Commission des affaires économiques

Réunion du 17 décembre 2008 : 2ème réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • médiation
  • rené ricol

La réunion

Source

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services

Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services.

Après avoir rappelé qu'il avait, parmi les premiers, alerté le Premier ministre, dès l'été dernier des risques pesant sur les conditions de financement et d'accès au crédit des petites et moyennes entreprises (PME), M. Hervé Novelli, secrétaire d'Etat auprès de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services, a souligné que la France était le seul pays à avoir mis en place, dès le début du mois d'octobre, avant le plan de soutien aux banques, un plan spécifique en faveur du financement des PME. Ce plan se décomposait ainsi :

- une enveloppe de 17 milliards d'euros disponible immédiatement, en provenance des excédents des livrets d'épargne réglementée ;

- 9 milliards d'euros de garanties et de prêts mis en oeuvre par Oseo, la banque publique des PME.

Au total, 26 milliards d'euros seront destinés aux PME et, fait nouveau, aux entreprises de taille intermédiaire (ETI), comprenant entre 250 et 500 salariés, que le Sénat avait, à l'occasion de l'examen du projet de loi de modernisation de l'économie, souhaité voir mieux prises en compte. La garantie d'Oseo, auparavant réservée aux PME, s'étendra désormais aux ETI. Sur les 9 milliards d'euros, deux mesures devraient s'avérer immédiatement très utiles : une mesure innovante de renforcement de la trésorerie, consistant à convertir 2 milliards d'euros d'avances de trésorerie en prêts à moyen et long terme, grâce à un mécanisme de garantie, et la distribution d'une enveloppe de 2 milliards d'euros de prêts à court terme. En outre, 330 millions d'euros de prêts supplémentaires seront garantis par la société de caution mutuelle de l'artisanat et des activités de proximité (SIAGI), grâce à l'injection de 25 millions de fonds propres supplémentaires.

Faisant observer les difficultés que rencontrent les entreprises dans leurs relations avec les assureurs crédit, qui dénoncent ponctuellement les polices souscrites par leurs clients, M. Hervé Novelli a rappelé l'entrée en vigueur, le 8 décembre, d'un complément public d'assurance crédit s'appliquant lorsqu'un assureur crédit décide de diminuer le montant de sa garantie ou lorsqu'une entreprise nouvellement assurée ne peut obtenir de lui le montant de garantie souhaité. Pour la part des créances que les assureurs crédit considèrent comme difficilement assurables, l'Etat prend en charge 50 % du montant garanti au travers de la Caisse centrale de réassurance, l'assureur crédit conservant le reste.

Puis M. Hervé Novelli a commenté les divers dispositifs d'accompagnement permettant aux entreprises d'accéder aux mesures du plan de financement des PME. Un numéro de téléphone a été créé pour toute entreprise rencontrant des difficultés :

- si elles cherchent à obtenir un soutien d'Oseo, elles voient leur appel directement étudié par la délégation régionale appropriée et leur dossier, par conséquent, traité au plus près de leurs besoins ;

- si elles sont entrées dans une relation semi-conflictuelle avec leur banquier, elles sont renvoyées vers les services du médiateur du crédit, M. René Ricol, nommé par le président de la République le 23 octobre. En un mois d'activité, ces derniers ont reçu 1.700 dossiers, dont un tiers a été traité, au sein duquel les deux tiers ont abouti positivement. Le médiateur s'appuie pour ce faire sur une équipe centrale de 7 médiateurs délégués, traitant les dossiers lorsque la médiation locale, assurée par les 105 médiateurs départementaux que constituent les directeurs départementaux de la Banque de France, a échoué. Une importante proportion, de l'ordre de 90 %, des dossiers reçus sont toutefois de nature structurelle et ne relèvent donc pas de la médiation. Afin d'y remédier, a été décidé, en accord avec le médiateur du crédit, les réseaux consulaires et les syndicats professionnels, de mettre en place une assistance de proximité pour orienter les entreprises rencontrant des difficultés de financement vers les solutions les plus adaptées à leurs problèmes. En outre, les préfets réunissent régulièrement des comités de suivi du financement de l'économie composés de leurs services économiques et financiers, des représentants des entreprises et des banques ainsi que d'Oseo afin de suivre sur chaque territoire la mise en place effective du dispositif.

a ensuite rappelé les mesures annoncées par le président de la République le 4 décembre dernier pour relancer l'économie. En complément de l'exonération de taxe professionnelle pour tout nouvel investissement réalisé avant la fin de 2009 et de la mise en place du fonds stratégique de 20 milliards d'euros, ont été mobilisés 26 milliards d'euros pour financer un plan de relance qui donnera lieu à l'examen par le Parlement début janvier de deux projets de loi : un collectif budgétaire et un texte regroupant l'ensemble des dispositions non financières du plan. Afin de le financer, l'Etat s'endettera à hauteur de 20 milliards d'euros, ce qui creusera de 0,8 point le déficit public en 2009. 11,5 des 26 milliards d'euros du plan de relance correspondent à des mesures de trésorerie telles que le remboursement anticipé de dettes de l'Etat sur les entreprises (TVA, crédit d'impôt recherche). L'Etat va par ailleurs augmenter de 5 à 20 % les acomptes qu'il verse sur les marchés publics de plus de 20.000 euros.

Enfin, M. Hervé Novelli a souhaité revenir sur les acquis de la présidence française de l'Union européenne en matière d'aides aux entreprises. Sous sa présidence, les ministres de l'industrie et de la compétitivité des pays membres de l'Union ont unanimement adopté le Small business act réclamé par la France en 2007, auquel a été accolé un certain nombre d'actions :

- l'octroi par la Banque européenne d'investissement (BEI) de 30 milliards d'euros de prêts globaux aux PME entre 2008 et 2011, dont 15 milliards concentrés sur 2008 et 2009 ;

- le passage du seuil de minimis, en dessous duquel les aides accordées par les Etats membres à leurs entreprises n'ont pas à être notifiées à la Commission européenne, de 200.000 à 500.000 euros sur trois ans.

Par ailleurs, la directive européenne sur les retards de paiement va être durcie, dans la lignée de la réduction des délais de paiement décidée par la France dans la loi de modernisation de l'économie (LME). Les dérogations prévues dans la loi jusqu'à la fin de 2011, date à laquelle les délais de paiement seront tous portés à 45 jours fin de mois, apporteront la souplesse requise pour certains secteurs, un guichet « délais de paiement » étant par ailleurs ouvert par Oseo.

Considérant pour conclure que les réactions françaises face à la crise avaient été rapides et adaptées aux caractéristiques de notre économie, M. Hervé Novelli a constaté que l'impact de cette crise, s'il était indéniable sur certains secteurs très exposés (automobile, immobilier ...), au niveau local notamment, se diffusait plus lentement aux autres secteurs. Il a cependant reconnu que l'effondrement des transactions immobilières entraînerait une baisse des mises en chantier et la suppression de nombreux programmes de construction d'ici quatre à cinq mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

s'est enquis de l'accessibilité des très nombreuses mesures évoquées pour les entreprises, ainsi que du sort des dossiers non traités.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

Se félicitant de l'action du Gouvernement, notamment à l'échelle européenne, M. Gérard Cornu a souligné la persistance sur le terrain d'importantes difficultés pour les entreprises et a rapporté la frilosité des banques à financer leurs projets. Relayant la difficile distinction par les élus locaux entre les problèmes d'ordre conjoncturel et ceux de nature structurelle auxquels sont confrontées les entreprises, il s'est demandé quelle pourrait être leur action concrète pour les soutenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

a demandé à ce que les élus locaux soient mieux informés des mesures prises pour appuyer les entreprises, afin de pouvoir en faire la promotion auprès de celles-ci.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Terrade

S'interrogeant sur la capacité des entreprises à se repérer au milieu du « maquis » d'aides qui leur sont proposées, Mme Odette Terrade a appelé l'Etat et les collectivités territoriales à donner l'exemple en matière de réduction des délais de paiement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dominati

Se félicitant du rappel par le ministre de l'ensemble des mesures de soutien prises depuis le début de la crise, et estimant qu'elles étaient adaptées à la diversité des entreprises, M. Philippe Dominati s'est en revanche interrogé sur leur pérennité, ainsi que sur l'encouragement au rapprochement des entreprises afin de créer davantage de ces grosses PME dont manque notre pays.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Confirmant, en s'appuyant sur son expérience locale, que toutes les mesures n'étaient pas connues des entreprises, M. Philippe Darniche s'est demandé dans quelle mesure elles l'étaient davantage des préfets, censés les relayer. Estimant que les organismes consulaires devraient être plus mobilisés pour effectuer ce travail d'information, il a confirmé à son tour l'excessive prudence des banques dans leur politique de prêt aux entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

Se félicitant de la réactivité des mesures prises, et plus particulièrement de celle consistant pour l'Etat à porter à 20 % les acomptes versés sur les marchés publics, M. Michel Bécot a plaidé pour l'extension de ce dispositif aux collectivités territoriales. Exprimant ses craintes face aux évolutions récentes de l'assurance crédit et s'interrogeant sur la nécessité de compléter le plan de relance, il a stigmatisé à son tour la réticence des banques à octroyer des prêts et il a craint une aggravation de ce phénomène.

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Après que M. Jacky Pierre eut abondé en ce sens, M. Gérard Cornu a interrogé le ministre, qui avait annoncé en novembre devant la commission que le projet de taxation des ventes de particuliers sur internet était écarté, sur l'article 30 du projet de loi de finances rectificative pour 2008 prévoyant une telle taxation, qui serait de nature à créer une distorsion entre transactions selon qu'elles sont opérées dans le monde réel ou sur le réseau et paraît contraire au statut d'auto-entrepreneur créé par la LME. Pointant la forte exposition du secteur de l'automobile à la crise, il l'a par ailleurs questionné sur la possibilité d'y conclure des accords de branche sur les délais de paiement.

Debut de section - Permalien
Hervé Novelli, des petites et moyennes entreprises, du tourisme et des services

En réponse aux divers intervenants, M. Hervé Novelli a apporté les précisions suivantes :

- la mise en place d'un numéro d'appel unique dédié aux entreprises et géré par Oseo constitue la principale mesure pour orienter les entreprises face à la multitude d'aides. Parallèlement, tous réseaux disponibles [Mouvement des entreprises de France (Medef), Confédération générale du patronat des petites et moyennes entreprises (Cgpme), Union professionnelle artisanale (Upa) et chambres de commerce et d'industrie (CCI)] seront activés et leurs moyens mutualisés ;

- la frilosité des banques, qui est une réalité, a fait l'objet de mesures (mise en place d'une commission de suivi, accompagnement des entreprises, médiation du crédit) ayant permis d'obtenir l'engagement des organismes bancaires qu'ils assoupliraient leur politique de crédit ;

- la crise crée des opportunités en matière de rapprochement d'entreprises. Des travaux économétriques menés par le Conseil d'analyse économique (CAE) ont montré que les carences de la France en entreprises de taille moyenne, dont est particulièrement bien pourvue l'Allemagne, affecte le commerce extérieur. Les mouvements de restructuration d'entreprises et les mesures favorisant la mobilisation de fonds propres devraient encourager leur développement. Le ministre a rappelé, à cet égard, avoir proposé d'élargir le dispositif de réduction ou de suppression de l'impôt sur la fortune (ISF) pour les investissements dans les PME, mobilisant déjà un milliard d'euros ;

- le numéro d'appel unique dédié aux entreprises devrait permettre de mieux diffuser l'information les concernant, le rôle du préfet se limitant à réunir le comité de suivi et ses services financiers ;

- si un décret publié en avril raccourcit à 30 jours les délais de paiement de l'Etat aux entreprises, le dispositif n'a en revanche pas encore été élargi aux collectivités territoriales. Il est toutefois prévu pour ces dernières de réduire progressivement les délais de paiement en les faisant revenir de 45 jours actuellement à 40 jours au 1er janvier 2009, 35 jours au 1er janvier 2010 et 30 jours au 1er juillet 2010 ;

- le secteur de l'automobile, qui a été largement abordé dans les débats parlementaires relatifs à la LME, est couvert par un accord de branche volontaire. Celui-ci ayant été dénoncé, une réflexion est actuellement menée sur l'élaboration d'un nouvel accord, la LME ayant prévu à cette fin un délai courant jusqu'en février ;

- les trois principaux assureurs crédit ont signé une convention avec le ministre en charge de l'économie, et il conviendra d'être attentif aux suites qui y seront données ;

- le plan de relance, dont personne ne sait, en l'état actuel des choses, s'il sera suffisant, sera adapté si les circonstances venaient à l'exiger ;

- les professionnels du commerce en ligne travaillent à établir une distinction entre vendeurs professionnels et occasionnels, pour l'application de la taxation des ventes en ligne des particuliers. Le statut d'auto-entrepreneur sera parfaitement adapté au commerce électronique.

- Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président -

La commission a ensuite entendu M. René Ricol, médiateur du crédit, accompagné de M. Nicolas Jacquet, médiateur délégué en charge des relations avec les préfets, les collectivités et les élus.

Debut de section - Permalien
René Ricol

a tout d'abord présenté le dispositif de mise en oeuvre de la mission de médiation du crédit aux entreprises définie par une lettre du Président de la République du 27 octobre dernier. Sur le terrain, 105 médiateurs départementaux, qui sont les directeurs départementaux de la Banque de France, de l'Institut d'émission des départements d'outre-mer (IEDOM) et de l'Institut d'émission d'outre-mer (IEOM), prennent en charge des dossiers de médiation au plus près des entreprises, tâche dans laquelle ils se sont totalement investis. Au niveau central, M. René Ricol a indiqué qu'il était entouré d'une équipe de sept médiateurs délégués et d'une vingtaine de personnes, la mission disposant également d'une plate-forme sur internet.

La mission a déjà été saisie de quelque 2500 dossiers, dont environ 600 ont été clos avec un taux de succès de 62 %.

Debut de section - Permalien
René Ricol

a souligné que 90 % des dossiers soumis à la médiation concernaient des demandes de prêts déjà anciennes, antérieures à la crise financière et économique, constatation qui conduit à s'interroger sur la politique d'anticipation des difficultés des entreprises. On peut aussi constater que depuis quelques mois, les banques, confrontées à la crise financière, ont eu le souci d'améliorer leur bilan, en prenant des marges dans des grands groupes et en ayant la tentation d'éliminer les petits dossiers à risque, ce qui explique sans doute pour partie que l'opinion, qui a ressenti ce resserrement du crédit, ait eu du mal à comprendre la nécessité du plan de soutien aux banques.

Mais depuis l'intervention volontaire du Président de la République, les choses ont évolué : les banques ont, le 12 novembre dernier, pris l'engagement de maintenir l'enveloppe de leurs concours aux entreprises et de ne pas exiger d'augmentation des garanties.

Revenant sur le fait que nombre de saisines portent sur des dossiers qui ne sont pas liés à la crise financière, M. René Ricol a noté que la France n'était pas encore en situation de crise économique, même si des régions ou des secteurs connaissent des difficultés. En revanche, deux secteurs, l'automobile et l'immobilier, souffrent déjà gravement de l'anticipation de cette crise, qui se traduit par la renonciation à de nombreuses décisions d'achat.

Il n'est pas douteux cependant que l'on va vers une aggravation de la situation : il faut donc agir vite, inciter les entreprises à anticiper leurs difficultés et les banques à leur assurer le soutien dont elles ont besoin, en leur demandant des efforts que l'on ne pourra sans doute pas leur demander sur une longue période. Il doit y avoir aussi une responsabilité collective des banques, des entreprises et de leurs conseils, et M. René Ricol a indiqué à cet égard qu'il s'était employé à mobiliser les organisations professionnelles et consulaires pour qu'elles coordonnent leur action, se mettent en réseau et apportent aux entreprises le soutien et l'assistance dont elles peuvent avoir besoin pour repenser leur stratégie : dans certains cas, il peut suffire d'un crédit de 3.000 à 5.000 € et d'un peu de conseil pour sauver une petite entreprise individuelle.

Il faudra aussi essayer de mobiliser les fonds d'investissement pour aider des entreprises qui ont un fort potentiel de croissance, mais qui pourront avoir des pertes.

Il s'agit également de « mettre la pression » sur les banques et les investisseurs pour éviter les délais inutiles : les deux tiers des dossiers qui ont été réglés ont été traités en moins de cinq jours au niveau des départements. Mais si les banques font des efforts, il faut aussi que les entreprises en fassent pour « remettre un peu d'argent ». Pour l'instant, plus de 500 entreprises ont été sauvées et les banques « jouent le jeu ».

En dehors du chantier de la mise en place des mécanismes d'assistance, et de celui consistant à associer concours des banques et développement des fonds propres, le dernier chantier est celui de l'assurance-crédit, et la question du comportement des assureurs-crédit. Ceux-ci doivent comprendre qu'ils risquent de tuer une entreprise, lorsqu'ils refusent d'assurer un mouvement d'un de leurs assurés avec cette entreprise. Ils doivent arrêter de considérer qu'il faut déclasser une entreprise lorsque le trésorier-payeur général lui accorde des délais : il faudrait plutôt qu'ils considèrent de tels délais comme des concours bancaires supplémentaires. Il faut aussi que tous, y compris les assureurs-crédit, tiennent un discours « mature » : certes, l'assurance-crédit n'assure que de « bons risques », mais il ne peut guère en être autrement, compte tenu des montants respectifs, dans ce secteur, des encours de crédit (300 milliards d'euros) et des capitaux propres (2 milliards d'euros).

Evoquant enfin la question des délais de paiement, M. René Ricol est convenu que les trop longs délais de paiement avaient été en France une plaie depuis des années : ils sont, dans un cas sur deux, l'élément déclencheur des dépôts de bilan et ils ont de multiples inconvénients. Leur réduction était donc attendue par « une large majorité silencieuse ». Mais, simultanément, on constate un effet asymétrique qui peut être catastrophique sur les entreprises vendant au comptant et payées à terme. Il est donc urgent de mettre en place un dispositif corrigeant cet effet et une mission a été confiée en ce sens à OSEO.

Un débat a suivi.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Cornu

s'est félicité des mesures prises pour faire face aux difficultés actuelles, de l'engagement du Gouvernement, de la concertation au niveau européen, tout en relevant que les élus ressentent un certain décalage entre ces mesures, qui ne sont pas toujours suffisamment connues, et ce qui se passe sur le terrain. Ainsi, on constate toujours une certaine frilosité des banquiers, dont certains paraissent disposés à perdre leurs clients plutôt qu'à leur accorder des prêts, même lorsqu'ils présentent toutes les garanties.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

s'est réjoui de l'engagement pris par les banques de maintenir leurs concours aux entreprises, relevant que les banquiers « frileux » ne font pas vraiment leur métier et soulignant que, si l'entreprise s'engage, le banquier peut aussi s'engager. Il a également estimé que la mise en place d'un accompagnement des entreprises par les chambres consulaires et les organisations professionnelles permettrait de « sortir par le haut » beaucoup de dossiers. Il a enfin noté que l'absence de garantie par l'assurance-crédit pouvait aussi avoir pour effet de rendre frileux les chefs d'entreprise et a insisté sur l'importance d'aider les petites entreprises à établir leur prévisionnel ou un « business plan ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jackie Pierre

Rejoignant les propos de M. Gérard Cornu, M. Jackie Pierre s'est également inquiété de la frilosité des banquiers, qui ne se manifeste pas toujours directement et prend dans certains cas la forme d'une absence de réponse aux demandes de leurs clients. Il a à cet égard cité le cas, dans son département, d'un commerce dont la rentabilité était avérée et qui n'avait pu obtenir réponse de son banquier sur une demande de crédit, ce qui a entraîné la fermeture du commerce et mis une famille dans une situation dramatique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Merceron

a félicité M. René Ricol de son souci de mobilisation au plus près du terrain et, citant l'exemple d'une entreprise mise en péril du fait d'un refus de garantie d'un de ses clients par l'assurance-crédit, a demandé comment remédier à de telles situations et continuer à garantir l'entreprise.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard César

évoquant la présentation à Bordeaux par Mme Christine Lagarde, ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, et par M. René Ricol du dispositif de médiation du crédit aux entreprises, a souhaité savoir si de semblables déplacements, très utiles pour susciter la mobilisation sur le terrain, seraient organisés sur l'ensemble du territoire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

a demandé si les présidents des régions et des conseils généraux étaient associés au dispositif de médiation du crédit aux entreprises.

Debut de section - Permalien
René Ricol, médiateur du crédit

En réponse à ces interventions, M. René Ricol, médiateur du crédit, a apporté les précisions suivantes :

- comme le montre le nombre de dossiers qui a pu être traité avec succès, les banques ont effectivement changé d'attitude et il est assez remarquable que le système de médiation ait pu être monté et commencer à fonctionner en six semaines, même s'il faudra quelques mois pour en apprécier vraiment les résultats. Les élus, en raison de leur parfaite connaissance du terrain, peuvent être un relais d'information très utile pour apprécier ce fonctionnement et ces résultats, et faciliter ainsi, en quelque sorte, le « contrôle interne » de la procédure de médiation ;

- il est effectivement indispensable qu'il y ait un effort de recapitalisation des entreprises et que les réseaux socioprofessionnels jouent leur rôle d'assistance aux entreprises et, pour le faire efficacement, acceptent de coordonner leur action, comme ils viennent de s'y engager ;

- le vrai problème de l'assurance-crédit est que le métier d'assureur-crédit n'a pas été compris et « sur-vendu » : les assureurs-crédit n'assurent que les bons risques et il n'est pas possible, compte tenu du niveau de leurs capitaux propres, de leur demander, comme aux banques, de faire plus qu'ils ne font. Il faudra donc sans doute trouver d'autres moyens de garantie, par exemple en faisant, pour les petites entreprises, jouer la Société de caution mutuelle de l'artisanat et des entreprises en proximité (SIAGI), ou en faisant appel aux régions qui ont des fonds de garantie ou d'investissement ;

- les déplacements en région se poursuivent, au rythme de deux régions par mois et ils s'avèrent très utiles en termes de communication et de diffusion de l'information : il serait cependant difficile d'en faire plus, car il faut avant tout traiter les dossiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

a ensuite demandé à M. René Ricol s'il avait constaté des disparités régionales dans le traitement des dossiers en fonction du secteur d'activité concerné ou type d'établissement bancaire.

Debut de section - Permalien
René Ricol, médiateur du crédit

a indiqué qu'il y avait eu initialement des différences d'attitude entre les banques, mais qu'aujourd'hui la proportion des cas résolus favorablement est la même dans tous les réseaux bancaires. Il a pu y avoir aussi, au sein d'un même réseau, des attitudes différentes au niveau des équipes locales. Pour y remédier, il a été demandé aux banques de ne pas autoriser les équipes locales à prendre des décisions de refus et de faire « remonter » les dossiers concernés. A ce propos, M. René Ricol a observé que l'on pouvait se féliciter d'un taux de clôture positive de 62 % des dossiers de médiation, mais que le vrai succès aurait été qu'aucun de ces dossiers n'ait été soumis à la médiation : en effet, s'il était possible qu'ils soient acceptés, il aurait mieux valu qu'ils le soient tout de suite.

La commission a ensuite entendu M. Georges Pauget, président de la Fédération bancaire française (FBF).

Debut de section - Permalien
Georges Pauget, président de la Fédération bancaire française (FBF)

Après avoir souligné que l'institution du médiateur du crédit avait permis la mise en place d'un mode de fonctionnement efficace en coordination avec les banques, M. Georges Pauget a dressé un panorama de la situation générale en matière de crédit :

- il a relevé que la situation du crédit aux entreprises était aujourd'hui satisfaisante, avec une croissance de 12,7 % pour le mois d'octobre 2008. Cette croissance importante repose sur un effet stock. La demande de nouveaux crédits s'est en effet ralentie au cours des mois de septembre et d'octobre, du fait d'un mouvement soudain de suspension des investissements des entreprises, lié à la chute brutale de la demande ;

- il a souligné que le crédit à la consommation s'était contracté de 0,4 % sur les dix premiers mois de l'année. Le mois d'octobre 2008 a constitué une véritable rupture, avec une chute de 8,8 % des crédits à la consommation ;

- le rythme annuel des crédits à l'habitat continue à se ralentir, avec 9,4 % en octobre 2008, contre 10,1 % en septembre, dans un contexte de chute de 30 % des achats de logement et d'augmentation des prix dans l'immobilier.

Concernant le financement de l'économie, M. Georges Pauget a indiqué que les banques allaient voir leur chiffre d'affaires diminuer du fait de la crise. Elles doivent d'ailleurs agir en conciliant les contraintes du chiffre d'affaires et du risque. En matière de crédit immobilier, le risque reste cependant limité du fait des sécurités juridiques relatives à la limite d'endettement des ménages et aux conditions de crédit (taux d'intérêt fixe) : cette situation différencie d'ailleurs la France de pays comme l'Espagne ou le Royaume-Uni, très touchés par la crise immobilière.

a estimé que la situation était complexe à gérer pour les établissements bancaires français. Certes, il s'agit de banques de détail et ils devraient, à ce titre, bien résister à la crise. Cependant il a souligné que dans son propre groupe, il était nécessaire d'informer et de former 70 000 salariés afin qu'ils acquièrent des réflexes de gestion de crise.

S'agissant des marges des banques, M. Georges Pauget a évoqué le rapport Athling, remis au comité consultatif des services financiers. Ce rapport a souligné que, pour les crédits renouvelables, la fixation de taux d'intérêt moindres pouvait conduire, en dessous d'un certain seuil, à ce que les établissements bancaires perdent de l'argent, compte tenu du niveau de risque élevé sur ces crédits. Il a estimé qu'il était louable de souhaiter des taux d'intérêt moins élevés, voire de restreindre les conditions de distribution de ce type de crédits, mais que ces solutions pourraient conduire à exclure des populations fragiles des circuits de consommation.

Il a d'ailleurs indiqué que des travaux avaient été lancés par Mme Christine Lagarde et M. Martin Hirsch sur le sujet, dans le cadre de la transposition de la directive relative aux crédits à la consommation. Il a par ailleurs estimé que la proposition de loi visant à supprimer ces crédits renouvelables sur les lieux de vente était inadaptée. Une bonne information des consommateurs est certes nécessaire, mais un aménagement des dispositifs d'information et de publicité existant apparaît suffisant.

a ensuite fait valoir les conditions difficiles dans lesquelles les banques se procuraient les ressources à cinq ans sur le marché. Ces prix élevés justifieraient une répercussion sur les prix de vente, mêmes si les banques ne le font pas totalement aujourd'hui. Il a ainsi mis en avant l'existence d'une véritable problématique du coût de la liquidité : cette situation ne devrait pas cesser, même avec le refinancement des banques par la Société de financement de l'économie française (SFEF). Les mesures prises demandent en effet du temps et la situation est difficile sur le marché bancaire, marqué par une volatilité très importante. Il a estimé que la confiance mettrait beaucoup de temps à se réinstaller - plus d'un an dans le cas du système bancaire américain.

S'agissant du plan de financement de l'économie, il a relevé que celui-ci consistait d'une part, à fournir de la liquidité aux banques, dans un contexte de paralysie du marché interbancaire et qu'il portait, d'autre part, sur les fonds propres. Ce plan permet ainsi aux banques d'atteindre le potentiel de fonds propres en phase avec l'engagement d'accroissement de 4 % du financement de l'économie. Si ces mesures n'avaient pas été arrêtées, la « machine » économique se serait arrêtée : dans une situation caractérisée par des marchés volatils, la réglementation prudentielle (l'accord de Bâle II) impose en effet une augmentation des fonds propres. Le plan tient donc compte de l'architecture du système prudentiel en Europe.

Certaines contreparties ont été imposées aux banques dans le cadre de ce plan : elles concernent d'une part la rémunération des dirigeants et la définition de règles de rémunération des traders. D'autre part, les banques se sont engagées à une croissance du financement de l'économie de 3 à 4 %, afin de ne pas accentuer la crise économique.

a enfin souligné que les caractéristiques du système bancaire français constituaient une protection. En effet 64 % du chiffre d'affaires des trois principaux groupes (Société Générale, BNP Paribas, Crédit agricole) sont issus de la banque de détail, ce qui constitue un élément de stabilité important : la banque de financement et d'investissement ne peut ainsi pas déstabiliser l'ensemble du système. Par ailleurs la répartition géographique des activités de la banque de détail à l'international, qui représente 20 % du chiffre d'affaires des établissements français, montre que ces établissements sont modérément exposés aux impacts de la crise.

Ces éléments expliquent que, comme l'a souligné le gouverneur de la Banque de France, les banques françaises sont convenablement capitalisées : leur profil d'activités, et donc de risque, est significativement inférieur à la plupart des autres pays.

Un débat s'est ouvert.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Bécot

a exprimé son sentiment d'une frilosité des banques et d'un manque de connaissance du monde de l'entreprise, contrastant avec la situation qui prévalait quelques années auparavant. Il a également mis l'accent sur les situations dramatiques de certaines familles résultant de l'accumulation de « crédits revolving », estimant indispensable de trouver des solutions à destination des personnes les plus fragiles.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Darniche

Après avoir souligné les qualités du plan de relance, M. Philippe Darniche a relayé les plaintes de certaines entreprises qui regrettent la prudence excessive des banques. Il a interrogé M. Georges Pauget sur son appréciation de la réponse apportée par les banques à la crise.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

s'est inquiété du refinancement des banques au niveau international, souhaitant savoir si toutes les banques avaient recours à des fonds souverains.

Debut de section - Permalien
Georges Pauget, président de la Fédération bancaire française (FBF)

En réponse aux différents intervenants, M. Georges Pauget a apporté les précisions suivantes :

- les fonds souverains sont intervenus dans le capital des banques, essentiellement américaines, dans la première phase de la crise, essuyant des pertes considérables. Ils ne sont donc pas disposés aujourd'hui à investir. Les établissements français ont cependant tous des fonds souverains dans leur capital, mais à de faibles niveaux ;

- la profession bancaire a été marquée par deux transformations importantes. D'une part le paysage réglementaire a été profondément bouleversé, avec l'encadrement des dispositifs et l'institution de contraintes formelles, notamment par les normes Bâle II. Les conditions de travail des banquiers ne sont donc pas comparables à ce qu'elles étaient quelques années auparavant. D'autre part, un turn over important a eu lieu dans le personnel du secteur, du fait des 35 heures, de plans de réduction d'emploi et de mesures d'âge : des responsables assez jeunes sont ainsi aujourd'hui sur le terrain, qui n'ont jamais eu à gérer de crises, d'où la nécessité de mettre en place des outils de formation et d'accompagnement ;

- un sondage réalisé auprès des entreprises par le Crédit Agricole a montré que plus de 90 % d'entre elles estimaient que le comportement de leur banquier n'avait pas changé. Des changements ont pu cependant être observés dans deux situations : une dégradation importante de la situation de l'entreprise d'une part, les défauts du système d'autre part, pour lesquels la médiation du crédit constitue une réponse devant permettre de régler la situation des entreprises saines ;

- s'agissant des propositions de loi déposées sur le surendettement, il a souhaité attirer l'attention de la commission sur plusieurs éléments. Il a en effet estimé qu'il serait utile de s'intéresser aux causes de dysfonctionnement de certaines commissions de surendettement, soulignant qu'il y avait une grande diversité parmi les commissions. Par ailleurs il a exprimé ses craintes quant au projet de « fichier positif », qui devrait recenser l'ensemble des crédits souscrits par les particuliers et qui pourrait aggraver le surendettement, comme le montrent les exemples britannique et américain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Paul Emorine

Puis sur proposition de M. Jean-Paul Emorine, président, la commission a décidé d'ouvrir les auditions conduites par M. Philippe Dominati, rapporteur sur les propositions de loi n° 94 (2008-2009), présentée par M. Philippe Marini, visant à responsabiliser les acteurs du crédit à la consommation et à lutter contre le surendettement, n° 114 (2008-2009), présentée par M. Claude Biwer, Mme Muguette Dini, M. Michel Mercier et les membres du groupe de l'Union centriste, tendant à prévenir le surendettement, et n° 153 (2004-2005), adoptée par l'Assemblée nationale, tendant à prévenir le surendettement, dans le cadre d'un groupe de travail composé, outre du rapporteur, de deux sénateurs du groupe UMP, deux sénateurs socialistes, un sénateur du groupe de l'Union centriste, un sénateur du groupe non-inscrits, un sénateur du groupe Rassemblement démocratique et social européen (RDSE) et un sénateur du groupe communiste républicain et citoyen et des sénateurs du parti de gauche (CRC-SPG).

Enfin, la commission a désigné Mme Elisabeth Lamure, rapporteur, sur le projet de loi n° AN 1360 (XIIIe législature) pour l'accélération des programmes de construction et d'investissement publics et privés.