Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission entend, au cours d'une réunion publique ouverte à l'ensemble des sénateurs, M. Manuel Valls, ministre de l'intérieur, sur la politique de l'immigration.
Merci, Monsieur le ministre, d'avoir accepté de répondre à nos questions et de nous présenter les orientations de la politique de l'immigration. En raison de la tenue d'un conseil de défense ce matin à l'Elysée, nous avons dût déplacer l'horaire de cette rencontre. Je vous demande de bien vouloir excuser en conséquence nos collègues qui participent en ce moment au débat en séance publique sur le collectif ou aux deux réunions de commission et à la réunion de délégation concomitantes. Nous aurons l'occasion de nous revoir sur d'autres sujets, comme la sécurité. Cette audition porte sur l'immigration. J'ajoute que pour nous le droit d'asile est une question en soi, qui ne peut être considérée comme un appendice de la politique d'immigration.
Merci de m'avoir convié à vous présenter les axes de la politique du gouvernement sur l'immigration, l'asile, je m'en expliquerai, l'intégration et l'accès à la nationalité. J'ai été parlementaire pendant dix ans. Je connais l'importance du travail en commission qui permet d'affiner les perceptions et d'apporter les éclairages essentiels. Je prendrai toute ma part aux travaux auxquels vous souhaiterez m'associer. J'étais, il y a deux semaines, devant la commission des lois de l'Assemblée nationale : j'y ai tenu les mêmes propos. Je veux me rendre disponible aussi vis-à-vis du Parlement européen ; au début du mois, je me suis rendu à Strasbourg.
Je suis très attaché au principe de libre circulation et je serai très scrupuleux quant à la préservation de l'acquis Schengen. Je refuse la fermeture unilatérale des frontières (tout doit être décidé par le Conseil, sur proposition de la Commission) comme la politique de la chaise vide si je n'obtiens pas satisfaction. Je n'ai absolument pas accepté un compromis correspondant à ce que souhaitait le précédent gouvernement. Mais je sais que l'Europe doit se doter de mécanismes efficaces de surveillance de nos frontières. C'est le but du règlement «évaluation » qui a donné lieu à un débat de principe avec le Parlement européen. J'ai discuté de la question avec le président Schulz et de nombreux parlementaires européens, mais aussi avec la commissaire Malmstrom. Les solutions que j'ai proposées -qui aboutissent à renforcer le rôle de la commission dans le processus d'évaluation- et la bonne prise en compte des demandes du Parlement européen dans le règlement évaluation semblent satisfaire aussi bien la Commissaire que le Parlement européen.
Je sais être ici dans un lieu où les questions sont abordées avec mesure et nuance. C'est ce que réclament les Français. Je connais la préoccupation permanente des Sénateurs pour le respect des principes humanistes du droit et des libertés publiques. L'exigence qui vous anime sur des sujets sensibles comme la loi pénitentiaire ou le fichier accompagnant la carte d'identité en porte témoignage. Je connais, aussi, la liberté des sénateurs qui peut les amener, en conscience, à penser différemment de leur propre camp. Votre esprit de tempérance sera utile pour aborder les sujets qui, en dehors de ces murs, sont toujours soumis aux polémiques stériles, aux instrumentalisations et aux fracas.
Les questions d'immigration, d'intégration, d'asile et de nationalité ont, depuis de nombreuses années, alimenté les tensions. Par un curieux renversement, dans notre pays, dont l'histoire a affirmé la tradition d'accueil, l'arrivant a été perçu comme une menace, et non plus comme une chance. Jamais peut-être auparavant les mots de Jacques Prévert, parlant de ces «étranges étrangers », n'avaient aussi bien décrit la dureté du débat public. La volonté du président de la République et du Premier ministre est d'aller vers l'apaisement. Il m'appartient, dans mes fonctions, de mettre en oeuvre cette volonté à laquelle les Français ont très largement souscrit.
Ministre de l'intérieur, j'ai la charge de la sécurité de nos concitoyens. J'assume pleinement la fermeté nécessaire à l'accomplissement d'une telle mission.
Je suis également le ministre d'un État dont il m'appartient de garantir la plénitude et la continuité de l'action - je sais toute l'importance que vous accordez à cette question.
Je suis le ministre d'un État qui doit accueillir à l'intérieur de son espace, en fixant pour cela des règles, et en les faisant appliquer.
Le ministère de l'intérieur est aussi celui des grandes libertés publiques. C'est cet ensemble cohérent, formé d'un Etat à la fois régulateur des flux migratoires et garant des libertés publiques et fondamentales, qui doit permettre au ministre que je suis de mettre en oeuvre, en lien étroit avec les autres ministères compétents, une politique de justice et d'équilibre en matière d'immigration et d'intégration. Cette politique s'appuiera sur deux principes fondamentaux: l'objectivité et la transparence. Il s'agit de mettre en place des procédures justes, de faire la promotion d'un dialogue renouvelé avec les associations et les organisations syndicales et de mener une réflexion plus étroitement coordonnée avec les collectivités territoriales, confrontées, comme l'Etat, aux situations de grande précarité que peuvent connaître les migrants. Pour tendre vers davantage de justice, des premières avancées ont été réalisées. Elles doivent se prolonger, notamment par le bais d'un travail législatif qui se traduira par deux projets de lois, l'un présenté à l'automne, l'autre au premier semestre 2013. Au cours des deux derniers mois, j'ai pris trois mesures à caractère d'urgence.
Première mesure de bon sens, prise avec mes collègues Michel Sapin et Geneviève Fioraso : l'abrogation de la circulaire du 31 mai 2011 sur les étudiants étrangers, qui conduisait à refuser le droit au séjour à des personnes hautement qualifiées, souhaitant exercer leurs talents dans notre pays.
Deuxième mesure qui répond à l'engagement du Président de la République: la circulaire du 6 juillet 2012, qui fait désormais de l'assignation à résidence la règle à la place de la rétention administrative pour les familles qui doivent être éloignées.
Troisième mesure: à la suite de l'arrêt de la Cour de justice des communautés européennes, il n'est plus procédé à des mises en garde à vue de ressortissants étrangers, au seul motif du séjour irrégulier sur le territoire. Cela demande une évolution de notre droit qui garantisse l'efficacité de d'éloignement.
Parallèlement à ces premières réalisations, des travaux ont débuté visant à doter l'administration d'un cadre d'action clarifié et assoupli. Admettre au séjour quelqu'un qui n'en avait pas acquis le droit, le « régulariser », est un acte important qui doit s'appuyer sur des critères précis et objectifs. Il s'agit de donner une expression concrète à notre devise républicaine et de mettre un terme à toute idée de partialité et d'arbitraire. La République c'est l'inverse du privilège, de l'avantage et du traitement différencié. La République c'est, partout, et pour chacun, les mêmes principes de droit qui s'appliquent.
Une circulaire est en cours de préparation qui doit préciser les critères de l'admission exceptionnelle au séjour. Ceux-ci vont être discutés, cet été, avec l'ensemble des parties prenantes (associations, syndicats) et je suis à l'écoute des parlementaires. Ces critères portent sur les années de présence sur le territoire, les attaches familiales, la scolarisation des enfants, la situation par rapport au travail, donc sur ce qui fait la réalité d'une vie construite sur notre territoire. Interprétés de manière trop restrictive, ces dernières années, sans prendre pleinement en compte la nature des liens tissés par les demandeurs de titre avec notre pays, ces critères demandent du réalisme dans leur application. Il y avait 30 000 régularisations par an sous le précédent gouvernement, dont 15 000 purement discrétionnaires. La clarification des critères réduira la part d'incertitude. Elle donnera de la lisibilité aux personnes concernées et permettra de résoudre les situations individuelles les plus difficiles. Mais elle n'a pas pour objet d'augmenter le nombre de régularisations. Les critères sont justes, ils viseront à sortir de toute logique d'arbitraire, mais ils resteront précis et rigoureux.
Vous serez prochainement amenés à étudier deux projets de loi visant à tendre vers davantage de justice. Celui que nous vous présenterons à l'automne mettra fin au «délit de solidarité» qui permet de poursuivre l'aide désintéressée, apportée à des étrangers en situation irrégulière, sur la même base juridique utilisée pour les filières criminelles d'immigration. Notre loi ne saurait punir ceux qui, en toute bonne foi, veulent tendre une main secourable.
Le second projet de loi, présenté au premier semestre 2013, dans ses dispositions relatives à l'immigration, proposera la création d'un titre de séjour pluriannuel pour les étrangers en situation régulière sur notre territoire. Ceux-ci doivent bénéficier d'un cadre administratif moins contraignant. Les difficultés à obtenir le renouvellement d'un titre de séjour sont des facteurs de fragilisation économique, d'instabilité et in fine des obstacles à l'intégration. Il s'agit, par conséquent, de sortir d'une logique qui, tout à la fois, est dure humainement, complexifie les missions de l'administration et se révèle contreproductive pour notre pays. Entre 50 000 à 60 000 personnes en situation régulière pourront bénéficier de ce titre pluriannuel.
Dans ce même projet figurera la question de l'asile, avec la transposition des directives européennes qui vont prochainement être adoptées. La France est une terre d'accueil, mais aussi de refuge. En voulant parler, un jour, au nom de l'humanité toute entière, notre patrie a acquis un statut singulier et universel qui nous oblige ; il est devenu une référence en matière de liberté pour toutes celles et ceux qui, à travers le monde, subissent l'oppression et la violence. L'asile réclame, cependant, un cadre précis d'application. Une réflexion est en cours avec nos partenaires européens, auprès de qui j'ai pu insister, au Conseil Justice et Affaires intérieures de l'Union européenne, sur la volonté de la France de s'inscrire pleinement dans une tradition. Ce «paquet asile» va nous amener à remettre à plat les procédures applicables : je m'appuierai sur le Parlement pour garantir les nouveaux droits accordés aux demandeurs en préservant l'objectif de réduction des délais fixé par le président de la République.
En matière d'immigration, faire preuve de mesure, c'est faire preuve de réalisme, condition nécessaire pour qu'un principe de justice soit pérenne. Le réalisme en matière d'immigration c'est, avant tout, la prise en compte de la situation économique et sociale de notre pays. Conformément aux engagements du Président de la République, un débat sera organisé, chaque année, au Parlement, sur la régulation des migrations économiques en fonction des besoins de notre pays, dans le cadre d'une concertation large avec les partenaires sociaux, les collectivités locales et les associations.
Le réalisme consiste également à avoir parfaitement conscience des filières d'immigration clandestine et à les combattre avec la plus grande fermeté. Ceux qui exploitent la misère humaine seront combattus avec détermination, ce qui implique un redéploiement des forces de sécurité vers un travail de fond, nécessaire au démantèlement des filières, en lien étroit avec les ministères du travail et du budget.
Le réalisme, c'est encore agir efficacement en matière d'éloignement. Les personnes, en situation irrégulière sur notre territoire, et qui n'ont pas vocation à y rester, doivent regagner leur pays d'origine. La décision de la Cour de cassation du 5 juillet qui ne donne plus légalement le temps matériel nécessaire pour examiner la situation d'un étranger au regard de son droit au séjour et d'en tirer les conséquences administratives ouvre un vide juridique qu'il s'agit de combler. Il y va de l'efficacité nécessaire de la politique d'éloignement. Dans le cadre du projet de loi présenté à l'automne, un dispositif sera proposé qui respectera les impératifs constitutionnels et européens, et garantira un équilibre indispensable entre le respect des libertés individuelles et les exigences de maîtrise des flux migratoires.
Le réalisme c'est, enfin, comprendre l'immigration et l'intégration dans la diversité de leurs implications, ce qui signifie faire la promotion d'un travail interministériel trop oublié sous le gouvernement précédent. Certains sujets demandent d'avancer en parfaite coordination et intelligence. Ce fut le cas, récemment, avec l'envoi conjoint - ce qui représente une première! - d'une circulaire du ministère de l'intérieur aux préfets et d'une circulaire de la chancellerie aux procureurs, à la suite de la décision de la Cour de cassation mettant fin aux gardes à vue au seul motif du séjour irrégulier. De même, les critères d'admission exceptionnelle au séjour sont l'objet d'une réflexion commune avec le ministère du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social. La consultation des acteurs sociaux, qui commence cette semaine, est menée conjointement par mes équipes et celles de Michel Sapin. Le sujet, particulièrement délicat, des étrangers malades réclame une action commune avec le ministère des affaires sociales et de la santé afin d'améliorer l'articulation entre les agences régionales de santé et les préfectures. Nous allons lancer avec Marisol Touraine une mission commune sur ce sujet. Inutile de rappeler devant vous la suppression du droit de timbre de 30 euros pour accéder à l'aide médicale d'Etat, votée en loi de finances rectificative.
C'est une exigence d'équilibre qui anime mon action. Je veux regarder l'immigration comme un défi positif pour la France, celui de l'intégration et celui, également, qui conduit à devenir Français. Si je suis le ministre de l'intégration, par mon décret d'attribution, je reconnais bien volontiers que ce sujet traverse l'ensemble des politiques publiques. Il est interministériel par essence et c'est en ce sens que j'ai commencé à travailler avec mes collègues.
Faire le choix de venir en France c'est, pour beaucoup d'arrivants, le début d'une adhésion pleine et entière à notre Nation. C'est le message que la France a fait vivre, tout au long des époques, depuis que la question de la Nation s'est posée. On ne naît pas forcement Français, on peut, si on le souhaite, le devenir, comme je l'ai fait il y a trente ans. Notre nation n'a pas une identité figée dans le marbre, elle est la somme d'identités multiples qui se retrouvent dans un idéal commun et dans des lois communes qui forment notre République. Le défi de l'immigration sera relevé si la naturalisation n'est plus vécue comme la fin d'un parcours du combattant, mais comme l'issue d'un processus d'intégration qui a sa part d'exigence. Le nombre de naturalisations est en chute libre: si rien n'est fait, ce nombre va chuter de 40% entre 2011 et 2012, après une chute de 30% entre 2010 et 2011. Cette chute résulte d'une politique délibérée d'exclure de la nationalité des gens méritants et ne posant aucune difficulté. Je m'apprête à revenir sur les critères introduits subrepticement par mon prédécesseur. Je veux faire de la nationalité un moteur de l'intégration et non le résultat d'une course d'obstacles aléatoire et discriminante.
En appliquant cette ligne politique, j'ai conscience de ne pas plaire à tout le monde. Mais j'ai la conviction d'atteindre un point d'équilibre. J'entends les critiques monter au sein de certaines associations, qui me reprochent d'être trop dur vis-à-vis des étrangers. Elles se mêlent à d'autres, venues du camp opposé, par la voix même de mon prédécesseur, qui me reproche d'être laxiste.
Comment être à la fois trop dur et laxiste? Ces appréciations contradictoires sont les conséquences du point d'équilibre que je recherche. Je ne prétends pas détenir la vérité. Il n'y a rien de figé. La seule question qui vaille est la suivante: est-ce que le choix qui est fait est juste ou non? S'il est juste, il sera appliqué. S'il est injuste, il sera rejeté.
Merci des ces annonces. Nous sommes très attentifs à ces sujets et à la place de la loi. Vous avez évoqué l'attachement du Sénat à la mesure. Nous sommes très attachés aux libertés publiques, aux droits de l'homme, au fait que la France, par son histoire, soit une terre d'accueil.
Est-il possible d'éviter les polémiques trop faciles ? Il ne s'agit pas de savoir s'il faut être « laxiste » ou « dur » mais il faut être juste, savoir quel est le droit applicable et quels droits nouveaux mettre en oeuvre. Vous avez indiqué, conformément aux engagements du Président de la République, certaines orientations qui divergent de celles qui ont été choisies par cinq fois en cinq ans.
Beaucoup de collègues, venus de toutes les commissions, nous ont rejoints. Nous sommes nombreux à nous féliciter de l'abrogation de la circulaire qui signalait à tous les étudiants qui frappent à notre porte que la France les rejetait ou les contraignait à de longues files d'attente dans des bureaux, pour les inciter à aller ailleurs. Il est très important pour le rayonnement de la France qu'elle accueille les étudiants du monde.
Nous nous réjouissons aussi de la circulaire que vous avez prise pour sortir les enfants des centres de rétention, où ils n'ont pas leur place. Vous avez annoncé que vous comptez mettre fin au délit de solidarité, contre lequel nous nous sommes exprimés, puisqu'il conduisait à pénaliser certaines associations pour leur missions humanitaires.
On ne peut s'en tenir aux circulaires. Il faut inscrire certaines dispositions dans la loi. Ainsi, pour le regroupement familial, le durcissement des exigences législatives, comme celle d'une durée de séjour de 18 mois ou l'obligation de demander un visa de long séjour, ont rendu plus difficile l'exercice du droit de vivre avec son conjoint. Nous pouvons nous interroger sur la pertinence de l'examen culturel et linguistique. Songez ce qu'il adviendrait de nos expatriés en Inde ou en Chine si leurs conjoints devaient subir le même type de test ! Une politique nouvelle de naturalisation peut offrir une réponse à certaines difficultés.
Sur l'éloignement des étrangers en situation irrégulière, l'allongement de deux à cinq jours de la durée de rétention préalable au contrôle du juge a posé problème à de nombreux sénateurs, de même que l'allongement de la durée maximale de rétention de 32 jours à 45 jours. Il y a aussi les restrictions aux droits des étrangers, entre leur arrestation et leur placement en rétention sont dans la loi. Nous aimerions connaître vos intentions précises en la matière.
De même, je vois mal comment ne pas prendre de mesure législative à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation rendant impossible la garde à vue dans la procédure d'éloignement.
La loi du 16 juin 2011 a créé le concept un peu singulier de zone d'attente flottante, en tout point du territoire. Vous reconnaissez-vous dans une telle notion ?
Sur l'asile, la question des pays d'origine dits sûrs et des parties sûres des pays dits non sûrs doit être posée.
Sur Mayotte, nous avons rendu la semaine dernière un rapport. Il est impossible de continuer cette politique tragique qui cause tant de morts sur les frêles esquifs entre les Comores et Mayotte et tant de difficultés à la population mahoraise. Dépenser 50 à 70 millions d'euros pour reconduire des gens qui reviennent amène à se demander s'il y a d'autres moyens de procéder.
Votre circulaire sur l'assignation à résidence exclut Mayotte. Ce n'est pas satisfaisant, mais face à l'ampleur du problème, comment faire autrement ? Le problème de l'immigration clandestine fait de Mayotte, malheureusement, un cas à part. Songez que la moitié des reconduites à la frontière de notre pays ont lieu à Mayotte, nouveau département de 300 kilomètres carrés et que plus de 40 % des personnes concernées sont réitérantes.
Je tiens à évoquer les conséquences de la lutte contre l'immigration clandestine sur les mineurs étrangers isolés. Les chiffres que nous entendons varient de 3 000 à 8 000. Quel est le bon ? J'espère obtenir des réponses précises dans les mois qui viennent. Il est urgent de mettre fin à ces drames qui touchent trop de monde. Il faut trouver des solutions. L'excellent rapport publié la semaine dernière par notre commission ouvre des pistes de réflexion.
Il importe de trouver des solutions immédiates, pour mettre fin à un fléau dont la population de notre île est la première victime. Il est urgent de poursuivre la lutte contre l'immigration clandestine, voire de l'intensifier, mais autrement que par une politique du chiffre qui a montré ses limites.
A l'instar de la Seine Saint-Denis, il faudrait que les pouvoirs publics contribuent à l'effort en faveur des mineurs isolés, qui sont une conséquence directe de la lutte contre l'immigration clandestine.
A terme, il faut favoriser la coopération régionale. Puisque l'on invoque souvent les liens entre Mahorais et Comoriens pour revenir sur le choix irréversible de Mayotte en faveur de la France, mettons-les à profit pour bâtir dans les faits, et non seulement dans les mots, une véritable coopération régionale.
A la suite de la remise du rapport sénatorial, vous pouvez compter sur les sénateurs de la commission des lois dont je suis pour chercher des solutions à ce problème qui gangrène Mayotte.
Que coûte, globalement, la lutte contre l'immigration clandestine, en y incluant le temps passé par la police à escorter les sans-papiers ? En a-t-on bien pris la mesure ? Vous vous étonnez qu'on vous dise à la fois dur et laxiste. Oui, lorsque vous annoncez des circulaires, qui je l'espère, n'empièteront pas sur le pouvoir législatif, on peut penser que vous êtes laxiste. Cependant, quand vous expliquez qu'il n'y aura pas plus de 30 000 régularisations, cela nous rappelle de vilains souvenirs à propos de parents d'enfants scolarisés : on s'était alors arrêté au nombre indiqué, et de nombreux parents, cette année-là, n'ont pu être régularisés.
Quelle sera votre politique en faveur des mineurs isolés pris en charge par l'aide sociale à l'enfance ? Sait-on le coût humain pour ces jeunes incités à s'insérer dans la société française, à faire des études, mais qui ne sont pas sûrs d'être régularisés à 18 ans ? C'est pourtant l'une des voies d'entrée en France.
La convention internationale des droits de l'enfant prévoit pour les mineurs, qui sont les grands oubliés du code de l'entrée et du séjour des étrangers, des droits spécifiques comme le droit de vivre avec ses parents, mais aussi le droit à une vie privée propre, indépendante de celle des parents. Lorsque leurs parents ne sont pas régularisés, ils risquent de devoir abandonner leur scolarité et les amis qu'ils se sont faits en France.
Je vous félicite, monsieur le Ministre, pour vos propos, qui marquent une rupture et un apaisement.
Lors de votre nomination, certaines formations politiques se sont interrogées sur l'attribution à votre ministère des attributions liées à l'immigration et à l'intégration. Vous vous êtes engagé de façon très volontariste sur l'immigration, mais est-il envisagé de modifier les contours de votre ministère ? Mme la garde des sceaux a proposé de confier l'asile au ministère des affaires étrangères, la naturalisation et l'intégration aux affaires sociales et à la justice. Serait en outre créé un ministère de l'immigration et du co-développement.
Le Sénat, dans sa grande sagesse, a adopté une proposition de loi sur le droit de vote des résidents étrangers. Au-delà de votre point de vue, que j'espère favorable, envisagez-vous que l'Assemblée l'adopte prochainement ?
Sur les Roms, la FIDH (Fédération internationale des droits de l'homme), la CNCDH (commission consultative nationale des droits de l'homme) et la Halde (Haute autorité de lute contre les discriminations et pour l'égalité) avaient émis des recommandations afin de mettre fin aux discriminations dont ces populations sont victimes et de trouver des solutions durables et humaines à leur accueil en France, au-delà de la politique de départs soi-disant volontaires qui s'intensifient. Quelles sont vos ambitions en la matière ?
Je salue votre décision juste et conforme aux orientations européennes de mettre fin au placement des familles en centres de rétention. Elle était nécessaire. En tant que président du conseil général du Doubs, j'attire votre attention sur les conséquences qui peuvent être catastrophiques de cette juste décision. On manque de places dans les centres d'hébergement d'urgence et l'hiver sera là dans quelques mois...
Comment répondre aux cas des étrangers qui ne sont ni expulsables ni régularisables ?
Je vous rejoins sur la circulaire relative aux étudiants étrangers, qu'il est souhaitable d'accueillir, dans la mesure où ils sont de vrais étudiants, parce qu'ils seront demain des ambassadeurs dans le monde entier.
Sur la régularisation, vous avez évoqué des critères objectifs, mais quid des personnes qui auront eu maille à partir avec la justice et la police ?
Quant à la reconduite à la frontière, elle est plus facile à dire qu'à faire. Notre collègue de Mayotte a cité le chiffre de 40 % de réitérants. Que comptez-vous faire pour être « efficace », selon vos propres termes ?
Sur le regroupement familial, vous estimez, monsieur le Président, les critères trop stricts. L'exemple des Français en Chine, que vous avez pris, me paraît un peu spécieux. Que je sache, les Chinois ne se sentent pas menacés par l'immigration française ! En revanche, en France, le problème de l'immigration est incontestable. Il ne me paraît pas trop strict d'exiger une vraie intégration. En tant que maire, j'ai reçu quelqu'un qui voulait faire vivre sa famille, cinq personnes, dans un studio de 30 mètres carrés...Que répondre ? Est-il excessif de demander un logement décent, alors même qu'il nous manque un million de logements en France ? De s'assurer de l'existence d'un vrai travail, alors que nous avons trois à quatre millions de chômeurs ? Les mesures pleines de bons sentiments et d'angélisme...
sont sympathiques. Sauf sur le terrain. L'immigration incontrôlée en Europe a conduit partout à une poussée du populisme ! Réfléchissons-y au moins autant qu'au coût de la lutte contre l'immigration clandestine !
Les critères des naturalisations deviennent aberrants : ils excluent des bacheliers formés dans nos établissements à l'étranger.
La diminution des délais d'examen des demandes d'asile suppose que l'on améliore l'accès aux préfectures et que l'on augmente les moyens de l'OFPRA, dont la plupart des officiers de protection sont précarisés.
Allez-vous prendre en compte la décision de la Cour européenne des droits de l'homme sur l'effet non suspensif de la procédure prioritaire de l'OFPRA ?
Me réjouissant de l'abrogation de la circulaire du 31 mai, je souhaiterais savoir comment vous comptez vous associer au programme d'accueil de 100 000 étudiants brésiliens en Europe, pour lesquels certains de nos partenaires ont supprimé les visas. La France pourrait en accueillir 10 000.
S'agissant des ressortissants roumains et bulgares, force est de constater que le travail des associations pour les aider à sortir de la précarité par l'accès au travail est mis à mal par l'application des mesures transitoires de la procédure européenne d'adhésion. Envisagez-vous de les évaluer ?
Enfin, la taxe sur les cartes de séjour ayant été beaucoup augmentée par la loi de finances pour 2012, allez-vous la ramener à un niveau supportable pour les personnes concernées ?
En tant qu'universitaire, je vous remercie d'avoir abrogé la circulaire sur les étudiants étrangers, même si cela n'est pas suffisant pour que notre pays redevienne attractif. Dans le master que je dirige, le nombre d'étudiants étrangers a baissé de 80%.
A propos des régularisations, la taxe exigée de l'employeur des travailleurs étrangers -représentant un mois de salaire au SMIC- est non seulement rédhibitoire, mais l'inégalité qu'elle introduit entre candidats à un contrat de travail est aussi contraire aux règles de l'OIT, et sans doute de la Constitution. Il faut d'urgence régler ce très grave problème.
Autre discrimination, l'examen culturel et linguistique. Je connais en effet des habitants de ma commune vivant en France depuis 30 ans et pour lesquels cet examen constitue un véritable traumatisme. Ces clauses me rappellent les règles mises en place dans le sud des Etats-Unis après la guerre de Sécession qui ont empêché pendant un an les esclaves et leurs descendants de voter.
J'ai apprécié votre discours clair et sans langue de bois. Cela nous change ! Ce mélange de fermeté et d'humanisme me convient parfaitement. Oui, il faut abandonner les principes discrétionnaires au profit de la justice et de la transparence. Car chaque fois que l'on fait usage de l'arbitraire, la République est abimée, et chaque fois que l'on fait appel à la justice et à la transparence, la République en sort renforcée. Or, le rôle d'un ministre de l'intérieur est bien de renforcer les principes républicains. Lors de votre passage dans les Hautes-Pyrénées, les forces de l'ordre ont particulièrement apprécié votre discours et, surtout, votre considération pour leur travail.
Merci pour ces propos fort apaisants. L'on aurait pu penser que la gauche reviendrait sur l'inclusion, emblématique de la politique Sarkozy, de l'intégration et de l'immigration dans les attributions du ministère de l'intérieur. Cela aurait marqué une rupture symbolique.
Votre intervention ouvre, enfin, des perspectives constructives à la politique d'immigration. Je souhaite que vous ayez les moyens de concrétiser ces annonces. J'estime pour ma part qu'il est positif de lier intégration et immigration, car on ne peut tenir un discours juste en matière d'immigration sans une politique d'intégration active.
Pourriez-vous revenir rapidement sur le dernier conseil européen et la question de l'espace Schengen. N'y voyez aucun procès d'intention à votre égard, simplement nos commissions des lois et des affaires européennes se sont préoccupées de ce qui s'y est dit. Pourriez-vous nous donner votre sentiment personnel sur l'état d'esprit de vos collègues européens sur l'évaluation de Schengen et sur les fameuses « circonstances exceptionnelles » autorisant le rétablissement de contrôles intérieurs. Tous les Etats membres ne partagent pas notre tradition d'accueil...
Les déclarations d'intention sont une chose, c'en est une autre de tenir la ligne de crête entre fermeté et humanisme tout au long d'un exercice ministériel.
La répartition des CHRS (centre d'hébergement et de réinsertion sociale) est très inégale entre les territoires. Par exemple, le Maine-et-Loire accueille, proportionnellement à sa population, plus de demandeurs d'asile que la Loire Atlantique. C'est simple : là où il y a une borne Eurodac, il y a un nombre important de demandeurs. Il faudrait peut-être généraliser ces bornes, ou bien procéder à une stricte régionalisation.
L'on ne peut distinguer immigration, régularisation et asile, car ce sont les 18 à 24 mois de la procédure de demande d'asile qui aboutissent à placer les personnes dans une situation de ni-ni objectif, les relations qu'elles ont nouées dans notre pays compliquant alors la reconduite à la frontière. Si l'on ne voit pas que la demande d'asile constitue le moyen le plus simple d'entrer en France pour ensuite introduire des recours, l'on manque une étape dans la compréhension globale du phénomène. Si renforcer les moyens consacrés à l'examen des demandes d'asile est conforme à la mission de notre pays, c'est aussi nécessaire pour, en menant une politique de régularisation ferme et compréhensible par les populations, ne pas aboutir à des régularisations de fait.
Le versement du timbre comme le bénéfice de l'APL ne devrait pas dépendre de la seule nationalité, mais également des ressources. Est-il normal que des étudiants étrangers touchent cette allocation dans la mesure où leurs parents n'ont pas de revenus en France, alors qu'ils occupent dans leur pays des situations parfois enviables ? Il y a là une profonde injustice.
J'ai apprécié vos propos au moment de votre prise de fonctions. Il est bon de ne stigmatiser aucune communauté, car la confiance dans la République se fonde aussi sur des propos apaisants, et sur une égalité de traitement en fonction de critères simples et intelligibles par tous. Comment cette uniformité sera t-elle mise en oeuvre sur le territoire, alors que de si mauvaises habitudes ont été prises depuis si longtemps ?
Il faut se pencher sur le montant des taxes pour le droit au séjour, qui peut atteindre 1 000 à 1 500 euros pour une famille.
Si je me félicite d'entendre certains se réjouir aujourd'hui de l'abrogation de la circulaire sur les étudiants étrangers, j'aurais aimé qu'ils le disent en séance lorsque nous examinions, il y a quelque temps, ma proposition de résolution sur ce sujet.
La question des gens du voyage est, dans l'esprit de nos concitoyens, souvent associée à celle de l'immigration. Je m'y consacre depuis plusieurs années, notamment avec Louis Besson dans le cadre de l'AMF à partir de 1995, puis comme rapporteur de la loi de 2000. Une proposition de loi reprendra les sujets urgents que j'ai identifiés au fil de deux missions récentes. Je ne la déposerai pas sans vous l'avoir communiquée et en avoir débattu avec le Défenseur des droits. Je souhaite, monsieur le Président, qu'elle puisse être rapportée par un membre de la majorité sénatoriale. Il est d'autant plus nécessaire d'agir que les mesures transitoires prendront fin le 31 décembre 2013. Sur 2,8 millions de Roms de nationalité roumaine, 15 000 veulent vivre en France. Ils ne relèveront plus du droit de l'immigration, mais du statut des gens du voyage de notre pays. Je me tiens à votre disposition pour travailler sur ce sujet.
Soyez assuré que la commission des lois traitera avec attention votre proposition.
Au problème de la répartition territoriale des demandeurs d'asile s'ajoute celui de l'inégalité des charges pesant sur les conseils généraux, qui financent l'aide sociale et l'aide à l'enfance. L'État mettra-t-il en place une forme de solidarité nationale ou une coopération entre les collectivités ?
Enfin, quid des tests osseux visant à déterminer l'âge des mineurs qui se révèlent peu fiables, prennent du temps et coûtent cher ?
Sur l'accès à la nationalité, je vous suggère une mission associant l'inspection générale de l'administration, un sénateur, et qui irait dans une préfecture, celle du Nord, pour voir concrètement comment améliorer les circuits.
Votre politique de l'immigration n'introduit finalement pas de changement fondamental. Quelles instructions allez-vous donner à vos préfets en matière de régularisation ? La mise en place de critères objectifs ne doit pas gêner les préfets, qui ont besoin de conserver la nécessaire souplesse d'appréciation.
L'encombrement de la cour nationale du droit d'asile explique largement la lenteur de la procédure. Envisagez-vous d'augmenter ses moyens dans le cadre du budget, afin de limiter les délais d'examen à une année ?
Les budgets des préfectures pour l'hébergement des demandeurs d'asile sont épuisés depuis le mois de mai dernier, l'État n'a pu assumer toutes ses responsabilités. D'où l'utilité de conventions entre les collectivités, les grandes villes et l'État.
On confie aux conseils généraux des missions importantes, sans régler la facture ? Ils ne peuvent presque plus investir, eux qui assurent les trois quarts de l'investissement.
Après des périodes froides, l'Algérie, où je vais souvent et d'où M. Fabius revient, a la volonté de se rapprocher de la France. Beaucoup de jeunes veulent connaître notre pays et apprendre sa langue. Je vous prie de faciliter cette relation. Comment tisser des liens très forts d'amitié si nos consulats pinaillent pour l'octroi de visas. Je suis intervenu personnellement pour qu'on ne décourage pas ces jeunes. Soyez mon interprète, monsieur le Ministre.
Je me rendrai en Algérie cet automne, monsieur le Président. J'y aborderai la problématique des visas et des conventions très particulières qui nous lient à ce pays. J'en parlerai d'ailleurs dès ce soir au Maroc.
De toutes les autres interventions, j'aurais aimé retenir celle de M. Fortassin, dont je le remercie tout particulièrement.
Si l'on peut bien entendu en débattre, le périmètre de mon ministère procède d'un choix du président de la République et du Premier ministre. Catherine Tasca l'a dit, il y a une cohérence à regrouper l'immigration, l'intégration et le droit d'asile. Le grand ministère de l'intérieur ne doit pas être uniquement le ministère de l'ordre public, même si sans ordre public, il n'y a pas de démocratie, mais aussi celui des libertés publiques. J'ai, sur l'OFPRA, une responsabilité administrative et financière ; je n'ai en aucun cas celui de mettre en cause l'indépendance de ses agents. Dans le cadre de la préparation du projet de loi de finances pour 2013, j'obtiendrai les moyens permettant de réduire le délai à six mois comme le président de la République s'y était engagé pendant la campagne.
S'il est important de rappeler la distinction entre immigration et droit d'asile, lequel est régi par des conventions internationales, il va de soi que les personnes déboutées de ce droit peuvent ensuite relever de notre politique de l'immigration.
Le droit de vote des étrangers nécessite une réforme constitutionnelle qu'il revient au président de la République d'engager selon les formes qu'il choisira. A mes yeux, si ce droit peut être accordé à une personne qui n'est pas ressortissante d'un Etat de l'Union européenne, il ne constitue peut-être pas un élément d'intégration supplémentaire. Là où je suis, je veux insister sur la question essentielle de la naturalisation. Le droit de vote des résidents étrangers a été porté dans les années soixante-dix ; aujourd'hui le vrai sujet est celui de l'intégration des première, deuxième et troisième générations.
L'accès à la nationalité française s'apparente souvent à une course d'obstacles aléatoire et très discriminante. Aussi, la semaine prochaine, lorsque nous les rencontrerons avec le Premier ministre, je donnerai des directives aux préfets. Il faut changer la donne, mesurer l'impact de la déconcentration - pas uniquement dans le Nord -, et remettre à plat les critères d'accès à la nationalité comme l'insertion professionnelle, l'emploi, les conditions de ressources, la situation des jeunes ou des conjoints français. On doit encore encadrer l'entretien d'assimilation, car le questionnaire, auquel même un grand nombre d'entre-nous aurait du mal à répondre, s'apparente surtout à un jeu télévisé. En outre, les agents des préfectures, confrontés à ces situations, méritent de disposer d'outils performants. Je ne veux pas remettre en cause du jour au lendemain la déconcentration. Tout en évitant les va-et-vient, il convient de veiller à la cohérence et à l'égalité sur l'ensemble des territoires.
Le président de la République et le Premier ministre ont demandé aux membres du gouvernement de ne légiférer que lorsque cela était nécessaire, comme avec la décision de la cour de cassation. Ce sera le cas sur le titre de séjour. La loi doit conforter la hiérarchie des normes et assurer l'égalité. Lors du débat sur la carte de trois ans, je serai tout à fait disposé à rediscuter des critères mis en place ces dernières années, comme, pour le regroupement familial, des restrictions concernant le conjoint étranger. 73 % des signataires d'un contrat d'accueil et d'intégration sont arrivés en France dans le cadre du regroupement du fait d'un lien familial. Voilà un champ à explorer, tout en veillant à discerner d'éventuelles situations de fraudes.
A l'occasion des débats que nous aurons au Parlement tous les ans sur le lien entre économie et immigration, ou lors de la discussion des différents projets de loi, je souhaite que nos échanges soient sereins. L'accueil des étudiants étrangers renvoie à la place de la France dans le monde. Traitons de l'économie et parlons sans langue de bois de l'accueil de l'immigration. En effet, les conditions d'accueil ne sont pas bonnes parce qu'il se fait dans les mêmes quartiers de mêmes villes, ce qui rajoute aux difficultés de l'immigration régulière et de la population.
Le monde s'est ouvert et l'immigration, ce grand défi de la planète, change. Elle n'est plus la même qu'il y a quarante ans et concerne désormais tous les départements. Je ne suis ni naïf ni angélique, le débat sera difficile, raison de plus pour essayer de le maîtriser.
La rétention est une mesure coercitive ultime, lorsque l'éloignement ne peut être réalisé par un autre moyen. D'une durée moyenne en métropole d'environ dix jours, elle ne peut être portée à 45 jours au maximum que par une double décision du juge des libertés et de la détention. Sous l'influence de notre droit national et du droit européen, elle va connaître des profonds changements. Soyons, contrairement à ce qui s'est passé avec la dernière décision de la cour de cassation, capables de les anticiper.
Les zones d'attentes flottantes, prévues par le code, sont destinées à faire face à des situations exceptionnelles. Ce ne sont pas des lieux de non-droit, elles bénéficient d'un cadre spécifique sur lequel le défenseur des droits et le contrôleur général des lieux de privation sont très vigilants. Bien que les associations soient critiques, il faut les maintenir. Les préfets les plus concernés, notamment sur la façade méditerranéenne, ont reçu instruction de préparer des scénarios de crise pour anticiper les lieux de débarquement et en déduire les modalités d'hébergement les plus efficaces. J'accorde sur ce sujet la plus grande attention à la garantie des droits des étrangers et aux attentes du Parlement comme du contrôleur général.
Je suis très sensible à la qualité du rapport sur Mayotte. Il est impossible, comme vous l'avez reconnu, de considérer que la situation concernant la rétention des enfants est la même qu'en métropole. Il convient de prendre en compte nos relations avec les Comores. Je me tiens à la disposition des parlementaires de ce département.
Enfin, je veux vous dire mon inquiétude sur la problématique des Roms, qui ne se règlera pas par le seul accès au travail. Il s'agit d'un problème plus général de citoyens européens pourchassés dans leurs pays d'origine, que l'Union européenne devrait rappeler à leurs obligations.
Les expériences utiles menées en Ile-de-France ou à Tourcoing demeurent homéopathiques, tandis que la situation à Lyon, Aix-en-Provence, Lille et en Seine-Saint-Denis est très difficile. Devant les risques de confrontation entre les communautés constatés dans ce département, nous sommes contraints à procéder à des opérations de démantèlement. Il faut traiter le débat dans la sérénité car, si l'on procède comme il y a deux ans, on établira l'amalgame.
Je reviendrai rapidement devant vous poursuivre ces échanges.
Je vous remercie de vos réponses. Elles montrent votre souci de traiter les questions plutôt que de les exploiter. Comptez sur nous pour continuer à y travailler.