Avant d'évoquer la proposition de loi visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l'exploitation des réseaux radioélectriques mobiles, dite « PPL 5G », je souhaite brièvement revenir sur ce qu'est la 5G. La cinquième génération de standards de télécommunications mobiles est souvent désignée comme une rupture technologique. Elle apportera en effet un changement d'échelle dans les capacités des réseaux - débits multipliés par dix, temps de latence divisés par dix, etc. - et surtout, elle promet le développement de nouveaux usages critiques pour la vie économique d'un pays, usine du futur, véhicule connecté, ville connectée, internet des objets... Une véritable course à la 5G est engagée dans le monde entier car il y va de la compétitivité de nos opérateurs et de nos entreprises. Il faut cependant avoir à l'esprit que la véritable 5G, qui permettra ces nouveaux usages - la 5G dite stand alone - ne sera pas disponible avant 2021 ou 2022.
La proposition de loi instaure un régime d'autorisation préalable à l'exploitation, par les opérateurs télécoms, des équipements des réseaux mobiles. Elle confère ainsi le moyen au Premier ministre de protéger les intérêts de la défense et de la sécurité nationale. Elle se distingue d'un autre régime d'autorisation actuellement en vigueur en application de l'article 226-3 du code pénal d'abord en ce qu'elle est centrée sur l'exploitation des équipements, alors que le régime du code pénal est focalisé sur les équipements, ensuite en ce qu'elle vise à protéger les intérêts de la défense et de la sécurité nationale alors que le régime du code pénal entend éviter les atteintes au secret des correspondances et à la vie privée. Enfin, elle ne concerne que les opérateurs télécoms d'importance vitale ; le régime actuel d'autorisation inscrit dans le code pénal concerne à la fois les équipementiers - qui fabriquent les équipements - et les opérateurs télécoms - qui les utilisent.
La nouvelle autorisation préalable vise à garantir la sécurité des réseaux 5G. Selon le Gouvernement, ceux-ci sont porteurs de nouvelles vulnérabilités qui exigent d'analyser la sécurité du réseau dans son ensemble, au-delà de la seule qualité des équipements utilisés. Or, le Gouvernement estime que ces nouvelles vulnérabilités ne peuvent être tolérées en raison du caractère particulièrement critique des usages promis par la 5G - car la véritable rupture de la 5G proviendra de ses usages. On imagine l'ampleur des conséquences en cas de panne ou de piratage d'un réseau organisant la circulation des véhicules connectés...
Tous les pays du monde réfléchissent actuellement à cette question de la sécurité de la 5G. Certains pensent avoir trouvé la solution en interdisant l'équipementier chinois. Ce n'est pas l'orientation du Gouvernement, et c'est heureux. Je l'ai déjà dit : nous n'avons pas à participer à une guerre commerciale qui n'est pas la nôtre et qui voudrait réduire l'Europe à un simple théâtre d'opérations.
Un mot de l'état d'esprit dans lequel j'ai travaillé : ce texte doit permettre à l'État de protéger la sécurité nationale, sans obstruer les déploiements de la 5G ni obérer la concurrence entre les fournisseurs des opérateurs.
Je partage les deux objectifs poursuivi par le Gouvernement. Car il ne faut pas rater le virage de la 5G : la compétitivité à moyen terme de nos opérateurs et de notre économie en dépend.
Sur le fond, la sécurité des réseaux 5G doit être garantie tant pour des raisons de sécurité que pour des raisons économiques : les acteurs économiques qui bénéficieront des nouveaux usages doivent pouvoir avoir confiance en la sécurité des réseaux.
Sur la forme, dans le calendrier retenu, la France serait l'un des premiers pays à se doter d'un cadre juridique clair tendant à garantir la sécurité des réseaux 5G. Je regrette seulement la méthode utilisée par le Gouvernement : une tentative de « passage en force » lors de la loi Pacte, puis le choix d'un véhicule législatif privant les débats d'étude d'impact et d'avis du Conseil d'État. L'exigence de célérité ne doit pas se faire au détriment de la qualité de la loi, surtout lorsqu'elle est à ce point structurante pour les années à venir.
Je partage les objectifs du Gouvernement. Mais je souhaite aussi éviter une sortie de route dans le virage de la 5G : c'est la préoccupation qui m'a guidée. Cette nouvelle autorisation administrative ne doit pas mettre en péril la rapidité des déploiements, ni en augmenter le coût. Elle ne doit pas avoir pour conséquence une dégradation du service rendu aux usagers, aujourd'hui avec la 4G ou dans le futur. Évitons de sombrer dans le tout sécuritaire et assurons-nous de la proportionnalité du dispositif.
Je vous proposerai des amendements en ce sens, qui pourraient, pour la plupart, se résumer en trois mots : rééquilibrer, simplifier, préciser. Rééquilibrer le texte en encadrant davantage les motifs de refus du Premier ministre et en lui permettant d'autoriser sous conditions : je préfère un « oui mais » à une approche binaire du type « oui ou non ». Je souhaite également m'assurer que l'État ne dictera pas aux opérateurs leur politique d'achat. Simplifier en fusionnant les procédures d'autorisation applicables aux opérateurs. Et enfin préciser, en particulier indiquer clairement que le dispositif se limite aux équipements 5G.
Ce rapport équilibré tient compte des divers enjeux, sécurité, économie, usages personnels. Le sujet aurait mérité plus de discussions : c'est un débat de société ! La 5G ouvre des perspectives intéressantes, mais nous devons nous interroger sur la société dans laquelle nous vivrons dans quelques années. D'abord un amendement à la loi Pacte, ensuite un texte sans étude d'impact ni avis du Conseil d'État : moi aussi je regrette la forme. À nous d'être vigilants. Nous ignorons quels nouveaux usages émergeront, nous manquons de visibilité économique et sociale car le modèle de la 5G n'est pas stabilisé. Nous ne devons pas retarder le déploiement dans les territoires ruraux. Cependant, en tant que parlementaires, nous devons être très vigilants sur la sécurité de l'État, de nos entreprises et de nos concitoyens... Nous devrons inévitablement y revenir ! C'est pourquoi il conviendra de prévoir une évaluation sans trop tarder.
Notre collègue rapporteur nous propose la voie de la sagesse et de la simplicité, sur un sujet complexe techniquement. Nous avions dénoncé l'absence d'étude d'impact, mais les auditions et le rapport nous fournissent des éléments de réflexion. Nous aurions pris beaucoup de risques à adopter un simple amendement du Gouvernement en discussion de la loi Pacte.
Je m'interroge sur la rétroactivité au 1er février, souhaitée par le Gouvernement. Elle poserait sans doute problème aux opérateurs concernés. Sera-t-elle maintenue ?
Enfin, il est question de la 5G mais qu'en est-il de la 4G et des équipements existants, si les équipementiers ne reçoivent pas du Premier ministre l'autorisation prévue ?
La 5G pourrait susciter dans les territoires peu favorisés bien des espoirs, concernant l'aménagement du territoire, les déplacements, les créations d'emplois... Nous qui, dans le Grand Est, avons décidé d'apporter la fibre optique jusque chaque habitation, nous le savons bien : ce n'est pas parce qu'elle sera disponible que la 5G sera utilisée. Le phénomène d'exclusion est devant nous... Il y a aussi des enjeux financiers. Des transferts de compétences sont à prévoir, aux dépens du contribuable local. Là encore, nous en avons fait l'expérience : nous avons négocié avec l'Office national des forêts des redevances pour le passage de la fibre optique dans le domaine forestier...
Je salue le travail de notre rapporteur sur ce sujet complexe et en perpétuelle évolution. Je partage le propos de Viviane Artigalas, une veille constante s'impose.
Les auditions ont montré combien la sécurisation des réseaux est un travail complexe. Il sera confié à l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi). Celle-ci est-elle dimensionnée, cependant, pour cette charge supplémentaire ?
Je félicite Mme le rapporteur. La question économique est importante. Mais la dimension liée à la défense nationale et à la sécurité est au coeur de ce texte. Ne soyons pas naïfs et songeons à tout ce que permettra la 5G : les forces de sécurité et de cyber défense doivent pouvoir utiliser le réseau civil de 5G, qui est d'une complexité folle. Des garde-fous s'imposent, l'autorisation préalable adossée à une certification des équipements constitue un bon compromis, on n'oblige pas les opérateurs à prendre des fournisseurs sur une liste prédéfinie. Les questions de défense et de sécurité concernent tous nos concitoyens et les opérateurs ne sont pas dispensés de prendre en compte ces impératifs dans leur mode de fonctionnement !
Ce texte est un bon compromis et, assorti sans doute de quelques amendements, il répondra aux attentes des forces de sécurité et de défense.
Les technologies et les logiciels évoluent à très grande vitesse. La législation doit à la fois protéger les données des citoyens et les systèmes de transmission : c'est une gageure dans un domaine international, ouvert.
Les intérêts de la défense nationale, ceux de nos entreprises, doivent être protégés. Il y a urgence, car les opérateurs sont maintenus dans un immobilisme qu'ils estiment de plus en plus grave : si une feuille de route n'est pas décidée rapidement, le retard se creusera et sera pour notre pays de plus en plus difficile à rattraper.
Merci pour ce rapport. Je me bornerai à une question : en cas de problème, y a-t-il un plan ? Combien de temps sera nécessaire pour réparer une panne ? Je m'interroge au regard des délais de réparation des pannes qu'on peut actuellement observer... Quand la grande vitesse d'exécution sera devenue indispensable pour les démarches administratives ou la vie économique, quand tout sera connecté, tout dysfonctionnement pourrait avoir des effets redoutables, s'il dure : un plan de maintenance des lignes et des serveurs sera-t-il en place pour y faire face très rapidement ?
Je félicite à mon tour Mme le rapporteur. Une question sur les risques pour la santé : soixante-dix chercheurs avaient l'an dernier demandé un moratoire au déploiement de la 5G et tiré la sonnette d'alarme sur les effets nocifs pour la santé ; deux cent quarante scientifiques en ont demandé le report. Où en est-on ? Certains affirment à l'inverse que les ondes 5G pénètrent moins profondément que d'autres ondes magnétiques. En vingt-cinq ans d'utilisation constante des téléphones portables, on n'a observé aucune hausse des tumeurs du cerveau. Ici, dispose-t-on d'études ? Des questions sont posées dans la société.
Ma question porte sur les emplois. L'installation de la fibre a déjà suscité des besoins de formation. Cette proposition de loi est très ambitieuse et la 5G est très certainement porteuse de développement économique dans les territoires. A-t-on mesuré l'impact pour les emplois et les besoins de formation ?
La commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a examiné la proposition de loi le 12 juin dernier. Le texte nous paraît strictement suffisant pour assurer la protection des intérêts de la défense et de la sécurité nationale. Il paraît équilibré et pourra faire l'objet d'une application souple, conciliant divers critères d'appréciation du risque, assortissant l'autorisation de conditions d'exploitation, modulant sa durée. Une évaluation de l'application sera nécessaire, notamment au regard de l'évolution des usages et du développement des technologies, afin de garantir la pérennité dans le temps de cette protection. Car on ne mesure pas où tout cela peut nous mener...
Sous réserve de ces observations et des trois amendements techniques, la commission de la défense et des forces armées est favorable à l'adoption de la proposition de loi.
Les futurs usages ne sont pas encore connus. Le véritable déploiement de la 5G aura lieu en 2021 ou 2022 : une évaluation pourra alors être conduite... Le passage à la 5G est important pour la vitalité économique - refuser la 5G par crainte des futurs usages, ce serait un peu comme en rester au minitel !
La santé n'est pas comprise dans le périmètre de ce texte. Soit dit en passant, la même inquiétude se renouvelle à chaque apparition d'une nouvelle technologie ! On s'est moins inquiété de la généralisation des micro-ondes...
Merci à Mme Lamure d'avoir avec sagesse refusé un amendement à la loi Pacte : M. Allizard et moi avons entendu un certain nombre de personnes en audition et nous avons aujourd'hui du sujet une vision plus complète qu'au mois de février dernier - comme d'ailleurs probablement les opérateurs et même le Gouvernement. J'espère que ce dernier sera ouvert à nos propositions. Je reviendrai lors de l'examen des amendements sur la question de la rétroactivité.
S'agissant de la question des transferts de compétences et des charges financières qui les accompagnent : ces enjeux existent, mais ne sont pas non plus réellement l'objet du texte. Quoi qu'il en soit je précise que le déploiement de la 5G doit se faire partout sur le territoire - et pas au détriment de la 4G.
Je remercie la présidente qui m'a confié ce rapport, sur un sujet passionnant et qui n'est pas aussi complexe que je le croyais initialement. L'Anssi estime que ses moyens sont proportionnés à cette nouvelle mission : 30 recrutements ont eu lieu récemment, d'autres suivront. Il ne semble pas y avoir de souci...
Monsieur Montaugé, nos collègues de la commission des affaires étrangères estiment que la défense nationale, la sécurité, les intérêts économiques sont ici bien protégés.
Nous en sommes à la phase d'expérimentation, les questions d'emploi et de formation ne se posent pas encore et l'impact de la 5G n'a pas pu être encore mesuré, mais je ne suis pas certaine qu'il serait très différent de ce qu'on a pu observer avec d'autres technologies nouvelles.
Avant d'en venir aux amendements, je voudrais indiquer que pour apprécier la recevabilité des amendements au regard de l'article 45 de la Constitution, autrement dit le lien des amendements avec le texte, j'ai considéré qu'entraient dans le champ de la proposition de loi les dispositions visant à préserver les intérêts de la défense et de la sécurité nationale de la France dans le cadre de l'exploitation des réseaux radioélectriques mobiles.
Article 1er
Mon propos sera un peu long sur les premiers amendements, COM-20, COM-1 rectifié bis et COM-11.
Mon amendement COM-20 restreint le champ d'application en faisant explicitement référence aux réseaux de cinquième génération et des éventuelles générations ultérieures ; il aligne la terminologie avec l'alinéa 10 et ajoute une précision. La restriction que j'ai mentionnée se retrouve dans les amendements COM-1 rectifié bis et COM-11. Ils réduisent également le champ du texte aux équipements à risque, dans une logique de proportionnalité, ce à quoi je suis favorable.
En revanche, je suis défavorable à une extension aux équipementiers. Cette proposition est a priori séduisante, mais elle brouillerait la logique du texte, car le régime d'autorisation porte sur l'exploitation des équipements, non sur les équipements en eux-mêmes. En outre, le régime instauré repose sur des obligations de sécurité imposées aux opérateurs, qui sont différentes de celles imposées aux équipementiers. Enfin et surtout, cette proposition d'extension va de pair avec une fusion de l'autorisation créée avec celle déjà existante dans le code pénal. Si une telle fusion est souhaitable pour les opérateurs concernés par la proposition de loi - c'est l'objet d'un amendement que je vous proposerai - elle ne l'est pas pour les équipementiers. En effet, dans le cadre du régime du code pénal relatif aux équipements permettant des interceptions de sécurité, l'analyse des équipements est confiée à une commission consultative et le délai réglementaire pour l'instruction des dossiers est de neuf mois. Le régime prévu dans le texte ne comporte aucune consultation et le délai réglementaire d'instruction des dossiers sera, selon le Gouvernement, de deux mois. N'allons pas rendre le nouveau régime incompréhensible, ne vidons pas de son utilité l'autorisation existante. Pourquoi défaire cet article 226-3 qui fonctionne bien ?
Je propose donc aux auteurs des deux amendements identiques de rectifier ceux-ci en conservant seulement la mention de la 5G et des générations ultérieures, et la restriction du champ d'application aux équipements à risque. À défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Les propositions du rapporteur me paraissent raisonnables. Je rectifie mon amendement en ce sens.
Mme Sylviane Noël. - Je le rectifie également.
Les équipements en eux-mêmes relèvent d'une autre procédure d'autorisation, je l'ai indiqué, plus lourde et plus longue.
Cette procédure d'autorisation n'a pas de rapport avec celle nouvelle autorisation, qui passe exclusivement par les services du Premier ministre ?
C'est l'Anssi qui est chargée de l'instruction des demandes d'autorisation dans les deux cas.
Cela n'exclut-il pas dès lors les premiers déploiements de 5G, ceux qui s'appuient sur la 4G, au risque de fragiliser le régime ici créé ?
Il se pose une question de fond : durant une longue période, il y aura à la fois de la 4G et de la 5G. Couvre-t-on l'ensemble du sujet, techniquement, en se limitant à la 5G ? Les liens sont forts entre les deux techniques ! Les garanties du texte doivent s'apprécier en tenant compte de cette imbrication entre 4G et 5G...
N'ayez pas d'inquiétude. Si nous retreignons le champ à la 5G, c'est qu'il ne faut pas retarder les déploiements de la 4G qui seront, dans un premier temps, utilisés par la 5G, mais uniquement pour les usages existants. Les futurs usages de la 5G n'existent pas encore. Mon amendement ne met pas en danger les équipements ni n'exclut les usages futurs. Ceux-ci n'utiliseront pas les antennes ou d'autres éléments de la 4G.
Oui, et tout le monde partage la préoccupation de ne pas retarder le déploiement de la 4G. C'est pour cette raison que j'ai voulu infléchir la rédaction.
Les amendements COM-20, COM-1 rectifié ter et le COM-11 rectifié sont adoptés.
Les amendements COM-2 rectifié bis et COM-12, identiques, visent à préciser le contenu de l'arrêté : les opérateurs souhaitent en effet que la liste des appareils visés par le nouveau régime d'autorisation utilise la terminologie des normes techniques internationales. Cela relève de la rédaction de l'arrêté, je suggère donc aux auteurs de retirer leurs amendements, pour les redéposer en séance : alors, nous pourrons interroger le Gouvernement. Nous demanderons alors l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements. À défaut de retrait, mon avis sera défavorable.
Les amendements COM-2 rectifié bis et 12 sont retirés.
Mon amendement COM-30 rectifié supprime la mention du périmètre géographique dans la demande d'autorisation : il s'agit de s'assurer que l'État ne dicte pas aux opérateurs leur politique d'achat. Ce n'est pas à lui de choisir les équipementiers... Ce point avait été évoqué lors de l'audition de la secrétaire d'État devant notre commission, or malgré mes assurances de celle-ci, un certain flou subsiste.
Mon amendement COM-21 est rédactionnel.
L'amendement COM-13 supprime également le périmètre géographique, mais poursuit la logique d'extension du dispositif aux équipementiers et de fusion de l'ensemble des régimes d'autorisation. J'ai dit mon opposition sur ce point. Si cet amendement est rectifié et devient identique au COM-30, j'y serai bien sûr favorable. Sinon, avis défavorable.
Quel est le rapport entre le périmètre géographique et l'équipement ? Un opérateur place les équipements autorisés où il le souhaite !
Dans le texte initial, c'était l'inverse : il y avait un risque que le Premier ministre n'interdise à un opérateur de placer tel équipement à tel endroit.
L'idée était aussi que les équipements soient déployés de façon cohérente, et qu'en cas de panne, un autre équipement prenne la relève. Mais cela ne marche pas ! Un expert nous l'a dit, il ne sera pas possible de faire de l'interopérabilité.
Je suis d'accord pour supprimer la validation par le Premier ministre, mais il importe que le dossier soumis à l'Anssi indique où seront situés les équipements. Cela me gêne qu'on ne le prévoie pas.
Je ne suis pas mandaté par ma commission pour répondre, mais c'est un point qui a été évoqué lors de notre discussion. En matière de sécurité, le périmètre géographique est une notion importante. Imaginez que l'on souhaite installer un matériel à proximité d'une zone sensible. Jamais le Premier ministre ne donnera une autorisation tant qu'il n'aura pas de garanties sur le lieu d'implantation.
Le Gouvernement, je le crains, voudra rétablir l'actuelle rédaction.
Nous en discuterons en séance publique, la position de la commission évoluera peut-être avec les explications du Gouvernement.
Le Premier ministre ne peut imposer les types de matériels et leur localisation. En revanche, il est normal qu'il soit informé de l'implantation.
Il faut prendre en compte les intérêts de la défense mais nous prémunir également contre le risque de pressions contre le déploiement d'un équipement.
Les amendements identiques COM-30 rectifié et COM-13 rectifié sont adoptés, ainsi que l'amendement COM-21.
L'amendement COM-14 supprime la durée maximale de huit ans prévue pour les autorisations délivrées par le Premier ministre. Or cette durée correspond à celle de l'amortissement des matériels et dépasse de loin celle des équipements logiciels : défavorable.
L'amendement COM-14 est retiré.
L'amendement COM-22 soumet le décret d'application à l'avis du Conseil d'État - c'est une garantie quant à la sécurité juridique du texte.
Surtout, il indique que le Premier ministre peut délivrer une autorisation sous conditions : la logique binaire, autorisation ou refus, ne suffit pas pour proportionner la décision aux enjeux.
L'amendement COM-22 est adopté.
Deux amendements identiques, le COM-23 que je vous présente et le COM-10 de la commission pour avis, corrigent la rédaction.
Mon amendement COM-24 renforce l'exigence de proportionnalité, car les décisions du Premier ministre auront un impact sur le rythme de déploiement, les coûts et l'accès des utilisateurs finaux aux services fournis grâce aux réseaux. Seul un risque particulièrement caractérisé justifie de telles incidences.
Cet amendement vise également à réduire la portée discriminatoire du texte en visant tout État étranger plutôt que tout État non membre de l'Union européenne - même si, nous le savons bien, les États membres de l'Union européenne partagent avec la France des valeurs et des normes qui rendent peu probables des actes d'ingérence sur un opérateur ou un prestataire. Enfin, pour clarifier le fait que ce régime d'autorisation porte globalement sur l'équipement et ses modalités d'exploitation, ma rédaction précise que le niveau de sécurité de l'équipement fait partie de l'analyse de sécurité.
Les demandes soumises au Premier ministre doivent comporter la garantie qu'un certain nombre d'obligations seront respectées. L'absence d'une telle garantie pourrait motiver une décision de refus du Premier ministre, sur le fondement d'un risque sérieux d'atteinte aux intérêts de la défense et de la sécurité nationale. L'amendement COM-8 de la commission pour avis ajoute parmi les obligations celles relatives aux communications d'urgence : cela complète opportunément le texte. J'y suis favorable.
L'amendement COM-9 de la commission pour avis soumet la motivation au droit commun : quand un secret protégé par la loi est en cause, la communication des motifs est facultative. J'y suis favorable.
Les amendements identiques COM-3 rectifié bis et COM-15 mentionnent le secret des correspondances, ajoutent dans les critères à prendre en compte le niveau de sécurité des appareils ; et ils remplacent « les modalités de déploiement et d'exploitation » par la « configuration ».
Le texte mentionne déjà la confidentialité, qui recoupe le secret des correspondances. La question des modalités de déploiement et d'exploitation mériterait sans doute d'être davantage explicitée en séance. Mais il s'agit de l'objectif même du nouveau régime d'autorisation : il ne serait pas avisé de le supprimer ! Je suis donc défavorable à ces amendements.
Viser les États étrangers plutôt que les États hors Union européenne ne risque-t-il pas de fermer la porte à toute stratégie européenne ?
Quant à la proportionnalité, nous venons déjà d'exclure les équipements liés à la 4G : il ne faudrait pas transiger avec le « risque sérieux ».
Notre rédaction ne fait nullement obstacle à des travaux communs à l'échelle européenne. Mais il s'agit de notre défense nationale et des intérêts étrangers pourraient monter au capital d'un fournisseur européen. Nous ne visons ici que ce que nous pouvons maîtriser, c'est-à-dire le cadre national.
La proportionnalité est importante, car on ne saurait geler tout projet en raison d'un risque faible, ni gêner sans une bonne raison l'activité des opérateurs et le déploiement de la 5G.
Les amendements COM-23 et COM-10 sont adoptés, ainsi que les amendements COM-24, COM-8, COM-9.
L'amendement COM-3 rectifié bis est retiré.
L'amendement COM-15 n'est pas adopté.
L'amendement COM-25 complète le COM-22 relatif aux autorisations sous conditions. Il procède également à une modification d'ordre rédactionnel.
Son adoption ferait tomber les amendements COM-4 rectifié bis et COM-16 qui poursuivent la logique d'unification des régimes applicables aux équipementiers et aux opérateurs. J'ai dit mon opposition à cette solution. Avis défavorable, donc.
L'amendement COM-25 est adopté. Les amendements COM-4 et COM-16 sont sans objet.
Par l'amendement COM-26, nous nous assurons que le texte s'applique sur l'ensemble du territoire, y compris à Wallis-et-Futuna.
L'amendement COM-26 est adopté.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
Mon amendement COM-27 prévoit que le non-respect des conditions posées par le Premier ministre sera sanctionné comme une absence d'autorisation. L'adoption de cet amendement ferait tomber les COM-5 rectifié bis et COM-17, qui visent à unifier les différents régimes. Avis défavorable pour les raisons déjà évoquées.
L'amendement COM-27 est adopté.
Les amendements Com-5 rectifié bis et COM-17 sont sans objet.
L'amendement COM-28 concerne l'application de l'article 2 à Wallis-et-Futuna.
L'amendement COM-28 est adopté.
L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 3
Les amendements identiques COM-6 rectifié bis et COM-18 visent à décaler l'entrée en vigueur de l'article, prévue au 1er février 2019. Je me suis moi-même étonnée de cette date mais les opérateurs que nous avons entendus en audition ne s'en sont pas émus: la législation en cours d'élaboration était annoncée et connue d'eux. Avis défavorable.
Les amendements COM-6 rectifié bis et COM-18 sont retirés.
L'article 3 est adopté sans modification.
Articles additionnels après l'article 3
Mon amendement COM-29 procède à une simplification par rapport au texte initial : pour un équipement entrant à la fois dans le champ de l'autorisation prévue à l'article R. 226-7 du code pénal et dans celui de l'autorisation prévue ici, une seule demande d'autorisation pourra être déposée.
Cette idée de simplification est également présente dans les amendements COM-7 rectifié bis et COM-19, mais je ne soutiens pas l'extension aux équipementiers : je propose donc aux auteurs de les rectifier dans le sens de mon amendement. J'émettrai alors un avis favorable. À défaut de rectification, l'avis serait défavorable. Je précise que, dans cette hypothèse, les deux amendements deviendront sans objet si le mien est adopté.
Je rectifie l'amendement COM-7 rectifié bis pour le rendre identique au COM-29.
Je fais de même pour le COM-19.
Les amendements identiques COM-29, COM-7 rectifié ter et COM-9 rectifié sont adoptés et deviennent un article additionnel.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Les avis de la commission sur les amendements de commission sont repris dans le tableau ci-après :
- Présidence de Mme Sophie Primas, présidente de la commission des affaires économiques, et de M. Vincent Éblé, président de la commission des finances -
Nous entendons ce matin M. Éric Lombard, directeur général de la Caisse des dépôts et consignations.
C'est un plaisir tout particulier de vous recevoir, monsieur Lombard, car c'est la première fois que la commission des finances et la commission des affaires économiques vous entendent depuis que vous avez pris vos fonctions de directeur général en novembre 2017.
Alors que la Caisse des dépôts est placée sous la « surveillance spéciale » du Parlement, il apparaît tout à fait utile que vous puissiez nous faire part de vos réalisations depuis votre arrivée à la tête de cette institution, et des perspectives qui s'offrent à elle.
En moins de deux ans, vous avez engagé des chantiers de grande ampleur, tels que la création de la Banque des territoires, ou encore la constitution d'un grand « pôle financier public » grâce au rapprochement entre la Caisse des dépôts et la Banque Postale.
La Caisse des dépôts elle-même connaît des changements significatifs, notamment avec la loi « Pacte », récemment promulguée, qui modifie en partie la gouvernance de votre institution en faisant évoluer les prérogatives de la commission de surveillance. Deux membres de la commission des finances, Jérôme Bascher et Claude Raynal, y représentent d'ailleurs le Sénat.
Au début de votre mandat, vous aviez indiqué vouloir rationaliser les participations financières de la Caisse des dépôts et procéder à des ajustements de son organisation. Vous nous donnerez votre appréciation des évolutions réalisées en la matière et des prochains changements à venir.
Il me semblerait utile d'avoir des éclaircissements sur deux points qui intéressent la commission des finances. Le premier concerne les résultats financiers de la Caisse des dépôts pour 2018. Vous nous en rappellerez certainement les principaux éléments, mais pouvez-vous nous expliquer pourquoi la contribution du groupe au budget de l'État était moindre en 2018 qu'en 2017, soit 1,6 milliard d'euros contre 1,9 milliard d'euros ? Compte tenu des nouvelles modalités de calcul du « dividende » versé chaque année à l'État prévues par la loi Pacte, ne craignez-vous pas une hausse importante de cette contribution l'an prochain ?
Le second point concerne le nouvel engagement écologique et social de la Caisse des dépôts. Cette dernière a levé la semaine dernière 500 millions d'euros d'obligations « durables », dont 90 % visent à financer des projets dits « verts » et 10 % à financer des projets « sociaux ». Vous nous direz en quoi ces obligations sont différentes des « green bonds » émis en 2017. Par ailleurs, les deux tiers des investissements devraient concerner des projets immobiliers. Comment leurs impacts environnementaux et sociaux sont-ils évalués ? Comment justifiez-vous le succès de cette première émission en dépit du taux de rendement négatif proposé ?
Monsieur le directeur général, vous le savez, les liens entre le Parlement et la Caisse des dépôts sont étroits et anciens. En venant échanger avec nous aujourd'hui, vous vous inscrivez dans une relation de confiance et de collaboration de plus de deux cents ans. « Une histoire qui dure », donc !
Nous sommes tous, ou avons été, élus locaux. Nous savons donc combien la Caisse est un partenaire majeur dans le financement des services publics de proximité comme les écoles, les hôpitaux et les logements sociaux. Votre action est en effet un outil essentiel dans le financement des infrastructures du quotidien et vous donne une présence à chaque étape de la vie de nos citoyens, de la crèche à la retraite.
Les récentes années, voire les derniers mois, ont été riches à la fois de législations qui concernent ces domaines, et de projets portés par votre institution. Du point de vue du Parlement, je pense notamment à la loi ELAN et à la loi Pacte. En parallèle, vous avez lancé des initiatives comme la Banque des territoires, qui devrait renforcer encore les liens entre les collectivités et la Caisse, ou de nouveaux fonds de prêts pour les PME, qui portent à près de 3 milliards d'euros votre engagement dans la création et le développement de ces entreprises. La Caisse est également un partenaire majeur du programme Action coeur de ville.
Par ailleurs, la loi Pacte nous rapproche encore. Nous serons en effet amenés à interagir encore plus fréquemment, puisqu'elle prévoit la présence d'un membre de la commission des affaires économiques du Sénat au sein du conseil de surveillance, aux côtés de celui déjà désigné par nos collègues de la commission des finances.
La commission des affaires économiques a naturellement un intérêt tout particulier pour les questions de financement de l'économie et du logement social. Nos collègues auront de nombreuses questions à vous poser au cours de cet échange, tant l'empire de la Caisse des dépôts est vaste. Les sujets d'intérêt et d'actualité ne manquent pas.
Nous devrions ainsi aborder les enjeux du logement social et de l'urbanisme en général, du financement des PME, de l'innovation, de l'énergie, du tourisme.
Pour ma part, monsieur le directeur général, j'aurais un vif intérêt à ce que vous développiez les actions de la Caisse qui concernent la restructuration des bailleurs sociaux, le programme Action coeur de ville et, évidemment, les opérations en cours autour de La Poste.
Au-delà de ces projets actuels, votre projet affiche une ambition forte : celle de dépenser dans les territoires 20 milliards d'euros par an pendant cinq ans. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir convié à m'exprimer devant vos commissions réunies. C'est avec grand plaisir que j'inaugure ce nouveau format introduit par la loi Pacte.
À bien des égards, cette loi va d'ailleurs contribuer à la modernisation et au développement de la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Elle ouvre bien sûr la voie au rapprochement avec La Poste, mais elle porte surtout une réforme importante de notre gouvernance. Le texte a pu évoluer au cours du débat parlementaire, notamment grâce aux apports du Sénat, et je me félicite du travail que nous avons mené ensemble.
La loi Pacte préserve les spécificités du statut de la CDC en maintenant le caractère public de l'établissement, qui reste placé sous la surveillance la plus spéciale du Parlement, tout en modernisant sa gouvernance ; les prérogatives de la Commission de surveillance sont renforcées, afin de rapprocher son fonctionnement des meilleurs standards de la gouvernance d'autres institutions financières.
D'abord, la loi Pacte modernise la composition de la commission de surveillance. Le rôle central du Parlement est considérablement renforcé. À compter de 2020, la future Commission de surveillance sera composée de seize membres, dont cinq parlementaires : trois députés - deux membres de la commission des finances, un membre de la commission des affaires économiques - et deux sénateurs - un membre de la commission des finances, un membre de la commission des affaires économiques. Trois personnalités qualifiées seront également nommées par le président de l'Assemblée nationale, et deux le seront par le président de votre Haute Assemblée. Autre évolution importante : deux salariés en seront également membres.
Surtout, la commission de surveillance devient un véritable organe délibérant. Elle se prononcera, demain, sur les orientations stratégiques, adoptera le budget, déterminera le niveau d'appétence au risque, le niveau de fonds propres et le besoin de liquidités, sur la base d'un modèle prudentiel qu'elle déterminera.
Dernier élément de modernisation : la supervision de la CDC sera désormais confiée à l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l'ACPR. La préparation de notre établissement à cette évolution constitue d'ailleurs l'un des grands chantiers de cette année 2019.
Je suis convaincu que ces réformes étaient nécessaires. Conjuguées aux transformations internes menées depuis un an et demi, elles permettront d'améliorer l'efficacité et la lisibilité de l'action de la CDC. Cette action, comme je m'y étais engagé lors de ma nomination, je la veux résolument dirigée vers les territoires. Car, plus que jamais, la lutte contre les fractures territoriales et sociales est une priorité pour la Caisse des dépôts.
Pour mener cette action, nous nous appuyons bien sûr sur les résultats du groupe, et ceux de 2018, que nous avons rendus publics en avril, sont bons.
Le bilan agrégé de la CDC, qui additionne celui de la section générale et celui du fonds d'épargne, s'élève à un peu plus de 430 milliards d'euros d'engagement. Nos fonds propres sont stables par rapport à 2017, soit 48 milliards d'euros dont 12 milliards d'euros au titre du fonds d'épargne et 36 milliards d'euros au titre de la section générale. Les résultats agrégés de 2018 s'élèvent à 3,3 milliards d'euros, dont respectivement 1,8 milliard d'euros pour la section générale et 1,7 milliard d'euros pour le fonds d'épargne. En dépit d'évolutions liées à des facteurs exceptionnels, dont l'impact est relativement limité, nos résultats pour 2018 sont donc stables par rapport à 2017.
L'une des conséquences de ces bons résultats est une nouvelle contribution importante de la CDC au budget de l'État puisque 1,6 milliard d'euros ont été versés au titre de 2018. Cette contribution est en baisse par rapport à 2017, monsieur le président, en raison notamment de plus-values exceptionnelles en 2017. À l'occasion du bicentenaire de la CDC, un accord avec le pouvoir exécutif avait été trouvé pour céder certains actifs, tels que la participation de la CDC à la Sanef.
Sur la question des nouvelles règles de fixation de cette contribution, la loi Pacte prévoit que le ministre de l'économie propose, après avis de la commission de surveillance, un montant. Jusqu'à présent, le ministre propose que la moitié des résultats consolidés de la section générale soit versée à l'État. Nous allons essayer de maintenir ce cap, mais la CDC reste sensible à l'évolution des marchés financiers.
Dans les prochaines années, si l'environnement économique nous le permet, nous ambitionnons de maintenir cette contribution autour de 1,7 milliard d'euros, tout en étant plus ambitieux pour les territoires. De 2019 à 2023, nous souhaitons en effet investir 100 milliards d'euros : 75 milliards d'euros de prêts sur fonds d'épargne et 25,9 milliards d'euros d'investissements sur nos fonds propres.
En 2018, nous avons également mené une réorganisation ambitieuse de la CDC autour de cinq métiers, afin de rendre notre action plus lisible. Cela me permet de vous présenter aujourd'hui la contribution de chacun de ces métiers à nos résultats.
Notre activité de gestion d'actifs a réalisé un résultat agrégé de 1,267 milliards d'euros en dépit d'un contexte boursier volatil. L'encours d'actifs en gestion est de 154,6 milliards d'euros, en hausse de 4 milliards d'euros. Cet encours dépasse actuellement 170 milliards d'euros. Ces résultats permettent à la fois de financer l'économie réelle et de dégager la rentabilité nécessaire pour financer les activités d'intérêt général de la CDC. Par ailleurs, l'empreinte carbone de notre encours a été réduite de près de 50 % sur les quatre dernières années. Nous poursuivrons nos efforts dans cette voie.
La gestion des participations stratégiques, qui regroupe l'ensemble des participations dans nos filiales, contribue au résultat 2018 à hauteur de 900 millions d'euros, notamment grâce aux excellents résultats de CNP Assurances, de La Poste ou d'Icade.
Notre troisième métier, le soutien aux entreprises, avec Bpifrance, a réalisé cette année un résultat d'un milliard d'euros. Cette dynamique reflète le développement commercial de Bpifrance, notamment en faveur du soutien aux entreprises en région. Ce très bon résultat se traduit dans nos comptes par une contribution de 333 millions d'euros.
La direction des retraites et des solidarités ne contribue pas au résultat de la CDC. Ce n'est pas son rôle. Ses équipes, les plus nombreuses de l'établissement public, travaillent pour le compte de leurs mandants, qu'il s'agisse de l'État ou de régimes de retraite. L'activité de cette direction a été très soutenue l'an passé, avec notamment la mise en place du compte personnel de formation, le CPF, sur laquelle je reviendrai. De gros investissements ont été réalisés pour optimiser les prestations de services de ces métiers qui constituent une véritable expertise du groupe CDC.
Dernier métier : la Banque des territoires (BDT). Le 6 juin dernier, nous avons fêté avec Olivier Sichel le premier anniversaire de cette marque qui regroupe l'ensemble de nos activités au service des territoires. Je rappelle que la BDT propose à ses clients, élus, professions juridiques et organismes de logement social, du conseil et des crédits d'ingénierie, des prêts, des investissements en capital pour financer des projets. La BDT met également à disposition les capacités de son opérateur CDC-Habitat, qui gère plus de 500 000 logements.
Cette première année d'exercice a été une réussite, en tout cas en termes de niveau d'activité. En 2018, la Banque des territoires a réalisé un résultat agrégé légèrement supérieur à un milliard d'euros. Ces moyens, nous les mettons au service des territoires, avec par exemple en 2018 : 769 millions d'euros d'investissements locaux ; 12,8 milliards d'euros de prêts en faveur du logement social et des collectivités locales ; 17 millions d'euros de crédit d'ingénierie pour accompagner les collectivités dans leurs projets.
Au cours de sa première année d'existence, la Banque des territoires a aussi démontré sa capacité à répondre rapidement aux besoins des territoires et des élus. Je pense au Plan logement, sur lequel je reviendrai, mais aussi à l'« Aqua prêt », une enveloppe de 2 milliards d'euros de financements de très long terme en faveur du renouvellement des réseaux d'eau et d'assainissement.
Comme vous le constatez, ces résultats sont solides. Le modèle de la Caisse des dépôts est robuste, sain et vertueux : nos activités rentables, la gestion d'actifs et les participations, permettent de financer notre action d'accompagnement des politiques publiques en faveur de l'intérêt général et de la lutte contre les inégalités territoriales et sociales, au coeur de notre mandat.
En 2019, nous comptons poursuivre et approfondir cette dynamique en faveur des territoires. La Banque des territoires est naturellement au coeur de cette stratégie et intervient sur la plupart des chantiers que nous avons ouverts cette année. Elle joue en effet un rôle essentiel en appui des politiques publiques. Je pense notamment à trois grands programmes nationaux.
Le grand plan d'investissement (GPI), dont nous assurons une partie de la gestion en collaboration avec le Commissariat général à l'investissement, a permis d'investir 8 milliards d'euros et d'engager 1 520 projets en 2018.
Le plan « Action coeur de ville », initié par votre ancien collègue Jacques Mézard, s'est déjà concrétisé par la signature de 222 conventions avec les villes choisies. Dans le cadre de ce plan, nous participons à des actions de modernisation, de revitalisation, de retour des commerces en centre-ville, de rénovation de l'habitat social et de l'équipement public afin de redonner de l'attractivité à ces territoires où vivent 25 % de nos concitoyens.
Ce programme, qui part des territoires, est exemplaire dans sa méthode, et nous accompagnons cette démarche qui part du terrain. Le 11 décembre dernier à Poitiers, nous avons convié les 222 maires afin qu'ils puissent échanger sur les bonnes pratiques. De nombreux maires ont accepté d'animer des ateliers pour partager leur expérience comme Jean-François Copé, maire de Meaux et Nathalie Appéré, maire de Rennes.
Le programme le plus récent, « Territoires d'industrie » est tout aussi essentiel. La question de la réindustrialisation de notre pays est fondamentale, en matière de lutte contre le chômage mais aussi de rééquilibrage des territoires. Elle ne pourra passer que par des projets locaux, au plus proche des territoires et de leurs particularités, afin d'ancrer des bassins d'emploi. Dans ce programme, la Banque des territoires assume son rôle d'appui aux politiques publiques en prévoyant d'investir 100 millions d'euros par an. Pour cet appui aux politiques publiques, nous travaillerons demain en coordination étroite avec la future Agence nationale de la cohésion des territoires.
Cette année, nous comptons également amplifier notre effort d'investissement dans les territoires, avec plus de 820 millions d'euros d'investissements sur nos fonds propres. Notre engagement génère un effet de levier supérieur à sept et permet un soutien significatif à des secteurs comme les infrastructures numériques ou les énergies renouvelables.
Nous souhaitons aussi renforcer et rendre plus attractive notre offre de prêts en faveur des collectivités territoriales. J'ai évoqué l'« Aqua-prêt » lancé en 2018. Sur le même modèle, nous avons proposé à l'État de diversifier notre gamme de financements, pour répondre aux besoins croissants des collectivités, sur des maturités très longues. Le premier conseil de défense écologique a concrétisé cette proposition, puisque le Premier ministre a confirmé la mise en place prochaine de nouvelles enveloppes de 5 milliards d'euros de nouveaux prêts : l'« Édu-prêt », en faveur de l'investissement dans les bâtiments éducatifs ; le « Mobi-prêt », qui soutiendra les investissements dans les mobilités du quotidien ; l'extension de l'« Aqua-prêt » à une compétence coûteuse pour les collectivités, à savoir la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, la Gemapi.
La Banque des territoires est aussi un acteur pivot du secteur du logement social, avec un encours de près de 150 milliards d'euros, qui représentent 290 000 prêts. Sur les trois dernières années, les financements au secteur s'élèvent en moyenne à 14 milliards d'euros par an.
Le logement social connaît de très profondes évolutions, que nous nous efforçons d'accompagner. Nous l'avons fait avec le premier Plan logement, lancé en avril 2018. Toutes les mesures de ce plan sont opérationnelles. Je pense notamment au dispositif d'allongement de dette auquel les organismes ont recouru massivement pour plus de 16 milliards d'euros, mais aussi au prêt de haut de bilan 2.0 pour renforcer leurs fonds propres.
Je sais que le Sénat a suivi très attentivement les travaux qui se sont tenus dans le cadre de la clause de revoyure. Vous avez pu constater que la BDT y a joué un rôle essentiel, notamment par les études que nous avons produites. Surtout, nous avons annoncé début mai le Plan logement 2. Nous avons d'abord voulu soutenir l'investissement des bailleurs avec des mesures massives : 4 milliards d'euros de nouveaux prêts à taux fixe et 1 milliard d'euros d'Eco-prêt supplémentaire. Pour apporter au secteur plus de visibilité et garantir sa solvabilité, nous allons également renforcer les quasi-fonds propres des bailleurs, grâce à la souscription de titres participatifs pour 800 millions d'euros.
Au total, les Plans logement 1 et 2 représentent près de 16 milliards d'euros. C'est un effort considérable. J'en profite pour vous redire mon attachement au modèle de financement du logement social sur fonds d'épargne, qui permet d'offrir à 17 % de nos concitoyens des logements abordables et le plus souvent de qualité. Ce modèle est unique en Europe et doit être préservé. Il a contribué à protéger le secteur des aléas de marché, des crises financières et des intérêts d'acteurs privés. Il permet en outre une tarification unique des prêts sur l'ensemble du territoire, avec des maturités très longues pouvant aller jusqu'à quatre-vingts ans avec le Plan logement 2.
Autre chantier de cette année, sans doute le plus structurant : le rapprochement avec La Poste que j'ai évoqué en introduction. Cette opération permettra la constitution d'un grand pôle financier public au service des territoires, dont le bilan sera supérieur à 1 000 milliards d'euros. Au-delà des chiffres, je voudrais revenir sur le sens que nous donnons à ce projet, qui doit profiter à la CNP, à La Poste, à la Caisse des dépôts, mais surtout à l'intérêt général.
Ce projet sera bénéfique pour CNP Assurances, qui est une grande compagnie, dont le modèle devait impérativement être conforté. CNP est confrontée à de nouveaux enjeux et cette opération renforcera son modèle d'affaires, dans la mesure où elle ne possède pas de réseau de distribution en propre. L'évolution de ses partenariats obligeait à repenser son modèle et notamment à renforcer son ancrage avec La Banque postale. Cette opération permet également de renforcer le lien avec le groupe BPCE, qui a décidé de rester un partenaire majeur de CNP jusqu'en 2030.
C'est évidemment un projet bénéfique pour La Poste, qui est confrontée à une érosion rapide des volumes de courrier. Sous l'impulsion de Philippe Wahl, elle opère une diversification très ambitieuse, en développant de nouveaux métiers. C'est dans ce contexte que nous avons souhaité constituer un pôle public de bancassurance, en apportant à la Banque postale les parts que détient la CDC dans CNP Assurances. Cette opération sera donc un élément clé de la transformation de La Poste, en renforçant son pôle de services financiers à destination du grand public.
Pour le groupe CDC, ce rapprochement préservera nos résultats et doit aussi nous permettre de gagner en force de frappe. Ainsi, le maillage territorial unique dont dispose La Poste, avec ses 17 000 points de contact, est utile à l'accomplissement des missions du groupe Caisse des dépôts, en cohérence avec la création de la Banque des territoires. Cette opération améliorera également la cohérence des outils publics de financement, au service des territoires et de nos concitoyens.
Surtout, j'ai la conviction que ce projet sert l'intérêt général. La Poste continuera à assurer ses missions de service public, mais nous allons aussi développer ensemble de nouveaux axes stratégiques, toujours dans l'objectif de lutter contre les fractures territoriales.
Je pense bien sûr aux maisons de services au public, qui sont la base des futures maisons « France service » annoncées par le Président de la République. Nous nous sommes engagés sur un plan pluriannuel d'investissement de 30 millions d'euros. Aux côtés du groupe La Poste, nous souhaitons garantir la qualité de service de ces structures et participer à la création des 500 nouvelles maisons « France service », notamment dans les territoires ruraux, afin de lutter contre l'enclavement et de veiller à l'accès de tous aux services publics. C'est pourquoi nous voulons également renforcer l'itinérance du dispositif, en constituant des équipes mobiles capables d'apporter le service directement au domicile des usagers.
Vous le voyez, les synergies entre La Poste et la CDC existent déjà et nous allons les développer et les renforcer. J'en citerai trois : la transformation numérique des territoires, puisque nous voulons poser les bases d'un pôle de souveraineté numérique et accompagner davantage la transformation numérique de l'État et des collectivités, je pense au projet Blockchain ; la ville intelligente, avec le développement d'une plateforme nationale pour structurer la logistique urbaine ; la « Silver économie » et les services à la personne, afin que la CDC et La Poste deviennent un acteur important au service du « bien vieillir ».
Si vous le souhaitez, je pourrais détailler plus précisément les modalités de cette opération lors de notre échange. Je voudrais simplement vous en indiquer les grandes étapes jusqu'à sa conclusion, dont nous espérons qu'elle interviendra début 2020. Nous sommes dans l'attente de la décision de l'Autorité des marchés financiers (AMF) auprès de laquelle la Banque Postale a déposé une demande de dérogation à une offre publique d'achat (OPA) sur CNP. L'opération devra ensuite être validée par la Commission de surveillance de la CDC et le conseil d'administration de La Poste, puis soumise à l'accord des différentes autorités de tutelle et de supervision : l'Autorité de la concurrence, l'Autorité des marchés financiers (AMF), l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) et la Banque centrale européenne (BCE). L'opération devrait aboutir au 1er trimestre 2020.
Pour conclure ce tour d'horizon des perspectives pour les prochains mois, je voudrais évoquer deux chantiers qui me tiennent particulièrement à coeur. Au-delà de la lutte contre les inégalités territoriales, il y aussi la lutte contre toutes les inégalités. En ce sens, le développement des activités de la direction des retraites et des solidarités est l'une de mes priorités.
Je pense d'abord à la mise en oeuvre du compte personnel de formation, dont le législateur a confié la gestion à la Caisse des dépôts et consignations, désormais exprimé en euros. Les bénéfices pour nos concitoyens seront très concrets : tout salarié ou demandeur d'emploi pourra, demain, réaliser sa démarche en ligne, pour la recherche d'une formation adaptée, de l'inscription jusqu'au paiement. Aujourd'hui, le taux de chômage des personnes non qualifiées est de 18 %, ce qui rend la formation professionnelle indispensable. Cette opération constitue un triple défi - technique, organisationnel et social. Nos équipes sont pleinement mobilisées et répondront dans les temps à ces défis. Nous avons d'ailleurs pu présenter à la ministre Muriel Pénicaud les avancées de la plateforme il y a quelques semaines.
Second chantier sur lequel nous sommes mobilisés depuis plusieurs mois : la future réforme des retraites. Je l'ai rappelé tout à l'heure, depuis plus de 70 ans, la CDC est un partenaire privilégié des employeurs publics. Nous gérons près de 4 millions de retraités, soit un retraité sur cinq. La CDC gère quatre des cinq régimes de retraite publics - la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL), l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (Ircantec), la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP) et le Fonds spécial des pensions des ouvriers des établissements industriels de l'État (FSPOEIE) - et coopère étroitement avec le service des retraites de l'État.
Forte de cette expérience, la CDC, qui gère des régimes par capitalisation et répartition, par annuité et par points, des régimes de base ou complémentaires, peut compter parmi les grands opérateurs de la future réforme. Par la diversité de nos savoir-faire et des régimes que nous gérons, je pense que nous sommes à même de devenir l'acteur référent d'un futur pôle public des retraites.
J'espère, au travers de ce bref tour d'horizon des multiples activités de la CDC, avoir pu vous montrer que nous mobilisons chaque jour nos forces pour servir l'intérêt général, au plus près des territoires.
Le Gouvernement a annoncé le transfert de la Société de financement local, la SFIL, banque publique participant au financement des collectivités territoriales, à la Caisse des dépôts. Or, le montant élevé de prêts structurés, 3,5 milliards d'euros environ, dans son bilan n'est pas sans rappeler les difficultés antérieures de Dexia. Pourriez-vous nous faire un point sur l'avancée des discussions sur ce transfert et sur la solvabilité de la SFIL ?
La Caisse des dépôts a annoncé la semaine dernière l'augmentation de 6 % à 8 % de sa participation au capital d'Euronext, devenant le premier actionnaire de l'opérateur boursier. Or, plusieurs agences de notation ont souligné le risque financier que constituerait l'achat de la bourse d'Oslo pour Euronext. Ne faudrait-il pas stabiliser l'endettement d'Euronext avant de se lancer dans de nouvelles opérations ?
Enfin, un rapport parlementaire préconise de « mettre la main » sur les dépôts de garantie des locataires. La CDC a-t-elle été associée à cette réflexion ?
Monsieur le directeur général, vous avez fait référence à l'accompagnement qu'accorde la Caisse des dépôts dans la restructuration du mouvement HLM et des bailleurs sociaux en détaillant les différents dispositifs. Pouvez-vous nous préciser les résultats des prêts à taux fixe et des prêts de haut de bilan bonifiés un an après leur lancement ?
L'offre Tonus de la Banque des territoires en zones tendues prévoit l'investissement en nue-propriété dans la construction de logements sociaux, dont les bailleurs seraient usufruitiers pendant une période de 15 à 20 ans. Quels bailleurs sont visés ? Souhaitez-vous par cette offre faire revenir les institutionnels dans le logement résidentiel ? Ce serait une bonne chose, mais vous n'ignorez pas que le mouvement HLM est particulièrement inquiet que le secteur privé détienne des logements sociaux.
Enfin, comment envisagez-vous de décliner l'initiative « smart-city » sur les technologies de la ville de demain dans le logement social ? Avez-vous noué un partenariat avec le logement HLM ? En effet, des projets incubés par des organismes de logements sociaux semblent particulièrement intéressants, comme la construction en matériaux biosourcés, que vous pourriez accompagner à une plus grande échelle.
Monsieur le directeur général, je salue le rôle joué par la CDC dans la clause de revoyure en éclairant le débat par les études qu'elle a pu fournir. Cela étant, les ressources ont été remplacées par des prêts, qui finiront par devoir être remboursés un jour, même au bout de 80 ans... Action Logement s'est également efforcée de trouver des solutions à moyen terme, mais après ?
La réforme du Gouvernement repose notamment sur la réorganisation des bailleurs sociaux. Cette réforme permettra-t-elle de réaliser des économies d'échelle qui pourraient être réaffectées à la construction ? Quel sera le rôle de la Caisse des dépôts dans cette phase de réorganisation ? Les économies d'échelle attendues seront-elles à la hauteur ?
Les commerçants des centres-villes ont été victimes de préjudices économiques graves en marge du mouvement des Gilets jaunes. La Banque des territoires, présentée par le Gouvernement comme une réponse aux fractures sociales, est-elle intervenue, et comment ?
Quels sont selon vous les principaux obstacles à la mise en place d'un fonds national d'indemnisation des pertes d'exploitation occasionnées par ces manifestations ? Les communes, les régions, les chambres de commerce et d'industrie et les chambres des métiers et de l'artisanat ont participé localement à la mise en place de fonds d'indemnisation, mais pas l'État.
Comme mon collègue Dallier, je pense que la CDC, par ses études et sa défense du logement social, a joué un rôle important dans l'arbitrage de la clause de revoyure. À peine était-elle signée que le Gouvernement lançait une mission portant sur la diversification des sources de financement du secteur du logement social... Or, si les investisseurs institutionnels sont très utiles pour le logement intermédiaire, ils représentent une menace pour le logement social, remettant en cause la lucrativité quasi nulle du capital des logements sociaux. Cette mission évoque également un financement par d'autres prêteurs que la Caisse des dépôts et consignations, et s'interroge sur la capacité des fonds d'épargne à assurer les besoins de financement du logement social. Avez-vous été associé à cette réflexion ? Partagez-vous ce diagnostic ? Le principe structurant d'un financement du logement social assuré a minima à 50 % par la Caisse des dépôts pourrait-il être remis en cause ?
Pour conclure, je rappellerai que la spécificité du Livret A au regard de la réglementation européenne est adossée à sa mission prioritaire de financement du logement social.
Merci pour votre explication sur le pôle financier public, et notamment sur les liens que vous êtes en train de mettre en place avec la Banque Postale. Je souhaite vous interroger sur les fonds propres et les maisons de services au public, qu'on appellera désormais les maisons « France service ». Vous avez annoncé le déblocage de 30 millions d'euros de vos fonds propres pour l'aménagement du territoire. La Poste a également annoncé sa participation. Quid de la transformation numérique ? La CDC a beaucoup fait par le passé pour l'accompagnement des personnes âgées dans les territoires ruraux ou dans le cadre de la politique de la ville. La Poste dispose aussi du fonds de présence territoriale qu'elle pourrait mobiliser en ce sens.
Vous financez des projets bas carbone, la production d'énergies renouvelables, les économies d'énergie. Pouvez-vous détailler vos actions ? Le parc des bâtiments publics des collectivités territoriales représente des millions de mètres carrés, notamment dans les bâtiments d'enseignement, et la plupart de ces bâtiments sont anciens et mal isolés. Il y a là de colossales économies d'énergie à réaliser. Avec le plan d'investissement, vous avez dégagé une enveloppe spécifique pour réduire l'empreinte énergétique des bâtiments publics et accompagner les collectivités territoriales dans leurs projets de rénovation. Pour quel montant exactement ? Pouvez-vous faire un point d'étape sur la mise en place de ce plan ?
L'action coeur de ville représente effectivement un effort important en matière d'ingénierie et de financement. Ne se fait-elle pas au détriment des petites villes, celles qui comptent moins de 10 000 habitants ?
Comment envisagez-vous l'indemnisation des pertes enregistrées par les commerçants suite aux manifestations ?
Vous avez évoqué la réforme des retraites, et vous êtes un acteur majeur de la gestion des régimes publics de retraite, aux côtés du service des retraites de l'État. Comment, techniquement, allez-vous reconstituer les carrières complètes des agents publics ? Actuellement, vous ne disposez que des six derniers mois. Combien de temps cela prendra-t-il ? Que deviendra le régime de cotisation par capitalisation pour les fonctionnaires ?
En 2018, 68 % de vos prêts ont bénéficié à des communes de moins de 3 000 habitants, pour un montant d'investissement de près de 20 milliards d'euros. Si petites soient-elles, les communes doivent souvent faire face à des investissements très lourds, qu'il s'agisse du financement d'écoles ou de celui des réseaux, dans un contexte budgétaire communal très contraint. Or le caractère élevé d'une annuité peut constituer un frein très important au déblocage de l'investissement pour des communes qui n'ont pas un budget très élevé. J'ai été maire d'une commune de 400 habitants pendant dix ans, et j'ai pu constater à de nombreuses reprises que la CDC ne proposait pas de prêts d'une durée supérieure à celle proposée par les banques commerciales, c'est-à-dire 25 ans. Si l'on peut se réjouir de la mise en place de dispositifs innovants, comme l'Aqua-prêt, qui permettront aux collectivités de gérer au mieux leurs compétences sur l'eau, l'assainissement ou la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, il est regrettable que ce type de financement ne puisse pas être proposé pour d'autres types d'investissements, au moins pour des collectivités qui ont des budgets plus contraints. La banque des territoires offrira-t-elle des modalités de prêt plus flexibles aux petites communes, pour étaler ces investissements considérables sur des durées plus longues ?
Vous avez évoqué votre participation au développement de l'économie et des start-up via la BPI, à hauteur de 330 millions d'euros. Comment évaluez-vous l'affectation de ces fonds ? On ne construira pas une économie émergente dans le numérique sans aider à la création et à l'accompagnement de ce qu'on appelle maintenant les licornes, c'est-à-dire des entreprises importantes et viables de l'économie numérique.
Le dispositif « territoire d'industrie » est une énième traduction - positive - du grand plan d'investissement qui remonte déjà à quelques années. Le Gouvernement a choisi de cibler certains territoires, plutôt métropolitains, au détriment de territoires plus ruraux, pourtant tout autant concernés par les filières priorisées. En fait, il y a beaucoup de communication, et les moyens publics ne sont pas forcément au rendez-vous dans les 130 territoires repérés. Vous dites que l'ensemble du territoire national doit être éligible à ce type de soutien. Allez-vous aider autant les entreprises situées dans les territoires d'industrie que celles qui n'y sont pas ?
L'Union européenne a remis en cause SFIL, dont la rentabilité est faible et qui surrémunère de nombreux cadres, sans parler des incertitudes réglementaires et des stratégies de diversification contestées. SFIL restera-t-il l'un des véhicules bancaires du pôle ? La Cour des comptes et l'Europe se sont exprimées sur cette question.
Bien sûr, la banque des territoires va prendre toute sa place dans le soutien à l'industrie. Y aura-t-il aussi des prises de capital dans certaines PME en difficulté ? Je pense en particulier à General Electric. Allons-nous continuer à ne pas investir dans les capitaux privés de ces entreprises ? L'Allemagne le fait, avec ses Länder, et pour nous, cela devient tabou ! Lorsqu'une entreprise est en difficulté, comme nous l'avons fait pour PSA, avec succès, comme M. Obama l'a fait avec General Motors, avec succès, l'État doit investir non seulement dans la machine-outil, mais aussi dans le capital, pour la relancer. La France est en train de prendre du retard dans ce domaine, quand d'autres pays européens font le contraire.
Pour les logements sociaux, la ressource a été remplacée par des prêts, comme l'a dit M. Dallier. Et la circulaire dont a parlé Mme Lienemann repose le problème du modèle économique du logement social et du rôle central qu'a la CDC. Beaucoup d'élus et de maires s'interrogent sur la durée du prêt, et sur la garantie des villes. Ils sont toujours absents alors qu'ils sont les premiers concernés. Sans leur garantie, il n'y a plus de construction de logement social. Et ils sont très hostiles à la construction de logements sociaux chez eux sans qu'ils puissent donner leur avis. Cela met la CDC en situation difficile dans certains territoires.
Vous avez évoqué l'exemple du numérique, avec la fibre pour tous sur l'ensemble du territoire pour éviter une certaine fracture numérique. Quand les choses se passent bien, il faut le dire aussi ! Vous avez parlé de l'ambition de réindustrialiser la France. Si le chiffre envisagé est de 100 millions d'euros par an, cette ambition est bien faible ! Même s'il s'agit de prises de participation, et qu'il y a un coefficient multiplicateur, 100 millions d'euros par an, ce n'est rien !
La France a une chance territoriale phénoménale. Sur l'aspect agricole, un programme est prévu ; sur l'aspect forestier, pouvez-vous nous exposer le travail réalisé et les perspectives d'accompagnement des investissements forestiers industriels ? Il faut un grand plan national d'accompagnement pour la reforestation de nos territoires. Ce n'est pas la surface forestière qui diminue, mais le nombre de tiges productives.
Monsieur le Président Éblé, vous m'avez demandé quelle était la différence entre un green bond et un sustainable bond. Les deux correspondent à des émissions de dette de la CDC, allouées à des opérations particulières de transition écologique et énergétique. Le sustainable bond a un mandat plus large, qui inclut le logement social et les maisons de retraite, alors que le green bond se restreint à des opérations écologiques. Les 500 millions d'euros levés seront affectés à des opérations à vocation écologique et solidaire. Ils ont été collectés la semaine dernière, pour cinq ans, à un taux négatif de 26 centimes : non seulement les investisseurs nous prêtent de l'argent, mais en plus ils nous payent pour cela ! Ce n'est pas forcément un très bon signal sur l'équilibre macroéconomique général, mais c'est un témoignage de la motivation des investisseurs internationaux, puisque seuls 40 % des fonds proviennent d'investisseurs français.
Les prêts structurés de la SFIL ont été réduits, et s'élèvent désormais à un milliard d'euros. La SFIL est une banque de développement, détenue à 75 % par l'État, 20 % par la CDC et 5 % par la Banque Postale, qui a été constituée pour récupérer un certain nombre d'actifs de Dexia. Ses équipes ont fait un travail remarquable ces dernières années pour réduire le risque qui était porté par l'État du fait de ces actifs. C'est un travail de Pénélope : pour chaque ligne, avec chaque contrepartie, il a fallu négocier pour réduire le risque. L'encours de la SFIL est d'environ 75 milliards d'euros, pour 1,5 milliard d'euros de fonds propres. La rentabilité de la SFIL est modeste, ce qui est assez logique pour une banque de développement. Son mandat est de financer les collectivités, et elle continue à le faire en refinançant l'activité de financement des collectivités locales de la Banque Postale. La diversification, pour elle, sera de financer les grandes opérations d'exportation. C'est une activité qui contribue à l'intérêt général, et les banques sont demandeuses de cette intervention. La grande exportation française est d'ailleurs suivie attentivement et garantie par l'État au travers de la BPI.
La SFIL restera-t-elle un véhicule bancaire de la CDC ? Oui, puisqu'il y a un mandat particulier. Un des projets qui sous-tend le rapprochement avec la Poste est de bien coordonner l'action de quatre établissements de types très divers mais ayant chacun un mandat bien précis : Bpifrance, la Banque des territoires, la SFIL et la Banque postale.
Je ne connais pas la rémunération des collaborateurs de la SFIL. Il y a des activités très techniques de gestion financière mais, comme on est dans le secteur public, ce ne sont pas les rémunérations qui sont servies dans le privé. La situation a été suivie de très près par l'État, et le sera par nous lorsque la SFIL rejoindra le groupe.
Sur Euronext, nous sommes montés au capital en deux temps. Nous avions 3 %, Bpifrance avait 3 % et, en accord avec Nicolas Dufourcq, nous avons rassemblé ces participations dans les mains de la CDC pour avoir une unité de commandement sur ces 6 %. Comme une banque française et une banque néerlandaise étaient vendeuses, nous avons racheté leurs participations. La première raison est qu'Euronext constitue un actif stratégique : Euronext est une grande infrastructure de marché, et l'endroit où s'échangent les titres permettant d'accéder au capital des grandes entreprises européennes. Il était donc dans le mandat de la CDC de peser au capital de cette grande entreprise européenne d'origine française. Sous l'autorité de Stéphane Boujnah, Euronext construit une plateforme européenne. C'est une institution très bien gérée, dont l'équilibre financier, que nous suivons attentivement, ne nous inspire pas d'inquiétude, et qui a les moyens de financer son développement, d'autant qu'elle s'appuie sur des actionnaires solides.
Sur le dépôt de garantie des locataires, nous avons rencontré l'auteur du rapport. Nous avons des réserves sur l'idée de centraliser des ressources financières à un moment où leur rémunération est négative. Ce serait compliqué pour l'établissement qui porterait la ressource... Et les bailleurs sociaux ont de la trésorerie.
Un vrai mouvement d'évolution est engagé dans le logement social, avec un rapprochement des bailleurs pour se consolider. Ils s'appuient sur la mise en place des outils : le rallongement de la dette est en place ; le prêt de haut de bilan tarde à être mis en oeuvre, car il s'agit d'une offre conjointe avec Action logement. La clause de revoyure a permis une meilleure compréhension entre les différentes familles de l'HLM, Action logement, l'État et la CDC, sur les outils à leur disposition. Les rapprochements qui se font sont de vrais rapprochements. CDC Habitat, notre opérateur de logement social, a décidé l'année dernière de fusionner les treize entreprises sociales pour l'habitat de son réseau, ce qui génère de vraies économies - et, avec plus de 750 opérateurs, le logement social a des gains de productivité à faire.
L'offre Tonus que nous mettons en place repose sur nos capitaux propres à hauteur de 700 millions d'euros. Elle est conçue pour être à destination des bailleurs sociaux exclusivement. Je remercie la commission de surveillance de son soutien : la CDC va porter la nue-propriété pendant des durées de quinze à vingt ans, sans aucune rémunération. Le bailleur social, ayant l'usufruit, récupèrera la totalité des revenus, pour un investissement qui représentera sans doute la moitié du montant total.
Il y a aussi des baisses de charges pour le secteur : quand nous allongeons la dette en faisant du prêt de haut de bilan à 0 % pendant vingt ans, nous supprimons des charges financières. Outre l'effort de bonification financière, qui représente 700 millions d'euros par an, l'État a décidé de maintenir un taux de Livret A certes élevé par rapport à l'univers des taux, mais plus bas qu'il n'aurait été avec la formule précédente, et cela représente aussi un effort de soutien au secteur de 700 millions d'euros.
Avec le mouvement du logement social, nous sommes dans une relation d'offre de service. Nous dialoguons avec les fédérations, avec chaque organisme, et chacun décide si nos outils lui conviennent ou non. La Banque des territoires emporte un dynamisme accru, avec un site internet à destination de tous les organismes, présentant des offres très diverses.
L'allongement de la dette, s'il diminue la charge annuelle, ne fait pas baisser le coût global, qui augmente au contraire. Quel est le rôle de la CDC dans la réorganisation ? Les acteurs viennent nous voir et nous finançons le projet qu'ils nous proposent. Notre neutralité entre les mouvements de logement social est totale, et nous offrons les mêmes outils à chacun - je l'ai clairement dit aux fédérations.
Le financement des PME et des TPE n'est pas le rôle de la Banque des territoires. Bpifrance finance les entreprises grandes et moyennes. Le financement des commerces de centre-ville, qui ont souffert, n'est ni dans notre mandat ni dans nos moyens. C'est le rôle des banques commerciales ou mutualistes qui sont sur le terrain. Quant aux indemnisations, elles relèvent des assureurs ou des pouvoirs publics. La CDC ne fonctionne qu'avec les revenus de ses placements et de son travail. S'il lui arrive de financer à fonds perdus de l'ingénierie ou du développement, elle ne peut intervenir sur un fonds d'indemnisation pour ce type d'activités.
Dans le cadre de la mission que vous avez mentionnée, nous avons été interrogés. Il est important d'avoir un modèle partant du Livret A, qui est un produit de placement sûr et très apprécié de nos concitoyens. Ce livret A alimente essentiellement le logement social et les activités d'investisseur de la CDC. Le logement social étant garanti par les élus et les collectivités locales, cela fait du Livret A un placement extrêmement sûr. C'est l'ensemble qui fait système, et il ne faut pas l'affaiblir en le modifiant, car il est puissant et protecteur.
Même dans la configuration actuelle, avec des marchés financiers agités et des taux d'intérêt négatifs, il n'y pas de doute sur la solidité des fonds d'épargne, dont les fonds propres ont été augmentés fortement ces dernières années, dont les résultats sont très largement positifs et dont l'équilibre financier est assuré. Les fonds d'épargne gérés par la CDC représentent 285 milliards d'euros. Au total, il y a environ 290 milliards d'euros de prêt, dont 170 milliards d'euros pour le logement social et les collectivités locales - le reste étant investi sur les marchés financiers. Tout cela est très solide, et se déploie dans le cadre d'un mandat que nous donne le Gouvernement, et sous la surveillance très attentive du ministère des finances. Aucune préoccupation, donc, mais ce système doit continuer à se développer.
Sur certains segments du secteur du logement, on peut être plus dynamique. Je pense notamment au logement intermédiaire, où nous avons nous-mêmes été acteurs de la dynamisation, dans un pays où le manque de logements est un sujet chronique depuis des dizaines d'années.
Pour les maisons « France service », les 30 millions d'euros viendront de la CDC, et le fond de présence territoriale est utilisé chaque année par la Poste pour maintenir une présence territoriale très large - et coûteuse. La transformation numérique comporte deux éléments. L'installation du très haut débit partout est en cours, au rythme de 100 000 prises par trimestre dans les régions d'initiative publique, non couvertes par les opérateurs privés. Pour les personnes âgées ou celles qui ne sont pas adaptées, c'est la présence humaine qui les aidera, dans les maisons « France service », itinérantes ou fixes. Il faut une présence sur les territoires, pour permettre un accompagnement personnel, lorsqu'il est nécessaire.
La transition écologique est une de nos priorités. Les financements existent, et nous avons des enveloppes très abondantes pour la rénovation thermique du logement social. Les règles ont été assouplies, et on espère que cela sera mieux utilisé. Vous avez raison : sur les bâtiments publics mal isolés, il y a des économies importantes à faire pour les collectivités locales. Nous souhaitons qu'elles se saisissent de ces enveloppes pour faire de la rénovation des bâtiments. Nous avons aussi des enveloppes pour les universités, et nous avons rénové l'université de Bordeaux. Nous le faisons savoir aux élus, et la Poste nous aidera à leur porter le message.
Il y a plusieurs types de territoires, dans la République, qui demandent un traitement particulier. Il y a les quartiers, dont on ne parle pas beaucoup, mais auxquels nous sommes très attachés. Il y a les villes moyennes, pour lesquelles l'initiative « Action coeur de ville » est très forte. Nous devons être très actifs dans les bourgs ayant une fonction de centralité. Nous le sommes dans certaines régions, qui ont engagé des initiatives dans ce sens, comme la Bretagne. Nous le sommes quand les élus nous le demandent. Je me suis, par exemple, rendu à Brioude, à la demande du maire, pour monter un projet. Nous réfléchissons, avec le Gouvernement, à des initiatives plus fortes en faveur des bourgs et des zones rurales ayant une fonction de centralité, sur un modèle de coordination entre les différents acteurs : État, CDC et probablement quelques autres.
Pour ce qui concerne le dossier des retraites, la reconstitution de carrière est compliquée. Sans anticiper sur les décisions du Gouvernement, il me semble qu'il y a trois cas de figure. Pour celles et ceux qui prendront leur retraite dans les cinq ans qui viennent, le régime ne change pas. Les personnes qui entrent dans la vie professionnelle intègreront immédiatement le futur système. Entre les deux, pour les personnes qui ont déjà acquis des droits importants dans le système actuel, et qui vont en acquérir dans le futur système, il faudra reconstituer leur carrière, et basculer les intérêts de l'ancien système dans un nouveau système - car il me semble important que les droits acquis soient préservés. Cela nécessitera une longue période de transition, pour que les droits de chacun soient bien reconstitués. Un pays comme la Suède a fait ça avant nous, sur des périodes de transition longues, et sous la surveillance d'organismes publics et des partenaires sociaux. En tous cas, il faudra du temps. Concernant l'avenir de la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), et d'autres systèmes, c'est au Gouvernement de faire des propositions. Pendant la très longue période de transition, ce système sera probablement maintenu. Et, même si nous basculons vers un régime universel, il faudra bien diverses institutions pour gérer les différentes catégories d'agents et de salariés.
Les prêts des fonds d'épargne sont autorisés par décision du ministre des finances, avec lequel nous avons des débats francs et directs sur les enveloppes pour les collectivités locales. Depuis la crise de 2008, les banques du secteur concurrentiel sont revenues très activement dans le financement des collectivités locales. Les fonds d'épargne ont vocation à intervenir quand il y a une faille de marché, mais pas en concurrence avec les acteurs privés.
Pour la plupart des collectivités locales, il y a les offres des banques commerciales ; la Banque des territoires peut intervenir en complément, mais avec une offre plus onéreuse. Pour les grandes collectivités, cela ne pose pas de problème : elles arbitrent. Pour les petites, qui n'ont pas forcément accès aux banques commerciales, c'est plus compliqué, mais elles disposent de nos offres. Que je sache, les banques commerciales vont très rarement au-delà de 25 ans pour la durée des prêts - ce qui s'inscrit, par conséquent, dans le mandat de la CDC. La durée du crédit que nous proposons est liée au projet. Pour un projet de très long terme, comme pour des prêts fonciers ou en matière d'infrastructures, nous allons sur des durées plus longues.
Pour l'évaluation de Bpifrance, nous analysons très attentivement l'utilité des fonds engagés. Je suis convaincu que l'énergie exceptionnelle déployée par Nicolas Dufourcq et les équipes de Bpifrance est l'une des causes du retour de l'industrialisation et du développement des sociétés - nous avons désormais une cinquième licorne française, dans le secteur de la photographie. Nous suivons, segment par segment, la croissance et le développement de nos investissements. C'est très encourageant.
Sur les territoires ruraux qui ne sont pas dans les territoires d'industrie, je ferais la même réponse que sur les villes moyennes : nous sommes présents, et nous accompagnons, y compris quand ce n'est pas fléché par un grand programme national.
M. Gremillet dit que 100 millions d'euros par an, ce n'est rien. En effet, mais le mandat de la CDC ne porte pas sur le développement des entreprises elles-mêmes, qui concerne Bpifrance ou les banques commerciales. Il porte sur l'aménagement local qui permet d'accueillir l'industrie. De ce point de vue, la somme paraît bien calibrée. S'il faut plus, nous mettrons les fonds immédiatement à disposition.
Pour la CDC, le sujet est plutôt de trouver des projets. Quand le projet est identifié et porté par les acteurs locaux et par les entreprises, nous trouvons les fonds.
Le CDC doit-elle intervenir dans les entreprises en difficulté ? C'est le rôle de Bpifrance, qui peut prendre des risques plus importants que ne le ferait un opérateur privé pour soutenir une entreprise qui présente des risques particuliers ou se trouve dans une phase difficile de sa vie. En cas de retournement ou d'intervention dans une situation très difficile, il me semble que c'est plutôt le rôle de l'État, même s'il peut y avoir débat. Lorsque la souveraineté nationale est concernée, les outils sont plutôt à la main du ministère des finances, avec lequel nous avons un dialogue très fluide.
La garantie des collectivités locales est essentielle. Chacun fait en sorte qu'elle ne soit pas appelée. Lorsqu'un organisme est en difficulté, la CDC intervient, et parfois aussi la Caisse de garantie du logement locatif social.
La CDC ne gère que 300 000 hectares de forêts, dont 150 000 hectares qui lui appartiennent - qui appartiennent donc à tous. Cette gestion est faite de manière responsable, avec une vision longue. Nous replantons chaque année 3 500 hectares. J'ai accompagné le Président de la République lors d'un déplacement dans les Vosges, car l'adaptation et la modernisation de notre secteur industriel forestier sont des enjeux importants.
Comment évaluez-vous l'efficience de votre accompagnement des entreprises du numérique ?
Nous le faisons en conseil d'administration de Bpifrance, par segments d'investissement. On observe l'évolution de la valorisation du portefeuille, et en suivant les entrées et sorties de portefeuille. La direction générale de Bpifrance nous présente les nouveaux investissements, et notamment les initiatives récentes dans la Deep Tech. Il y a des succès, et des échecs.
Merci.
La réunion est close à 12 h 30.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.