Mes chers collègues, nous allons commencer cette réunion, qui devrait être la dernière de la session 2018-2019, par un rapide bilan du travail de la délégation depuis octobre 2018. Puis nous allons parler du « Plan national d'action visant à éradiquer les mutilations sexuelles féminines », présenté par le Gouvernement le 21 juin. Ensuite nous avons des mesures à prendre au sujet du vingtième anniversaire de la création de la délégation. Enfin, nous pourrons évoquer ensemble des pistes de réflexion sur notre programme de travail à venir, qui fera l'objet d'une validation, comme chaque année, dès le début du mois d'octobre.
Vous avez reçu les chiffres clé du travail de la délégation pendant cette session. S'agissant de notre rythme de réunions, nous avions souhaité, il y a un an, mieux adapter le travail de la délégation aux contraintes du calendrier parlementaire. Notre bilan ne s'est pas ressenti de cet effort d'organisation. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : quatre rapports d'information (cinq prochainement avec le rapport sur les violences faites aux femmes handicapées), deux colloques, trois tables rondes et une résolution adoptée à l'unanimité par le Sénat.
S'agissant de la communication sur les travaux de la délégation, nous avons nettement accru le nombre de communiqués de presse. Par ailleurs, la tribune sur le féminicide dont nous avons pris l'initiative, co-signée par 152 sénateurs et publiée vendredi dernier par le journal Libération, a été abondamment relayée et a permis, à mon avis, de rendre visible l'implication de notre institution contre ces violences.
J'en viens au « Plan national d'action visant à éradiquer les mutilations sexuelles féminines », dont le texte vous a été communiqué.
Vous le savez, notre délégation a beaucoup travaillé sur ce sujet l'année dernière, avec le rapport de Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac adopté en mai 2018, puis la proposition de résolution examinée à l'initiative de la délégation en séance publique le 14 mars dernier et adoptée à l'unanimité. Je précise que pour l'examen de ce texte, le Gouvernement était représenté dans notre hémicycle par le secrétaire d'État auprès de la ministre des Solidarités et de la santé chargé de la Protection de l'enfance.
Si l'on peut bien évidemment se réjouir que le Gouvernement se mobilise contre les mutilations sexuelles féminines, on peut regretter que nos travaux ne soient jamais cités par ce plan. Pourtant, le Sénat, à travers sa résolution, est l'une des institutions de notre pays les plus impliquées contre ces violences.
De plus, certains passages du plan rappellent des phrases entières de notre rapport ou de notre résolution, sans jamais s'y référer. Je pense par exemple au développement sur la terminologie « mutilations sexuelles féminines » préférée à celle d'excision ou de « mutilations génitales féminines », ou à la déclaration selon laquelle « Aucune tradition ne saurait être invoquée pour justifier les mutilations sexuelles féminines »...
D'ailleurs, les rares propositions concrètes du plan ressemblent à des recommandations que nous avons formulées, là encore sans citer nos travaux. Je pense notamment au signalement systématique des filles, adolescentes et femmes mutilées qui accouchent dans les maternités françaises (proposition n° 4 de notre rapport), à la sensibilisation des étrangers arrivant dans notre pays au cadre législatif français interdisant l'excision (proposition n° 7), ou encore à l'identification, dans les établissements d'enseignement scolaire du second degré, des jeunes filles quittant sans motif le système éducatif à l'âge de l'obligation scolaire, « afin de mieux identifier les victimes potentielles de mutilations sexuelles féminines ». Ce passage du plan reprend, vous l'avez compris, notre proposition n° 2.
De surcroît, on déplore une nouvelle fois un certain manque de substance derrière les propositions du Gouvernement. En effet, ce plan ne donne pas de précisions sur les moyens qui financeront les mesures prévues et l'action des associations oeuvrant au quotidien pour lutter contre l'excision. Car dans ce domaine aussi, les associations sont le « bras armé » des politiques publiques. Or, comme souvent, on a l'impression d'en rester à des effets d'annonce et à de la communication. Il manque du concret !
Je relève également que sur dix-neuf pages, dix seulement concernent réellement le coeur du sujet. Plusieurs pages du plan sont ainsi en réalité dédiées à mettre en valeur le bilan du Gouvernement en matière d'égalité femme-homme, érigée en « grande cause du quinquennat »...
Je remarque par ailleurs que le plan du Gouvernement cite la loi du 3 août 2018 renforçant la lutte contre les violences sexuelles et sexistes, sans mentionner la disposition introduite par le Sénat, à l'initiative de la délégation, pour étendre explicitement les missions de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) au repérage des mutilations sexuelles féminines.
Je m'étonne également que le plan se réfère au seul travail de la Maison des femmes de Saint-Denis en matière de chirurgie réparatrice, sans citer le Women Safe et le Docteur Foldès, qui a pourtant opéré des milliers de femmes victimes de mutilations ! Nous avons, bien sûr, été très impressionnés par l'engagement du docteur Ghada Hatem, que nous avons entendue avec beaucoup d'intérêt, et par les remarquables qualités de la structure qu'elle dirige à Saint-Denis. Mais il semble inapproprié de ne pas rendre hommage aux autres acteurs de cette lutte, pour laquelle on a besoin de tous les talents et de toutes les énergies...
Enfin, un dernier aspect qui me paraît problématique est l'absence de référence au continuum des violences. Le plan aborde les mutilations sexuelles féminines comme un phénomène isolé, sans prendre en compte la continuité évidente des violences qui existe entre mutilations, mariages des enfants ou mariage forcé, et grossesses précoces. Nos travaux ont pourtant bien établi ce lien indéniable.
Notre délégation a publié, comme vous le savez, après avoir pris l'attache de nos collègues Maryvonne Blondin et Marta de Cidrac, co-rapporteures, un communiqué de presse synthétisant ces réactions au « Plan du gouvernement pour éradiquer les mutilations sexuelles féminines », afin de rappeler que la délégation, mais aussi le Sénat, ont été forces de proposition contre l'excision, et d'exprimer des interrogations sur la portée effective du plan, en l'absence de précisions sur les financements qui y seront associés.
On ne peut que regretter une nouvelle marque de manque de considération, voire de mépris du Gouvernement à l'égard des travaux du Sénat, alors que sur des sujets aussi sérieux, il semblerait au contraire important de travailler de concert et en bonne intelligence.
Je m'associe pleinement au communiqué de presse publié la semaine dernière, que j'ai d'ailleurs relayé dans mon territoire.
Je souscris totalement à ce qui vient d'être dit par la présidente et par Maryvonne Blondin. Je ne comprends pas cette tendance à vouloir ignorer les travaux du Sénat. Cette attitude parvient à introduire des clivages dans des sujets qui devraient pourtant, compte tenu de leur gravité, faire consensus. J'ai moi aussi relayé notre communiqué de presse pour souligner ce manque de correction.
Je crains par ailleurs que la lutte contre l'excision soit remisée au second plan en raison du « Grenelle des violences conjugales » annoncée pour l'automne par Marlène Schiappa.
Je rappelle que Women Safe, qui à Saint-Germain-en-Laye joue un rôle très important dans la prise en charge des femmes victimes de mutilations sexuelles féminines, et qui n'est malheureusement pas cité dans le plan du Gouvernement, mène une action plus générale d'accompagnement des femmes victimes de violences, quelles qu'elles soient.
Je précise à cet égard que Women Safe organise demain au Sénat un colloque dont je suis la marraine. De nombreuses associations engagées dans la lutte contre les violences faites aux femmes y seront présentes. Cette manifestation mérite notre attention.
Je crois qu'il faut continuer à avancer ensemble avec nos partenaires et souligner le véritable travail de fond que mènent le Sénat et la délégation sur tous ces sujets. Il est regrettable qu'une démarche constructive ne puisse prospérer.
Ne faudrait-il aussi pas tenter de nous rapprocher davantage de nos collègues de l'Assemblée nationale pour avancer sur tous ces graves sujets ?
Compte tenu de l'engagement des plus hautes autorités de l'État en faveur de l'égalité femmes-hommes, « grande cause du quinquennat », je suggère que notre présidente, au nom de la délégation, adresse notre rapport au Président de la République ainsi qu'au Premier ministre, afin d'attirer leur attention sur nos travaux et manifester notre volonté de travailler de concert dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
Je note par ailleurs que l'épouse du président est fort impliquée dans cet objectif ; elle s'est récemment rendue à Women Safe.
Il est important, en effet, de réagir face à des comportements, qui ont pour conséquence d'invisibiliser les travaux du Sénat. Si vous en êtes tous d'accord, nous adresserons donc notre rapport, ainsi que la résolution du Sénat, au Président de la République et au Premier ministre, en informant de cette démarche, bien entendu, le président Larcher.
Cette initiative me semble importante. Pour autant, ne tombons pas dans le piège des polémiques politiciennes. Les sujets que nous portons ne sont pas clivants, c'est la façon de s'en emparer, sans tenir compte de notre institution, qui introduit des clivages.
Il faut faire attention à la manière d'aborder certains sujets. Par exemple, dans le cadre des mesures pour améliorer les conditions de travail des femmes de chambre dans les hôtels, annoncé le 24 juin dernier, la secrétaire d'État met en cause les entreprises du secteur du nettoyage, alors que la question est beaucoup plus complexe... On ne peut pas imputer à ces seules entreprises la précarité de ces personnels. Les causes sont multiples.
Sur ce sujet précis, il me semble qu'il faudrait aussi avoir une approche juridique précise, en partant du code du travail. Il est important d'avoir une approche technique de ces problèmes. Le Sénat peut être utile dans cette réflexion, car notre délégation a travaillé sur la plupart des sujets abordés par la secrétaire d'État et peut donc être force de proposition.
Je suis d'accord. S'agissant des femmes de chambre, on ne peut pas mettre sur le même plan les grands hôtels et les entreprises de propreté. Certaines de ces dernières ont en effet pris des mesures pour améliorer la situation de leurs employés et contribuent à former des personnes souvent non qualifiées. Ne tombons pas dans la caricature !
Notre prochain rendez-vous avec la secrétaire d'État sera le temps fort du budget. Dans l'intervalle, je suggère que nous prenions tous l'attache de nos déléguées départementales aux droits des femmes. Les remontées de terrain que j'ai de mon territoire sont tout à fait préoccupantes s'agissant des subventions allouées aux associations, notamment en ce qui concerne les droits sexuels et reproductifs. Il faudra bien interpeller la ministre sur ce sujet : concrètement, avec quoi fonctionnent les associations ?
En effet, on a beaucoup parlé du téléphone grave danger (TGD) ces derniers jours, dans le cadre de la mobilisation contre les féminicides. À entendre le Gouvernement, cet outil serait peu utilisé. Mais je rappelle que pour que cet outil fonctionne bien, il faut qu'il y ait quelqu'un pour répondre à la femme menacée. Or cela induit des coûts et les tribunaux manquent de moyens pour rémunérer le personnel nécessaire à cette écoute.
Dans les Yvelines, le nombre des TGD a été diminué, sans rapport, semble-t-il, avec les besoins...
Dans mon département, l'association d'aide aux victimes Agora Justice n'a plus les moyens d'accompagner les personnes qui lui sont adressées par le procureur.
J'ai interpellé le Gouvernement sur la question des unités médico-judiciaires (UMJ) et la possibilité de réaliser des prélèvements après une agression, sans dépôt de plainte préalable. On me répond qu'un rapport des inspections sur le sujet est attendu d'ici la fin de l'année, et qu'il faut identifier les crédits et le circuit budgétaire de la procédure envisagée. Bref, je n'ai pas eu de réponse concrète à mes questions !
J'en profite aussi pour signaler que le colonel Nicolas Duvinage, alors chef du Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N) du Service central de renseignement criminel, que notre délégation a rencontré en janvier 2018 lors d'un déplacement au pôle judiciaire de la gendarmerie nationale à Pontoise, est désormais commandant de la gendarmerie du Finistère. Je salue son engagement dans la lutte contre les violences faites aux femmes.
Il faudrait interroger le Gouvernement sur le TGD et les bracelets électroniques. Dans mon département, le Val-d'Oise, le procureur du parquet de Pontoise et la présidente du tribunal de grande instance sont très investis dans la lutte contre les violences faites aux femmes. Ils pourraient nous aider à avancer sur le sujet du TGD et de la diffusion des bracelets électroniques, car ils sont très en pointe sur ces questions.
C'est une excellente idée. Nous pourrions organiser une visite de travail au tribunal de Pontoise. Merci à tous pour ces échanges.
J'en viens aux informations dont je souhaitais vous faire part au sujet de notre projet d'événement à l'occasion des 20 ans de la délégation. Permettez-moi tout d'abord un rappel des modalités d'organisation de cette manifestation, que nous avons arrêtées ensemble. Sa date, tout d'abord : le jeudi 10 octobre. Sa forme, ensuite : un échange de vues interactif sur les évolutions des vingt dernières années en matière de droits des femmes, plus particulièrement sous l'angle des acquis législatifs. Les participants, enfin. Nous avons souhaité associer aux membres actuels de la délégation, ses anciens membres - plus particulièrement ses anciennes présidentes -, les personnalités qui ont participé ces dernières années aux travaux de la délégation, ainsi que des invités des sénateurs et sénatrices de la délégation engagées dans la défense des droits des femmes.
Lors de notre réunion du 7 mars 2019, nous avons exprimé le souhait que cette commémoration soit prolongée par un geste fort qui marquerait, dans un registre symbolique, l'adhésion de l'ensemble de l'institution sénatoriale à l'égalité entre femmes et hommes.
Dans un premier temps, nous avons suggéré que soient inaugurées dans l'hémicycle du Sénat des plaques matérialisant les places qu'y ont occupées d'anciennes sénatrices illustres. Sans que son nom soit précisément mentionné à cette étape de notre réflexion, Dinah Derycke, première présidente de la délégation, décédée prématurément en 2002, s'est naturellement s'imposée. Une seconde proposition faite à la délégation concernait, comme je vous en ai informés lors de notre réunion du 6 juin dernier, la dénomination d'une salle de réunion du Sénat - celle où nous nous trouvons actuellement - en l'honneur de Dinah Derycke. Ces deux projets n'ont toutefois pas abouti.
Je vous propose donc, dans une démarche positive et pour que nous puissions avancer, de choisir, pour marquer la célébration de cet anniversaire, la création d'un « Prix de la délégation aux droits des femmes du Sénat ». Celui-ci pourrait d'ailleurs, si nous le décidons, être dénommé en hommage à Dinah Derycke : il s'agirait ainsi, dans cette hypothèse, du Prix Dinah Derycke de la délégation aux droits des femmes du Sénat.
Cette récompense, strictement honorifique, serait décernée à des personnalités, associations ou institutions engagées dans la défense des droits des femmes et la promotion de l'égalité entre femmes et hommes.
Ce prix pourrait être remis pour la première fois le 10 octobre 2019. Nous pourrions décider de l'attribuer tous les trois ans, dans les mois qui précèdent chaque renouvellement du Sénat. Ses titulaires seraient désignés par la délégation à partir d'une liste de personnalités et d'associations établie de préférence parmi les structures et experts ayant collaboré à nos réflexions, de sorte que chaque palmarès soit le reflet de l'orientation de nos travaux. Toutes les décisions relatives au Prix de la délégation (choix des personnalités nominées puis des lauréats, organisation de la cérémonie, etc.) seraient prises par la délégation elle-même.
À mon avis, ce prix pourrait être un vecteur de communication institutionnelle intéressant, tant pour notre délégation que pour le Sénat.
J'attire votre attention sur le fait que, si vous souscrivez aujourd'hui à la création de ce prix, dont la première cérémonie aurait lieu le 10 octobre, en même temps que la célébration de notre anniversaire, nous devrons nous réunir fin septembre pour désigner ensemble les premiers lauréats. Qu'en pensez-vous ?
J'adhère à l'idée de ce prix. Il me semble que la périodicité évoquée par notre présidente - trois ans - permettrait de conférer de la valeur à cette récompense et nous donnerait le temps de travailler entre deux promotions de lauréats.
Je trouve que cette initiative nous donnera de la visibilité et j'y suis donc favorable. Toutefois, je pense que nous ne devrions pas abandonner l'idée d'une salle dénommée d'après une sénatrice. J'en ai fait l'expérience dans mon département, le fait de donner le nom de femmes à des collèges ou à des salles a permis de réelles avancées. Certes, ce sont des gestes symboliques, mais nous savons combien les symboles peuvent être importants.
S'agissant de la salle Dinah Derycke, j'aimerais savoir pour quelles raisons cette proposition n'a pas avancé. Quant au Prix de la délégation, je trouve l'idée de notre présidente excellente et j'y adhère pleinement, sous réserve de sa périodicité. Pour moi, il faut absolument le décerner tous les ans. Voyez la Journée de l'Amérique latine : cet événement a lieu chaque année au Sénat, c'est devenu une tradition. Et le président y participe toujours. Peut-être devrions-nous, au vu de ce précédent, prévoir que le Prix de la délégation sera remis tous les ans, par exemple à l'occasion du 8 mars. Nous pourrions, par ce prix, contribuer à mettre en valeur et à honorer des personnalités et des associations porteuses de valeurs que nous partageons.
En effet, ce pourrait être structurant d'organiser ce prix chaque année. L'idée consistant à en faire notre événement du 8 mars me semble intéressante, d'autant plus que la préparation d'une telle manifestation peut, à mon avis, être relativement légère.
J'avoue ne pas bien comprendre quels motifs s'opposeraient à ce que la salle où nous nous réunissons porte le nom de la première présidente de la délégation... Pour ma part, je suis d'accord avec un prix dont la remise serait annuelle. Si nous le décernons tous les trois ans, le risque est qu'il tombe assez vite dans l'oubli. L'identité d'un tel événement se construit nécessairement avec le temps. Il y a tellement de femmes dans le monde et dans nos territoires dont nous pouvons soutenir le combat par cette récompense ! Nous ne devons pas nous interdire, à mon avis, de procéder à cette cérémonie tous les ans.
Pour en revenir à la dénomination de cette salle, nous ne devons pas oublier que les autres délégations ont vocation à s'y réunir : elle ne nous est pas réservée.
Pour autant, cela ferait peut-être du bien aux autres délégations de se réunir dans une salle portant le nom d'une femme ! Pour en revenir au prix, je soutiens l'idée d'une remise annuelle ; la date du 8 mars me semble tout-à-fait appropriée pour inscrire cet événement dans la durée.
Je partage tout ce qui a déjà été dit. Donner le nom de cette salle à la première présidente de la délégation serait un geste fort, je le soutiens. J'aimerais également savoir pour quelles raisons cette décision a été écartée. De plus, à titre personnel, cela ne m'aurait pas choqué que Dinah Derycke ait sa plaque dans l'hémicycle. Les documents photographiques exposés dans l'immeuble du 26 rue de Vaugirard nous montrent que le Sénat a compté des sénatrices qui ont marqué l'institution, et qu'il est important d'honorer. Je pense notamment à Marie-Hélène Cardot, qui fut pendant longtemps (de 1946 à 1971) élue des Ardennes.
Chers collègues, je suis d'accord avec ce qui a été dit précédemment. Je suis, moi aussi, favorable à un prix annuel. Quant à la dénomination de cette salle, je pense à tout le moins que nous devrions savoir pourquoi cette idée n'a pas abouti.
En conclusion de ces échanges, je constate donc que, au terme d'un débat constructif et animé, le principe de la création d'un « Prix de la délégation aux droits des femmes » a été adopté ce matin de manière unanime. J'observe également un consensus sur le fait que ce prix sera décerné par la délégation chaque année (d'abord le 10 octobre prochain, lors de la célébration du vingtième anniversaire de la délégation, puis les années suivantes à l'occasion du 8 mars), et que les lauréats seront choisis par la délégation parmi les personnalités et associations ayant été associées à nos divers travaux.
Nous pouvons donc passer au troisième point de l'ordre du jour, qui concerne notre programme de travail pour la prochaine session.
J'en viens au dernier point de notre ordre du jour concernant notre programme de travail pour 2019-2020. Je vous propose tout d'abord, pour cette année d'élections, les orientations générales suivantes :
- privilégier les résolutions pour avoir des débouchés en séance publique plus satisfaisants que les débats sur un rapport d'information, comme on a pu le voir avec la résolution du 14 mars 2019. On peut donc imaginer d'autres résolutions, par exemple sur les femmes handicapées, qui constituent un angle mort des politiques publiques (vers le 25 novembre) ou sur la fin de la Présidence française du G7 (janvier 2020).
Nous pourrions aussi, le cas échéant, envisager une Résolution sur les femmes dans les guerres, qui pourrait s'appuyer sur le 27 mai 2020, Journée nationale de la Résistance, ou sur le 75e anniversaire de la libération des camps de concentration, en avril 2020. Cette résolution permettrait de conclure nos réflexions sur les viols de guerre et de prolonger de précédents travaux de la délégation sur les femmes dans la Résistance.
- Éviter de programmer une étude thématique au champ très vaste, qui nous occuperait toute l'année, pour essayer de réagir davantage à l'actualité, notamment législative, dans un contexte où beaucoup d'entre nous seront mobilisés par les échéances électorales ;
- avoir recours, face aux textes législatifs, à des formats légers et des rapports plus courts, comme cela a été le cas en 2016 pour la proposition de loi sur le délit d'entrave numérique à l'IVG.
Trois séquences me paraissent par ailleurs s'imposer en raison de l'actualité législative :
- sur la PMA, en privilégiant l'audition d'experts (sociologues, psychanalystes, médecins...), probablement sous la forme d'une table ronde ;
- sur les retraites ;
- sur le projet de loi d'orientation et de programmation de l'aide publique au développement dont les intervenants de la table ronde du 20 juin sur le G7 nous ont parlé.
Parmi les autres réunions et auditions à prévoir prochainement, il y a d'ores et déjà quelques pistes :
- Brigitte Grésy, récemment nommée présidente du Haut conseil à l'égalité (HCE) ;
- une audition budgétaire, pour laquelle il me paraît souhaitable de solliciter la ministre, afin de faire le point sur les moyens dédiés aux associations ;
- l'audition de la cheffe du Service des droits des femmes pour parler du réseau des déléguées aux droits des femmes.
Il nous faut aussi prévoir un programme spécifique pour la journée du 25 novembre dédiée aux violences. Je suggèrerais pour ma part une table ronde sur les violences faites aux femmes dans les conflits, dans la continuité de la table ronde du 20 juin sur le G7. Cette réunion pourrait avoir lieu le jeudi 14 ou le 28 novembre 2019. La résolution sur les femmes handicapées et la suite des auditions Virage Dom (Guadeloupe - Martinique) pourrait également s'inscrire dans une partie de notre programme consacré aux violences.
Nous avons par ailleurs été approchés par l'Union des entreprises de proximité, qui souhaite présenter une étude réalisée en collaboration avec l'Institut Supérieur des Métiers sur la place des femmes dans les entreprises de proximité. Cela me paraît rejoindre les préoccupations déjà exprimées par Marie-Pierre Monier.
De plus, Laure Darcos a suggéré de travailler sur le thème « femmes et sciences ». Ce sujet ayant donné lieu à un rapport de la délégation aux droits des femmes de l'Assemblée nationale et à une réunion l'an dernier, à l'Assemblée, des deux délégations et de l'Office d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, il me paraît plus intéressant d'envisager une visite des organismes de recherche de l'Essonne.
Nous devrions aussi, à mon avis, programmer une table ronde sur la Conférence mondiale de l'ONU sur les femmes, programmée à Paris en juillet 2020 dans le cadre des suites de la Conférence de Pékin de 1995. Peut-être à l'occasion du 8 mars ?
Qu'en pensez-vous ?
Je voudrais ajouter une information : je suis depuis plusieurs années la marraine d'événements organisés au Sénat par l'ONG Action Santé Femmes. En 2019, leur colloque aura lieu le lundi 16 septembre, sur le thème des femmes dans les conflits armés, dans le cadre de la Journée Internationale de la Paix célébrée le 21septembre. Le prix Nobel de la paix Denis Mukwege a été sollicité. Vous êtes tous invités à assister à ce colloque.
Les propositions faites sur les tables rondes me paraissent très intéressantes, notamment sur la PMA qui s'inscrit dans le thème de la bioéthique. Il y a quelques semaines, les ministres de la Santé et de la Justice ont organisé plusieurs colloques sur les lois de bioéthique, auxquels les sénateurs ont été invités. C'était passionnant. Ces réunions nous ont permis de recueillir des informations objectives de la part des deux ministères et de nous faire notre propre idée sur le sujet, sans tomber dans les postures politiques.
Je trouve que les retraites représentent un sujet très important, et l'on sous-estime souvent l'impact des différentes réformes sur les femmes, dont une majorité vit sous le seuil de pauvreté.
La délégation a déjà fait un travail autour des femmes et de la santé, mais j'ai l'impression que nous pouvons aller plus loin sur ce thème, notamment sur la question de la recherche, encore insuffisante, et sur un certain nombre de maladies qui touchent plus particulièrement les femmes. Nous pourrions auditionner Agnès Buzyn à cette occasion.
Enfin, je suis particulièrement alertée sur la prostitution des mineures. Il y a une grande inquiétude dans les départements ; serait-il possible de travailler sur ce sujet ? Je suis consciente que cela représente beaucoup de thèmes de travail pour une année, mais il me semble que cette question s'inscrit dans la continuité de nos travaux et qu'il serait intéressant d'aller plus loin.
Merci pour ces suggestions. Travailler sur la prostitution des mineures est une bonne idée. Nous avons constaté au moment de la QPC déposée sur la loi de 2016 que la prostitution restait un vrai sujet de débat. Nous allons voir comment intégrer ces propositions dans le calendrier.
À propos de la PMA, il faut bien entendu auditionner des experts pour fonder notre avis. Toutefois, il me semblerait également intéressant de recueillir des témoignages de personnes ayant eu recours à la PMA, que ce soit positif ou négatif. Nous voterons cette loi en notre âme et conscience, à partir de notre intime conviction. C'est pourquoi il ne serait pas inutile d'entendre ces personnes, leurs motivations et leurs expériences.
Je suis tout à fait favorable au fait de poursuivre les travaux sur les retraites. Je suggère de prendre en compte la situation des femmes françaises qui travaillent pour des institutions de notre pays à l'étranger et qui, arrivées à l'âge de la retraite, se retrouvent face à des difficultés, car ces organismes ne sont pas toujours des employeurs exemplaires. On pourrait par exemple entendre les associations locales qui travaillent sur le sujet.
Je voudrais savoir qui est en charge de la sélection des expositions sur les grilles du jardin du Luxembourg, car la délégation pourrait éventuellement y organiser une exposition avec des portraits de femmes. Lorsque j'étais maire, je l'ai beaucoup fait, notamment dans des quartiers où les femmes sont peu visibles dans l'espace public, afin de les mettre en lumière. Je trouve que ce genre d'initiative marque et interpelle les gens en montrant toute la richesse et la diversité des femmes.
Vous le savez, je suis très attachée à l'égalité femmes-hommes, à la mixité et à l'universalisme. Sans que cela débouche forcément sur un rapport, nous pourrions organiser une matinée de réflexion sur la question du respect de l'article 50 de la Charte olympique relatif à l'absence de tout signe d'appartenance religieuse ou politique chez les sportifs, dans le cadre des Jeux Olympiques (JO) de 2024. J'ai pensé que la délégation pourrait rencontrer les femmes engagées dans cette cause ainsi que, peut-être, des sportifs, pour réfléchir à cette question délicate.
Merci pour ces propositions. C'est la vice-présidente Hélène Conway-Mouret qui est en charge de la politique événementielle du Sénat, et donc de la sélection des expositions sur les grilles du jardin du Luxembourg. En tant qu'ancienne membre de la délégation, elle sera sans doute à l'écoute de nos propositions. Nous pourrions, dans un premier temps, la solliciter afin de mieux comprendre la procédure de sélection inhérente à ce type d'expositions.
Je note également l'idée d'une réunion sur les JO et l'article 50 de la Charte olympique, bien que nous ayons déjà auditionné l'association de référence sur ce sujet en 2016, dans le cadre du rapport de Chantal Jouanno sur le thème « Femmes et laïcité ».
Pour avoir soutenu l'une des expositions ayant orné les grilles du jardin du Luxembourg, je peux témoigner que l'organisation de ce type d'événement est un long parcours du combattant. Il faut être conscient que ce type de projet demande de déployer une grande énergie.
Sur l'universalisme, je porte évidemment le sujet depuis de nombreuses années et je pense qu'il serait intéressant d'en discuter entre nous. Ce n'est pas seulement une question « religieuse », c'est aussi un sujet politique et syndical.
En ce qui concerne la prostitution des mineurs, j'alerte sur cette question depuis 2008, alors que le problème avait émergé dans le cadre de l'examen d'un texte sur l'enseignement supérieur. Certains de nos collègues l'avaient découvert à cette occasion et s'en étaient émus.
Je soutiens bien sûr l'idée de travailler sur les retraites et de prolonger nos travaux sur le thème « femmes et santé », ayant été co-rapporteure, avec Annick Billon, d'un rapport de la délégation en 2014-2015, qui explorait déjà ces aspects.
Le Haut conseil à l'égalité (HCE) a été récemment renouvelé et je suis heureuse d'en être membre au titre du Sénat. Faisant partie de la commission sur la santé, les droits sexuels et reproductifs, je me demande si je peux lui soumettre des idées de travail pour éviter les doublons avec notre délégation.
Durant le dernier mandat du HCE, j'étais la suppléante de Roland Courteau et j'ai pu apprécier l'intérêt des réunions de cette instance.
En ce qui concerne la bioéthique et la PMA, nous pourrions nous tourner du côté du Comité consultatif national d'éthique (CCNE), dont j'ai été membre, et qui a rendu un remarquable avis sur la révision des lois bioéthique, qui a nécessité de longs mois de travail.
Les personnalités entendues dans le cadre de ce rapport étaient d'éminents experts qui ont permis de prendre de la hauteur sur ces problématiques très complexes.
Sur la santé des femmes, nous remarquons que de plus en plus de femmes sont touchées par les cancers, notamment le cancer du poumon qui concerne désormais tant les hommes que les femmes, en lien probablement avec le tabagisme des jeunes. Cette évolution est malheureuse et pourrait faire l'objet d'une réflexion de notre part.
La prostitution des mineures constitue, je vous rejoins, un sujet de préoccupation croissante.
Une étude sur l'application de la loi de 2016 me paraît nécessaire. C'est une démarche à laquelle doit participer notre délégation.
Il me semble important de marquer le coup des suites de la conférence de Pékin. L'idée de prévoir un événement à ce sujet pour le 8 mars est donc très pertinente !
Enfin, dans la mesure du possible, je souhaiterais que nous puissions également travailler sur les familles monoparentales. Nous savons bien que les cheffes de ces familles sont très majoritairement des femmes. Comment ces dernières sont-elles prises en compte dans les politiques publiques, qu'il s'agisse de l'accueil des enfants, du pouvoir d'achat, de l'emploi ou de la retraite ? Souvenons-nous que ces femmes étaient présentes en nombre sur les ronds-points au début du mouvement des gilets jaunes.
Je souhaiterais axer la table ronde sur la PMA sur l'expertise, mais je n'exclue pas la possibilité d'auditionner, par la suite, des personnes qui vivent ou ont vécu ces situations. Nous pourrions par exemple auditionner l'association BAMP.
Tout a été dit, je voudrais simplement rajouter un point sur les violences faites aux femmes, et notamment le sujet préoccupant des féminicides, dont nous entendons beaucoup parler en ce moment. Ce sont 76 femmes qui ont été assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint depuis le 1er janvier 2019, mais je ne suis pas convaincu que l'accueil des victimes par la police et la gendarmerie soit à la mesure des enjeux, malgré le nombre de rapports réalisés par la délégation au sujet des violences.
Comme je le rappelais au début de notre réunion, le Sénat s'est mobilisé la semaine dernière par la publication d'une tribune dans Libération qui a eu un large écho médiatique.
Je vous remercie pour tous ces échanges et je vous donne rendez-vous la semaine du 23 septembre pour finaliser le prix de la délégation. D'ici là, le secrétariat de la délégation vous enverra la liste des associations et personnalités auditionnées ces dernières années afin de guider nos choix. Je vous souhaite à tous et toutes un très bel été.