Le rôle de la vaccination dans notre politique de santé publique est une des préoccupations de notre commission.
La présidente Annie David avait demandé à la Cour des comptes une enquête sur la politique vaccinale de la France. Sur la base de cette enquête et des travaux complémentaires du rapporteur, Georges Labazée, un débat en séance publique s'était déroulé au mois d'avril 2013.
La vaccination est un facteur essentiel de prévention, mais sa mise en oeuvre se heurte à plusieurs difficultés, si bien qu'aujourd'hui, la couverture vaccinale des Français n'est pas optimale. Certaines populations potentiellement plus exposées que d'autres ne sont pas couvertes. De manière plus générale, nos concitoyens ont souvent du mal à appréhender les recommandations vaccinales et s'interrogent sur la nécessité ou non de recourir à des vaccinations qui ne sont pas obligatoires. Enfin, les réticences vis-à-vis de la vaccination se développent, soit du fait de mouvements qui en remettent en cause le bien-fondé même, soit en raison de craintes sur la sécurité des vaccins et leurs effets indésirables.
Sur ce dernier point, l'une des controverses les plus notables porte sur la nocivité des adjuvants et particulièrement des sels d'aluminium utilisés dans de nombreux vaccins.
Le lien entre la persistance de traces d'aluminium chez certaines personnes vaccinées et une maladie dégénérative dite du « myofasciite à macrophages » fait l'objet d'études depuis une vingtaine d'années sans que l'on soit parvenu à un total consensus scientifique.
Nous avions évoqué cette question à l'occasion de ce rapport sur la politique vaccinale, notamment avec la ministre de la santé et le Pr Maraninchi, alors directeur général de l'ANSM. Annie David avait souhaité en saisir l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, afin qu'il puisse compléter l'information du Parlement.
L'Office a accepté de donner suite à cette demande et il a organisé, en mai 2014, une audition publique, animée par nos collègues Jean-Louis Touraine, député, et Corinne Bouchoux, sénatrice. Ceux-ci ont ensuite présenté leurs conclusions à l'Office fin janvier dernier. L'ensemble a été réuni dans un rapport qui vient d'être publié.
Jean-Louis Touraine et Corinne Bouchoux ont bien voulu venir ce matin présenter la synthèse de ces travaux devant notre commission et je les en remercie vivement.
Le 22 mai 2014, Corinne Bouchoux et moi-même avons organisé une audition publique sur les adjuvants vaccinaux et, en particulier, sur les sels d'aluminium incorporés aux vaccins pour les rendre plus efficaces.
Nous sommes heureux d'avoir co-présidé cette audition publique à un double titre. D'une part, les débats se sont déroulés très sereinement, bien que des points de vue très divergents se soient exprimés sur un sujet fort controversé, ce qui a confirmé une fois encore le rôle irremplaçable des auditions publiques de l'Opecst en permettant une expertise collective, contradictoire et transparente.
D'autre part, la vaccination, me semble-t-il, a été victime de son succès. Rappelons-nous des ravages qu'a pu faire la variole, qui a notamment tué Louis XV - ce virus aujourd'hui n'existe plus sauf dans des laboratoires - ou, plus récemment, des conséquences de la poliomyélite. Aujourd'hui le recul de la vaccination fait que la rougeole tue à nouveau des enfants.
La désaffection ou la suspicion envers les vaccins n'est pas uniquement un phénomène français, même si elles ont pu être accélérées par la manière dont les pouvoirs publics ont abordé la grippe H1N1.
Les débats autour de la vaccination ont confronté deux approches, celle de la balance bénéfice-risque, qui est traditionnelle dans le domaine de la médecine, pensons par exemple au risque lié à l'intervention chirurgicale, et le principe de précaution. Je rappelle que la notion de balance bénéfice-risque ne consiste pas à nier les risques, mais à les rapporter aux bénéfices en matière de santé.
Cette audition publique a fait suite à la saisine d'Annie David, alors présidente de la commission des affaires sociales du Sénat. En effet, elle a appelé l'attention du président Bruno Sido sur le lien entre la persistance de traces d'aluminium chez certaines personnes vaccinées et une pathologie appelée « myofasciite à macrophages ».
L'un des orateurs, Christopher Exley, professeur de biochimie inorganique à l'université de Keele au Royaume-Uni a d'ailleurs félicité l'Opecst pour l'organisation d'un tel débat, dont il a regretté qu'il n'ait pas eu lieu dans son propre pays.
Bien qu'elle fasse l'objet d'études depuis plus d'une vingtaine d'années, la communauté scientifique n'est toujours pas parvenue à un consensus sur l'existence éventuelle d'un lien de causalité entre cette pathologie et les sels d'aluminium.
Les adjuvants vaccinaux sont apparus comme une nécessité pour renforcer les défenses immunitaires de l'organisme. Le plus efficace paraît être l'aluminium mais on peut regretter qu'aucune étude comparative n'ait été faite récemment entre types d'adjuvants.
L'audition publique a comporté deux tables rondes consacrées à des interrogations sur les effets et la sécurité des adjuvants, d'une part, et, d'autre part, aux pistes qui peuvent être envisagées pour l'avenir.
Malgré les points de vue opposés qui se sont exprimés à l'occasion de ces tables rondes, un accord a pu toutefois être dégagé sur quelques questions. Les recommandations qui ont été formulées seront évoquées dans un second temps.
Bien que tous les acteurs aient déclaré ne pas être hostiles au principe de la vaccination, ils n'en ont pas moins défendu des arguments très opposés sur les effets des sels d'aluminium.
Les uns ont mis en cause leur toxicité ou encore déclaré qu'il existait un lien de causalité entre les sels d'aluminium ajoutés aux vaccins et certaines pathologies. Ainsi, le Pr Romain Gherardi, chef du service d'histologie-embryologie de l'Hôpital Henri Mondor à Créteil a déclaré avoir découvert par hasard, il y a 25 ans, la présence d'une lésion histologique - jusqu'alors inconnue - qu'il a baptisée myofasciite à macrophages. Ces macrophages - c'est-à-dire des cellules d'origine sanguine infiltrant les tissus, dont le rôle est de phagocyter les débris cellulaires et les pathogènes - sont, selon le Pr Gherardi, chargés de particules. Contenant de l'aluminium, ces dernières ont la forme de l'hydroxyde d'aluminium.
Ces particules sont détectées à la biopsie musculaire.
Elles sont persistantes, car chez les patients ayant contracté une myofasciite à macrophages et présentant un syndrome de fatigue chronique, un délai de l'ordre de 66 mois et même jusqu'à 14 ans peut s'écouler entre la dernière vaccination et la biopsie.
Une autre caractéristique de ces particules d'hydroxyde d'aluminium injectées par voie intramusculaire réside dans le fait qu'elles émigrent vers le cerveau. Ce phénomène est connu. Il a été constaté chez des patients dialysés dans des zones où l'eau est très riche en aluminium. Celui-ci, à des doses bien plus fortes que celles contenues dans un vaccin, a provoqué des encéphalopathies aluminiques qui ont entraîné des démences.
S'agissant des symptômes de la myofasciite à macrophages, le Pr François-Jérôme Authier, responsable du centre de référence des maladies rares à l'Hôpital Henri Mondor a indiqué qu'ils étaient de trois types : des douleurs musculo-articulaires, une asthénie chronique et des troubles cognitifs chroniques très sévères qui ne sont corrélés ni à la douleur, ni à la fatigue, ni à la dépression, ni à la durée de l'évolution.
Quant au Pr Yehuda Shoenfeld, président du 9ème congrès international de l'auto-immunité et chef du département de médecine de l'Université de Tel Aviv, il a souligné qu'il avait constaté, il y a deux ans, des syndromes auto-immuns induits par les adjuvants dénommés Asia (auto-inflammatory syndrome induced by adjuvants). Il s'agit d'adjuvants qui, une fois introduits dans l'organisme d'un individu, seraient susceptibles d'augmenter ces maladies auto-immunes.
Sur ces différentes analyses, de nombreux autres intervenants ont émis de sérieuses réserves. Comme l'a relevé le Pr Jean-François Bach, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, il n'y a pas lieu de remettre en cause la pertinence de l'observation du Pr Gherardi sur la présence durable de l'aluminium au niveau du site d'injection du vaccin ni sur l'incorporation du métal dans les macrophages. Pour autant, le problème est de démontrer la relation de cause à effet entre ces observations et les manifestations cliniques. Or, celles-ci sont relativement peu spécifiques des malades atteints de myofasciite, qu'il s'agisse de fatigues chroniques ou de certaines manifestations neurologiques. Seules des études épidémiologiques comparatives peuvent démontrer cette relation de causalité.
Pour ce qui est du syndrome Asia - dans lequel le Pr Shoenfeld a inclus le syndrome de la guerre du Golfe -, est-il pertinent de le rattacher majoritairement au risque vaccinal ?
Pour sa part, le Pr Daniel Floret, président du Comité technique des vaccinations du Haut Conseil de la santé publique, a constaté que les preuves sur les facteurs génétiques favorisant la pénétration de l'aluminium dans le cerveau n'étaient pas apportées par les études expérimentales faites par l'équipe du Pr Gherardi.
Dans ce débat sur la sécurité des adjuvants, il importe donc, comme on vient de le voir, de démontrer rigoureusement l'existence d'un lien de causalité entre un effet secondaire et un adjuvant. A cet égard, j'ai été conduit, en réponse à un participant, à préciser qu'on ne pouvait attendre de la médecine de démontrer l'absence d'effet, ni, par conséquent, la non-toxicité d'un adjuvant ou d'un vaccin, sans mettre en regard d'éventuels effets secondaires et les effets bénéfiques prouvés de ces produits. On peut toutefois regretter le manque d'études dans ce domaine.
Le Pr Brigitte Autran, professeure d'immunologie à l'Université Pierre et Marie Curie et responsable du département d'immunologie de la Pitié-Salpétrière, a fort opportunément insisté sur les raisons pour lesquelles le sel d'aluminium en particulier et les adjuvants en général contribuent à l'efficacité des vaccins et s'avèrent ainsi nécessaires.
Retraçant la genèse du recours au sel d'aluminium, elle a rappelé qu'en 1923, Gaston Ramon, un élève de Pasteur, avait découvert le moyen de rendre enfin la toxine diphtérique efficace car s'il avait injecté uniquement cette toxine après l'avoir détoxifiée sans lui adjoindre d'adjuvant, il n'aurait eu aucune protection immunologique. C'est à partir du moment où il a observé qu'en faisant une préparation particulière entre cette toxine détoxifiée et le sel d'aluminium qu'il a enfin obtenu une protection.
Le succès de cette expérience a conduit Ramon à la répéter avec le vaccin contre le tétanos, nouvelle opération qui a également réussi. Si bien que, note Brigitte Autran, l'ensemble de la communauté mondiale lui a emboîté le pas en utilisant le sel d'aluminium dans les vaccins pour les rendre plus efficaces. Complexés avec des protéines, les sels d'aluminium constituent des agrégats qui ont la propriété de recomposer une particule proche de la particule bactérienne, laquelle a, elle-même, cette énorme capacité d'activation du système immunitaire.
Le débat que nous avons eu à l'Opecst est, je pense, une première en France. Il nous permet de prendre conscience que la vaccination n'est pas seulement un fait scientifique mais qu'elle est également un fait social. Si l'on néglige cela et si l'on ne rétablit pas la confiance dans la vaccination aucune action ne permettra d'augmenter la couverture vaccinale. Ce débat a également lieu en Allemagne suite à l'épidémie de rougeole à Berlin. Les débats sur les pistes pour l'avenir ont donné lieu à des échanges également divergents, qu'il s'agisse de la pertinence d'un moratoire ou de la recherche d'alternatives aux adjuvants.
La profondeur de ces divergences plaide fortement en faveur du développement des recherches, sur lequel, comme on le verra, un consensus s'est dégagé.
Sur le premier point concernant la pertinence de l'instauration du moratoire, il m'apparaît nécessaire de procéder à une analyse sans concession des bénéfices et des risques et non de justifier simplement le refus d'un tel moratoire, en invoquant les risques considérables qui pourraient résulter d'un arrêt de la vaccination, de l'absence de preuves suffisantes pour arrêter tel ou tel vaccin ou encore de la résurgence éventuelle de maladies à court terme.
Quoi qu'il en soit, j'estime que l'exemple des autorités japonaises, cité lors de l'audition publique par le Pr Yehuda Shoenfeld, mérite d'être pris en considération. En effet, sans, semble-t-il, avoir remis en question le rapport bénéfice-risque du vaccin contre le papillomavirus, les autorités japonaises ont décidé, en 2013, de suspendre cette vaccination par précaution, en raison de près de 2 000 cas d'effets indésirables sur plus de trois millions de jeunes filles vaccinées. La question de l'âge recommandé pour la pratique de cette vaccination est en effet soumise à une étude supplémentaire.
Quant aux alternatives aux adjuvants, il importe, là aussi, d'adopter une position volontariste.
En effet, il existe des vaccins ne comportant pas d'adjuvants, comme le vaccin contre la dengue ou, dans le passé, le DTP. S'agissant du DTP, Sanofi a toutefois cessé la commercialisation du vaccin non adjuvé, en accord avec l'Afssaps, du fait d'effets secondaires, à savoir des réactions allergiques dont la survenue n'a pu être expliquée, selon la déclaration du Dr Alain Sabouraud, représentant de Sanofi-Pasteur. Or, comme des représentants d'associations de malades, on est fondé à déplorer une telle déclaration, parce qu'elle met de nouveau l'accent sur l'insuffisance de la recherche.
Pour ce qui est du phosphate de calcium, il a servi de substitut aux sels d'aluminium dans les années 60. Selon Sanofi, il a cessé d'être utilisé parce que les résultats en ont été variables et même contradictoires.
En revanche, pour M. Didier Lambert, président de l'association Entraide aux malades de la myofasciite à macrophages (E3M), c'est lors de l'achat des vaccins Pasteur par Mérieux que ce dernier a décidé de recourir très rapidement aux sels d'aluminium pour des raisons de rentabilité financière.
Un autre argument de nature économique a également été soulevé par le Pr Yehuda Shoenfeld. Ainsi a-t-il reproché aux laboratoires de ne pas investir suffisamment dans la recherche de nouveaux adjuvants par rapport aux recettes qu'ils tirent des vaccins.
A cet égard, l'invocation de la très longue durée des études nécessaires pour remplacer les adjuvants chimiques ne doit-elle pas céder devant l'impératif justement évoqué par le Pr Shoenfeld de trouver des pistes additionnelles pour empêcher les infections ?
De telles observations ne devraient pas être écartées, à l'heure où nous avons assisté à la propagation du virus Ebola.
Malgré cet ensemble de divergences, un consensus a pu s'établir sur les recommandations suivantes.
Tout d'abord, intensifier les recherches.
Plusieurs raisons justifient un tel objectif. Comme l'a indiqué le Pr Hervé Bazin, professeur émérite à l'Université de Louvain, nos connaissances sur la vaccination sont insuffisantes. On ne connaît pas parfaitement les mécanismes d'action des adjuvants, c'est pourquoi il importe de procéder à des études épidémiologiques fondées sur des cohortes. Enfin, la myofasciite à macrophages est vraisemblablement sous-diagnostiquée.
Deuxième point de consensus, financer la recherche, qui doit reposer sur une expertise indépendante.
Au cours de l'audition publique, les industriels ont fait valoir que la recherche sur les adjuvants était très active. Pour autant, de nombreux intervenants - certains professeurs et des représentants d'associations de malades - ont souhaité que cette recherche soit indépendante, c'est-à-dire, comme l'a rappelé Jean-Yves Le Déaut, qu'elle soit financée sur fonds publics. C'est d'ailleurs le cas de la recherche sur la myofasciite à macrophages, puisque le Pr Romain Gherardi s'est vu attribuer un crédit de 150 000 euros par l'Agence de sécurité du médicament.
Enfin, il est nécessaire d'améliorer l'efficacité du système d'alerte, notamment en encourageant les patients - au besoin à l'aide d'une campagne nationale d'information - à déclarer les effets indésirables qu'ils ressentent, sur le site de l'ANSM, la proportion de déclarations étant encore insuffisante.
Le rapport que j'avais fait au nom de la commission des affaires sociales pointait, parmi les facteurs limitant le recours à la vaccination, le faible taux de couverture des professionnels de santé eux-mêmes. Il n'est que de 15 à 16 % selon les professions. Il me semble qu'il faut agir pour faire évoluer cette situation.
Par ailleurs l'incitation à ne pas se faire vacciner circule à profusion sur l'Internet et il est particulièrement difficile de contrôler la désinformation.
Je pense que le débat que nous allons avoir sur la loi de santé doit être l'occasion pour nous de prendre position sur la politique vaccinale.
S'agissant du myofasciite à macrophage j'ai eu plusieurs fois l'occasion d'auditionner l'association qui défend les malades. Comment expliquez-vous le décalage entre l'introduction de l'aluminium comme adjuvant et la découverte de la maladie ?
Je vous indique que nous avons reçu de M. Didier Lambert, président de l'association E3M, un courrier contestant l'appréhension de la myofasciite à macrophage par le rapport de l'Opecst.
Ce point d'étape est important pour nos débats sur les vaccins. Je suis pour ma part très réservée sur l'idée d'un moratoire sur la vaccination. Il faut me semble-t-il faire prévaloir la balance bénéfice-risque. En matière de santé publique, moins il y a de personnes vaccinées, plus le risque augmente.
Il est certes nécessaire de développer les recherches, mais celles-ci se heurtent à des problèmes de moyens dans tous les domaines de la santé que ce soit les cancers de l'enfant ou les maladies rares. La recherche publique indépendante est soumise à des contraintes financières particulièrement draconiennes. Ce manque de financement fait parfois perdre à la France sa place de premier plan en matière de recherche.
Je pense également qu'il faut approfondir la question de l'âge le plus approprié pour la vaccination contre le papillomavirus.
Je trouve notre débat étrange, M. Touraine a clairement démontré tout l'intérêt de la vaccination. Cet intérêt considérable n'est pas remis en cause par le débat sur la toxicité de l'adjuvant aluminique. L'enjeu principal est donc de lutter contre les peurs irraisonnées qui touchent d'ailleurs toutes les catégories de la population. Ce n'est pas une question de diplômes !
Je remercie Corinne Bouchoux et Jean-Louis Touraine d'avoir travaillé sur ce dossier qui n'est pas facile. Il n'y a aucun doute sur le rapport bénéfice-risque en matière de vaccination. En ce qui concerne le H1N1, nos concitoyens n'ont pas recours à la vaccination car ils savent qu'ils ne risquent pas grand-chose. La mortalité associée à cette grippe est sans commune mesure avec celle due à la diphtérie ou au tétanos.
Je m'inquiète de l'absence de recherches épidémiologiques dans notre pays. La création d'un accès ouvert aux données de la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (Cnam) permettrait de disposer rapidement de statistiques intéressantes, s'agissant par exemple de la proportion d'affections résultant de tel ou tel type de vaccination. Il me semble que cela ne serait pas coûteux. Nous sommes aujourd'hui obligés de nous reporter à des données établies à l'étranger ou qui peuvent être immédiatement contestées.
En ce qui concerne les vaccinations dangereuses, l'absence de grande épidémie explique que la population n'ait pas conscience des risques encourus en cas de refus de vaccination.
Je remercie les rapporteurs pour leur travail qui nous fait avancer. Je rejoins le constat de la nécessité d'intensifier la recherche et de disposer d'une expertise indépendante. Il me semble également indispensable de lancer des études épidémiologiques sur des cohortes. Le système d'alerte doit en outre être renforcé.
Cela étant dit, le débat devra avoir lieu lors de l'examen du projet de loi relatif à la santé. Nous sommes en effet dans le doute. Un certain nombre de vaccins sont aujourd'hui obligatoires, par exemple pour l'inscription des enfants à l'école. Or, les parents n'ont pas le choix du vaccin. En 2008, le retrait par le laboratoire Sanofi, sans justification suffisante, du vaccin sans adjuvant aluminique démontre l'insuffisance des avancées scientifiques. Nos concitoyens devraient pouvoir choisir le vaccin qu'ils souhaitent se voir administrer, en attendant que la recherche avance. Nous devons nous mobiliser pour que la recherche publique indépendante ait davantage de moyens.
Je remercie nos collègues pour la clarté et l'objectivité de leur exposé. En tant que citoyen, je constate des faits indéniables tendant à prouver la nocivité de certains adjuvants mais je suis aussi conscient du caractère indispensable des vaccinations. Je rejoins à cet égard les propos de Georges Labazée sur les effets désastreux que peuvent avoir les informations qui circulent sur Internet.
Il faut mettre en balance les bénéfices d'un côté et les effets secondaires, voire les risques, de l'autre. Nos concitoyens se déplaçant beaucoup, le problème relève surtout de l'OMS tant en matière de recherche que dans le domaine de l'épidémiologie. Les efforts de recherche doivent donc bien sûr se poursuivre. Je rejoins Corinne Bouchoux lorsqu'elle dit que la recherche ne peut être exclusivement privée. Mais nous savons qu'il existe en France de très importantes capacités de recherche, ne serait-ce qu'à l'Inserm.
Je suis résolument opposé à un moratoire car celui-ci ne ferait pas disparaître le risque résultant de l'absence de vaccination. Je rappelle que cette année encore, le virus H1N1 a été à l'origine de complications pulmonaires très sévères chez des sujets jeunes. Le vaccin reste extrêmement bénéfique à l'humanité.
Nous sommes tous d'accord sur le caractère indispensable des vaccins mais nous pensons tous également que ces vaccins doivent présenter toutes les garanties sanitaires pour les populations. Depuis juin 2012, l'Académie nationale de médecine reconnaît que l'aluminium utilisé migre vers le cerveau. L'agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) recommande quant à elle de ne pas utiliser de déodorant contenant des sels d'aluminium sur une peau lésée. Dans un arrêt du 21 novembre 2012, le Conseil d'Etat a imputé la survenue d'une myofascitite à macrophages à l'injection d'un vaccin à adjuvant aluminique. Des chercheurs américains nous alertent également. Nous ne faisons donc plus face qu'à de simples probabilités.
Les dégâts provoqués par la myofascitite à macrophages sont importants : plus de 78 % des personnes qui en sont atteintes ne peuvent plus exercer d'activité professionnelle. Arrêtons les amalgames : cette maladie ne touche pas des « anti-vaccinaux ». Les personnes atteintes sont très démunies car non seulement les maux dont elles souffrent sont mal connus mais il existe un déni de la maladie. Nous devons intensifier les efforts de formation. Beaucoup de professionnels ne sont pas avertis de la réalité de cette maladie et certains cas ne sont pas correctement diagnostiqués. Les services du Pr Gherardi sont très sollicités car le nombre de professionnels formés est insuffisant.
S'agissant du vaccin contre la DT Polio, une alternative sans adjuvant aluminique a été disponible pendant un certain temps. Les effets secondaires qui pouvaient en résulter étaient beaucoup moins invalidants que ceux qui résultent des adjuvants actuels. J'ajoute que le problème de la myofascitite à macrophages est son temps de latence.
A partir du moment où la recherche est entre les mains de laboratoires privés et que ceux-ci peuvent décider unilatéralement d'arrêter un vaccin, les populations sont prises en otage. Pourquoi la possibilité de recourir au vaccin contre la DT Polio sans adjuvant aluminique n'est-elle pas offerte ? Devons-nous continuer à prendre des risques en attendant que la recherche progresse ? Le déblocage par l'ANSM de la somme de 150 000 euros au profit des services du Pr Gherardi a été obtenu à l'issue d'un parcours du combattant.
La situation actuelle nécessite davantage, de la part des pouvoirs publics, qu'un simple appel à relancer la recherche. Nous devons financer la recherche et trouver parallèlement des solutions alternatives comme la mise en place de vaccins sans adjuvants aluminiques.
Le principe de précaution doit être appliqué : des vaccins sans adjuvants aluminiques contre la DT Polio doivent être rendus disponibles et un moratoire doit être appliqué sur le Gardasil.
La notion de bénéfice-risque est importante. Le risque doit être apprécié sous l'angle quantitatif, c'est-à-dire du nombre de personnes pour lesquelles on peut établir un lien de causalité, et sous l'angle de la gravité des pathologies identifiées.
Le principe de la vaccination doit être défendu. Je ne suis pas favorable à l'application d'un moratoire. Pour autant, il est fondamental de continuer les études épidémiologiques, notamment grâce à l'open data. La recherche doit également continuer sur les substituts aux adjuvants actuels. Ces études doivent être menées de façon indépendante. La recherche publique doit être défendue.
Nous avons trop longtemps ignoré les personnes qui ont présenté des pathologies graves en occultant le problème. Les victimes doivent être écoutées et prises en compte.
S'agissant de l'épidémie de grippe de cette année, elle a été grave, avec un taux de mortalité bien supérieur à ceux des années précédentes. Il faudrait une parole scientifique, cautionnée au niveau national, qui explique le manque de résultats de la protection vaccinale et la gravité de l'épidémie. Rappelons à ce sujet, en lien avec les problèmes posés par Internet soulignés par Georges Labazée, que les mouvements sectaires ne se privent pas d'intervenir dans ce domaine.
Les trois propositions que vous formulez sont trop tournées vers le principe de précaution. Il me semble qu'il faudrait réaffirmer le principe applicable en l'espèce qui est celui du rapport bénéfice-risque. Il faut rappeler le caractère obligatoire de la vaccination et simplifier le calendrier vaccinal.
Je voudrais souligner l'intérêt de la présentation des travaux de l'Opecst devant les commissions compétentes. Afin d'éviter des effets secondaires qui peuvent être liés aux changements hormonaux intervenant à l'adolescence, la vaccination contre le papillomavirus ne pourrait-elle être décalée ?
Je rappelle que, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel devrait se prononcer le 20 mars prochain sur le caractère obligatoire de la vaccination.
Sur le plan technique, il serait possible de faire figurer sur la carte Vitale les éléments relatifs au calendrier vaccinal. Je rappelle qu'avant que les indications ne changent, la caisse nationale d'assurance maladie avait évalué à 35 millions d'euros le coût de la non-observance des trois injections du vaccin contre le papillomavirus, le délai entre les injections étant vraisemblablement trop long.
Si je puis évoquer mon expérience personnelle dans notre discussion, je voudrais simplement témoigner du fait que, faute de vaccination, sur les vingt enfants du village d'origine de ma fille adoptive, situé dans la banlieue Nord de Niamey, un seul a survécu à l'épidémie de rougeole qui a ravagé le pays.
Notre débat portait sur les adjuvants vaccinaux. Il est bien sûr nécessaire de renforcer les études sur la myofasciite à macrophages et sur le lien de causalité avec les adjuvants.
Aujourd'hui, la défiance à l'égard des vaccins est multifactorielle. Il y a toujours eu des effets secondaires aux vaccins. Ce qui a changé, c'est que la controverse est médiatisée. Des personnes atteintes de pathologies très lourdes expriment leur incompréhension face à l'inaction. Nous payons aussi par un climat général de suspicion les scandales de l'amiante ou du Médiator. Il ne faut pas en rester là.
L'Opecst a ses propres limites. Il ne lui appartient pas de prendre une position définitive dans ce dossier.
Il est peu probable que des avancées puissent intervenir au seul niveau français. Le développement d'un nouveau vaccin représente plusieurs milliards d'euros. Il en va certainement de même pour celui d'un nouvel adjuvant. Ce n'est pas au niveau des capacités d'un seul pays.
A propos de l'indépendance de la recherche, je voudrais souligner que les conflits d'intérêts ne sont pas le propre de la seule industrie pharmaceutique. Certains chercheurs publics ont aussi des liens d'intérêts : fortement impliqués dans un domaine et sur une pathologie, ils peuvent avoir à coeur, sans pour autant y trouver un intérêt financier, à promouvoir telle ou telle maladie.
En science, une vérité n'est établie que lorsqu'elle est corroborée par un autre laboratoire. Ces questions appellent un effort international de recherche, une action à développer au niveau européen.
Pour ce qui concerne les mesures immédiates à prendre, il n'est pas imaginable de préconiser un moratoire sur la vaccination des enfants. Pour les adultes, il faut considérer la perte de chance ou la non-assistance à personne en danger que cela pourrait représenter. Nous devons convaincre mais aussi faire en sorte que les vaccins de demain soient plus efficaces et plus sûrs. Sur la tuberculose, par exemple, peu de progrès ont été faits par rapport aux premiers vaccins alors que nous aurions les moyens de développer des vaccins plus appropriés. En nous appuyant sur des recherches en vaccinologie mais aussi en immunologie, en épidémiologie, des progrès substantiels sont indubitables pour des vaccins plus efficaces et moins risqués.
Les effets secondaires peuvent effectivement être liés à l'administration du vaccin à une période de la vie. Dans certains cas, il n'y a aucune relation de cause à effet. Les études sur le vaccin contre l'hépatite C, un temps soupçonné de provoquer de graves effets secondaires, ont permis d'établir une proportion égale de la population concernées par l'apparition de maladies dans les différents groupes témoins. Dans le doute, il faut accepter humblement que ces questions sont lourdes et que leur apporter une réponse prend du temps. Les moratoires sont à réserver à des cas extrêmes.
Il n'y a parfois aucune rationalité dans le rapport à la vaccination. Les personnels soignants qui disposent d'une grande facilité d'accès à la vaccination, ne se font pas plus vacciner. De la même manière, il n'est pas nécessaire d'être âgé pour tirer un bénéfice de la vaccination contre la grippe : les jeunes ne sont pas moins malades.
Si la rationalité était à l'oeuvre, nous n'aurions pas le même rapport au tabac, responsable, chaque année, de la mort de 93 000 Français et de 500 000 Américains. Deux fumeurs sur trois meurent à cause du tabac mais il reste plus de fumeurs en France que dans d'autres pays.
La commission procède à l'examen de l'amendement sur la proposition de loi n° 126, visant à faciliter le stationnement des personnes en situation de handicap titulaires de la carte de stationnement.
La commission adopte l'avis suivant :
La commission procède à l'examen de l'amendement sur la proposition de loi n° 262, visant à supprimer les franchises médicales et participations forfaitaires.
La commission adopte l'avis suivant :
La commission nomme M. Jérôme Durain comme rapporteur sur la proposition de loi n° 127 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à allonger les congés exceptionnels accordés aux salariés lors du décès d'un enfant ou d'un conjoint.
La réunion est levée à 11 h 16.