Séance en hémicycle du 12 mai 2015 à 9h30

Sommaire

La séance

Source

La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

M. le Premier ministre a demandé à M. le président du Sénat de lui faire connaître le nom d’un sénateur pour siéger comme membre suppléant au sein du Conseil national de la mer et des littoraux.

Conformément à l’article 9 du règlement du Sénat, la commission des lois a été saisie. La nomination au sein de cet organisme extraparlementaire aura lieu ultérieurement, dans les conditions prévues par ce même article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions orales.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Corinne Imbert, auteur de la question n° 1047, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Madame la secrétaire d’État, je souhaite attirer votre attention sur les incertitudes et les conséquences liées au projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement en ce qui concerne les personnes handicapées vieillissantes, notamment dans le département de la Charente-Maritime, considérant que la notion de limite d’âge, à savoir soixante ans, dans les structures pour adultes handicapés est assez floue.

En effet, d’une part, la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées tend à confirmer leurs droits et leur statut, quel que soit leur âge, en favorisant leur maintien dans les établissements pour personnes handicapées.

Il existe de fortes pressions de la part des familles, inquiètes de leur avenir, pressions qui s’exercent essentiellement sur les gestionnaires souhaitant aussi conserver un effet de filière associative.

Par ailleurs, ce même texte ou les décrets afférents, codifiés au sein du code de l’action sociale et des familles, semblent limiter le rôle de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées à l’âge de soixante ans, puisque les textes concernant les personnes handicapées de plus de soixante ans en établissements font référence non plus à la notion d’orientation, mais au fait de statuer sur leur accompagnement.

Dès lors, on peut se demander s’il faut voir là une limite d’âge de fait dans le rôle des établissements pour adultes, qui ne devraient plus alors accueillir de personnes handicapées à partir de soixante ans. Madame la secrétaire d’État, quelle interprétation faut-il faire de cette contradiction ?

En Charente-Maritime, le schéma départemental en faveur des personnes adultes handicapées pour la période 2013-2017 traite de cette problématique, et ce dans un contexte financier très contraint. Le département a, malgré tout, souhaité structurer la fluidité des parcours de vie, autrement dit organiser l’accueil des personnes handicapées vieillissantes dans des structures pour personnes âgées, avec un projet adapté, sous des formes multiples, afin de permettre l’accueil des plus jeunes, notamment ceux qui sont maintenus en établissements pour enfants et adolescents handicapés au titre de l’amendement « Creton », en profitant des places libérées dans les établissements pour adultes.

Aussi y a-t-il lieu, madame la secrétaire d’État, de s’interroger sur la manière dont le projet de loi relatif à l’adaptation de la société au vieillissement traite de la situation des personnes handicapées vieillissantes, ainsi que sur la façon dont ce texte organise le décloisonnement entre deux secteurs de prise en charge, à savoir celui des personnes âgées et celui des personnes handicapées.

On peut également se demander si le projet de loi prévoit ou non de fixer une limite d’âge aux structures du handicap pour préserver le projet initial de ces structures, qui est aussi d’accompagner les jeunes adultes.

Enfin, comment ne pas aborder la question de l’équité quand des personnes handicapées vieillissantes, qui n’ont pas pu travailler au cours de leur vie, sont hébergées en foyer occupationnel, en foyer d’accueil médicalisé, alors que cette limite d’âge et de prise en charge est clairement fixée pour des travailleurs handicapés qui ont atteint l’âge de la retraite et qui ne sont alors plus accueillis en établissements ou services d’aide par le travail, ni même en foyer d’hébergement ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Madame la sénatrice, vous faites référence au projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement. À ce sujet, je voudrais d’abord redire que ce texte ambitieux et très attendu par nos concitoyens sera définitivement voté avant la fin de l’année, pour une pleine et entière entrée en vigueur au 1er janvier 2016.

Je profite également de l’occasion qui m’est donnée d’être ici, au Sénat, pour me féliciter encore de la qualité des débats parlementaires et du vote de la Haute Assemblée sur ce projet de loi, le 19 mars dernier, sans qu’aucune voix s’y oppose.

J’en reviens à vos interrogations, madame la sénatrice, quant à la portée du texte sur le champ du handicap, et plus particulièrement sur les personnes handicapées vieillissantes.

Ce public, qui se situe au croisement des dispositifs « handicap » et « personnes âgées », demande en effet une attention particulière. Je m’efforce d’y répondre, en lien étroit avec ma collègue Ségolène Neuville.

Nous avons notamment accéléré la publication, en mars 2015, par l’Agence nationale de l’évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux, l’ANESM, d’une recommandation relative à l’adaptation de l’intervention auprès des personnes handicapées vieillissantes.

Au cœur du projet de loi d’adaptation de la société au vieillissement, la recherche de complémentarité et de cohérence entre les deux publics est constante, notamment avec la mise en place, au niveau local, des CDCA, les conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie, qui favoriseront l’approche globale des deux groupes de population.

De même, le texte apporte des garanties concernant les maisons départementales des personnes handicapées, les MDPH, au travers de l’encadrement législatif des maisons départementales de l’autonomie, les MDA.

Sur la délicate question des barrières d’âge que vous soulevez, le Gouvernement a soutenu l’introduction d’un article 30 bis prévoyant la remise d’un rapport au Parlement sur l’incidence des seuils de soixante ans et soixante-quinze ans pour l’attribution des prestations. Ce rapport, qui devra être remis dans les six mois suivant la promulgation de la loi, nous permettra de pallier le manque d’indicateurs budgétaires sur l’effet de telles mesures.

Enfin, sur le plan financier, j’ai souhaité que les mesures d’anticipation de la loi, prises dès cette année à hauteur de 83 millions d’euros sur la CASA, la contribution additionnelle de solidarité pour l'autonomie, aient également une incidence positive sur le secteur du handicap. Je citerai notamment l’abondement du fonds de compensation du handicap, la revalorisation des salaires des aides à domicile, le soutien au programme d’adaptation des logements privés à la perte d’autonomie ou encore le plan pluriannuel d’aide à l’investissement pour les établissements pour personnes âgées et personnes handicapées.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de cette réponse. Comme vous l’avez dit, il s’agit d’une question délicate, qui n’est pas simple à régler.

Nous nous heurtons, dans les départements, à cette limite d’âge, car il ne faut pas oublier qu’un réel problème se pose également avec les jeunes adultes handicapés maintenus dans les établissements pour enfants.

Dans le département de la Charente-Maritime, nous avons travaillé, en concertation avec les établissements, pour réorganiser le secteur à moyens constants, en créant de nouvelles places et en en fermant d’autres qui n’étaient pas occupées, pour permettre la fluidité du parcours que nous appelons de nos vœux.

J’espère que nous pourrons avancer sur cette question technique et délicate de l’approche globale, afin que les choses soient clairement définies, ce qui aidera nos services, lesquels travaillent de façon très étroite avec les établissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Franck Montaugé, auteur de la question n° 1060, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

J’ai souhaité attirer l’attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et du droit des femmes sur les modalités dérogatoires de financement des établissements publics de santé isolés géographiquement et situés dans des zones à faible densité de population, introduites par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014.

La circulaire n° DGOS-R1-2014-366 du 29 décembre 2014 relative à la campagne tarifaire 2014 des établissements de santé précisait, en son annexe V, les modalités de financement des activités isolées en indiquant ceci : « La LFSS pour 2014 a introduit une disposition relative au financement des activités isolées. Elle vise à corriger les limites du modèle actuel de financement des établissements de santé reconnus comme étant géographiquement isolés. »

Elle poursuivait : « Un décret d’application précisant les critères d’isolement géographique, la procédure de sélection des établissements éligibles et les modalités de financement est en cours d’examen par le Conseil d’État. Les établissements qui bénéficient de ce financement pour 2014, pour un montant total de 19, 3 millions d’euros, répondent aux critères d’éligibilité décrits dans le projet de décret en Conseil d’État. Les directions générales des ARS ont été consultées et se sont prononcées sur les critères, et sur la liste des établissements ».

Dans le cadre de ce décret d’application et des critères régissant l’éligibilité des établissements de santé à ce régime dérogatoire de financement, je vous demande de bien vouloir nous indiquer dans quelle mesure certains établissements, notamment le centre hospitalier public d’Auch, en Gascogne, à la lumière de leur caractère singulier, pourraient bénéficier de financements complémentaires ?

En effet, malgré un écart entre le niveau d’activité, parfois insuffisant, d’un site et les seuils économiques théoriques des référentiels, le maintien de financements doit permettre de garantir un accès équitable aux soins à l’ensemble de la population en rendant possible la conservation, dans les territoires faiblement dotés, d’une offre de soins, dont la qualité ne doit pas dépendre uniquement du volume d’activité.

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d'État

Monsieur le sénateur, vous l’avez dit, la disposition de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 relative au financement des activités isolées vise à corriger l’inadaptation du modèle actuel de financement des établissements de santé reconnus comme étant géographiquement isolés.

Ces établissements ont bien souvent un volume d’activité insuffisant pour garantir un niveau de financement permettant d’équilibrer leur budget de fonctionnement. Pourtant, leur maintien est indispensable pour répondre aux besoins de santé de la population locale.

L’adaptation consiste donc à mettre en place un financement complémentaire à la tarification à l’activité pour les activités concernées par cette situation d’isolement géographique.

Les critères d’éligibilité, en particulier l’isolement géographique, ont été précisés par décret en date du 17 février 2015.

L’établissement d’Auch, s’il présente une singularité dans l’offre de soins, ne répond cependant pas à l’ensemble des critères permettant de bénéficier d’une aide nationale.

Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes a cependant demandé à l’agence régionale de santé de suivre avec une attention particulière la situation de cet établissement, en particulier s’agissant du renforcement de ses activités et de leur articulation dans l’offre de soins du territoire.

Tout comme vous, Mme la ministre est particulièrement vigilante sur le rôle que jouent les établissements comme celui d’Auch pour garantir une offre de soins accessible à tous et de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Montaugé

Je remercie Mme la secrétaire d’État de sa réponse. Je saisis cette occasion pour réaffirmer la nécessité de prendre en compte les équipements sanitaires publics des territoires ruraux, en particulier quand ces territoires se situent dans l’orbite de métropoles largement pourvues en équipements sanitaires, comme il se doit. Il faut cependant veiller à ce que tous les moyens sanitaires ne soient pas concentrés dans ces métropoles. Or les intentions du Gouvernement et les dispositions qui ont été annoncées vont en ce sens, ce que je tenais à saluer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Françoise Cartron, auteur de la question n° 1055, adressée à Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la malformation de Chiari est une maladie rare, orpheline, qui consiste en un déplacement vers le bas de la portion caudale du cervelet. La syringomyélie est également une maladie rare et orpheline qui creuse des cavités dans la moelle épinière ; elle est très douloureuse et extrêmement handicapante. Ces deux maladies sont souvent associées. Dans leurs types les plus graves, les symptômes sont particulièrement handicapants : une mauvaise circulation du liquide céphalo-rachidien provoque une hypertension intracrânienne, des retards psychomoteurs ou même la paralysie complète, et, parfois, une mort subite.

Actuellement, les patients souffrant de ces pathologies se voient proposer, en France, des traitements médicamenteux palliatifs de la douleur, ainsi que la craniectomie, opération lourde et risquée dite de « décompression ». Il s’avère que ces deux réponses, si elles peuvent soulager temporairement le patient, ne permettent pas de bloquer l’évolution de la maladie.

Dans le même temps, l’Espagne autorise depuis de nombreuses années un acte chirurgical qui consiste à sectionner le filum terminale extradural. Un institut spécialisé dans cette pathologie existe à Barcelone. Je ne suis pas spécialiste, mais l’opération se révèle à la fois moins onéreuse, moins invasive et plus efficace, si l’on en croit les témoignages des malades. Cette technique semble permettre un soulagement définitif et arrêter l’évolution de la maladie. L’intervention permet, dans la plupart des cas, de recouvrer une activité normale quelques semaines, voire quelques mois, après l’opération.

Il semble que cette intervention ne soit pas automatiquement remboursée par les caisses d’assurance maladie françaises et reste, par conséquent, à la charge des patients et de leur famille. Si, dans certains départements, des familles ont bénéficié d’un remboursement, tel n’est pas le cas sur tout le territoire. Est-il possible, madame la secrétaire d’État, d’envisager une prise en charge complète de cette intervention par la sécurité sociale, quelle que soit la région de rattachement du patient ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie

Madame la sénatrice, comme vous l’avez indiqué, la maladie d’Arnold-Chiari est une malformation congénitale du cervelet. Cette maladie rare peut provoquer une hypertension intracrânienne ou certains troubles neurologiques.

Une proportion importante de cas de malformation de Chiari de type 1, l’une des formes de cette maladie, conduit le malade à développer des lésions de la moelle épinière et, par conséquent, des symptômes tels que des troubles de la motricité ou de la sensibilité des membres supérieurs et inférieurs, pouvant aller jusqu’à la paralysie complète.

L’opération la plus courante est aujourd’hui la craniectomie, ou craniotomie. Quelques équipes neurochirurgicales proposent la section du filum terminale extradural. Cette opération, pratiquée en particulier en Espagne, est très controversée.

La prise en charge par l’assurance maladie des interventions chirurgicales programmées dans les pays de l’Union européenne est subordonnée, par la loi, à une autorisation préalable du service médical de l’assurance maladie. Cette autorisation peut être refusée, selon les termes mêmes de la loi, si « les soins envisagés ne figurent pas parmi les soins dont la prise en charge est prévue par la réglementation française », ce qui est le cas de l’intervention chirurgicale pratiquée par certains chirurgiens étrangers pour traiter la syringomyélie.

En effet, la littérature médicale scientifique ne permet pas aujourd’hui de se prononcer sur l’efficacité de ce traitement. Cependant, la France dispose, parmi ses centres de référence pour les maladies rares, d’un centre de référence des syringomyélies, l’hôpital de Bicêtre, qui relève de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris. Ce centre a mis en place un protocole de recherche sur l’utilité de l’intervention chirurgicale pour le traitement des syringomyélies à l’exclusion des indications habituelles, afin d’établir d’une façon rigoureuse et scientifique la pertinence de cette intervention chirurgicale.

À l’issue de cet essai, si les résultats sont probants, une saisine de la Haute Autorité de santé pourra être effectuée par la société savante de neurochirurgie, afin d’inscrire cet acte à la classification commune des actes médicaux en vue de sa prise en charge par l’assurance maladie. Il est donc nécessaire de poursuivre l’évaluation en cours de l’efficacité de ce traitement avant de lancer les travaux avec la Haute Autorité de santé pour permettre, à terme, une prise en charge par l’assurance maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Je suis ravie que les spécialistes se penchent aujourd’hui sur cette question douloureuse. Reste le problème de l’inégalité face au remboursement : lorsque des patients intentent des recours, ils obtiennent le remboursement dans certains départements seulement. J’espère que les conclusions des études en cours permettront, dans un bref délai, d’accorder un remboursement à tous les patients atteints de cette maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Joëlle Garriaud-Maylam, auteur de la question n° 1057, adressée à M. le ministre de l’intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question s’adressait effectivement à M. le ministre de l’intérieur, mais je ne doute pas que Mme la secrétaire d’État saura me répondre. Cette question porte sur les difficultés rencontrées par les Français de l’étranger égarant ou se faisant voler un permis de conduire et qui, faute de résidence en France, sont trop souvent contraints de repasser l’examen.

Lors des récents débats au Sénat sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, le ministre Emmanuel Macron a indiqué que le décret d’application allait enfin paraître cet été, répondant ainsi indirectement à ma question écrite de février 2014 portant sur ce sujet et restée sans réponse à ce jour. Il a mentionné le fait que certaines conclusions juridiques nécessaires à la rédaction définitive du décret étaient attendues pour le mois d’avril. Pourriez-vous nous informer de leur teneur, madame la secrétaire d’État ?

Par ailleurs, le Sénat a voté un amendement des sénateurs représentant les Français de l’étranger visant à donner aux consulats des compétences proches de celles des préfectures en matière de délivrance de duplicatas du permis, permettant ainsi d’inscrire ce principe dans la loi. Nous espérons donc que l’Assemblée nationale conservera cette mesure. Quel que soit le sort de cet amendement, il me semble essentiel de veiller à ce que les décrets d’application couvrent bien l’intégralité des questions posées dans la résolution de l’Assemblée des Français de l’étranger de mars 2015, dont le champ est nettement plus large que l’amendement voté au Sénat.

Cette résolution demandait au Gouvernement de permettre aux postes consulaires de délivrer des duplicatas de permis de conduire en cas de vol ou de perte et des permis de conduire internationaux ; d’habiliter les consulats à délivrer le relevé d’information restreint ; de simplifier la procédure de « rétablissement des droits à conduire » pour les Français qui ont été titulaires d’un permis de conduire français et qui reviennent en France ; de tenir l’assemblée des Français de l’étranger informée des négociations bilatérales menées par la France en matière d'échanges et de reconnaissance des permis de conduire ; de veiller à la bonne information des expatriés par la publication d’un fascicule d’information et la mise à jour du site internet du ministère des affaires étrangères sur ces questions ; enfin, de négocier avec nos partenaires européens pour que la réussite à l’examen du code de la route soit reconnue en Europe.

Madame la secrétaire d’État, pourriez-vous prendre, au nom du Gouvernement, l’engagement que le ou les décrets d’application couvriront bien l’ensemble de ces points ?

Debut de section - Permalien
Laurence Rossignol, secrétaire d’État auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, des personnes âgées et de l’autonomie

Madame la sénatrice Joëlle Garriaud-Maylam, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence du M. le ministre de l’intérieur.

La situation des Français établis à l’étranger, qui ont perdu ou se sont fait voler leur permis de conduire français, est examinée avec attention par le Gouvernement. Cette question a, comme vous l’avez rappelé, fait l’objet d’un amendement parlementaire adopté à l’unanimité par le Sénat le 10 avril dernier, lors de l’examen du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

Cet amendement ouvre la possibilité pour les Français résidant à l’étranger de se voir délivrer un permis de conduire par les consulats, qu’ils aient ou non conservé un lien résidentiel avec la France. La conformité de cet amendement avec la directive européenne du 20 décembre 2006 relative au permis de conduire n’est cependant pas totalement certaine.

Ainsi, cette directive subordonne, dans ses articles 7 et 12, la possibilité pour un conducteur de solliciter un permis de conduire auprès d’un État à la condition qu’il ait fixé sa résidence normale sur le territoire de cet État, autrement dit qu’il y réside habituellement plus de 185 jours par an. Aussi, la demande d’un permis de conduire français ne semble pouvoir être ouverte qu’aux ressortissants français ayant conservé leur résidence normale en France.

Bien sûr, le Gouvernement est pleinement conscient du facteur d’intégration important que constitue la possibilité de conduire un véhicule à l’étranger. C’est la raison pour laquelle il présentera au Conseil d’État, dans les prochaines semaines, devançant ainsi l’adoption de la loi précitée et de ses décrets d’application, un projet de décret modifiant l’article R. 225-2 du code de la route afin de permettre notamment aux conducteurs titulaires d’un permis français qui y sont autorisés par la réglementation européenne de demander le renouvellement de leur titre perdu, volé ou détérioré auprès du poste consulaire dont ils dépendent. Après avoir vérifié leur identité, ce poste transmettra, par la valise diplomatique, la demande à la préfecture chargée de l’instruction. Le Gouvernement proposera en conséquence un amendement au projet de loi précité pour fiabiliser ce dispositif juridique.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Je remercie Mme la secrétaire d’État de cette réponse. Je souhaite simplement souligner le problème posé par la procédure des questions écrites et des questions orales. Ma question écrite, posée en février 2014, n’avait toujours pas reçu de réponse après quinze mois. En l’espèce, l’amendement que nous avions déposé nous a permis d’obtenir une réponse. Je pense cependant que, si le Gouvernement faisait un effort pour répondre plus rapidement à nos questions écrites, nous y gagnerions tous.

En ce qui concerne ma question, il reste du travail à faire. Un certain nombre de problèmes avaient été évoqués par les Français de l’étranger, car ils sont très importants pour leur manière de vivre, de travailler et de se déplacer en Europe, et la réponse que vous nous avez donnée, madame la secrétaire d’État, n’est pas totalement satisfaisante.

Il faut évidemment examiner la conformité de la solution juridique proposée par le Gouvernement à la directive européenne. Je souhaite toutefois attirer votre attention sur le fait que les Français expatriés, même s’ils n’ont pas une résidence habituelle en France, se rendent régulièrement dans notre pays. Il est donc très important de faire vivre cette double citoyenneté en leur permettant de vivre, de conduire, et d’avoir accès à une représentation administrative non seulement dans leur pays de résidence, mais également en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Sylvie Robert, auteur de la question n° 1081, adressée à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’orée de ce millénaire, la France remportait successivement la Coupe du monde et le Championnat d’Europe de football. Les clubs de l’élite se montraient particulièrement compétitifs sur la scène européenne, attirant de nombreux joueurs du gotha international, conséquence partielle de l’arrêt Bosman rendu par la Cour de justice des Communautés européennes en 1995.

Aujourd’hui, la situation des clubs professionnels français est nettement plus contrastée. Pour la plupart, les marges de manœuvre budgétaires se sont considérablement réduites, influant directement sur les résultats sportifs. Pour preuve, en dix ans, la France a perdu deux places à l’indice UEFA, passant de la quatrième à la sixième place.

Si la diminution des ressources financières a pu avoir des externalités positives, favorisant l’émergence de nouvelles politiques de développement axées sur la formation, par exemple, il n’en demeure pas moins vrai que, dans leur ensemble, les clubs professionnels ont perdu en compétitivité à l’échelle européenne.

Ce phénomène s’explique, dans une certaine mesure, par le décrochage croissant observé en matière de droits de retransmission audiovisuelle entre le championnat français et la majorité des principaux championnats européens, en particulier le championnat anglais. De 607 millions d’euros actuellement pour la Ligue 1, ils seront de 748, 5 millions d’euros pour la période 2016-2020. Ils atteindront 945 millions d’euros pour la série A en Italie et culmineront à près de 7 milliards d’euros pour la Premier League anglaise de football, pour les saisons de 2016 à 2019. En d’autres termes, à partir de 2016, les droits de retransmission télévisée, qui constituent un peu plus de la moitié du chiffre d’affaires des clubs européens en moyenne, seront dix fois plus importants en Angleterre qu’en France.

Or, l’écart est d’ores et déjà abyssal puisque le dernier de la Premier League perçoit pratiquement deux fois plus que le premier de la Ligue 1. Avec l’entrée en vigueur des nouveaux contrats, le risque est donc que le décrochage entre les clubs européens et anglais ne s’accentue au point de porter éventuellement préjudice à l’intérêt sportif des compétitions européennes.

C’est pourquoi, dans le cadre du « fair-play financier », règle de bonne gestion financière soutenue par la Commission européenne et mise en œuvre à partir de la saison 2011-2012 au titre de l’équité sportive, une réflexion pourrait être conduite avec l’Union des associations européennes de football, l’UEFA, afin d’encadrer et d’harmoniser les règles relatives aux droits de retransmission audiovisuelle du football. S’il ne saurait bien sûr être question de porter atteinte à la libre concurrence sur le plan économique, il s’agit de renforcer la concurrence sur le plan sportif.

Je souhaite par conséquent connaître la position du Gouvernement quant à cette initiative. De plus, quelles mesures sont-elles préconisées pour développer l’attractivité du championnat français et des clubs professionnels, lequel a une incidence mécanique sur les droits de retransmission télévisée ?

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports

M. Thierry Braillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports. Madame la sénatrice, je dois relever une omission dans votre question. En citant les grandes victoires françaises, vous avez oublié 1993 et la victoire en ligue des champions de l’Olympique de Marseille, seul club français à avoir gagné cette compétition. Je me devais, devant le président Jean-Claude Gaudin, de relever cette légère erreur !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

M. le président. Vous êtes déjà pardonnée, ma chère collègue !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État

Vous appelez mon attention sur l’écart croissant des droits de retransmission audiovisuelle du football entre les principaux championnats européens et la Premier League anglaise, conséquence du contrat assez faramineux que cette dernière vient de signer. Cette situation, qui est préoccupante – vous l’avez très bien exprimé – pose la question de l’équité dans une compétition entre des clubs qui n’auront pas la même position sur la ligne de départ.

Je rappelle tout d’abord que la solution à ce problème ne peut être réglementaire quand bien même cette réglementation serait européenne. En effet, si la Commission européenne est intervenue à plusieurs reprises à titre préventif sur la vente des droits d’exploitation audiovisuelle dans le sport, c’est essentiellement pour s’assurer de la portée concurrentielle de ces transactions. Il paraît donc difficile qu’elle puisse intervenir afin de limiter la marge de manœuvre des titulaires des droits en matière de fixation des prix.

De plus, une telle intervention serait considérée comme une entrave à la concurrence. En effet, l’acquisition des droits télévisuels est étroitement liée aux marchés de la télévision en aval. Si la Ligue 1 française a pu multiplier par six depuis 1998 ses droits de diffusion, c’est en grande partie par le jeu de la concurrence entre acteurs télévisuels, notamment par l’émergence d’un nouvel acteur sur ce marché, la chaîne beIN SPORTS.

Les solutions sont donc à rechercher ailleurs. Comme vous le suggérez, c’est au sein de l’UEFA que pourrait être menée une réflexion en vue de permettre une meilleure mutualisation des produits issus de la vente des droits télévisuels des compétitions de clubs organisées par l’UEFA, produits qui se sont élevés, au titre de l’année 2013-2014, à près de 1, 347 milliard d’euros. Ce serait un élément tout à fait intéressant du « fair-play financier » que de contrebalancer certaines inégalités territoriales.

En ce qui concerne la Ligue 1, la première condition à la fois de l’augmentation des droits télévisés et de la diversification des ressources du football professionnel est l’amélioration de son attractivité. En effet, il ne suffit pas d’être compétitif, encore faut-il être attractif.

Ainsi, dans la loi de finances pour 2015, le Parlement, sur proposition du Gouvernement, a substitué à la taxe sur les spectacles, qui nuisait à la compétitivité du sport professionnel, une TVA à taux réduit. De même, certaines contraintes pesant sur l’affichage publicitaire dans les enceintes sportives sont en train d’être levées dans le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.

J’ajoute que les différentes mesures fiscales engagées par le Gouvernement pour renforcer la compétitivité de nos entreprises bénéficient également aux clubs professionnels.

Ce travail doit être poursuivi. Je sais que la Ligue nationale de football professionnel travaille sur cette question. Je vais d’ailleurs vous faire une confidence, j’ai moi-même saisi le président Michel Platini des inégalités qui se créent aujourd'hui par rapport non seulement aux droits audiovisuels, mais aussi aux diverses règles fiscales applicables aux différents clubs selon le pays qu’ils représentent. Peut-être des coefficients de péréquation pourraient-ils permettre de répondre à votre préoccupation. Ce travail doit être poursuivi, notamment via l’encouragement de l’appropriation par les clubs du formidable levier de développement que constituent les stades.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, pour votre réponse étayée. Je suivrai très attentivement l’évolution de cette réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, auteur de la question n° 1038, adressée à M. le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Ma question porte sur la possibilité d’élargir le service civique aux bailleurs sociaux.

Créé en 2010, le service civique est un engagement volontaire, pour les jeunes Français âgés de seize à vingt-cinq ans, qui vise à renforcer la cohésion nationale et la citoyenneté. Depuis 2010, 81 000 jeunes de seize à vingt-cinq ans ont participé à une mission, pour 80 % d’entre eux dans le secteur associatif.

En février 2014, la Cour des comptes a souligné que la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 prévoit un objectif de montée en charge du dispositif qui se traduit par un budget de 170 millions d’euros pour 2015 et qui devrait atteindre 221 millions d’euros à l’horizon de 2017.

La Cour des comptes préconise donc la nécessité de trouver un certain nombre de missions nouvelles, sans toutefois créer un risque de substitution à l’emploi. Parmi les neuf domaines d’intervention reconnus prioritaires par la nation pour l’accomplissement d’une mission d’intérêt général, la solidarité répond bien aux missions que pourraient mener des jeunes au sein des organismes d’habitations à loyer modéré, dont les objectifs demeurent le droit au logement, la cohésion et la mixité sociale.

Ces missions auprès des bailleurs sociaux permettraient de renforcer l’intégration citoyenne des jeunes dans la vie municipale et les encourageraient à s’impliquer pour leur quartier. Elles renforceraient également la prise de conscience de leur environnement, notamment par le respect des biens, lesquels sont trop souvent dégradés de façon répétée au sein du parc de logements sociaux. De plus, elles seraient un facteur d’insertion sociale puisque, selon une étude de l’Agence du service civique, 75 % des volontaires travaillent ou étudient après la fin de leur engagement.

Lors de sa conférence de presse du 5 février 2015, le Président de la République a annoncé, d’une part, la création d’un service civique universel et, d’autre part, l’obligation pour l’Agence du service civique d’accepter la demande de mission formulée par tout jeune à partir du 1er juin 2015.

Monsieur le secrétaire d'État, comptez-vous élargir les missions de service civique aux bailleurs sociaux pour les jeunes qui en formuleraient la demande et, si oui, comment entendez-vous répartir l’organisation du service civique au sein de ces organismes ?

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports

Madame la sénatrice, vous l’avez rappelé, le Président de la République a fait du développement du service civique dans notre pays une priorité pour permettre à chaque jeune qui en fait la demande de bénéficier du service civique. C’est un signal fort de confiance auprès de la jeunesse de notre pays.

Ces jeunes étaient 35 000 en 2014, ils seront 70 000 à la fin de l’année. Cette montée en puissance, qui traduit le volontarisme du Gouvernement et l’entière mobilisation sur cette question de Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, suppose également des moyens et des choix. Ce sont 73 millions d’euros qui viennent abonder le budget alloué au service civique dès 2015. Les choix sont de préserver la qualité des missions en termes tant de durée que de contenu.

Nous voulons donc solliciter l’ensemble des acteurs – et pas seulement le secteur associatif – ainsi que l’ensemble des partenaires publics au travers des trois fonctions publiques.

Cette mobilisation indispensable, il nous faut donc l’encourager, avec le développement de missions au sein des bailleurs sociaux, qui peuvent déjà accueillir des jeunes volontaires.

En effet, les agréments en service civique peuvent être délivrés aux organismes sans but lucratif ou à des personnes morales de droit public. Nombre d’organismes sont éligibles de par leur statut : c’est le cas des offices publics de l’habitat, les OPH, et des sociétés coopératives d’HLM ayant le statut de SCIC, société coopérative d’intérêt collectif.

Les OPH de Valence et du Pays Brive ont ainsi accueilli des volontaires d’Unis Cité et d’une mission locale.

Concernant la qualité des missions, les OPH pourront apporter leur plus-value par des thématiques nouvelles autour du « savoir habiter » : former les habitants aux gestes quotidiens en faveur de l’environnement pour réaliser des économies d’énergie, diffuser des messages de prévention auprès des habitants en vue de lutter contre les incivilités, sensibiliser au tri, etc.

Enfin, les bailleurs sociaux pourraient proposer des solutions de logement destinées aux volontaires. Cela fait partie des réponses à mobiliser pour accompagner la mobilité des jeunes sur le territoire national.

Vous le voyez, en réponse à votre question pertinente, les bailleurs sociaux ont toute leur place dans le grand chantier qu’est le service civique pour permettre à chaque jeune de pouvoir vivre cette expérience.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d'État, de votre réponse que j’accueille avec satisfaction. Il me paraît en effet important que les organismes sociaux – je préside moi-même un important office public de l’habitat dans les Alpes-Maritimes – puissent accueillir des jeunes pour leur permettre d’accomplir leur service civique et les ouvrir sur des missions que vous avez rappelées : le bien-vivre ensemble, l’éco-citoyenneté, les accès aux droits de l’ensemble de ces populations…

Convaincue que le service civique est un passeport important pour bon nombre de jeunes, je vais donc d’ores et déjà étudier comment Côte d’Azur Habitat, le premier bailleur social dans le département des Alpes-Maritimes et le cinquième en France, pourra accueillir ces jeunes afin de les aider à acquérir une formation, une expérience, ce qui facilitera leur insertion dans la vie sociale et professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à Mme Gisèle Jourda, auteur de la question n° 1058, adressée à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

Ma question porte sur le devenir de la profession des guides-conférenciers sur notre sol.

Pour le département de l’Aude, le tourisme constitue l’un des axes majeurs du développement économique. Historiquement liés à la mise en exergue du patrimoine audois, les guides-conférenciers sont l’élément moteur de qualité de sa mise en valeur.

Une réforme récente soulève la question de sa déréglementation, laquelle impacte au bas mot une trentaine de guides-conférenciers pour ce qui concerne notre territoire.

La réglementation des métiers du guidage a été réformée par le décret du 1er août 2011 relatif aux personnes qualifiées pour la conduite de visites commentées dans les musées et monuments historiques. Ainsi, les quatre professions réglementées de guide-interprète régional, guide-interprète national, guide-conférencier des villes et pays d’art et d’histoire et guide-conférencier national ont été remplacées par une unique profession, celle de guide-conférencier.

La formation universitaire pour y accéder dispense des enseignements en histoire, en histoire de l’art, en médiation culturelle, en langues étrangères, mais surtout une approche technique du métier qui en garantit la spécificité et la qualité, aboutissant à la délivrance d’une carte professionnelle dont seule l’obtention permet l’exercice du métier de guide.

L’article 10 de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises a remplacé certains régimes d’autorisation préalable par des régimes déclaratifs. Ce système déclaratif permettra ainsi à toute personne désirant conduire des visites guidées de le faire sans diplôme spécifique, autrement dit sans garantie ni contrôle des compétences et contenus scientifiques. Ainsi, il sera possible de faire visiter la cité de Carcassonne, classée au patrimoine mondial de l’humanité, sans avoir à prouver ses connaissances sur le patrimoine audois.

Cette loi de simplification vise également à simplifier les dispositifs de droits de parole pour les guides étrangers ressortissants de l’Union européenne, mais ce sans valeur de réciprocité et sans qu’aucun contrôle ne soit mis en place pour s’assurer de l’exactitude de leurs propos !

Quel dommage pour notre patrimoine, et quel contresens lorsque l’on connaît notre investissement en vue du classement des châteaux du pays cathare au patrimoine mondial de l’humanité !

L’effet d’aubaine créé par ce texte aura des conséquences dommageables pour la qualité de la profession et, a fortiori, pour les acteurs touristiques locaux qui s’en trouveront affaiblis.

« Affaibli » est le terme adéquat, car la profession de guide-conférencier est déjà soumise à une grande précarité due à la saisonnalité de son activité, mais également à sa nécessaire organisation autour du travail à la vacation ou à la prestation.

N’oublions pas que la plupart des guides-conférenciers sont des travailleurs indépendants, qui contribuent à l’essor économique de notre territoire grâce à leur activité d’entrepreneur. Cette ouverture unilatérale à la concurrence et à la compétitivité menace donc clairement la profession.

C’est pourquoi je souhaiterais connaître les intentions exactes du Gouvernement en la matière. Quel sera le contenu des ordonnances ? Qu’envisagez-vous en termes de modalités de contrôle et de sanctions ? Comptez-vous prévoir des aménagements ?

Debut de section - Permalien
Thierry Braillard , secrétaire d'État auprès du ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, chargé des sports

Madame la sénatrice, je ne sais pas si je répondrai à toutes les questions que vous avez posées, mais je vais en tout cas vous donner le point de vue du Gouvernement

Le régime professionnel des guides-conférenciers a connu en 2011 une refonte importante, qui a permis la création d’un statut unique. La délivrance de la carte professionnelle en préfecture sur production de pièces attestant des qualifications, diplômes et formations requis matérialise cette réforme.

Environ 10 000 guides-conférenciers sont actuellement détenteurs de la carte professionnelle.

L’annonce d’une ordonnance supprimant cette carte et instaurant un régime déclaratif se substituant au régime actuellement en vigueur a suscité de nombreuses réactions, notamment de la part des associations de guides-conférenciers.

Redoutant la dégradation des conditions d’exercice de leur métier, la déqualification des prestations et le recrutement d’un personnel insuffisamment formé, les organisations professionnelles du secteur ont immédiatement alerté les services de Mme la ministre de la culture et de la communication. Leurs inquiétudes, relayées par de nombreux parlementaires, mettent en lumière le maillage territorial de cette profession qui participe activement aux enjeux de développement touristique en valorisant le réseau patrimonial français, dont la densité est exceptionnelle.

Au sein d’un comité de pilotage interministériel formé en octobre 2014, Mme la ministre de la culture et de la communication a fait valoir que des pistes d’amélioration de la réforme de 2011 devaient être envisagées, mais qu’elles devaient être concertées avec les organisations professionnelles concernées. Elle a rappelé par ailleurs l’urgence de dispositions spécifiques à concevoir pour les tour-opérateurs établis en dehors de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen.

Les organisations professionnelles représentant les guides-conférenciers ont été reçues à différentes reprises. Le 3 mars dernier, les éléments d’information suivants leur ont été présentés.

Le régime d’autorisation préalable d’exercice du métier de guide-conférencier ainsi que la carte ou le badge professionnel sont conservés, et les évolutions envisagées ne nécessitent pas le recours à un projet d’ordonnance.

Des actualisations seront ainsi apportées à l’arrêté listant les diplômes et les formations requis, en réintroduisant notamment des établissements d’enseignement supérieur du ministère de la culture et de la communication dans la liste des établissements habilités.

Le passage à la dématérialisation de la procédure administrative d’autorisation d’exercer est envisagé à l’horizon 2016, avec la création d’un registre national en ligne.

Ce registre, régulièrement mis à jour, aura également pour vocation de valoriser la profession et ses domaines de compétences. Les organisations professionnelles seront associées à cette transition numérique.

Enfin, Mme la ministre de la culture et de la communication a rappelé qu’un groupe de travail sur les métiers du guidage et de la médiation sera mis en place prochainement.

Telles sont, madame la sénatrice, les éléments que Mme Fleur Pellerin, ministre de la culture et de la communication, m’a demandé de vous transmettre.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Jourda

J’ai bien noté, monsieur le secrétaire d’État, la volonté de concertation et d’association des organismes touchés par cette refonte du métier de guide-conférencier.

Nous serons vigilants à cet égard, car il faut absolument soutenir ces entrepreneurs qui, en réalisant le maillage de notre territoire, assurent la spécificité de l’identité culturelle française.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Marc Laménie, auteur de la question n° 1059, adressée à M. le secrétaire d’État auprès de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur l’avenir des conditions de transport de voyageurs et de fret de la ligne SNCF de TER entre Charleville-Mézières et Givet, dans les Ardennes.

Sur cette ligne de la vallée de la Meuse longue de soixante-quatre kilomètres, qui a une riche histoire et compte 800 000 voyageurs annuels, les conditions de transport se sont notablement dégradées. En l’espace de trente ans, en effet, la durée du trajet est passée de cinquante-deux minutes à une heure et dix minutes. Cette dégradation est due à un déficit d’entretien sur cette période – ce problème ne se pose pas seulement dans les Ardennes ! –, rendant cette double voie difficilement praticable à certains endroits, ce qui est source de ralentissements à trente voire à dix kilomètres à l’heure. Priorité est due, en effet, à la sécurité des voyageurs.

Les travaux de maintenance effectués par Réseau ferré de France au cours des dernières années n’ont pas permis de combler le retard et se révèlent insuffisants pour garantir la pérennité de la ligne, dont le coût total de remise en état est évalué entre 130 et 150 millions d’euros, compte tenu du grand nombre d’ouvrages d’art et de tunnels qu’elle comporte.

Or cet axe ferroviaire de la vallée de la Meuse est de première importance dans le schéma des transports ardennais et représente fondamentalement un outil d’aménagement du territoire sur le plan tant économique que touristique, avec le projet de réouverture vers la Belgique de la section Givet-Dinant.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, je souhaiterais savoir, monsieur le secrétaire d’État, quelles mesures peuvent être prises à court et à moyen terme pour conforter l’existence de ce transport public, qui est le deuxième plus fréquenté de Champagne-Ardenne. Cette voie ferrée est en effet indispensable pour l’avenir des Ardennes, compte tenu de la nécessaire participation financière de l’État et des collectivités territoriales, engagée depuis 2007 dans le cadre du contrat de développement économique.

La poursuite des travaux d’investissement doit constituer une priorité au titre de la politique de soutien aux transports ferroviaires de voyageurs et de fret.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le sénateur, la ligne ferroviaire reliant Charleville-Mézières à Givet, parcourue par des TER de la région Champagne-Ardenne, est en effet une des liaisons les plus fréquentées de cette région. C’est la raison pour laquelle elle a bénéficié, entre 2008 et 2013, de 55 millions d’euros de travaux de modernisation de la voie dans le cadre du contrat de développement économique des Ardennes 2007-2013, ainsi que sur fonds propres de SNCF Réseau.

Ces travaux ont permis la modernisation de treize kilomètres de voies, et des interventions sur trois tunnels et deux ponts de franchissement de la Meuse. En outre, je rappelle que la maintenance annuelle de la ligne s’élève à 4, 5 millions d’euros, intégralement financée par SNCF Réseau.

Certaines portions de la voie restent très dégradées et ont conduit à la mise en place de limitations temporaires de vitesse pour garantir la sécurité des circulations ferroviaires. Pour assurer la pérennité des circulations existantes, des travaux seront nécessaires dans les dix prochaines années.

Vous le savez, nous sommes en phase de finalisation des contrats de plan État-région, les CPER, 2015-2020. Le Gouvernement a pris en compte la particularité de cette ligne, qui supporte un fort trafic et présente une importance pour toute la vallée de la Meuse. J’ai entendu le président de la région, M. Jean-Paul Bachy, faire part de son souhait de voir cette ligne figurer parmi les toutes premières priorités pour le CPER à venir.

Aussi, au vu de l’intérêt de cette ligne pour la desserte locale et du trafic qu’elle supporte, l’avenir de la ligne Charleville-Givet a été placé au cœur des discussions du CPER 2015-2020, conformément aux souhaits du président de région. Le financement d’une première phase de travaux a été acté et fera l’objet d’un effort substantiel aux côtés de la région, de l’État et de SNCF Réseau.

Cette première phase de travaux permettra de lever des limitations temporaires de vitesse, et d’améliorer ainsi les temps de parcours actuels. L’exemple de la ligne Charleville-Givet est celui d’un territoire où le Gouvernement s’engage tant sur la route, le rail que le fleuve.

L’action de l’État pour ce bassin de vie me paraît, dès lors, s’inscrire pleinement dans les priorités de ce gouvernement pour un maintien des activités économiques sur les territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, pour cette réponse pédagogique. Vous avez en effet cité la notion de bassin de vie, que tous les élus et les acteurs économiques de la vallée de la Meuse font leur. Nous sommes également tous attachés à l’histoire de cette vallée, que vous avez rappelée.

J’ai évoqué la question ferroviaire, mais il ne faut pas oublier non plus le volet routier et le volet relatif au fleuve Meuse, car ces trois aspects sont complémentaires. Je pense notamment au programme de lutte contre les inondations mis en place au cours des dernières années. Ces trois voies de communication sont liées.

L’histoire de cette voie ferrée, qui comporte de nombreux ouvrages d’art et tunnels, est également importante. Il est vrai, par ailleurs, que le trajet par la route n’est pas simple, du fait de la géographie particulière du département et de la vallée.

Je prends note de l’engagement pris, monsieur le secrétaire d’État. J’ai conscience de l’importance du coût consacré à cette ligne, mais une infrastructure, quelle qu’elle soit, coûte cher.

Il convient donc de prendre en compte l’aspect financier, mais aussi le volet humain, et d’intégrer la notion de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Daniel Reiner, auteur de la question n° 1075, adressée à M. le secrétaire d'État auprès de la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Je souhaite attirer votre attention, monsieur le secrétaire d’État, sur le projet de réaménagement de l’autoroute A31, qui va de la frontière luxembourgeoise jusqu’à Toul, en passant par Nancy et Metz, dans la vallée de la Moselle.

Le 6 mars dernier, lors de sa visite d’État au Luxembourg, le Président de la République a déclaré, à juste titre : « Il faut relancer l’A31 bis ». Cette déclaration faisait suite à la saisine, par le Gouvernement, de la Commission nationale du débat public, la CNDP. Le débat se poursuit actuellement en Lorraine.

Cette étape était réclamée depuis de nombreuses années par l’ensemble des forces vives économiques et sociales de Lorraine, pour lesquelles l’A31 bis est un dossier très important.

En effet, monsieur le secrétaire d’État, la circulation n’a cessé d’augmenter sur cette autoroute, y compris au cours des quinze dernières années. Elle accueille, aujourd’hui, parfois plus de 100 000 véhicules par jour, dont de 8 000 à 12 000 poids lourds. Ce trafic impressionnant, qui en fait un des axes routiers les plus chargés de France, résulte à la fois de la densité des échanges dans le sillon lorrain, notamment entre Metz et Nancy, des flux de transit particulièrement importants entre la mer du Nord et la Méditerranée et d’une augmentation des migrations pendulaires transfrontalières : plus de 80 000 travailleurs frontaliers lorrains se rendent chaque jour au Luxembourg, et l’on estime qu’ils devraient être au nombre de 100 000 dans dix ans.

Le projet consiste à réaliser des barreaux autoroutiers neufs, notamment à l’ouest de l’agglomération de Nancy, et d’élargir à deux fois trois voies, sur la totalité du tracé, l’actuelle autoroute A31. Dans un rapport remis le 27 juin 2013, la commission Mobilité 21 pointait l’urgence de la situation.

Je souhaite profiter de cette occasion pour appuyer la demande formulée par notre collègue Jean-Pierre Masseret, président du conseil régional de Lorraine, que soit étudiée la mise en œuvre expérimentale d’une écotaxe sur le territoire lorrain.

En effet, les poids lourds en transit européen évitent l’Allemagne, qui a elle-même instauré une telle taxe, et participent ainsi à la surcharge du trafic international en Lorraine et en Alsace. Permettre demain à la nouvelle région Alsace-Champagne-Ardenne-Lorraine d’appliquer une écotaxe faciliterait les déplacements quotidiens de milliers de Lorrains et pourrait apporter une source de financement non négligeable pour la réalisation de l’A31 bis, ce qui est nécessaire compte tenu de l’ampleur de ce projet.

Monsieur le secrétaire d’État, alors que s’engage le débat public sur ce dossier majeur, je souhaiterais connaître les intentions du Gouvernement, du moins l’état de ses premières réflexions sur le principe même de la réalisation de cet équipement, ainsi que sur les modalités et le calendrier de celle-ci.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies

Monsieur le sénateur, je partage bien évidemment votre analyse sur le rôle majeur de l’A31 pour les territoires qu’elle dessert et sur les difficultés et nuisances que supportent les usagers et les riverains de la voie, du fait de l’importance des trafics, qu’il s’agisse des véhicules particuliers ou des poids lourds. De nombreux Lorrains empruntent l’A31 tous les jours pour se rendre au travail, ce qui provoque une congestion importante aux heures de pointe, tout particulièrement entre Thionville et le Luxembourg, en raison de la forte augmentation du nombre de transfrontaliers ces dernières années.

Le projet d’autoroute A31 bis a été classé parmi ceux de première priorité par la commission Mobilité 21 et le Gouvernement est tout particulièrement attaché à sa réalisation rapide. C’est la raison pour laquelle j’en ai saisi la Commission nationale du débat public le 26 novembre 2014. Il tire les enseignements des opinions exprimées lors du débat public de 1999 sur le projet, aujourd’hui abandonné, d’autoroute A32.

Les aménagements envisagés portent sur un élargissement à deux fois trois voies des infrastructures existantes, accompagné d’une remise à niveau environnementale et de la construction de deux nouveaux tronçons autoroutiers à deux fois deux voies : la liaison A30-A31 Nord à l’ouest de Thionville et la liaison Toul-Dieulouard.

Le débat public a été lancé par les réunions d’ouverture des 15 et 16 avril dernier, à Nancy et à Metz, et se prolongera jusqu’au mois de juillet prochain. Je souhaite que ce moment fort de concertation entre l’État et le grand public s’inscrive dans la démarche de renforcement de la démocratie participative engagée par le Gouvernement. À l’issue du débat, le président de la Commission nationale du débat public dressera le bilan de la concertation, que j’étudierai avec attention afin de prendre en compte les avis exprimés avant de fixer l’orientation du projet autoroutier A31 bis.

Monsieur le sénateur, je vous donne donc rendez-vous à ce prochain stade de la procédure et souhaite que le débat public en cours permette, d’ici là, de préciser à la fois l’expression des besoins et les meilleures modalités de réalisation. Je vous confirme en tout cas le fort intérêt que porte le Gouvernement au dossier de l’A31 bis et aux solutions qui devront être mises en œuvre pour accompagner le développement économique du sillon lorrain et celui de ses échanges avec les pays voisins.

Sur la question de l’écotaxe régionalisée, nous sommes pour l’heure dans une phase de concertation entre l’État et les régions. Des questions juridiques se posent, notamment en termes de compatibilité avec le droit européen. Quoi qu’il en soit, la porte n’est pas fermée et le débat se poursuit.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir indiqué que le Gouvernement est très attaché à la réalisation rapide de ce projet. C’est déjà un motif de satisfaction.

Le projet d’autoroute A32 envisagé en 1999 a été abandonné parce qu’il s’agissait de construire une seconde autoroute, parallèle à la première, dans la même vallée, ce qui n’avait guère de sens.

S’il est plus sommaire et plus « rustique », ce projet d’aménagement de l’autoroute A31 reste fort coûteux : entre 1 milliard et 1, 5 milliard d’euros. C’est la raison pour laquelle il serait bon d’engager une réflexion sur la mise en œuvre d’une écotaxe en Lorraine, comme cela avait été envisagé pour l’Alsace lors du Grenelle 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, auteur de la question n° 1084, transmise à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

À l’occasion de l’examen du projet de loi « MAPTAM » de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, achevé au mois de janvier 2014, ont été votées des dispositions importantes en matière de prévention des inondations, notamment la création d’une taxe, assise sur le foncier, permettant de financer cette politique.

Pour mémoire, je rappelle que, depuis cette date, ce ne sont pas les inondations qui ont manqué en France. Il n’est qu’à songer à celles qui se sont produites dans le Var et le sud de la France, aux mois de février et de novembre 2014, ou, en 2015, en Savoie et dans le Loir-et-Cher, notamment.

L’évidente urgence de la mise en place effective – c’est-à-dire financée – d’une politique active de prévention de l’inondation n’étant plus à démontrer, on peut s’étonner que les décrets d’application prévus par la loi MAPTAM, en particulier ceux qui sont nécessaires à l’instauration de la taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations prévue à l’article 56, soient toujours en gestation. Ce retard serait dû à une mésentente entre le ministère de l’intérieur et celui des finances : si cela était vrai, ce serait plus que fâcheux.

Monsieur le secrétaire d’État, qu’en est-il des raisons de ces retards et quels sont les délais probables de publication de ces décrets d’application ?

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies

Monsieur le sénateur, le Parlement a souhaité mettre en œuvre une nouvelle compétence couvrant les actions et travaux portant sur la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations, notamment afin d’assurer une meilleure protection de la population contre les effets dommageables des inondations.

La loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles confie cette compétence aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre.

Cette compétence, qui peut être exercée directement ou par l’intermédiaire de syndicats mixtes en fonction de la structure et des caractéristiques des bassins versants concernés, nécessite des moyens pérennes et des compétences techniques particulières. Afin d’en permettre le financement, la loi MAPTAM a prévu la possibilité de mettre en place une taxe pour la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations. Celle-ci est facultative, plafonnée et affectée. Les dispositions de l’article 56 de la loi décrivent de façon détaillée les modalités de mise en place, de recouvrement et d’utilisation de cette recette par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre. Ces dispositions ont été introduites dans l’article 1530 bis du code général des impôts.

Si la loi a effectivement prévu que les conditions d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État, il apparaît, à l’examen de l’article 1530 bis du code général des impôts, que le texte législatif est suffisant pour permettre une mise en place de cette taxe, sans que des précisions supplémentaires soient nécessaires.

Il a ainsi été possible d’indiquer, par une note d’information relative aux délibérations fiscales à prendre par les collectivités territoriales en cours d’année pour une application l’année suivante datée du 11 septembre 2014, que les communes et leurs EPCI à fiscalité propre qui ont déjà pris cette compétence pouvaient mettre en place dès 2015 cette taxe pour le financement de leurs actions entrant dans le champ de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations. De ce fait, il paraît possible de faire l’économie d’un nouveau décret.

En ce qui concerne les autres textes d’application intéressant directement la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, je précise que le projet de décret « digues » a reçu un avis favorable du Conseil d’État le 24 mars dernier et qu’il sera prochainement publié. Le décret relatif aux missions d’appui auprès des préfets coordonnateurs de bassin a été publié le 30 juillet 2014. Le projet de décret relatif aux établissements publics d’aménagement et de gestion des eaux et aux établissements publics territoriaux de bassin sera prochainement soumis au Conseil national d’évaluation des normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics, avant transmission au Conseil d’État.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Rarement une réponse du Gouvernement m’a procuré autant de satisfaction… Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de m’avoir apporté cette bonne nouvelle. On a la fâcheuse habitude de prévoir des décrets d’application en Conseil d’État. Je suis heureux que le texte voté par le Parlement soit d’application immédiate.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Mathieu Darnaud, auteur de la question n° 1065, transmise à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Traditionnellement, la fin de la saison hivernale est marquée par la reprise d’activités d’entretien des espaces naturels et des jardins. Parmi celles-ci, bon nombre génèrent chaque année des déchets verts, le plus souvent éliminés par brûlage. Or la période de tolérance qui s’étendait jusqu’au 1er janvier 2015 est désormais terminée.

Les collectivités rurales ont à leur charge d’importants travaux de débroussaillement, de défrichement et de tonte. Je tiens notamment à rappeler que, en Ardèche, l’espace forestier couvre plus de 45 % de la surface du territoire.

Le transport des déchets verts par les ouvriers communaux, la mise à disposition de véhicules adaptés aux reliefs de montagne et les frais de carburant liés représentent des charges importantes, d’autant plus difficiles à assumer que l’État a engagé un mouvement de baisse drastique des dotations publiques.

Or, monsieur le secrétaire d’État, ces charges pourraient être considérablement allégées et le travail des agents communaux facilité si, à l’instar des agriculteurs, forestiers et particuliers soumis à l’obligation légale de débroussaillement, les services techniques communaux de ces petites communes étaient autorisés à brûler les déchets verts sur place. Je souhaite donc savoir si, en matière de brûlage des déchets végétaux, le Gouvernement entend demander aux préfets d’assouplir le décret, afin de faciliter la vie aux collectivités rurales.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies

Monsieur le sénateur, les brûlages à l’air libre de végétaux sont interdits pour deux raisons essentielles : d’une part, ils sont à l’origine de risques d’incendie ; d’autre part, ils provoquent des nuisances pour le voisinage et sont dangereux pour la santé. En effet, cette combustion très incomplète émet des polluants, tels que les particules fines et les dioxines, qui se concentrent dans les végétaux, les produits laitiers et les œufs.

Le règlement sanitaire départemental permet au préfet de déroger à cette règle dans certains cas, par exemple pour éviter la propagation à des plantes saines de maladies qui touchent des végétaux de la même espèce.

En zone rurale, la solution la plus adaptée pour se débarrasser des déchets verts est le compostage, en particulier le compostage de proximité. Celui-ci permet d’éviter de transporter des déchets verts vers la déchetterie et supprime donc aussi la consommation d’énergie, les pollutions, l’encombrement et les coûts correspondants.

Le compostage au jardin ou en plateforme de compostage, à une plus grande échelle, permet d’économiser l’énergie qui serait gaspillée en brûlant ces déchets verts très humides. Au lieu d’être détruite, cette matière naturelle retourne au sol sous forme d’un compost utile au jardinier.

Pour accompagner ce mouvement, la loi de transition énergétique pour la croissance verte a prévu un développement important du tri à la source des biodéchets, notamment du compostage. Elle contribuera ainsi à généraliser ces pratiques et à développer des possibilités de compostage à coût moindre, tout en augmentant le nombre d’emplois associés à ces pratiques vertueuses écologiquement et non délocalisables. Cela s’inscrit pleinement dans le cadre de la transition vers l’économie circulaire.

Enfin, la feuille de route de la table ronde « santé environnement » de la Conférence environnementale prévoit que, dans le cadre des plans régionaux santé-environnement, un guide à destination des collectivités pourra être rédigé dans les régions volontaires. Les ministères de l’écologie, de la santé et de l’agriculture soutiendront ces démarches volontaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Mathieu Darnaud

Votre réponse, monsieur le secrétaire d’État, ne me satisfait guère.

Je vous invite à venir constater sur le terrain la complexité de la mise en œuvre des plateformes de compostage. Par ailleurs, il arrive que le volume de déchets verts produits soit tel que le recours au compostage ne soit pas envisageable. Il faut alors déposer ces déchets dans des déchetteries dédiées, ce qui impose parfois, à l’heure où il est beaucoup question de développement durable et de bilan carbone, d’effectuer un trajet de trente ou quarante minutes.

Même si les préoccupations de santé publique doivent bien sûr être prises en compte, je pense qu’il conviendrait d’assouplir la réglementation en vigueur afin d’élargir les possibilités de recours à l’écobuage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Christian Favier, auteur de la question n° 1041, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Monsieur le secrétaire d’État, je souhaite vous faire part de mon inquiétude quant aux conditions de mise en œuvre de l’expérimentation lancée au mois de janvier dans plusieurs départements en vue d’une révision des valeurs locatives cadastrales des locaux d’habitation.

Le département du Val-de-Marne faisant partie des territoires d’expérimentation, sans doute en raison de sa grande diversité urbaine et sociale, je suis particulièrement sensible à cette question. Je m’étonne d’ailleurs que le conseil départemental n’ait à aucun moment été saisi de ce projet. L’État ne saurait conduire seul ce travail, au risque de n’avoir qu’une vision parcellaire des bases d’imposition des territoires.

Ainsi, les conséquences de la révision des valeurs locatives pour les contribuables et les collectivités locales ne doivent pas être évaluées sous le seul angle comptable. Cette évaluation doit nécessairement intégrer les paramètres socio-économiques, urbains et humains propres à chaque territoire, afin d’adapter les modalités retenues aux différentes échelles.

Par ailleurs, cette révision aura des effets sur les potentiels financiers et fiscaux des collectivités territoriales, et donc sur la répartition des dotations de l’État et les instruments de péréquation.

Une large concertation avec les collectivités territoriales sur les modalités de cette expérimentation est par conséquent nécessaire. L’expérience de la réforme des bases d’imposition des locaux professionnels, que le Gouvernement a dû geler, est sans doute la meilleure illustration de ce qu’il ne faut pas faire.

Compte tenu de l’importance des conséquences de la réforme des valeurs locatives, en particulier pour les populations, mais aussi pour les budgets communaux, déjà mis à mal, je vous prie, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer quels dispositifs d’information et de concertation seront mis en place avec les élus locaux des communes et des départements concernés par cette expérimentation.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Monsieur le sénateur, comme j’ai eu l’occasion de vous le faire savoir dans un courrier en date du 18 février dernier, le Gouvernement s’est engagé, dans le cadre du pacte de confiance et de responsabilité entre l’État et les collectivités locales conclu le 16 juillet 2013, à travailler sur les principes et les modalités de mise en œuvre de la révision des valeurs locatives pour les locaux d’habitation.

L’article 74 de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2013 prévoit ainsi qu’une expérimentation de cette révision sera menée en 2015 dans cinq départements choisis afin de refléter la diversité des réalités départementales, dont Paris et le Val-de-Marne.

À l’occasion du vote de cette disposition, une concertation s’est tenue, associant les commissions des finances des deux assemblées et les associations d’élus, afin de définir les principes de l’expérimentation.

Il s’agit d’un travail de bénédictin, qui n’en est qu’à ses débuts. La Direction générale des finances publiques, la DGFiP, établira un rapport. Le Gouvernement transmettra ensuite au Parlement, en amont de l’examen du projet de loi de finances pour 2016, un bilan des simulations auxquelles la DGFiP aura procédé.

Sur le fondement de ce bilan et au vu des enseignements tirés de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels, notamment en ce qui concerne les commissions locales et l’association des élus locaux, de nouvelles discussions pourront s’engager afin de déterminer selon quelles modalités une révision des valeurs locatives des locaux d’habitation pourrait effectivement être mise en œuvre.

On a pu mesurer les difficultés ou les limites de ce long travail expérimental à l’occasion de la révision des valeurs locatives des locaux professionnels. Cela m’a conduit à m’engager à vous proposer de différer d’un an la mise en œuvre concrète du processus de révision des valeurs locatives des locaux d’habitation, afin de prendre en compte les difficultés recensées et d’adapter, le cas échéant, les modalités de calcul de ces valeurs locatives.

Je tiens donc à vous rassurer, monsieur le sénateur : il y aura bien un travail itératif et collaboratif avec les élus concernés, ainsi qu’avec les commissions départementales et communales des impôts, avant toute mise en œuvre de la révision, laquelle devra d’ailleurs respecter un certain nombre de principes de stabilité globale des prélèvements. Nous aurons l’occasion d’en reparler lorsque la DGFiP aura achevé la collecte des informations nécessaires au bon travail de l’ensemble des acteurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Favier

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de vos éléments de réponse.

Je rappelle que nous ne sommes évidemment pas opposés à la mise en œuvre d’une révision des valeurs locatives cadastrales. Au contraire, nous regrettons que du retard ait été pris en la matière.

Cela étant, cette question est extrêmement sensible, car les conséquences d’une telle révision peuvent être très lourdes, s’agissant d’un impôt par nature souvent très injuste, dans la mesure où, sauf pour les ménages les plus modestes, il ne tient pas compte des ressources des familles.

Il faut donc être très prudents. De ce point de vue, la concertation avec les élus locaux est extrêmement importante. Le ministère chargé du budget ne saurait décider seul. La population doit être étroitement associée à la réflexion, par l’intermédiaire de ses élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Yannick Botrel, auteur de la question n° 1051, adressée à M. le secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

La loi prévoit, depuis le 1er janvier 2015, une exonération de sept années de taxe foncière sur les propriétés bâties, ou TFPB, et de contribution foncière des entreprises, ou CFE, pour les équipements agricoles dédiés à des activités de méthanisation.

Par cette disposition, le législateur a souhaité favoriser le déploiement, promu par le ministre de l’agriculture, d’unités de méthanisation agricole dans notre pays. Le vote de ce dispositif par le Parlement n’a d’ailleurs pas suscité de débat particulier, car la représentation nationale partage cet objectif de manière très transversale.

La méthanisation représente une piste intéressante en matière de diversification de nos sources d’énergie. Elle offre des compléments de revenu non négligeables à nos agriculteurs et permet le développement d’une filière industrielle de construction de méthaniseurs en France, dans un secteur de production de matériels jusqu’alors essentiellement occupé par l’Italie et l’Allemagne.

Les deux exonérations précédemment citées concernent les unités de méthanisation agricole achevées après le 1er janvier 2015, l’objectif du Gouvernement étant avant tout d’apporter une incitation.

Cependant, en tant que législateur, nous avons complètement omis le fait que 98 unités étaient déjà en service avant cette date, de sorte que nous nous trouvons, aujourd’hui, dans une situation paradoxale. Si les choses devaient demeurer en l’état, il y aurait, d’une certaine manière, rupture d’égalité entre les producteurs, selon que leur unité ait été achevée avant ou après le 1er janvier 2015.

Cela me semblerait profondément inéquitable, et il convient de réfléchir à un dispositif permettant de surmonter cette difficulté.

La règle de non-rétroactivité de la loi fiscale s’applique. Cela étant, il est possible de faire en sorte que les 98 unités créées avant le 1er janvier 2015 soient éligibles à ces exonérations à partir de cette date, comme toutes les autres. Bien entendu, les exonérations ne valant que pour sept années, le dispositif s’appliquerait pour la seule durée restant à courir jusqu’au septième « anniversaire », si je puis dire, de l’unité concernée.

Voilà quelques semaines, à la suite d’une question orale du député Paul Molac, le Gouvernement a fait connaître la position de Bercy sur un élargissement du champ de ces exonérations. Il apparaît que l’avis du ministère est très réservé, celui-ci estimant qu’une telle mesure engendrerait un « effet d’aubaine ».

Je m’oppose nettement à cette analyse. Techniquement, un effet d’aubaine est constaté lorsqu’un dispositif crée une dépense importante qui ne peut être prévue à l’avance. Or nous parlons ici de la TFPB et de la CFE de 98 unités d’exploitation : la dépense fiscale engendrée n’est donc pas importante et elle peut parfaitement être prévue.

D’ailleurs, je ne comprends pas la position du Gouvernement, dans la mesure où, en définitive, il ne s’agit que de rétablir l’équité entre agriculteurs-méthaniseurs. Elle est d’autant plus surprenante que le Premier ministre lui-même a indiqué, voilà quelques semaines, que « certains [agriculteurs] ont pris le parti de développer la méthanisation agricole. Nous devons soutenir les agriculteurs qui savent innover. »

J’aurais donc souhaité connaître la position de M. Le Foll, ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui est concerné au premier chef par le sujet. Quels dispositifs envisage-t-il de proposer, sachant que la situation actuelle est discriminante, une inégalité ayant été instaurée entre agriculteurs-méthaniseurs ?

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Bien évidemment, le Gouvernement encourage la valorisation des effluents d’élevage et déchets agricoles par la méthanisation. À cet effet, a été présenté en mars 2013 un plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote, avec pour objectifs une meilleure gestion de l’azote et le développement de la méthanisation agricole.

Dans cette perspective, il convient de mettre en place une fiscalité incitative. En effet, cette activité nécessite la construction de nombreux immeubles – locaux techniques, digesteurs, cuves, locaux de stockage, etc. –, constituant autant d’investissements lourds qui, dès son démarrage, représentent une charge importante au regard de sa rentabilité.

Une première exonération de taxe foncière sur délibération des collectivités a donc été décidée en loi de finances rectificative pour 2013.

Surtout, par l’article 60 de la loi de finances pour 2015, le Gouvernement a souhaité renforcer l’incitation en faveur de la méthanisation, en créant un dispositif de plein droit pour toutes les installations nouvelles, celles dont l’achèvement est postérieur au 1er janvier 2015. Pour les autres, l’exonération optionnelle de taxe foncière sur les propriétés bâties demeure applicable.

Les unités pionnières de méthanisation agricole participent, il est vrai, à la dynamique positive de développement de la méthanisation agricole. En effet, elles jouent un rôle de référence pour les financeurs et les porteurs de nouveaux projets. En outre, les pionniers sont souvent engagés dans l’accompagnement de ces derniers. Toutefois, s’agissant d’un dispositif incitatif, il est apparu logique et juridiquement adéquat qu’il s’applique à des investissements non encore réalisés, et non à un stock.

Pour autant, la question de l’égalité de traitement des différents opérateurs est importante. D’ailleurs, elle ne se résume pas à sa dimension fiscale, mais porte aussi sur le tarif de rachat pratiqué par EDF et la contribution au service public de l’électricité, la CSPE, l’instauration de cette dernière étant principalement motivée par la volonté de financer les énergies renouvelables.

Par conséquent, le Gouvernement entend bien s’inscrire dans le dialogue. Je suis prêt à recevoir les représentants des syndicats professionnels, que j’ai rencontrés à l’occasion du salon de l’agriculture. Ma porte est ouverte pour étudier cette question de l’existence d’une différence de traitement entre producteurs de méthane agricole.

Debut de section - PermalienPhoto de Yannick Botrel

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d’État. Les agriculteurs concernés avaient cherché à ouvrir le débat avant le 1er janvier 2015, en prenant un certain nombre d’initiatives et de contacts, y compris, d’ailleurs, au niveau du ministère des finances. Une réunion avait été organisée, à laquelle le ministère de l’agriculture et celui de l’environnement avaient également participé.

J’estime, avec d’autres, que la situation actuelle crée une discrimination au détriment des agriculteurs s’étant lancés les premiers dans cette voie de la méthanisation, techniquement compliquée et coûteuse.

J’ai bien entendu votre conclusion, monsieur le secrétaire d’État, qui me semble nuancer les propos tenus jusqu’à présent par le Gouvernement. Vous donnez en effet à entendre que le débat pourrait ne pas être complètement clos.

Il ne s’agit pas, bien entendu, de prendre une mesure rétroactive, mais il convient au moins de faire en sorte que, pour la période restant à courir, l’ensemble des unités de méthanisation soient traitées de manière identique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Daniel Chasseing, auteur de la question n° 1063, adressée à M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

La situation de notre agriculture ne cesse d’inquiéter celles et ceux qui représentent les territoires ruraux. En particulier, celle des éleveurs est toujours plus fragile, malgré les assurances données par le Président de la République lors du sommet de l’élevage qui s’est tenu voilà deux ans, d’autant que la conjonction actuelle d’un niveau élevé des charges et d’un niveau trop bas des prix agricoles fait chuter leurs revenus.

C’est pourquoi j’ai choisi ce matin d’appeler l’attention du Gouvernement sur un certain nombre de problèmes majeurs, en accord avec les responsables agricoles de mon département. J’attends de sa part des réponses précises, à l’heure où la réforme de la politique agricole commune, la suppression des quotas laitiers – inquiétante notamment pour les exploitations laitières de zones intermédiaires –, la baisse des aides pour la France – à hauteur de 5 % pour le premier pilier et d’un niveau à ce jour indéterminé pour le second – et d’autres évolutions en cours ou projetées amènent à s’interroger sur la survie économique du secteur de l’élevage.

En premier lieu, la bonification des prêts ne pourra désormais plus être prolongée au-delà de la durée du plan d’entreprise, à savoir quatre ans. C’est tout de même très peu ! Cette évolution ne remet-elle pas en cause l’intérêt de la bonification ? Je souligne au passage l’existence d’un regrettable retard en matière d’octroi de prêts bonifiés, retard certes habituel, mais bien supérieur, cette année, à ce que l’on a pu connaître naguère.

En deuxième lieu, comment la revalorisation des droits à paiement de base – les DPB, qui ont remplacé les droits à paiement unique, les DPU – s’opérera-t-elle pour les jeunes agriculteurs ? À ce propos, je tiens à relever un facteur d’alourdissement de la procédure : la nécessité d’obtenir la signature du propriétaire cédant. Cette dernière innovation était-elle bien utile ?

En troisième lieu, quelles seront les modalités d’attribution des aides couplées ? Un nouveau producteur sera-t-il un jeune agriculteur ou un agriculteur qui se diversifie ? Dans ce cas, comment se fera l’accès à la réserve du soutien couplé à la vache allaitante ? Et je ne parle pas de l’arrêt brutal de la prise en compte des génisses, qui engendrera de lourdes conséquences…

En quatrième lieu, le dispositif de l’indemnité compensatoire de handicap naturel, l’ICHN, laquelle serait revalorisée en 2015, intégrant la prime à l’herbe, reste, au dire des éleveurs, d’une grande complexité. Une question importante reste en suspens : la suppression du critère d’âge – la limite était naguère fixée à 65 ans – ne risque-t-elle pas d’inciter les anciens à prendre leur retraite plus tard, et donc à ne pas libérer les terres ? Peut-on revenir sur cette mesure ? Par ailleurs, le siège social pourrait être délocalisé.

En cinquième lieu, j’évoquerai les mesures compensatoires au défrichement. Depuis la modification du code forestier, l’autorisation de défrichement est subordonnée soit au versement de 3 000 euros par hectare – auquel viendra s’ajouter le coût du dessouchage –, soit au respect de conditions de reboisement, ce qui est inadapté pour certains départements montagneux comme la Corrèze, où le taux de boisement dépasse 50 %. N’est-il pas possible d’adapter cette mesure en fonction de la spécificité des territoires, comme le ministre de l’agriculture l’avait évoqué lors d’un déplacement dans le département, ou de revenir à l’ancien système des dérogations accordées par les préfets, qui satisfaisait à la fois les agriculteurs et les forestiers ?

Enfin, les éleveurs déplorent qu’il leur ait fallu remplir les déclarations de surfaces au mois d’avril, sans connaître les critères de la réforme de la PAC et sans avoir encore obtenu de l’Institut national de l’information géographique et forestière, l’IGN, les éléments nécessaires.

Je vous remercie par avance, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir me transmettre les réponses du ministre de l’agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, qui sont très attendues par les éleveurs. Je pense en particulier aux plus jeunes d’entre eux, qui, débutant dans le métier, trouvent les règles par trop floues et dénoncent l’incertitude ambiante, préjudiciable à leurs intérêts.

L’installation des jeunes relève de la problématique foncière, mais aussi de celle de la revalorisation et de la sécurisation des revenus agricoles, indispensables pour redonner aux jeunes le goût du métier.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Je vous prie, monsieur le sénateur, de bien vouloir excuser l’absence de M. Le Foll, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

Tout d’abord, les prêts bonifiés ont été maintenus, en réponse à une demande forte des organisations professionnelles agricoles, et malgré des paramètres désormais moins incitatifs. C’est l’application directe de la nouvelle réglementation européenne qui conduit à en limiter la durée à cinq ans. Par ailleurs, dans un contexte de taux bas, l’intérêt des prêts bonifiés est moins net qu’il ne l’était voilà quelques années.

En pratique, les crédits publics disponibles pour soutenir ce mode d’intervention en faveur de l’installation peuvent très bien être utilisés pour d’autres interventions, comme les aides aux investissements réalisés par des jeunes.

Ensuite, concernant les droits à paiement de base, il s’agissait de permettre leur transfert entre fermiers.

Le 10 mars, Stéphane Le Foll s’était engagé auprès des agriculteurs à ce que les fermiers puissent, au même titre que les autres agriculteurs, transférer leurs références à un fermier reprenant tout ou partie de leur exploitation.

C’est un sujet très important, sur lequel le Gouvernement avait décidé d’avancer, malgré les réticences de la Commission européenne. Cette dernière a finalement donné son accord officiel sur cette possibilité de transfert entre fermiers, dans les mêmes conditions que les autres types de transfert. Là encore, il s’agit de conditions requises par la réglementation européenne.

En ce qui concerne les aides couplées et le verdissement, ainsi d’ailleurs que les autres aides, je peux vous dire que toutes les règles sont désormais connues, pour la plupart depuis octobre 2014.

Toutes les informations, y compris les notices techniques, sont disponibles et reprises sur le site pac2015.gouv.fr. Chacun doit maintenant s’attacher à les diffuser clairement. C’est d’ailleurs un des objectifs des comités d’appui que le ministre a demandé à chaque préfet de mettre en place pour informer les agriculteurs et les accompagner dans la constitution de leurs demandes d’aides.

Sur la question de l’indemnité compensatoire aux handicaps naturels, je tiens d’abord à rappeler que cette dernière va connaître sa plus forte augmentation depuis sa création, en atteignant plus de 1 milliard d’euros dès 2017, conformément aux engagements pris par le Président de la République à Cournon-dAuvergne en 2013.

Je souligne que la France a obtenu satisfaction sur quasiment toutes ses demandes face à la Commission, qui défendait de manière globale une conception de cette aide n’ayant jamais été celle de notre pays.

Votre question précise sur la suppression de la limite d’âge, jusqu’alors fixée à 65 ans, porte sur un point mineur. La France n’a pu faire prévaloir sa position, mais cette suppression n’aura qu’une incidence très limitée, dans la mesure où quelqu’un qui aurait des revenus extra-agricoles d’un certain niveau ne pourra de toute façon pas toucher cette aide, comme c’était déjà le cas auparavant. En revanche, un agriculteur toujours en activité dans les zones de montagne concernées et âgé de plus de 65 ans touchera toujours l’aide, ce qui n’est pas choquant en soi et permet de répondre à certaines demandes. L’impact sur les jeunes et l’installation ne sera que très marginal.

Enfin, la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a retenu le principe de la compensation obligatoire à tout défrichement.

Cette compensation peut se faire soit en reboisement, soit au travers de travaux sylvicoles pour un montant équivalent ou par le versement d’une somme équivalente au Fonds stratégique de la forêt et du bois.

Il faut noter que, à la suite de l’intervention de nombreux sénateurs, y compris du Limousin, la reconquête d’espaces agricoles enfrichés n’entre pas dans le champ de la compensation : des boisements de moins de trente ans sont, sous certaines conditions, exemptés d’autorisation de défrichement, et donc de compensation. La loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt a également dispensé d’autorisation les défrichements réalisés dans des communes de montagne à très fort taux de boisement – supérieur à 70 %. Si les communes ou les parcelles que vous évoquez remplissent ces critères, il ne devrait pas y avoir de difficultés.

De manière globale, la protection des forêts et le reboisement ayant été reconnus d’intérêt général par la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt, le principe général de compensation obligatoire en cas de défrichement apparaît entièrement légitime au regard des services rendus par la forêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Je remercie M. le secrétaire d’État de cette réponse, qui semble très claire. J’en ferai part aux agriculteurs.

Je regrette que les bonifications de prêts soient limitées dans le temps. Par ailleurs, en zone de montagne, souvent le foncier manque mais le défrichement est impossible à mettre en œuvre au regard des dépenses à engager : 3 000 euros par hectare, c’est beaucoup, sachant qu’il faut aussi prendre en compte les frais de dessouchage et de remise en culture. Enfin, j’espère que les règles de la PAC sont désormais parfaitement connues. En avril, elles ne l’étaient pas encore complètement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Cyril Pellevat, auteur de la question n° 1052, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Je souhaite appeler l’attention sur la formation biqualifiante aux métiers de la montagne proposée au lycée Frison-Roche de Chamonix.

Ce lycée fait partie des quatre établissements de l’académie de Grenoble dispensant à des lycéennes et des lycéens ayant déjà un bon niveau sportif une formation destinée à les aider à mener un double projet d’orientation professionnelle articulé autour des métiers de la montagne.

Les jeunes suivent le programme scolaire des filières générales, technologiques ou professionnelles, assorti de contenus ciblés propres à la préparation des diplômes d’État des métiers de la montagne. Ils peuvent ainsi valider, à l’issue du lycée, une première partie d’un diplôme d’État d’accompagnateur en montagne, de ski alpin ou de ski de fond, qui assure une employabilité immédiate.

Afin de compléter la culture montagnarde des élèves, est associé à ce programme d’enseignement technique un enseignement pratique en montagne, soit sur des sites-écoles, soit sur des parcours d’initiation de niveau facile à peu difficile pour le ski, les raquettes ou l’escalade.

Tout d’abord, je tiens à souligner et à saluer les efforts de l’éducation nationale et des équipes pédagogiques associées pour proposer aux jeunes des vallées et des montagnes des formations innovantes qui leur assurent un débouché rapide et efficace dans le secteur économique, majeur dans mon département de la Haute-Savoie, des activités touristiques du ski et du plein air.

Ces formations sont notamment un réel enjeu pour les emplois saisonniers en montagne. Elles connaissent un grand succès : 200 personnes étaient présentes lors de la journée « portes ouvertes » organisée par l’établissement, fin janvier 2015.

Il conviendrait que le ministère aille plus loin, afin de rendre encore plus performant ce dispositif, qui porte ses fruits. Dans cette perspective, je désire soulever le problème du transport des élèves pour leurs activités en plein air.

En effet, si l’on prend l’exemple du lycée Frison-Roche, la nature de l’environnement immédiat de l’établissement fait que les terrains utilisés pour la pratique relèvent rapidement d’une cotation « assez difficile », pas toujours adaptée aux exigences techniques et pédagogiques ni au niveau sportif des élèves, selon la météorologie et le type d’exercices. Or la réglementation actuelle sur les transports scolaires ne permet pas une mobilité rapide des élèves et des coordonnateurs vers des sites plus appropriés ; elle manque de souplesse.

Aussi serait-il souhaitable d’envisager un dispositif qui puisse permettre d’améliorer la mobilité des élèves, toujours dans un cadre réglementaire. Cela permettrait de réaliser l’activité sportive en zone adaptée, de modifier le programme d’activité le matin même ou de permettre un repli en cas de mauvais temps, d’alléger la charge de travail administratif des coordonnateurs et des services comptables du lycée.

Enfin, l’utilisation des ressources locales serait source d’économies pour le budget de la région. Les écoles de ski possèdent des minibus, les professionnels de la montagne ont des véhicules à neuf places et les établissements scolaires pourraient s’équiper.

Conscient de la responsabilité qui incombe à l’institution scolaire à l’égard des élèves qui lui sont confiés durant le temps scolaire et de l’obligation de surveillance pour qu’ils ne subissent aucun dommage, conscient de la rigueur des dispositifs de transport, sachant que la formation biqualifiante retient l’attention du rectorat et qu’elle est très suivie, je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de m’indiquer quelles solutions pourraient être envisagées afin d’améliorer cette formation particulièrement innovante et unique, à travers un aménagement en matière de transport des élèves.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Monsieur Pellevat, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse à la question très précise que vous avez posée.

L’organisation de sorties scolaires participe à la mission éducative des établissements d’enseignement. C’est pourquoi le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche l’encourage vivement.

Cependant, ces sorties scolaires ne peuvent intervenir que dans un cadre réglementé qui assure la sécurité des élèves.

Ainsi, la circulaire 2011-117 du 3 août 2011 prévoit que le transport des élèves et des accompagnateurs doit être assuré par un conducteur professionnel. En tout état de cause, il n’appartient pas aux enseignants, au regard de leurs obligations statutaires, de conduire des véhicules, que ceux-ci soient personnels, de location ou de service.

Néanmoins, à titre exceptionnel, un enseignant en service peut conduire un véhicule personnel après y avoir été autorisé par le chef d’établissement et quand l’intérêt du service le justifie. Ces conditions doivent se matérialiser au travers d’un ordre de mission. Je tiens en outre à préciser que cette mesure a un caractère supplétif et n’est utilisée qu’en dernier recours, c’est-à-dire en cas d’absence momentanée d’un transporteur professionnel ou de refus de celui-ci d’effectuer le trajet. De plus, elle s’applique uniquement dans le cadre des activités scolaires obligatoires ou de certaines activités périscolaires.

Vous faites état de la situation des élèves en biqualification en zone de montagne. Ces derniers ont un emploi du temps établi à l’avance, dans lequel les sorties scolaires ont un caractère régulier et prévisible. Dès lors, en application des textes que je viens de vous rappeler, l’établissement doit faire appel à un conducteur professionnel. C’est une règle de sécurité essentielle, prise dans l’intérêt des personnes transportées, ainsi que des enseignants.

Monsieur le sénateur, notre école est responsable de l’éducation des jeunes de notre pays, mais également et prioritairement de leur sécurité lorsqu’elle les a sous sa garde. C’est avec ce souci constant que le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche conduit son action.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Je vous remercie de cette réponse, monsieur le secrétaire d’État. Bien évidemment, je suis un peu déçu. Les établissements scolaires demandent un peu plus de souplesse. Sachez que les lycées qui proposent ce type de formation biqualifiante aux métiers de la montagne attendent beaucoup plus du ministère sur ce point précis.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Richard Yung, auteur de la question n° 1053, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

Sur les quelque 3 millions de demandes de visa d’entrée en France reçues chaque année par nos consulats, 10 % sont rejetées en moyenne, ce taux variant fortement selon les pays.

Ensuite, nous ne savons pas très bien ce qui se passe. Il existe une commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France, qui siège à Nantes, mais nous ne disposons pas des chiffres retraçant son activité. À ma connaissance, il est très rare que cette commission fasse droit aux demandes des ressortissants étrangers qui la saisissent, mais je ne détiens pas de données précises. De même, je ne sais pas quel sort le ministère réserve à l’avis de la commission : le suit-il en règle générale ou lui arrive-t-il de passer outre ?

Le 17 juillet 2014, j’ai interrogé par écrit le ministre des affaires étrangères sur ce sujet. Il n’y a pas eu de réponse, non plus qu’à un second courrier adressé en décembre 2014… Cette situation m’a conduit à poser la présente question orale au Gouvernement : c’est mon dernier espoir d’obtenir une réponse !

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Monsieur Yung, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui m’a chargé de vous transmettre sa réponse.

Les étrangers qui se voient refuser la délivrance d’un visa par un poste diplomatique ou consulaire doivent, avant tout recours contentieux devant la juridiction administrative, présenter un recours administratif préalable devant la Commission de recours contre les décisions de refus de visa d’entrée en France, la CRRV, créée en novembre 2000.

La commission dispose d’un délai de deux mois pour se prononcer. À défaut, le recours est réputé avoir fait l’objet d’une décision implicite de rejet. La CRRV, par son rôle de filtre, permet de limiter le nombre des recours contentieux devant le tribunal administratif de Nantes, compétent en première instance depuis 2010.

Le nombre de recours introduits devant la CRRV a augmenté de 277 % entre 2010 et 2014, pour atteindre le chiffre record de 19 864. Pour information, 5 269 recours avaient été enregistrés en 2010. Cette progression est liée à deux facteurs : la progression quantitative de la demande de visas et la communication, par les postes diplomatiques et consulaires, des motifs de refus et des voies de recours, procédure d’information qui a été généralisée aux visas de court séjour en avril 2011.

La commission, dont les effectifs n’ont pu croître dans les mêmes proportions que le nombre des recours, malgré de réels efforts de redéploiement des emplois équivalents temps plein au sein de la sous-direction des visas, a donc dû faire face à un accroissement brutal de ses tâches.

Ne pouvant traiter tous les recours dans le délai réglementaire de deux mois malgré la rationalisation de ses méthodes de travail, elle a mis en place un préexamen systématique et immédiat des demandes qui lui sont adressées, afin de détecter, d’une part, les recours manifestement irrecevables ou mal fondés, et, d’autre part, les recours devant être examinés en urgence compte tenu du caractère solide des éléments apportés.

Cette nouvelle organisation et la mise en place d’une commission mensuelle supplémentaire ont permis une augmentation constante du nombre de décisions explicites prises par la CRRV depuis 2012 : elle a été de 76 % entre 2012 et 2014.

Enfin, pour l’année 2014, sur 19 864 recours enregistrés, la commission en a rejeté 19 578 et 286 ont fait l’objet d’une recommandation de délivrance de visa.

Debut de section - PermalienPhoto de Richard Yung

On voit bien quels sont les chiffres : 3 millions de demandes de visa, 300 000 rejets, 19 000 recours, 280 décisions favorables aux requérants, le Gouvernement restant de toute façon libre de suivre ou non l’avis de la CRRV…

Notre sentiment est ce que toute cette procédure ne sert pas à grand-chose. Elle donne un faux espoir aux déboutés. Je reprendrai cette discussion avec le ministre de l’intérieur.

Un élément de réponse m’a surpris. Je croyais que la loi française disposait désormais que l’absence de réponse valait accord de l’administration. Or j’observe que, en l’espèce, c’est le contraire. Ce sera un deuxième sujet de discussion avec le ministre de l’intérieur…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Gilbert Roger, auteur de la question n° 1069, adressée à M. le ministre des affaires étrangères et du développement international.

Debut de section - PermalienPhoto de Gilbert Roger

Je souhaite attirer l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et du développement international sur la plainte pour crime contre l’humanité déposée le 10 septembre 2014 par la Coordination des chrétiens d’Orient en danger, la CHREDO, à l’encontre de Daesh, que le procureur de la Cour pénale internationale a décidé d’instruire.

Au moins quatre-vingt-dix chrétiens de rite assyrien sont aux mains de Daesh depuis la fin du mois de février 2015, à la suite de l’enlèvement par le groupe djihadiste des habitants de deux villages du nord-est de la Syrie, situés dans une zone contrôlée par les forces kurdes. La France doit agir et s’engager davantage dans la lutte contre les exactions commises à l’encontre des chrétiens d’Orient et des diverses minorités, en raison de leur religion, et des musulmans sunnites qui ne partagent pas les croyances des membres de Daesh.

Je demande donc à M. le ministre de bien vouloir m’indiquer quelles initiatives compte prendre le Gouvernement pour protéger les chrétiens d’Orient et si celui-ci est disposé à soutenir la plainte pour génocide et crime contre l’humanité déposée par la CHREDO contre Daesh devant la Cour pénale internationale.

Debut de section - Permalien
Thierry Mandon

Monsieur le sénateur, M. le ministre des affaires étrangères et du développement international, retenu à l’étranger, m’a chargé de vous répondre.

La France condamne fermement les violences et les exactions à l’encontre des civils, quelle que soit leur appartenance religieuse ou ethnique. Elle est particulièrement préoccupée par la situation des chrétiens d’Orient, avec lesquels la France entretient des liens spécifiques hérités de l’histoire.

Vous nous interrogez sur les initiatives que compte prendre le Gouvernement pour protéger les chrétiens d’Orient et les autres populations persécutées. La France n’a pas attendu pour agir. Dès l’offensive de Daesh vers Mossoul, en juillet 2014, elle a apporté une assistance aux déplacés, notamment chrétiens ou yézidis, et a favorisé l’accueil de ces personnes sur son sol au titre de l’asile.

Le 27 mars, elle a convoqué une réunion ministérielle du Conseil de sécurité des Nations unies consacrée aux victimes de violences ethniques ou religieuses au Moyen-Orient. À l’occasion de ce débat inédit, elle a proposé l’élaboration par les Nations unies d’une charte d’action comprenant quatre volets : l’accompagnement humanitaire, pour répondre à l’urgence ; l’accompagnement militaire, pour permettre le retour des populations persécutées sur les terres dont elles ont été chassées ; les solutions politiques inclusives dans les pays en crise ; la lutte contre l’impunité pour les auteurs des crimes, dont certains sont constitutifs de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité.

Comme l’a annoncé le ministre des affaires étrangères et du développement international, la France accueillera prochainement une conférence internationale consacrée à la mise en œuvre de ces orientations pour la protection des personnes victimes de violences ethniques ou religieuses. Nous sommes également en contact constant avec les autorités locales et nationales en Irak, afin que tout soit mis en œuvre pour assurer cette protection.

Concernant la lutte contre l’impunité pour les auteurs des crimes, la France appelle tous les États à adhérer au Statut de Rome, pour que justice soit rendue aux victimes des crimes les plus graves ayant une portée internationale. Comme l’a souligné le ministre des affaires étrangères et du développement international lors de la réunion du 27 mars, il est indispensable que le Conseil de sécurité saisisse la Cour pénale internationale. Nous vous rappelons que la France a présenté au Conseil de sécurité, en mai 2014, une résolution visant à déférer la situation en Syrie à la Cour pénale internationale. Cette résolution, qui était soutenue par plus d’une soixantaine d’États, s’est cependant vu opposer les vetos russe et chinois.

Nous encourageons par ailleurs les États sur le territoire desquels les membres de Daesh ont perpétré des crimes ou dont ils ont la nationalité à les poursuivre et à les juger en vertu de leur compétence au titre des lois nationales et des conventions internationales auxquelles ils sont parties.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Jean-Patrick Courtois, auteur de la question n° 1044, adressée à M. le ministre de l'intérieur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

En France, selon une étude de l’INSEE parue en novembre dernier, le nombre des sans domicile fixe a progressé de 44 % au cours des onze dernières années. Cette augmentation sensible se traduit par une concentration de plus en plus en importante dans les centres-villes, prenant souvent la forme de rassemblements de quatre ou cinq personnes qui, pour éviter la solitude liée à leurs conditions de vie très difficiles, ont plusieurs chiens pour animaux de compagnie. Ces rassemblements ne constituent pas en eux-mêmes un délit, car, en vertu d’un principe républicain, toute personne dispose du droit de circuler librement, mais ils peuvent être une source de perturbation de l’ordre public.

Il ne s’agit naturellement pas de remettre en cause le droit de circuler librement, mais seulement de souligner que ces rassemblements engendrent un climat d’inquiétude et posent un réel problème de salubrité publique : excréments d’animaux sur la voie publique, conditions d’hygiène plus que sommaires, etc.

En tant que maire, je suis souvent sollicité par mes administrés pour tenter d’apporter une solution à ce problème. Je souhaiterais donc savoir quelles dispositions pourraient être prises par les élus locaux ou les forces de police pour dissuader ces rassemblements, sans pour autant porter atteinte à la liberté de circuler dans les centres-villes. Il s’agit avant tout de trouver des solutions pouvant apaiser l’inquiétude des citoyens sans stigmatiser des personnes qui sont déjà suffisamment en souffrance.

Debut de section - Permalien
Thierry Mandon

Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser l’absence du ministre de l’intérieur, qui m’a chargé de répondre à votre question.

Vous évoquez un sujet qui appelle des réponses mesurées et adaptées au contexte local, à Mâcon comme partout en France. Un équilibre doit être trouvé entre le respect de la liberté d’aller et venir, constitutionnellement protégée, et la préservation de l’ordre public. Le sujet nécessite également d’être traité avec humanité, car il s’agit d’hommes et de femmes confrontés à des situations personnelles difficiles ; j’ai bien noté que telle était votre approche.

Pour commencer, je voudrais rappeler le cadre législatif permettant de sanctionner les comportements qui pourraient troubler l’ordre public.

L’article 312-12-1 du code pénal sanctionne d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 3 750 euros d’amende « le fait, en réunion et de manière agressive, ou sous la menace d’un animal dangereux, de solliciter, sur la voie publique, la remise de fonds, de valeurs ou d’un bien ». Des sanctions pénales beaucoup plus lourdes sont prévues pour l’exploitation de la mendicité d’autrui, en particulier lorsque cette infraction est commise à l’égard d’un mineur.

Ces dispositions pénales fondent juridiquement les services de police à effectuer des contrôles dont la mise en œuvre peut, en elle-même, suffire à faire cesser les troubles à l’ordre public qui seraient constatés. En outre, le maire dispose de pouvoirs de police lui permettant de prendre les mesures qui lui paraissent nécessaires en vue de préserver le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Bien évidemment, ces mesures doivent toujours rester proportionnées aux dommages potentiels ; la juridiction administrative s’en assure lorsqu’elle est saisie.

Par ailleurs, l’une des meilleures manières de prévenir les troubles à l’ordre public consiste sans doute à prévoir des dispositifs d’accueil adaptés. Par exemple, à Paris, la préfecture de police a mis en place, de longue date, une brigade d’assistance aux personnes sans abri. Dans de nombreuses villes, les municipalités ont confié aux associations la gestion de centres d’accueil, dont certains répondent aux besoins des personnes sans domicile fixe en leur offrant la possibilité de stocker leurs bagages ou encore d’accueillir leur chien.

Bien entendu, aucune des mesures que je viens d’évoquer ne saurait suffire à elle seule. Seule une combinaison des dispositifs préventifs, sociaux, mais aussi, quand cela est nécessaire, répressifs, est de nature à répondre efficacement à votre questionnement, qui invite à une réflexion municipale globale sur les règles et les principes du vivre-ensemble.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Patrick Courtois

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État, mais le problème reste entier. Nous sommes désarmés durant la journée. À Mâcon, il existe un asile de jour et un asile de nuit, mais, lorsque des rassemblements de personnes fortement alcoolisées se forment dans le centre-ville, notamment près des magasins d’alimentation, cela pose des problèmes considérables de relations entre les populations. Il y a parfois des bagarres ou des tentatives d’extorsion de fonds, et les forces de police sont complètement désarmées.

C’est un sujet important, qu’il faut examiner calmement, dans le respect de la dignité humaine ; il ne s’agit pas du tout de repousser les SDF hors des centres-villes. Il faudrait que le ministère de l’intérieur et l’Association des maires de France travaillent ensemble sur ce sujet, car j’ai peur que les habitants ne finissent un jour par faire eux-mêmes la police.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Bruno Sido, auteur de la question n° 1061, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Je souhaite appeler l’attention de Mme la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche sur la place de l’éducation nationale au sein du système de formation par apprentissage, à la suite du diagnostic et des propositions de réformes publiés le 19 décembre 2014 par le Conseil d’analyse économique, instance placée auprès du Premier ministre.

La lecture de cette étude, dont Jean Tirole, « prix Nobel » d’économie, est l’un des auteurs, fait apparaître un constat préoccupant pour les formations de niveau V comme le certificat d’aptitude professionnelle, le fameux CAP.

En effet, de 2004 à 2010, la progression du nombre d’apprentis s’explique par l’essor de l’apprentissage dans l’enseignement supérieur : le nombre d’apprentis y a augmenté de 24 %. À l’inverse, le nombre d’entrées en apprentissage des élèves de niveau CAP a diminué de 6 %.

Pour expliquer cette situation, certains pointent le fait que l’apprentissage peine à être perçu comme une solution positive d’orientation. Il s’agit là d’un vrai défi, que la formation des enseignants doit permettre de relever. De fait, ce sont souvent des collégiens en difficulté qui sont orientés par défaut vers l’apprentissage. Sans doute les enseignants pourraient-ils être davantage formés à identifier les talents autres qu’académiques.

Mettons-nous à la place d’un apprenti en CAP qui débute sa formation et s’aperçoit que les matières académiques conservent une place prépondérante. Cela peut contribuer à expliquer le taux d’échec considérable – il est de 40 % – en CAP. En somme, l’apprentissage de niveau V est encore trop scolaire et trop éloigné des besoins des entreprises, pour deux raisons : l’insuffisante association des entreprises à la définition des programmes et l’excessive lourdeur des procédures pour ouvrir une nouvelle formation.

Enfin, l’apprentissage implique de trop nombreux intervenants, peu ou mal coordonnés. Simplifier la gouvernance est un enjeu majeur pour gagner en efficacité et mieux comprendre qui est responsable de quoi.

Dans ces conditions, je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de bien vouloir m’indiquer quelles mesures concrètes sont prévues pour réduire le taux d’abandon en CAP et mieux répondre aux forts besoins du tissu économique.

Debut de section - Permalien
Thierry Mandon

Monsieur Sido, je vous prie d’excuser l’absence de Mme Vallaud-Belkacem, qui, vous le savez, a beaucoup à faire en ce moment et m’a donc chargé de vous répondre.

Vous l’avez souligné, l’apprentissage souffre d’un manque d’attractivité. Le ministère de l’éducation nationale agit donc pour lui redonner toute la visibilité nécessaire ; cette action est vraiment au tout premier rang de ses priorités. Ainsi, les journées d’information sur les métiers, qui précèdent les choix d’orientation, réserveront désormais une place particulière à l’apprentissage. La découverte de cette voie sera également intégrée dans le parcours individuel d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel, le PIODMEP, à partir de la classe de cinquième. En outre, les formations en apprentissage seront intégrées dans les logiciels d’orientation post-baccalauréat. Enfin, des parcours mixtes combinant statut scolaire et apprentissage seront désormais possibles, afin d’éviter aux élèves des changements d’établissement qui pourraient les détourner de cette voie.

Toutefois, si l’information et l’orientation doivent être renforcées, il est également très important, me semble-t-il, de rapprocher l’éducation nationale du monde de l’entreprise, pour améliorer l’attractivité et la réussite des actions d’apprentissage.

De ce point de vue, le ministère de l’éducation nationale est déterminé à rendre les formations par la voie de l’apprentissage plus conformes aux attentes du monde du travail, afin de favoriser l’insertion rapide des jeunes apprentis dans le monde professionnel. Il a engagé une expérimentation avec huit branches professionnelles, afin de rénover en profondeur le processus d’élaboration des diplômes. Il sera particulièrement attentif aux filières le plus en tension, ainsi qu’aux premiers niveaux de qualification.

Enfin, pour lutter contre l’échec scolaire, qui touche plus fortement le secteur de l’apprentissage, des mesures concrètes de lutte contre le décrochage ont été mises en œuvre par ce gouvernement. Une attention toute particulière est accordée au choix de l’orientation et à l’assiduité des élèves. S’agissant plus particulièrement des établissements accueillant des apprentis, ils sont encouragés à développer la mixité des publics, afin de créer une atmosphère stimulante et valorisante pour ces derniers.

Au travers de ces différentes mesures, il s’agit de mettre en œuvre progressivement un plan d’action systématique, qui doit aider les élèves à s’accomplir et à se réaliser, que ce soit par la voie générale ou la voie professionnelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Sido

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de votre réponse.

Je voudrais cependant citer quelques chiffres, qui sont accablants. Le nombre d’apprentis a baissé de 8 % en 2013, de 3 % en 2014 et de 15 % depuis le début de l’année 2015. Aussi M. le Président de la République, qui, j’en conviens, est très mobilisé sur ce sujet, a-t-il fixé un objectif de 500 000 jeunes en alternance, en affirmant que « relancer l’apprentissage, c’est relancer l’emploi, c’est réaffirmer la priorité à la jeunesse ».

Je veux également signaler que 70 % des apprentis qui vont jusqu’au bout de leur cursus trouvent un emploi dans les six mois suivant la fin de leur formation, alors que 25 % de nos jeunes sont, hélas, au chômage…

Monsieur le secrétaire d’État, vous l’avez bien compris, il s’agit non pas d’une question politicienne, mais d’une vraie question politique : comment faire pour que nos jeunes intègrent le monde du travail ? Il faut rassembler l’éducation nationale et les entreprises pour définir des programmes adaptés à des jeunes qui, s’ils ne sont pas forcément très intellectuels, sont pétris de qualités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

La parole est à M. Michel Canevet, auteur de la question n° 1064, adressée à Mme la ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

J’ai souhaité interroger la ministre de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, qui est effectivement très occupée en ce moment, sur la situation du collège Kerhallet à Brest, qui devrait être classé en réseau d’éducation prioritaire renforcée, dit REP+, si l’on veut confirmer la priorité accordée à la formation des jeunes et à leur meilleure insertion en milieu scolaire.

La première carte relative à ce nouveau dispositif ne retenait qu’un seul collège situé en Bretagne, ce qui fait de celle-ci la région métropolitaine comptant le moins d’établissements classés en zones sensibles, au titre des dispositifs REP+ et REP. On en dénombre dix-sept pour la seule agglomération de Marseille, monsieur le président.

Le secteur de rattachement de ce collège est constitué pour l’essentiel par le quartier de Bellevue, dont la population rencontre des difficultés sociales. Il est reconnu comme quartier prioritaire au titre de la politique de la ville depuis janvier dernier. Sachant que 80 % des élèves du collège sont désormais issus des quartiers sensibles de Brest, l’inadéquation entre la politique d’intégration scolaire et la politique urbaine me semble dommageable.

Les élèves fréquentant cet établissement connaissent un taux d’échec assez élevé et des retards scolaires, ce qui montre bien la nécessité d’un accompagnement plus soutenu, même si le taux de réussite au diplôme national du brevet s’est ponctuellement amélioré.

S’agissant des difficultés sociales des familles de ce quartier, j’observe que le nombre d’élèves boursiers s’accroît régulièrement depuis plus de quinze ans. Ils représentent aujourd’hui les deux tiers de l’effectif du collège, contre 33 % en 2000. En outre, l’établissement accueille cette année des élèves de seize nationalités différentes, ce qui oblige l’équipe éducative, dont j’ai constaté la mobilisation et la très forte motivation, à apporter un soutien accru.

En conséquence, il me semble nécessaire, monsieur le secrétaire d’État, que soient mis à jour les critères ayant présidé au choix des collèges classés en REP+, pour intégrer les évolutions observées depuis lors.

Si le Gouvernement souhaite la réussite scolaire de tous, le classement de cet établissement doit être revu. Cela est justifié par les difficultés des élèves le fréquentant.

Debut de section - Permalien
Thierry Mandon, secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l'État et de la simplification

Monsieur le sénateur, je vous confirme que le Gouvernement souhaite la réussite scolaire de tous les élèves. C’est la raison pour laquelle il a mis en place une nouvelle cartographie de l’éducation prioritaire, qui a été déterminée dans chaque académie au terme d’un dialogue et en tenant compte de critères objectifs dont on sait qu’ils ont une incidence sur la réussite scolaire.

S’agissant plus particulièrement de l’académie de Rennes, au terme de la discussion qui a été menée, le collège Kerhallet a été maintenu dans le dispositif de l’éducation prioritaire, et cinq écoles primaires lui ont été rattachées pour la rentrée de 2015.

S’agissant plus particulièrement de son classement en REP et non en REP+, l’académie reste pleinement attentive aux besoins des élèves du collège Kerhallet. À cet égard, 40 heures ont été attribuées en sus de la dotation horaire globale, pour permettre d’organiser les enseignements de manière plus individualisée. Le collège bénéficie également d’une dotation en heures d’accompagnement éducatif trois fois plus importante que la moyenne départementale. Un emploi d’assistant d’éducation supplémentaire à temps plein a également été octroyé. Enfin, les fonds sociaux de cet établissement sont trois fois plus élevés que la moyenne des collèges du département.

Ainsi, bien qu’il n’ait pas été classé en REP+, les moyens du collège Kerhallet ont été considérablement renforcés, eu égard à la situation particulière dont vous vous êtes fait l’écho. En effet, il est le collège du département du Finistère le mieux doté au regard du nombre d’élèves qui y sont scolarisés.

Vous le voyez, monsieur le sénateur, le ministère est attentif aux difficultés de chaque établissement. Il adapte la répartition des moyens pour que chaque élève puisse apprendre dans un environnement favorable permettant à tous de réussir.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de cette réponse. Toutefois, elle ne me satisfait guère.

Si ce collège bénéficie effectivement de moyens accrus par rapport aux autres collèges du département, cela est justifié par le fait qu’il a à accueillir une population affrontant de grandes difficultés.

Ce que je dénonce surtout, c’est l’inadéquation entre la politique de la ville définie par le Gouvernement et la politique de soutien scolaire. Il me semblerait en effet logique que ces deux politiques soient mises en cohérence. Dès lors que des quartiers ont été classés en zones sensibles, il convient de prendre en compte cette nouvelle situation.

Je suis donc déçu par la réponse de Mme la ministre de l’éducation nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Gaudin

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures cinquante-cinq, est reprise à quatorze heures trente, sous la présidence de M. Gérard Larcher.