Commission des affaires économiques

Réunion du 8 janvier 2008 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • OGM
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  • préfiguration

La réunion

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Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables

Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Jean-Louis Borloo, ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, et de Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'Etat chargée de l'écologie auprès du ministre d'Etat, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le projet de loi n° 149 (2007-2008) relatif aux organismes génétiquement modifiés (OGM).

a indiqué à titre liminaire que le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat en urgence le 20 décembre 2007 avait une double filiation. D'une part, ce projet s'inspire des travaux effectués par la commission des affaires économiques du Sénat, notamment du rapport de la mission d'information sur les enjeux économiques des organismes génétiquement modifiés (OGM) présidée par M. Jean Bizet et dont M. Jean-Marc Pastor était rapporteur, présenté le 15 mai 2003. D'autre part, le projet de loi constitue la première traduction des conclusions du Grenelle de l'environnement. Rappelant qu'un projet de loi avait été soumis à la Haute Assemblée lors de la dernière législature puis retiré de l'ordre du jour parlementaire, il a précisé que les principes dégagés de façon consensuelle pendant le Grenelle de l'environnement étaient présents dans le texte présenté à la commission, à savoir : la responsabilité, la transparence, l'expertise pluraliste. Il a ensuite insisté sur la nécessité que l'Etat garantisse aux agriculteurs la possibilité de produire avec ou sans OGM et a estimé nécessaire d'instaurer un régime de responsabilité de plein droit pour le préjudice économique qui pourrait résulter de la présence accidentelle de ceux-ci dans des cultures conventionnelles et biologiques.

a ensuite attiré l'attention des commissaires sur le respect de l'impératif de transparence, notamment grâce à la création d'un registre national des cultures d'OGM établi à l'échelle parcellaire qui sera mis à la disposition de tous les citoyens. Puis il a déclaré que la création d'une Haute Autorité sur les OGM dotera la France de l'expertise diversifiée dont elle a besoin. Composée de scientifiques issus de cultures différentes, alliant les points de vue des sciences dites « dures » et des sciences humaines, cette Haute Autorité sera également largement ouverte à la société civile afin de débattre de sujets à la fois scientifiques, économiques et éthiques.

Abordant la question du calendrier parlementaire, M. Jean-Louis Borloo a précisé que l'objectif initial du Gouvernement était l'adoption de ce projet de loi avant la suspension, le 9 février 2008, des travaux du Parlement. Il a ensuite expliqué que la question, distincte du projet de loi, du maïs Bt MON 810, dont le Gouvernement avait décidé, à la suite du Grenelle, de suspendre la commercialisation jusqu'à l'avis de la Haute Autorité, avait perturbé ce calendrier. Le ministre d'Etat a rappelé que le décret du 5 décembre 2007 avait créé un comité de préfiguration de cette Haute Autorité composée de 35 personnes, et que l'arrêté de suspension n'avait pas été notifié à la Commission européenne, le dossier scientifique étant insuffisant et nécessitant un complément d'information. En conséquence, le Président de la République a souhaité, lors de sa conférence de presse du 8 janvier 2008, attendre l'avis du comité de préfiguration de la Haute Autorité sur le maïs Bt MON 810 pour décider de la suite à donner, puis d'entamer le débat parlementaire. Le ministre d'Etat a alors clairement exposé le choix à venir du Gouvernement. Dans l'hypothèse où le comité de préfiguration émettrait un « doute sérieux » sur les risques sanitaires et environnementaux du maïs Bt MON 810, le Gouvernement ferait en effet jouer la clause dite de « sauvegarde » prévue à l'article 23 de la directive 2001/ 18/CE qui obligerait alors la Commission européenne à s'emparer du dossier et à évaluer ce produit. L'activation de la clause de sauvegarde empêcherait dès lors la commercialisation et la culture du maïs Bt MON 810 jusqu'à la décision de la Commission européenne. Symétriquement, cette clause ne serait pas activée si le comité n'émettait pas de « doute sérieux ».

A propos du calendrier d'examen du projet de loi, le ministre d'Etat a fait savoir aux commissaires que le changement d'ordre du jour permettrait aux sénateurs de procéder à un examen du projet de loi dans de meilleures conditions que celles initialement prévues.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

après avoir remercié le ministre d'État pour son exposé, a tenu à faire deux commentaires préalablement à ses observations sur le contenu du projet de loi. Rappelant l'estime qu'il porte aux deux membres du gouvernement auditionnés par la commission, il a toutefois fait part de son étonnement face au témoignage de sympathie récemment exprimé par Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, secrétaire d'État chargée de l'écologie, à l'égard de Monsieur José Bové. Il a ensuite regretté le report de l'examen de ce texte, estimant que le temps de la réflexion avait été pris ces dix dernières années au Sénat et avait permis de dégager un large consensus au sein de la commission des affaires économiques. Il a ajouté qu'il était disposé à accompagner les propositions du gouvernement sur l'application du principe de transparence au niveau de la parcelle et plus seulement du canton.

Il a ensuite exprimé son étonnement face à l'hypothèse d'une « clause de sauvegarde », estimant que les vingt-trois dernières études scientifiques menées depuis dix ans au sujet du maïs Bt MON 810 n'ont démontré aucun risque sanitaire ou environnemental et qu'à sa connaissance aucune nouvelle étude ne venait contredire cette analyse. La France perd de la crédibilité à l'égard de nos voisins européens alors qu'elle exercera, à compter de juillet prochain, la présidence de l'Union européenne. Il a indiqué que les parlementaires auront de grandes difficultés à justifier le comportement du gouvernement auprès de nos concitoyens. Le pouvoir d'achat de certains agriculteurs risque de diminuer alors que les prix agricoles sont repartis à la hausse et que les productions d'OGM ont un rendement supérieur à la moyenne.

constatant que le Grenelle de l'environnement reposait sur un compromis tacite fondamental, à savoir la sanctuarisation de la question nucléaire au détriment des biotechnologies, s'est inquiété des conséquences dommageables du report du projet de loi sur ce secteur de la recherche française. Rappelant que trois multinationales, malheureusement non européennes, possèdent 97 % de la propriété intellectuelle des traits génétiques en matière végétale, il s'est dit troublé par la perte d'indépendance de notre pays dans le domaine des biotechnologies.

Après avoir rappelé qu'il suivait de longue date les questions environnementales, il a tenu à commenter les trois axes structurant le projet de loi : la transparence, la responsabilité, l'expertise.

Il a précisé que le manque de transparence engendre la suspicion de l'opinion publique et a mis l'accent sur le fait que la destruction illégale de plants d'organismes génétiquement modifiés ne devait en aucun cas entraîner l'impunité des auteurs. S'agissant du principe de responsabilité, il a suggéré de reprendre l'idée émise lors de la lecture au Sénat du projet de loi relatif aux OGM en 2006 de créer à titre transitoire un fonds d'indemnisation alimenté par des cotisations volontaires obligatoires des agriculteurs cultivant ces organismes, dans l'attente d'un engagement à terme des assureurs privés sur ce dossier. Sur le principe d'expertise, il a appelé de ses voeux un plan de recherche ambitieux grâce auquel l'Institut National de la Recherche Agronomique et les différents ministères concernés pourraient mettre en place des fonds communs de placement innovation et permettre aux céréaliers de s'impliquer.

En réponse à M. Jean Bizet, Mme Nathalie Kosciusko-Morizet a indiqué que son attitude vis-à-vis de M. José Bové ne constituait qu'un acte de politesse élémentaire, nécessaire pour amorcer le dialogue avec les opposants aux organismes génétiquement modifiés.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables

En complément, M. Jean-Louis Borloo a assuré la secrétaire d'Etat de son soutien, et indiqué qu'il s'était mis d'accord avec le ministre de l'agriculture, M. Michel Barnier, pour que celui-ci adopte la plus extrême réserve à l'égard de M. Bové lors de leur rencontre de ce jour.

Puis il n'a pas caché qu'il était possible que la Commission européenne interdise l'utilisation du maïs Bt MON 810. Insistant pour que soit établie une distinction claire entre la thématique de la recherche en biotechnologie et celle de la commercialisation des produits à base d'OGM, il a indiqué vouloir obtenir le lendemain au ministère de la recherche le fléchage de crédits budgétaires sur les biotechnologies. Il a ensuite noté que nul ne pouvait anticiper les conclusions du comité de préfiguration sur les risques sanitaires et environnementaux du maïs Bt MON 810 et s'est dit favorable à une saisine de l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (AESA) si le comité de préfiguration émettait un doute sérieux sur ce produit.

Debut de section - PermalienPhoto de François Fortassin

a déclaré qu'au lieu d'être « ébloui » par les explications du ministre, il n'avait reçu aucun éclaircissement répondant à ses interrogations. Ajoutant que le Gouvernement traitait le Parlement d'une façon singulière, il a estimé que le débat engagé était « surréaliste » puisque la commission des affaires économiques du Sénat discutait d'un projet de loi retiré de l'ordre du jour parlementaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Marcel Deneux

après avoir apporté son soutien aux propos de M. Jean Bizet, rapporteur, a regretté le « gâchis » que représentait le retrait du texte de l'ordre du jour parlementaire. Craignant les amalgames dans l'esprit de nos concitoyens, il a estimé que le Gouvernement commettait ainsi sa première faute politique. Déclarant que l'on dramatisait trop le débat sur les biotechnologies, il a considéré qu'une trop large écoute était accordée à des personnes dont la représentativité était discutable et ce, au détriment de la représentation parlementaire. Regrettant la perte de crédibilité du Gouvernement et de la France sur la scène européenne, il a conclu son intervention sur les difficultés que ne manqueront pas de susciter les plantations d'OGM avec ou sans autorisation dans les mois à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Muller

après avoir rappelé les conclusions du Grenelle de l'environnement sur les OGM, s'est félicité du changement de calendrier annoncé car le sujet abordé était complexe et nécessitait un temps de réflexion pour assurer la coexistence des filières. Il a rappelé qu'en tant que maire de la commune de Wattwiller, il s'était heurté au refus de l'administration d'établir des périmètres de protection autour des parcelles de culture biologique. Après avoir apporté son soutien à l'action de M. José Bové, il a exhorté le gouvernement à tenir sa parole donnée devant le Parlement. A cette occasion, il a suggéré au ministre d'associer, dans l'hypothèse d'une activation de la clause de sauvegarde, tous les acteurs présents lors du Grenelle de l'environnement pour étayer le dossier français. Choqué par le fait que d'aucuns qualifient M. Bové de « repris de justice », il a déclaré que le « premier repris de justice dans cette affaire » était l'Etat eu égard aux nombreuses condamnations de l'État français pour non-transposition de la directive 2001/18/CE. Puis il a estimé que le modèle agricole français n'avait rien à gagner à l'utilisation des OGM compte tenu de la renommée des productions de son terroir. Rappelant que le seuil d'étiquetage des produits contenant plus de 0,9 % d'OGM, fixé par la commission européenne, était avant tout un compromis politique, M. Jacques Müller a indiqué que la présence de ces organismes ne pouvait être détectée que si elle dépassait le seuil de 0,1 %. Il a conclu que le calcul du préjudice économique, prévu à l'article 5 du projet de loi, en cas de présence accidentelle d'OGM dans une plantation, aboutirait à un résultat manifestement inférieur au préjudice global réellement subi par l'exploitant.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Mortemousque

après avoir évoqué son implication dans ce dossier en tant qu'élu du Périgord, a déclaré avoir apprécié les conclusions du Grenelle de l'environnement qui lui ont ouvert des perspectives nouvelles, puis a conclu sur la nécessité de ne pas décourager les forces économiques de notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Charles Revet

après avoir approuvé les propos de M. Jean Bizet, rapporteur, a demandé au ministre si les agriculteurs français respecteraient la législation en vigueur et s'ils seraient indemnisés pour le préjudice subi par l'achat précoce de semences qu'ils ne pourraient plus utiliser. Il s'est par ailleurs interrogé sur l'opportunité de bloquer les importations des OGM en cas d'activation de la clause de sauvegarde. Il s'est enfin posé la question du rôle futur de l'Institut National de la Recherche Agronomique.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

a tenu à rendre hommage aux travaux de ses collègues. Après avoir rappelé que tout dépendait des conclusions du comité de préfiguration, il s'est interrogé sur les conséquences d'un avis concluant à l'absence d'un doute sérieux sur l'évaluation des risques relatifs à l'utilisation du maïs Bt MON 810.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Bizet

a réaffirmé qu'il était prêt à aller très loin dans la l'application du principe de transparence tout en restant fidèle aux convictions de sa famille politique. S'inquiétant de la multiplication prévisible des emblavements illégaux, il a craint que l'année 2008 soit une « année entre parenthèses » qui mette en difficulté les agriculteurs. Il a par ailleurs insisté sur la nécessité de condamner les fauchages illégaux. Évoquant la révolution de l'hybridation dans le domaine agricole il y a cinquante ans, il a exprimé son inquiétude de voir l'agriculture française passer aujourd'hui à côté d'une évolution majeure de l'agriculture mondiale, source de gains de productivité. Pour conclure, il a regretté que la France prenne du retard dans ce dossier.

Debut de section - Permalien
Jean-Louis Borloo, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables

après avoir évoqué les difficultés de la genèse du Grenelle de l'environnement, s'est félicité de ce que ni le Parlement, ni le Gouvernement ne furent hostiles à cette nouvelle démarche de gouvernance nécessaire pour aborder le nouveau millénaire. Il a ajouté que personne n'avait remis en cause la méthodologie et la qualité des acteurs du Grenelle de l'environnement ni contesté ses conclusions, détaillées et validées par tous les acteurs, qui ont constitué un matériau essentiel pour le pouvoir politique. Il a conclu en souhaitant que soient sanctuarisées les surfaces nécessaires aux chercheurs français pour mener à bien leurs études sur les OGM.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

a souligné, en conclusion, que la Haute Assemblée souhaitait être réaliste et dégager un consensus sur un sujet qui interroge fortement nos concitoyens. Évoquant la déception du Sénat devant le report de ce texte, il a craint que cette mesure suscite l'incompréhension du monde agricole. Conscient que l'absence de cadre législatif clair sur cette question provoquait l'inquiétude des Français, il a appelé le Gouvernement à agir rapidement. Il a enfin mis l'accent sur la nécessité de concevoir une nouvelle voie pour le modèle agricole français, considérant que l'agriculture biologique ne pouvait constituer à elle seule un mode d'agriculture durable.

La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements sur la proposition de loi n° 137 (2007-2008), modifiée par l'Assemblée nationale en première lecture, relative aux tarifs réglementés d'électricité et de gaz naturel.

Elle a émis les avis figurant dans le tableau suivant :