Commission des affaires européennes

Réunion du 7 novembre 2012 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • DOM
  • RUP
  • intégration
  • mer
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  • outre-mer
  • structurel
  • ultrapériphériques

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Comme en avril dernier à propos de la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), cette réunion est commune à la commission des affaires européennes, à la commission des affaires économiques et à la délégation à l'Outre-mer. Ce travail en commun est utile car les régions ultrapériphériques (RUP) sont souvent les oubliées de la construction européenne. Seuls trois États membres, à savoir l'Espagne, le Portugal et la France, disposent de RUP. Les autres États ne mesurent pas toujours que les RUP sont une chance pour l'Europe, de la même manière que l'Europe est une chance pour les RUP. Il est donc impératif de rappeler l'importance des RUP et la spécificité de leurs problèmes.

Notre réunion est une première étape. Nous allons examiner en commun deux propositions de résolutions européennes. La semaine prochaine, la commission des affaires économiques se prononcera sur les éventuels amendements à ces deux propositions de résolution. Troisième étape : le 19 novembre, le Sénat examinera ces deux propositions de résolution en séance publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Avec l'examen en séance publique du projet de loi relatif à la régulation économique outre-mer, cette semaine est clairement consacrée aux outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Depuis plusieurs années, dans les plans de financement des projets dans les outre-mer, l'État a disparu et c'est l'Europe qui joue le rôle clé. Nous avons donc tout intérêt à suivre les décisions prises par l'Union européenne (UE) et sa stratégie à l'égard des RUP. Nous sommes aujourd'hui inquiets : une fois de plus, l'Union ne semble pas désireuse de prendre en compte les spécificités de nos outre-mer. L'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) n'est pas suffisamment utilisé. La délégation sénatoriale à l'Outre-mer a souhaité donc réagir à la communication présentée en juin dernier par la Commission européenne sur sa stratégie à l'égard des RUP en initiant une proposition de résolution européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Hier après-midi, la commission des affaires européennes a adopté, sur la proposition de notre collègue François Marc, une proposition de résolution européenne sur le cadre financier pluriannuel de l'Union européenne. Ce texte prend en compte la problématique des RUP. Cette proposition de résolution européenne va être transmise à la commission des Finances et devrait devenir résolution du Sénat.

Nous allons donc examiner tout d'abord la proposition de résolution initiée par la délégation sénatoriale à l'Outre-mer.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le 30 octobre, Georges Patient et moi-même présentions devant la délégation sénatoriale à l'Outre-mer, qui nous avait désignés comme co-rapporteurs, la proposition de résolution européenne que je suis chargé de vous exposer.

Les deux propositions de résolution que nous examinons aujourd'hui sont tout à fait complémentaires et l'on ne peut que se féliciter de cette synchronisation des travaux de la commission et de la délégation qui permettra de porter ces textes sur les fonds baptismaux de la séance publique le 19 novembre. L'onction du vote donnera toute sa solennité à la démarche qui pourra constituer un appui appréciable pour le Gouvernement dans les négociations à Bruxelles. Les instances européennes sont en effet attentives, nous l'avons vérifié pour la pêche, à l'expression de la représentation nationale ! Cet appui sera d'autant plus précieux dans un contexte budgétaire tendu, la présidence chypriote de l'Union entendant proposer 50 milliards de coupes budgétaires.

J'en viens au contenu de notre proposition de résolution. Le 20 juin dernier, la Commission européenne publiait une communication intitulée « Les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive », exposant la stratégie de l'Union européenne à l'égard des régions ultrapériphériques (RUP). Cette communication intervenait bien tardivement dans le processus des négociations puisque les propositions de la Commission sur le cadre financier pluriannuel avaient été publiées dès juin 2011 et celles sur le paquet réglementaire en octobre 2011.

Je vous dirai d'emblée que l'accueil réservé à cette communication par les RUP elles-mêmes, qu'il s'agisse des RUP françaises mais également des RUP espagnole (Canaries) et portugaises (Açores, Madère), a été extrêmement mitigé. Cela fut exprimé très clairement au Forum des régions ultrapériphériques, tenu à Bruxelles début juillet, et réitéré à la Conférence des présidents des RUP, aux Açores, en septembre. Le point de vue des deux députés européens que nous avons auditionnés le 11 octobre, MM. Younous Omarjee et Patrice Tirolien, avait la même tonalité.

En dépit de timides avancées relatives à la reconnaissance d'une diversité de situations caractérisant les RUP et à la nécessité de leur meilleure insertion régionale, ainsi que de grandes orientations stratégiques globalement acceptables, la communication de la Commission européenne reste largement redondante et incantatoire et reflète une position en net décalage avec les attentes et la situation concrète des RUP.

En réaction à cette approche de l'avenir européen des RUP qui n'est guère satisfaisante, la résolution que nous vous soumettons aujourd'hui s'articule autour de deux axes principaux et intègre les préoccupations exprimées à maintes reprises par ces régions : elle appelle ainsi à une prise en compte effective des contraintes et de la diversité de ces régions ; elle appelle également à une meilleure cohérence dans la mise en oeuvre des politiques européennes entre elles, les RUP étant trop fréquemment les victimes collatérales de leurs contradictions.

S'agissant de la première série de préconisations, qui visent à assurer la prise en compte effective des contraintes et de la diversité des RUP, il s'agit de plaider pour une stratégie européenne équilibrée prenant en compte effectivement, et pas seulement dans le discours, d'une part, à la fois le retard en termes d'équipements structurants des territoires et un contexte économique et social très dégradé, et, d'autre part, les contraintes propres aux RUP et la diversité de leurs situations.

Tout d'abord, et Georges Patient y reviendra tout à l'heure en présentant la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, il nous est apparu nécessaire, dans le cadre de la politique de cohésion, de renchérir sur la demande d'un assouplissement de ce qu'il est convenu d'appeler en langue européenne « la concentration thématique », c'est-à-dire les critères d'objectifs auxquels doivent satisfaire les projets pour être éligibles aux fonds structurels. Je n'entre pas dans le détail des objectifs thématiques qui sera exposé ultérieurement avec la politique de cohésion.

Cet assouplissement en matière de fléchage des projets éligibles aux financements européens, ainsi qu'un abaissement du taux de concentration thématique devraient contribuer à éviter que ne se matérialise un décalage de plus en plus important entre les objectifs stratégiques ambitieux définis par la Commission européenne, axés sur la compétitivité et l'innovation, et la réalité du terrain qui appelle un rattrapage structurel.

En outre, les objectifs de développement ne pourront être atteints en l'absence de consolidation des secteurs traditionnels qui, eux aussi, ont besoin des aides européennes. Ces secteurs, garants de la cohésion sociale, constituent le socle de développement sans lequel l'émergence de secteurs innovants restera une fiction.

De même que la Commission européenne scande un discours incantatoire sur la nécessité de valoriser les atouts des RUP dans le développement d'une « croissance intelligente, durable et inclusive », en « (tenant) compte (de leurs) spécificités et contraintes » mais n'évoque que bien peu les nécessaires politiques de rattrapage, elle se contente d'inviter chaque région à « trouver sa propre voie vers une prospérité accrue, en fonction de ses particularités » et reste hostile à l'instauration d'instruments spécifiques d'aide aux RUP bien que, reconnaît-elle, « certains (...) aient fait leurs preuves ». Ainsi, en contradiction avec ce discours sur les atouts que représentent les outre-mer et, fait nouveau, la mention explicite et la reconnaissance de leur diversité, la Commission européenne veille à une interprétation et à une mise en oeuvre très restrictive de l'article 349.

En deuxième lieu, la proposition de résolution invite à mobiliser plus largement et plus fréquemment au bénéfice des RUP le fondement juridique de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE).

Conformément à la position traditionnellement réductrice de la Commission, sa communication de juin 2012 ne fait que de rares références à l'article 349 du traité qui justifie pourtant que des mesures spécifiques soient prises en faveur des RUP afin de tenir compte de leurs handicaps.

La France est déterminée à obtenir une meilleure utilisation de ce fondement juridique et nous pouvons, par notre résolution, peser dans les négociations et aider le gouvernement dans ce dossier majeur. Il s'agit de mettre en place un cadre global approprié qui pourrait prendre la forme d'un « règlement plurisectoriel en faveur du soutien aux filières d'avenir dans les RUP », à savoir des filières identifiées comme stratégiques et contribuant à leur désenclavement telles que les énergies renouvelables, les TIC, les transports, le tourisme ou encore une filière bois en Guyane. Ce mécanisme pourrait comprendre un programme ? de type POSEI ? d'aides aux entreprises et couvrant ces secteurs porteurs de croissance.

Il s'agit également de multiplier les déclinaisons sectorielles de l'article 349 afin de permettre l'adaptation des politiques européennes aux réalités des RUP. Cette prise de position, déjà martelée dans les négociations sur la réforme de la politique commune de la pêche (PCP), semble en voie d'aboutir pour ce secteur.

La prise en compte des contraintes spécifiques aux RUP sur le fondement de l'article 349 du TFUE doit enfin pouvoir se décliner dans les programmes européens horizontaux, tels que l'instrument financier pour l'environnement (LIFE) ou le programme « Horizon 2020 » pour la recherche. Il apparaît nécessaire, pour rendre effectif l'accès des RUP à ces programmes, d'assurer un accompagnement spécifique des porteurs de projet issus des RUP ainsi que des appels à projets spécifiques à ces régions.

L'accès des RUP à certains programmes horizontaux reste en effet aujourd'hui théorique, faute pour ces régions de pouvoir répondre aux critères d'éligibilité qui ne tiennent pas compte de certaines contraintes telles que, par exemple, l'éloignement. C'est ainsi que la jeunesse des RUP françaises se trouve largement privée du bénéfice du programme Erasmus dans la mesure où celui-ci ne permet pas la prise en charge financière du transport de l'étudiant originaire d'une RUP entre sa région et la capitale de son État membre.

Il apparaît par ailleurs nécessaire, pour compenser les handicaps structurels auxquels sont confrontés les acteurs économiques, de faire des aides d'État un levier plus efficace. L'article 107, paragraphe 3, du traité permet la prise en compte des spécificités des RUP. Compte tenu de l'éloignement géographique et de l'étroitesse de leurs marchés, les aides aux entreprises des RUP ne peuvent en effet être considérées comme des menaces à la libre concurrence. Il apparaît donc aujourd'hui indispensable que les taux actuels d'intensité et l'éligibilité des aides au fonctionnement valables dans les RUP soient maintenus et il serait même utile d'aller plus loin en introduisant un seuil de minimis spécifique à ces régions.

Enfin, il est singulier que la communication de la Commission n'évoque pas le cas particulier de Mayotte, collectivité en voie de « rupéisation ». Il convient que la Commission accorde une attention toute particulière à cette collectivité qui présente d'importantes spécificités et que de larges dérogations lui soient accordées sur le fondement de l'article 349 pour lui permettre de bénéficier effectivement des aides européennes.

La seconde catégorie de préconisations figurant dans la proposition de résolution souligne la nécessaire cohérence des politiques communautaires à l'égard des RUP : il s'agit de la problématique de la politique commerciale.

À deux reprises au cours des deux dernières années, le Sénat a souligné l'incohérence de la politique commerciale avec les autres politiques sectorielles de l'Union à l'égard des RUP. Je vous rappelle nos initiatives successives qui ont conduit à l'adoption de la résolution du 3 mai 2011 tendant à obtenir compensation des effets, sur l'agriculture des départements d'outre-mer, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne, ainsi qu'à l'adoption de la résolution du 3 juillet 2012 visant à obtenir la prise en compte par l'Union européenne des réalités de la pêche des régions ultrapériphériques françaises.

La politique commerciale de l'UE constitue en effet une menace pour l'économie des RUP et entrave l'intégration régionale de ces régions.

La mise en cohérence de la politique commerciale avec les autres politiques communautaires doit notamment passer par l'évaluation systématique et préalable des effets des accords commerciaux conclus par l'UE sur l'économie des RUP, les mécanismes de compensation financière ne pouvant constituer qu'un pis aller et n'étant pas en mesure, à terme, d'empêcher la disparition de pans entiers de l'économie des RUP, en particulier dans le secteur agricole.

Dès sa communication de 2004, la Commission affirmait que « en ce qui concerne les nouveaux accords préférentiels de l'UE avec d'autres pays tiers, la Commission effectuera une analyse d'impact des effets de ces accords sur l'économie des régions ultrapériphériques ». Il est donc troublant de trouver une déclaration analogue de la Commission huit ans plus tard, dans la communication de 2012 : « les accords conclus par l'UE tiendront dûment compte des RUP, par exemple lorsque ces accords couvrent des produits fabriqués dans les RUP », dont l'application paraît loin d'être garantie. Encore une fois, il y a loin du discours aux mesures concrètes : les sombres perspectives pour les marchés de la banane, du sucre et du rhum en sont une illustration !

Ce constat justifie que nous prenions encore une fois une position très ferme sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Mes chers Collègues, vous ne serez pas étonnés que je vous appelle à adopter la proposition de résolution européenne que j'ai déposée avec le président Serge Larcher et notre collègue Roland du Luart. Il était impératif que la délégation sénatoriale à l'Outre-mer réagisse à cette nouvelle stratégie européenne pour les RUP, qu'a publiée la Commission à la veille de la conclusion de plusieurs négociations décisives pour ces régions : celle sur le cadre financier pluriannuel 2014 2020 et celle sur la nouvelle politique de cohésion de l'Union européenne pour la même période.

Je ne reviendrai pas sur le caractère décidément incantatoire des communications successives de la Commission au sujet des RUP. Malgré trois communications en dix ans sur ce sujet, la cause des RUP ne semble pas avoir avancé à Bruxelles, du moins pas dans certains bureaux. Je le regrette beaucoup évidemment. Cette dernière communication, publiée fin juin par la Commission, m'offre toutefois un motif d'espoir : pour la première fois, elle reconnaît la nécessité de prendre en compte la spécificité de chacune des RUP, et non simplement des RUP dans leur ensemble par rapport au reste de l'UE. Il nous faudra être vigilants sur la concrétisation de cette avancée.

La proposition de résolution qui est aujourd'hui soumise à la commission des affaires européennes me semble insister sur deux points majeurs : l'article 349 du TFUE et la nécessité de favoriser l'intégration régionale des RUP dans leur environnement géographique immédiat.

L'article 349 du TFUE, je le rappelle, prévoit que le Conseil adapte le droit de l'UE pour prendre en compte les handicaps des RUP, qu'il s'agisse de l'éloignement, de l'insularité, de la faible superficie, du relief et du climat difficiles, ou encore de leur dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits. Or, nous peinons à obtenir de la Commission, qui a le monopole du pouvoir de proposition au Conseil, la mise en oeuvre de cet article qui figure dans le traité et doit donc bénéficier aux RUP. Vous verrez dans la proposition de résolution que je vous soumettrai tout à l'heure, que cet article 349 doit également trouver à s'appliquer en matière fiscale et en matière de fonds structurels européens.

Le second point que je veux souligner dans la proposition de résolution que nous vous soumettons au nom de la délégation à l'Outre-mer, c'est la nécessité de faciliter l'intégration des RUP dans leur environnement géographique. Ce n'est que la contrepartie obligée de leur éloignement du continent européen. La délégation à l'Outre-mer insiste, à ce sujet, sur les obstacles que les accords commerciaux conclus par l'UE peuvent représenter pour cette intégration régionale. C'est un fait, je le déplore. J'évoquerai tout à l'heure une autre entrave à l'intégration régionale : les normes qui s'imposent dans nos DOM de la même manière que dans l'Hexagone ; cela asphyxie certaines productions, complique les échanges des DOM avec leurs voisins et rend souvent plus coûteux leur approvisionnement.

Comment l'UE peut elle encore ignorer l'incohérence entre, d'une part, son souci de faciliter l'intégration régionale des RUP, souci d'ailleurs manifeste dans ses propositions sur la future politique de cohésion et, d'autre part, l'application aveugle dans les RUP d'accords commerciaux ou de normes inadaptées ? Je ne m'attarde pas plus sur ces deux éléments essentiels de la proposition de résolution soumise à notre commission : mise en oeuvre de l'article 349 et cohérence dans la stratégie d'intégration régionale des RUP. Leur importance capitale explique qu'ils soient également défendus dans un autre texte que je vais vous soumettre tout à l'heure en mon nom propre.

Mais, pour l'heure, je vous invite à adopter cette proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Je vous rappelle le contexte de ces propositions de résolution : des décisions sont sur le point d'être prises s'agissant du budget de l'Union européenne sur la période 2014-2020. C'est un moment décisif : il s'agit de savoir quelle partie du budget sera consacrée à la politique de cohésion et, au sein de cette enveloppe, quelle part sera consacrée aux RUP.

Les deux propositions de résolution européenne que nous examinons aujourd'hui visent, d'une part, à sensibiliser le Gouvernement. La commission des affaires européennes a entendu M. Bernard Cazeneuve, ministre des affaires européennes, il y a deux semaines : il a indiqué qu'il réunirait les parlementaires des RUP et qu'il se rendrait dans ces régions. On ne peut que saluer cette décision. Il s'agit par ailleurs de faire savoir à la Commission européenne que, pour parler clairement, nous ne nous laisserons pas faire. Nous n'accepterons pas que ces crédits, essentiels au vu de la situation de ces territoires, soient diminués.

Je pense que cette proposition de résolution doit susciter une large adhésion sur tous les bancs.

La proposition de résolution européenne suivante est adoptée à l'unanimité, sans modification, par la commission des affaires européennes :

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu les articles 107, paragraphe 3, et 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

Vu la communication « Un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques » présentée par la Commission européenne le 26 mai 2004,

Vu la communication « Les régions ultrapériphériques : un atout pour l'Europe » présentée par la Commission européenne le 17 octobre 2008,

Vu le rapport du Sénat n° 519 (2008-2009) fait au nom de la mission commune d'information sur la situation des départements d'outre-mer,

Vu le mémorandum conjoint des régions ultrapériphériques, « les RUP à l'horizon 2020 », signé le 14 octobre 2009 à Las Palmas de Gran Canaria,

Vu le mémorandum de l'Espagne, de la France, du Portugal et des régions ultrapériphériques signé le 7 mai 2010 à Las Palmas de Gran Canaria,

Vu les conclusions du Conseil Affaires générales du 14 juin 2010,

Vu la résolution n° 105 du Sénat (2010-2011) du 3 mai 2011 tendant à obtenir compensation des effets, sur l'agriculture des départements d'outre-mer, des accords commerciaux conclus par l'Union européenne,

Vu le rapport « Les régions ultrapériphériques européennes dans le marché unique : le rayonnement de l'UE dans le monde » remis le 12 octobre 2011 par M. Pedro Solbes Mira, à M. Michel Barnier, membre de la Commission européenne, chargé du Marché Intérieur et des Services,

Vu la résolution du Parlement européen du 18 avril 2012 sur le rôle de la politique de cohésion dans les régions ultrapériphériques de l'Union européenne dans le contexte de la stratégie « Europe 2020 »,

Vu la communication « Les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive » présentée par la Commission européenne le 20 juin 2012,

Vu la résolution n° 121 du Sénat (2011-2012) du 3 juillet 2012 visant à obtenir la prise en compte par l'Union européenne des réalités de la pêche des régions ultrapériphériques françaises,

Vu la déclaration finale de la XVIIIe Conférence des Présidents des régions ultrapériphériques de l'Union européenne tenue les 13 et 14 septembre 2012 aux Açores,

Considérant que le document publié le 20 juin dernier par la Commission européenne constitue la troisième communication définissant la stratégie de l'Union européenne (UE) pour les RUP en moins de dix ans ;

Considérant que, comme l'a souligné de façon récurrente la Commission européenne, les régions ultrapériphériques (RUP) constituent un atout pour l'Europe et que, selon les termes de sa communication du 20 juin 2012, « toute stratégie en faveur des RUP doit reconnaître leur valeur pour l'UE dans son ensemble » ;

Considérant que l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) permet l'édiction de mesures spécifiques aux RUP afin de prendre en compte leurs contraintes propres que sont « leur éloignement, l'insularité, leur faible superficie, le relief et le climat difficiles, leur dépendance économique vis-à-vis d'un petit nombre de produits » ;

Considérant que le bilan du programme d'options spécifiques à l'éloignement et à l'insularité (POSEI), mis en place sur le fondement de l'article 349 du TFUE, est salué par tous, que ce programme, né au début des années 1990, constitue le seul véritable exemple d'instrument dédié aux RUP pour le financement de politiques sectorielles et qu'il voit son champ cantonné à l'agriculture par la Commission européenne en dépit d'une vocation initiale plus large ;

Considérant que la politique commerciale de l'UE, qui ne prend aucunement en compte les réalités des RUP, constitue une menace pour l'économie de ces régions et entrave leur intégration régionale ;

Déplore que la Commission européenne ait adopté sa communication avec un retard préjudiciable alors qu'avaient été respectivement publiées, dès juin 2011, ses propositions sur le cadre financier pluriannuel et, en octobre 2011, celles sur le paquet réglementaire relatif notamment à la politique de cohésion ;

Constate que cette communication, au contenu largement redondant par rapport aux deux précédentes, est en décalage aggravé avec les attentes régulièrement exprimées par les RUP et les recommandations du rapport de M. Solbes Mira,

Estime que cette communication souffre d'une double contradiction :

- Une contradiction interne, entre des objectifs stratégiques, certes ambitieux puisque axés sur la compétitivité et l'innovation, mais potentiellement irréalistes s'ils sont exclusifs de politiques de rattrapage, dès lors qu'ils s'appliquent aux régions les moins développées, au sens de la politique de cohésion, politique qui doit viser dans les RUP prioritairement à combler les retards en matière d'équipements structurants ;

- Une contradiction externe, puisque la concentration thématique imposée pour bénéficier d'un soutien financier exclut des secteurs traditionnels des économies des RUP qui doivent pourtant constituer le socle de développement de ces régions, socle indispensable à l'émergence de secteurs innovants ;

Demande en conséquence un assouplissement de la concentration thématique pour les RUP, en intégrant dans le taux de concentration un quatrième objectif prioritaire laissé au libre choix de chaque région et en abaissant ce taux à un niveau plus adapté aux réalités de ces régions ;

Note avec intérêt l'affirmation de la Commission selon laquelle « chaque RUP est différente et des pistes spécifiques doivent être envisagées pour chacune d'entre elles », les RUP étant jusqu'à présent appréhendées comme un ensemble homogène alors même que certaines présentent des singularités, comme le caractère continental d'un vaste territoire pour la Guyane ;

Considère, à l'instar du Parlement européen, que l'article 349 du TFUE est très insuffisamment utilisé par l'UE et déplore la portée restrictive donnée à cet article par la Commission européenne ;

Salue l'initiative du Gouvernement français, annoncée par le ministre des outre-mer lors de la Conférence des Présidents des RUP des 13 et 14 septembre 2012, visant, d'une part, à élaborer un cadre global approprié pour les interventions communautaires dans les RUP, qui pourrait prendre la forme d'un « règlement plurisectoriel en faveur du soutien aux filières d'avenir dans les RUP », et, d'autre part, à multiplier les déclinaisons sectorielles de l'article 349, permettant ainsi l'adaptation des politiques européennes aux réalités des RUP, et en particulier l'instauration de dérogations aux normes européennes pour leur approvisionnement en provenance de pays voisins ;

Estime également indispensable que la révision des lignes directrices des aides à finalité régionale soit mise à profit, sur le fondement de l'article 107, paragraphe 3, du TFUE, pour renforcer la prise en compte effective des particularités des RUP en matière d'aides d'État, par le biais du maintien des taux actuels d'intensité et de l'éligibilité des aides au fonctionnement, ainsi que par l'instauration d'un seuil de minimis spécifique ;

Appelle à ce que les règlements relatifs aux programmes horizontaux, tels que l'instrument financier pour l'environnement (LIFE), le programme Erasmus ou le programme « Horizon 2020 », permettent, sur le fondement de l'article 349 du TFUE, un accès privilégié des RUP à ces programmes, notamment par le biais d'un accompagnement approprié des porteurs de projets ou d'appels à projet spécifiques ;

Estime qu'une attention particulière doit être accordée par la Commission européenne à Mayotte, dans le cadre de la transformation de cette collectivité en RUP, et que l'article 349 du TFUE justifie l'octroi de larges dérogations à cette collectivité ;

Relève que les objectifs affichés dans la communication par la Commission européenne de prise en compte des réalités des RUP dans la mise en oeuvre des politiques sectorielles, au premier rang desquelles la politique commerciale, constitueraient un changement de cap radical par rapport à son orientation actuelle dont on ne pourrait que se féliciter ;

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Le financement des RUP françaises se trouve largement tributaire des décisions qui vont être prises prochainement à Bruxelles. Deux sujets préoccupent particulièrement les RUP : l'avenir des fonds structurels européens et celui du régime de l'octroi de mer.

Concernant l'avenir des fonds structurels, il dépend du cadre financier pluriannuel dont l'Union européenne va bientôt se doter pour la période 2014-2020.

Sur la période 2007-2013, les RUP françaises sont les seules régions de la République française à être éligibles à l'objectif « convergence » et bénéficient d'une enveloppe de 3,2 milliards d'euros. Sur ces 3,2 milliards, 482 millions d'euros sont attribués au titre d'une dotation complémentaire qui est versée aux RUP, pour compenser les surcoûts liés à leurs handicaps structurels. Cette allocation additionnelle s'élève à 35 euros par habitant.

Ce soutien européen à l'investissement local est essentiel pour les RUP. Il exprime la volonté de l'UE de tirer parti des « atouts uniques qu'elles possèdent et de leur valeur ajoutée pour l'UE » : je ne fais ici que reprendre les mots de la Commission dans sa récente communication sur les RUP du 20 juin 2012. Effectivement, les RUP sont aux avant-postes de l'UE dans l'océan Atlantique, les Caraïbes, l'Amérique latine et l'océan Indien. Elles représentent plus de la moitié de la zone économique exclusive de l'UE ; elles constituent aussi une réserve potentielle de ressources marines et un laboratoire en eau profonde unique pour la recherche. Leur biodiversité exceptionnelle offre également de nombreuses opportunités. Leurs situations géographiques permettent à l'UE de développer des activités spatiales, mais aussi d'exploiter certaines sources d'énergie renouvelables (éolienne, solaire, géothermique ou photovoltaïque). Des gisements de pétrole ont même été découverts l'an dernier au large de la Guyane.

Le Sénat devrait plaider pour que le cadre financier pluriannuel 2014-2020 traduise concrètement cette reconnaissance des régions ultrapériphériques (RUP) comme un atout pour toute l'Union européenne.

Car, pour l'instant, ce n'est pas le cas. La Commission européenne propose au contraire une baisse d'environ 43 % de l'allocation spécifique pour les régions ultrapériphériques (RUP), ce qui mettrait en péril la continuité des projets initiés pendant l'actuelle période de programmation. De fait, la Commission propose de ramener de 35 à 20 euros par habitant le montant de l'allocation spécifique RUP.

Par ailleurs, au-delà de la question de l'enveloppe budgétaire, il ne faut pas entraver la consommation des crédits dans les RUP et, pour cela, il faudrait adapter les règles aux situations locales, conformément à l'article 349 du TFUE. De ce point de vue, il serait utile d'aligner le taux de cofinancement pour l'allocation spécifique RUP sur celui prévu pour les fonds européens « classiques » en outre-mer, soit 85 % au lieu de 50 % aujourd'hui.

Dans le même esprit, il serait nécessaire d'adapter le « fléchage » des fonds aux réalités locales. En effet, la Commission propose que, pour les RUP, 50 % des crédits du FEDER soient consacrés à trois objectifs : la recherche et innovation, la compétitivité des PME et la promotion d'une économie à faible teneur en carbone. Les RUP doivent certes prendre ainsi leur part au succès de la stratégie Europe 2020, mais le retard que certaines RUP accusent en termes d'infrastructures justifierait plus de souplesse sur le fondement de l'article 349 du TFUE. A cet égard, le Sénat doit soutenir deux demandes : d'une part, exonérer de toute conditionnalité et de tout fléchage l'utilisation de l'allocation spécifique RUP, parce que, précisément, cette allocation est destinée à compenser les handicaps des RUP ; d'autre part, prévoir que l'affectation de la moitié des crédits du FEDER se fasse non pas sur trois mais quatre objectifs, le quatrième devant être laissé au libre choix des RUP.

En complément du FEDER et du FSE, les régions européennes peuvent mobiliser des crédits européens au titre de la coopération territoriale avec des collectivités ou États voisins.

Toutes ces possibilités pourraient être mises à profit pour favoriser l'indispensable intégration des DOM dans leur environnement géographique immédiat. Pour cela, il faut combattre l'idée que les crédits de coopération transfrontière ne devraient pas être mobilisés au-delà de 150 kilomètres des frontières de l'UE. Cette idée semble aujourd'hui abandonnée, mais nous devons en avoir confirmation.

Sur un plan plus général, il faut souligner que l'application stricte des normes européennes dans les RUP n'est pas cohérente avec la nécessité reconnue par la Commission européenne de promouvoir l'intégration des RUP dans leur environnement régional. Par exemple, les exigences phytosanitaires s'appliquant à la production du riz dans l'UE ont conduit la Guyane à délaisser cette culture, et à importer du riz des États voisins (comme le Suriname) qui ne respectent pas ces normes. Pour remédier à l'absurdité de telles situations, des adaptations des normes doivent être décidées chaque fois que nécessaire sur le fondement de l'article 349 du TFUE, pour mieux prendre en compte les réalités locales.

Le second sujet européen qui met en jeu le financement des RUP françaises est l'avenir du régime de l'octroi de mer après le 1er juillet 2014, date à laquelle expire la décision du Conseil de 2004 ayant autorisé le régime actuel.

Ce régime fiscal très ancien, puisqu'il remonte au XVIIème siècle, s'applique à la fois aux marchandises importées et aux biens fabriqués localement. Son taux de base diffère selon les régions : de 6,5 % à La Réunion à 17,5 % en Guyane. Dans chaque DOM, le Conseil régional, qui fixe les taux, peut décider d'exonérer totalement ou partiellement les biens produits sur place, ce qui crée de fait un différentiel de taxation par rapport aux produits importés. Une décision du Conseil de 2004 encadre ces différentiels de taux.

Les recettes générées par l'octroi de mer et l'octroi de mer régional représentent de 130 millions d'euros pour la Guyane à 366 millions pour La Réunion. Cela représente une part importante des recettes fiscales des collectivités, jusqu'à 90 % pour certaines communes guyanaises.

Or l'avenir de ce régime fiscal, qui déroge au principe de liberté de circulation des marchandises dans le marché intérieur, est incertain. Le régime actuel d'octroi de mer est encadré par la décision du Conseil du 10 février 2004 relative au régime de l'octroi de mer dans les DOM, qui a autorisé ce régime pour dix ans, jusqu'au 1er juillet 2014. Un rapport à mi-parcours était néanmoins attendu des autorités françaises afin de vérifier l'impact de ce régime.

Si la France a bien remis ce rapport en 2009, la Commission a jugé que son contenu ne permettait pas d'étayer sérieusement le bien-fondé du régime dérogatoire.

Or l'échéance du 1er juillet 2014 approche et la France n'a pas encore pris l'attache de la Commission européenne pour préparer l'avenir de ce régime fiscal. Or, les vingt mois qui nous séparent du 1er juillet 2014 ne seront pas trop longs pour mener à bien ce dossier et le Sénat doit marquer son inquiétude devant l'incertitude qui règne encore.

Plusieurs scénarios d'évolution sont envisageables, de la reconduction d'un dispositif d'octroi de mer simplifié et flexibilisé, à l'évolution vers un système de TVA régionale permettant de maintenir un effet de soutien à la production locale, en passant par un scénario hybride mêlant les deux options.

Or le ministère des outre-mer ne semble travailler que sur l'hypothèse d'une reconduction de l'octroi de mer, moyennant quelques adaptations.

Le Sénat doit faire valoir que la piste de la TVA régionale mériterait aussi d'être explorée, même si elle représenterait un changement radical. Au vu des échanges avec la Direction générale TAXUD (Fiscalité et union douanière) de la Commission européenne, il m'apparaît que la Commission européenne attend des autorités françaises la présentation de différentes options, pour dégager celle qui serait la moins discriminatoire et la plus propice au développement économique local. Le Sénat doit donc demander au Gouvernement de s'atteler sans délai à cette tâche, pour que les RUP ne vivent pas avec l'épée de Damoclès d'un refus européen de prolonger le régime de l'octroi de mer.

C'est pourquoi je vous propose d'adopter la proposition de résolution européenne que je viens de vous présenter.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

Pouvez-vous nous donner des indications sur la part que représentent les recettes de l'octroi de mer dans les recettes fiscales des collectivités d'Outre-mer, afin que la commission des affaires économiques puisse se prononcer en toute connaissance de cause la semaine prochaine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Oui, nous pouvons évidemment vous les fournir sans délai.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Raoul

L'important est en effet de sécuriser le financement des collectivités territoriales dans les DOM.

Debut de section - PermalienPhoto de Georges Patient

Effectivement, tout nouveau dispositif qui viendrait se substituer au régime actuel de l'octroi de mer devrait être calibré pour préserver les recettes fiscales des collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Les plus pessimistes à l'égard de l'avenir de l'octroi de mer inclinent à croire que tout droit de douane de ce type est incompatible avec les règles de l'Union européenne. En fait, il suffirait que le Gouvernement démontre que le régime de l'octroi de mer est un outil pertinent pour soutenir l'activité et l'emploi en Outre-mer. Jusque là, aucun rapport suffisant n'a été fourni à cette fin par le gouvernement français à la Commission européenne. Or, il devient urgent en 2012 d'apporter cette preuve. Le Gouvernement semble tabler vers une décision politique mais ce scénario n'est que la réplique de celui de 2004, lequel s'était soldé par l'octroi d'un délai de dix ans, que la France n'a pas mis à profit pour réfléchir. Nous sommes désormais dos au mur. Il importe donc, aujourd'hui, soit d'apporter la justification du bien-fondé de l'octroi de mer, soit d'imaginer un dispositif alternatif. Dans cette perspective, je souligne qu'une TVA régionale frapperait les services qui n'entrent pas, aujourd'hui, dans l'assiette de l'octroi de mer. Par ailleurs, la TVA suffira-t-elle à assurer aux collectivités territoriales un niveau de recettes équivalent à aujourd'hui ? Il est en tous cas urgent d'intervenir dans la mesure où l'État, en l'état actuel de ses finances publiques, serait incapable de combler le manque à gagner.

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

Finalement, l'avenir de l'octroi de mer est une question française plutôt qu'européenne : c'est à la France, dans le cadre des règles européennes auxquelles elle a consenti, de trouver un dispositif équivalent et compatible avec ces règles. Le ministre des affaires européennes, que notre commission a entendu le 24 octobre dernier, a affirmé sa volonté de prendre ce dossier à bras le corps. Mais il est utile de lui dire notre inquiétude par cette proposition de résolution européenne, dont l'autre volet, consacré à la politique de cohésion, est également important, tant l'investissement local dépend des fonds européens.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

La France s'est-t-elle rapprochée des deux autres États membres directement concernés par la problématique des régions ultrapériphériques : l'Espagne et le Portugal ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Les députés européens de ces régions ont déjà l'occasion d'échanger au sein de la Conférence des députés des RUP qui les réunit. Et nous savons par ailleurs que l'Espagne, qui dispose d'un régime analogue à l'octroi de mer dans ses RUP, a déjà entrepris des démarches auprès de la Commission européenne pour assurer l'avenir, si bien que nos homologues sont beaucoup moins inquiets.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Vaugrenard

Et, concernant la politique de cohésion, avez-vous rapproché vos points de vue avec vos homologues portugais et espagnols ?

Debut de section - PermalienPhoto de Simon Sutour

En effet, trois États dont la France sont directement concernés au Conseil. Mais l'issue dépendra de l'ensemble de la négociation du cadre financier pluriannuel qui est encore cours.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Larcher

Je note que nous avons déjà adopté deux résolutions européennes dans les derniers mois, l'une sur la politique commerciale de l'Union, l'autre sur la pêche, et nous avons à chaque fois obtenu des résultats. Il est donc utile de mobiliser le Parlement national pour conforter la position des autorités françaises dans la négociation européenne, et un vote à l'unanimité de la proposition de résolution qui nous est soumise lui conférerait encore plus de poids.

A l'issue de ce débat, la commission des affaires européennes a adopté, à l'unanimité, la proposition de résolution européenne suivante :

Le Sénat,

Vu l'article 88-4 de la Constitution,

Vu l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne,

Vu la décision du Conseil du 10 février 2004 relative au régime de l'octroi de mer dans les départements français d'outre-mer et prorogeant la décision 89/688/CEE,

Vu la décision de la Commission du 23 octobre 2007 autorisant le régime d'aide d'État de l'octroi de mer (C (2007) 5115 final),

Vu le rapport n° 519 (2008-2009) de la mission commune d'information outre-mer du Sénat « Les DOM, défi pour la République, chance pour la France, 100 propositions pour fonder l'avenir »,

Vu la résolution européenne du Sénat n° 65 (2011-2012) du 5 février 2012 sur les propositions de règlements relatifs à la politique européenne de cohésion 2014-2020,

Vu la proposition de règlement du Conseil fixant le cadre financier pluriannuel pour la période 2014-2020 présentée par la Commission européenne le 29 juin 2011 (COM (2011) 398 final) et sa modification en date du 6 juillet 2012 (COM (2012) 388 final),

Vu la communication de la Commission européenne : « Les régions ultrapériphériques de l'Union européenne : vers un partenariat pour une croissance intelligente, durable et inclusive » du 20 juin 2012 (COM (2012) 287 final),

Considérant le traitement spécifique que l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne prévoit pour les régions ultrapériphériques, notamment en matière de politique fiscale et de conditions d'accès aux fonds structurels ;

Considérant l'importante contribution qu'apporte le soutien financier européen au développement des départements d'outre-mer français ;

Considérant le soutien que le différentiel entre les taux internes et externes de l'octroi de mer dans les RUP permet d'apporter à la production locale de ces territoires ;

Considérant la part prépondérante que représentent les recettes issues de l'octroi de mer dans les recettes fiscales des DOM ;

- Concernant la politique de cohésion et le cadre financier pluriannuel 2014-2020 :

Souhaite que le cadre financier pluriannuel 2014-2020 traduise concrètement la reconnaissance des régions ultrapériphériques (RUP) comme un atout pour toute l'Union européenne, conformément à la communication de la Commission de juin 2012 ;

Fait valoir que les taux de programmation des fonds structurels dans les DOM sont du même ordre que dans l'hexagone et que, de ce fait, la capacité des RUP à consommer les fonds européens ne peut être sérieusement invoquée pour justifier une baisse des crédits alloués à ces régions ;

Demande le maintien, dans le cadre financier pluriannuel 2014-2020, de l'allocation spécifique pour les régions ultrapériphériques et à faible densité de population au niveau qui est le sien dans l'actuelle période de programmation ;

Défend un régime dérogatoire permettant d'exonérer de toute conditionnalité et de tout fléchage l'utilisation de cette allocation spécifique destinée à compenser les handicaps des RUP au titre de l'article 349 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ;

Propose d'aligner le taux de cofinancement de l'allocation spécifique aux RUP sur celui de 85 %, prévu pour les autres fonds structurels dans ces régions ;

Soutient un assouplissement de la concentration thématique pour l'emploi des fonds structurels dans les RUP, afin que ces fonds contribuent à l'investissement dans les infrastructures locales dont ces régions continuent d'avoir besoin, et propose que la concentration requise de la moitié du FEDER se fasse non pas sur trois mais quatre objectifs, le quatrième devant être laissé au libre choix des régions ;

Souligne la nécessité de faciliter la coopération transfrontière en permettant aux RUP insulaires de pouvoir mobiliser les crédits, qui y sont destinés, au-delà de la limite prévue de 150 kilomètres ;

Appelle le Gouvernement à veiller à l'articulation entre le FEDER et le Fonds européen de développement pour faciliter les projets de coopération territoriale entre les RUP et les États voisins de ces régions ;

Fait observer que la nécessité reconnue par la Commission européenne de promouvoir l'intégration régionale des RUP n'est pas cohérente avec l'application stricte des normes européennes dans ces régions et appelle en conséquence des adaptations de ces normes afin de mieux prendre en compte les réalités locales ;

Estime que le mécanisme pour l'interconnexion en Europe que la Commission propose de créer dans le cadre financier 2014-2020 pourrait opportunément être mobilisé au profit des RUP afin de soutenir le déploiement des réseaux de transport, d'énergie et de télécommunications dans ces régions ;

Insiste pour que l'enveloppe budgétaire qui sera consacrée à Mayotte, qui deviendra RUP au 1er janvier 2014, ne vienne pas en diminution de l'enveloppe aujourd'hui prévue pour les RUP françaises ;

Juge nécessaire de préparer Mayotte à l'utilisation des fonds structurels et, à cette fin, d'assister ce département dans l'élaboration d'un plan global de développement auquel contribueraient ces fonds ;

- Concernant l'octroi de mer :

Recommande d'améliorer les moyens statistiques des DOM afin de fiabiliser l'évaluation de l'efficacité de l'octroi de mer au regard de son objectif premier, le développement local ;

S'inquiète de l'incertitude qui règne à seulement vingt mois de l'échéance du 1er juillet 2014, date à laquelle s'éteindra la prorogation, accordée par le Conseil en 2004, du régime de l'octroi de mer ;

Appelle l'attention du Gouvernement sur la nécessité d'entreprendre sans délai un dialogue avec la Commission européenne, sans quoi le temps fera défaut pour que soit finalisé par la Commission, soumis au Parlement et approuvé par le Conseil, un régime fiscal dérogatoire prêt à prendre le relais de l'actuel octroi de mer au 1er juillet 2014 ;

Suggère au Gouvernement français de ne pas se borner à demander la prolongation de l'octroi de mer, moyennant quelques ajustements, mais de présenter à la Commission européenne plusieurs options d'évolution débouchant sur un plan d'action global susceptible, sur le fondement de l'article 349 du TFUE, de soutenir le développement de ces régions ultrapériphériques (RUP) par une juste compensation de leurs contraintes permanentes, sans nuire à l'intégrité du marché intérieur ni fragiliser les recettes fiscales des collectivités des DOM ;

Invite à ce titre à mieux explorer avec la Commission européenne plusieurs pistes, dont celle d'une TVA locale dans les DOM déjà évoquée par le rapport de la mission commune d'information du Sénat sur l'outre-mer en 2009 ;