comme la clé de voûte de la nouvelle organisation ferroviaire, « alors même que des entreprises nationales figurent parmi les intervenants du marché », pour citer le rapport du rapporteur pour le Sénat, Francis Grignon. L'État est en effet confronté à des intérêts multiples : il édicte les normes, il est l'actionnaire exclusif de Réseau ferré de France (RFF) et de l'opérateur historique dominant, il est aussi l'autorité organisatrice de transport (AOT) pour le service ferroviaire national et les trains d'équilibres du territoire (TET). L'obligation juridique issue du droit communautaire n'a fait que confirmer ce besoin d'indépendance.

Selon le même rapport du Sénat, qui est à l'origine de cette indépendance, « la personnalité juridique et l'autonomie financière sont un gage supplémentaire de l'indépendance fonctionnelle de l'ARAF, qui ne sera plus intégrée à la personnalité juridique de l'État. » Et d'ajouter : « l'Autorité de régulation des activités ferroviaires disposera de la sorte du plus haut degré d'indépendance dont peut jouir une instance de régulation, ce qui renforcera auprès des acteurs du secteur les garanties d'impartialité des décisions qu'elle sera amenée à prendre. » Le Sénat a apporté de nombreux compléments, tels que le choix comme président d'une personnalité en fin de carrière, qui ne puisse en principe être tenté par une carrière postérieure...

Notre indépendance se juge à l'aune de nos décisions. Si l'Araf a été choisie pour assurer la régulation du transport par autocars ouvert à la concurrence et le contrôle économique des autoroutes, c'est sans doute que son indépendance est désormais considérée comme normale. Si la première mission entre dans nos compétences - nous régulerons un nouveau mode de transport - le contrôle des autoroutes sort un peu du champ de la régulation telle que nous la pratiquons.

La loi prévoit un abondement de notre budget par un prélèvement sur les péages, ce qui dégage nos recettes de la dépendance de l'État, même si ce dernier revient sur ses décisions, comme sur les 3,7 millièmes du montant des redevances d'utilisation du réseau que nous percevons. Si nous n'étions pas une autorité mais une administration, nous ne pourrions pas bénéficier de ce type de financements.

Le coût de la régulation est à comparer avec le poids des entreprises concernées - l'Araf compte 62 équivalents temps plein (ETP), contre 50 000 pour SNCF Réseau et 100 000 pour SNCF Mobilités - et avec les bénéfices qu'elle entraîne, puisqu'elle incite les entreprises soumises à sa régulation à maîtriser leurs coûts.

Nous pouvons aussi nous comparer avec d'autres régulateurs, tel que l'Office of Rail and Road (ORR) britannique, créé en 1993 contre 2010 pour nous, agissant sur 16 093 kilomètres de voies ferrées contre 29 784 kilomètres en France, utilisées plus intensément, avec 92 trains par kilomètre de ligne par jour contre 47 en France. L'ORR compte 180 agents contre une cinquantaine à l'Araf, 12 membres du collège élus pour cinq ans contre sept élus pour six ans chez nous, et dispose d'un budget de 30 millions de livres, soit 43 millions d'euros, contre 12 millions d'euros pour l'Araf.

Notre localisation au Mans, décidée par arrêté ministériel - fait inédit pour une autorité administrative indépendante (AAI) - peut se comprendre du point de vue de l'aménagement du territoire. Or l'ensemble des experts - économistes, juristes - que nous devons consulter se trouvent en région parisienne. C'est préoccupant. S'il est aisé de recruter des juniors en province, c'est bien plus difficile pour des spécialistes de haut niveau, dont une partie réside en banlieue ou en grande banlieue. Une mission menée par l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et du développement durable doit objectiver nos besoins résultant de l'extension de nos compétences, mais des voix se sont fait entendre pour que l'Arafer fonctionne avec les moyens de l'Araf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Pouvez-vous nous parler d'autres autorités en Europe que la britannique ? Avez-vous des relations avec elles ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Nous appartenons au Club des régulateurs, qui en regroupe 25, tous dits indépendants, ce qui est plus ou moins vrai. Les régulateurs d'Italie et de Suède sont ceux dont nous sommes les plus proches. Certains disposent d'une compétence intermodale : c'est le cas aux Pays-Bas, c'est également celui de l'ORR, qui vient de récupérer la route, ou du régulateur italien, qui s'occupe aussi du transport aérien. Lors de sa création, l'Araf a été considérée comme correspondant le mieux aux standards, grâce à son budget indépendant de l'État et du processus de nomination de ses membres. Le régulateur allemand gère un ensemble de secteurs, mais je ne me prononcerai pas sur son indépendance.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous considérez donc que certains de ces 25 régulateurs ne présentent pas toutes les garanties d'indépendance...

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Tous n'ont pas les mêmes moyens. Le régulateur allemand, comme d'autres, peut recevoir des instructions du Gouvernement...

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Cette hypothèse, soutenue par le Sénat à l'origine, n'était pas une mauvaise idée. Asseoir le financement de la régulation sur les entreprises qui en font l'objet est une originalité intéressante. L'État a toutefois défini un plafond - à hauteur de 11 millions d'euros - à nos recettes issues des 3,7 millièmes ; il a créé, sans le dire, une taxe qui lui revient au-delà de ce plafond.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En 2014, le taux du droit fixe a été fixé à zéro par arrêté ministériel.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Oui, à la demande du collège. Ce taux nul était la seule solution pour réduire une trésorerie devenue trop importante sans que l'opération puisse être qualifiée de subvention.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

L'implantation du siège d'une AAI « loin de Paris » pose problème, selon vous : « loin », tout est relatif...

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Pour qui habite Paris intra-muros, Le Mans n'est qu'à une heure, en plus du temps passé dans le métro. Mais le temps de transport atteint deux heures et demie aller, soit cinq heures par jour au total, pour qui habite en grande banlieue. Un jeune polytechnicien que nous avions recruté a ainsi « craqué » au bout de deux ans.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Les conjoints travaillent souvent à Paris ; les cadres de haut niveau sont souvent installés en région parisienne, avec de grands enfants, qui poursuivent leur cursus en région parisienne... Le Mans n'a rien de rébarbatif. Mais pour un membre du collège comme Jean Puech, qui habite près de Rodez, ce n'est pas tout près ! Pour les jeunes, au contraire, les loyers sont faibles et la ville est agréable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il était intéressant de connaître l'opinion du président de la seule AAI dont le siège est situé en dehors de la capitale. Si nous généralisions ce modèle, peut-être les opinions changeraient-elles ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Rien ne s'opposerait à ce que nous soyons installés en banlieue, comme l'est la SNCF et le sera bientôt RFF. Aller à Bruxelles depuis Le Mans n'est pas évident, non plus que d'obtenir de certaines personnalités qu'elles daignent venir jusqu'à nous pour les auditions. Ancien élu, je comprends bien l'intérêt d'une telle localisation en matière d'aménagement du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La loi « Macron » a considérablement élargi vos compétences. Pourrez-vous continuer à fonctionner dans ces conditions ? Lors d'une conférence de presse, le 10 juillet, vous déclariez « avoir rarement vu une telle vélocité dans la mobilité », et « qu'il ne fallait pas confondre vitesse et précipitation ». Pouvez-vous nous en dire plus ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il nous était demandé d'être opérationnels, pour notre nouvelle compétence relative au transport par autocars, dès le 1er août, alors que la loi n'était pas encore votée et les décrets pas encore publiés. Comment pouvions-nous recruter le personnel nécessaire en l'espace de quelques jours ? La décision de décaler cette date au 1er octobre est sage. Le début de notre rôle dans le secteur des autoroutes, au 1er février, est en conséquence plus jouable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous dites avoir besoin de 15 millions d'euros pour fonctionner.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

D'après nos estimations, il nous faudrait une dizaine de personnes s'agissant de la régulation des autocars et une douzaine pour assurer nos nouvelles compétences relatives aux autoroutes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous avez donc besoin d'une trentaine de postes supplémentaires. Serez-vous entendu ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je ferai mon travail de président, j'essayerai d'être convaincant.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je ferai au mieux, comme d'habitude.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Si l'on veut que nos décisions soient respectées, il est important que nous puissions en garantir la qualité et qu'une doctrine apparaisse assez rapidement afin que chacun des acteurs du secteur s'y retrouve.

L'idéal serait de limiter les différends et l'utilisation notre pouvoir de sanctions. Il me semble que les opérateurs français ont eu la prudence d'éviter de demander des arrêts distants de moins de 100 kilomètres - ils ne devraient donc pas nous solliciter, mais je ne dispose pas d'éléments concernant les opérateurs étrangers. Les demandes devraient être nombreuses après la première année, mais nous aurons alors à nous pencher sur les gares routières, qui en ont bien besoin dans le grand désert français ; il faut en réguler l'accès, la tarification, etc.

Le choix de notre autorité s'agissant des autoroutes s'explique par le besoin d'une autorité dotée de la personnalité morale ; je peux ester en justice, ce qui constitue un moyen de pression dans notre contrôle des appels d'offres.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Comment articulerez-vous votre action avec celle de l'Autorité de la concurrence, qui a démontré son rôle en cette matière ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Elle intervient ex post, sur des marchés passés manifestement en violation de certaines règles, tandis que nous intervenons ex ante. Nous nous concertons, sur la séparation comptable par exemple, et notre relation est très correcte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne parle pas de conflit, mais est-il opportun de confier les autoroutes à plusieurs autorités indépendantes ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Nous jouons un rôle différent. Nous nous prononcerons sur l'indépendance des membres des commissions d'appels d'offres, ce qui ne correspond pas au rôle de l'Autorité de la concurrence. C'est néanmoins primordial, compte tenu de ce que j'ai observé...

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Nous vérifierons que l'évolution de la tarification respecte bien les règles fixées, ce qui n'était pas dans les moyens des ministères chargés de ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il est vrai qu'il faut ajouter les ministères : cela finit par faire beaucoup ! Cette extension des compétences par la loi « Macron » n'était pas spécialement souhaitée ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il était logique de devenir multimodal, comme le devient l'opérateur principal, qui se lance dans le covoiturage et les autocars. En l'espèce, nous vérifierons que les conventions de service ne sont pas bouleversées par la concurrence des autocars.

Nos nouvelles compétences concernant les autoroutes relèvent d'un choix politique que je ne remets pas en cause, mais qui m'a surpris. L'Autorité de la concurrence aurait-elle dû en être chargée ? Je ne peux pas répondre à cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Et sur l'existence de plusieurs AAI aux missions proches ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je n'ai pas l'impression que nous risquions de nous marcher sur les pieds. Nous contrôlons en amont, et les plaintes iront à l'Autorité de la concurrence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Soit, mais on n'este pas en justice en amont, seulement en aval.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

C'est vrai, mais cette possibilité se limitera aux commissions d'appels d'offre. Je suis là pour appliquer et faire appliquer la loi.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous avez fait montre le 13 mai dernier d'une indépendance certaine à l'égard de l'exécutif, en donnant un avis défavorable à un projet de décret qui vous réorganisait.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

J'ai toujours fait preuve une tendance naturelle à l'indépendance.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Suivi unanimement par le collège - comme depuis ma nomination alors qu'il a été renouvelé deux fois - j'ai considéré que le décret était contradictoire avec la loi d'août 2014, beaucoup moins précise que celle de 2009 sur les modalités de présentation du rapport d'activité, le législateur ayant souhaité introduire plus de souplesse. Finalement, le ministère a suivi nos remarques, sauf sur la règle selon laquelle notre silence vaut approbation, que le Conseil d'État a voulu maintenir.

Nous avions raison de nous inquiéter de l'alourdissement du fonctionnement, et des allers et retours avec le ministère, qui peine parfois à nous répondre. Nous nous sommes expliqués. Avec l'accord du collège, j'essaie depuis plus d'un an d'améliorer nos relations avec le ministère des transports. Nous ne sommes pas là pour nous marcher sur les pieds : nous avons en charge la régulation économique ; ils doivent préparer le schéma de circulation et veiller à l'aménagement du territoire. Chacun son métier, et les vaches sont bien gardées ! Nous nous réunissons tous les deux mois et essayons de régler nos problèmes ex ante et non plus ex post, pour éviter d'avoir à réitérer des déclarations comme celle d'il y a quelques mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ce que vous dites témoigne de l'inquiétant délitement de l'État. Vous avez donc obtenu satisfaction, sauf sur les délais : vos avis sont réputés favorables en l'absence de décision.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Oui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous n'y êtes pas allé de main morte - cela peut rassurer sur ce que peut être une autorité indépendante. Vous aviez demandé la suppression du caractère contraignant des délais et obtenu de ne plus avoir à consulter le Gouvernement avant toute décision, avis ou recommandation, ni transmettre les pièces.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Ce n'était pas compatible avec mes obligations en matière de secret des affaires. J'avais tenu deux réunions avec le directeur adjoint du ministère, qui ne m'avait pas suivi. J'aurais sans doute pu agir avec plus de délicatesse...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne puis que constater que vous avez une personnalité indépendante. Le Gouvernement a cédé ; l'a-t-il fait aussi sur la présence de représentants du Gouvernement aux délibérations de votre collège ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Oui pour les délibérations : cela aurait été incompatible avec les modalités de nomination des membres du collège, deux étant nommés par le ministère des transports et deux par Bercy : la représentation du Gouvernement aurait faussé la liberté des débats avec ces hauts fonctionnaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Au vu de ces modalités, je ne suis pas sûr que cela apporte une solution complète.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Les débats doivent être libres au sein de l'Autorité. Le Gouvernement peut avoir des représentants dans certains cas, mais pas dans tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Et si quelqu'un d'autre que vous avait présidé l'Araf ? Il aurait pu accepter de consulter le Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

C'est exact. Mais je considère que j'ai des comptes à rendre au Parlement, et non à l'exécutif, avec qui je dois travailler.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le Gouvernement souhaitait, semble-t-il, que vous soyez moins indépendant que le mot...

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

C'est possible. Le Sénat a tranché la question de la présence d'un commissaire du Gouvernement avec la loi du 4 août dernier.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le Sénat a toujours eu une attention particulière pour cette date ! Dans la loi « Macron », il est prévu que le collège décide de la localisation des services de l'Autorité en fonction des nécessités de service.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Le nombre de mètres carrés que nous occupons paraît excessif, compte tenu de notre double implantation, au Mans et à Paris. Je ne peux pas la supprimer, mais j'optimiserai l'usage des locaux, sachant que j'aurai besoin de plus de présence parisienne qu'auparavant. Cet amendement nous a offert une certaine latitude.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Du rapporteur de l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le mode de désignation des membres du collège vous convient-il ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il ne m'appartient pas d'avoir une opinion sur ce sujet. J'ai cependant regretté que la nomination d'un membre par le Conseil économique, social et environnemental ait été supprimée et remplacée par celle d'un ministère - les ministres nomment désormais quatre membres - d'autant plus qu'il s'agissait d'un chef d'entreprise. Il a démissionné dès qu'il a appris la chose. Il faut éviter un collège trop important. Le mélange des vacataires et des permanents est intéressant : cela permet la participation de personnes ayant des expériences diverses. Nous nous réunissons actuellement une matinée et une journée complète par semaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La rémunération du président et des vice-présidents est conséquente, en toute logique. Au contraire, celle des autres membres du collège ne conduit-t-elle pas à un problème au recrutement ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il n'est pas simple que des membres acceptent d'être nommés pour des vacations lorsqu'ils habitent en province. Cela limite le recrutement à la région parisienne ; même pour les membres permanents : un Toulousain a ainsi refusé d'être nommé parce qu'il souhaitait continuer son activité d'enseignement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

En juillet 2013, vous avez fustigé la mauvaise coordination entre RFF, SNCF Infra et la direction de la circulation ferroviaire (DCF) devant la commission du développement durable de l'Assemblée nationale. Y a-t-il eu des suites ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je n'ose pas dire que les suites sont inscrites dans la loi du 4 août 2014. Séparer l'attribution des sillons, au sein de la SNCF, et l'infrastructure, dépendant en théorie de RFF, mais en réalité de SNCF Mobilités, correspond à une très mauvaise organisation, créée pour ne pas exister longtemps. Les tensions, très fortes, ont eu, par exemple, pour conséquence l'attribution de sillons fermes, avant que SNCF Infra ne lance des travaux imprévus, nécessitant des déviations plus chères ou des coupures de trafic.

La chute du fret ferroviaire est due notamment aux travaux menés la nuit, quand les trains de marchandises circulent, et aux diagonales complexes alternant entre réseaux électrique et diesel. Si, en plus, les sillons ne sont pas assurés, les industriels préfèrent le transport routier. La chute du fret ferroviaire s'accentue depuis 2000 alors qu'il est censé être prioritaire.

Espérons que la loi du 4 août 2014, en réunissant l'infrastructure et l'attribution des sillons, supprime ces incohérences insupportables. Elle constitue une avancée. L'outil industriel doit néanmoins progresser. Cette exigence de performance explique la mise en place d'une régulation incitative. Plus il y aura d'utilisateurs, plus RFF disposera de recettes.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Leroy

Tout le monde souhaite un transport écologiquement supportable. Le transfert de la route vers le ferroviaire fait partie des préoccupations nationales. L'ouverture du transport de marchandises à la concurrence européenne va dans le même sens.

Le citoyen est intéressé par votre mode de fonctionnement, mais aussi votre utilité. J'espère que vous pouvez jouer un rôle incitatif. Votre autorité ne sera reconnue que si elle contrôle la qualité juridique des décisions, mais aussi leur efficacité économique. Les Allemands nous dament le pion alors que leur réseau est moins dense que le nôtre.

Êtes-vous déjà responsables des filiales de la SNCF chargées du transport sur route ? Le serez-vous ? Serez-vous responsable du transport de marchandises dans le tunnel sous la Manche, alors que le conflit avec le transport maritime affecte Dunkerque et Calais ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

La chute du fret ferroviaire en France est bien antérieure à l'ouverture à la concurrence. Elle a été continue dès les années 2000, mais s'est ralentie depuis un an à la SNCF. Paradoxalement, la progression de la concurrence est extrêmement rapide, plus qu'en Allemagne. La situation n'est pas pour autant satisfaisante.

La chute du fret est d'abord due à la qualité des sillons, que l'on s'attache à améliorer malgré le mécontentement de RFF. Son président est conscient que leur fonctionnement doit être optimisé et leur fiabilité progresse. Une partie des investissements a porté sur le petit réseau, le « 7 à 9 », peu utilisé. Or priorité doit être donnée à la région parisienne, dont le réseau, saturé, est dans un état préoccupant, et sur les noeuds ferroviaires autour de Paris, Bordeaux et Lyon.

Il est dangereux de lancer des études sur des projets futurs dont la réalisation est hypothétique. La matière grise de RFF, ou plutôt de SNCF Réseau, n'est pas divisible à l'infini. Il faut en éviter la dispersion, qui handicape son fonctionnement.

Le réseau allemand est en bon état et les centres industriels sont répartis différemment sur le territoire, à des distances réduites. La situation française est moins facile.

Des décisions doivent être prises concernant le réseau secondaire. Faut-il le rationaliser en limitant le nombre de kilomètres, ou laisser les industries gérer elles-mêmes certaines sections - sans les privatiser ?

Nous n'intervenons pas dans les secteurs routier et maritime. La réforme du premier paquet ferroviaire nous attribue cependant la régulation économique de la partie française du tunnel sous la Manche, mais la question, relevant d'un traité binational, n'est pas réglée pour l'instant.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Leroy

Votre autorité, au-delà de ses prérogatives juridiques, peut jouer un rôle incitatif.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Oui. Le règlement des différends nous fait prendre connaissance des problèmes que rencontrent les entreprises sur le terrain et progresser. Le débat contradictoire impose l'expression de chacun, avant que nous prenions des décisions. La médiation est possible, mais minoritaire. Nous voulons une régulation incitative.

Neuf consultations ont aussi été organisées pour recueillir l'avis des acteurs. Nous les synthétisons pour formuler des propositions. L'Araf tente d'établir une doctrine pour que les opérateurs sachent comment se comporter. Nous souhaitons que l'ensemble des acteurs, y compris politiques, aient une vision objective de la situation et non induites par le monopole. L'an prochain, nous créerons un observatoire des transports établissant des comparaisons européennes - tout en respectant le secret des affaires - pour que les décideurs politiques disposent d'éléments objectifs.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Leroy

Le développement d'observatoires est une tendance actuelle de certaines autorités, comme l'Autorité de régulation des communications électroniques et des postes (Arcep). On peut s'étonner qu'elle ait mis tant de temps à en créer un qui se penche sur l'état des liaisons mobiles. C'est le meilleur compte rendu qui puisse être donné au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Existe-t-il un marché ferroviaire ? Vouloir installer une concurrence artificielle dans ce secteur a-t-il un sens ? La tentative de conciliation des objectifs économiques et écologiques n'a pas abouti. Les investissements prennent du retard. Le résultat de cette concurrence est surtout la diversification du monopole de la SNCF. Je ne remets pas en cause votre travail - il faut imaginer Sisyphe heureux.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il ne m'appartient pas d'en juger, mais on ne peut laisser la concurrence sans régulation. Il existe différents segments de marché. Le développement du marché ferroviaire a été handicapé par plusieurs facteurs. L'engagement national n'a pas suffi à endiguer sa chute. Pour moi, la concurrence n'a jamais été un but, mais un moyen pour que l'opérateur historique progresse en se remettant en cause.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

La SNCF est extrêmement performante à l'étranger, où elle gagne des parts de marché, alors qu'elle en perd en France. Pourtant, la concurrence est très violente, en Allemagne ou ailleurs. La SNCF n'a pas la même pugnacité en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Ne finance-t-elle pas ses activités à l'étranger avec les bénéfices de son monopole français ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

C'est ce qui est reproché en Allemagne. Nous avons mission de réaliser des séparations comptables. Aucune activité subventionnée ne peut en financer une autre. Nous avons réalisé ces séparations pour Gares et connexions et poursuivons avec Fret SNCF, TER, TET, afin que les flux financiers soient correctement identifiés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Certaines entraves n'existent peut-être pas à l'étranger.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Vous avez raison, mais ce n'est pas de la compétence du régulateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Vous ne disposez pas de l'indépendance financière qui vous donnerait une indépendance totale. Vous êtes financés par un prélèvement sur la redevance sur les autoroutes, mais c'est le pouvoir exécutif qui propose le montant du prélèvement. Cela relativise votre indépendance.

J'ai été effaré par vos propos selon lesquels il serait impossible de recruter hors de Paris, comme s'il n'y avait point de salut hors de la capitale. Moi qui suis de Bretagne, j'y vois une forme de mépris. Vous notez que le réseau est saturé en Île-de-France. Si l'on suit votre logique, selon laquelle tout doit se faire à Paris, on va inévitablement vers la saturation - et ses conséquences, en matière de pollution de l'air notamment. Je redoute ce discours prétendant qu'il faut être près de ceux avec lesquels on est en contact, comme si les nouvelles technologies ne permettaient pas ces relations. Monsieur Cardo, en tant qu'ancien élu, vous devriez prendre pleinement conscience de ce qu'impliquent vos propos.

La SNCF a une volonté manifeste de privilégier le transport de voyageurs. Nous n'avons pas, sur notre territoire, les moyens matériels d'assurer le lien entre le rail et la route. Nous n'avons ni les infrastructures, ni la souplesse. Le fret ne fonctionne que si le train est complet. La rigidité est totale, quand la SNCF fait preuve de souplesse dans le secteur du transport de voyageurs. Quels sont les moyens à mettre en oeuvre pour rattraper notre retard ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il ne faut pas confondre l'observation d'une réalité et mes souhaits. Nous avons joué le jeu de l'aménagement du territoire, mais je constate que nous n'avons pas pu pourvoir certains postes. Nous atteignons à peine un effectif de cinquante personnes, cinq ans après notre création. Il est possible de recruter des jeunes brillants prêts à se déplacer, mais nous avons du mal à trouver des personnes expérimentées qui acceptent d'aller travailler au Mans, c'est un fait.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Lorsque l'on a la volonté manifeste de recruter sur l'ensemble du territoire, on adapte ses moyens. Pourquoi ne pas transformer votre demi-journée de réunion par semaine, devenue une journée et demie avec l'Arafer, en une semaine tous les mois ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Il faut distinguer le collège et les salariés. En ce qui concerne ces derniers, j'observe la situation à distance puisque je n'effectue qu'une seule nomination, celle du secrétaire général. Tout le reste dépend de lui. Nous avons fait appel à des cabinets de recrutement et tenté beaucoup de choses.

L'opérateur historique a décidé d'arrêter le fret en wagon isolé, qui était déficitaire. En Allemagne, cela représente une bonne partie du marché, mais les pôles sont répartis différemment. Je ne peux qu'observer cette décision de l'opérateur qui a limité le déficit, sans augmenter le chiffre d'affaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La loi « Macron » vous assigne le contrôle des sociétés autoroutières. Vous savez que l'une de mes marottes consiste à étudier les curriculum vitae des membres des AAI. Or l'une des membres de votre collège, qui en fait partie depuis 2012, a été nommée coordinatrice du groupe de travail sur les autoroutes mis en place par le Premier ministre en janvier 2015. Est-ce le nec plus ultra en matière d'indépendance ? Y a-t-il un lien avec la nouvelle compétence qui vous a été confiée par la loi ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

J'ai effectivement constaté qu'elle était coordinatrice de ce groupe de travail, mais je ne suis pas persuadé que nous ayons récupéré cette compétence grâce à elle.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Nous avons mis au point un code de déontologie que nous améliorons actuellement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous nous avez démontré que vous saviez vous exprimer sans détour. Votre silence est éloquent...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je ne doute aucunement de votre volonté d'indépendance, mais vous comprendrez que je trouve cette situation anormale.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Vous avez votre analyse. J'observe la situation et j'aurai une réaction le cas échéant. Soyez certains que je garantirai l'indépendance des décisions du collège, et il y aura débat si nécessaire.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je ne m'en étonne pas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il existe une distorsion considérable entre les rémunérations du président et des vice-présidents, d'une part, et les membres du collège, de l'autre, payés 250 euros la séance. Mais si, en plus d'être membre de l'autorité, l'on accepte ce type de mission confiée par l'exécutif, on sait quelles conséquences cela peut avoir sur le fonctionnement de l'autorité.

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

L'un des membres de notre collège, qui était administrateur d'un port, a démissionné. Je verrai à l'avenir comment cela se passe.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il ne s'agit pas d'un conflit d'intérêts mais d'un problème d'indépendance. Comment ne pas penser à la corrélation entre ce groupe de travail installé par le Premier ministre et l'extension des compétences de l'Araf ?

Debut de section - Permalien
Pierre Cardo, président de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires

Je ne sais pas si ce lien existe. L'Autorité de la concurrence a souhaité que cette compétence nous soit attribuée. Le problème que vous évoquez exige peut-être un débat à un autre niveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Nous recevons M. Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public (CNDP). Un questionnaire détaillé vous a été adressé par notre rapporteur, vous y avez répondu.

La CNDP a été créée par la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement, dite loi Barnier. Elle s'est vue reconnaître le statut d'autorité administrative indépendante (AAI) par la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Selon l'article L.121-1 du code de l'environnement, elle est « chargée de veiller au respect de la participation du public au processus d'élaboration des projets d'aménagement ou d'équipement d'intérêt national de l'État, des collectivités territoriales, des établissements publics et des personnes privées relevant de catégories d'opérations dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État, dès lors qu'ils présentent de forts enjeux socio-économiques ou ont des impacts significatifs sur l'environnement ou l'aménagement du territoire ». À ce titre, elle assure le principe de participation consacré à l'article 7 de la Charte de l'environnement. Il lui est interdit de se prononcer sur le fond des projets qui lui sont soumis. Nous connaissons tous sa façon de procéder, pour l'avoir vue à l'oeuvre dans nos territoires. Son collège compte 21 membres, nommés pour cinq ans ou la durée de leur mandat, lequel est renouvelable une fois. Le président et les vice-présidents exercent leurs fonctions à plein temps et sont rémunérés ; les autres membres perçoivent une indemnité.

Conformément à la procédure applicable aux commissions d'enquête, M. Christian Leyrit prête serment.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

L'article L.121-1 du code de l'environnement donne la fonction principale de la CNDP. Le principe de participation du public a été énoncé dès la conférence de Rio en 1992. La même année, au-delà des processus d'enquête publique, la circulaire Bianco a établi le principe d'un débat en amont sur le principe et l'opportunité d'un projet. En 1995, la loi Barnier l'a fait entrer dans le corpus juridique français. La France est en outre tenue de respecter les engagements qui découlent de la convention d'Aarhus, signée en 1998, notamment prévoir des délais raisonnables pour que le public puisse participer activement au processus décisionnel, et ce dès le début de la procédure, lorsque toutes les solutions sont encore possibles.

Le rapport du groupe d'études présidé par Mme Nicole Questiaux, publié fin 1999, préconisait de transformer la Commission nationale en AAI, ce qui a été fait par la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité. Le principe de participation du public a été conforté par une directive européenne de 2003 et par l'inscription dans la Constitution de la Charte de l'environnement : un éminent représentant des Nations unies a ainsi souligné que la France était le seul pays à accorder une valeur constitutionnelle à la participation du public.

La loi Grenelle du 12 juillet 2010 a étendu les missions de la CNDP et élargi sa composition. Le collège compte aujourd'hui 25 membres, dont le président et les deux vice-présidents qui travaillent à plein temps et sont nommés par décret, le président l'étant après audition par les commissions de l'aménagement du territoire et du développement durable des deux Chambres. S'y ajoutent deux parlementaires, six élus locaux représentant les régions, les départements et les villes, un représentant du Conseil d'État, un de la Cour de cassation et un de la Cour des comptes, élus par leurs pairs, un magistrat des tribunaux administratifs, deux représentants d'associations environnementales, deux du patronat, deux des syndicats, deux des usagers et consommateurs et enfin deux personnalités qualifiées.

La CNDP est obligatoirement saisie par le maître d'ouvrage de tout projet d'aménagement ou d'équipement de plus de 300 millions d'euros, public ou privé : autoroute, TGV, port, aéroport, installation nucléaire ou industrielle, stockage des déchets, transport de gaz ou d'électricité, équipement sportif, comme le stade de la Fédération française de rugby. Nous étudierons bientôt un projet du groupe Auchan.

Les projets entre 150 et 300 millions d'euros font l'objet d'une publication dans la presse par le maître d'ouvrage. La CNDP peut être saisie par dix parlementaires, un conseil régional ou départemental, une commune, un EPCI, ou une association active sur l'ensemble du territoire national. Les ministres concernés peuvent également nous demander d'organiser de débats publics sur des options générales. Cela a été le cas sur les nanotechnologies en 2009, sur les déchets nucléaires en 2005-2006, et sur les transports dans la vallée du Rhône.

La CNDP siège en assemblée plénière une matinée par mois. Elle peut soit considérer que la concertation relève du maître d'ouvrage et se contenter de désigner un garant, soit organiser elle-même un débat public. Dans ce cas, quatre à sept personnes sont mobilisées pour animer le débat sur le terrain. Nous essayons de développer tous les modes d'expression afin de diversifier le public, ceux qui se rendent aux réunions publiques étant essentiellement des hommes, plutôt âgés, de catégorie socio-professionnelle supérieure.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

En effet, sauf sur l'éolien en mer auquel le public était plutôt favorable.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Ce n'est pas le cas aujourd'hui sur le projet d'éolien en mer de Dieppe-Le Tréport, qui suscite une assez forte hostilité.

Nous développons les ateliers d'approfondissement, les cahiers d'acteurs, les avis, les contributions, les débats interactifs sur Internet, les questions-réponses et les débats mobiles auprès des citoyens dans les gares, les lycées, les universités. Nous avons organisé une conférence de citoyens fort intéressante sur le projet Cigéo (Centre industriel de stockage géologique). L'objectif est de rencontrer les citoyens là où ils sont, selon notre nouvelle devise : « Vous donner la parole et la faire entendre ».

La CNDP est l'une des rares institutions à travailler avec des membres de la société civile et non des fonctionnaires. Elle compte dix permanents mais une cinquantaine de personnes sont mobilisées par les débats en cours, qui demandent six mois de préparation. Les débats durent quatre mois, mais peuvent être prolongés de deux mois. La commission particulière a deux mois pour établir un compte rendu ; je rédige le bilan dans le même délai, puis le maître d'ouvrage a trois mois pour décider de modifier, ou non, son projet.

La CNDP a reçu 160 saisines depuis 2002, organisé 55 concertations avec garant et 75 débats publics. À l'issue de ceux-ci, un tiers des projets ont été abandonnés ou remaniés, un tiers ont été substantiellement modifiés et un tiers n'ont pas ou peu évolué.

Les décisions de la CNDP sont susceptibles de recours devant le juge administratif. Ceux-ci ont tous été rejetés, en première instance ou en appel. La CNDP n'étant pas une personne morale, elle ne peut ester en justice et est donc représentée par le ministère de l'écologie, ce qui est loin d'être satisfaisant puisqu'il est possible que le ministère ou l'État conteste une décision de la CNDP...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Sur la décision d'organiser ou non un débat.

L'essentiel, c'est l'indépendance. Par rapport à qui ? À quoi ? Ingénieur des ponts, préfet pendant onze ans, je n'ai pas la même onction de l'indépendance qu'un magistrat. C'est la diversité des instances de nomination et la collégialité de la prise de décisions qui garantissent l'indépendance et l'impartialité de notre commission. Ses membres sont nommés selon dix-neuf procédures distinctes : certains sont élus par leurs pairs, d'autres nommés, par les présidents des assemblées, le ministre ou encore des associations d'élus... Difficile, dans ces circonstances, d'assurer la parité homme-femme.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Peut-on imposer au Conseil d'État, à la Cour des Comptes ou à la Cour de Cassation d'élire en son sein une femme - ou un homme ? Consulté, le Secrétaire général du Gouvernement estime que cela ne serait pas anticonstitutionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Le monde change...

La première valeur de la CNDP est la transparence : les citoyens doivent avoir accès à l'ensemble des informations disponibles. Nous veillons à ce que le débat public procède par échange d'arguments : il ne s'agit pas d'un référendum ou d'une enquête d'opinion, mais de mesurer la puissance des arguments. Nous devons être indépendants vis-à-vis du maître d'ouvrage, qu'il s'agisse de l'État ou d'une entreprise privée. Enfin, impartialité et neutralité sont indispensables : sans elles, la CNDP perd sa raison d'être. Cette indépendance se mesure dans les comportements, les comptes rendus, les bilans que je rédige.

Nous avons organisé le 6 juin dernier un débat citoyen planétaire sur les cinq grands thèmes de la COP 21, en partenariat avec le secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), la fondation Danish Board of Technology (DBT) et Missions publiques. Dans 76 pays, 97 débats ont rassemblé plus de dix mille citoyens autour d'échanges d'une grande richesse. Il importait, en Inde ou en Chine, qu'ils soient organisés par des organismes indépendants et n'émanent pas du gouvernement.

Il y a une formidable attente des Français en matière de participation. Notre colloque de juin dernier sur « Le citoyen et la décision publique » a montré que, selon des enquêtes de TNS-Sofres, plus de 90 % de nos concitoyens souhaitaient être consultés directement avant toute décision publique : c'est la première des six propositions formulées pour améliorer le fonctionnement de notre démocratie. Ils souhaitent des garanties de neutralité : ceux qui organisent le débat public ne doivent pas être parties prenantes à la décision. Pour 57 % des Français, l'organisation du débat public doit être confiée à une AAI ; pour 16 %, au Gouvernement ; pour 12 %, à une société privée ; pour 8 %, à un organisme dépendant du Gouvernement et pour 6 % au Parlement.

Les membres des commissions particulières et les garants désignés par la CNDP signent une charte d'éthique et de déontologie, renforcée en mai 2015 : il faut désormais n'avoir pris aucune position publique sur des sujets en lien avec l'objet du débat au cours des trois années précédentes. J'ai eu deux fois à conseiller à un membre de démissionner, car, comme l'écrit le doyen Gélard, l'impartialité et l'indépendance doivent se donner à voir : il ne peut y avoir le moindre doute, sauf à porter atteinte à l'ensemble du processus.

Ce qui est en jeu, c'est la légitimité de la décision publique, le rapport entre le citoyen, l'expert et le décideur politique, le débat entre enjeux de court et de long terme, bref, le fonctionnement de notre démocratie, à un moment où la défiance envers les institutions et la parole publique atteint des niveaux inédits. Il s'agit de fonder une gouvernance publique fondée non sur les rapports de force mais sur l'écoute, la co-construction de l'intérêt général, seule à même de redonner confiance. Le sociologue Michel Callon disait du débat public : « ce qui s'y joue de plus profond, c'est la reconstruction du lien social, à partir de l'existence reconnue de minorités ». La légitimité d'une décision dépend de ses conditions d'élaboration. Transparence, rigueur et impartialité sont indispensables pour éviter conflits et blocages, et garantir une mise en oeuvre rapide des décisions. De ce fait, fonctionnement démocratique et efficacité économique sont liés. Pour que le citoyen retrouve confiance, le débat doit avoir lieu suffisamment tôt, en amont de la décision, alors qu'il y a encore des alternatives. Il doit disposer d'expertises indépendantes du maître d'ouvrage. Ce que le Conseil d'État a appelé en 2011 la démocratie délibérative doit aboutir à une action publique transparente et collaborative, comme l'a indiqué le Président de la République lors de la présentation du plan pour la France 2015-2017, dans le cadre du partenariat pour un Gouvernement ouvert, dont la France assurera la présidence l'an prochain. Nous avons lancé 21 chantiers et formulé de nombreuses propositions innovantes dans le groupe de travail présidé par M. Alain Richard sur la modernisation et la démocratisation du dialogue environnemental.

Pourquoi votre commission doit-elle être une AAI pour exercer sa mission ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Je crois avoir répondu dans mon propos liminaire. Si, par exemple, des opposants demandent une expertise complémentaire sur la liaison ferroviaire entre Rennes et Nantes qui doit desservir Notre-Dame des Landes, mieux vaut que la CNDP ne soit pas un service administratif sous l'autorité du ministre : cela évite à ce dernier d'avoir à refuser, ce qui ne contribuerait pas à la sérénité du débat, ou à accepter, ce qui serait désavouer ses services. Le statut d'AAI nous donne plus de liberté. De fait, il est rare que nous n'acceptions pas les demandes de débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Dans certains pays démocratiques, de telles structures relèvent du ministère du développement durable. C'est le cas au Québec.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Le bureau d'audiences publiques sur l'environnement est proche de la CNDP mais donne un avis sur les projets, contrairement à nous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Pourquoi sollicitez-vous la transformation de votre commission en autorité publique indépendante ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Parce que nous ne pouvons pas ester en justice. Le ministère de l'écologie, qui assure notre défense, peut donc être à la fois demandeur et défenseur. Il semblerait toutefois, selon des études juridiques, que certaines AAI puissent ester en justice, si cela est prévu dans les textes.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Autre argument : notre financement. Nous n'obtiendrons certes pas de recettes affectées. L'indemnisation du président d'un débat public est plafonnée à 9 200 euros bruts, pour un travail à tiers temps sur un an. Pour un membre de la commission, le plafond est de 6 800 euros bruts - huit fois moins qu'au Québec. Pour le reste, le débat public est financé directement par le maître d'ouvrage. Le secrétaire général du débat est un de ses salariés, ce qui n'est pas satisfaisant. C'est pourquoi je propose que les maîtres d'ouvrage financent collectivement un fonds que la CNDP utiliserait pour organiser des débats, sur le modèle du fonds d'indemnisation des commissaires enquêteurs (Fice), géré par la Caisse des dépôts. Ils y sont tous favorables, car l'économie réalisée atteindrait 15 %. De même, il est incompréhensible que les garants que nous désignons soient indemnisés par le maître d'ouvrage. Il va y être prochainement remédié.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Être hébergé dans les locaux du ministère du développement durable, boulevard Saint-Germain, fait-il entrave à votre indépendance ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Cela ne me semble pas poser problème. Nous sommes une équipe réduite. Le site qui nous héberge, au 244 boulevard Saint-Germain, accueille de nombreuses autres institutions, ce qui permet des économies d'échelle.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Pourquoi pas ? Actuellement, la mutualisation des moyens avec l'ACNUSA, notamment, permet un bon rapport coût-efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

La composition du collège vous donne-t-elle satisfaction ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Oui. Nous nous réunissons le premier mercredi de chaque mois. Avec 25 membres, il est rare que nous soyons au complet. Souvent, tous les 25 ne sont pas tous nommés. Le représentant du Sénat a ainsi démissionné car nous nous réunissons en même temps que vos commissions, le mercredi matin....

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Un journaliste bien intentionné a voulu démontrer que les sénateurs ne travaillaient pas.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Pas seulement les sénateurs...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

C'est typique de la démarche de certains médias. Que vous ne soyez pas toujours au complet n'a rien de dramatique. À l'Académie française, il y a toujours des sièges vacants !

Quel est l'apport des membres issus du Conseil d'État, de la Cour de Cassation et de la Cour des Comptes ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Il est très important. Le membre du Conseil d'État nous aide sur les questions juridiques...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Les recours sont désormais formés devant le tribunal administratif de Paris.

Le membre issu de la Cour de Cassation ayant démissionné, une nouvelle assemblée générale a désigné son remplaçant parmi quatre candidats : une ancienne juge pour enfants, sensible à ce titre à la problématique de la légitimité des décisions difficiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il n'y a pas de commission nationale du débat judiciaire...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Une décision publique fait toujours des gagnants et des perdants. Le débat public permet non de trouver un consensus mais de voir qui est perdant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous y viendrons. Parmi vos membres, certains, issus des grands corps de l'État, cumulent un nombre de présidences et de participations à des collèges divers qui force l'admiration...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Les représentants des trois grands corps assistent quasiment à toutes nos séances. Nos membres reçoivent une indemnité de 152 euros par séance - or les dossiers à étudier sont parfois compliqués et impliquent un travail en amont.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ce n'est pas l'appât du gain qui les motive...

Ne voyez-vous pas de problème à ce que l'un de vos vice-présidents soit passé du jour au lendemain, le 7 mars 2013, du poste de directeur adjoint du cabinet de la ministre du logement à la vice-présidence de votre commission ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Je n'ai aucun rôle dans la nomination des vice-présidents.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Actuellement, les trois membres permanents sont : un spécialiste de l'environnement, une universitaire experte de la participation du public et de la consultation numérique et moi-même, qui ai un profil d'aménageur. Avoir été au service de l'État pendant toute ma carrière me prive-t-il de l'indépendance requise ? J'ai été maître d'ouvrage entre 1989 et 1999, époque où l'on a construit quelque 4500 km d'autoroutes. C'est un atout pour dialoguer avec les maîtres d'ouvrage et les pousser dans leurs retranchements. Et puis ma carrière est faite, je ne demande rien à personne. Ce trio est équilibré, et je propose d'ailleurs de remplacer l'universitaire, qui nous quitte, par une personne au profil semblable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Vous ne répondez pas à ma question. Estimez-vous normal que le directeur adjoint de la ministre du logement - Cécile Duflot à l'époque - soit devenu vice-président de la CNDP ? Je ne sais pas où en était le débat sur Notre-Dame des Landes à ce moment, mais cela pose un problème...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Le sujet de Notre-Dame des Landes a été traité par la Commission en 2003. Les nominations sont prévues par les textes, je n'y prends pas part.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Mais vous pouvez avoir un avis. L'un des membres de votre commission a siégé entre 2004 et 2010 et siège de nouveau depuis 2012. N'est-ce pas trop longtemps ? Il a eu des problèmes judiciaires en tant que faucheur volontaire. Est-ce compatible avec la neutralité de votre commission ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Les membres sont nommés pour cinq ans et le mandat est renouvelable une fois. La personne que vous évoquez quittera donc la commission dans quelques mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Avec un tel sens de la diplomatie, vous auriez dû être ambassadeur et non préfet !

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Aucun membre n'a un poids déterminant et la plupart des décisions sont prises sans vote. La diversité est une richesse.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Encore faut-il que cette diversité soit réelle. La CNDP a organisé un débat public sur les nanotechnologies à la demande du Gouvernement en 2009 et 2010. Apparemment, ce fut un fiasco. En avez-vous tiré les enseignements ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

J'étais alors préfet de Basse-Normandie. Des groupes organisés ont empêché la plupart des réunions publiques. J'ai pris les mesures nécessaires pour que le débat ait lieu, à Caen. Sur le Cigéo, aucune réunion publique n'a pu se tenir, les opposants au débat empêchant même les opposants au projet de s'exprimer. Nous avons donc utilisé d'autres méthodes : débats interactifs sur Internet, partenariats avec la presse locale, conférences de citoyens... Cette dernière méthode, inspirée de ce qui se pratique dans les pays nordiques, a consisté à former de manière contradictoire dix-sept citoyens, qui n'étaient pas engagés, pendant plusieurs week-ends. Ils ont ensuite rédigé une note douze pages, qui a surpris le président de l'Autorité de sûreté nucléaire par sa pertinence. Preuve que les citoyens peuvent apporter un éclairage pertinent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Cela dépend aussi des pièces qui leur sont fournies...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Un comité de pilotage, composé de six personnes, et un comité d'évaluation, composé de trois universitaires, dont un Italien, surveillaient le processus. Tout a été publié.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Qu'il ne fallait pas passer directement à la phase industrielle, mais prévoir un délai d'expérimentation. C'est pourquoi l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) a rééchelonné le processus et prévu une phase pilote de quelques années.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Qui sont ceux qui s'opposent au débat et pourquoi le font-ils ? Comment débattre avec eux ? S'agit-il d'associations ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Oui, locales et nationales. Je les ai reçus. Pour être crédibles, nous devons lancer des débats publics lorsque les alternatives existent. Le stockage profond dans l'argile était décidé depuis la loi de 2006. Idem pour l'éolien en mer : les zones propices sont définies, les appels d'offres ont été lancés, un lauréat a été choisi... Le débat public arrive trop tard. Les pêcheurs de Dieppe-Le Tréport ont beau signaler que la zone est très mal choisie, le maître d'ouvrage ne peut plus rien changer. Il aurait mieux valu que le débat public intervienne au moment du choix entre plusieurs zones, et ensuite l'appel d'offres. Les trois quarts des Français estiment que lorsqu'on lance un débat public, la décision est déjà prise. Personnellement, je n'en souhaitais pas sur l'éolien marin à Dieppe-Le Tréport, car il ne pouvait porter sur l'opportunité du projet. Mais il y en avait eu à Courseulles-sur-Mer, Saint-Brieuc, Saint-Nazaire et Fécamp, et l'opposition était la plus forte à Dieppe-Le Tréport. Il ne faut pas faire des débats publics pour tout, et n'importe quand !

Autre problème : entre la conception du projet et sa réalisation, le délai est si long - parfois quarante ou cinquante ans ! - que les conditions ont changé. Or il est très difficile de remettre en cause un projet sur lequel on travaille depuis vingt ans, même quand il ne correspond plus aux besoins. Dans un récent article, intitulé « État de droit et légitimité des décisions », je montrais comment certains citoyens ont le sentiment de n'être jamais entendus. Je ne parle pas de ceux qui s'opposent à toute évolution la société, mais de ceux qui sont de bonne foi. À force de se sentir méprisés, ils sont prêts à utiliser tous les moyens pour empêcher le projet de se faire. L'objet du débat public est que les opposants ne considèrent pas la décision comme illégitime. Ils défendent parfois des intérêts légitimes ! Pendant le débat, très sensible, sur Cigéo, le maître d'ouvrage a été très maladroit. Même s'il avait raison, il s'est mis dans son tort en annonçant qu'il continuait à avancer sur le projet. Aujourd'hui, il faut co-construire l'intérêt général : prenons plus de temps pour prendre les décisions, elles en seront plus riches. Jean-Pierre Duport, ancien préfet de la région Île-de-France, faisait remarquer combien les ingénieurs de RFF avaient évolué après avoir été confrontés aux citoyens au cours des débats publics. C'est une excellente chose.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Les dossiers sont ralentis à l'excès par la multiplication des procédures. Chez nos voisins, les choses vont plus vite ! Ancien directeur des routes, vous savez qu'il est plus facile de faire une route là où il n'y a pas d'habitants... mais ce n'est pas là qu'on les fait ! Êtes-vous pour la suppression des enquêtes publiques ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Au moment de l'enquête publique, tout est déjà décidé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Je connais pourtant des projets qui ont échoué suite aux avis des commissaires enquêteurs.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

C'est rare.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Vous n'intervenez pas sur le fond des dossiers mais organisez un échange d'arguments. Quel est la plus-value par rapport aux enquêtes publiques ? On ne compte plus les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou les schémas de cohérence territoriale (SCoT) que celles-ci ont arrêtés.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Sur les grands projets, c'est plus rare. Les citoyens souhaitent s'exprimer avant les grandes décisions, pas quand tout est réglé.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Qu'importe que les décisions soient déjà prises, puisque vous n'intervenez pas sur le fond ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

On ne lance pas un débat public tant que les données ne sont pas suffisamment claires pour tout le monde. Les dossiers des enquêtes publiques sont d'une complexité qui dépasse parfois les ingénieurs des ponts ! Certes, les procédures ont été multipliées, notamment sous l'influence des directives européennes ; la France a tendance à en faire plus que ses voisins en la matière. Mais la multiplication des comités Théodule ne suffit pas pour que les citoyens aient le sentiment de participer aux débats.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

D'où l'intérêt de supprimer certaines commissions...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

En effet, les citoyens n'y comprennent plus rien. C'est aussi l'objet de la commission présidée par Alain Richard sur la simplification du droit de l'environnement. Attention, toutefois, à ce que l'objectif de réduction des délais ne conduise pas à limiter les échanges avec le public. C'est le contraire qu'il faut faire !

Il faut lutter contre la sur-notabilisation des commissions, toujours composées des mêmes experts qui ne représentent pas les citoyens.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

À quoi a servi, par exemple, le débat public sur la LGV au Sud de Bordeaux ? Il a coûté très cher. J'étais contre ce projet, je le reste, et ce débat ne m'a apporté aucune satisfaction.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Vous avez raison, les débats coûtent trop cher, entre 800 000 et 1 million d'euros en moyenne depuis 2002. Nous réduisons leur coût : les deux prochains que nous organisons, sur les Center Parcs de Poligny et du Rousset, coûteront en tout moins de 500 000 euros. D'ailleurs, les réunions en petits groupes sont plus efficaces que des grand-messes, propices aux jeux de rôles. Sur le projet de RER entre Hénin-Beaumont et Lille, nous organisons quarante réunions de proximité pour rencontrer les jeunes défavorisés du bassin minier, afin de promouvoir une démocratie de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Les élus servent tout de même à quelque chose. Pour eux, la sanction, c'est l'élection !

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Il s'agit de redonner à la décision publique toute sa légitimité. Mais pourquoi l'a-t-elle perdue ? Pourquoi la démocratie représentative ne fonctionne-t-elle plus ? À vous entendre, on se croirait au temps de la Grèce antique, de la démocratie directe. Dans la démocratie participative, le nombre des personnes consultées est inversement proportionnel à celui des décideurs... J'ai bien suivi le dossier de la LGV Méditerranée. C'est le plus mauvais projet - le tracé dit « des métropoles » - qui l'a emporté : il coûte si cher qu'il est irréalisable. Son seul avantage est d'apporter à certains grands élus une satisfaction narcissique. Comment mieux articuler débat et prise de décision ? Qui a la légitimité pour celle-ci ? Votre commission n'a-t-elle pas un rôle essentiellement cathartique ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Qui sont les opposants ? Pour un projet d'infrastructure linéaire, d'abord ceux qui sont touchés directement. Certains plaident pour la décroissance. Enfin, d'aucuns contestent l'évolution de notre société, par exemple à l'occasion des projets de Center Parcs, qui mobilisent de l'argent public.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

N'ont-ils pas de représentants ? Comment rendre la décision plus légitime ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Le dossier doit être compréhensible et indiquer clairement qui prend les décisions. Pour Cigéo, cela n'est pas évident...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Je souhaite que le maître d'ouvrage soit contraint de répondre par des engagements précis aux arguments soulevés pendant le débat. La transparence du processus est plus importante que tout. Il y aura toujours des personnes en désaccord, mais il faut qu'ils soient convaincus d'avoir été entendus. Or les maîtres d'ouvrage balayent parfois les arguments d'un revers de main, je l'ai constaté au cours de ma carrière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ainsi, lorsque vous occupiez les plus hautes fonctions dans l'administration, vous ne teniez aucun compte de l'avis de vos concitoyens ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Parfois...

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Si c'est le cas, il faut tout démolir !

Il faut entendre tout le monde, y compris la population locale qui veut que son territoire vive : le projet de Centre Parcs dans l'Isère représente un espoir d'emploi et de développement économique.

L'administration envoie souvent une réponse-type, nous le constatons. Il faudrait que la haute fonction publique qui nous gouverne fasse correctement son travail. Je regrette que vous ne l'ayez pas dit plus souvent lorsque vous étiez en activité.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Ce n'est pas le cas général, même s'il y a des exemples. Il y a des maîtres d'ouvrage qui évoluent à l'issue du débat public. Mais il y a assurément des progrès à faire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Vaspart

Il y a les grands projets, mais aussi les petits, tout aussi bloqués. Maire depuis 24 ans, conseiller général, je sais que nous faisions avancer les dossiers plus vite autrefois. Il faut certes écouter les opposants, mais en présence d'une large majorité, chacun doit prendre ses responsabilités. Notre pays est bloqué. Le pouvoir a été transféré des élus à d'autres. Il est grand temps que nous le reprenions, sur les territoires et au niveau national - j'espère que le Sénat y contribuera, pour la prochaine législature.

J'ai été surpris de vos propos. Le port de Saint-Cast, le chemin piéton qui longe le littoral de cette commune, le golf d'Aucaleuc, ont été des parcours du combattant ! Le projet Pierre et Vacances a été empêché par un conseiller d'État qui a une maison en face. C'est toujours ainsi.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Cela existe aussi sur le Bassin d'Arcachon. Ce qui motive la création de cette commission d'enquête, c'est le démembrement de l'autorité de l'État.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Je suis totalement d'accord avec le sénateur Vaspart. Mais dans notre société, il est important de dialoguer avec les gens, y compris avec les opposants.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Mais nous, élus, ne faisons que cela ! Sinon, nous ne serions pas élus !

Debut de section - PermalienPhoto de Louis-Jean de Nicolay

Merci à M. Leyrit pour son travail sur le 1 % paysage et développement. Je me suis occupé de l'autoroute A 28, bloquée par un pique-prune pendant huit ans à cause de Dominique Voynet ; il a été sauvé par le 1 % et une bonne collaboration avec Cofiroute. Membre de la commission supérieure des sites, j'ai eu à connaître du dossier de Roland-Garros : à aucun moment, le débat public n'a été mentionné... C'est inquiétant. J'espère que le promoteur ne se targue pas d'un débat public tenu il y a cinq ou six ans sans en présenter les conclusions, et que cette consultation obligatoire n'est pas là uniquement pour que les gens aient eu l'occasion de se plaindre...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Sur Roland-Garros, il a été décidé de faire une constatation recommandée, sans débat public. Pour la sérénité des débats, il est préférable que l'organisateur du débat ne soit pas le maître d'ouvrage lui-même.

J'ai dû mal m'exprimer : précédemment, le débat public se traduisait par des réunions publiques, des grands-messes, où les participants sont à 95% des opposants, qui en font une tribune. Aujourd'hui, nous allons à la rencontre des gens concernés par le projet pour prendre en compte l'ensemble des points de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Dans cette affaire de TGV, j'ai demandé quelle était l'expertise de l'État : il n'en avait pas, faute de moyens - seule la SNCF assurait l'expertise. Que les porteurs du projet organisent ou financent le débat public car ils sont les seuls à en avoir les moyens intellectuels traduit un désengagement de la puissance publique, dont le rôle ne fut pas négligeable au cours des derniers siècles.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Les missions de l'État ont évolué, ne serait-ce que depuis vingt ans, de même que sa capacité à avoir une expertise technique.

La quasi-totalité des recours portent sur la décision de ne pas réorganiser un débat public. En effet, la CNDP est saisie à nouveau si l'enquête publique n'est pas intervenue dans les cinq ans, délai qui me parait trop court. Si le projet n'a pas connu de changement majeur, nous décidons généralement qu'il n'y a pas lieu d'organiser un second débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Nous ne pouvons pas vous laisser partir sans vous interroger sur Notre-Dame des Landes ! Que s'est-il passé ? Quel est votre sentiment ?

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Le débat public a eu lieu en 2003...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

L'enquête publique a eu lieu en 2008, et l'enquête au titre de la loi sur l'eau en 2013. Dans un projet aussi long, il aurait fallu un continuum dans le dialogue, donc dans la confiance. Je ne connais pas grand-chose au dossier, sinon que, alors vice-président du Conseil général de l'environnement du développement durable, j'avais dû organiser une contre-expertise et alimenter la commission du dialogue constituée par le Premier ministre d'alors. C'était difficile, après des années d'absence de dialogue. Des conflits aussi violents et aussi longs sont préoccupants, voire dramatiques, pour notre État de droit. Pour en sortir, il faut plus de dialogue, d'écoute et de compensation. Par construction, nous ne nous prononçons pas sur le fond ; mais les opposants ont des arguments audibles, qui sont peut-être restés sans réponse ; ajoutez à cela les gagnants et les perdants...

Un éminent parlementaire m'a dit à propos de Cigéo : « quand j'entends un expert nucléaire, je n'ai pas d'avis ; quand j'en entends deux, je commence à en avoir un. » Les citoyens ont besoin d'avoir une expertise indépendante du maître d'ouvrage. En Allemagne, il y a, semble-t-il, deux grands bureaux d'études sur le nucléaire, l'un qui travaille plus avec le gouvernement et l'autre avec les associations.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Dire que des points de vue différents doivent être exposés au citoyen n'est pas faire injure au porteur de projet - je l'ai été pendant des années. Les brillants ingénieurs ne garantissent pas qu'un projet soit le meilleur du point de vue de l'utilité collective. Les territoires aussi ont une expertise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Il est normal que chacun souhaite s'exprimer : je m'étonne que les citoyens ne soient que 90 % à le dire, et non 100 % ; je n'ai pas besoin de l'Ifop pour le savoir ! L'important est de dégager une opinion majoritaire - privilège de la démocratie représentative. Certains projets font forcément des mécontents, mais doivent néanmoins être réalisés par la puissance publique dans l'intérêt général.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Mézard

Ils doivent être réalisés dans l'intérêt du plus grand nombre, quitte à en compenser les conséquences négatives pour certains.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Absolument ! Mais ce sera plus facile de l'imposer s'il y a eu dialogue et confiance.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

L'intérêt général n'a jamais été la somme des intérêts particuliers. Il faut, à un moment donné, que chacun prenne ses responsabilités, comme nous, élus, les prenons devant nos électeurs. Je ne remets pas en cause l'existence de votre AAI ; mais il faut savoir où l'on met le curseur.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

C'est aux décideurs de décider, nous apportons un éclairage. Les citoyens ont parfois l'impression que les décisions sont prises par deux ou trois personnes. Le processus est aussi important que la décision en elle-même.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Les décisions sont prises par l'État, les entreprises publiques dont il est actionnaire, les collectivités...

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

L'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) propose que la CNDP intervienne dans le domaine de la santé. Le président du Sénat s'est dit désireux, sur certains sujets complexes, que la CNDP organise des conférences de citoyens, très développées en Europe du Nord, et qui apportent un éclairage beaucoup plus riche qu'un simple sondage.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Cela peut concerner une filière, une technique, quand le sujet n'est pas conflictuel... pas forcément un dossier particulier.

Debut de section - Permalien
Christian Leyrit, président de la Commission nationale du débat public

Je n'oppose jamais démocratie participative et démocratie représentative.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

La démocratie participative n'est-elle pas devenue un cache-misère du dysfonctionnement de notre démocratie représentative ? Avec la concentration des pouvoirs à l'Élysée, le reste des acteurs fait de la figuration. Nous vivons la fin d'un système. Les décisions se prennent ; par qui ? Quand ? Elles se prennent en douceur. Mais le bon peuple n'apprécie pas beaucoup ces procédés, ce qui crée un malaise. Dès lors, il suffit de déplacer une motte de terre pour déclencher une révolution. Avec l'amplification par les médias, vous êtes parti pour dix ans !

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Voilà en tout cas un beau débat public ! Merci d'avoir joué le jeu.

La réunion est levée à 18 h 10