La réunion

Source

Puis la commission procède à l'examen du rapport de MM. François Patriat et Jean-Claude Requier, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Travail et emploi » et compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage », et entend leur communication sur le contrôle relatif aux écoles de la deuxième chance.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Selon Pôle emploi, le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie A - sans aucune activité - a diminué de 23 800 au mois de septembre dernier ; il faut remonter à juin 2006 pour trouver une baisse supérieure. Cette diminution est particulièrement marquée chez les moins de 25 ans : - 2,6 %. Je ne dis pas qu'il s'agit du retournement de la courbe du chômage. Mais c'est une bonne nouvelle marquant que la politique du Gouvernement commence à porter ses fruits.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Le budget 2016 de la mission « Travail et emploi » s'inscrit dans la continuité. Doté de 11,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et de 11,4 milliards d'euros en crédits de paiement, les crédits sont donc maintenus à un haut niveau en 2016.

Ses trois priorités sont l'emploi des jeunes, l'accompagnement des personnes les plus éloignées de l'emploi et le soutien aux PME et TPE. Les dispositifs en faveur de l'emploi et de l'insertion des jeunes seront consolidés. La garantie jeunes sera dotée de près de 300 millions d'euros en autorisations d'engagement et de plus de 270 millions d'euros en crédits de paiement, afin de financer l'entrée de 10 000 jeunes supplémentaires dans le dispositif, soit 60 000 bénéficiaires en 2016. Les crédits de l'établissement public d'insertion de la défense (Épide) seront augmentés pour financer 570 places supplémentaires, conformément à l'engagement du président de la République. Les crédits des écoles de la deuxième chance (E2C) seront maintenus à hauteur de 24 millions d'euros.

Pour accompagner les personnes les plus éloignées de l'emploi, 590 millions d'euros seront consacrés aux structures de l'insertion par l'activité économique.

Par ailleurs, dans le prolongement des mesures prises en faveur des demandeurs d'emplois âgés de plus de soixante ans depuis le début du quinquennat, la prime transitoire de solidarité (PTS) permet, depuis le 1er juin 2015, de faire bénéficier, sous certaines conditions, les demandeurs d'emploi bénéficiaires de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) ou du revenu de solidarité active (RSA) nés entre le 1er janvier 1954 et le 31 décembre 1955, d'une prime de 300 euros par mois jusqu'à la retraite. Le nombre de contrats aidés financés en 2016 sera maintenu à un niveau élevé : 295 000 seront créés, en lien avec les évolutions attendues de l'économie et du marché de l'emploi.

Dans le prolongement du plan « Tout pour l'emploi dans les TPE et les PME » lancé par le Premier ministre en juin dernier, un effort particulier sera consenti en faveur de l'apprentissage avec la création de l'aide « TPE-Jeunes apprentis » de 4 400 euros versée la première année aux entreprises de moins de onze salariés recrutant un apprenti de moins de 18 ans. Plus de 277 000 entrées en apprentissage sont programmées contre 265 000 en 2015, soit un renversement de la courbe. L'aide « TPE embauche premier salarié » encouragera certaines des 1,2 million d'entreprises sans salarié à recruter.

Les moyens consacrés au service public de l'emploi seront préservés. La subvention pour charges de service public sera quasi stable à 1,5 milliard d'euros, pour un accompagnement renforcé des publics les moins autonomes, dans la lignée des recommandations formulées dans le rapport de la Cour des comptes de septembre 2015.

Le budget initial consacré aux maisons de l'emploi prévoyait une diminution de moitié de leurs crédits à hauteur de 13 millions d'euros. L'Assemblée nationale l'a cependant abondé de 8 millions d'euros supplémentaires. Ce rééquilibrage me semble justifié.

Le projet de budget prévoyait un maintien des crédits de fonctionnement des missions locales, importantes pour accompagner les jeunes. L'Assemblée nationale a abondé ces crédits à hauteur de 12 millions d'euros supplémentaires, compte tenu du renforcement de leurs missions, notamment en matière d'accompagnement des bénéficiaires de la garantie jeunes. Cette initiative me semble bienvenue.

Ce budget de sortie de crise accompagnera les publics les plus fragiles. Je vous propose donc l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » et du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » sans modification.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Avec plus de 11 milliards d'euros en autorisations d'engagement comme en crédits de paiement, le budget de la mission « Travail et emploi », que présentait le Gouvernement, est préservé. La conjoncture économique et sociale appelait l'État à maintenir son soutien à l'emploi et je me félicite des choix du Gouvernement. Ce budget accompagnera la reprise en finançant des dispositifs en faveur des jeunes, des seniors et des personnes les plus éloignées du marché du travail.

Ce budget responsable fait des choix assumés. La mission « Travail et emploi » participera à l'effort de redressement de nos comptes publics. La réduction des dépenses d'intervention dans le contexte actuel n'aurait pas été responsable, c'est pourquoi les dépenses de fonctionnement et les dépenses de personnel ont été réduites. Conformément à la norme gouvernementale de réduction des crédits de fonctionnement, les dépenses du ministère diminueront de 7 % en autorisations d'engagement et de 5 % en crédits de paiement. Des efforts particuliers en matière de politique des achats seront réalisés avec la poursuite du regroupement au niveau central des services supports du ministère du travail, de l'emploi de la formation professionnelle et du dialogue social, et du ministère des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, sous l'égide du secrétariat général. Les dépenses afférentes aux affaires immobilières seront réduites de près de 30 % en autorisations d'engagement et stables en crédits de paiement. Les dépenses de personnel diminueront de 4,5 millions d'euros en 2016 avec la suppression de 192 postes. Il convient de souligner cet effort significatif.

Des chantiers importants en matière de dialogue social seront poursuivis en 2016, dernière année de mesure de l'audience syndicale, qui verra l'organisation de l'élection dans les très petites entreprises ; près de 15 millions d'euros en autorisations d'engagement et 16 millions d'euros en crédits de paiement seront consacrés à ce rendez-vous. En application de la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et au dialogue social, un mécanisme de mesure de l'audience des organisations patronales a été mis en place. Les premiers résultats seront connus en 2017, en même temps que la deuxième mesure de la représentativité syndicale.

L'année 2016 sera la deuxième année de mise en oeuvre du fonds paritaire destiné au financement des organisations syndicales et patronales, dont la réforme était nécessaire. Le dispositif, doté de 33 millions d'euros en crédits de paiement, semble garantir un système plus transparent et plus satisfaisant. Ces crédits prendront aussi en charge la formation des salariés appelés à exercer des responsabilités syndicales ainsi que la participation des partenaires sociaux à la conception, à la mise en oeuvre et au suivi des politiques publiques du travail et de l'emploi.

Le budget de la mission « Travail et emploi » s'inscrit donc dans la cohérence par rapport à l'action menée depuis 2012 et aux priorités du Gouvernement, notamment l'emploi des jeunes. Les orientations du Gouvernement comme les choix effectués vont dans le bon sens, celui de l'accompagnement de la reprise économique. Je vous propose à mon tour d'adopter ces crédits sans modification.

Nous avons, avec François Patriat, réalisé un contrôle sur les écoles de la deuxième chance. Créées dans le prolongement du livre blanc « Enseigner et apprendre - vers la société cognitive » de la Commission européenne présenté lors du Conseil européen de Madrid de décembre 1995, elles accueillent chaque année, sur 107 sites, plus de 14 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans sortis du système scolaire et rencontrant la plupart du temps d'importantes difficultés scolaires et sociales, et les aident à définir un projet professionnel adapté à leur profil et à leurs aspirations. Elles reposent sur une organisation originale, chacune d'entre elles jouissant d'une très grande autonomie, mais devant faire l'objet d'une labellisation pour assurer une certaine homogénéité sur l'ensemble du territoire.

Les auditions réalisées - notamment celle d'Édith Cresson, ancienne Premier ministre, présidente de la fondation des Écoles de la deuxième chance - et un taux de sortie positive de près de 60 % nous ont convaincus de l'utilité de ce dispositif.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Alors que 150 000 jeunes quittent le système scolaire sans diplôme ni qualification chaque année, il nous semblait important de réaliser un contrôle budgétaire sur ce dispositif. Les écoles de la deuxième chance sont une goutte d'eau au sein de la mission « Travail et emploi », avec des crédits de 24 millions sur 11 milliards d'euros, et un dispositif largement méconnu. Cinq pistes sont à envisager.

Il faudrait renforcer et institutionnaliser la coordination des dispositifs de lutte contre le décrochage scolaire et entre les écoles. Une multitude d'initiatives en faveur des décrocheurs scolaires coexistent sans dialogue institutionnalisé entre elles. Au-delà des échanges informels, des mutualisations seraient possibles - par exemple les bénéficiaires de la garantie jeunes pourraient profiter des compétences des E2C pour la remise à niveau scolaire. Une seule structure de référence d'orientation et de structuration de l'offre en faveur des décrocheurs devrait être identifiée, notamment en renforçant les plateformes de suivi et d'appui aux jeunes décrocheurs. L'autonomie des écoles a pour contrepartie la faible mutualisation des pratiques et de certaines fonctions entre les structures. Le réseau devrait regrouper certaines fonctions - notamment administratives - au sein d'un seul établissement, ce qui déchargerait des personnels déjà fortement sollicités.

Améliorer la visibilité du dispositif serait nécessaire. La plupart des jeunes intégrant une E2C ont été orientés par les missions locales ; les candidatures spontanées demeurent marginales. La communication à destination des établissements scolaires et des jeunes doit être renforcée. L'attestation de compétences acquises remise en fin de « scolarité » en E2C ne jouit actuellement d'aucune reconnaissance juridique. Elle devrait être inscrite à l'inventaire de la Commission nationale de la certification professionnelle afin d'être mieux reconnue par les chefs d'entreprises.

Si le suivi des anciens stagiaires par les écoles - faiblesse majeure de ce dispositif - est obligatoire, il est en réalité très hétérogène, allant du simple appel téléphonique à un suivi individuel et renforcé. Un effort d'harmonisation devrait être poursuivi afin de renforcer l'accompagnement des jeunes sortis du dispositif.

Le suivi même du dispositif peut être amélioré : actuellement, l'autorité de tutelle dépend entièrement des informations remontées par le réseau. La nouvelle convention pluriannuelle d'objectifs 2016-2018 devrait être l'occasion de définir des indicateurs de suivi permettant à l'ensemble des financeurs (État, régions, etc.), dans le cadre d'un dialogue de gestion renforcé, de connaître l'activité de chaque établissement ainsi que sa situation financière.

Il nous semble en outre nécessaire de poursuivre le développement territorial du réseau : pour des raisons historiques, l'ouest et le sud-ouest de la France comportent très peu de structures. La première école a ouvert à Marseille et le dispositif a peu à peu essaimé. Pour des raisons politiques, certains exécutifs régionaux n'ont pas souhaité accompagner ce type de projets. En Bourgogne, nous avons créé une école dans chaque département de la région. L'augmentation du nombre de places décidée par le comité interministériel à l'égalité et à la citoyenneté du 6 mars 2015 doit permettre d'étendre le réseau pour une couverture plus homogène du territoire.

La structure du financement des E2C est mixte. Sur un budget total de 75,6 millions en 2013, l'État apporte 20 % des financements, les régions près d'un tiers, le reste étant réparti entre le fonds social européen (FSE), la taxe d'apprentissage et diverses recettes. Si la plupart des écoles présentent une situation financière saine, certaines d'entre elles, notamment situées en région parisienne, connaissent d'importantes difficultés de trésorerie du fait de modalités de répartition de la taxe d'apprentissage et de versement des aides du FSE mal interprétées ou appliquées de manière hétérogène.

L'interprétation de certains organismes collecteurs peut se traduire par une diminution du montant de la taxe perçu par les E2C. Après avoir nié cette difficulté, le ministère a reconnu que des organismes collecteurs avaient donné une interprétation erronée de ces règles à leurs interlocuteurs. Il a donc adressé un courrier à l'ensemble d'entre eux. Cette initiative, nécessaire, n'est pas suffisante. Une circulaire serait plus appropriée pour fixer clairement les modalités de répartition de la taxe d'apprentissage, pour éviter toute ambiguïté.

Dans la précédente programmation, les aides du FSE étaient gérées par les directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (Direccte) dont l'intensité des contrôles différait selon les régions. Dans la nouvelle programmation, les régions deviendront autorités de gestion, souhaitons que cela se traduise par une gestion plus fluide de ces aides.

Notre contrôle a mis en avant toute l'utilité de ce dispositif qui répond à un véritable besoin des jeunes sortis du système scolaire. Les E2C, qui ne sauraient se substituer à l'éducation nationale, en sont un complément intéressant. Les jeunes rencontrés nous ont tous indiqué que les cursus proposés par l'éducation nationale ne leur correspondaient pas. Grâce au cousu main des écoles de la deuxième chance, ils ont trouvé, par tâtonnement parfois, une voie répondant davantage à leurs aspirations, alors qu'ils pouvaient avoir des situations personnelles très difficiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Merci pour cette présentation. Comme vous, j'y vois des raisons d'être optimiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

L'amendement n° 1 ne revient pas sur le principe des contrats aidés mais, dans la continuité de notre position de l'an dernier, il réduit les crédits alloués aux contrats aidés du secteur non marchand et majore ceux du secteur marchand.

Je doute que les associations et les collectivités locales puissent absorber l'augmentation des contrats uniques d'insertion - contrats d'accompagnement dans l'emploi (CUI-CAE) - dans le secteur non-marchand, 200 000 contrats supplémentaires ! Nous aurons ce soir un débat sur la dotation globale de fonctionnement : les collectivités ont de plus en plus de mal à assurer le suivi des contrats aidés et à les financer.

À cela s'ajoute un problème de fond : le taux de sortie vers l'emploi et l'accès à un emploi durable sont très différents selon le secteur. Dans le secteur non marchand, seuls 19,8 % des titulaires d'un CUI-CAE trouvent un emploi durable ensuite : moins d'un bénéficiaire sur cinq ! Alors que ce taux est deux fois supérieur dans le secteur marchand. Je m'étonne des difficultés que rencontre le secteur marchand : de nombreux chefs d'entreprise de mon département sont prêts à embaucher mais ils se heurtent aux quotas.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Boulard

Je me félicite que l'Assemblée nationale ait rajouté des crédits aux maisons de l'emploi ; la réduction de 50 % de leurs dotations menaçait leur existence.

Un dispositif intéressant de la politique de la ville permet à un jeune remplissant les conditions pour bénéficier d'un contrat aidé de se voir attribuer une aide pour créer son activité. Cette troisième voie doit être encouragée.

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Sur le terrain, on constate qu'il y a 500 000 offres de travail non satisfaites. Le budget prévoit-il de remédier à l'inadéquation entre l'offre et la demande ? Les entreprises sont prêtes à embaucher si on simplifie les dispositifs et si on réforme le code du travail. Pouvez-vous mesurer ces freins à l'embauche ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Les rapporteurs ont eu beaucoup de mérite de traiter ce dossier compliqué. Un tableau de leur rapport mérite réflexion : les opérateurs mobilisent plus de 55 000 ETP. Pôle emploi a recruté 4 000 agents supplémentaires. Quel a été l'impact financier de cette mesure et pour quelle efficacité ? D'autres recrutements sont-ils prévus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

J'ai apprécié l'optimisme des rapporteurs, au vu des dernières statistiques de l'emploi. Nous avons déjà été témoins d'engagements sans cesse reportés. Soyons prudents !

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Comment expliquer la réduction des moyens de Pôle emploi, alors que le nombre de chômeurs ne diminue que ponctuellement : la tendance reste à la hausse, il faut accompagner le retour à l'emploi.

Les moyens de l'apprentissage ont été fortement réduits ces dernières années, alors qu'il est un des meilleurs moyens d'insertion professionnelle, notamment des jeunes, qui sont l'une des priorités de l'action publique. Tous les jeunes se sont détournés de l'apprentissage parce que les dispositifs ont été constamment modifiés. Ils ont besoin de clarté, de même que les entreprises, sinon on obtient cette chute des effectifs.

À l'aide à l'embauche d'un premier salarié par une TPE, j'aurais préféré une exonération des cotisations sociales, par exemple durant trois ans, afin d'inciter les artisans et chefs d'entreprises à embaucher. Compte tenu de la délégation de la compétence économique, ces dispositions ne pourraient-elles pas être mises en oeuvre par les régions ? Évitons les redondances entre l'État et les régions, sinon l'on répétera les erreurs passées.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Je salue les efforts budgétaires de l'État, notamment en faveur des jeunes avec la garantie jeunes, le renforcement de l'apprentissage, les contrats aidés et l'emploi dans les TPE. Cet ensemble concrétise la volonté politique en faveur de l'emploi des jeunes.

Nous aurions pu suivre le rapporteur général sur une réallocation à budget constant pour augmenter le nombre de contrats dans le secteur privé, en diminuant ceux prévus dans le secteur public, mais vous proposez une réduction très forte avec des arguments contestables : selon vous, la réduction des concours de l'État aux collectivités locales les empêcherait de recruter avec ce type de contrats. Au contraire, grâce à ce dispositif, les collectivités qui s'interrogent sur leur masse salariale peuvent répondre à des besoins ponctuels.

Contrairement au dispositif mis en place il y a dix ans, les collectivités territoriales ne sont plus obligées de recruter les personnes titulaires d'un contrat aidé. Celles-ci bénéficient d'une première expérience très utile et d'un an de formation dans le milieu du travail, ce qui est l'une des missions de nos collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Je me félicite que le travail et l'emploi gardent ce niveau de crédits dans une période où les coups de rabot affectent chacune des missions budgétaires, mais je ne voterai pas cet amendement excessif, qui supprime 200 000 contrats aidés dans le secteur non marchand pour en créer 40 000 dans le secteur marchand, soit une disparition de 160 000 contrats !

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Vous ne laissez plus grand-chose ! L'objectif est d'amener à l'emploi ceux qui en sont le plus éloignés ; les associations et les collectivités locales leur offrent cette chance.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

S'il y a quelques années nous avions avancé l'idée que les contrats aidés subventionnés remplaceraient du personnel communal sous statut pour réduire la masse salariale...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Voilà un renversement assez étonnant des arguments. Les collectivités locales utilisent les contrats aidés parce qu'elles espèrent garder certains contrats après les départs en retraite. Mais, l'État ne prenant plus en charge les cotisations sociales, nous devons payer le chômage durant un à deux ans, sans aucune aide !

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Pouvons-nous signer 200 000 contrats aidés dans les collectivités ? J'en doute. Il ne s'agit pas de faire une politique d'affichage, mais d'avoir des chiffres précis. Et l'argument principal, c'est que le taux d'emploi durable est deux fois plus important dans le secteur marchand - ce qu'affirme le bleu budgétaire : il ne s'agit pas d'enchaîner les petits boulots !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous ne sommes pas contre renforcer les contrats dans le secteur marchand.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Plutôt que de l'affichage, créons des emplois supplémentaires dans le secteur marchand. Étrangement, je connais des entreprises prêtes à embaucher massivement mais les préfets leur indiquent ne pas avoir suffisamment de contrats aidés à leur proposer, alors que le chômage des jeunes est le problème numéro un.

Photo de Daniel Raoul

Vous en supprimez 160 000. Je peux comprendre de faire un effort sur le secteur non marchand, mais à enveloppe à peu près constante. Pourquoi vouloir absolument réduire le nombre de contrats aidés dans les collectivités locales ? Je n'ai pas eu de difficulté à en signer dans les collectivités dont j'ai été l'élu... Ne pourrait-on utiliser une partie des crédits initiaux pour régler le problème de la sortie et des cotisations chômage et conserver la totalité des contrats ? Les zones franches urbaines sont vues soit comme un effet d'aubaine, soit comme un échec ; la troisième voie suggérée par Jean-Claude Boulard aiderait un jeune à créer son entreprise dans un quartier prioritaire de la politique de la ville. Mettons bout à bout les dispositifs tout en gardant le montant global.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Je suis prêt à examiner le sujet, mais on ne peut entendre en permanence le Gouvernement affirmer que les collectivités dépensent trop et créer davantage de contrats aidés !

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Nous pourrions vous suivre si vous proposiez de créer 40 000 contrats aidés supplémentaires dans le privé et, sans négliger la différence du niveau de prise en charge par l'État, de créer le reste en contrats aidés dans le secteur non marchand.

Debut de section - PermalienPhoto de François Patriat

Dans la région Bourgogne, nous avons signé les deux types de contrats : à côté des contrats aidés de l'État, j'ai créé des contrats-ressources. Après mille emplois tremplin entre 2006 et 2009 payés au Smic majoré de 20 % et assortis d'une formation, nous avons signé 500 contrats ressources, les deux débouchant dans 50 % des cas sur un CDI. Ne soyons pas si manichéens ! Je regrette que le rapporteur général ne souhaite pas trouver de moyen terme.

Il n'est pas dans ma mission de traiter des emplois en tension. Il existe des réponses multiples. Certains employeurs se plaignent de la rigidité de certaines règles : un restaurateur, dont Pôle emploi était le « principal ennemi », m'indiquait qu'il n'emploierait jamais un apprenti... Le rôle de Pôle emploi est d'orienter les jeunes. Il développe par exemple les datings. Les crédits attribués à Pôle emploi sont presque constants, avec seulement 12 millions de réduction sur 1,5 milliard d'euros. Désormais, l'accompagnement est davantage personnalisé.

La réduction du nombre d'apprentis tient à la réduction de trois à deux ans du bac professionnel, à la crise économique et à la réduction des aides. Mais même en 2007, 2008 et 2010, où les contrats d'objectifs et de moyens pour l'apprentissage avaient des objectifs élevés, ceux-ci n'étaient pas atteints en raison des difficultés à trouver un employeur. On en a pris conscience et la courbe semble inversée. Je souhaite que l'on donne aux employeurs la lisibilité et la visibilité dont ils ont besoin pour employer les jeunes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Espérons que l'embellie sur l'emploi se maintienne et que la tendance s'inverse ! L'inadéquation entre l'offre et la demande d'emploi est vieille comme le travail et le chômage. Si vous avez des solutions contre l'instabilité fiscale lorsque vous serez au Gouvernement, je suis pour. Dans la petite commune dont j'ai été maire durant trente ans, j'ai créé 50 contrats de travaux d'utilité collective (TUC). Alain Juppé et Dominique Baudis qui n'en voulaient pas, en ont pourtant fait autant à Bordeaux et à Toulouse.

L'amendement n° 1 est adopté.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission « Travail et emploi » ainsi modifiés.

Elle décide également de proposer au Sénat l'adoption sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage » et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

La commission donne acte à MM. François Patriat et Jean-Claude Requier de leur communication et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Enfin, la commission procède à l'examen du rapport de MM. Michel Bouvard et Thierry Carcenac, rapporteurs spéciaux, sur les missions « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » (et articles 57 à 57 quater) et « Crédits non répartis » et le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Carcenac

Principale mission du pôle économique et financier de l'État, la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » porte principalement les crédits des deux administrations de réseaux que sont la direction générale de finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI), ainsi que les moyens de plusieurs structures et politiques transversales qui relèvent de Bercy.

Comme depuis plusieurs années, cette mission qui représente 3 % du budget de l'État contribue fortement à l'effort de réduction des dépenses publiques. Ses crédits baisseront de 317 millions d'euros en 2016, soit 15,2 % des réductions totales du budget général, pour s'établir à environ 11 milliards d'euros. Cette baisse correspond, tout d'abord, à la suppression de 2 453 ETP, dont 2 130 ETP pour la seule DGFiP, soit près de 7 400 ETP en trois ans. Les dépenses de personnel diminuent ainsi de 127 millions d'euros cette année. Celles-ci représentent 79 % des crédits de la mission ; elles sont donc le principal levier d'économies. Toutefois, l'annonce par le Président de la République, hier, de la création de 1 000 postes de douaniers supplémentaires dans le cadre de la lutte contre le terrorisme remet en cause cette prévision - nous venons d'apprendre que deux douaniers avaient été victimes des tragiques événements de vendredi dernier. Notre première estimation aboutit à un coût supplémentaire de 70 millions d'euros pour 2016. Deux priorités coexistent donc : une réduction des effectifs correspondant aux gains d'efficience, et une hausse des effectifs consacrés à la sécurité, qui sont plus que jamais nécessaires.

L'autre volet des économies de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines » est une réduction nette de 190 millions d'euros des dépenses hors personnel (- 8 %). Celle-ci est toutefois loin de correspondre seulement à des économies sur le fonctionnement courant. Certes, les administrations s'attachent à maîtriser leurs coûts, à l'instar de la DGFiP qui peut encore réduire ses coûts d'affranchissement, grâce aux progrès de la dématérialisation. Néanmoins, à missions constantes, les gisements d'économies de fonctionnement se font de plus en plus rares. En fait, une partie de la baisse tient à la réduction des aides aux buralistes à hauteur de 63 millions d'euros, du fait de la fin du programme triennal 2014-2016 qui concernait 26 000 d'entre eux. En outre, les investissements baissent de 33 millions d'euros - les investissements informatiques de la DGFiP et de la DGDDI étant heureusement préservés.

L'un des principaux chantiers de modernisation tient à la rationalisation du réseau territorial de la DGFiP, avec ses 4 000 points de contact. Ce chantier de long terme doit être mené avec constance : le maintien de petites trésoreries de trois ou quatre agents n'est pas raisonnable. Il ne s'agit pas seulement de faire des économies, mais aussi de fournir un service public de qualité aux usagers et des conditions de travail satisfaisantes aux agents.

Du côté de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI), la réorganisation du réseau se poursuit également. L'an dernier, nous avions évoqué la situation du centre de Metz, avec les 130 agents prévus pour Ecomouv' : désormais, il centralisera les services chargés de la fiscalité des transports.

Dans ces réorganisations, le contrôle fiscal ne doit pas être oublié. Le Gouvernement a fait à juste titre de la lutte contre la fraude et l'optimisation fiscales une priorité - qui d'ailleurs porte ses fruits, puisque le service de traitement des déclarations fiscales rectificatives (STDR) devrait rapporter 2,1 milliards d'euros en 2016, après 2,5 milliards d'euros cette année. Les progrès sont également notables en matière de fiscalité internationale, grâce notamment à l'action de l'OCDE. Mais il importe aussi de ne pas baisser la garde sur le terrain. À cet égard, il conviendrait de créer un « indice de couverture du tissu fiscal », pour vérifier qu'aucun territoire n'est oublié. Dans certaines zones, les brigades sont nombreuses et, dans d'autres, très disséminées. La création de cet indice aiderait à rationaliser le réseau.

Le projet de loi de finances contient aussi des mesures intéressantes, telles que l'obligation de posséder un logiciel de caisse certifié pour éviter les fraudes.

Enfin, le numérique est une véritable chance pour les administrations de Bercy. Il ne s'agit pas seulement de la dématérialisation d'un nombre croissant de procédures existantes, déclarations, paiements etc., mais aussi de nouveaux outils, qui s'appuient sur des techniques de data mining - à ce jour, toutefois, seuls dix agents y sont affectés. Nous estimons qu'il conviendrait de repenser le recouvrement de l'impôt lui-même.

Nous avons exploré deux pistes avec le groupe de travail de la commission des finances sur le recouvrement de l'impôt à l'heure de l'économie numérique. En ce qui concerne le commerce en ligne, pourquoi ne pas prélever la TVA à la source, au moment du paiement, plutôt que d'attendre une hypothétique déclaration d'un vendeur introuvable ? En ce qui concerne les revenus des particuliers qui utilisent des plateformes comme Airbnb ou Uber, pourquoi ne pas demander à ces plateformes de déclarer automatiquement ces revenus ? Nos interventions auprès de Bruxelles devront se poursuivre car si l'Union européenne reconnait des pertes de recettes de TVA - près de 140 milliards d'euros par an, dont 14 milliards d'euros pour la France -, elle n'est pas encore prête à de telles évolutions.

Le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières » rassemble diverses structures d'état-major, d'expertise et de support de Bercy, et affiche une baisse de 5,5 % de ses crédits, soit 58 millions d'euros. Au-delà de l'effort sur les crédits de personnel, les économies sont en partie réalisées sur l'action sociale ministérielle (restauration, tourisme etc.). Surtout, la baisse des dépenses d'investissement tient à l'arrêt de l'opérateur national de paye (ONP) : les économies de 2016 sont une maigre consolation par rapport au milliard d'euros perdu pendant une décennie. Les investissements restants sont consacrés à la mise à jour de l'application existante PAY.

Les crédits du programme 148 « Fonction publique » sont stables, hormis les 30 millions d'euros supplémentaires ouverts pour aider les ministères à recruter 6 000 apprentis, conformément aux engagements du Président de la République.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

La politique immobilière de l'État repose sur deux outils principaux, au-delà des budgets ministériels. Le premier est le programme 309 « Entretien des bâtiments de l'État », rattaché à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », qui finance les travaux d'entretien lourd de l'État propriétaire. Il est doté de 145 millions d'euros, soit une légère baisse. Les crédits alloués à la « maintenance corrective » baissent au profit de la « maintenance préventive », ce qui semble être de bonne politique.

Le second outil est le compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », qui finance les travaux structurants de reconversion. Ce compte est financé par les produits de cessions des immeubles de l'État, évalués à 500 millions d'euros pour 2016. L'objectif paraît réaliste, mais à moyen terme les perspectives sont plus inquiétantes : la raréfaction progressive des biens cessibles de qualité pourrait finir par remettre en cause l'équilibre économique du compte d'affectation spéciale. De plus, la liste des cessions peut parfois laisser songeur : on y trouve ainsi un terrain à Palmyre, en Syrie. Vivons-nous dans le même monde que ceux qui dressent ces listes ?

Les produits de cessions sont également réduits du fait des décotes « Duflot » en faveur du logement social, qui permettent de céder un immeuble en-dessous de sa valeur vénale, jusqu'à la gratuité. Le projet de loi de finances prévoit d'ailleurs d'élargir ces décotes. Nous avons obtenu le bilan de ces cessions : depuis 2013, les décotes représentent 75 millions d'euros, soit 61 % de la valeur des vingt-six biens cédés, ce qui a permis la construction de 3 779 logements, dont 2 889 logements sociaux. Sans préjuger du bien-fondé de cette politique, on ne peut que constater que celle-ci ne correspond pas à la vocation du CAS, qui est de contribuer au désendettement et à la modernisation du parc immobilier de l'État. Je vous proposerai donc un amendement tendant à minorer d'un montant égal à la décote consentie le budget du ministère à l'origine de la cession : ainsi, c'est bien le budget général qui assumera le coût de la politique en faveur du logement social, comme c'est sa vocation.

En outre, nous vous proposerons un amendement tendant à faire figurer la liste des décotes « Duflot » en annexe au projet de loi de finances : après tout, celles-ci sont des moindres recettes, comme le sont les dépenses fiscales.

Les recettes de cessions sont pour une part affectées au désendettement de l'État (programme 721), au taux théorique de 30 %. En pratique, celui-ci ne sera que de 16 % en 2016, soit 80 millions d'euros, en raison de multiples régimes d'exonération. Bien entendu, l'existence de ces régimes se comprend, notamment pour le ministère de la défense. Reste que, pour assurer la soutenabilité et la lisibilité du CAS, il faudra à terme envisager la suppression de ces dérogations. Les règles sont aujourd'hui illisibles, avec une série d'exceptions aux exceptions.

En outre, l'équilibre du compte d'affectation spéciale est assuré par une contribution exceptionnelle de 75 millions d'euros du ministère des affaires étrangères... alors même qu'il bénéficie théoriquement d'une exonération pour les biens cédés à l'étranger. Ainsi en est-il de la cession de l'ambassade de France à Hong-Kong, mais le ministère va désormais la louer - et à quel prix ?

Le reste des recettes finance la modernisation du parc immobilier de l'État (programme 723). Ce chantier de long terme implique des choix mais aussi des obligations, par exemple en termes de mise en accessibilité. L'objectif de 14,15 mètres carrés par poste de travail fixé pour 2016 paraît réaliste, sachant que la cible ultime est de 12 mètres carrés pour tous les ministères.

La bonne diffusion des principes de la politique immobilière de l'État est toutefois freinée par la faiblesse de France Domaine. En pratique, les ministères gardent la main sur l'essentiel des dépenses et des décisions, comme pour le choix du régime d'occupation des immeubles (achat, location etc.). En région, l'autorité hiérarchique appartient au préfet, et non aux responsables régionaux de la politique immobilière de l'État (RRPIE). En Île-de-France, la coordination entre administrations centrales et déconcentrées demeure insuffisante et entrave des projets de mutualisation pourtant prometteurs.

Enfin, les opérateurs constituent l'angle mort de la politique immobilière de l'État. Sept ans après les circulaires du Premier ministre, qui nous avions inspirées avec Thierry Carcenac dans le cadre nos travaux à l'Assemblée nationale, leur patrimoine n'est toujours pas connu. Quant à leurs dépenses, elles restent mal estimées et mal pilotées. Pourtant, les possibilités de cession ou de valorisation sont très importantes. Certes, France Domaine a annoncé le « suivi renforcé » de 31 opérateurs dans l'élaboration de leur stratégie immobilière - mais peut-être faudrait-il parler de suivi tout court ? En outre, seule l'université Paris I figure dans la liste alors que les universités représentent 60 % du patrimoine des opérateurs. Un travail considérable reste donc à faire, notamment dans la perspective de la sortie du moratoire sur la dévolution du patrimoine aux universités. Aujourd'hui, ce moratoire enlève toute incitation pour les universités à réaliser des cessions.

La mission « Crédits non répartis », anciennement « Provisions », comprend deux dotations visant à couvrir des dépenses indéterminées au moment du vote de la loi de finances. Cette mission, dénuée de stratégie de performance, est la moins dotée du budget général. Toutefois, ce montant ne comprend pas, à ce stade, les crédits de subvention versés sur proposition du Parlement, qui seront intégrés par voie d'amendement en cours de navette.

Les crédits sont en nette augmentation : la dotation du programme « Provision relative aux rémunérations publiques » s'établit à 11,4 millions d'euros en crédits de paiement, une première depuis 2009. Elle correspond aux mesures d'accompagnement des réorganisations de services liées à la nouvelle organisation territoriale de l'État. La dotation du programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles » disposera quant à elle de 324 millions d'euros d'autorisations d'engagement et 24 millions d'euros de crédits de paiement. Une nouvelle fois, nous rappelons que la doctrine d'emploi des crédits de ce programme devrait être clarifiée. Dans le passé, la Cour des comptes a critiqué le fait que ce programme a été utilisé pour répondre à des besoins de crédits de personnel en fin de gestion. Cette année, le montant des crédits a été revu à la baisse dès l'examen du projet de loi de finances à l'Assemblée nationale pour contribuer au financement des dépenses supplémentaires votées par les députés. Dans les deux cas, on est assez loin de l'objet de ce programme prévu par la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

Enfin, quatre articles sont rattachés à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

L'article 57 étend le bénéfice du dispositif de cessation anticipée d'activité et de l'allocation afférente à l'ensemble des agents publics victimes d'une maladie professionnelle provoquée par l'amiante, sur le modèle du dispositif existant pour les salariés du secteur privé. Il s'agit d'une mesure d'équité, que nous vous proposons d'adopter.

L'article 57 bis prolonge, jusqu'au 31 décembre 2018, l'expérimentation relative au contrôle des arrêts maladie des fonctionnaires par les caisses primaires d'assurance maladie. Cette prolongation permettra d'achever l'évaluation de l'expérimentation et de tester de nouveaux outils juridiques et techniques avant la généralisation. Nous y sommes favorables.

L'article 57 ter tire les conséquences de la mise en oeuvre du protocole d'accord relatif à l'avenir de la fonction publique et à la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations en prévoyant un abattement sur certaines indemnités perçues par les fonctionnaires accompagnant la rénovation des grilles indiciaires. Il harmonise en outre les règles en matière d'avancements d'échelons au sein des trois fonctions publiques. Je suis favorable à l'amendement déposé par notre rapporteur général supprimant cet article. En effet, celui-ci n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact - il est issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée. Lorsque nous avons entendu la Cour des comptes sur son rapport relatif à la masse salariale dans la fonction publique, elle nous avait dit que le coût consolidé dans la durée pouvait être particulièrement élevé.

Enfin, l'article 57 quater prévoit la remise d'un rapport du Gouvernement sur les conséquences des suppressions de postes à la DGDDI. Compte tenu des annonces faites hier par le Président de la République, ce rapport n'a plus lieu d'être. Nous vous proposons donc de supprimer cet article.

Nous sommes favorables à l'adoption de ces missions, sous réserve de l'adoption des amendements que le rapporteur général et nous-mêmes vous présentons.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Par le passé, j'étais avec Philipe Dallier rapporteur spécial de cette mission : si la DGFiP donne l'exemple en matière de réduction d'effectifs, du fait des évolutions technologiques, il faut néanmoins prendre garde à ne pas supprimer les emplois utiles pour repérer les fraudes fiscales complexes, la TVA carrousel ou encore le non-versement de la TVA pour le commerce électronique. Bercy doit veiller à supprimer les postes strictement non indispensables. Par exemple, les représentants des hôteliers s'inquiètent de la concurrence déloyale des locations meublées qui ne sont pas soumises à la fiscalité. Ce constat vaut aussi pour les douanes, les mille postes annoncés hier étant destinées aux missions de sécurité et non aux missions fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Les réductions d'effectifs peuvent-elles se prolonger encore longtemps ?

Le Gouvernement souhaitait mobiliser des terrains publics pour relancer le logement social. La décote « Duflot » ne s'appliquerait pas beaucoup du fait de multiples difficultés. Quelles sont-elles ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Merci pour cette présentation très pédagogique. Dans nos départements, les petites trésoreries ferment : c'est bien dommage, d'autant que les communes doivent s'acquitter de tâches auparavant dévolues aux agents de l'État. La dématérialisation s'est faite au détriment des collectivités locales, surtout des petites.

Je regrette aussi que les effectifs des douanes ne soient pas plus importants pour lutter efficacement contre toutes les formes de fraudes : trafics, contrefaçons etc. Avec si peu de douaniers, comment contrôler les camions, si nombreux sur nos routes ?

Debut de section - PermalienPhoto de Éric Doligé

Dans leur rapport, les rapporteurs spéciaux souhaitent que les exonérations de contribution au désendettement dont bénéficient certains ministères soient supprimées, mais pas à court terme. Il faudra bien trouver des compensations pour les ministères concernés : ainsi, les ventes du ministère des affaires étrangères vont à l'entretien et à la sécurisation des ambassades et des consulats. Il faudrait des règles précises pour que les ministères sachent en début d'année quels sont les travaux qu'ils peuvent réaliser.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Pour lutter contre la fraude et l'optimisation fiscales, il faut du personnel. Les services ne disposent plus des moyens nécessaires pour contrôler les déclarations. Nombre de collectivités territoriales estiment que les montants acquittés au titre de la cotisation foncière des entreprises (CFE) et de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) ne correspondent pas à la réalité du terrain. Lors de mes investigations à Paris, j'ai constaté que la mobilisation pour le CICE s'est effectuée au détriment d'autres missions. En outre, la dématérialisation a un énorme impact sur les collectivités : c'est un véritable transfert de charge, les plus petites n'ayant pas les moyens pour y faire face.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Il est prévu que le CAS abonde durant de nombreuses années le budget de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Les plus beaux immeubles ayant été vendus, nous arrivons à l'asymptote et les ventes se réduiront ensuite. Le CAS, à terme, ne sera plus soutenable. En tant qu'élu local, toutefois, je suis favorable à la décote « Duflot » qui a aidé à mener à bien des opérations immobilières - celles-ci sont complexes et prennent parfois une mandature. En revanche, j'estime comme vous qu'il faut que cette procédure apparaisse dans le budget de l'État.

Debut de section - PermalienPhoto de Antoine Lefèvre

Le marché national d'évaluation passé par France Domaine avec BNP Real Estate s'est révélé décevant. Ainsi, dans mon département, des ventes de bâtiments militaires sont impossibles du fait d'évaluations beaucoup trop élevées.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Le ministère des affaires étrangères avait naguère passé un accord avec une filiale de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour mener à bien ces évaluations à l'étranger. Elles n'ont rien donné, car il est presque impossible de connaître les marchés immobiliers dans une centaine de pays.

Un tableau du rapport montre que sur 500 millions d'euros de cessions, 142 millions d'euros sont le fait du ministère de la défense et 232 millions d'euros du ministère des affaires étrangères, soit 75 % du total. Cette politique repose sur une tête d'épingle. La vente du campus de Kuala Lumpur a été une excellente opération. En revanche, l'État prélève sa part, ce que je considère être une sorte de racket. Toute cette politique mériterait d'être repensée à moyen terme.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Certaines autorités administratives indépendantes louent des locaux bien plus chers que 400 euros par mètre carré, comme l'ont signalé les rapporteurs spéciaux dans leur rapport ou notre collègue Jacques Mézard dans le cadre de la commission d'enquête sur le sujet. J'espère que la situation va s'améliorer.

Le regroupement des services du ministère de la défense à Balard, et du Premier ministre à Ségur-Fontenoy, contribuera-t-il à réduire les coûts et à rationaliser le fonctionnement de l'État ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Carcenac

Les évolutions démographiques, économiques et technologiques appellent une redistribution géographique des services fiscaux. On ne peut plus accepter que des entreprises soient vérifiées tous les six ans parce qu'elles sont implantées sur d'anciens bassins industriels tandis que, dans d'autres zones, elles ne le soient que tous les soixante-dix ans. Nous devons restaurer l'égalité entre territoires.

En raison des évolutions technologiques, le besoin en personnel est moindre, mais il faudra continuer à répondre aux demandes d'information des contribuables. Il faudra surtout revoir les méthodes de perception de la TVA et les contrôles du CICE qui durent en moyenne trois heures - soit, pour l'ensemble des demandes de restitution, l'équivalent de 285 agents à temps plein. Nous devrons imaginer une autre façon de travailler, mais je doute que la réflexion soit engagée. La loi sur la nouvelle organisation territoriale de la République (NOTRe) va entraîner une nouvelle organisation régionale, des fusions de communes, de nouvelles intercommunalités, et elle aura par conséquent un impact sur les trésoreries. La dématérialisation, qui va encore s'accélérer, va avoir des conséquences indéniables sur les petites communes. Enfin, n'oublions pas que la retenue à la source doit intervenir en 2018. Ces différents chantiers appellent à un véritable dialogue social.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

Avec les occupations illégales, les conditions suspensives, les recours des riverains, les montages financiers, il s'écoule beaucoup de temps entre le moment où un bien est inscrit sur la liste et celui où il est vendu. Heureusement, notre ancien collègue Thierry Repentin est là pour faire avancer les dossiers.

Néanmoins, certaines opérations laissent songeur : l'immeuble de l'institut national des langues et civilisations orientales (INALCO), rue de Lille à Paris, a subi une décote de 77 %, soit 4,8 millions sur un bâtiment estimé à 6,2 millions, pour construire... seulement 18 logements, soit une subvention d'État de 267 000 euros par logement. La ville de Paris se trouve de facto détentrice d'un droit de préemption sur le budget de l'État pour ses logements sociaux, contrairement à d'autres collectivités moins bien loties. Or le prix d'acquisition du foncier est souvent la variable d'ajustement qui permet de réaliser ou non de tels projets.

Le CAS a rarement pu fournir les 30 % des produits de cessions destinés au désendettement de l'État, et il le pourra de moins en moins car il faudra assurer la maintenance et l'accessibilité du patrimoine. En outre, l'État n'a pas de réelle stratégie sur les cessions : la question de l'avantage comparatif de la vente sur la valorisation locative, y compris par un tiers, n'est jamais posée. En outre, l'État ne réalise jamais de travaux avant une cession pour optimiser le prix de vente. En revanche, avec les schémas directeurs immobiliers régionaux (SDIR), France Domaine s'est dotée de bons outils.

L'avenir du CAS est posé car les biens cessibles de qualité sont de moins en moins nombreux. Le ministère des affaires étrangères n'a pas d'autres moyens que la vente de ses biens immobiliers pour assurer la réfection et la sécurisation de ses ambassades et consulats. Nous aurons le même problème avec le parc universitaire qui est dans un état déplorable, mis à part les bâtiments neufs. Comment mettre à niveau le parc existant ? De nouvelles dérogations seront demandées. Le retour aux universités est d'ailleurs prévu dans le cas de l'opération d'intérêt national (OIN) de Saclay - je suis à l'origine de l'amendement qui le permet.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Je vais vous présenter des amendements transversaux qui concernent l'ensemble des fonctions publiques, et qui sont par convention rattachés à la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

L'amendement n° 1, qui porte article additionnel après l'article 57, déjà présenté l'an passé, rétablit les trois jours de carence dans la fonction publique afin de lutter contre l'absentéisme et de se rapprocher de la situation du privé. Nous en débattrons en séance.

L'amendement n° 1 est adopté.

L'amendement n° 2, qui réduit les crédits de la mission à hauteur de 200 millions d'euros, tire les conséquences de l'amendement que nous venons d'adopter.

L'amendement n° 2 est adopté.

L'amendement de crédits n° 3 pose la question du temps de travail dans la fonction publique. Cette piste a été évoquée par la Cour des comptes dans le rapport que nous lui avions commandé au titre de l'article 58-2 de la LOLF. Une augmentation de 1 % du temps de travail dans la fonction publique équivaudrait à 700 millions d'euros d'économies. Je propose d'aligner le temps de travail du public sur le privé, à savoir 37,5 heures par semaine. Nous économiserions ainsi 2,2 milliards d'euros, tout simplement.

L'amendement n° 3 est adopté.

L'amendement de crédits n° 4, adopté l'an passé par le Sénat, ralentit le glissement vieillesse-technicité (GVT) automatique, soit 1,18 milliard d'euros d'économies.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

C'est un amendement de jouvence !

L'amendement n° 4 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

L'amendement de crédits n° 5 reprend une préconisation de la Cour des comptes sur la masse salariale des opérateurs l'État : entre 2009 et 2013, elle a augmenté de 50 %. Comme le demande également la commission d'enquête sur les autorités administratives indépendantes, nous proposons de la contenir, à hauteur de 184 millions d'euros.

L'amendement n° 5 est adopté.

L'amendement n° 6, qui supprime l'article 57 ter, ne marque pas une opposition de principe aux mesures de revalorisation des régimes indemnitaires dans la fonction publique. Simplement, nous n'avons aucune étude d'impact sur son coût. Nous demanderons au Gouvernement des précisions, notamment en raison des conséquences de cette mesure sur les collectivités territoriales.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bouvard

L'amendement n° 7 supprime l'article 57 quater qui demande un rapport sur la baisse des effectifs de la direction générale des douanes et droits indirects, compte tenu des annonces d'hier.

L'amendement n° 7 est adopté.

L'amendement n° 8, que je dépose seul et qui porte article additionnel après l'article 63, reprend celui de l'an dernier sur l'imputation au budget de chaque ministère la décote « Duflot ».

L'amendement n° 8 est adopté.

L'amendement n° 9, que nous présentons conjointement avec Thierry Carcenac et qui porte article additionnel après l'article 63, propose une annexe au projet de loi de finances pour recenser le coût des opérations « Duflot », par analogie à une dépense fiscale.

L'amendement n° 9 est adopté.

À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », ainsi modifiés.

Elle décide de proposer au Sénat d'adopter la mission « Crédits non répartis ».

Elle décide de proposer au Sénat d'adopter les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».

Elle décide de proposer au Sénat d'adopter l'article 57, ainsi que l'article 57 bis.

Elle décide de proposer au Sénat de supprimer l'article 57 ter et l'article 57 quater.

La réunion est levée à 19 h 35.