Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 23 mai 2018 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • chinois
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  • militaire
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La réunion

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La réunion est ouverte à 10 h 35

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Je remercie celles et ceux qui ont travaillé jusque tard dans la nuit d'être présents parmi nous ce matin.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Nous examinons aujourd'hui un projet de loi autorisant la ratification du traité de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions audiovisuelles.

Cette organisation, plus connue sous l'acronyme « OMPI », qui compte actuellement 191 États membres, dont la France et l'Union européenne, a pour principale mission de promouvoir la protection de la propriété intellectuelle dans le monde grâce à la coopération entre les États et en collaboration avec d'autres organisations internationales.

En 1996, l'OMPI a entrepris un important processus d'adaptation des droits d'auteur et des droits voisins à l'ère numérique. Le traité sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes - le TIEP - a ainsi permis d'assurer, sur le plan international, la protection des droits des artistes-interprètes participant à un enregistrement sonore ainsi que la protection des producteurs de phonogrammes.

Le présent traité, signé à Pékin en 2012, permettra d'étendre ces mêmes droits, déjà consacrés dans les ordres juridiques français et communautaire, aux artistes-interprètes et exécutants du secteur audiovisuel, c'est-à-dire aux comédiens, aux chanteurs et aux danseurs.

Il permettra aux artistes-interprètes de jouir d'un droit exclusif sur leurs interprétations. Ce droit se décompose, comme pour les auteurs, de droits patrimoniaux et d'un droit moral en raison du lien « intime » qui les relie à leur interprétation. Ces droits seront maintenus au moins jusqu'à l'extinction des droits patrimoniaux de l'artiste-interprète. Le droit moral post mortem pourra, quant à lui, être écarté par les États membres qui ne reconnaissaient pas ce droit antérieurement à la ratification du traité ou à leur adhésion.

S'agissant des droits patrimoniaux, l'artiste bénéficiera d'un droit exclusif de reproduction de son interprétation, qui s'applique pleinement dans l'environnement numérique. Le traité reconnaît en outre à l'artiste des droits de distribution, de radiodiffusion et de location commerciale au public.

En matière de diffusion, le traité de Pékin veille à maintenir un équilibre entre les droits des artistes sur leurs interprétations audiovisuelles et l'intérêt public général, notamment en matière d'enseignement, de recherche et d'accès à l'information.

En contrepartie de la radiodiffusion ou de la communication au public d'une interprétation, le traité propose aux États contractants de choisir entre trois options : octroyer à l'artiste-interprète un droit exclusif sur son interprétation ; prévoir un système de rémunération dite « équitable » ; ou n'accorder aucun droit. Il s'agit donc d'un « régime à la carte » qui permettra à chaque partie de conserver ses traditions juridiques.

En application du « traitement national » prévu à l'article 4, les artistes de l'audiovisuel pourront, dans le cadre des exploitations de leurs interprétations au sein des États contractants, être considérés comme les nationaux et être rémunérés en conséquence. Le traité de Pékin reprend à cet égard la proposition de l'Union européenne d'assortir le traitement national d'un principe de réciprocité. Par conséquent, le traitement national s'appliquera dans la mesure des notifications ou réserves faites par la partie contractante. Il convient de noter que la copie privée, qui constitue une exception au droit de reproduction, est exclue du champ du traitement national.

En outre, le traité de Pékin impose aux parties d'assurer « une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces qui sont mises en oeuvre par les artistes-interprètes ou exécutants dans le cadre de l'exercice de leurs droits ».

Enfin, le traité aborde la question de la cession des droits des artistes-interprètes aux producteurs audiovisuels sans toutefois la trancher. Cette question a constitué un point d'achoppement ayant empêché l'OMPI de conclure le traité et l'a amené à conduire des négociations pendant douze ans.

Afin de faire aboutir ces discussions, le traité de Pékin ne revêt aucun caractère contraignant et couvre l'ensemble des modèles existants au sein des États membres de l'OMPI, permettant alors à chacun d'eux de conserver son cadre juridique.

Grâce à ce traité nos artistes bénéficieront de prérogatives accrues dans les autres États parties, ce qui participera au rayonnement de la culture française à travers le monde.

Les syndicats d'artistes et les organismes de gestion collective sont satisfaits de la conclusion de ce traité qui accroît la protection des artistes-interprètes de l'audiovisuel au niveau international, notamment dans certains pays qui ne leur reconnaissent pas ou peu de protection. Le principe du traitement national garantit aux artistes-interprètes des revenus complémentaires au titre des exploitations faites dans certains États parties.

En conséquence, pour l'ensemble de ces raisons, je ne peux que préconiser l'adoption de ce projet de loi.

À ce jour, sur les 83 signataires, seuls 19 ont déjà ratifié le traité, or son entrée en vigueur nécessite 30 ratifications ou adhésions. Le dépôt des instruments de l'Union européenne et de l'ensemble de ses États membres devrait intervenir de manière simultanée.

L'examen en séance publique est prévu le 31 mai prochain, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Des sanctions sont-elles prévues contre le piratage ?

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Le code prévoit surtout des peines d'amende, rarement de prison.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Les Américains ont une politique très stricte. Les membres du jury pour les Oscars ne peuvent visionner les films plus d'une fois et les sanctions peuvent être extrêmement lourdes. Existe-t-il des tentatives d'harmonisation d'un pays à l'autre ?

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Tout dépend si l'on copie l'oeuvre une seule fois ou de manière industrielle. Dans ce dernier cas de figure, les dommages et intérêts seront importants.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité, le rapport et le projet de loi précité.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert Laufoaulu

Nous examinons aujourd'hui le projet de loi autorisant l'adhésion de la France, pour le compte de Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie et les Terres australes et antarctiques françaises, à la convention concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, signée à Lugano, le 30 octobre 2007, par l'Union européenne, d'une part, et l'Islande, la Norvège et la Suisse, d'autre part.

La « convention de Lugano II », entrée en vigueur le 1er janvier 2010, a pour objet de remplacer la convention de Lugano I de 1988, signée entre les États membres de la Communauté européenne et les États membres de l'Association européenne de libre-échange. Lugano I était « une convention parallèle » à la convention de Bruxelles de 1968 concernant la compétence judiciaire et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, conclue entre les six États membres fondateurs de la Communauté européenne en vue de faciliter le règlement des litiges civils et commerciaux transfrontières. La convention de Bruxelles s'était révélée si efficace qu'il avait été jugé nécessaire de l'étendre aux pays de l'Association européenne de libre-échange (AELE).

Par la suite, le traité d'Amsterdam de 1997 ayant communautarisé la coopération judiciaire civile, la convention de Bruxelles a été convertie en un règlement entré en vigueur en mars 2002, refondu en janvier 2015.

Par la suite, en raison du parallélisme existant entre les régimes instaurés par la convention de Bruxelles et par la convention de Lugano I, des négociations ont été engagées en vue de l'adoption d'une convention de Lugano II calquée autant que possible sur les dispositions du règlement Bruxelles I.

Pourquoi adhérer à Lugano II ? Le règlement Bruxelles I prévoit qu'il remplace, entre les États membres, la convention de Bruxelles de 1968, sauf en ce qui concerne les territoires des États membres qui entrent dans le champ d'application territorial de cette convention et qui sont exclus du présent règlement, en vertu de l'article 355 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Celui-ci prévoit que les pays et territoires d'outre-mer (PTOM) - la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises et les îles de Wallis et de Futuna - font l'objet du régime spécial d'association. Les actes adoptés par les institutions de l'Union sur le fondement du traité ne s'appliquent pas à eux.

Pour mémoire, la dernière décision d'association outre-mer qui établit une nouvelle relation entre l'Union européenne et les PTOM date de novembre 2013 et est entrée en vigueur en janvier 2014. Elle a pour but principal « la promotion du développement économique et social des pays et territoires, et l'établissement de relations économiques étroites entre eux et l'Union dans son ensemble ». En conséquence, dans les PTOM, le régime de la détermination des compétences, de la reconnaissance et de l'exécution des décisions civiles et commerciales reste celui de la convention de Bruxelles, qu'ils sont d'ailleurs les seuls à continuer d'appliquer.

En vue de rapprocher les règles applicables sur l'ensemble du territoire national, la France a choisi d'adhérer à la convention de Lugano II pour le compte de ses PTOM.

La Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française étant compétentes en matière de procédure civile, il sera nécessaire de procéder à une adaptation du droit de ces collectivités. Déjà, l'Assemblée de la Polynésie française et le Congrès de Nouvelle-Calédonie ont rendu un avis favorable sur ce projet de loi. Dans les autres PTOM, les articles 509-1 à 509-8 du code de procédure civile relatifs aux autorités chargées, au sein des juridictions compétentes, des formalités de reconnaissance et d'exécution des décisions transfrontières, seront applicables de plein droit.

À Wallis-et-Futuna où l'État est resté compétent en matière de procédure civile, l'application des dispositions des articles 509 et suivants du code de procédure civile a été étendue, comme le prévoit l'article 1575 du code de procédure civile. L'adaptation terminologique a été également été faite, puisque nous avons des tribunaux de première instance au lieu de tribunaux de grande instance et de tribunaux d'instance.

La convention de Lugano II se limite au droit civil et commercial, elle reprend les règles du droit international privé européen figurant dans le règlement Bruxelles I. La juridiction compétente est celle de l'État où le défendeur a son domicile. Cette règle est assortie d'exceptions. En vue de protéger la partie la plus faible - celle-ci ne pouvant, par principe, être assignée que devant les juridictions de son domicile -, la convention fixe aussi des règles spéciales en matière d'assurances, de contrats conclus par les consommateurs ou de contrats individuels du travail. Mais la convention prévoit aussi, sans considération de domicile, des compétences exclusives de tribunaux dans certaines matières - droits réels immobiliers, nullité ou dissolution des sociétés. Des règles en matière de litispendance et de connexité permettent aussi d'éviter que les juridictions de plusieurs États membres ne connaissent simultanément d'une demande ayant le même objet et la même cause. La convention pose le principe d'une reconnaissance mutuelle des décisions rendues sans qu'il soit besoin de recourir à une procédure complémentaire et limite les cas dans lesquels une décision n'est pas reconnue. Par ailleurs, principale innovation de la convention, un mécanisme d'exequatur simplifié est mis en place : les décisions exécutoires dans un État partie sont mises à exécution dans un autre État partie, sur requête de toute partie intéressée et à l'issue d'un contrôle purement formel.

En conclusion, je recommande l'adoption de ce projet de loi. La sécurité juridique en est améliorée, grâce à la circulation transfrontière des décisions de justice en matière civile et commerciale.

L'examen en séance publique est prévu le jeudi 31 mai 2018, selon la procédure simplifiée, ce à quoi je souscris.

Suivant la proposition du rapporteur, la commission a adopté, à l'unanimité et sans modification, le rapport et le projet de loi précité.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Le bureau de notre commission avait décidé à l'automne dernier un déplacement de quatre jours à Djibouti, qui a eu lieu en mars dernier, en préparation de la LPM. Djibouti est en effet la première base française de forces prépositionnées ; c'est aussi la conjoncture géostratégique dans cette région qui nous intéressait.

Avec nos trois collègues, nous nous sommes donc attachés aux deux aspects de la présence française à Djibouti : la dimension militaire évidente, mais aussi la présence non militaire, à travers l'économie, le rôle du français comme langue officielle ou la place de la France dans le système éducatif et de santé à Djibouti.

Après avoir tâché d'évaluer la présence française dans ce pays aujourd'hui, nous nous sommes finalement posé une question simple : faut-il maintenir cette présence, faut-il la renforcer ou envisager au contraire d'autres priorités ?

La France est à l'origine de la création de ce petit État de la Corne de l'Afrique, alors dénommé territoire des Afars et des Issa, ce qui explique la relation forte et complexe qui unit la France et Djibouti. Cette relation se manifeste par l'importance du français, langue officielle avec l'arabe, dans une région anglophone.

À l'indépendance, en 1977, la France a conclu avec Djibouti un accord de défense renouvelé en 2011.

Aujourd'hui, la présence de la France à Djibouti repose sur quatre piliers, qui sont liés entre eux : la langue française et l'histoire commune ; la présence économique ; la présence militaire des forces françaises stationnées à Djibouti (FFDJ), dans un dispositif interarmes complet ; et la présence des familles de militaires français. Souhaitons-nous enclencher une dynamique ou demeurer dans un statu quo peu porteur d'avenir ?

L'intérêt d'une mission comme celle-ci est de confronter l'idée que nous pouvons avoir de la situation à la réalité du terrain, en faisant un certain nombre de constats.

Premier constat : tout le monde semble affluer dans cette région stratégique, dans un contexte où la présence française, longtemps déclinante, est aujourd'hui au mieux stabilisée. C'est le cas des Américains, qui ont ouvert dans les années 2000 une très importante base militaire dans la région qui compte maintenant 4 000 hommes et de très importants moyens, notamment aériens. C'est de Djibouti que décollent tous les drones américains qui sont en action en Somalie ou au Yémen. Par ailleurs, deux écoles anglophones ont ouvert récemment à Djibouti, ce qui témoigne d'un début d'évolution.

C'est aussi le cas des Chinois, qui ont ouvert leur première base militaire hors de Chine à Djibouti. Si le nombre de soldats stationnés dans cette base n'est pas communiqué, il est indéniablement en augmentation progressive. Surtout, cette base importante aurait la capacité d'accueillir des troupes bien plus nombreuses. La Chine est par ailleurs très active dans les infrastructures, portuaires, ferroviaires, de télécommunications, etc.

Les pays du Golfe sont également très intéressés par Djibouti. Dubaï y gérait jusqu'à récemment un port, transféré d'autorité à la Chine par les autorités djiboutiennes. L'Arabie Saoudite envisagerait d'y ouvrir une base et elle serait prête à financer la modernisation de l'armée djiboutienne. Le Japon dispose également d'une installation à Djibouti, dans le cadre des opérations de lutte contre la piraterie. Enfin, certains pays européens comme l'Allemagne ou l'Espagne sont représentés au travers de leurs contingents engagés dans les opérations en Somalie.

Deuxième constat : la présence militaire française à Djibouti est un élément très fort d'influence. Naturellement, cet atout est aujourd'hui mis en concurrence par l'arrivée massive d'autres puissances. Mais il reste des acquis, notamment dans l'insertion des militaires français et de leurs familles dans le pays, qui nous distingue de façon spectaculaire des Américains ou des Chinois.

Troisième constat : après une période d'incompréhensions, voire de désamour, la relation entre la France et Djibouti reprend des couleurs. Cela tient aussi, paradoxalement, à l'arrivée d'autres acteurs, les Djiboutiens mesurant l'intérêt à ne pas dépendre d'une seule relation, en l'espèce avec la Chine. De plus, la langue et la culture française sont si prégnantes dans le pays, notamment dans l'élite politique et économique, qu'elles font aussi partie de son identité. Une partie des Djiboutiens sont aussi inquiets du risque de dilution de leur identité qui repose sur cette spécificité francophone au sein d'une région anglophone.

Il y a donc aujourd'hui une véritable opportunité pour que la France repense sa présence à Djibouti, dans tous les domaines et non sous le seul angle militaire, comme vont le montrer nos collègues à qui je cède la parole, avant, si vous en êtes d'accord, monsieur le président, de la reprendre brièvement en conclusion.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

Nous en venons au volet militaire. Avec 1 450 hommes sur place à l'heure actuelle, les Forces françaises stationnées à Djibouti (FFDJ) représentent encore la première base de prépositionnement de l'armée française. Ces forces visent en premier lieu à accroître la capacité de projection, à la fois en volume et en rapidité. À titre d'exemple, depuis la base aérienne de Djibouti, les chasseurs français sont à quelques minutes du Yémen, de la Somalie, et à portée de nos bases en Jordanie (base Prince-Hassan) et aux Émirats Arabes Unis (base 104). De la même façon, les capacités de transport aérien à Djibouti ont été sollicitées au début de l'opération Serval.

Les FFDJ sont également un point d'appui pour nos forces navales passant de la mer Rouge à l'océan Indien ; la mission Jeanne d'Arc de formation des élèves officiers s'y arrête tous les ans. En deuxième lieu, les Forces assurent, dans le cadre du traité franco-djiboutien renouvelé en 2011, la défense du territoire djiboutien.

En troisième lieu, elles sont positionnées au point stratégique du détroit du Bab-el-Mandeb, par lequel transite la quasi-totalité du trafic commercial entre l'Asie et l'Europe. Ce carrefour abrite aussi une part très significative des échanges avec l'Afrique, dans la Corne de l'Afrique et au-delà. À ce titre, les FFDJ ont joué un rôle important dans les opérations de lutte contre la piraterie en mer d'Oman (opération Atalante).

Enfin, la base de Djibouti offre à l'armée française un laboratoire ou terrain d'entraînement sans comparaison en raison des conditions climatiques proches des milieux arides et semi-arides auxquels l'armée française est souvent confrontée et parce que les conditions d'entraînement y sont beaucoup plus souples que sur le territoire national : tir à munitions réelles, par exemple.

Toutes ces raisons expliquent pourquoi l'armée française a maintenu, malgré les réductions importantes d'effectif des FFDJ, un ensemble complet interarmes. Les FFDJ sont constituées d'une base aérienne (BA 188) abritant 4 Mirages 2000-D de défense aérienne, un avion de transport tactique Transall et 2 hélicoptères Puma, d'un détachement de l'aviation légère de l'armée de terre (Detalat) composé de deux Puma et d'une Gazelle, d'une base navale et du 5e Riaom (régiment interarmes d'outre-mer). Fort de 580 militaires, ce régiment est structuré en groupement tactique interarmes (GTIA) qui associe différentes composantes, avec des éléments tournants prélevés sur les régiments de métropole et incorporés de façon temporaire au 5e Riaom. Les militaires en affectation de longue durée sont minoritaires : 29 %, contre 71 % pour les affectations de courte durée.

Il est intéressant d'observer le profil familial des militaires de ce régiment en mission de longue durée : sur 166 militaires, 111 sont venus à Djibouti avec leurs enfants, soit 168 enfants scolarisés. Il y a donc un véritable enjeu dans le choix du profil des militaires que nous envoyons là-bas.

Enfin, il convient de souligner l'apport de ce dispositif en matière d'entraînement et d'interopérabilité. C'est le cas, naturellement, pour l'armée française, à travers le brassage de troupes en mission de courte durée, qui peuvent ainsi s'aguerrir aux conditions difficiles de la guerre en milieu aride et désertique, mais aussi à travers les manoeuvres interarmes. C'est ainsi que nous avons pu assister à une partie des manoeuvres Wakri 2018, qui associaient le 5e Riaom, les moyens aériens de la BA 188 et les moyens amphibies du BPC Dixmude, à bord duquel nous avons assisté à la présentation de l'exercice.

C'est le cas également pour l'interopérabilité avec nos alliés et partenaires : ainsi, les manoeuvres Wakri associaient un détachement des US Marines et un élément des Forces armées djiboutiennes.

Dans les années passées, le format des FFDJ a été fortement revu à la baisse. À la veille des attentats de 2015, le ministère de la défense s'interrogeait même sur le maintien d'une base aérienne, ce qui aurait fait tomber les effectifs à moins de 1 000 hommes. Nous n'en sommes plus là. La question pourrait être de savoir s'il ne faut pas, au contraire, inverser la tendance. La loi de programmation militaire semble ouvrir des perspectives en ce sens.

Au-delà du volume même de l'effectif, il convient de porter une attention soutenue aux profils affectés.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Djibouti renvoie souvent, dans l'imaginaire des Français, à la seule présence militaire. Or la première chose que l'on remarque lors d'une visite sur place, ce n'est pas la dimension militaire, mais les investissements massifs dans les infrastructures portuaires.

Il y a à cela une très bonne raison. Djibouti dispose déjà d'un port en eaux profondes et il est au carrefour de l'Éthiopie, de la Somalie et de l'Érythrée, idéalement situé pour contrôler le détroit du Bab-el-Mandeb. Cet atout géographique est d'ailleurs la raison de l'arrivée initiale des Français dans la seconde moitié du XIX e siècle !

Or on assiste à la conjonction de plusieurs facteurs qui créent une situation nouvelle à Djibouti. Tout d'abord, l'Éthiopie se développe rapidement. Ce pays de 100 millions d'habitants devrait atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire et donc sortir du sous-développement dès 2025. Du reste, sa compagnie aérienne cherche à s'imposer comme le leader du marché pour toute l'Afrique de l'Est.

Deuxième facteur favorable, l'Éthiopie n'a pas de débouché maritime et Djibouti constitue, en quelque sorte, son port naturel. Les Français en avaient bien conscience lorsqu'ils ont construit, il y a plus d'un siècle, le chemin de fer entre Addis-Abeba et Djibouti. Malheureusement, nous avons perdu cette vision stratégique. Cette ligne de chemin de fer a vieilli et lorsque les Djiboutiens se sont tournés vers la France pour la rénover, au début des années 2000, nous n'avons pas donné suite, l'opération étant jugée peu rentable. Entre temps, le trafic routier a crû très fortement : on compte environ un millier de poids lourds par jour entre Addis-Abeba et Djibouti. Les Djiboutiens se sont alors tournés vers d'autres pays dans leur projet de développement.

Troisième facteur qui a favorisé le projet djiboutien de devenir un nouveau hub logistique pour toute l'Afrique de l'Est, la région des Grands Lacs, les Soudan et l'Égypte, et même pour l'océan Indien et la péninsule arabique : l'intérêt très vif des nouveaux acteurs. Il s'agit premièrement des pays du Golfe. Rappelons que Djibouti est à la fois un pays africain et un pays arabe (l'arabe étant la deuxième langue officielle), séparé du Yémen par une quinzaine de kilomètres seulement. C'est ainsi que les Dubaïotes se sont vu confier l'exploitation du premier terminal de containers après que les Français eurent, là encore, marqué leur peu d'intérêt. Deuxième nouvel acteur majeur : la Chine, qui a obtenu à la fois de remplacer les Dubaïotes pour l'exploitation d'un port et d'en construire un second. Les Chinois ont également construit la nouvelle ligne de chemin de fer Addis-Djibouti, qu'ils ont symboliquement inaugurée un siècle quasiment jour pour jour après l'inauguration de la première ligne par les Français. Ils ont également construit le nouveau réseau de télécoms, qu'ils maîtrisent entièrement, et un hôpital, même si celui-ci n'est pas vraiment pourvu de médecins. Ils ont enfin obtenu le droit de construire une immense base militaire, bien protégée, que nous avons survolée. Les intérêts de la Chine pour l'Afrique sont connus. À Djibouti, ils s'illustrent clairement et de manière massive.

Philippe Paul l'a rappelé fort justement, les différents domaines s'entrecroisent. La présence chinoise est forte, car elle est à la fois militaire et civile. Si quelqu'un doutait du lien entre le militaire et le civil, les réactions très vives des Américains à la perspective de mainmise chinoise sur toute l'activité portuaire de Djibouti ont été explicites. Les Américains, qui entretiennent une base de 4 000 hommes ont exprimé très clairement qu'il n'était pas question que les approvisionnements de leur base soient dépendants du bon vouloir chinois, si ceux-ci devaient finir par gérer toutes les infrastructures portuaires.

C'est pourquoi, alors même que la France a, pendant une quinzaine d'années, un peu délaissé Djibouti sur le plan économique, il existe aujourd'hui une vraie fenêtre de tir pour réinvestir dans ce pays. Il faut aider Djibouti à éviter de se retrouver dans un face-à-face exclusif avec la Chine, qui pourrait vite devenir étouffant.

De fait, les réalisations chinoises ont été largement financées par des prêts chinois à Djibouti. Or, dès 2019, Djibouti va devoir commencer à rembourser ces prêts, alors même que le pays produit peu, en lui-même.

Dans ces conditions, le risque est grand que le créancier chinois se paye en nature, en récupérant tout ou partie de la propriété des infrastructures. Il y a quelques semaines, le Fonds monétaire international (FMI) a exprimé, en la personne de Mme Lagarde, sa préoccupation par rapport à la stratégie chinoise consistant à prêter sans limitation à des pays financièrement fragiles, qui auront les plus grandes difficultés à rembourser. Cette stratégie, loin d'être imprudente, est peut-être le retour délibéré vers une forme d'impérialisme que les puissances européennes ont elles-mêmes pratiqué au XIXe siècle, et qui permet de prendre le contrôle d'un pays par ses infrastructures. Nos collègues du groupe de travail sur les nouvelles routes de la Soie, présidé par Pascal Allizard, nous en diront sans doute plus.

Dernier point enfin, le potentiel touristique, aujourd'hui inexploité, d'un pays qui allie un ensoleillement quasi permanent, un patrimoine naturel significatif et une population francophone. Un des responsables que j'ai rencontrés là-bas m'a dit : je parle français, je pense en français et je rêve en français. Cet acquis est un bien inestimable pour la France !

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Saury

Je vous présenterai quant à moi la dimension socioculturelle de la présence française à Djibouti. La vitalité de la langue française y est frappante, plus forte encore que dans bien des pays francophones d'Afrique. Or Djibouti est le seul point francophone dans cette région. Mais cette position commence à être remise en cause, avec l'arrivée massive de nouveaux acteurs, notamment américains et chinois, à un moment où ce n'est plus la France qui réalise les grands projets de développement.

En second lieu, la diminution du volume des FFDJ a un impact très important. En effet, parce que les militaires français qui sont en affectation longue (deux ans et plus) viennent parfois accompagnés de leurs familles, le groupe scolaire Kessel-Dolto dispose d'un vivier important d'enfants français (58 %), ce qui garantit un niveau élevé de langue française dans ces deux établissements. À ce titre, il convient de noter que le lycée Kessel est un des plus gros lycées français à l'étranger. La diminution des effectifs (de 10 000 hommes à l'indépendance du pays, les FFDJ sont passées à 2 000 au début de cette décennie, puis à 1 450 en 2015) a entraîné en quelques années la perte de 400 élèves français. De façon plus subtile, à l'occasion de réorganisations des FFDJ, certains postes de longue durée ont été convertis en postes tournants, notamment dans les fonctions support - la famille ne s'installe pas sur place. Du reste, le choix a été fait, pour des raisons d'économies, de privilégier les célibataires pour les postes longs à Djibouti. Cette logique aboutit à fragiliser l'école et le lycée français, et donc toute notre présence dans le pays.

Philippe Paul l'évoquait en introduction, il y a là un cercle vicieux : s'il y a moins d'enfants de militaires, le niveau du lycée, mais aussi son équilibre économique, se dégrade ; or la qualité des écoles et lycées joue beaucoup dans le choix des militaires d'emmener ou non leurs familles.

Par ailleurs, nous avons eu l'occasion de constater le niveau de délabrement avancé des locaux du lycée Kessel. Le groupe scolaire est installé dans des préfabriqués qui datent de 1994 et qui ont fait plus que leur temps. Un projet de construction en dur a été proposé, qui repose aussi sur l'octroi par les FFDJ d'une emprise sur un terrain limitrophe de la base. Ce projet est, à l'heure actuelle, ralenti par des problèmes de gouvernance, notamment au sein de l'association des parents d'élèves, gestionnaire du lycée. Il faut donc vivement souhaiter qu'il puisse aboutir rapidement, notre ambassade s'y emploie.

Le recrutement des enseignants est rendu difficile par les conditions peu attrayantes : contrairement aux militaires, ils n'ont pas la possibilité d'être imposés en France. Or le droit fiscal djiboutien ne reconnaît pas la notion de foyer fiscal, ce qui fait que les couples avec enfants sont désavantagés par rapport à une situation en France. En deuxième lieu, l'électricité, indispensable pour la climatisation, est très chère à Djibouti. Une enseignante rencontrée sur place nous indiquait payer entre 800 euros et 1 000 euros par mois d'électricité en n'utilisant la climatisation qu'avec parcimonie. Enfin, Djibouti n'ayant quasiment pas de production alimentaire propre, hormis pour la pêche, le coût de la vie y est élevé. Pour toutes ces raisons, beaucoup d'enseignants repartent après un an, ce qui fragilise le groupe scolaire.

Au total, la situation est paradoxale et assez fragile. Il existe certains atouts (comme le niveau important d'aide de l'AEFE), mais la situation peut basculer facilement, ce qui rend d'autant plus cruciale la question des familles de militaires. S'ajoute enfin à cet ensemble un institut français, qui constitue un lieu culturel majeur pour le pays.

Le Centre médico-chirurgical inter-armées (CMCIA) des FFDJ est l'établissement de référence à Djibouti. Naturellement, sa vocation est en premier lieu militaire. Il est également ouvert aux familles des soldats et à la communauté française. Mais le CMCIA accueille aussi un public djiboutien. L'excellence de ce centre, qui n'est menacé que par son succès, contraste avec la situation de l'hôpital construit par la Chine, dont l'activité est très limitée faute de personnel médical.

En conclusion, le pilier socio-éducatif et culturel est clairement un avantage comparatif de la France par rapport aux autres nations qui affluent à Djibouti, d'autant que les Français de Djibouti vivent en lien et en harmonie avec les Djiboutiens, notamment en les faisant travailler et en faisant fonctionner le commerce local, contrairement aux ressortissants des autres nationalités. Mais ce pilier demande à être conforté, notamment via l'amélioration de la situation du lycée.

En complément et pour terminer, mon regard personnel sur Djibouti n'est pas très optimiste. Se cumulent l'importance de la consommation de khat, les difficultés de la gouvernance économique, un niveau de chômage très important, un partage des richesses déséquilibré, une agriculture très limitée par le manque d'eau, une activité économique de production faible... La situation sécuritaire, qui semble aujourd'hui bien établie, pourrait se révéler précaire.

Djibouti, pays aujourd'hui calme, entouré de voisins instables, représente un enjeu géostratégique évident pour la France, mais c'est aussi une terre d'incertitudes pour laquelle nous devons peser nos engagements à l'aune de ces nombreuses menaces.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Une des personnes auditionnées avant notre départ avait défini la relation entre la France et Djibouti comme un « je t'aime, moi non plus ». Les liens se sont un peu distendus, mais les autorités djiboutiennes s'aperçoivent qu'elles se sont beaucoup engagées avec la Chine. Et chez nous, certains songent à réduire la voilure. Les Chinois, eux, ont construit une base militaire de sept étages, qui héberge des milliers de personnes, et ils savent pourquoi ils sont là - Pascal Allizard pourra en attester. Nos entreprises investissent moins car l'accès aux marchés n'est pas toujours d'une grande transparence... Alors, que faire ? Nous ne devons pas laisser tomber Djibouti. Notre ambassadeur y fait un travail remarquable, mais les résidents se sentent un peu seuls. Les visites officielles sont rares. Quand le général de Villiers est venu, il a décidé de stopper la baisse des effectifs. M. le Drian était aussi venu il y a quelques années.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Merci pour ces communications passionnantes. À l'entrée du détroit de Bab-el-Mandeb, qui est un des points chauds du globe, la poussée chinoise, avec les routes de la soie, est un défi pour la présence française. C'est pourquoi il nous faut un véritable plan d'action. Nous devons d'abord décider si nous restons, ou pas. L'intérêt de la région est à la mesure des dangers qu'elle présente. La prévarication et la concussion restent importantes dans certains pays de la région, puisque tous les pays qui investissent en Afrique n'ont pas comme nous des comités d'éthique pour les surveiller. Cela ne favorise pas nos positions. Dans ce pays francophile et francophone, l'état du lycée français est terrible. On ne sent pas de véritable vision française pour Djibouti, alors que ce pays a peuplé l'imaginaire de générations de conscrits. Nous devrons interpeller le ministre des affaires étrangères sur ce point. Je me réjouis que le Sénat y ait envoyé une mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Merci pour ce rapport, qui conforte le point de vue qu'exprimera notre rapport sur les nouvelles routes de la soie. L'aspect géostratégique est évident : juste en face de Djibouti, le port de Gwadar au Pakistan, tout proche de l'Iran, est sous contrôle chinois. Officiellement, c'est un port de commerce mais, à vingt kilomètres de là, les Chinois créent un port militaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Tracez une ligne droite avec Djibouti : vous fermez l'accès au détroit d'Oman et à la Méditerranée. Et on annonce une seconde base militaire chinoise à Djibouti. Quant à la présence française, il faut décider : la maintenir, avec les moyens adéquats, ou partir, ce dont nous paierions lourdement, et longuement, le prix. A Changchun, ancienne capitale impériale, une Université forme des centaines de jeunes Chinois au français. Ces étudiants sont destinés, pour les plus brillants, à venir en France et, pour les autres, à devenir les futurs cadres de la présence chinoise en Afrique. La rentabilité et la solvabilité des investissements chinois n'est pas avérée à Djibouti - ces investissements échappent d'ailleurs aux critères de l'OCDE. Cela signifie qu'ils sont adossés à des contrats de nantissement, et qu'il faut s'attendre à des conflits de type canal de Suez.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Il y a quelques semaines, le Premier ministre éthiopien, en visite à Djibouti, a proposé au Président Omar Guelleh d'échanger des parts dans les infrastructures portuaires contre des parts dans la compagnie aérienne éthiopienne. Djibouti veut devenir le Singapour de la Mer Rouge. Avez-vous perçu une solidarité régionale qui pourrait être défavorable à la France ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cédric Perrin

Président du groupe d'amitié avec les pays de la corne de l'Afrique, je sens que certains pays africains réfléchissent à revenir sur les concessions octroyées aux Chinois. Avez-vous perçu une attitude similaire à Djibouti ?

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Merci pour votre synthèse, qui rassemble les observations que les sénateurs des Français de l'étranger peuvent effectuer individuellement. Ce rapport devra être suivi d'effet. Nous manquons peut-être de moyens, mais surtout de volonté. Les visites de haut niveau sont trop rares : une fois tous les dix ou vingt ans, c'est peu. Qu'attendent de nous les Djiboutiens ? Avec les Chinois, c'est trop tard, ils sont pieds et poings liés, pour avoir accepté des infrastructures parfois non nécessaires : ainsi, du second port. Quant à la voie de chemin de fer, elle transporte des marchandises chinoises vers toute l'Afrique de l'Est.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

Ce rapport, complet, présente bien les défis actuels. La France n'a pas la taille critique pour faire face à la Chine, qui développe sa stratégie. L'Union européenne est absente de votre présentation, alors qu'elle seule a la taille critique. Avez-vous rencontré son délégué ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

En effet, la France a énormément déçu. Le centre médico-chirurgical fait suite à un hôpital militaire français qui avait excellente réputation et qu'on a fermé. Même remarque pour le chemin de fer. Je salue l'importance du travail, et de la présence, de nos militaires qui, contrairement aux Américains et aux Chinois, s'implantent et travaillent au sein de la population. J'ai assisté dans d'autres pays africains à l'ouverture, par nos militaires, de centres de traitement de la tuberculose ou de prévention du sida. On en vient même parfois à souhaiter l'arrivée d'un attaché de défense qui soit père de famille nombreuse pour équilibrer les comptes du lycée ! Vis-à-vis de l'Union européenne, nous devons réaliser un travail de persuasion, par exemple pour qu'elle s'implique dans les lycées, comme je l'avais demandé aux Philippines.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Vous n'avez guère évoqué les difficultés posées par le climat. À l'école, les directives de Paris imposent de travailler l'après-midi, alors qu'il peut faire 50 degrés. Résultat : air climatisé, et dépenses extraordinaires. Les Djiboutiens ont aussi compris que l'intérêt de nombreux pays pour leur situation permettait de faire monter les prix, par exemple pour le loyer des bases militaires. Quand les Américains se sont installés, nous avons dû doubler le loyer de notre base pour nous aligner.

Debut de section - PermalienPhoto de Robert del Picchia

Ce rapport devrait être suivi par une deuxième mission.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

« Je t'aime, moi non plus », disiez-vous. Je suis allé en 2009 à Djibouti, avec notre collègue Dulait, et les relations étaient alors empoisonnées par l'affaire Borel, du nom de ce magistrat français retrouvé mort au fond d'un ravin. Le dossier gêne-t-il toujours la relation bilatérale ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Françoise Perol-Dumont

Le pilier socio-éducatif est fondamental. Les relations entre le ministère de l'éducation nationale et Djibouti étaient d'ailleurs très importantes. Où en sont-elles ? Vous avez parlé de la vétusté des locaux, mais pas du contenu de l'enseignement. Pouvez-vous nous donner des précisions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Ladislas Poniatowski

Merci pour ce passionnant rapport. Trois pays sont incontournables en Afrique : la République Démocratique du Congo, le Nigéria et l'Éthiopie. Djibouti est le port de l'Éthiopie. Face à la Chine, nous ne sommes plus l'acteur principal, mais il faut rester, bien sûr, si la France veut rester la France ! Et où en est la lutte contre la piraterie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Paul

Il y a trois semaines, un avion américain se posait à Djibouti, après que son pilote a été ébloui par un laser vert peut-être opéré depuis la base chinoise - les Chinois le démentent. Cet incident montre la tension qui s'accumule avec la nouvelle stratégie chinoise.

Ce que les Djiboutiens attendent, c'est que les entreprises françaises recommencent à investir. Ils se méfient désormais des financements chinois. Mais nos acteurs économiques sont arrêtés par l'absence de garanties et certains problèmes de corruption. Les Djiboutiens souhaitent aussi acquérir du matériel militaire français. Une mission militaire récente a souligné l'importance de leurs besoins, mais le financement dont ils disposent, en provenance d'Arabie Saoudite, se limiterait pour l'instant à 50 millions d'euros. L'aide saoudienne pourrait permettre notamment d'acheter des vedettes rapides pour protéger les côtes djiboutiennes.

Nous avons peu évoqué l'Europe pendant notre mission, l'Union européenne s'investit dans la lutte contre l'islamisme en Somalie même si nous avons pu échanger brièvement avec le représentant de l'Union à l'ambassade de France. L'enseignement sur place est de qualité, mais j'ai senti le corps enseignant quelque peu tendu face aux difficultés matérielles.

Debut de section - PermalienPhoto de Hugues Saury

L'un des chantiers européens en cours est celui de l'usine de dessalement : l'Union européenne a donné 67,5 millions d'euros, contre 5,5 millions d'euros apporté par le Gouvernement. Quant à la solidarité régionale : chaque pays a des problématiques spécifiques. L'Érythrée n'a de relations ni avec l'Éthiopie, ni avec Djibouti. Partout, les ethnies sont multiples et en rivalité. À l'école française, l'enseignement est de qualité, mais les locaux posent problème. De plus, le conseil d'école est dirigé par les parents djiboutiens, qui n'ont pas forcément les mêmes conceptions et objectifs que le corps enseignant français.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert-Luc Devinaz

Les fils de soie de la stratégie chinoise ne sont ni plus ni moins que des fils d'araignée - et notre propre consommation donne les moyens à la Chine de tendre sa toile. Oui, la région n'est pas sûre, mais quel point du monde l'est ? Voyez ce qui se passe chez nous... L'armée française, contrairement aux Américains et aux Chinois, ne reste pas dans ses casernes, mais se mélange à la population. La communauté française aime ce pays, mais pourrait être plus soudée. Sur le plan militaire, Djibouti est un porte-avions à moindre coût ! Je n'ai pas eu le sentiment qu'on cherchait à nous exclure : les Djiboutiens cherchent à desserrer l'étau chinois en se rapprochant de l'Éthiopie, mais sans exclure la France. L'affaire Borel n'a pas été évoquée.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

Merci. Ce rapport, qui fait honneur à notre commission, doit être suivi d'effet.

La commission nomme rapporteur :

Bernard Fournier sur le projet de loi n° 360 (2017-2018) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République d'Ouzbékistan relatif aux services aériens, de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Kazakhstan relatif aux services aériens et de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de Côte d'Ivoire relatif aux services aériens.

La séance est close à 12 h 15.