S'agissant l'article 52 octies, introduit par l'Assemblée nationale, il faut en effet du temps pour le comprendre. Même son exposé sommaire n'est pas tout à fait simple.
En revanche, s'agissant de l'article 52 septies, j'y suis, comme Christine Lavarde, tout à fait favorable, ne serait-ce que parce que sur les deux Ehpad qui restent à transférer, l'un est situé en Haute-Garonne, à Barbazan.
Il s'agit de l'un de ces sujets dont le principe est bon - ces établissements n'ont plus rien à voir avec le ministère des armées, mais relèvent du secteur médico-social - mais qui se heurte à des difficultés concrètes d'application.
Évidemment, la disparition de cet établissement, à proximité de Luchon, au pied des Pyrénées, serait un cataclysme, mais sa reprise est très complexe, en raison, notamment, du problème du statut militaire des personnels. Ceux-ci, en effet, acceptent difficilement d'y renoncer.
Derrière une idée générale de bon sens peuvent parfois se cacher des problèmes plus complexes. Se donner une année supplémentaire est donc bienvenu, mais je ne suis pas sûr que cela permettra de résoudre le problème. Quoiqu'il en soit, donnons un peu d'air à cette opération.
Je suis donc favorable à cet amendement du Gouvernement et je souhaiterais que cela soit consigné, car cela est rare !
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Défense » et l'article 52 septies, et de réserver sa position sur l'article 52 octies.
La réunion est close à 16 h 05.
La réunion est ouverte à 16 h 35.
Nous avons le plaisir de recevoir Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, pour poursuivre notre cycle d'auditions sur le projet de loi de finances pour 2018.
Monsieur le ministre, depuis votre nomination, vous vous êtes montré particulièrement actif dans la promotion de ce que vous appelez l'école de la confiance : aménagement de la réforme des rythmes scolaires et de la réforme du collège, relance des stages de réussite, dédoublement des classes de cours préparatoire (CP) dans les établissements situés en réseaux d'éducation prioritaire renforcés (REP+) ou encore mise en place du dispositif « devoirs faits ».
Il est vrai que vous connaissez parfaitement ce ministère puisque vous avez été recteur des académies de Guyane et de Créteil - en tant qu'élu seine-et-marnais, je m'en souviens bien - et directeur général de l'enseignement scolaire.
En 2018, le budget de la mission interministérielle « Enseignement scolaire » progressera de 1,3 milliard d'euros pour atteindre 51,3 milliards d'euros. Il restera, à ce titre, le premier budget sectoriel de la Nation. Il fait donc l'objet de la plus grande attention de notre commission.
Je suis très heureux de présenter ce budget, le premier de la Nation, ce qui traduit la priorité accordée à l'éducation. Il illustre l'importance du projet d'école de la confiance. Notre société doit être davantage une société de confiance, une société qui fasse plus confiance à son école et dont l'école produise plus de confiance en la société. C'est insuffisamment le cas aujourd'hui.
Les moyens doivent être articulés avec des finalités claires, l'augmentation budgétaire n'étant évidemment pas une fin en soi. Nous devons surtout partager avec nos concitoyens des principes clairs sur l'école, d'où la définition de priorités et un lien avec l'autre politique dont j'ai la charge, celle de la jeunesse et la vie associative.
Nos idées fondamentales sont de donner plus à ceux qui ont besoin de plus, d'où l'importance de l'éducation prioritaire ; d'insister sur la qualité des savoirs fondamentaux, c'est-à-dire « lire, écrire, compter, respecter autrui » ; de transmettre les valeurs de la République. C'est la fonction de l'école primaire qui est la première de mes priorités.
Pour la première fois, le budget de l'éducation nationale dépasse le seuil des 50 milliards d'euros, pour s'établir à 50,1 milliards d'euros - hors cotisations et pensions de l'État, qui feraient dépasser le seuil des 70 milliards d'euros -, soit une augmentation d'1,3 milliard d'euros par rapport à 2017. Ce chiffre permet d'envisager les transformations profondes du système éducatif que nous souhaitons.
Notre priorité est d'abord l'école primaire, qui apporte le socle fondamental qu'est « lire, écrire, compter, respecter autrui ». S'il n'est pas acquis, aucun autre savoir ne peut l'être. Aussi, nous voulons combattre l'échec scolaire à la racine en nous attachant aux premières années de la vie et aux territoires les plus défavorisés, c'est-à-dire aux réseaux d'éducation prioritaire renforcés, les REP + et, dès la rentrée prochaine, aux réseaux d'éducation prioritaires (RGP). Cela signifie un dédoublement de 2 500 classes de cours préparatoire en REP + cette année ; en 2018, les classes de CE1 en REP + seront elles aussi divisées par deux, tout comme les CP en REP ; en 2019, ce sera le cas des CE1 en REP. L'engagement du Président de la République sera ainsi tenu.
Nous nous donnons les moyens de cette ambition en programmant 3 900 postes supplémentaires dans le premier degré à la prochaine rentrée scolaire, afin de ne pas porter atteinte aux moyens de remplacement. Nous avons également prévu le financement en 2018 du début de montée en charge de l'engagement présidentiel d'une prime de 3 000 euros au personnel des réseaux d'éducation prioritaire renforcés. Cette mesure va de pair avec une politique plus générale de ressources humaines qui a pour objectif de mieux pourvoir les postes en REP et d'offrir une gestion plus attractive, plus dynamique, plus souple, au bénéfice du personnel et des élèves dans la lignée des recommandations de la Cour des comptes, qui a rappelé récemment le besoin de modernisation des ressources humaines de l'éducation nationale.
Nous voulons aussi réussir une véritable évolution du collège. La mesure emblématique des « devoirs faits », entrée en vigueur hier, sera dotée d'une enveloppe globale de 220 millions d'euros en 2018. Il s'agit de la systématisation d'un véritable soutien scolaire gratuit dans les 7 100 collèges de France, une heure par jour, quatre jours par semaine. Ce dispositif mobilise les professeurs, en heures supplémentaires, ainsi que les assistants d'éducation, les associations et les collectivités territoriales. Quelque 7 000 volontaires du service civique sont mobilisés actuellement ; ils seront ensuite 10 000.
Grâce à cet effort collectif, nous franchissons une nouvelle étape en matière de devoirs. L'ambiguïté est levée : oui, il faut donner des devoirs aux élèves pour leur apprendre l'autonomie et le travail personnel. Pour autant, ces devoirs doivent-ils être laissés aux conditions particulières de chacun en fonction de sa famille ? Non. La mesure « devoirs faits » diminue les différences pour que tous les élèves, quelle que soit leur classe sociale, en bénéficient. Nous évaluons à 25 % le nombre d'élèves qui demanderont à s'inscrire. Lors des conseils de classe du premier trimestre, nous inciterons aussi les élèves qui en ont le plus besoin à rejoindre le dispositif.
Nous répondons également à la fragilité scolaire, qui touche toutes les classes sociales, par les stages de réussite pendant les vacances scolaires. Leurs moyens augmenteront l'année prochaine de plus du double, passant de 15 millions d'euros à 35 millions d'euros. Les élèves s'y inscriront volontairement mais y seront également incités s'ils en ont besoin.
La fragilité sociale est également traitée, avec la revalorisation de 25 % des bourses de collège attribuées sur critères sociaux - le mérite étant davantage pris en compte - soit 43 millions d'euros supplémentaires.
La fragilité peut aussi être liée au handicap. Notre effort est sans précédent, avec 50 000 personnes en contrats aidés dont 11 200 seront transformées en accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH), des emplois plus stables, plus pérennes et plus professionnalisés. Notre politique vise à réduire le nombre de contrats aidés pour les remplacer par des contrats plus solides et plus qualitatifs.
Au-delà de ces transformations, 4 500 AESH supplémentaires seront directement recrutés. En outre, 100 postes de professeurs des écoles seront mis à disposition des 100 nouvelles unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS). Là aussi, le quantitatif est pris en compte, mais au service du qualitatif, c'est-à-dire la formation des personnels.
Bien d'autres dotations disent notre détermination à faire de l'école un lieu de travail et d'épanouissement pour les élèves, car c'est bien le but de toute éducation. Je pense en particulier à l'enveloppe consacrée à l'éducation artistique et culturelle qui progressera de 50 % l'an prochain et aux synergies que nous aurons avec le ministère de la culture. C'est ensemble que nous procéderons à une relance de l'éducation artistique et culturelle. La rentrée en musique en septembre 2017 était un premier signal de notre objectif d'une plus grande systématicité des pratiques artistiques et culturelles dans nos écoles. La musique, mais aussi la lecture - avec le lancement d'un plan lecture - et le théâtre font partie de nos priorités communes.
J'en viens au programme « Jeunesse et vie associative ». Il articule le temps des apprentissages que l'enseignement scolaire porte et le temps de l'accès à l'autonomie et à l'engagement que ce programme budgétaire soutient. C'est toute la cohérence du rattachement de ce programme au ministère de l'éducation nationale lors de la constitution du Gouvernement. Le but est de donner des bases solides aux jeunes de ce pays pour qu'ils se projettent en confiance vers leur avenir.
Le premier objectif consiste à les accompagner vers l'autonomie, par l'information, la mobilité internationale et l'accès de tous à des loisirs de qualité : le présent budget y consacre 25 millions d'euros.
Le tissu associatif constituant un facteur clé de réussite de cette politique, les associations du secteur « jeunesse et éducation populaire » seront financées à hauteur de 52 millions d'euros dont 31 millions d'euros via le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) qui soutient plus de 5 000 emplois et 21 millions d'euros destinés aux associations agréées aux échelons national et local.
Le deuxième objectif est de développer l'engagement dans la vie associative, qui rassemble 20 millions d'adhérents, 15 millions de bénévoles et 1,8 million de salariés qui occupent une place sociale et économique irremplaçable dans la vie de la Nation. Ces associations sont au coeur de la société de confiance que j'évoquais précédemment.
À périmètre constant, l'appui transversal au développement de la vie associative connaîtra une hausse de 60 % en 2018, passant de 10 millions d'euros à 16 millions d'euros. Le soutien au bénévolat, pilier du monde associatif, connaîtra un renforcement par la mise en oeuvre du nouveau compte d'engagement citoyen (CEC) qui valorise l'engagement au service de l'intérêt général de chacun de nos concitoyens.
Nous répondrons de façon spécifique aux besoins de toutes les associations en prenant leur taille en considération. Il est en effet nécessaire de distinguer les grandes associations, qui emploient jusqu'à des centaines de salariés, des plus petites, qui jouent un rôle décisif dans la vie sociale locale, notamment rurale.
Les dispositions de l'article 43 de ce projet de loi de finances prévoient la suppression du crédit d'impôt sur les taxes sur les salaires (CITS) et du CICE à partir de 2019, au bénéfice d'une réduction des cotisations patronales inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018. Cette diminution des cotisations patronales engendrera pour les associations une économie de 1,4 milliard d'euros chaque année à partir de 2019. Ce soutien considérable à la vie associative profitera aux associations qui emploient des salariés. Pour tenir compte des petites associations, dans le cadre de l'examen en séance publique des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative » à l'Assemblée nationale la semaine dernière, j'ai proposé un amendement au nom du Gouvernement relevant de 25 millions d'euros les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative ». Le but est de compenser, selon des modalités d'attribution renouvelées, la diminution de crédits ouverts au bénéfice du tissu associatif après la suppression de la réserve parlementaire. J'ai été très heureux de constater que cet amendement avait été adopté à l'unanimité. C'est le signe que l'ensemble de la représentation nationale a salué l'existence d'une compensation à la suppression de la réserve parlementaire. Ces crédits supplémentaires abonderont le Fonds de développement de la vie associative (FDVA). Comme l'amendement du Gouvernement le précise, ces 25 millions d'euros de crédits supplémentaires s'adresseront en priorité aux associations qui ne bénéficient pas des allègements de charge que j'évoquais précédemment. Il ne s'agit pas de faire renaître la réserve parlementaire. Un groupe de travail sera mis en place pour définir l'échelle et les modalités d'attribution de ces moyens. Le but est d'aller au plus près du terrain, en association avec les représentants de la Nation.
Le troisième objectif est d'accroître l'engagement par le service civique, dispositif plébiscité par les jeunes. L'immense majorité d'entre eux en ont une bonne image et neuf anciens volontaires sur dix se déclarent satisfaits de leur expérience. Le service civique est le reflet de la diversité de notre jeunesse ; il s'inscrit pleinement dans la continuité de la politique éducative, avec un quart de volontaires peu ou pas diplômés. C'est une école de l'engagement, de la détermination, de la persévérance, du dépassement de soi, une école de la vie. Ce succès se traduit dans les chiffres : en 2017, environ 130 000 volontaires ont bénéficié du dispositif. Notre objectif en 2018 est de parvenir à 150 000 volontaires. C'est pourquoi les crédits augmentent de 63 millions d'euros pour atteindre 448 millions d'euros. Cette dynamique sera portée par une diversification grandissante des employeurs et, s'agissant du ministère de l'éducation nationale, par une participation de 10 000 volontaires au dispositif « devoirs faits ».
Vous le constatez, ce budget traduit le plein engagement du Gouvernement en faveur de la jeunesse et de la vie associative et fait du ministère de l'éducation nationale le ministère de l'avenir, avec une vision complète des enjeux de la scolarité et de l'engagement des jeunes.
Cette action déterminée sera complétée et renforcée par la mise en place d'un autre engagement présidentiel, le service national universel, qui associera les ministères de l'éducation nationale et de la défense et dont les modalités sont en cours d'élaboration.
Nous avons là des perspectives d'avenir pour la jeunesse mais aussi pour l'ensemble de la Nation.
Je salue Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, avec lequel j'ai l'habitude de travailler.
Monsieur le ministre, vous arrivez à ce poste précédé d'une réputation flatteuse. Vous avez été recteur dans des territoires difficiles, en Guyane, à Créteil, mais avez également travaillé en administration centrale. Vous avez donc une caractéristique rare à ce poste : vous avez la compétence, manifestement des convictions, et sans doute aussi du caractère, ce qui ne nuit pas dans l'exercice de la fonction. Pour dire la vérité, nous avons plutôt envie de vous soutenir.
Dans ce budget, quel est l'héritage de la politique précédente - qui était bien plus quantitative que qualitative - qui vous ralentit ? Le Président de la République précédent s'était efforcé de mettre en place son programme d'embauches, qui a engendré des difficultés. Dans l'augmentation de 1,3 milliard d'euros de votre budget, quelle est la part du prolongement des « coups partis », par exemple du fait de la mise en oeuvre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) ?
Quelle est la répartition de cet héritage de création de 54 000 postes ? Ces postes ont-ils été vers votre priorité, que nous partageons, à savoir l'enseignement primaire ? En d'autres termes, subissez-vous l'inertie de décisions précédentes qui s'imposent à vous ?
En matière d'effectifs, le budget démontre une attitude réfléchie. Les quelque 2 800 postes créés dans le primaire sont équilibrés par une diminution dans le secondaire de 2 600 postes de stagiaires non pourvus - cela révèle d'ailleurs une limite de la politique quantitative, celle de la difficulté à trouver des candidats qui satisfassent les exigences du concours - et dans l'administration centrale, de 200 postes.
Votre effort en faveur du primaire se poursuit, avec la prolongation du dédoublement des classes au CP. Qu'en est-il du recrutement dans le secondaire ? Le problème du recrutement est justement une des raisons de renoncer à la politique quantitative. Certains considèrent que l'enseignement secondaire est mieux servi que le primaire, sauf pour des matières magistrales telles que les lettres, les mathématiques, l'anglais et l'allemand.
Au sein de la commission des finances, nous avions travaillé sur les heures supplémentaires. Envisagez-vous des pistes d'assouplissement, d'annualisation du temps de travail des enseignants ? Quel est votre sentiment sur l'année scolaire ? Notre beau pays a pour spécificité d'avoir les horaires les plus lourds et l'année la plus courte.
Je voudrais ensuite vous faire part d'une réflexion de sénateur, plus personnelle. L'école de la confiance suppose que l'école ait confiance en elle-même et qu'elle trouve des alliés. Vous avez des alliés naturels : les élus locaux. Ils peuplent les conseils d'administration des collèges et des lycées ; ils sont présents dans l'enseignement agricole. Mais ils sont assez peu mobilisés, si ce n'est pour des considérations logistiques. Cela les prive d'une participation plus effective à la vie des établissements. Vous avez l'intention de mobiliser des talents nouveaux, aux côtés des enseignants : les volontaires du service civique, le monde associatif - je partage cette conviction. Mobilisez aussi les élus pour des tâches autres que le périscolaire, qui leur a été imposé sans qu'ils soient volontaires, ayant le sentiment qu'avant d'apprendre le macramé et la confection de boîtes en coquillages, il fallait renforcer les enseignements principaux.
L'excellente initiative « devoirs faits » nous rappellera de très bons souvenirs d'approfondissements ou de rigolade - les deux sont possibles à l'école.
Quelle est l'autorité du chef d'établissement sur ses enseignants ? On a pu entendre que l'enseignement public était la plus grande profession libérale. Ne serait-il pas temps de trouver un bon compromis avec l'esprit de liberté et la responsabilité de l'enseignant devant sa classe, la communauté éducative étant une vaste plaisanterie car le chef d'établissement n'a pas d'autorité - il ne cherche pas non plus à en avoir ?
Une autre catégorie d'alliés, ce sont les parents. Comment les associer, les responsabiliser et les conduire à faire respecter les règles de l'école ? Il faut une confiance réciproque entre parents et enseignants pour obtenir un résultat. Finalement, ce qui compte, c'est la volonté. La vôtre nous rassure mais nous avons soif de détails et d'ouverture sur des projets.
Merci d'avoir repris le terme d'école de la confiance ; c'est le socle de tout. J'ai constaté que les pays dans lesquels l'école va mieux qu'en France ne sont pas tant ceux qui bénéficient de dispositifs techniques divers que ceux dans lesquels le degré de confiance est plus élevé qu'en France. Notre pays a connu cette confiance en l'école à certaines périodes. Il est possible de la retrouver. L'école devrait être un sujet d'unité nationale, tant en politique générale que dans la vie quotidienne. Cela passe d'abord par le respect des professeurs par les élèves et par notre société. C'est un premier enjeu qualitatif majeur.
Oui, la priorité va au premier degré. Elle est visible dans le budget ; il y a une rationalité de la décision. Je rappelle que lorsque nous nous comparons aux pays étrangers, nous constatons que la France dépense moins que la moyenne des pays de l'OCDE pour son école primaire alors qu'elle dépense plus pour le second degré.
Cela doit nous faire réfléchir et agir, c'est-à-dire consacrer nos moyens supplémentaires prioritairement et très fortement à l'école primaire ; c'est ce que nous faisons.
Quant au second degré, vous avez remarqué quelques annulations, par cohérence et sincérité budgétaires, en particulier pour tirer les conséquences des postes ouverts aux concours qui ne sont pas pourvus : elles n'ont donc pas pour conséquence de mettre moins de professeurs devant les élèves. Certains Capes, vous le savez, recrutent à une moyenne beaucoup trop basse, ce qui n'est pas souhaitable. Nous devons donc déployer une stratégie de long terme afin que la qualité soit au rendez-vous.
D'une manière plus générale, vous avez fait référence à l'évolution de la gestion des ressources humaines du ministère. J'ai évoqué le rapport de la Cour des Comptes. Nous mènerons des discussions approfondies avec l'ensemble des partenaires. Notre capacité à parler avec les organisations syndicales est très importante pour avancer sereinement sur ces sujets. Tout le monde peut gagner, notamment les professeurs, à une meilleure gestion du système, en termes de ressources humaines et d'organisation du temps de travail.
Il faut accompagner ces efforts d'une véritable stratégie de pré-recrutement : nous devons mener une politique volontariste pour attirer tous les talents vers les fonctions professorales, alors que de nombreux départs à la retraite auront lieu dans les quinze prochaines années. Il nous faudra faire preuve d'intelligence budgétaire. L'enjeu du pré-recrutement a certes été prévu par la loi de 2013, mais de manière extrêmement limitée. Dans le futur, je souhaite que nous puissions mettre en place, par des bourses notamment, un pré-recrutement dès la première année de l'université, voire en amont. Des questions se posent, en mathématique ou en sciences, en particulier, dans l'ensemble des pays du monde. Comme vous l'avez dit, l'objectif est qualitatif.
Nous avons les moyens en termes quantitatifs. À nous d'organiser les choses autrement, pour atteindre l'objectif qualitatif. Je souhaite que la France sorte du débat sur les créations et suppressions de postes. Le mouvement de balancier observé lors des quinquennats précédents doit cesser. Nous avons 850 000 professeurs, nous devons avancer et nous concentrer sur les enjeux qualitatifs, de recrutement, mais aussi de formation initiale et continue, identifiés dans les études internationales comme premier facteur de réussite d'un système scolaire.
Comment mobiliser les élus locaux, leur intelligence collective ? J'y suis extrêmement sensible. C'est par la réalité quotidienne que l'on répondra le mieux, je pense au rôle des élus dans les conseils d'administration des établissements, mais aussi par leur rôle au sein de l'enseignement professionnel, que je considère comme ma deuxième priorité, après l'enseignement primaire. Une concertation sera bientôt lancée sur l'enseignement professionnel. Nous voulons ne plus opposer l'apprentissage et l'enseignement professionnel mais valoriser l'ensemble pour dessiner un avenir réussi. La transition écologique, l'entrepreneuriat, les savoir-faire français sont des enjeux clés de l'économie et de la société ont vocation à mobiliser tout particulièrement les élus locaux, en associant toutes les forces vives autour des établissements.
Les enjeux périscolaires doivent eux aussi évoluer dans le sens de la qualité. On doit sortir du débat entre quatre jours et quatre jours et demi. Mon but est d'aboutir à une situation aussi équilibrée que possible. Nous n'avons pas supprimé le fonds de soutien aux communes pour celles qui restent à la semaine de quatre jours et demi. Nous n'incitons donc pas à revenir à quatre jours, mais nous offrons cette liberté, lorsqu'elle convient à la communauté éducative. J'ai eu un rapport précis sur mon bureau à mon arrivée montrant que l'un ou l'autre système importait peu en vérité. Certains élus se sont sentis mal à l'aise. Nous voulons arriver à une décrispation, afin que chacun se sente à l'aise et actif.
Je proposerai prochainement un « plan mercredi », articulé avec mes compétences en matière de jeunesse et de vie associative, pour appuyer les collectivités territoriales, qu'elles soient à quatre jours ou quatre jours et demi, pour organiser un temps périscolaire culturel, sportif...Les élus locaux seront considérés dans cette politique. On a besoin d'une éducation nationale qui suscite la confiance, de la part de ses propres acteurs, des familles, des élus locaux.
La commission dans sa majorité ne peut qu'approuver vos orientations : priorité au primaire, au soutien scolaire et à l'enseignement professionnel. Au lycée, la dispersion des moyens semble réelle. Les « devoirs faits » sont un vrai facteur de chance. On se penche beaucoup sur la question du logement et là est souvent la vraie inégalité.
Votre incitation au qualitatif plaît à la commission, qui considère qu'on doit cesser d'aller vers le « toujours plus » de postes, etc., et qu'il faut conduire des changements qualitatifs. J'ai deux questions à vous poser.
La France recule depuis plusieurs années dans le classement Pisa (programme international pour le suivi des acquis des élèves). D'autres pays ont décidé de prendre le « taureau par les cornes » et sans forcément consacrer plus de moyens. Comment ont-ils réussi à remonter dans le classement ? Que manque-t-il à la France ?
Quand on compare les jeunes Français aux jeunes Européens, on constate un déficit en langues étrangères : que faudrait-il faire pour améliorer leur niveau ?
Nous émettrons un avis très favorable sur cette mission.
Je conserve quelques questions, Monsieur le ministre, pour votre venue devant la commission de la culture. Une audition commune serait d'ailleurs utile.
Une question concerne les manuels scolaires : selon certaines informations, les crédits pour le renouvellement des manuels dans le cadre de la réforme du collège seraient insuffisants. Ce n'est pas nouveau : j'avais déposé un amendement en 2015 pour les augmenter. Ces informations sont-elles fondées ? Les crédits sont-ils suffisants ? Pouvez-vous nous garantir que les collectivités territoriales, les départements pour les collèges, ne devront pas mettre la main au portefeuille ?
Pour répondre au rapporteur général, oui, nous avons une stratégie face au recul de la France dans différents classements, notamment Pisa. Regardons d'abord les pays qui ont progressé vite, comme l'Allemagne dans les années 2000 - elle était très en-dessous de la France, elle est aujourd'hui légèrement au-dessus -, mais aussi le Portugal, la Pologne, qui ont réussi de belles performances grâce à des politiques volontaristes, ou les pays asiatiques, tel Singapour, qui ont fortement remonté dans les classements.
Un constat : nos résultats moyens s'expliquent par les écarts entre nos territoires et entre les élèves. Dans la partie ouest de la France, notre système scolaire a des résultats honorables, voire très honorables. Il ne faudrait pas détruire des choses qui fonctionnent bien. Je rappelle que les établissements français à l'étranger sont très attractifs, ce qui doit nous donner confiance en nous-mêmes. L'hétérogénéité des territoires et des publics doit nous conduire à mener une politique très volontariste d'acquisition des savoirs fondamentaux. Que reflètent l'enquête Pisa ou l'enquête Timss, qui concerne des élèves plus jeunes ? Tout simplement un niveau faible en français et en mathématiques, qui prend sa racine à l'école primaire. D'où notre volontarisme dans les territoires les plus défavorisés, en CP et en CE1. L'école maternelle sera rénovée également. Cela portera ses fruits à moyen terme, mais les tout premiers se verront dès la fin de cette année, non dans les résultats à Pisa, mais dans les résultats des élèves. Nous avons laissé s'accumuler les retards des élèves, au nom d'une fausse bienveillance. L'échec en licence peut s'expliquer ainsi par ce qui n'a pas été acquis lors des premières années. Cela s'accompagne d'une stratégie pour le collège, dont les résultats, je l'espère, se reflèteront dans le classement Pisa. La mesure « devoirs faits » en fait partie.
Sur la maîtrise des langues étrangères, la future réforme du baccalauréat doit nous permettre de réfléchir aux points de repères et aux évolutions pédagogiques, notamment avec les nouvelles technologies, qui ouvrent de belles perspectives.
La question des manuels scolaires est aussi stratégique. La question immédiate porte sur les budgets d'acquisition de manuels dans les collèges. Au-delà, nous devons nous interroger sur les manuels au XXIe siècle et leur économie. Je voudrais vous rassurer sur les enjeux de court terme : nous avons mis 13 millions d'euros dans le budget pour les manuels scolaires, ce qui peut sembler à certains insuffisants, mais en 2016 et 2017, 105 millions d'euros ont été engagés chaque année, en raison des changements de programmes. Revenons à la normale. Cette réponse ne nous exonère pas d'une réflexion plus structurelle. Le financement par l'État des manuels scolaires au collège peut apparaître comme une anomalie, alors que ce sont les communes qui l'assurent pour le primaire et les régions pour les lycées. Des discussions doivent s'ouvrir entre l'État et les collectivités territoriales à ce sujet. On peut vivre avec cette exception mais elle n'a pas de justification logique. Au-delà, c'est le rôle du manuel qui est interrogé. Je fais une différence entre l'école primaire et l'enseignement secondaire et je prends en compte les évolutions technologiques.
Nous avons besoin de manuels en papier, particulièrement à l'école primaire. Il ne faut pas aller vers l'extrémité du « tout numérique ». Mais ces manuels peuvent être plus minces, particulièrement dans le primaire, où la fonction structurante du manuel, y compris pour la communication avec les familles, doit être préservée. Or seulement 40 % des élèves ont un manuel à l'école primaire. Nous devons viser 100 %. Cela doit rendre optimistes ceux qui se préoccupent de l'économie éditoriale.
Il faut aussi, à partir du collège, une plus grande complémentarité entre le manuel, fixant l'ossature, et le numérique, fournissant la chair, si vous me permettez cette métaphore. Cela doit aller dans le sens de l'amincissement des manuels, donc un moindre coût et un moindre poids, et d'un usage harmonieux du numérique.
Les éditeurs ne doivent pas être inquiets à cet égard, quoique votre question traduise leur inquiétude, car cette évolution peut être positive, pour l'élève, bien sûr, mais aussi pour eux. Nous devons soutenir l'industrie des « EdTech » scolaires, objet du déplacement que je ferai tout à l'heure. Les éditeurs du futur feront des manuels, mais aussi des ressources numériques et des outils d'intelligence artificielle, à l'échelle nationale et internationale. Ayons cette vision large, plus vaste que la reconduction des habitudes... Je vois la possibilité d'un consensus avec l'ensemble des acteurs, afin de donner les outils pédagogiques nécessaires à nos élèves.
J'ai interrogé la ministre des armées la semaine dernière sur le déploiement du logiciel Source Solde, successeur du sinistre Louvois. Quid du logiciel SIRHEN ? Gérard Longuet nous a alertés à plusieurs reprises sur les dérives de son coût, qui aurait quintuplé par rapport aux prévisions initiales ?
Six pour cent des enfants souffrent de troubles spécifiques des apprentissages, dont le dépistage est du ressort du médecin scolaire, en collaboration avec les psychologues, l'équipe éducative et les parents. Or la pénurie de médecins dans l'éducation nationale est criante. Quelles actions souhaitez-vous mettre en oeuvre pour tenter d'améliorer cette situation préoccupante.
Sur les contrats aidés, je n'ai pas de souci avec la sincérité budgétaire voulue par le Gouvernement. Au sein des 200 000 contrats maintenus, quelle est la répartition ? La priorité aux accompagnants d'élèves handicapés est-elle exclusive d'autres contrats tels que ceux des Atsem ou des animateurs d'activités périscolaires ? Vous prévoyez la création de 15 000 accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) : que fait-on du delta ? Quelle est votre position sur le financement du service national universel ?
Je souhaite une précision sur les aides majorées dont le montant s'élève à 90 euros accordées aux établissements situés dans des communes bénéficiaires de la DSU ou DSR-cible au titre de la mise en oeuvre de la réforme des rythmes scolaires. Ces aides continueront-elles à être attribuées aux communes qui en bénéficiaient jusqu'à présent, pour la rentrée de septembre 2018 ?
Vous avez exercé pendant deux ans en Guyane, que vous connaissez bien. Ma première question porte sur l'insuffisance des établissements scolaires. L'État doit respecter le plan d'urgence, à hauteur de 250 millions d'euros sur cinq ans, soit 50 millions d'euros chaque année. Pour l'an prochain, cette somme est inscrite au budget des outre-mer, nous vous en remercions. Peut-on avoir cette garantie pour les années suivantes ?
Ma deuxième question concerne la stratégie que vous avez annoncée en Guyane pour lutter contre l'absentéisme et le manque d'enseignants.
Les manuels scolaires sont pris en charge par les communes, mais visiblement sans obligation juridique, les écarts variant de un à dix entre les communes, ce qui provoque des inégalités.
Je m'interroge sur la confiance des élèves en eux-mêmes, en raison de la façon dont sont utilisées les évaluations, vécues parfois de façon punitive, alors qu'il y aurait des manières positives à mettre en valeur.
Quel accès à la restauration scolaire chez les collégiens ? Certains établissements mettent en place des bourses pour les familles en difficulté. Dans d'autres, l'accès à la cantine est une préoccupation en termes de santé publique et de lutte contre les inégalités.
Monsieur le ministre, vous avez dit qu'il fallait faire du qualitatif, mais vous avez évoqué le quantitatif : je vous donne acte du fait que vous avez bien augmenté le budget de 1,3 milliard d'euros cette année. En revanche, vous dites qu'il faut donner confiance à ceux qui en ont le plus besoin. J'ai fait un petit calcul : pour une augmentation de 700 millions d'euros en faveur de l'enseignement public, l'augmentation est de 583 millions pour l'enseignement privé. Or vous savez que 13 % des élèves sont scolarisés dans le privé, contre 87 % dans le public. En quoi certains avaient-ils plus besoin de confiance que d'autres ? Quels ont été vos critères ?
Vous avez évoqué tout à l'heure la question de la disparité territoriale. C'est un fait indéniable, qui ne relève pas de l'idéologie ou de la défense d'un territoire contre un autre : les moyens consacrés par l'État à un élève de l'académie de Paris sont supérieurs de 47 % à ceux consacrés à un élève de l'académie de Créteil. Je veux bien qu'on aborde l'aspect qualitatif, car les enjeux sont très importants et peuvent nous rassembler, mais quand on relève un tel écart de dépenses, il ne s'agit pas seulement d'un rattrapage.
Vous avez souligné l'effort que voulez faire pour les réseaux d'éducation prioritaire. Dans la même académie de Créteil, vous avez supprimé 2 000 emplois aidés sur 5 300. Quelles ont été les missions identifiées comme étant devenues caduques ? Quels ont été vos critères ?
Nous sommes actuellement en train d'étudier le budget et nous recherchons des pistes d'économies. L'éducation nationale est le premier employeur de l'État, avec plus de la moitié des effectifs : je pense qu'il faudra également y chercher des économies. La plupart du temps, les ministres sont jugés à l'aune des dépenses supplémentaires qu'ils peuvent réaliser, mais je crois que tous doivent faire un effort de réduction de la dépense publique.
Identifiez-vous des pistes pour réduire les effectifs de l'éducation nationale ? Ne serait-il pas logique de demander aux enseignants du second degré de travailler plus, parce qu'il n'y a pas de raison pour qu'il y ait une différence forte entre leur temps de travail et celui des enseignants du premier degré ? Il serait peut-être juste de réexaminer la situation.
Le Président de la République a annoncé qu'il n'y aurait plus aucune fermeture de classe en milieu rural. Quelle sera la traduction pluriannuelle de cette mesure ? Arrêtera-t-on le comptage des effectifs ? Quelle est votre définition du milieu rural ? Qu'en sera-t-il des ratios d'encadrement ? Après la fusion des régions, ces ratios seront-ils revus ? Les taux de population rurale isolée ont évolué dans les départements et les suppressions de postes ont fait beaucoup de mal en milieu rural. Comment envisagez-vous le maintien des postes en zone rurale ?
Monsieur le ministre, je tiens à saluer votre pragmatisme s'agissant des nouvelles activités périscolaires (NAP). Vous avez évoqué le concept de « devoirs faits » : selon vos propos, il sera limité au collège. Vous avez également parlé de contractualisation avec les collectivités territoriales dans ce domaine : j'imagine qu'il s'agira des départements, puisque vous respecterez la répartition des compétences.
En ce qui concerne la substitution aux NAP, vous avez parlé d'un « plan mercredi ». Pouvez-vous nous en dire plus ? Vous vous doutez que les communes rurales qui avaient auparavant des contrats enfance jeunesse (CEJ) peuvent être intéressées.
Monsieur le ministre, vous avez confié à Pierre Mathiot une mission sur l'évolution du baccalauréat. Qu'en attendez-vous, pas simplement d'un point de vue budgétaire, mais aussi en termes de fusion des filières du baccalauréat général ?
On parle souvent des bourses des étudiants, mais on évoque beaucoup moins les bourses du secondaire. Pourriez-vous nous dire un mot sur l'effort réalisé dans ce domaine ?
On parle beaucoup du recrutement des enseignants, mais moins de leur formation. Quand on fait le tour des établissements dans nos départements, on se rend compte de la crise des vocations, avec un grand nombre de postes non pourvus au Capes. Comment faire pour revaloriser le métier d'enseignant ?
Par ailleurs, je veux saluer l'ampleur et l'ambition du « plan étudiants ». Étant père d'un jeune victime du système « admission post-bac » (APB), je constate que ce plan crée des espoirs, mais je ne peux qu'insister sur la nécessité de renforcer l'articulation entre le lycée et l'université.
Monsieur le ministre, comment allez-vous réussir cette réforme ? Avec quelle méthode de management ? Votre ministère a été qualifié de « mammouth » par certains de vos prédécesseurs. Or cette réforme ne se fera pas sans l'implication de tout le personnel. Pour passer à l'école de la confiance et de la réussite, le moment n'est-il pas venu de retrouver l'esprit des fondamentaux et de passer de l'éducation nationale à l'instruction publique ?
Monsieur le ministre, je viens de vous entendre parler de numérique et de manuels scolaires. Pour autant, l'action 07 du programme 421 dans le cadre du programme d'investissements d'avenir (PIA) est celle qui doit porter le plan numérique à l'école. C'est une des rares actions du PIA 3 qui n'est pas dotée de crédits de paiement cette année, alors que les autorisations d'engagement s'élèvent à 500 millions d'euros. Dois-je en conclure qu'elle est suspendue ?
Monsieur le Président, vous m'avez questionné sur le programme SIRHEN et sur les risques de dérapage qu'ont pu connaître certains logiciels de l'État. Le coût global de SIRHEN s'élève à 393 millions d'euros. Les financements s'étalent de 2009 à 2020. Aujourd'hui, nous sommes en route vers un SIRHEN réussi.
Antoine Lefèvre m'a interrogé sur les troubles d'apprentissage et sur la médecine scolaire. Ces questions font partie des grandes difficultés du système scolaire. C'est un problème non pas de moyens, mais d'attractivité de la fonction de médecin scolaire. La première mission que je m'impose est de réussir la visite médicale pour tous les élèves de six ans. Pour y arriver, j'ai engagé un travail interministériel avec la ministre de la santé, notamment pour que les médecins non scolaires puissent contribuer à la médecine scolaire. Par ailleurs, nous essaierons à moyen terme d'attirer davantage de personnes vers la médecine scolaire en proposant cette discipline comme spécialité lors du concours de l'internat. Nous envisageons également de faire évoluer les missions, en relation avec les médecins et les infirmières.
Cette question fait écho à celle soulevée par Gérard Longuet tout à tout à l'heure sur notre capacité à mieux impliquer les élus locaux. Les collectivités territoriales, qui doivent souvent lutter contre les déserts médicaux, peuvent contribuer à élaborer une vision d'ensemble des solutions à mettre en oeuvre.
Emmanuel Capus m'a questionné sur les contrats aidés. Dans quelle proportion les accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) s'y substituent-ils ? Les choses se préciseront avec le temps, en lien avec le ministère du travail. Notre priorité est l'accueil des élèves en situation de handicap. Les contrats aidés que nous conserverons viseront à accueillir ces élèves. Ils étaient 50 000 cette année. Toute diminution en termes de contrats aidés sera compensée par des AESH. Une fois encore, les enjeux qualitatifs sont plus importants que les enjeux quantitatifs.
Aujourd'hui, nous avons 80 000 supports : 50 000 contrats aidés et 30 000 AESH, contre 22 000 l'année précédente. Nous rencontrons encore quelques difficultés pour arriver à satisfaire toutes les demandes. Notre pays compte environ 300 000 élèves en situation de handicap, même si tous n'ont pas besoin d'un accompagnement à plein temps. Il existe deux sources de difficultés : premièrement, l'inflation des demandes, qui augmentent de 15 % ; deuxièmement, nous n'arrivons pas toujours à recruter toutes les personnes sur les emplois aidés. Cette inflation doit nous interroger sur notre système et sur la façon dont se passent les préconisations. Je travaille sur tous ces sujets avec Sophie Cluzel, la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, de façon à proposer des évolutions dans l'intérêt des élèves.
Emmanuel Capus m'a également interrogé sur le service national et sur son financement. Le service national n'est pas prévu pour 2018, même si nous avons prévu d'honorer cet engagement présidentiel au cours du quinquennat. Cela suppose un très gros travail interministériel qui impliquera notamment le ministère de la défense et celui de l'éducation nationale. Avant d'envisager la question de la budgétisation, il faut définir le concept. Je m'appuierai aussi sur mes compétences jeunesse et vie associative.
Jean Pierre Vogel m'a interrogé sur le financement des activités périscolaires. Je me suis peut-être mal exprimé lors des questions au Gouvernement, mais il n'y aura pas de changement. L'aide de 90 euros par élève sera maintenue. Nous travaillons avec la caisse d'allocations familiales pour que le soutien soit au moins aussi important que par le passé et surtout plus simple sur le plan administratif.
Pour répondre à Georges Patient, je confirme les engagements pris par le Président de la République il y huit jours en Guyane en faveur des collectivités territoriales pour les constructions scolaires du second degré. L'aide s'élèvera à 250 millions d'euros sur cinq ans. S'y ajouteront 150 millions d'euros sur dix ans pour les constructions scolaires du premier degré. Les sommes en jeu sont très importantes, de l'ordre de 400 millions d'euros. Cet engagement sera tenu. De façon plus générale, nous travaillons à trouver des solutions originales pour la Guyane sur la question des ressources humaines dans l'académie. On pourrait aussi parler de Mayotte. Nous avons besoin de nouvelles règles du jeu, dans l'intérêt de tous. Il est essentiel d'avoir plus de professeurs guyanais, le cas échéant, recrutés et formés différemment. Parmi les objectifs très ambitieux du ministère, nous souhaitons une école supérieure du professorat qui soit la locomotive du système guyanais dans la nouvelle université. C'est ce à quoi nous nous attèlerons avec les élus.
Sophie Taillé-Polian a posé la question des méthodes d'évaluation. C'est un sujet qui n'est pas binaire. La mise en perspective est importante. Il ne s'agit pas d'être pour ou contre l'évaluation, mais de savoir comment nous évaluons les élèves. Les sciences cognitives prouvent qu'il est bon de se tester pour connaître. C'est ce que font les jeunes lorsqu'ils jouent aux jeux vidéo, qui sont composés de tests permanents. En sport, la question du dépassement de soi ne pose aucun problème. Je m'étonne toujours que cela en pose dans le débat scolaire. Vous avez à juste titre repris à votre compte le mot de « confiance ». L'idée est bien d'instituer une sorte de contrat de confiance avec l'élève, non pas pour moins d'évaluation, mais pour plus d'évaluations et pour mieux d'évaluations. Cela inclut l'autoévaluation et l'instauration d'objectifs sur l'année. Nous visons le progrès personnalisé de l'élève.
En ce qui concerne l'accès à la restauration scolaire, il existe une hétérogénéité des situations. Nous avons la possibilité d'agir au travers des fonds sociaux, qui seront stabilisés, voire augmentés dans certains cas. J'alerte les académies pour qu'il y ait une plus grande homogénéité sur le territoire et qu'elles prennent mieux en compte les différentes situations sociales. Il y a aussi des enjeux qualitatifs, sur les circuits courts. Un de nos grands objectifs est, par exemple, la lutte contre l'obésité. J'en profite pour aborder un sujet que vous n'avez pas évoqué, mais qui est corrélatif : celui des toilettes. Cela fait toujours sourire, mais c'est une question dramatique, car les toilettes sont aussi des lieux de violence, qui manquent souvent d'hygiène. C'est un sujet sur lequel il faudra aussi mener des discussions avec les collectivités territoriales.
Je n'ai pas très bien compris la question de Pascal Savoldelli. Il n'existe aucune augmentation disproportionnée du budget de l'enseignement privé. Ce point mériterait d'être approfondi ultérieurement. Ce budget est un budget de justice sociale. Les augmentations les plus importantes ont trait à ce que nous faisons en REP et en REP+, notamment pour y attirer les professeurs. Je ne vois pas davantage de déséquilibre entre l'académie de Paris et celle de Créteil.
Michel Canevet m'a questionné sur la charge horaire dans le premier et le second degré. Ces différences ont des justifications anciennes. Par exemple, les agrégés enseignent 15 heures contre 18 heures pour les professeurs certifiés. Dans le futur, nous nous efforcerons d'affecter davantage les agrégés dans les lycées et dans l'enseignement supérieur. L'agrégation est une magnifique institution française. Elle tire notre système vers le haut. Nous devons donc positionner les professeurs là où ils sont utiles pour les élèves. C'est un exemple d'une politique de gestion des ressources humaines plus qualitative.
Pour répondre à Sylvie Vermeillet, le secteur rural est une des priorités du Président de la République. Nous ne devons plus être sur la défensive, mais le temps est à l'offensive. La question des seuils de fermeture ne doit plus être le sujet principal. Notre ambition est d'inverser la logique en rendant les écoles primaires et les collèges ruraux plus attractifs. Je rappelle que les écoles primaires rurales ont des résultats supérieurs à la moyenne nationale, contrairement aux collèges ruraux. Une analyse trop rapide nous conduirait à fermer les collèges dans ces zones et à maintenir les écoles primaires, mais je souhaite aller plus loin et redynamiser les collèges ruraux. Le rural a notamment une capacité d'innovation que je souhaite explorer. L'exemple typique que je cite souvent est le collège de Marciac dans le Gers. Cet établissement comptait 80 élèves il y a vingt ans, contre 250 aujourd'hui grâce à un festival de jazz, à des classes de musique et à l'existence d'un internat. Il ne doit pas y avoir de clivage entre l'urbain et le rural. Les politiques doivent au contraire être très complémentaires. Cela passe par la renaissance des internats ruraux. Un internat, ce n'est pas quatre murs, un lit et un toit, c'est un projet éducatif. Nous relancerons donc prochainement la politique des internats, au bénéfice du rural.
Charles Guené m'a questionné sur le dispositif « devoirs faits ». Oui, ce dispositif a vocation à s'étendre à l'école primaire dès la rentrée prochaine. Je lève une ambiguïté : même à l'école primaire, il est pertinent de faire des devoirs dès lors que la démarche est bien pensée.
Je ne peux pas détailler davantage sur le « plan mercredi ». L'idée est de concentrer les moyens du programme « Jeunesse et vie associative », auxquels viendront s'adjoindre ceux de la culture et du sport, dans un ensemble cohérent se déclinant dans les territoires, en appui aux efforts des collectivités. L'objectif est de donner une visibilité aux familles par rapport à l'offre périscolaire proposée sur le territoire.
Julien Bargeton m'a interrogé sur la mission « bac ». Elle vient d'être mise en place, ses conclusions seront connues début 2018. De grandes tendances se dégagent, conformément aux engagements de campagne du Président de la République : des épreuves sur quatre matières, le reste en contrôle continu. Bien des éléments restent à définir, ce sera la tâche de la mission. Notre ambition est d'avoir un bac plus « musclé », préparant mieux à la réussite.
Didier Rambaud a évoqué l'enseignement supérieur : il faut mieux prendre en compte les premiers désirs et les forces de l'élève. Nous concilierons excellence et réussite de tous par une capacité de choix plus forte et des effets de levier.
Didier Rambaud m'a aussi questionné sur la crise des vocations. Je crois beaucoup au prérecrutement ; la politique universitaire menée par Frédérique Vidal coïncidera avec ce que nous faisons sur le plan scolaire.
Sébastien Meurant m'a interrogé sur les méthodes de management pour mener à bien les réformes. Il y aurait beaucoup à dire. L'école de la confiance constitue la première des réponses. Les personnels doivent être heureux de travailler pour l'éducation nationale et se sentir estimés par leur institution. Cela ira de pair avec les évolutions en matière d'autonomie. Elle signifie non pas caporalisme, mais esprit d'équipe à l'échelle des établissements. Il y aura des ouvertures en termes de carrière au sein de l'éducation nationale comme en dehors.
Christine Lavarde a évoqué le numérique dans le programme d'investissement d'avenir (PIA). Il est exact que nous entrons dans une nouvelle phase. Les engagements pris en matière de tablettes numériques seront honorés. Nous insisterons néanmoins davantage sur la formation des professeurs. Ce PIA dessinera notamment la formation des professeurs du futur, qui mettra plus d'accent sur la dimension numérique.
La réunion est close à 18 h 25.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat