Mes chers collègues, mesdames, messieurs, je suis heureux d'ouvrir cette première réunion de commission de la session ordinaire 2022-2023 par une table ronde consacrée aux enjeux liés au développement du véhicule électrique.
Vous le savez bien, le secteur des transports est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France, puisqu'il représente 32 % des émissions. Le mode routier, qui comprend à la fois les véhicules légers et les poids lourds, est responsable de plus de 90 % de ces émissions.
C'est pourquoi nous nous sommes dotés d'objectifs ambitieux pour les réduire en limitant également les émissions de particules fines. L'article 73 de la loi d'orientation des mobilités, modifié par l'article 103 de la loi « Climat et résilience », prévoit ainsi la fin de la vente de voitures particulières neuves émettant plus de 123 grammes de dioxyde de carbone par kilomètre d'ici à 2030.
À l'échelle européenne, le texte sur la régulation des émissions de CO2 des automobiles est en cours de discussion. Le Conseil de l'Union européenne s'est notamment prononcé en faveur de l'interdiction, à partir de 2035, de la vente de véhicules neufs à moteur essence ou diesel.
Dans ce contexte, le véhicule électrique constitue un important levier de décarbonation du transport routier. D'après une étude de 2017 réalisée par la Fondation pour la nature et l'homme et la Fondation européenne pour le climat, en lien avec l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), en France, les émissions de gaz à effet de serre induites par la fabrication, l'usage et la fin de vie d'un véhicule électrique seraient 2 à 3 fois inférieures à celles des véhicules essence et diesel.
Cet impact climatique du véhicule électrique dépend néanmoins de nombreux autres facteurs, comme le mix énergétique, l'efficacité des modes de production des véhicules, les capacités de recyclage, ainsi que l'extraction des métaux nécessaires à la fabrication des batteries, avec des pollutions générées dans d'autres pays. Nous aurons sans doute l'occasion de revenir sur ce point important.
En outre, et à l'heure du déploiement des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) en agglomération, les véhicules électriques présentent l'avantage de ne pas émettre de polluants atmosphériques en roulant. Ils ne sont, à ce titre, pas concernés par d'éventuelles restrictions de circulation.
Les ventes de véhicules électriques ont ainsi fortement progressé ces dernières années. D'après l'Avere-France, dont nous recevons le délégué général, la mobilité électrique connaît une forte dynamique, avec plus de 174 000 véhicules électriques immatriculés au cours de l'année 2021.
Pour autant, le développement des véhicules électriques soulève d'importantes questions.
Pour y répondre, nous avons le plaisir d'accueillir des représentants de RTE, d'Enedis, de l'Avere-France, de Stellantis, de Renault et de la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC).
Je me permettrai seulement d'évoquer quelques questions, avant de vous laisser la parole pour un propos liminaire à l'échange avec les membres de la commission.
Ma première question concerne la capacité du réseau électrique à accueillir la montée en puissance rapide du nombre de véhicules à recharger dans les prochaines années. RTE, le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, a publié en 2017 un bilan prévisionnel, confirmé par une étude de 2019, qui montre que le système électrique sera en mesure d'accueillir le développement du véhicule électrique. Monsieur Bonnet, pourriez-vous nous indiquer si ces prévisions sont susceptibles d'être révisées compte tenu des risques de pénurie que nous rencontrons dans le contexte de crise actuelle ?
J'en viens ensuite au déploiement des bornes de recharge, qui est l'une des conditions sine qua non du développement de la mobilité électrique. L'objectif de déployer 100 000 bornes de recharge ouvertes au public à la fin de l'année 2021 n'a pas encore été atteint, puisque seuls 53 000 points de recharge avaient été installés au 31 décembre 2021.
Je m'adresse à présent aux représentants d'Enedis et de l'Avere-France : pourriez-vous dresser un état des lieux de la situation à la fois des bornes de recharge publiques et privées, en précisant aussi les différents types de points de recharge ? Pourriez-vous également préciser quels sont, d'après vous, les obstacles à lever pour accélérer leur déploiement ?
Le processus de fabrication des véhicules électriques est aussi source de nombreuses interrogations. Les objectifs sont ambitieux ; certains d'entre eux sont d'ailleurs déclinés dans le contrat stratégique de filière. Aussi, et ma question s'adresse plus particulièrement aux représentants de Renault et de Stellantis, nous souhaiterions savoir, d'une part, si les constructeurs estiment être en capacité de produire un grand nombre de véhicules électriques à court terme et, d'autre part, quelles problématiques sont spécifiques à la fabrication de ces véhicules, mais aussi à leur recyclage. En particulier, pourriez-vous faire un point sur la question de la production des batteries ?
Le déploiement à grande échelle du véhicule électrique suppose, enfin, une certaine acceptabilité s'agissant de l'offre de véhicules, leur autonomie, le maillage du territoire en infrastructures de recharge et le coût de la recharge, mais aussi le prix d'achat du véhicule lui-même. Il s'agit d'une question absolument cruciale, puisque le prix d'un véhicule électrique reste, à ce stade, supérieur à celui d'un véhicule thermique. La prime à la conversion et le bonus écologique permettent de diminuer ce surcoût. En parallèle, le rapporteur du projet de loi « Climat et résilience », Philippe Tabarot, soutenu à l'unanimité, avait souhaité créer un prêt à taux zéro pour l'acquisition de véhicules peu polluants, prêt qui figure désormais à l'article 107 du texte. En outre, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit le lancement d'un « leasing social ». Pourriez-vous, monsieur David, en détailler les modalités et, plus globalement, revenir sur les modalités d'aides à l'acquisition de véhicules électriques ?
Je cède à présent la parole à nos intervenants, pour un propos liminaire de quatre minutes, afin que chacun fasse le point, dans son domaine de compétence, sur les enjeux du développement du véhicule électrique et les éventuelles difficultés rencontrées quant à son développement.
RTE, le Réseau de transport d'électricité, assure l'exploitation du réseau à haute et très haute tension et garantit l'équilibre entre l'offre et la demande à tout moment en matière d'électricité.
Que se passera-t-il si nous avons, demain, 5 millions, 10 millions ou 35 millions de véhicules électriques en circulation ? Le système électrique sera-t-il en mesure de satisfaire la demande en électricité ?
Il faut répondre à ces questions sous l'angle de l'énergie, mais aussi de la puissance.
Nous avons publié, en 2019, une étude approfondie et rassurante sur cette question, réalisée en collaboration avec l'Avere-France. Pour autant, cette enquête se limite à l'horizon 2035. Nous avions travaillé sur des scénarios de 7 millions et de 16 millions de véhicules légers électriques en circulation. Dans ces conditions, l'énergie totale à mobiliser apparaissait relativement modérée par rapport aux 500 térawattheures de notre consommation totale d'électricité.
Pour ce qui concerne la puissance, nous avons soulevé quelques mises en garde. En effet, si on laisse s'installer les habitudes de recharge dites « naturelles », on pourrait devoir faire face à des pics de puissance relativement importants, de l'ordre de 6 à 8 gigawatts, soit 15 % à 20 % de la puissance appelée sur le réseau. Pour autant, nous sommes convaincus que des systèmes simples permettraient de lisser fortement ces appels de puissance. Je pense en particulier aux systèmes heures pleines et heures creuses, bien connues aujourd'hui de nos concitoyens qui utilisent des chauffe-eaux.
Nous avons également considéré que, si des dispositifs de pilotage fins, voire des dispositifs permettant aux véhicules de restituer l'électricité au réseau, étaient mis en place, ceux-ci pourraient fournir 1 à 2 gigawatts de puissance au moment où le réseau en aurait besoin.
Nous avons aussi étudié la question des grands départs en vacances, qui pourraient entraîner des appels de puissance importants. Ils seraient gérables, en été et même pendant Noël, bien qu'en période hivernale la situation soit un peu plus compliquée mais pas insurmontable.
Ces analyses ont été réactualisées dans le rapport publié en 2021 sur les « futurs énergétiques », qui s'efforce de dresser le tableau d'un système électrique totalement décarboné à l'horizon 2050, avec 36 millions de véhicules électriques légers. Nous avons imaginé que les véhicules lourds pourraient également être électrifiés, ce qui nécessiterait une puissance importante, de 80 à 100 térawattheures, ce qui représenterait la moitié de la hausse des besoins en électricité envisagés à cet horizon pour l'ensemble des activités de notre pays.
S'agissant des enjeux de flexibilité, ils sont variables en fonction des choix qui seront faits sur le mix de production. Nous devrions compter sur une automatisation plus poussée des véhicules électriques, pour qu'ils profitent des périodes de production des énergies renouvelables et apportent une contribution au bon fonctionnement du réseau. Si la part de nucléaire était importante, les besoins de flexibilité seraient moindres.
En ce qui concerne les risques de pénurie, la crise que nous connaissons ne remet pas en cause les orientations du rapport car celui-ci envisage un système électrique français totalement décarboné, avec une sortie des énergies fossiles dans tous les secteurs d'activité. Or la volatilité actuelle des prix du gaz ou du pétrole montre que cette voie est un impératif de souveraineté énergétique.
Par ailleurs, les difficultés rencontrées par le parc nucléaire français étaient d'ores et déjà soulignées dans ce rapport, qui concluait à l'urgence à prendre des décisions en la matière.
Les besoins éventuels d'adaptation du réseau de transport se traiteront dans le cadre du dialogue habituel de coordination entre Enedis et RTE. Pourraient surgir des questions ponctuelles concernant, par exemple, les aires d'autoroute, avec des besoins de puissance importants nécessitant des infrastructures spécifiques : nous en discutons avec les concessionnaires autoroutiers.
Je pense également aux projets de gigafactories de fabrication ou de recyclage des batteries, qui auront besoin de puissances importantes. RTE est en contact avec les opérateurs de ces usines pour en assurer le raccordement.
Je compléterai ce qui vient d'être dit sur la capacité du réseau en insistant sur le volet de la distribution d'électricité. Il y a déjà aujourd'hui en France environ 1 million de véhicules électriques rechargeables. À travers nos enquêtes qui vont être publiées dans les prochains jours, nous avons une vision assez complète des habitudes de recharge, et nous constatons que 89 % des possesseurs de véhicules électriques n'ont pas eu besoin d'augmenter la puissance de leur abonnement pour alimenter leur point de charge à domicile. Ils « logent » donc naturellement le temps de recharge en l'absence d'autres usages de l'électricité dans leur habitation, la nuit ou pendant les heures creuses. Toutefois, cette situation concerne très majoritairement les foyers français vivant en maison individuelle. Il est en effet plus compliqué en habitat collectif, qui abrite 44 % des ménages, de trouver des solutions de recharge.
À l'horizon 2050, si l'on ne faisait rien, le pic de consommation qui atteint, à l'heure actuelle, un maximum de 80 gigawatts les soirs d'hiver vers 19 heures, pourrait augmenter de 12 %. Toutefois, avec le pilotage de la recharge - pour l'essentiel en utilisant les heures creuses -, on réduirait à zéro cette augmentation du pic de consommation d'électricité.
Enedis, comme tous les gestionnaires du réseau de distribution public en France, a un rôle central. En effet, tous les véhicules électriques rechargeables - dont nous estimons le nombre à 17 millions en 2035 - auront besoin de points de charge, qui devront être connectés, directement ou indirectement, au réseau de distribution. Ce dernier devra fournir l'énergie nécessaire au moment où elle est demandée, avec la puissance nécessaire.
Nous sommes donc au centre de l'enjeu d'électrification du transport. Pour Enedis, la transition écologique et la décarbonation de l'économie constituent deux enjeux majeurs, avec le raccordement des producteurs d'énergies renouvelables au réseau de distribution et l'électrification des usages, principalement du transport.
On parle très souvent des bornes accessibles au public qui sont des maillons importants mais minoritaires de l'infrastructure à déployer. En effet, l'essentiel de l'équipement se fait en milieu privé, puisque 88 % des personnes de notre panel d'enquête ont indiqué qu'elles rechargent leur véhicule presque exclusivement à domicile.
Nous estimons qu'au printemps 2022, le nombre de points de charge - publics ou à domicile - a dépassé le million dans notre pays.
Les principaux enjeux de l'équipement en infrastructures de recharge concernent le résidentiel collectif, segment identifié de longue date par les pouvoirs publics. La difficulté est liée à la décision, par l'assemblée générale des copropriétaires, d'un investissement qui n'intéressera, au départ, qu'une minorité d'entre eux. Aujourd'hui, un dispositif, qui vient d'être précisé par décret, permet à la copropriété de choisir non seulement une solution privée mais aussi une solution publique préfinancée. Cette dernière permet de réduire à zéro euro le reste à charge pour la copropriété ; par la suite, le financement sera assuré par les seuls copropriétaires qui décident de se raccorder.
Par ailleurs, le second frein important à l'adoption du véhicule électrique est la peur de la « panne sèche ». Pour que les longs trajets puissent se faire sans problème, nous avons mis en place une première phase d'équipement de 400 aires de services d'autoroute, qui arrivera à son terme l'année prochaine. Je précise que la montée en puissance prévue à l'avenir pour ces aires d'autoroute ne nécessitera pas de travaux pharaoniques.
L'Avere-France réunit 230 adhérents : des constructeurs automobiles, des énergéticiens, des installateurs, opérateurs et fabricants de bornes de recharge. Au-delà de notre qualité d'association professionnelle, nous sommes également pilotes et porteurs, depuis 2016, d'un programme de certificats d'économies d'énergie, qui finance des infrastructures de recharge et mène des actions de sensibilisation et d'information auprès du grand public.
Le développement de la mobilité électrique est lié au constat de l'urgence climatique. Cela permet de réduire à la fois les émissions de CO2, les nuisances sonores et la pollution de l'air. La dynamique est enclenchée puisqu'au niveau européen, au cours du deuxième trimestre, près de 10 % des immatriculations ont concerné des véhicules électriques. En France la part de marché de l'électrique, avoisine 17 % des véhicules vendus. Au total, le parc français atteint 995 594 unités, en incluant les véhicules hybrides.
S'agissant du déploiement des bornes de recharge, la dynamique est également forte. Au 30 septembre 2022, on comptait 71 630 points de recharge ouverts au public, soit une augmentation de près de 50 % au cours des douze derniers mois, soit autant qu'entre 2016 et 2020.
Aujourd'hui, en France, 90 % des recharges sont dites « normales », c'est-à-dire d'une puissance inférieure à 22 kilowatts. Toutefois, on observe le développement important - avec un triplement depuis le début de l'année 2022 - de la recharge rapide et ultrarapide, supérieure à 150 kilowatts, en particulier grâce à l'équipement des autoroutes. D'ici la fin de l'année, notre objectif est d'équiper 100 % des aires de services en recharge rapide dans le prolongement du chiffre de 60 % qui a été atteint cet été.
Nous nous sommes par ailleurs livrés à un exercice de prospective afin de quantifier nos besoins à moyen terme : d'après la revue de littérature que nous avons faite, entre 175 000 et 215 000 points de recharge ouverts au public seraient nécessaires à l'horizon 2025, et entre 330 000 et 480 000 à l'horizon 2030. Il faudra y ajouter entre 48 000 et 65 000 points de recharge destinés au transport lourd, camions, bus et utilitaires légers.
Quatre axes principaux doivent être explorés dans les prochaines années pour s'assurer que la mobilité électrique puisse répondre aux enjeux : premièrement, éviter la fracture sociale en accompagnant une réduction des coûts, pour rendre la mobilité électrique accessible au plus grand nombre ; deuxièmement, développer massivement la recharge publique et privée - sachant que 90 % des recharges ont lieu à domicile ou au travail ; troisièmement, informer et sensibiliser les particuliers et les professionnels ; quatrièmement, accélérer l'électrification du transport lourd et de la logistique urbaine, en lien notamment avec le déploiement des zones à faibles émissions mobilité.
L'électrification est probablement la brique la plus importante pour l'avenir du groupe Stellantis et pour la mobilité future de nos clients. C'est un axe majeur de développement durable.
Avec notre plan stratégique « Dare Forward 2030 », nous nous engageons à la neutralité carbone en 2038 avec deux objectifs principaux : une réduction de notre empreinte carbone de 50 % et, surtout, la totalité de nos ventes de véhicules particuliers neufs en 100 % électrique en Europe d'ici à 2030, soit cinq ans avant l'échéance fixée par la Commission européenne. Cet engagement « plein pot » dans l'électromobilité implique une transformation profonde.
La batterie d'un véhicule électrique représente environ 40 % de son prix. C'est la raison pour laquelle nous avons très tôt investi dans des gigafactories, afin de produire ces batteries en France, en Allemagne et en Italie, les investissements afférents s'élevant à plus de 7 milliards d'euros. Grâce à notre joint-venture ACC (Automotive Cells Company), située à Douvrin, dans les Hauts-de-France, nous commencerons la production dès la fin 2023. En cohérence avec notre fort ancrage en France, nous disposerons ainsi d'une gigafactory de technologie française qui fabriquera les cellules nécessaires à la sécurisation de notre chaîne de valeur.
Nos investissements et prévisions d'investissement en matière d'électrification et de softwares s'élèvent à plus de 30 milliards d'euros entre 2021 et 2025. Nous souhaitons par ailleurs sécuriser notre approvisionnement en matériaux critiques ; d'où la conclusion de différents partenariats et, par exemple, l'entrée au capital de l'entreprise Vulcan, qui développe des projets d'extraction en Allemagne et, peut-être, demain, en Alsace.
Au-delà de la mise en oeuvre de notre plan stratégique, notre groupe asseoit son leadership dans la transition énergétique du marché français. Pour preuve, depuis janvier 2022, Stellantis est numéro 1 de l'électrification en France, avec 31 % de parts de marché des véhicules particuliers et utilitaires légers en 100 % électrique et hybrides rechargeables.
Un Français sur cinq, motivé par le coût du carburant et le souhait de faire des économies, se déclare prêt à sauter le pas du véhicule électrique, mais 74 % de nos clients français se disent freinés par l'importance du prix d'achat et l'autonomie limitée. Face aux problèmes d'accessibilité de ces véhicules, de l'accompagnement des clients et de la maîtrise du coût de l'énergie, nous avons lancé, cet été, une offre innovante avec un loyer modéré, de 110 euros par mois, puis une facturation à l'usage pour les clients éligibles à la prime à la conversion. C'est aussi pourquoi une fiscalité avantageuse aide à accélérer cette transition énergétique.
Aux enjeux financiers s'ajoutent les enjeux technologiques. Je citerai l'hybride rechargeable, qui nous semble la technologie de transition parfaite pour transformer les usages, et l'hydrogène, qui alimente nos fourgons électrifiés de taille moyenne. Nous avons déjà lancé des véhicules à pile à combustible pour nos marques Peugeot, Citroën et Opel et lancerons plus de 60 modèles 100 % électrique d'ici à 2030 en Europe.
Je soulignerai enfin l'importance des infrastructures : il faut densifier la couverture du territoire en stations d'hydrogène, couvrir les zones blanches en bornes publiques, continuer à promouvoir la wallbox, qui permet de programmer la recharge rapide aux heures adéquates, et accompagner plus fortement les copropriétés ainsi que les bailleurs sociaux.
Cette électrification est un défi pour Stellantis, mais aussi, plus largement, pour notre pays et pour l'environnement. Stellantis a investi en quatre ans 2 milliards d'euros dans son appareil industriel français pour réaliser cette transformation, avec l'aide des régions et de l'État et l'appui de l'ensemble de ses salariés. Nous devrons, en effet, demain, être capables de commercialiser ces véhicules électriques à des prix comparables à ceux des véhicules thermiques, afin d'offrir à nos clients des solutions de mobilité propres, sûres et abordables.
Je m'inscris dans la parfaite continuité de tout ce qui vient d'être dit.
Renault a déjà dix ans d'expérience dans le véhicule électrique et dispose d'une gamme assez complète, de la citadine aux utilitaires. En 2021, le groupe a présenté un nouveau plan stratégique intitulé « Renaulution », avec l'ambition de faire de Renault, dès 2030, une marque 100 % électrique pour les véhicules particuliers. Sachez que toutes nos marques sont embarquées dans cette dynamique : Alpine, par exemple, va devenir 100 % électrique, et certains véhicules seront produits dans notre usine historique de Dieppe.
Je vais brièvement décliner nos trois axes prioritaires : ancrer en France une production décarbonée de véhicules électriques et la valeur ajoutée associée dans nos territoires ; développer des services innovants de nouvelles mobilités électriques ; améliorer en permanence le bilan environnemental du véhicule électrique, avec un effort particulier dans le recyclage des batteries.
Premier axe : avec Stellantis et les représentants de la filière, la Plateforme automobile (PFA), nous voulons favoriser l'écosystème autour du véhicule électrique. Nous avons ainsi conçu un grand pôle baptisé ElectriCity afin d'y produire tous nos nouveaux véhicules électriques de marque Renault - je citerai la nouvelle R4 et la nouvelle R5, mais aussi la Mégane E-Tech, assemblée à Douai, dont le moteur provient de l'usine de Cléon, près de Rouen, et le châssis de l'usine du Mans. C'est une belle réussite tricolore ! Nous avons annoncé l'implantation dans ce pôle ElectriCity d'une gigafactory en partenariat avec Envision.
Tout ceci implique une reconversion très ambitieuse de nos usines et beaucoup de dialogue social. Nous avons mis en place des campus pour anticiper les besoins en formation, accompagner les transformations des métiers et développer de nouvelles compétences, en partenariat avec la filière et avec les pouvoirs publics. Nous développons également, en Île-de-France, des activités liées à l'hydrogène, via notre coentreprise Hyvia.
Deuxième axe : les services de nouvelles mobilités. Nous avons créé une marque dédiée, Mobilize, qui propose des services de mobilité alternatifs à la possession de véhicules, ce qui accroît le partage et les taux d'utilisation de ces derniers. Un service d'autopartage, Zity, est déjà en libre-service dans les rues de Paris. Ces dispositifs nécessitent de s'adapter aux spécificités de chaque territoire et de travailler au plus près des besoins avec les pouvoirs publics, auxquels nous demandons plus de lisibilité, surtout pour la généralisation des ZFE-m. J'ajoute que la marque Mobilize se déploie aussi dans le domaine de l'énergie : nous accompagnons les particuliers, les entreprises et les collectivités locales pour choisir les solutions de recharge les plus efficaces.
Troisième axe : améliorer en permanence le bilan environnemental des véhicules électriques. Nous y travaillons sur l'ensemble du cycle de vie des produits et le bilan est d'ores et déjà positif. Notre objectif est de réduire de 20 % d'ici à 2024-2025, et de 35 % en 2030, l'empreinte carbone de la batterie de la R5 par rapport à l'actuelle batterie de la Zoe, véhicule électrique historique de Renault. Nos nouvelles batteries sont conçues dès l'origine pour être facilement réparables, réutilisables et recyclées. Nous reconvertissons l'usine de Flins, qui produit actuellement la Zoe, pour l'organiser entièrement vers l'économie circulaire. Nous développons des activités de seconde vie liées aux batteries. Pour avoir été pionniers en matière de véhicules électriques, nous récupérons aujourd'hui des batteries de Zoe vieilles de dix ou quinze ans : peu de constructeurs ont cette chance. Or ces batteries conservent au minimum 75 % de leur capacité de charge, donc une valeur extrêmement importante, après une vie entière dans un véhicule. Nous les réutilisons avant de les recycler, par exemple dans des bateaux électriques ou en faisant du stockage stationnaire. Toujours à Flins, nous développons des activités de réparation et de démantèlement des batteries : nous avons signé des partenariats en ce sens avec de grandes entreprises françaises, notamment Veolia, avec l'objectif, en 2030, de réutiliser 80 % des matériaux des batteries dans une filière de production de nouvelles batteries.
Nous développons donc une gamme de produits et de services destinés à répondre à un maximum d'usages et de situations territoriales. La production de véhicules électriques s'organise également dans une logique d'écosystème. J'insiste sur un point : poussons les entreprises à renouveler leurs flottes car celles-ci permettent, ensuite, la création d'un marché d'occasion pour les particuliers.
Mon propos s'inscrira dans le droit fil des interventions précédentes. De nombreux acteurs, gestionnaires de réseau, constructeurs, collectivités, sont mobilisés pour le développement de la filière du véhicule électrique. L'enjeu est important, puisqu'il y va de l'atteinte de nos objectifs climatiques. La neutralité carbone en 2050 implique la fin de l'utilisation des énergies fossiles, en particulier de l'essence et du diesel, aujourd'hui utilisés majoritairement dans les véhicules.
On observe un très fort développement du véhicule électrique : au mois de septembre, plus de 15 % des immatriculations en France relèvent de l'électrique pur ; chaque mois, le nombre de véhicules électriques neufs immatriculés augmente par rapport à l'année précédente, alors même que l'on constate une baisse globale du nombre de véhicules immatriculés.
Le droit de l'UE est un facteur majeur de cette évolution. Un règlement européen oblige les constructeurs automobiles à des objectifs contraignants d'émission des véhicules neufs. Le nouveau règlement en cours de discussion, adopté par le Conseil et par le Parlement, fait actuellement l'objet d'un trilogue : il prévoit la fin du véhicule thermique en 2035.
Pour accompagner ce développement, l'État met en oeuvre une série de dispositifs d'aide, à commencer par les aides à l'achat d'un véhicule électrique, bonus et prime à la conversion.
Le bonus est ouvert à tous les ménages sans conditions de revenus. Il s'élève à 6 000 euros pour l'achat d'un véhicule dont le prix est inférieur à 47 000 euros, à 2 000 euros pour l'achat d'un véhicule dont le prix est situé entre 47 000 et 60 000 euros. Ce dispositif rencontre un franc succès : plus de 170 000 bonus ont été versés en 2021, déjà 150 000 en 2022.
La prime à la conversion consiste dans le versement d'une aide supplémentaire pour la mise au rebut d'un véhicule ancien, Crit'Air 5, 4 ou 3. L'objectif est d'accélérer le renouvellement du parc roulant. Ce dispositif a aussi une vocation sociale : si tous les ménages sont éligibles à une prime à la conversion de 2 500 euros pour l'achat d'un véhicule électrique, la prime monte à 5 000 euros pour les ménages des deux premiers déciles et pour les gros rouleurs. Là encore, le succès est au rendez-vous : depuis son lancement en 2018, près de 850 000 primes à la conversion ont été distribuées. Le projet de loi de finances pour 2023 prévoit d'allouer 1,3 milliard d'euros à ces dispositifs d'aide à l'achat.
Il existe aussi un prêt à taux zéro destiné aux ménages les plus modestes, mesure figurant dans la loi « Climat et résilience » et qui entrera en vigueur en janvier 2023. Vous avez voulu que cette disposition s'applique pour une durée expérimentale de deux ans ; le décret d'application couvre toutes les possibilités ouvertes par la loi : il sera ouvert à tous les ménages modestes habitant et travaillant dans une zone à faibles émissions. Je citerai, pour compléter ce tableau, un dispositif de microcrédit réservé aux ménages précaires et un crédit d'impôt concernant l'acquisition et la pose d'un système de charge pour véhicule électrique, égal à 75 % du montant des dépenses et limité à 300 euros.
Un mot du soutien aux bornes, qui s'organise autour de trois grandes priorités : le développement des bornes ouvertes au public, via le programme de certificats d'économie d'énergie Advenir, celui des bornes en copropriété, et enfin le déploiement d'un réseau de bornes de recharge rapide sur le réseau routier national - les crédits du plan de relance ont permis d'équiper toutes les aires de services de bornes de ce type, pour un budget total de 200 millions d'euros, et le plan France 2030 consacre 300 millions d'euros à la poursuite de cet effort.
Je poserai cinq questions.
Premièrement, quid du « couperet » de 2035 et de la fin du thermique, sachant qu'avec les technologies électriques actuelles il n'existe pas de solution permettant une autonomie acceptable et satisfaisante ? La seule option consiste à fabriquer des véhicules très lourds, ce qui est une aberration absolue si l'on se réfère aux lois de la physique et au fameux E=mc2... Une start-up a même imaginé des chariots avec batterie additionnelle pour les trajets autoroutiers ! N'aurait-il pas mieux valu, tout en donnant une forte priorité à l'électrique, préserver un peu de thermique pour certains usages ? Un bouquet de solutions incluant le biogaz ou l'hydrogène vert - je souligne qu'il s'agit d'hydrogène fabriqué avec des énergies renouvelables - aurait pu être plus efficace que ce couperet.
Deuxièmement, mes chers collègues, je vous invite à lire l'excellente interview, publiée dans Le Parisien, des PDG de Stellantis et de Renault. Une réponse de Carlos Tavares sur la question du bilan carbone et du poids des véhicules m'a en particulier intéressé : lorsqu'il était jeune ingénieur, raconte-t-il, les voitures du segment B pesaient 800 kilogrammes ; aujourd'hui, les mêmes voitures pèsent 1,6 tonne ! S'est-on posé la question de savoir si l'écorce terrestre était capable de fournir 800 kilogrammes de plus par véhicule ? J'évoquerai à ce propos une visite que j'ai faite récemment à l'École des mines de Nancy : un chercheur m'a présenté un dispositif pédagogique numérique développé à l'attention du monde politique, des chercheurs et des citoyens. Il vise à faciliter la prise de décision pour optimiser la sélection des produits en tenant compte de la rareté des métaux stratégiques utilisables pour la fabrication des batteries.
Troisièmement, je souhaite que nous fassions un point sur la task force sur la transition énergétique du transport de marchandises, trop souvent oubliée dans les débats.
Quatrièmement, je souhaite également interpeller les constructeurs quant au poids des véhicules. On assiste au développement de scooters électriques, de vélos hybrides - qui utilisent l'énergie musculaire - ou de microvéhicules électriques nommés « intermédiaires » par le chercheur Frédéric Héran. Or aucun des grands constructeurs ne semble vouloir aller dans ce sens, tant le modèle économique du SUV, lourd par définition, est profitable.
Cinquièmement, si le leasing social est mis en oeuvre de façon à permettre à de nombreux ménages modestes de changer de motorisation, cela entraînera une forte hausse de la demande. Comment comptez-vous y répondre ? Il est évident qu'il ne sera pas possible de faire acheter des SUV électriques à 100 euros par mois...
Je commencerai par poser une question à l'ensemble des intervenants. Nous nous sommes dotés d'un objectif ambitieux de développement des véhicules électriques ; c'est un défi pour vos filières, qui suppose de se réinventer et de développer de nouveaux approvisionnements et réseaux de distribution. L'Europe et la France ont fixé des objectifs dans un contexte différent de la situation actuelle. Nous devons désormais faire face à d'importantes hausses du coût de l'électricité, à des craintes de pénuries et à de fortes tensions concernant certains matériaux comme les semi-conducteurs. Eu égard à ces difficultés, l'objectif de fin de vente des véhicules thermiques vous paraît-il toujours pouvoir être atteint ? Faut-il faire ou non évoluer cette trajectoire ? Je souhaite que vous puissiez répondre sans détour à ces interrogations.
J'adresserai ensuite à M. David une question plus spécifique sur l'aide à l'acquisition des véhicules électriques : l'an dernier, nous nous avions lutté - et je pèse mes mots - pour conserver dans le projet de loi « Climat et résilience » la disposition portant création d'un prêt à taux zéro pour l'achat d'un véhicule propre. Cette disposition s'appliquera pendant deux ans, ce qui nous paraissait déjà insuffisant au moment de la réunion de la commission mixte paritaire sur ce texte, et le plafond de ressources choisi pour pouvoir en bénéficier nous semble toujours inadapté. À l'époque, le Gouvernement s'était opposé à cette proposition, tout comme la majorité à l'Assemblée nationale, mais nous avions obtenu gain de cause. Certains députés souhaitent maintenant étendre le champ de ce prêt à taux zéro avec le soutien du Gouvernement. Nous ne pouvons que nous réjouir de cette volte-face : les temps changent !
Sur le leasing social, avez-vous des précisions à nous communiquer ? En effet, depuis l'annonce du Gouvernement, personne n'a pu nous dire comment le dispositif allait fonctionner, à qui il doit bénéficier et s'il répond aux besoins de nos concitoyens.
Le règlement européen, dans sa version en cours de discussion, prévoit la fin de la vente des véhicules thermiques en 2035, et je précise que les véhicules à hydrogène sont inclus dans la liste des véhicules à zéro émission. À l'heure actuelle, tel que le règlement est rédigé, ce sont les émissions instantanées à l'échappement qui sont prises en compte, mais il nous semble que la perspective d'une production de carburants à zéro émission nette - c'est-à-dire sur l'ensemble du cycle du produit - du type biocarburants ou carburants verts, devrait aussi être prise en considération. Dans cette perspective, la France s'est battue, au Conseil, pour que ce règlement soit assorti d'une clause de revoyure, et l'a obtenue pour 2026. La Commission devra donc faire des propositions en vue d'un élargissement du champ des véhicules qui pourraient être utilisés après 2035.
La Task force automobile est le groupe réunissant l'ensemble de la filière au sein de Mobilians et l'État dans le cadre du contrat stratégique de filière prévu jusqu'à fin 2022. Des réflexions sont en cours pour l'élaboration d'un nouveau contrat.
Le leasing social est évidemment un sujet compliqué. Il fait l'objet de très nombreux travaux au sein de l'État, mais aussi avec l'ensemble des parties prenantes, notamment les constructeurs automobiles et les loueurs, l'objectif étant d'ouvrir l'accès à un véhicule électrique pour moins de 100 euros par mois aux Français les plus modestes. Le dispositif est en cours de calage, avec un gros point d'attention pour l'État, à savoir que 100 % de ces véhicules doivent être fabriqués en France. Il s'agit d'éviter que le leasing social contribue à accélérer l'importation de véhicules électriques en provenance de Chine.
La question a été posée de la fin de la motorisation thermique et du diesel. Notre président a longtemps plaidé pour que le choix des technologies ne soit pas imposé aux constructeurs. Néanmoins, la réglementation européenne nous place aujourd'hui dans une trajectoire 100 % électrique et nous serons au rendez-vous de cette réglementation. Avec une technologie comme l'hybride rechargeable, nous aidons à faire cette transition en permettant de combiner l'accès aux ZFE-m et la possibilité d'effectuer des trajets routiers plus longs en cas de nécessité.
Quant aux solutions alternatives, nous continuons d'innover et d'explorer, notamment en équipant des véhicules électriques de piles à combustible pour en faire des véhicules à hydrogène légers, avec une recharge (« refuel ») beaucoup plus rapide que la recharge électrique.
Enfin, pour évoquer des problématiques très urbaines, Citroën a mis au point un petit véhicule urbain appelé Ami, qui rencontre un véritable succès. Par ailleurs, la marque Peugeot a lancé des vélos et des scooters électriques. Nous considérons donc que le besoin vient du client et que nos productions de mobilité légères doivent répondre à leur demande.
Je rejoins tout à fait ce qui a été dit : nous prenons acte de ce qui a été voté pour 2035. M. Jacquin a soulevé la question de l'autonomie et c'est un sujet qui peut être abordé de plusieurs façons. On peut effectivement empiler et alourdir les batteries mais tout notre effort porte plutôt sur l'amélioration de la charge rapide. La nouvelle Mégane, par exemple, permet jusqu'à 470 kilomètres d'autonomie et, avec une charge rapide, elle peut satisfaire la plupart des usages. Par ailleurs, les batteries coûtent cher, y compris pour l'usager. Le poids du véhicule est également un enjeu majeur, comme vous l'indiquez, et ce paramètre est systématiquement pris en compte par les constructeurs automobiles, car il a un impact direct sur la consommation d'un véhicule thermique et sur l'autonomie d'un véhicule électrique. Je rappelle aussi que l'augmentation du poids des véhicules est un sujet complexe : il n'est pas seulement imputable aux batteries, mais aussi à de nombreux éléments comme les dispositifs de dépollution ou ceux qui sont imposés par des normes de sécurité routière ; on peut également mentionner le système avancé d'aide à la conduite (ADAS), etc.
Comme Sandrine Bouvier l'a souligné, nous développons des petits véhicules et Renault a été assez novateur dans ce domaine avec la « Twizy ». Nous construirons d'autres véhicules de ce type et ce n'est donc pas un segment que nous abandonnons, bien au contraire, puisque Renault a aussi une Twingo électrique et développera bientôt une R5 à un prix abordable.
Vous avez également évoqué le transport des marchandises. Nous examinons très attentivement ce sujet, en particulier dans nos approvisionnements - « supply chain » - pour décarboner nos moyens de production. Depuis 2015, Renault a ainsi diminué de 15 % ses émissions de CO2 liées au transport de marchandises. Notre objectif est de porter ce chiffre à au moins 30 % d'ici 2030.
S'agissant de l'autonomie des véhicules, je rappelle qu'en moyenne, les Français parcourent 30 kilomètres par jour mais il faut aussi prévoir les déplacements de plus longue distance, notamment lors des départs en vacances. Aujourd'hui, 60 % des modèles de véhicule ont une autonomie de plus de 300 kilomètres. Le déploiement de la recharge rapide sur les grands axes routiers facilitera les pauses toutes les deux heures pour recharger son véhicule et en même temps se conformer aux préconisations de la sécurité routière.
Le transport routier de marchandises est effectivement un enjeu majeur puisqu'en Europe, les camions représentent 2 % des véhicules mais 22 % des émissions de CO2. Une task force s'est réunie à de nombreuses reprises au cours des deux dernières années, avec, en matière de décarbonation, une feuille de route prévue par l'article 301 de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets. Plusieurs groupes de travail poursuivent leurs délibérations sur les différents segments : mobilité, transport de marchandises, transport de voyageurs, utilitaires légers, engins. Un groupe de travail a également été créé afin d'identifier la disponibilité de chaque énergie, l'idée étant de s'assurer que nous puissions effectivement répondre aux enjeux de la mobilité lourde et identifier les besoins à l'horizon de 2025.
La question des minerais est essentielle. Le rapport Varin de janvier 2022 sur la sécurisation de l'approvisionnement en matières premières minérales est très instructif. Je vous invite également à consulter le numéro 26 de la revue Géosciences du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), qui traite de ces questions. Il est important de ne pas passer d'une dépendance à l'autre. C'est pourquoi les constructeurs développent des solutions sur le territoire français pour s'assurer que le traitement des minerais non disponibles en Europe - même s'il existe certains gisements qui pourraient y être exploités - ne se fasse plus à l'étranger et pour capter sur nos territoires plus de valeur ajoutée.
Par ailleurs, aujourd'hui, les batteries ont une durée de vie de dix à quinze ans, avec une seconde vie de même durée pour le stockage. Pour l'instant, il y a peu de batteries à recycler puisque les flottes de véhicules électriques sont récentes, mais le recyclage permettra de réutiliser leurs composantes en minerais.
Ma question s'adresse à M. David. La loi d'orientation des mobilités prévoit la possibilité pour les collectivités locales et les intercommunalités de réaliser des schémas directeurs de développement des stations de recharge pour véhicules électriques, en lien avec les acteurs de la mobilité du territoire. Ce dispositif leur donne un rôle de chef d'orchestre du développement de l'offre de la recharge afin d'aboutir à une offre coordonnée entre les maîtres d'ouvrage publics et privés. Ces schémas permettent-ils réellement un déploiement homogène sur le territoire des infrastructures de recharge ?
Une autre difficulté concerne les secteurs sauvegardés ou protégés. Je pense aux exigences architecturales qui ne sont pas toujours compatibles avec les nécessités techniques liées à l'implantation des bornes. Il est difficilement envisageable de cacher une borne pour respecter les prescriptions architecturales, le risque étant que celle-ci ne soit pas identifiable par l'utilisateur. Les panneaux signalétiques et les marquages au sol sont également remis en cause dans les périmètres architecturaux. Au niveau administratif, la déclaration préalable apparaît ainsi comme une contrainte non négligeable. Ne faudrait-il pas faciliter les démarches d'installation pour favoriser un maillage cohérent sur l'ensemble du territoire ?
J'ai participé le mois dernier à l'inauguration du plus grand site français de points de recharge pour les voitures électriques, avec 500 bornes installées par une filiale d'EDF, Izivia, sur le parking des salariés du centre nucléaire de production d'électricité de Flamanville, dans la Manche. On ne peut que se féliciter du développement du réseau de bornes de recharge. Néanmoins, afin d'équilibrer les appels de puissance, un système de « foisonnement » se met en place, si bien que les propriétaires de véhicules n'ont plus, d'une certaine façon, la main sur le planning de recharge.
Je rebondis également sur les propos de Jean-Philippe Bonnet et de Pierre de Firmas : les véhicules électriques, en particulier avec les smart grids, vont devenir des réservoirs énergétiques en réinjectant sur le réseau la charge résiduelle en période de pointe pour recharger en heures creuses. Je ne conteste pas le bien-fondé de cette démarche, mais cela nous fait basculer dans un autre monde. J'en veux pour preuve l'arrêté ministériel du 22 septembre dernier, qui fait beaucoup parler de lui et donne pouvoir aux gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité de désactiver la charge des ballons d'eau chaude pendant la période de onze heures à quinze heures trente, et ce sans concertation. Le lissage risque de se faire de façon arbitraire, par le biais des technologies numériques. Quels dispositifs d'information, d'association ou d'appropriation avez-vous prévus pour accompagner ces propriétaires de véhicules électriques qui vont contribuer au lissage et réinjecter sur le réseau le surplus de charge lorsqu'ils seront rentrés le soir à leur domicile ?
On assiste effectivement à un très fort développement du véhicule électrique. À l'heure de la planification écologique, pouvez-vous nous préciser le rôle de l'État dans le déploiement équilibré des bornes de recharge sur l'ensemble du territoire ? C'est un vrai enjeu en Centre-Val de Loire ou en Pays de la Loire que je connais bien. Cette dernière région ne compte que 86 points de recharge pour 100 000 habitants, ce qui est très en deçà de la moyenne nationale. Comment assurez-vous une répartition équilibrée du réseau sur l'ensemble du territoire ? Portez-vous une attention particulière aux territoires peu denses afin de garantir l'égalité territoriale et un maillage intelligent ?
À l'heure actuelle, c'est un véritable stress pour recharger son véhicule électrique ; lorsque l'on dépasse une certaine distance, on ne connaît pas les limites du voyage.
Par ailleurs, les constructeurs ont beaucoup parlé de recyclage des batteries et d'économie circulaire, mais je ne vous ai pas entendu parler de « rétrofit ». Dans un contexte de pénurie de métaux annoncé par M. Jancovici, il pourrait s'agir d'une initiative intéressante. Est-ce toujours d'actualité ?
Les propos des intervenants traduisent une situation du véhicule électrique plutôt satisfaisante, même si les coûts d'acquisition restent élevés malgré les dispositifs mis en place. Avez-vous des propositions pour améliorer les ventes et permettre une baisse des coûts de production ? Les aides sont-elles suffisantes ? Sont-elles bien ciblées ?
S'agissant des minerais, les Chinois sont aujourd'hui leaders en matière de production de véhicules électriques et fabriquent les trois quarts des batteries lithium-ion. Ils contrôlent plus de la moitié des capacités de transformation et de raffinage du lithium, du cobalt et du graphite. Selon l'Agence internationale de l'énergie, les besoins en lithium sont importants et la situation sera critique dans les prochaines années. Quelle est la stratégie européenne ou française sur ce sujet ? Pouvez-vous également nous dire un mot des recherches concernant les batteries produites sans lithium et sans cobalt ? Les gigafactories françaises sont-elles mobilisées sur cette question ?
Le secteur industriel des constructeurs et des équipementiers a déjà perdu beaucoup d'emplois - avec une diminution de 40 % dans le Grand Est depuis 2007. Il semble établi que la production de voitures électriques est nettement moins intensive en emplois que la production de véhicules thermiques. L'an dernier, un rapport important de la CFDT et de la Fondation pour la nature et l'homme a conclu que seule la transition accélérée en France permettrait de maintenir durablement les savoir-faire, les productions, donc les emplois. Ses auteurs en appellent à un grand dialogue social, industriel et sociétal pour construire un scénario positif, à l'image de nos voisins allemands. Comment pensez-vous réussir cette transition de l'électromobilité tout en évitant les trop lourds impacts sociaux en termes d'emplois ?
Je suis élue du Lot, un département très rural. Je signale qu'à l'occasion du congrès des maires qui s'est tenu au Palais des congrès de Cahors vendredi dernier, plusieurs élus ont eu du mal à recharger leur véhicule électrique. La recherche d'une prise de branchement a été pour eux un stress important. Comment assurer un maillage correct et équitable des bornes sur le territoire ? Il ne s'agit pas seulement des habitants des territoires ruraux, car beaucoup d'entre eux rechargent leur véhicule exclusivement à leur domicile mais aussi, par exemple, des citadins qui partent en vacances. La mobilité ne sera assurée que s'il y a des bornes partout où on en a besoin.
Par ailleurs, les maires ont témoigné que le coût de la recharge est très variable d'une borne à l'autre : le prix d'une recharge peut même être supérieur au coût d'un plein d'essence classique ! Dans ces conditions, compte tenu de leur prix d'achat élevé au départ, comment développer le recours aux véhicules électriques pour diminuer les gaz à effet de serre ?
Ma question porte sur l'amont et sur l'origine de l'énergie utilisée - je pense aux énergies renouvelables. Le projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables vient d'être déposé sur le Bureau du Sénat. Dans la mesure où 88 % des utilisateurs sont en résidence individuelle, ne pourrait-on imaginer une offre globale - un « package » associant constructeurs et installateurs de bornes - lors de l'acquisition d'un véhicule électrique qui favoriserait l'autoconsommation d'énergies renouvelables ? C'est peut-être une piste que nous pourrions explorer dans ce texte. L'autoconsommation est un élément important qui pourrait constituer une réponse aux futurs besoins du réseau.
De nombreuses collectivités se sont saisies de la possibilité offerte par les schémas directeurs d'installation des infrastructures de recharge. La majorité des schémas sont réalisés au niveau départemental, grâce à un appui très fort des autorités organisatrices de la distribution d'énergie (AODE). Beaucoup de schémas sont en cours d'élaboration ; six seulement sont approuvés mais d'ici la fin de l'année, plus de la moitié d'entre eux seront validés.
L'État s'est engagé à mettre en place un maillage extrêmement resserré de bornes de recharge rapide sur le réseau routier national. Cela concerne les autoroutes, mais aussi les voies rapides non concédées. Il existe également un dispositif d'aides au niveau local, qui finance actuellement 30 % de la borne. On est dans une dynamique de développement simultané des véhicules électriques et des bornes. Il faudra bien entendu repérer les zones blanches et prévoir un système d'aides spécifiques pour pouvoir les couvrir. Toutefois, globalement, nous assistons à un développement très fort des bornes sur l'ensemble du territoire, en milieu urbain mais aussi en milieu rural.
Je propose de compléter les réponses sur le schéma directeur relatif aux infrastructures de recharge de véhicule électrique (IRVE). Le gestionnaire de réseau est un acteur important dans l'établissement de ces schémas, que nous accompagnons. Ce qui est intéressant dans cette démarche, c'est qu'elle permet de partager les scénarios de développement de la mobilité électrique avec les collectivités. Nous y intégrons aussi l'initiative privée - je pense ici aux plans de déploiement sur les parkings d'hypermarchés, etc. En effet, c'est aussi une composante très importante pour parvenir à un maillage harmonieux sur l'ensemble du territoire. Il y a, certes, des zones blanches, mais, dans l'ensemble, le mouvement est très bien parti.
Une incitation a été mise en place en faveur du schéma directeur : les coûts de raccordement au réseau des bornes de recharge installées dans ce cadre sont pris en charge à hauteur de 75 %.
M. Houllegatte a évoqué les smart grids. Cette possibilité de pilotage de l'énergie est effectivement une caractéristique très intéressante de la mobilité électrique. Mais, pour relativiser le cas du ballon d'eau chaude qui a été cité, ce n'est pas parce qu'il est pilotable que le réseau de distribution doit en assurer la conduite. Vous avez cité un arrêté récent, mais il s'agit de circonstances tout à fait particulières. En tout état de cause, le vehicle-to-grid (V2G), qui désigne le caractère bilatéral de la connexion d'un véhicule électrique avec la possibilité de réinjecter de l'énergie dans le réseau, s'inscrit dans un avenir un peu plus lointain. Certains véhicules sont déjà compatibles et des expérimentations se font ici et là, mais nous n'en sommes pas encore à l'industrialisation de ce procédé.
Pour compléter votre propos, nous avons procédé, dans mon département, en partenariat avec le syndicat d'énergie et la région, au maillage territorial. Le prix de la recharge dépend du syndicat d'énergie et ces derniers ont donc un rôle important à jouer car il ne faudrait pas que les tarifs excèdent ceux d'un plein d'essence.
Je note que vous avez mis sur le même plan la possibilité pour un véhicule de réinjecter de l'électricité dans le réseau et celle de déconnecter le signal heures creuses sur les chauffe-eaux cet hiver. Bien sûr, ce sont deux mécanismes qui permettent d'agir sur la demande. Pour autant, je signale que les deux logiques sont totalement différentes. En ce qui concerne les chauffe-eaux, il s'agit de valoriser la flexibilité : il y a un gain collectif à pouvoir lisser les appels de puissance. En ce qui concerne les véhicules, l'idée est de rémunérer les propriétaires pour le service rendu. Nul n'imagine sérieusement de le faire sans l'accord du propriétaire : ce serait purement et simplement du vol !
Nous souhaitons développer cette possibilité, qui permet à des propriétaires de retirer de la valeur de leur voiture en stationnement, s'ils estiment cela compatible avec l'usage qu'ils en font. À l'inverse, couper les chauffe-eaux relève des mesures d'urgence, dans une situation de crise énergétique : cela serait mis en oeuvre en cas de véritable nécessité.
On met en balance, d'un côté, la restriction temporaire et surmontable d'un usage limité à l'eau chaude et, de l'autre, la coupure totale d'électricité qui serait préjudiciable à un certain nombre d'usagers.
Nous rejoignons vos propos sur la nécessité d'assurer un maillage du territoire aussi homogène que possible, et de répondre aux besoins des habitants, des travailleurs ainsi que des touristes. J'apporterai cependant deux nuances.
Premièrement, il ne faut pas considérer le seul nombre de points de recharge, mais aussi prendre en compte la puissance installée. Ainsi, la Bourgogne-Franche-Comté compte quatre fois moins de points de recharge que la région la mieux dotée, à savoir l'Île-de-France ; cependant, en puissance installée, cela ne représente qu'une différence d'un à deux. Cela s'explique par le fait qu'en Île-de-France, de nombreux points de recharge lents ont été installés pour répondre aux besoins spécifiques de personnes qui n'ont pas de place de stationnement à domicile.
Deuxièmement, dans les territoires ruraux, la part de maisons individuelles est plus importante et, par conséquent, les capacités de recharge sont plus grandes. Depuis dix ans, nous réunissons dans le cadre d'un cercle des collectivités électromobiles, avec une bonne partie des syndicats d'énergie des communes et métropoles : ces acteurs de terrain souhaitent développer des recharges rapides, notamment à des endroits stratégiques comme les lieux touristiques, plutôt que des nouveaux points de recharge. Tel est l'intérêt des schémas directeurs : donner une vision locale du déploiement de la recharge.
À propos du défaut de borne de recharge au Palais des congrès de Cahors que vous avez mentionné, vos élus trouveront à mon avis une solution d'ici à 2025. En effet, la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d'orientation des mobilités prévoit à cette date l'équipement des parcs et des bâtiments non résidentiels. D'ici là, les centres commerciaux, notamment, ont prévu des déploiements importants.
Je vous sais très attentifs aux besoins des territoires et tous nous font remonter, en lien avec les schémas directeurs, la difficulté à intégrer les opérateurs privés. Par « opérateurs privés », j'entends des acteurs tels que les centres commerciaux et supermarchés. Si ces derniers mettent en place un nombre important de bornes, l'intérêt pour la puissance publique locale d'en déployer à proximité est bien entendu limité. Organiser un tel dialogue reste cependant difficile et les syndicats d'énergie souhaitent avancer sur ce sujet.
Concernant l'emploi, nous avons partiellement participé aux travaux de la Fondation pour la nature et l'homme et de la CFDT. Les besoins seront importants en installateurs de bornes de recharge. D'autres métiers, au-delà du secteur automobile, vont être nécessaires. Il faudrait s'interroger le plus tôt possible sur la mise en oeuvre de moyens permettant d'assurer formations et reconversions.
Pour revenir sur la question du coût, les cartes sont rebattues à l'heure actuelle en raison de l'inflation et des difficultés d'approvisionnement. En dehors de cette conjoncture, il était estimé que l'équité prix serait atteinte autour de 2027 entre les véhicules électriques et thermiques. Des études comme celles de l'UFC - Que Choisir montrent que l'électrique est déjà plus rentable que le thermique après trois à quatre ans d'utilisation, grâce au coût de l'énergie. Le problème actuel est que les opérateurs de recharge, notamment publics, voient leurs coûts de fourniture triplés. Certains ont des contrats qui n'arriveront à échéance que l'an prochain, d'autres y sont confrontés dès à présent. On anticipe, du fait de cette crise conjoncturelle, une augmentation des coûts sur certains réseaux de 20 % à 50 %. Cela ne remet pas en cause la mobilité électrique sur le long terme ni sa rentabilité : la recharge à domicile coûte 2 euros pour cent kilomètres, contre 12 euros pour le thermique. Quand bien même cet écart demeure important, nous vous invitons à réfléchir à un accompagnement des opérateurs, en particulier des bornes de recharge publiques et de copropriété, qui ne bénéficient pas du bouclier tarifaire.
L'usine de Flins est entièrement dédiée à prolonger la durée de vie des véhicules et de leurs composants. Cela comprend la réparation des batteries, leur démantèlement, des activités de seconde vie... Dans le cadre de ces activités, déjà opérationnelles, le rétrofit de véhicules est en projet.
Je signale qu'il est compliqué d'être rentable sur le rétrofit de véhicules particuliers : quelque soient les efforts consentis, cela coûte extrêmement cher et il est peu rentable de transformer un véhicule assez ancien qui a perdu de sa valeur. Il est par conséquent opportun de cibler certains véhicules, par exemple des utilitaires spécialement aménagés, et en particulier ceux qui rencontrent des difficultés à accéder à des zones à faibles émissions mobilité. Pensons aux artisans disposant d'un camion transformé de manière onéreuse, comme les camions frigorifiques : nous pourrions ainsi les électrifier.
Sur le thème de l'emploi, la production d'un moteur électrique n'a effectivement rien à voir avec celle d'un moteur thermique : les compétences sont totalement différentes. L'enjeu, énorme, est donc celui de la reformation de nos salariés, pour laquelle Renault a lancé le dispositif ReKnow University, et, au-delà, de nos partenaires. Il est prévu d'atteindre les 10 000 reformations d'ici à 2024 et 2 600 ont déjà été réalisées, grâce aux campus sur nos usines, notamment à Flins.
Un des sujets majeurs pour créer à nouveau de l'emploi est de ne pas en rester à l'assemblage des véhicules en France, mais d'y localiser la valeur ajoutée. À cet égard, le véhicule électrique représente de nombreux gisements de création de nouvelles filières : électronique de puissance, batteries... Cela relève de la haute technologie et nous souhaitons développer ces métiers de pointe autour de nos usines.
Je mentionnerai nos diverses actions pour abaisser le coût des véhicules. Ainsi, nous déployons des offres innovantes sur des petits véhicules comme la Peugeot e-208 ou l'Opel Corsa-e, pour aider nos clients à entrer dans cet univers. Nous proposons également au client, par exemple avec la Fiat 500 électrique, de choisir le format de leur batterie en fonction de leur besoins et d'arbitrer entre le poids et l'autonomie qu'ils souhaitent.
Le coût de la recharge est élevé dans certains cas ponctuels, comme sur l'autoroute. Il ne faut pas oublier que cela existait déjà avec le thermique : un plein sur autoroute a toujours été plus coûteux. Nous tâchons d'accompagner nos clients pour qu'ils disposent d'une solution de recharge adapté et notre coentreprise qui s'appelle « Free2Move eSolutions » et qui leur propose un accès à l'ensemble des bornes en leur permettant de choisir une solution conforme à leur besoin. S'ils ne sont pas pressés, ils peuvent choisir une solution peu coûteuse ; ils peuvent sinon se tourner vers une option plus chère, selon l'urgence de leur déplacement.
Quant aux énergies renouvelables, nous disposons de 22 hectares de panneaux photovoltaïques à Sochaux, qui nous permettent d'alimenter 10 % des besoins de l'agglomération : ils attestent de l'engagement de notre groupe dans le verdissement.
Aujourd'hui, les constructeurs produisent moins de véhicules et gagnent plus d'argent : cela traduit une montée en gamme, qui génère des plus-values plus importantes. La production de véhicules d'entrée de gamme suscite cependant l'inquiétude : des petits modèles urbains, thermiques, ont été abandonnés. Que pouvez-vous nous dire du développement de petits véhicules électriques urbains, notamment de modèles ne nécessitant pas de permis de conduire, comme les voiturettes ?
Par ailleurs, comment la planification est-elle à l'heure actuelle inscrite dans les schémas directeurs comme les schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet) ? Comment la cristalliser et la traduire en une politique de ressources et de besoins au niveau des schémas de cohérence territoriale (SCoT) ? La réflexion en matière de planification territoriale est-elle partagée par les collectivités ? Existe-t-il une vision commune quant à la montée en puissance de l'électrique, qui nécessite un renforcement des réseaux, lequel est à la charge des collectivités ? Pourriez-vous également développer la problématique du « stockage tampon » ?
Enfin, il existe différentes catégories de bornes et d'abonnements, ce qui soulève, du fait de la multiplicité des fournisseurs, un problème de portabilité financière : il est difficile de passer d'un abonnement à un autre, et, sans abonnement, les tarifs sont moins intéressants. Pourriez-vous nous en dire davantage sur ce point ?
En tant que sénatrice des Yvelines, je m'intéresse particulièrement aux implantations de Stellantis et Renault, mais j'élargirai ici mes interrogations aux outre-mer.
Le marché de la voiture électrique représente environ 16 % des ventes : ce chiffre est encore faible, mais le développement sera exponentiel, avec le basculement vers le tout-électrique d'ici à 2035 en Europe. Aussi, il me semble important d'aborder le problème des déchets, en particulier dans nos territoires ultramarins. Leurs contraintes sont les mêmes que sur le continent européen au niveau de l'exportation de ces déchets, mais aussi de la recyclabilité - ne serait-ce que de la batterie -, qui n'est pas prise en charge localement. Il suffit de penser au poids environnemental de ces déchets à La Réunion. Au-delà des discours, quelle masse critique peut-on atteindre dans ces territoires ?
Stellantis et Renault développent-ils une réflexion au sujet de ces territoires ultramarins ?
Quelle est, monsieur David, la stratégie du Gouvernement concernant ces régions ultrapériphériques ?
Je souhaite mettre en garde contre les risques qui pèsent sur notre tissu industriel du fait de la montée en puissance des voitures électriques, en particulier sur le décolletage, pratiqué majoritairement par des entreprises situées dans la vallée de l'Arve, dans mon département de la Haute-Savoie. Selon une étude, sollicitée par la plateforme automobile et réalisée par le cabinet Alix Partners, les industries de l'automobile perdront, en quelques années, 15 % à 30 % de leur effectif de production, ce qui représente, dans le scénario le plus pessimiste, jusqu'à 90 000 emplois. La transition vers l'électrique permettra dans le même temps d'en créer entre 8 000 et 11 000, à condition de former les salariés et de monter en compétence. La plateforme automobile s'inquiète du sort de certaines filières, dont le décolletage, l'emboutissage et la fonderie, qui sont des métiers dépendant fortement du marché automobile. Je rappelle que les voitures électriques nécessitent huit fois moins de pièces de décolleté qu'une voiture thermique. La contribution des fournisseurs français à la fabrication d'éléments et de pièces de motorisation pourrait ainsi diminuer de plus de 10 %, le risque étant de délocaliser les productions dans des pays aux coûts plus compétitifs.
Un plan de diversification, bienvenu, à destination du secteur du décolletage a été mis en place l'année dernière par le ministère de l'économie : il faudra résolument poursuivre l'accompagnement tant de la filière que de la recherche et développement des entreprises du secteur afin de poursuivre la diversification.
La DGEC inclut-elle ces considérations dans ses travaux en matière de développement des véhicules électriques ? Travaille-t-elle de concert avec le ministère de l'économie à ce sujet ?
Je souhaite d'abord mettre en avant les problèmes de raccordement au réseau dans mon département, la Charente, où de nombreux chantiers de panneaux photovoltaïques sont à l'arrêt à cause de transformateurs déclarés saturés par Enedis. J'ai encore reçu ce matin un courrier en provenance d'un porteur de projet de centrale photovoltaïque : les projets éoliens étant prioritaires, la durée de raccordement au réseau pour une telle centrale facile à mettre en place est de... sept à dix ans ! La colère gronde au sein de ces territoires qui produisent des énergies renouvelables sans obtenir la capacité de se raccorder dans des délais corrects.
Ensuite, que pensent les constructeurs de l'avis tranché de Jean-Marc Jancovici, lequel estime que nos ressources en métaux, comme le nickel, ne suffiront pas à convertir l'ensemble du parc automobile ? De plus, au regard de notre dépendance aux métaux rares, la filière automobile française aura-t-elle les moyens de lutter contre la concurrence chinoise qui s'apparente à un véritable dumping social et environnemental ?
Enfin, les constructeurs s'attaquent-ils à la lutte contre l'émission de microparticules issues de l'usure des pneus ? Une étude récente démontre en effet que les pneus émettent 1 850 fois plus de particules que l'échappement, ce que nous soulignions avec Rémy Pointereau dans le rapport d'information intitulé Transport de marchandises face aux impératifs environnementaux.
Avec ma collègue Christine Herzog, j'ai rédigé un rapport d'information relatif à la logistique urbaine durable, au nom de notre commission. Les personnes que nous avons alors rencontrées nous ont signalé l'impossibilité, à court et à moyen terme, de se procurer des véhicules propres dans la catégorie des véhicules lourds. Dans quels délais aboutiront les groupes de travail chargés de se pencher sur ce problème ? La difficulté à construire des batteries adaptées à ces véhicules se confirme-t-elle ?
Une part de plus en plus importante de nos concitoyens souhaite participer à la transition écologique et énergétique, même s'ils émettent des doutes face à l'avancée à marche forcée au niveau européen, au moment même où il est difficile de garantir l'approvisionnement en électricité et des coûts acceptables.
Je reviens, en tant qu'ancien président du syndicat départemental d'énergie de Saône-et-Loire, sur les réseaux de bornes de recharge : pouvez-vous nous préciser les efforts réalisés en direction de l'habitat collectif ? Pouvez-vous nous en dire davantage sur les plateformes, afin que chaque usager puisse savoir quelle est la borne la plus proche ?
Nous attendons toujours les opérateurs privés, censés fournir une offre de recharge au niveau national : on nous avait garanti leur déploiement lorsque, il y a quelques années, nous avions envisagé de déployer des bornes de recharge dans mon département. Si le privé renonce à s'engager, doit-on s'inquiéter de l'équilibre économique d'ensemble ?
Développez-vous une réflexion sur la possibilité de disposer de batteries additionnelles, par exemple lorsqu'il s'agit de partir en vacances ?
Du fait de la mécanique simplifiée de la voiture électrique, quelles sont les conséquences envisagées sur le réseau des garagistes et sur les coûts de réparation ?
La Commission européenne envisage d'interdire le plomb. Or d'après nos auditions, 80 % du plomb est utilisé par les batteries des véhicules électriques : pourrait-il être remplacé ?
Je reste assez pessimiste sur la trajectoire qui nous conduit à l'obligation totale de rouler en voiture électrique et presque rassuré de savoir que je serai mort d'ici là ... (murmures de sympathie).
Le développement des voitures électriques se fonde sur l'extraction de métaux rares comme le lithium tandis que nos idéologies liées à la transition mettent en avant nos responsabilités accrues. Or le lithium contamine les cours d'eau, tout comme l'air, et son acheminement se fait grâce à des supertankers en provenance de pays lointains, ce qui accroît notre dépendance. Il faut noter que des recherches de ce minerai sont déployées en France, notamment en Alsace, dans le Bas-Rhin, où je suis élue.
Pour extraire une tonne de lithium, sachez qu'il faut 6 millions de litres d'eau, ce qui correspond, pour un kilo de lithium, à 6 000 litres d'eau. Pour arriver aux 3 800 tonnes par an, à terme, il nous faudra donc un peu plus de 23 milliards de litres d'eau... Pourtant, la question de l'eau sera rapidement un problème environnemental majeur. Quel est donc, de ce point de vue, l'intérêt de vouloir passer au tout-électrique ? S'agit-il réellement d'une protection de l'environnement, alors que la décarbonation issue du fonctionnement des véhicules ne sera pas suffisante pour compenser les nuisances provenant des méthodes d'extraction et de transport ?
Un mot sur les territoires ultramarins, qui sont une priorité dans le cadre du développement du véhicule électrique, avec des problématiques spécifiques à chaque territoire. Des réflexions sont conduites dans le cadre de l'élaboration conjointe par l'État et les collectivités des programmations pluriannuelles de l'énergie.
Dans ces territoires, le véhicule électrique peut jouer un rôle extrêmement important, en raison de l'absence de déplacements de très grande distance. Il existe des dispositifs d'aide spécifiques, en particulier des bonus à l'achat plus élevés pour tenir compte du coût plus important des véhicules. Un travail important est mené avec EDF-SEI (Systèmes énergétiques insulaires) pour essayer d'intégrer le véhicule électrique dans ces réseaux de petite taille.
En ce qui concerne la logistique urbaine, nous avons largement évoqué les voitures électriques, mais se développent également les véhicules utilitaires légers (VUL) et les poids lourds électriques. Au Salon de Hanovre, les constructeurs ont présenté des poids lourds électriques qui couvrent l'ensemble de la gamme, y compris des camions de plus de 44 tonnes qui ne sont pas autorisés en France. La mobilité électrique n'est donc pas nécessairement réservée aux voitures. En France, un système d'appel à projets a été mis en place pour soutenir le développement des poids lourds électriques, qui nécessitent des bornes particulières, situées en général sur le réseau de transport, avec de fortes puissances. Le segment des poids lourds électriques est en phase de décollage : le décalage par rapport aux véhicules est d'environ cinq à dix ans.
Mon collègue d'Enedis a évoqué le fait que des bornes étaient installées chez des particuliers sans augmentation de puissance. Dans la région Nouvelle-Aquitaine, la préfète a demandé à Enedis et RTE de préparer le réseau à accueillir 14 gigawatts de puissance - l'équivalent de 16 réacteurs nucléaires - d'énergies renouvelables à un horizon de dix ans, ce qui nécessite des investissements importants.
Je note que le problème n'est pas la durée des travaux puisqu'il suffira de 18 mois à deux ans pour construire un nouveau poste source avec Enedis. L'objectif fixé par la préfète doit, en revanche, être traduit dans un schéma : deux années sont nécessaires pour mener la concertation préalable ainsi que l'évaluation environnementale et faire valider le schéma. On pourrait croire que les projets inscrits dans ce schéma sont ensuite dispensés de toute procédure : ce n'est pas le cas, car il faut refaire une concertation publique et une évaluation environnementale pour chacun des projets. On estime que des projets de poste source ou de ligne à haute tension nécessitent cinq ans de procédures et deux ans de travaux, ce qui nous conduit à une durée totale de sept ans. Il est donc important de ne pas sous-estimer la lourdeur de conception des infrastructures et la longueur des procédures.
Pour finir sur une note plus positive, sur la question du stockage tampon, je voudrais signaler un projet très intéressant développé dans les Hautes-Alpes par un syndicat d'énergie accompagné financièrement par RTE. Il consiste à coupler une station de recharge de véhicules électriques de trois ou quatre bornes avec une ombrière solaire et un stockage tampon réalisé à partir de batteries de seconde vie, ce qui permet de tirer profit de nombreuses configurations. Quand il y a du soleil, on peut alimenter directement les voitures ; en l'absence de voiture à recharger, l'électricité est stockée ; aux heures pleines, au lieu de tirer sur le réseau, les batteries servent à recharger les véhicules qui ont besoin d'électricité.
Ce type d'expérimentation me semble intéressant à généraliser chez les particuliers.
Je reprends à mon compte de nombreux propos tenus par M. Bonnet.
Le cas de la Charente est heureusement très particulier. Les demandes de raccordement soulèvent des difficultés d'adaptation du réseau, lesquelles sont sans doute dues à un manque d'anticipation.
Le développement des énergies renouvelables conduit à une véritable révolution de la structure même du réseau. Nous disposons de 2 300 postes sources, à l'interface du réseau de transport et du réseau de distribution. À l'horizon 2050, 60 à 70 % de ces postes seront dimensionnés non plus en fonction de la demande d'énergie, comme cela a toujours été le cas, mais de leur capacité à absorber l'injection des productions locales. Cette capacité d'absorption doit ensuite « remonter » au niveau du réseau de transport, ce qui nécessite parfois de lourds travaux d'adaptation des réseaux à tous les niveaux de tension.
Sur l'autoconsommation, on voit bien l'intérêt de coupler et de synchroniser la recharge d'un véhicule électrique avec la production d'énergie renouvelable au moment où elle se matérialise. L'usage d'ombrières entre midi et 14 heures sur les parkings d'entreprise permet par exemple de recharger des véhicules électriques.
Le résidentiel collectif est un véritable enjeu : aujourd'hui, environ 2 % des copropriétés sont équipées en infrastructures de recharge. Diverses solutions sont disponibles, ce qui est une bonne nouvelle : nous espérons qu'elles permettront de débloquer le problème de l'équipement. La copropriété peut confier l'installation à un opérateur privé, ou elle peut confier au gestionnaire du réseau public de distribution le soin de prolonger celui-ci dans le parking privé. Des possibilités de préfinancement existent : ne pas avoir à assurer un financement immédiat (up front) devrait - en tout cas, nous l'espérons - complètement changer la donne.
La portabilité financière, que nous appelons l'interopérabilité, consiste à permettre le rechargement lors d'un déplacement, avec passage d'un réseau à un autre. Deux modalités sont offertes au client : soit une recharge à l'acte, par carte bleue ou plus souvent avec un QR code et une application ; soit une recharge par le biais de la carte d'un opérateur de mobilité, qui permet d'être reconnu de réseau en réseau.
Cette interopérabilité est obligatoire en France depuis janvier 2017. Cette obligation n'a pas encore pu être totalement respectée car près de 15 000 points de recharge, sur les 70 000 en activité aujourd'hui, avaient été installés avant cette date. Le programme de financement Advenir doit permettre de moderniser ces points de recharge afin d'assurer l'interopérabilité. Rappelons que les syndicats d'énergie avaient déployé de façon précoce des réseaux de recharge afin de rassurer les premiers utilisateurs, notamment en bénéficiant du programme d'investissements d'avenir (PIA) de l'Ademe jusqu'en 2016.
S'agissant des véhicules utilisés pour la logistique, je rejoins les propos d'Olivier David : les constructeurs de poids lourds ont presque tous aujourd'hui des stratégies d'électrification de leur gamme, avec des perspectives de ventes de 50 % de leurs modèles en électrique d'ici à 2030. Cela concerne non seulement les petits poids lourds, mais également des véhicules qui permettront d'avoir une autonomie de 500 kilomètres et d'être rechargeables en 45 minutes, ce qui permettra de couvrir le fret sur de plus longues distances.
Pour l'habitat collectif, les observations du représentant d'Enedis sont également pertinentes. Les habitants des immeubles collectifs, qui bénéficient d'un droit à la prise, doivent pouvoir recharger leurs véhicules mais, surtout dans les copropriétés de 10 à 20 places, il faut absolument réfléchir et prévoir des déploiements importants afin de s'assurer de la bonne adéquation avec le système électrique. Pour réaliser ces équipements, il faudra fixer des obligations pour ces bâtiments et dresser un calendrier. Des incitations sont prévues : le programme Advenir couvre 50 % des coûts, et il existe des dispositifs de préfinancement, d'accompagnement des opérateurs privés, ou d'achat de l'infrastructure.
En ce qui concerne les plateformes, différentes applications permettent de savoir où se situent les bornes de recharge et de prévoir un trajet en fonction du modèle du véhicule, de la puissance au départ et de celle souhaitée à l'arrivée. Je ne pense pas qu'il y ait une volonté de mettre en place un monopole en la matière ; les applications développées par les constructeurs et autres acteurs fonctionnent très bien.
Enfin, sur les réseaux privés, les syndicats d'énergie ont déployé de façon précoce des réseaux de recharge. Aujourd'hui, énormément d'acteurs privés sont présents dans ce secteur, en particulier sur les autoroutes ou à proximité ainsi que sur les parkings de centres commerciaux. L'essentiel des 38 000 points de recharge installés depuis l'an dernier l'ont d'ailleurs été par des réseaux privés - les collectivités étaient impliquées dans la préparation des schémas directeurs et déploieront des points de recharge l'année prochaine.
En complément, je rappelle que dans le cadre d'un partenariat sous forme de joint venture, Stellantis a lancé le projet Atlante pour développer des bornes de recharge rapides, des ombrelles photovoltaïque et des solutions de stockage.
En ce qui concerne le lithium, sa récupération et son recyclage consomment moins d'eau que son extraction : c'est une piste pour l'avenir. Nous avons moins d'expérience que Renault sur le recyclage, mais cette voie est très importante pour le groupe Stellantis. Nous explorons notamment la piste du lithium géothermal à bas carbone avec notre partenaire Vulcan.
Par ailleurs, il est exact de dire que le poids de nos véhicules s'est accru ces dernières années. La rentabilité de notre entreprise nous a permis, en contrepartie, de consentir des investissements de grande ampleur dans les territoires, de financer la transformation de nos sites industriels ainsi que la recherche et le développement vers la transition énergétique, et de chercher des solutions durables.
Pour autant, le groupe Stellantis n'abandonne pas la production de petits véhicules. En témoignent la voiture sans permis Ami dont le prix est inférieur à 20 euros par mois, et la Fiat 500 qui est leader du segment A et rencontre un grand succès car elle correspond à une véritable demande de nos concitoyens.
Enfin, la diminution du coût de l'entretien des véhicules est une bonne nouvelle pour les consommateurs : elle contribue à faire diminuer ce que nous appelons le total cost of ownership (TCO), qui rend le véhicule électrique financièrement plus intéressant pour nos clients.
Dans les outre-mer, les deux constructeurs Renault et Stellantis, qui sont très présents, ont financé les filières de récupération des véhicules hors d'usage même si, pour l'instant, il y a encore peu de véhicules électriques en fin de vie dans ces territoires.
Néanmoins, nous rencontrons des difficultés car les batteries étant considérées comme des déchets, nous ne parvenons pas à les rapatrier en France pour les recycler. Je vous propose de travailler sur ce sujet pour nous aider à débloquer la situation et à améliorer cette filière.
Un mot sur le recyclage du lithium : le sujet est fondamental et nous permettra de réduire notre dépendance à l'égard des pays étrangers.
Enfin, Renault développera également des petits véhicules mais je veux surtout souligner que la montée en gamme est essentielle pour notre industrie : le nouveau plan stratégique de Renault se résume par la formule : « du volume à la valeur ». Nous sommes conscients de l'empreinte écologique de notre industrie et du fait que la traditionnelle production de masse de véhicules n'est sans doute plus un modèle d'avenir. Nos efforts consisteront donc à rénover nos véhicules, améliorer leur durabilité, développer des services d'autopartage et monter en gamme. De nombreux intervenants se sont interrogés sur la filière automobile française et le postulat fondamental est que pour mieux partager la valeur ajoutée, il faut en créer. C'est en montant en gamme que nous y parviendrons et que nous serons moins concurrencés sur le segment des voitures qui viennent de très loin.
Vous n'avez pas répondu à ma question sur la pollution aux microparticules liée au freinage ou à l'abrasion des pneumatiques.
Je ne suis pas un spécialiste du sujet, mais il me semble que cette question est liée au poids des véhicules. Or les véhicules électriques sont plus lourds, ce qui entraîne davantage d'émissions de particules lors du freinage.
Nous prenons en compte cette question, et nous essayons de développer des modules de freinage qui émettront moins de particules fines. Néanmoins, il faut rappeler que l'on constate une amélioration par rapport au thermique puisque le moteur électrique permet de freiner en récupérant de l'énergie
Je vous transmettrai des précisions écrites sur ce sujet.
Je souhaiterais également avoir une réponse à ma question sur le bilan de l'extraction des métaux rares, et notamment du lithium, qui pollue les sols, l'air et les eaux.
Partant de ce constat, je peine à trouver dans le véhicule électrique la solution adéquate à la problématique globale de la transition écologique et de la décarbonation.
Madame Bonnefoy, nous vous communiquerons également des données concernant le lithium.
S'agissant du bilan économique et environnemental d'ensemble de la filière du véhicule électrique, notre président lui-même n'a pas manqué de soulever des interrogations. Je rappelle que nous nous sommes lancés dans la transition énergétique pour des raisons réglementaires et, comme les autres acteurs, nous n'avons pas la réponse permettant de prendre en compte toutes les données sous-jacentes.
Je ne suis pas un spécialiste de l'extraction du lithium et des dommages à l'environnement qu'elle pourrait occasionner, mais l'urgence climatique se traduit par la nécessité absolue d'atteindre la neutralité carbone en 2050 : sur ce point, le véhicule électrique a un avantage incontestable sur le véhicule thermique. Sur le fond, la transition vers l'électrique ne fait pas débat, surtout dans un pays comme le nôtre où le mix énergétique est déjà très décarboné. Néanmoins, il reste vrai que cette industrie utilise des procédés polluants.
Je précise qu'il y a plusieurs façons d'extraire le lithium. Mme Bouvier a cité Vulcan et il existe différents projets pour essayer d'extraire le lithium de la façon la plus décarbonée possible.
Ces procédés sont pris en compte dans nos trois priorités : sécuriser nos approvisionnements de lithium, sécuriser les prix et extraire ce métal de la façon la plus responsable possible.
J'ajoute que le bilan CO2 du véhicule électrique est sans aucun doute positif. En France, un véhicule électrique permet de diminuer les émissions de 80 % sur l'ensemble du cycle de vie, y compris la production de la batterie.
Le recyclage est fondamental pour limiter le bilan environnemental de l'extraction : c'est la raison pour laquelle nous y travaillons avec autant d'acharnement, s'agissant en particulier du lithium.
Merci de votre participation à cette table ronde.
De nombreux défis subsistent, en matière d'extraction de matériaux, de recyclage des batteries, d'économie circulaire... Les véhicules électriques émettent certes beaucoup moins d'émissions de gaz à effet de serre, mais soulèvent de nouvelles interrogations sur leur mode de production.
Nous devons également réfléchir à la façon d'accompagner les personnes qui devront changer de véhicule pour accéder aux zones à faibles émissions mobilité - une question sur laquelle Philippe Tabarot avait fait une proposition et sur laquelle nous avons eu une longue et difficile commission mixte paritaire lors de la discussion de la loi « Climat et résilience ».
Nous nous sommes fixé des objectifs en matière d'émissions de gaz à effet de serre et, à présent, chacun d'entre nous doit essayer de trouver les meilleures solutions d'y parvenir.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible -''' en ligne sur le site du Sénat.