Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a procédé à l'audition de M. François Pérol, président du directoire du groupe Banques populaires et Caisses d'épargne.
a rappelé que la commission avait auditionné M. François Pérol le 29 avril 2009, dans le cadre du projet de loi portant création de l'organe central des Caisses d'épargne et des Banques populaires. Ce texte a été adopté le 18 juin 2009, puis le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement a accordé le 23 juin de la même année son agrément à la nouvelle structure, qui est aujourd'hui le deuxième groupe bancaire français. La fusion des groupes Banques populaires et Caisses d'épargne est devenue effective le 31 juillet 2009, malgré quelques recours juridictionnels et des critiques portant davantage sur ses modalités que sur son principe.
Il a estimé que le groupe BPCE est aujourd'hui confronté à de multiples défis : mettre en oeuvre le nouveau plan stratégique pour 2010-2013, consolider les parts de marché dans la banque de détail, recentrer Natixis et restaurer sa rentabilité, renforcer les fonds propres du groupe et rembourser les 6,3 milliards d'euros qu'il doit encore à l'Etat, ou encore réussir son internationalisation. Ces défis sont d'autant plus difficiles à relever que la fusion intervient dans un contexte d'importantes évolutions réglementaires et économiques pour le secteur bancaire. Outre la réforme des normes de solvabilité et de liquidité dans le cadre de « Bâle III », M. Jean Arthuis, président, a mentionné la volonté politique d'infléchir le modèle économique des banques, les projets convergents de taxation pour neutraliser l'aléa moral, la réforme des normes comptables sur la valorisation des actifs financiers, ou la directive « Solvabilité II » et son impact sur la bancassurance.
Il a donc souhaité que M. François Pérol puisse faire le point sur la réalisation de la fusion et les objectifs à long terme du nouveau groupe, le rétablissement de la banque de financement et d'investissement Natixis, les perspectives de remboursement des titres souscrits par la Société de prise de participation de l'Etat (SPPE), et sur sa perception des risques et opportunités que présentent les évolutions réglementaires en cours.
a indiqué que l'année 2009 a été consacrée à trois chantiers principaux : la réalisation de la fusion, qui ne fait actuellement plus l'objet de recours juridictionnels, la stabilisation de Natixis par des actions sur sa gouvernance, son encadrement et son profil d'activités et de risques, et la définition d'orientations stratégiques pour 2010-2013.
Il s'est félicité que le groupe soit devenu à nouveau bénéficiaire en 2009, à hauteur de 537 millions d'euros, après une perte de 1,8 milliard d'euros en 2008 à périmètre équivalent. Avec un résultat négatif de 757 millions d'euros, le premier semestre de 2009 portait la marque de la crise financière et la remise à niveau du provisionnement des actifs risqués de Natixis, suite à un audit externe. Des dépréciations de survaleurs ont également été enregistrées, à hauteur d'environ un milliard d'euros, sur des acquisitions réalisées en haut de cycle par les Banques populaires et les Caisses d'épargne. Tous les métiers bancaires du groupe ont connu un retour aux bénéfices au second semestre, de 447 millions d'euros au troisième trimestre et de 847 millions d'euros au dernier trimestre. Sur l'ensemble de ses métiers stratégiques, le groupe BPCE a enregistré un résultat net positif (corrigé des éléments exceptionnel) de 2,05 milliards d'euros en 2009, illustrant la trajectoire bénéficiaire sur laquelle se situe l'activité du groupe, qu'il a jugée encourageante pour la réalisation du plan stratégique.
a précisé que ce plan stratégique repose sur un postulat simple : une concentration sur « l'ensemble des métiers de la banque, mais seulement les métiers de la banque ». L'attention des équipes dirigeantes sera donc focalisée sur les métiers bancaires de base, de même que les ressources en fonds propres et en liquidités, dont la réglementation prudentielle en cours d'élaboration augmentera le coût. Ces activités de banque sont centrées sur la collecte et la garde de l'épargne au service du développement économique et recouvrent deux grands métiers :
- la banque commerciale et l'assurance, dont la collecte de l'épargne et l'assurance-vie, soit les activités régionales des Banques populaires, des Caisses d'épargne et de la Société marseillaise de crédit, et les activités nationales du Crédit foncier de France et de la Banque Palatine ;
- les activités de Natixis tournées vers les grands investisseurs, les grandes entreprises et les réseaux de détail, à travers la banque de financement et d'investissement, la gestion de l'épargne (gestion d'actifs, banque privée et assurance-vie) et, pour les banques de détail, les services financiers spécialisés.
L'activité de banque de financement et d'investissement de Natixis a été recentrée sur les services aux entreprises, tels que la couverture de change, le financement de projets, les financements structurés ou les financements obligataires et d'augmentations de capital. Ces métiers sont pleinement légitimes puisqu'il s'agit d'être présent sur les deux grandes sources de financement des entreprises que sont les marchés obligataires - particulièrement actifs en 2009 - et les crédits sur les bilans bancaires. En revanche, les activités pour compte propre ont donc été placées en gestion extinctive.
Hors de ces deux métiers, certaines activités sont classées en tant que participations financières, gérées dans un souci de valorisation interne ou externe par cession éventuelle. Il s'agit du secteur immobilier, au travers des participations dans Nexity, Foncia, Eurosic, Maisons France Confort ou le courtier Meilleurtaux, et de l'assurance-crédit, représentée par la Coface, dont l'activité et la relation avec le client sont fondamentalement différentes de celles de la banque.
a ajouté que la banque commerciale et l'assurance représentent aujourd'hui les deux tiers des revenus du groupe, Natixis environ le quart, et les participations financières 10 %. La logique antérieure de diversification ne sera donc pas poursuivie, en particulier dans le secteur immobilier, le groupe ayant vocation à être un banquier de ses clients promoteurs, constructeurs ou administrateurs de biens, et non à entrer en concurrence avec eux.
Cette stratégie s'appuie sur le socle coopératif du groupe, composé de 20 Banques populaires et 17 Caisses d'épargne régionales qui disposent d'un bilan autonome, d'une gouvernance spécifique et d'une capacité de décision à l'échelle régionale. Leur capital est composé de parts sociales, détenues par sept millions de sociétaires qui sont tous clients des banques. En revanche, tous les clients ne sont pas nécessairement sociétaires, sauf à la CASDEN.
Il a rappelé que ces 37 banques régionales détiennent le capital de l'organe central BPCE, qui aux termes de la loi adoptée en juin 2009 garantit la solidarité financière entre caisses et banques, et dispose pour ce faire de pouvoirs d'audit, de contrôle des risques, de conformité et de surveillance de la solvabilité et de la liquidité du groupe. Au-delà de la solidarité financière des réseaux, l'organe central assume des fonctions mutualisées telles que les ressources humaines et la politique de développement commercial, et détient des actifs mis en commun tels que Natixis, la Société marseillaise de crédit, la participation dans la Caisse nationale de prévoyance, le Crédit foncier de France, la Banque Palatine ou les activités internationales du groupe.
Les deux réseaux demeurent cependant distincts et concurrents en termes de clientèle et d'implantations, compte tenu de la grande notoriété des deux marques et de leurs positionnements différents sur des segments de clientèle souvent communs. Il a considéré que ce modèle n'est pas inédit.
a ensuite développé la « feuille de route financière » du groupe, qui comprend trois objectifs à l'horizon 2013 : un produit net bancaire de 25 milliards d'euros, contre 21 milliards d'euros fin 2009 ; un coefficient d'exploitation qui passerait de 77 % fin 2009 à 66 % ; et un rendement des fonds propres de l'ordre de 12 %.
Indépendamment des futures exigences de la réglementation prudentielle, ces objectifs supposent un renforcement des fonds propres. Il est ainsi prévu que le ratio des fonds propres « de base », dit « Core tier one », dépasse 8 % en 2013, contre 6,4 % à la fin du premier semestre de 2009 et 7 % à la fin de l'année 2009. Le groupe devra également avoir remboursé l'intégralité de l'aide de l'Etat, soit 2,3 milliards d'euros de titres super subordonnés et 3 milliards d'euros d'actions de préférence - ces dernières étant convertibles en actions ordinaires en 2014 - après que 1 750 millions d'euros ont déjà été remboursés en 2009 et début 2010. Il a précisé que ce remboursement s'effectuera cependant de manière progressive et au fil de la reconstitution des fonds propres, afin de maintenir la sécurité financière du groupe et de ne pas menacer sa solvabilité.
Abordant la traduction organisationnelle du plan stratégique, M. François Pérol a indiqué que les participations qui étaient séparément détenues par les holdings des Banques populaires et des Caisses d'épargne, soit essentiellement Foncia, le Crédit foncier de France et la Banque Palatine, seront apportées d'ici fin juillet 2010 à BPCE dans un objectif d'alignement des intérêts et d'analyse partagée sur les décisions industrielles concernant ces actifs. Le groupe avait ainsi pris l'engagement en juillet 2009, auprès de l'Etat et du régulateur, que les deux holdings de participations n'auraient qu'un caractère temporaire. Seule la participation de 41 % dans la société cotée Nexity demeurera directement détenue par les Caisses d'épargne, dans la mesure où cette participation ne ressortit pas aux activités stratégiques du groupe et où un changement de contrôle au profit de BPCE aurait pu entraîner une procédure de retrait obligatoire pour désintéresser les actionnaires minoritaires.
Il a ensuite précisé que le plan stratégique a été un travail collectif, élaboré par l'ensemble des dirigeants des Caisses d'épargne, des Banques populaires et des filiales, et sera également mis en oeuvre de manière collective et décentralisée, le plan d'entreprise de chaque banque ou caisse étant articulé avec le projet du groupe.
a reconnu que la tâche de M. François Pérol a été très exigeante. Revenant sur le remboursement des titres souscrits par la SPPE, il a relevé que leur rémunération croît dans le temps et s'est interrogé sur leur coût pour BPCE comme sur l'éventualité de recourir à d'autres modes de financement moins onéreux.
a rappelé le contexte de l'apport en fonds propres de l'Etat. Leur rémunération augmente effectivement, de 50 points de base par an s'agissant des actions de préférence, et devient supérieure au prix de marché pour inciter à un remboursement rapide. La charge d'intérêts correspondante pour BPCE était ainsi d'environ 550 millions d'euros début 2010. Le groupe a donc intérêt à leur substituer des ressources moins chères, et a de fait levé 1,75 milliard d'euros de titres hybrides en novembre 2009 et mars 2010 en regard des remboursements. Cette démarche est conforme aux prescriptions de la Commission bancaire, qui considère que le remboursement de l'Etat ne peut être réalisé au détriment de la solvabilité du groupe.
Puis en réponse à M. Philippe Marini, rapporteur général, qui a estimé que la structure de capital de BPCE est aujourd'hui plus fragile que celle des autres groupes bancaires, il a précisé que BPCE respecte les exigences réglementaires, mais « moins confortablement » que ses concurrents, qui auraient également vu leur pérennité menacée sans apport de l'Etat. Il a rappelé l'objectif d'amélioration du ratio « Core tier one » d'ici à 2013, et considéré que la principale différence entre BPCE et ses concurrents réside dans le fait que ces derniers ont levé d'importants volumes d'actions sur les marchés, leur permettant de rembourser l'Etat, alors que le seul accès de BPCE aux marchés résiderait dans une augmentation de capital de Natixis, qui lui apparaît encore prématurée. Il a précisé que 5,75 milliards d'euros devraient être intégralement remboursés à l'Etat d'ici à 2013. Pour ce faire, il a précisé que BPCE dispose de trois leviers : la génération de résultats, qui constitue le principal instrument, la levée complémentaire de parts sociales auprès des sociétaires et la cession d'actifs. Il a insisté sur le fait qu'il n'entend pas mettre en péril la solvabilité du groupe pour accélérer le désengagement de l'Etat.
s'est interrogé sur les principaux concurrents de BPCE, ainsi que sur l'éventualité d'une fusion des réseaux locaux des Banques Populaires et des Caisses d'épargne. Il a souhaité connaître l'attitude des syndicats suite à la création d'un organe central unique.
a répondu que les principaux concurrents de BPCE dans le secteur de la banque de détail sont le Crédit Agricole, le Crédit mutuel, BNP-Paribas, la Société générale et la Banque postale. Dans le secteur de la banque de financement et d'investissement, Natixis est confronté aux mêmes banques puisqu'elles interviennent toutes dans les deux métiers.
Il a ensuite totalement exclu la possibilité d'une fusion des réseaux. Les Banques populaires et les Caisses d'épargne constituent deux marques distinctes dont les clientèles ont des attentes différentes. L'assimilation des deux entités présenterait à la fois un risque pour les clients et pour les collaborateurs de chacune des deux entreprises. Les deux marques ont longtemps été en concurrence et, dans l'intérêt même de BPCE, il importe qu'elles le demeurent et qu'elles continuent de proposer deux offres séparées.
Il a enfin observé que la fusion s'est déroulée dans un contexte économique et financier difficile. Elle a par conséquent nourri beaucoup d'inquiétudes que les syndicats ont relayées. Pour autant, il note l'adhésion croissante du personnel au fur et à mesure de la construction progressive d'un groupe homogène. Il s'est félicité que le dialogue social soit plus apaisé même s'il a convenu que de nombreux progrès restent encore à réaliser.
s'est interrogé sur la résistance du modèle mutualiste lors de la crise financière et sur sa capacité à assurer le financement de l'économie. Il a souhaité avoir des précisions sur l'attractivité et l'image du groupe, en particulier des Caisses d'épargne, ainsi que sur des éventuelles cessions d'actifs, notamment les filiales Nexity et Meilleurtaux.
a plaidé pour que les deux modèles bancaires, capitaliste et mutualiste, soient considérés à égalité. Il a jugé que le modèle mutualiste a fait ses preuves et qu'il permet une banque de proximité avec une présence en région plus forte. En tout état de cause, il lui revient de gérer ses risques avec la plus grande rigueur.
En ce qui concerne le financement de l'économie, il a constaté que les encours de crédit de BCPE ont augmenté, en 2009, de 3,7 % alors que l'engagement pris à l'égard de l'Etat était de 3,5 %. Cette progression représente 13,5 milliards d'euros supplémentaires en termes de stock. Il a souligné qu'un tel accroissement est supérieur à celui de toutes les autres banques françaises, y compris celles dont les parts de marché sont plus élevées. Il a en effet estimé que la proximité permet à BPCE de s'engager durablement auprès des entreprises. La progression des crédits a été de 7,3 % pour les particuliers et de 3,1 % pour les entreprises.
Il a ensuite indiqué que les Caisses d'épargne sont, depuis longtemps, des entités de détail dont les produits sont variés et dépassent le cadre du simple Livret A. Il a toutefois admis qu'elles font face à un enjeu de développement de leur clientèle sur l'ensemble des services bancaires et financiers.
En ce qui concerne les actifs non stratégiques de BPCE, il a reconnu qu'une cession est envisageable même si, dans ce cas, ils doivent être valorisés afin de préserver les intérêts patrimoniaux du groupe.
a jugé qu'un taux de fonds propres durs inférieur à 7 % est très insuffisant par rapport à certaines grandes banques internationales, notamment canadiennes, dont les ratios peuvent dépasser 10 %. A cet égard, les banques françaises doivent encore réaliser des efforts importants pour atteindre des niveaux semblables. Il a également souhaité savoir si le crédit immobilier est en phase de reprise.
a déclaré que les prêts immobiliers apparaissent en très forte progression par rapport à la même période de 2009. La baisse des taux et les incitations fiscales ont conduit à dynamiser le marché. En réponse à une question de M. Philippe Marini, rapporteur général, il a estimé que la réduction des dépenses fiscales spécifiques à ce secteur doit être envisagée de façon très progressive. En ce qui concerne l'investissement des entreprises, il a constaté que la reprise de l'activité demeure lente.
s'est interrogé sur l'avenir des filiales Financière Océor, Coface et Banque Palatine. Il a également souhaité connaître l'évolution du profil de risque de la structure de cantonnement. Il a demandé des précisions sur l'évolution des provisions ainsi que sur les opérations de couverture par BPCE des actifs illiquides de Natixis. Enfin, il a abordé la nouvelle réglementation prudentielle de « Bâle III », la sanction prononcée par la Commission bancaire à l'encontre de BPCE en août 2009 et la récente notification de griefs à Natixis par l'Autorité des marchés financiers (AMF).
a indiqué que la filiale Océor connaît une profonde réorganisation : le provisionnement du coût du risque a été mis à niveau, les fonctions de support sont exercées par l'organe central et le redressement de la Banque de la Réunion a été engagé. En ce qui concerne la Coface, il a souligné qu'il s'agit d'une participation financière puisqu'elle n'est pas en synergie avec l'activité bancaire du groupe. Ses résultats progressent à mesure que le cycle économique s'améliore. Il a enfin noté que la Banque Palatine constitue une banque importante pour les petites et les moyennes entreprises (PME) réalisant un chiffre d'affaires de 15 à 100 millions d'euros. A ce titre, il a jugé essentiel qu'elle demeure indépendante.
En ce qui concerne la structure de cantonnement, il a d'abord fait valoir que la totalité de l'activité pour compte propre de Natixis a été mise en gestion extinctive. L'ensemble des portefeuilles de la structure s'élevait, en 2008, à 32 milliards d'euros de risques moyens pondérés. Il a été réduit, durant l'année 2009, de 15 % pour s'établir à 27 milliards d'euros. La garantie de BPCE a été apportée sur ces actifs à risque afin d'en libérer Natixis. Il a souhaité que la décroissance des actifs présents dans la structure soit plus rapide que leur écoulement naturel sans, pour autant, sacrifier le résultat. Il n'a cependant pas envisagé la possibilité de passer des provisions supplémentaires, ni celle d'effectuer des reprises de provisions compte tenu des incertitudes actuelles. Il a également rappelé que le bilan de Natixis s'est réduit de 100 milliards d'euros sur la période. La banque a ainsi fait le choix d'un profil de risque plus faible.
En ce qui concerne l'amende de 20 millions d'euros infligée par la Commission bancaire suite à des opérations de marché litigieuses, il a indiqué que les actifs en cause sont gérés de manière extinctive et que l'ensemble des procédures de contrôle interne ont été réévaluées au regard des meilleurs standards de la place de Paris. Il a estimé que la notification de grief de la part de l'AMF ne porte que sur un sujet très ponctuel.
a enfin abordé les questions de réglementation prudentielle. Il a jugé que la logique de renforcement des fonds propres à raison des activités exercées par les banques constitue la bonne voie. Il s'est toutefois inquiété d'une application trop précipitée de l'ensemble des mesures préconisées par le Comité de Bâle. Elles pourraient en effet conduire, dans des délais très restreints, à des levées de capitaux totalement disproportionnées. Les régulateurs bancaires doivent par conséquent veiller à une mise en place très progressive de la nouvelle réglementation. Les banques sont en effet soumises à des injonctions contradictoires puisqu'elles sont à la fois incitées à prêter davantage et à diminuer leur prise de risques.
a estimé qu'un moratoire de cinq ans avant la mise en oeuvre des nouvelles règles pourrait limiter leurs effets pervers.
a plaidé pour que toutes les mesures ne soient pas appliquées en même temps. Il a souligné que certaines d'entre elles sont contradictoires les unes entre les autres. Il a constaté, par exemple, que le ratio de levier vient en totale opposition avec les analyses et les principes mêmes du système de « Bâle II ».
En réponse à une question de M. Jean Arthuis, président, il a indiqué que, pour son groupe, l'augmentation des fonds propres nécessaires au respect des futures règles de « Bâle III » s'élèverait à plus de la moitié des fonds propres actuels.
a noté que le divorce semble être consommé entre le monde bancaire et les régulateurs sur ces questions.
a affirmé que la tendance générale apparaît bonne mais que les difficultés résident dans l'accumulation des mesures et dans le rythme de leur mise en oeuvre. Il a également relevé que les intérêts divergent entre les banques américaines et européennes. Aux Etats-Unis, les entreprises font majoritairement appel au marché. Le financement par le système bancaire est très limité et concentré sur les petites banques régionales auxquelles les nouvelles règles prudentielles ne devraient s'appliquer qu'en partie. Par conséquent, outre-Atlantique, l'impact sur le financement de l'économie du futur cadre de « Bâle III » sera réduit. Les autorités américaines sont donc d'autant plus tentées de privilégier l'adoption de règles strictes. En revanche, la situation est radicalement différente sur le vieux continent. Les banques européennes assurent très largement le financement de l'économie. Un cadre trop contraignant les désavantagerait au regard de la concurrence internationale et aurait des effets pervers sur la croissance et l'emploi en Europe.
Il s'est ensuite élevé contre les propositions relatives au ratio de liquidité. Il ne semble pas, selon lui, opportun d'adosser dans le temps les emplois et les ressources. Il a rappelé que les banques, à l'heure actuelle, financent les prêts longs en partie par des ressources courtes. Les banques n'ont pas la possibilité de lever deux ou trois fois plus de financement à moyen et long termes dans un contexte où les banques centrales réduisent peu à peu leurs mesures exceptionnelles de liquidité et où les Etats vont chercher à maîtriser leurs déficits publics. Par conséquent, ces nouvelles règles garantiront un degré de sécurité plus élevé mais le crédit sera moins abondant et plus cher.
En réponse à une question de M. Philippe Marini, rapporteur général, il a rappelé que la France n'a pas connu d'assèchement du crédit durant la crise financière. A cet égard, les mesures prises par l'Etat français se sont révélées très efficaces. Pour l'avenir, il a préconisé d'affirmer le principe du renforcement de la solvabilité des entreprises bancaires. Pour autant, il a répété que ce principe doit trouver une traduction concrète aussi progressive que possible afin de ne pas pénaliser la reprise.
a reconnu que les nouvelles règles entraveront la capacité des banques à dégager des bénéfices. Pour BPCE, il s'agit de prouver qu'il est possible d'être mutualiste et compétitif.
a déclaré qu'une seule condition est requise : la gestion du groupe mutualiste selon une logique d'entreprise.
Puis la commission a entendu une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur la situation économique et financière du Portugal.
Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Philippe Marini a tout d'abord insisté sur la nécessité de multiplier les contacts bilatéraux entre les Etats de la zone euro dont la caractéristique est de partager une monnaie unique sans gouvernement économique. Il est essentiel d'évaluer dans quelle mesure la crise remet en cause la nécessaire convergence économique et sociale entre les pays membres de la zone euro. Le Portugal est actuellement mis à l'épreuve par les marchés et par les agences de notation, dans un contexte d'instabilité politique interne, le Gouvernement ne disposant pas de majorité absolue au Parlement et l'opposition étant en phase de sélection de son chef de file.
Il s'est déclaré convaincu que la situation actuelle du Portugal n'expose pas la zone euro à un risque systémique. Une éventuelle -et improbable- crise des finances publiques aurait des conséquences limitées sur le secteur bancaire, qui ne détient aujourd'hui que 8 milliards d'euros de titres de dette portugaise. A titre de comparaison, les banques grecques ont dans leur portefeuille 40 milliards d'euros de dette grecque. Pour les créanciers extérieurs du Portugal, qui détiennent 83 % de sa dette publique, le risque est limité par la faible part que représentent les titres portugais dans leurs actifs. En tout état de cause, les déséquilibres des finances publiques portugaises sont connus et les données statistiques transmises à Eurostat peuvent raisonnablement être considérées comme fiables. En s'inspirant du dispositif institué au Portugal en 2008, il serait souhaitable d'étudier un accroissement du rôle des banques centrales nationales, qui sont indépendantes, dans l'élaboration des données transmises à Eurostat par les Etats de la zone euro.
a constaté que le Portugal est avant tout victime d'une crise de l'économie réelle, due principalement à la chute de ses exportations. Son système bancaire a résisté à la crise et a peu eu recours aux facilités de refinancement proposées par la Banque centrale européenne. Les crédits bancaires ont continué de progresser pendant la crise, contrairement à la tendance moyenne constatée dans la zone euro. Aucune bulle financière, immobilière notamment, n'a été constatée.
Le rapporteur général a relevé que, en 2009, l'ampleur de la récession a été moins importante que celle constatée chez nombre de ses partenaires, avec un taux de croissance négatif qui s'établit à - 2,7 % contre - 4,1 % en moyenne dans la zone euro. Cependant, le taux de croissance constaté depuis 2005 est inférieur à la moyenne de la zone, et les perspectives retenues par le programme de stabilité pour les années 2010 à 2013 sont moins élevées.
a souligné que le Portugal a déjà, de 2005 à 2008, conduit avec succès un ajustement budgétaire important, son déficit public passant de 6,1 % du produit intérieur brut (PIB) à 2,7 %. Les autorités portugaises sont aujourd'hui contraintes de demander à leurs citoyens, et d'assumer politiquement, un deuxième effort important. En 2009, le déficit portugais s'établissait à 9,3 % du PIB, contre 7,9 % en France, 12,7 % en Grèce et, pour l'année fiscale 2009-2010, 12,7 % au Royaume-Uni. Le niveau d'endettement public rapporté au PIB, qui s'établissait en 2009 à 77 %, soit un taux comparable à celui constaté en France et au Royaume-Uni, reste au Portugal à un niveau très inférieur à celui constaté en Grèce. A ce jour, le Portugal n'a éprouvé aucune difficulté pour conduire son programme de financement. Toutefois, la contagion, injuste, de la crise grecque a abouti à une remontée des écarts de taux avec l'Allemagne.
a constaté que la soutenabilité des finances publiques portugaises a été améliorée par les réformes structurelles conduites au cours des cinq dernières années. Les effectifs de la fonction publique ont été réduits de près de 10 % par le non remplacement d'un départ en retraite sur deux, voire sur trois dans certains ministères. L'âge de départ en retraite est progressivement porté, dans les secteurs public et privé, à 65 ans. La date de convergence a été ramenée, par le programme de stabilité, de 2015 à 2013. Le mode de calcul des pensions tient désormais compte de l'évolution de l'espérance de vie.
a estimé que le Portugal doit, en réaction à la crise, accélérer ses réformes structurelles. La compétitivité de son modèle économique, fondé sur un faible coût du travail, s'érode et certains secteurs d'activité sont en difficulté, notamment le textile. Parallèlement, le volume des fonds structurels européens se réduit et la dépendance énergétique est forte. Les principales pistes identifiées par ses interlocuteurs pour sortir de la crise consistent en une stabilisation de la demande interne pour réduire les importations, un développement des exportations dans les secteurs à plus forte valeur ajoutée et vers de nouveaux marchés, en particulier les pays lusophones, le développement du tourisme, le production d'énergie, notamment hydroélectrique et solaire, et l'engagement de grands travaux. Ce dernier point oppose fortement majorité et opposition.
a insisté sur l'importance du programme de stabilité 2010-2013, transmis à la Commission européenne avec deux mois de retard. Sur le plan politique, il a constaté que les responsables perçoivent la surveillance forte dont leur pays fait l'objet de la part de ses partenaires et des marchés et savent qu'ils n'ont pas droit à l'erreur, ce qui les pousse à adopter des positions responsables. L'opposition s'est ainsi abstenue lors du vote du budget de 2010. Le gouvernement portugais est contraint de rompre avec la pratique, constatée dans tous les pays européens, du « double langage », qui conduit à tenir un discours différent devant les électeurs et devant les instances européennes. La surveillance des marchés et des agences de notation ne le permet plus. Dans ces conditions, de nouvelles méthodes ont été mises au point et le programme de stabilité a été soumis, pour consultation, aux partis politiques et aux partenaires sociaux. Il est discuté au Parlement, ce qui pourrait constituer une source d'inspiration pour le Parlement et le gouvernement français.
Sur le fond, selon le gouvernement portugais, la consolidation budgétaire passe essentiellement par des mesures en matière de dépenses, même si ce pays ne s'est pas doté d'une norme de progression des dépenses. Les principales mesures envisagées sont la réduction du poids de la fonction publique, la réduction des dépenses sociales et militaires et le report de projets d'investissement. Comme pour beaucoup d'Etats-membres, l'objectif du programme de stabilité est de retrouver en 2013 le niveau de dépenses, rapporté au produit intérieur brut, d'avant la crise.
En matière de recettes, le Portugal va adopter des augmentations d'impôts temporaires et notamment une taxe de 20 % sur les plus values et une tranche à 45 % de l'impôt sur le revenu pour les revenus supérieurs à 150 000 euros. Il va introduire des péages sur les autoroutes gratuites et engager une politique de réduction de la dépense fiscale en combinant l'introduction d'un plafond global de bénéfices fiscaux et la révision de certains régimes.
a rappelé que les autorités portugaises, comme celles des autres Etats membres de l'Union européenne, doivent concilier rigueur budgétaire et accompagnement du retour de la croissance. Il a souligné que les hypothèses sur lesquelles sont fondées les prévisions de retour au respect des critères fixés par le traité de Maastricht sont plus prudentes dans le programme de stabilité portugais que dans celui d'autres Etats et que les autorités portugaises ne cherchent pas à dissimuler le potentiel de croissance encore peu élevé de leur économie. Il s'est interrogé à propos des effets sur la croissance de la politique de « go and stop » à laquelle s'apparente la soudaine interruption des mesures de relance provoquée par la mise en oeuvre du programme de stabilité.
En conclusion, M. Philippe Marini, rapporteur général, a considéré que la crise révèle les insuffisances et les lacunes de la construction de la zone euro. La notion de « PIGS », acronyme en anglais de « Portugal, Irlande, Grèce, Espagne », est injurieuse et simpliste, à l'origine de tensions incompatibles avec le partage d'une monnaie commune. Elle illustre la légèreté avec laquelle les modèles nationaux et les économies sont analysés. Il s'est demandé combien de temps la zone euro pourra encore fonctionner sans que soient traitées les questions, essentielles dans une zone monétaire, de la convergence des systèmes fiscaux et sociaux, de l'harmonisation du coût des facteurs de production et de la définition des objectifs de la banque centrale européenne.
a relevé que le gouvernement, fragile, du Portugal bénéficie peut-être d'une prise de conscience collective de nature à permettre un relatif consensus sur les réformes structurelles à engager.
a insisté sur le fait que, au-delà de la rigueur budgétaire qu'il va falloir mettre en oeuvre, le rebond du Portugal dépend d'une évolution du modèle économique qui ne se décrète pas. La situation de ce pays est un exemple des insuffisances et des incohérences de nos systèmes.
a noté que le Portugal a choisi de faire reposer l'essentiel de son ajustement sur la maîtrise des dépenses, alors même que la part de ses dépenses publiques dans le PIB est déjà inférieure à celle constatée dans d'autres Etats.
La commission a donné acte au rapporteur de sa communication.
Enfin, la commission a demandé à être saisie pour avis, sous réserve de sa transmission, du projet de loi n° 1889 (AN - XIIIe législature) relatif aux réseaux consulaires, au commerce, à l'artisanat et aux services et a désigné M. Éric Doligé rapporteur pour avis de ce texte.