Au cours d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Dominique Braye sur la proposition de loi n° 64 (2009-2010) de M. Jean-Pierre Sueur et plusieurs de ses collègues relative à l'amélioration des qualités urbaines, architecturales et paysagères des entrées de villes.
a estimé que la volonté d'améliorer les qualités urbaines, architecturales et paysagères de ces espaces est partagée par l'ensemble des personnes qu'il a auditionnées et par la commission de l'économie.
Dénonçant les méfaits de la logique d'occupation à l'entrée des villes, qui a abouti au développement à outrance de surfaces commerciales de piètre qualité architecturale, il a plaidé vigoureusement pour un changement de modèle d'aménagement. A ses yeux, l'omniprésence de ces surfaces commerciales s'explique par un prix des terrains abordable, la proximité d'infrastructures à fort trafic, celle des consommateurs, la concurrence entre distributeurs et l'importance des rentrées fiscales et des créations d'emplois qui en découlent.
a ensuite tenu à rappeler les marges de manoeuvre dont disposent déjà les communes qui souhaitent intervenir dans l'aménagement de leurs entrées de villes. Premièrement, si elles veulent échapper à l'interdiction de construire dans la bande de 75 ou 100 mètres de part et d'autre des routes en entrées de ville, elles doivent réaliser une étude prenant en compte les nuisances, la sécurité et la qualité architecturale, urbaine et paysagère. Deuxièmement, les plans locaux d'urbanisme peuvent comporter des orientations d'aménagement sur des quartiers, prévoyant éventuellement des « actions et opérations d'aménagement », opposables aux tiers, pour mettre en valeur les entrées de ville.
S'interrogeant sur la volonté des élus de recourir à ces deux dispositifs, il a estimé que la proposition de loi, très contraignante, n'apporterait pas de solution pertinente aux difficultés d'aménagement des entrées de ville. A rebours de la logique voulue par le législateur en matière d'urbanisme depuis dix ans, consistant à inciter les élus à définir un projet global préalable dans leur document d'urbanisme, ce texte privilégie en effet une logique réglementaire fondée sur des pourcentages applicables quel que soit le territoire considéré. En proposant une solution uniforme pour les 16 850 communes couvertes par un plan d'occupation des sols ou un plan local d'urbanisme et les 4 266 communes dotées d'une carte communale, la proposition de loi tend à imposer un modèle unique pour toutes les entrées de villes, rompant par ailleurs avec la philosophie de l'amendement « Dupont » adopté dans la loi du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l'environnement pour obliger les communes à mener une réflexion préalable d'aménagement, sans préjuger du contenu de celle-ci.
Puis M. Dominique Braye, rapporteur, a présenté le contenu de la proposition de loi :
- l'article 1er impose à tous les plans locaux d'urbanisme et cartes communales de comprendre, d'ici à 2012, un plan d'aménagement des entrées de villes comportant des obligations très précises sur le choix du type d'implantations, avec notamment un tiers de bâtiments à usage culturel, sportif, universitaire ou associatif, 20 % d'espaces verts, ou encore 60 % au maximum de parkings par rapport aux surfaces commerciales ;
- l'article 2 propose que toutes les routes nationales soient dénommées voies urbaines dans les entrées de villes ;
- l'article 3 impose aux plans de déplacement urbain de comporter une annexe définissant des conditions d'amélioration de la desserte par les transports en commun des entrées de villes.
S'agissant de l'article 1er, M. Dominique Braye, rapporteur, a souhaité conserver le I de l'article et a présenté un amendement portant rédaction globale des paragraphes II à V. Celui-ci propose que, le préfet, qui dispose d'un mois pour examiner un plan après son élaboration ou sa révision, puisse enjoindre à ses auteurs de le modifier pour que l'aménagement des entrées de villes prenne en compte les préoccupations en termes de nuisances, de sécurité et de qualité architecturale, urbanistique et paysagère.
S'agissant de l'article 2, il a proposé à la commission de ne pas l'adopter considérant qu'il est déjà possible, aujourd'hui, pour les communes qui le souhaitent, de passer des conventions avec les départements ou avec l'État pour exercer tout ou partie des compétences de voirie sur une portion de route nationale ou départementale. Cet article est trop contraignant et pose en outre des problèmes de constitutionnalité puisque les moyens correspondant aux nouvelles charges qui seraient transférées ne sont pas inscrits dans la loi.
Enfin, M. Dominique Braye, rapporteur, a proposé à la commission de ne pas adopter l'article 3, dans la mesure où il apparaît en grande partie satisfait par les dispositions du projet de loi dit Grenelle II sur les schémas de cohérence territoriale (SCOT), qui devront à terme préciser les conditions permettant le désenclavement par transport collectif des secteurs habités qui le nécessitent. A ce sujet, le rapporteur a proposé que le terme « habités » soit remplacé par celui d'« urbanisés », à l'occasion de l'examen du projet de loi par l'Assemblée nationale ou par la commission mixte paritaire. Il a, en outre, estimé qu'il n'était pas opportun d'obliger indifféremment tous les plans de déplacement urbain à prévoir des mesures définissant des conditions d'amélioration de la desserte des entrées de ville par les transports en commun.
En conclusion, il a annoncé son intention d'interroger le Gouvernement en séance publique sur les modalités et le contenu de la prochaine réforme de l'urbanisme commercial. Il a en outre souhaité que, dans le contexte actuel de désengagement des services de l'Etat, la réflexion intercommunale se développe très largement en matière d'élaboration de document d'urbanisme.
a souhaité savoir si le texte qui sera débattu en séance publique sera bien celui initialement rédigé par son auteur, M. Jean-Pierre Sueur.
a répondu affirmativement, rappelant que, par accord entre les groupes et les commissions, les propositions de loi ou de résolution inscrites à l'ordre du jour réservé aux groupes d'opposition ou minoritaires sont examinées en séance sur la base du texte originel, sauf accord du groupe concerné.
a relevé que les modifications proposées par le rapporteur vidaient le texte initial de son contenu.
a fait valoir que la philosophie de la proposition de loi était contraire aux principes d'urbanisme actuels.
a souhaité que la commission adopte un amendement d'appel pour que les portions de routes départementales traversant des communes leur soient transférées avec les moyens financiers adéquats pour en assurer l'entretien.
a rappelé que les conseils généraux se contentent bien souvent de rénover l'asphalte des routes départementales, l'ensemble des autres dépenses liées à ces voies étant supportées par les communes traversées, même si certains conseils généraux prennent en charge les dépenses liées au déneigement par exemple. En outre, elle s'est montrée hostile à la proposition de son collègue M. Bruno Sido, convaincue de la nécessité, en règle générale, de garantir la propriété pleine et entière d'une personne publique sur l'ensemble d'une infrastructure de transport.
a estimé que la proposition de loi est trop injonctive, alors que les élus devraient davantage utiliser les actuels schémas de cohérence territoriale qui permettent de répondre précisément aux préoccupations légitimes de l'auteur du texte.
estimant que la faillite de l'urbanisme français ces trente dernières années était une erreur collective, a exhorté ses collègues à ne pas renouer avec les errements passés.
souscrivant à l'analyse du rapporteur, a ajouté que le classement en zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP) permet de protéger les entrées de villes.
e, rapporteur, a ajouté avoir bon espoir de convaincre les députés de revenir sur la suppression, actée dans la loi dite Grenelle I, de l'avis conforme des architectes des bâtiments de France pour autoriser les travaux dans ces zones, en instituant une procédure de codécision entre les architectes et les élus.
a indiqué que le groupe socialiste ne se prononcerait pas sur l'amendement et soutenait la proposition de loi d'origine. Par ailleurs, il a regretté que l'auteur du texte n'ait pas été invité à la réunion de la commission de l'économie portant sur sa proposition de loi.
ne s'est pas montré hostile à cette idée.
Puis la commission a adopté un amendement à l'article 1er tendant à réécrire ses paragraphes II, III et IV.
Suivant la position de son rapporteur, la commission n'a pas établi de texte. En conséquence, la discussion en séance portera sur le texte initial de la proposition de loi.
Présidence de M. Jean-Paul Emorine, président, puis de M. Gérard César, vice-président -
La commission a ensuite procédé à l'examen du rapport et des amendements sur la proposition de résolution européenne n° 98 (2009-2010), présentée au nom de la commission des affaires européennes par Mme Fabienne Keller, sur le marché des quotas de CO2 et le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières.
a exposé que cette proposition de résolution abordait, en premier lieu, la réforme programmée du marché des quotas de CO2 à compter de 2013, à la suite de l'adoption par l'Union européenne, dans le cadre de la présidence française, du paquet « énergie-climat » en décembre 2008. A cet égard, il a rappelé que, pour la France, le programme national d'allocation des quotas avait prévu, pour la période 2005-2007, une attribution gratuite des quotas à hauteur de 156,5 millions de tonnes, puis à hauteur de 132,4 millions de tonnes pour la période 2008-2012, les trois secteurs attributaires les plus importants étant l'acier, l'électricité et le ciment.
Il a indiqué que les règles de fonctionnement du marché des permis d'émission pour la période 2013-2020 avaient été profondément modifiées par la directive du 23 avril 2009 améliorant et étendant le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre, l'objectif visé étant une baisse de 21 % d'ici à 2020 des émissions par rapport à 2005, soulignant que le passage progressif du principe d'attribution gratuite des quotas de CO2 à celui de leur mise aux enchères constituerait la principale innovation.
Dans cette perspective, la proposition de résolution préconise :
- d'axer l'organisation de ces enchères, dont le produit serait intégralement reversé aux Etats membres au prorata des quotas qui leur sont alloués, autour d'une plateforme européenne permettant de déterminer un prix unique d'adjudication ;
- de réglementer et encadrer le marché secondaire des quotas de CO2, ce qui implique le passage par une chambre de compensation ainsi que sa surveillance par une autorité européenne, ou à défaut par des autorités nationales existantes, telles que l'Autorité des marchés financiers pour la France.
Après avoir indiqué qu'il était globalement d'accord avec ces préconisations, M. Jean Bizet, rapporteur, a précisé que les quatre amendements qu'il proposait tendaient à les compléter.
Il a présenté ensuite le deuxième point de la proposition de résolution, à savoir la perspective de la mise en place d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières de l'Union européenne, souvent désigné sous le vocable de « taxe carbone aux frontières », dont les enjeux économiques et écologiques sont majeurs en période de crise économique. Il a attiré l'attention sur le risque encouru par de nombreux secteurs d'activité, si la totalité des quotas d'émission de gaz à effet de serre était mise aux enchères, de subir une concurrence déloyale de la part de pays tiers qui ne s'imposeraient pas de telles contraintes environnementales. Des « fuites de carbone » pourraient en résulter, dommageables économiquement et socialement pour l'Union européenne et écologiquement pour la planète.
Pour y remédier, la proposition de résolution envisage donc l'éventualité de l'instauration d'un mécanisme d'inclusion carbone aux frontières.
a considéré que le succès de la mise en place de cet instrument reposait à la fois sur une exacte appréhension des rapports de force au niveau international et au sein même de l'Union européenne ainsi que sur une bonne conception des modalités pratiques de son déploiement.
Rappelant que cet instrument « anti-dumping écologique » avait vocation à être mis en place dans le cas où les négociations internationales ne permettaient pas d'aboutir à un accord entre les grands pays pollueurs, il a indiqué que l'amendement rédactionnel qu'il proposait à l'alinéa 29 visait à crédibiliser la position de l'Union européenne, dans la mesure où ce dispositif ne pouvait être accepté en France que si tous les Etats se soumettaient à la même discipline en la matière.
L'Europe étant le niveau pertinent d'intervention en matière de lutte contre le réchauffement climatique, il apparaît donc nécessaire de rallier l'ensemble des partenaires européens à l'éventualité de la mise en place d'un tel dispositif.
D'un point de vue technique, le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières devra être compatible avec les règles de l'Organisation mondiale du commerce. A cet égard, M. Jean Bizet, rapporteur, a relevé que l'article 20 de l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (GATT) relatif aux « exceptions générales » pourrait être utilisé pour imposer certaines restrictions aux échanges pour des motifs de protection de l'environnement, ce qui se heurte pour l'instant au principe dit « du produit similaire » qui interdit toute distorsion de concurrence entre deux produits semblables.
En définitive, il a souhaité que cette contribution du Sénat au débat sur le changement climatique puisse orienter et appuyer les positions défendues par les autorités françaises dans le cadre des négociations sur le changement climatique, sous l'égide des Nations Unies, qui se dérouleront du 7 au 19 décembre 2009 à Copenhague.
a indiqué que l'expression « taxe carbone aux frontières » pouvait prêter à confusion. Elle a précisé que cette proposition de résolution ne faisait pas référence au mécanisme financier national de limitation d'émissions de CO2, appelé « taxe carbone » et examiné dans le cadre du projet de loi de finances pour 2010, mais au mécanisme mis en place au niveau européen pour les entreprises les plus polluantes relevant du marché des quotas. Elle s'est également réjouie que ce débat ait pu avoir lieu avant le sommet de Copenhague.
Puis la commission a procédé à l'examen des onze amendements déposés sur la proposition de résolution. Elle a adopté :
- l'amendement n° 7 présenté par M. Jean Bizet, rapporteur, visant à réécrire le 18e alinéa pour préciser que le statut des quotas d'émissions de CO2 ainsi que leur traitement comptable et fiscal devraient être clarifiés et harmonisés ;
- l'amendement n° 8 présenté par M. Jean Bizet, rapporteur, visant à réécrire le 19e alinéa afin de mentionner clairement que le marché des quotas de CO2 devrait être encadré et régulé, pour limiter le pouvoir de marché, les risques de contrepartie et d'abus de marché (la manipulation des cours ou l'utilisation d'informations privilégiées par exemple) ;
- l'amendement n° 4 présenté par Mme Nicole Bricq, MM. Gérard Miquel, Michel Sergent et les membres du groupe socialiste, visant à supprimer, à l'alinéa 20, la référence aux autorités nationales existantes comme l'Autorité des marchés financiers en France comme solution de repli, afin de renforcer la demande de création d'une autorité européenne chargée de superviser et de réguler le système communautaire qui représente aujourd'hui le plus gros marché carbone du monde ;
- l'amendement n° 5, présenté par Mme Nicole Bricq, M. Michel Sergent et les membres du groupe socialiste, visant à compléter le 20e alinéa par une disposition précisant que l'autorité européenne de surveillance du marché des quotas sera habilitée à prononcer des sanctions ;
- l'amendement n° 10, présenté par M. Jean Bizet, rapporteur, visant à insérer, après le 20e alinéa, un alinéa prévoyant que le renforcement des règles prudentielles de gestion du risque sur les produits dérivés, actuellement étudié par la Commission européenne, s'applique également aux instruments dérivés sur quotas, sans que soit créé un régime particulier ;
- l'amendement n° 11, présenté par M. Jean Bizet, rapporteur, visant à réécrire la fin du 29e alinéa pour préciser que le mécanisme d'inclusion carbone aux frontières pourra être mis en place, non seulement si les Etats, jugeant le partage de l'effort de réduction des émissions de CO2 inéquitable, n'ont pas signé d'accord, mais également si, après avoir signé un accord politique, sa mise en oeuvre par les Etats n'est pas conforme aux termes prévus.
Après que Mme Fabienne Keller a jugé que le passage obligatoire par une chambre de compensation, pour tous les produits financiers, permettait de sécuriser les marchés, M. Jean Bizet, rapporteur, a retiré l'amendement n° 9, qui, au 20e alinéa, tendait à supprimer cette obligation.
Quatre amendements ont en revanche été rejetés :
- l'amendement n° 1 présenté par Mme Nicole Bricq, M. Michel Sergent, M. Gérard Miquel et les membres du groupe socialiste, visant à modifier la rédaction du 12e alinéa afin d'établir un prix-plancher pour remédier à la volatilité importante du prix de la tonne de CO2, Mme Fabienne Keller ayant considéré qu'il n'était pas souhaitable de tenter d'organiser le marché des quotas de CO2 par une gestion administrative ; M. Michel Teston s'est alors demandé si la volatilité du prix de la tonne de CO2, librement fixé par le marché, n'entrait pas en contradiction avec la volonté de réduction des émissions de gaz à effet de serre ;
- l'amendement n° 2 présenté par Mme Nicole Bricq, M. Michel Sergent, M. Gérard Miquel et les membres du groupe socialiste, réécrivant le 13e alinéa afin de permettre que les recettes des enchères soient directement utilisées pour atteindre les objectifs fixés par le paquet « énergie-climat » et pour lutter contre la pauvreté énergétique ;
- concernant l'amendement n° 3 présenté par Mme Nicole Bricq, M. Michel Sergent, M. Gérard Miquel et les membres du groupe socialiste, visant à modifier l'écriture de la fin du 18e alinéa pour harmoniser le statut juridique des quotas en tant que produits financiers, Mme Fabienne Keller a indiqué que, vingt-six Etats membres étant d'accord pour définir les quotas comme des « actifs incorporels », il convenait de privilégier une unité de définition à l'échelon européen ;
- l'amendement n° 6 présenté par Mme Nicole Bricq, M. Michel Sergent, M. Gérard Miquel et les membres du groupe socialiste, visant à compléter le 22e alinéa pour que la nouvelle directive prévoie en particulier les modalités de la supervision et de la régulation européenne.
La commission a alors adopté la proposition de résolution telle que modifiée, le groupe socialiste et le groupe communiste, républicain, citoyen et des sénateurs du parti de gauche s'abstenant.
Puis, la commission a proposé la candidature de M. Jackie Pierre pour siéger au sein du Comité des usagers du réseau routier national.