Commission des affaires sociales

Réunion du 17 janvier 2018 à 10h14

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CHU
  • stage

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Avant de donner la parole à notre rapporteur, je commence par vous présenter à tous mes meilleurs voeux pour la nouvelle année.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Nous avons examiné, le 11 octobre dernier, trois projets de loi procédant à la transposition de quatre ordonnances dans le domaine de la santé, qui ont été prises sur le fondement de la loi du 26 janvier 2016. Après la réunion d'une commission mixte paritaire le 5 décembre dernier, seul reste en discussion le projet de loi relatif à la profession de physicien médical et à la reconnaissance des qualifications professionnelles dans le domaine de la santé.

Notre désaccord porte sur une seule des nombreuses dispositions de ce texte ; il est cependant majeur. Notre commission, suivant l'avis quasi unanime des professionnels de santé, a supprimé en première lecture les dispositions relatives à la procédure d'accès partiel ; l'Assemblée nationale les a rétablies en nouvelle lecture.

L'accès partiel constitue un assouplissement très substantiel des procédures d'accès aux professions de santé pour les ressortissants des différents États membres de l'Union européenne. Il s'agit d'autoriser un professionnel de santé formé dans un État membre à exercer certaines des activités entrant dans le champ de compétence d'une profession de santé de son État d'accueil, dès lors que sa profession d'origine ne trouve pas d'équivalent dans ce pays d'accueil. Le juge européen autorise ainsi un masseur-balnéothérapeute formé en Allemagne à exercer partiellement la profession de kinésithérapeute en Grèce.

Je ne reviens pas sur les raisons qui m'ont poussée à préconiser cette solution, qui sont toujours d'actualité. Il me semble en effet que nous sommes assez largement d'accord sur l'impréparation qui a présidé à la mise en place d'une évolution pourtant fondamentale pour notre système de santé, ainsi que sur les risques que ce dispositif présente pour l'organisation, la qualité et la sécurité des soins dispensés aux patients. Ce sont du reste les raisons qui justifient l'opposition unanime et constante des acteurs concernés au premier chef par cette réforme, les professionnels de santé.

Il me paraît plus intéressant de souligner que l'argumentation développée par la rapporteure de l'Assemblée nationale à l'appui de la ratification de cette mesure, lors de la réunion de notre commission mixte paritaire, ne portait que sur le respect des obligations communautaires de la France, et non sur l'intérêt intrinsèque de la procédure d'accès partiel pour l'avenir de notre système de santé. Cette position me paraît révélatrice des conditions de transposition de ce dispositif, qui a fait l'économie d'une véritable concertation de fond avec les professionnels de santé, et n'a pas même exploré la possibilité d'une transposition alternative plus respectueuse du fonctionnement de notre système de santé - telle que celle retenue par l'Allemagne.

Du reste, la parution dès le 2 novembre 2017 du décret encadrant la mise en oeuvre de l'accès partiel, avant même la réunion de la commission mixte paritaire, témoigne assez de ce que le Gouvernement n'avait aucunement l'intention de s'embarrasser d'un véritable débat de fond sur ce texte - qui avait, il est vrai, été élaboré par le Gouvernement précédent. En tout état de cause, ces dispositions réglementaires ne permettent en rien de répondre aux inquiétudes que nous avons formulées en première lecture, s'agissant notamment des compétences d'encadrement et de contrôle dévolues aux ordres.

Pour l'ensemble de ces raisons, je ne peux que réitérer les observations que j'ai déjà formulées devant vous et vous inviter à ne pas sacrifier, contre l'avis de tous les acteurs de la santé, la cohérence de notre système de santé et la qualité des soins à des considérations essentiellement juridiques. Je vous propose donc d'adopter un amendement visant à exclure les dispositions mettant en place l'accès partiel à l'exercice d'une profession médicale ou paramédicale en France du champ de la ratification de l'ordonnance que nous examinons aujourd'hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Vanlerenberghe

Votre position ne me surprend pas, puisque c'est celle que vous aviez défendue en première lecture. Vous avez mentionné une solution alternative adoptée par l'Allemagne, mais il me semble que ce pays n'a tout simplement pas transposé la directive. Par ailleurs, votre souci de prendre en compte l'avis des professionnels de santé est louable, la réalité est que le texte présenté par le Gouvernement sera adopté par l'Assemblée nationale. Pour modifier ce dispositif qui semble déraisonnable, il faut sans doute agir directement au niveau européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Sol

Je déplore, comme vous, que l'avis des professionnels de santé n'ait pas été pris en considération et que l'impact de ce dispositif sur la qualité des soins n'ait pas été mesuré. De plus, sa généralisation à d'autres professions n'est pas souhaitable. La vigilance s'impose donc.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

J'avais indiqué en première lecture que nous n'étions pas d'accord avec la rapporteure. Nous maintenons cette position. D'abord, ce dispositif ne concerne pas toutes les professions de santé. Par ailleurs, nous ne sommes pas moins sensibles que vous à la qualité des soins, nous estimons cependant que les textes d'application la garantiront, au besoin en autorisant des dérogations.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Je propose de nouveau que nous nous penchions sur la formation des praticiens de santé que nous accueillons.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Tourenne

Toujours les mêmes arguments ! Certains sont si excessifs qu'ils en deviennent dérisoires. Vous faites état de l'opposition de l'ensemble de la profession ; que je sache, celle-ci n'a jamais empêché le législateur de prendre les décisions qu'il estimait opportunes. Et ce n'est pas la première fois que la profession se mobilise : ainsi, si nous l'avions écoutée, nous n'aurions jamais adopté le tiers payant. Votre vocabulaire, je crois, a dépassé votre pensée. Soutenez-vous vraiment qu'autoriser un masseur-balnéothérapeute à exercer en France détruirait la cohérence de notre système de santé ? L'ordonnance comporte d'ailleurs des garanties quant à la vérification des connaissances et des compétences des praticiens concernés, voire à la mise en place de formations complémentaires. Bref, cette querelle n'a pas lieu d'être et elle est indigne de notre assemblée.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Cohen

Nous nous abstiendrons. Mais les arguments de la rapporteure donnent matière à réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Si j'apprécie souvent la sagesse et l'humanité de M. Tourenne, sur ce sujet je ne suis pas d'accord avec lui. Professionnel de santé, je ne voudrais pas que ma position soit imputée à une forme de corporatisme. Sur le plan médical, ce dispositif ouvre une brèche et nous verrons bientôt des praticiens élargir indûment leur champ de compétence. Au niveau juridique, le fait que l'Allemagne n'ait pas transposé doit nous inciter à réfléchir. Je m'abstiendrai.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Je suis d'accord avec la rapporteure. En France, il existe une forte sélection pour l'accès à la profession de kinésithérapeute. Il serait anormal que des praticiens moins formés puissent venir l'exercer sur notre territoire. Qui peut le moins ne peut pas le plus !

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Si la France avait, comme l'Allemagne, décidé de ne pas transposer, étant donné le poids de ces deux pays dans l'Union européenne, cela aurait ouvert la voie à un débat qui aurait pu déboucher sur d'autres solutions, je pense par exemple à un programme ambitieux d'harmonisation des formations. Actuellement, tous les diplômes étrangers ne sont pas reconnus. Si la France est contrainte, d'un point de vue juridique, à prendre position, les professions sont unanimes dans leur opposition à ce dispositif ; nous devons en tenir compte et nous montrer vigilants.

Je déplore, en particulier, qu'aucun réel contrôle de l'activité partielle ne soit prévu. L'harmonisation européenne des formations serait bien évidemment bienvenue, mais elle demande du temps. Enfin, l'aspect linguistique n'est pas à négliger. Nous ne disposons actuellement d'aucun outil national standardisé pour mesurer l'aisance en français, à la fois pour les échanges courants et dans le vocabulaire spécialisé.

Nous ne pouvons pas nous contenter d'une argumentation de nature juridique. Il y a eu des cas où la France a tardé pendant des années à transposer, sans être sanctionnée. Nous pouvons donc faire preuve d'un peu de courage !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Nous passons à l'examen de votre amendement n° COM-1.

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Imbert

Il rétablit les dispositions introduites par notre assemblée en première lecture.

L'amendement n° COM-1 est adopté. L'article 2 et le projet de loi sont adoptés dans la rédaction issue des travaux de la commission.

La commission nomme M. Bernard Jomier en qualité de rapporteur sur la proposition de loi portant création d'un fonds d'indemnisation des victimes de produits phytopharmaceutiques et M. Yves Daudigny en qualité de rapporteur sur la proposition de loi relative à la réforme de la caisse des Français de l'étranger.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

Nous recevons à présent les magistrats de la Cour des comptes venus nous présenter le premier volet d'une enquête réalisée à la demande de notre commission et portant sur le rôle des centres hospitaliers universitaires (CHU) dans le système de santé. Je remercie de leur présence M. Patrick Lefas, président de chambre maintenu, M. Noël Diricq, contre-rapporteur, M. Michel Clément, conseiller maître, Mme Laure Fau, conseillère référendaire, ainsi que les magistrats qui les accompagnent : MM. Frédéric Gaston, Jean-Christophe Bras, Mme Florence Gérard-Chalet, rapporteurs extérieurs, et le professeur Patrick Netter, conseiller-expert.

Les CHU ont été institués en 1958, il y aura bientôt soixante ans. Au nombre de 30, ils occupent une place considérable en termes d'activité et de financement dans le système hospitalier. Les CHU ont une mission spécifique en matière de formation des médecins et de développement de la recherche, sans pour autant en détenir le monopole puisque d'autres établissements participent aussi à ces activités de formation et de recherche. Les CHU exercent également des missions de soins, mais elles ne se limitent pas à des soins de haut niveau, supposant un degré élevé d'excellence ou de spécialisation. Les CHU font aussi office d'hôpitaux de proximité dans les métropoles et leurs bassins de population. Il s'agit là d'ailleurs d'une situation assez originale par rapport à celle d'autres pays européens.

Dans un contexte marqué par les difficultés et les tensions que connaît globalement le système hospitalier, y compris les CHU, il me paraissait nécessaire de nous interroger sur le rôle des CHU dans notre organisation sanitaire, sur la manière dont ils répondent aux objectifs qui leur ont été assignés en matière de recherche, de formation et bien entendu de soins. S'agissant de cette mission de soins, il y a également lieu d'examiner l'articulation entre les CHU et les autres établissements de santé en se demandant si, au niveau territorial, la gradation est véritablement optimale du point de vue de l'accès à des soins de qualité et de la bonne utilisation des financements publics.

Nous ne pourrons pas obtenir les réponses à l'ensemble de ces questions aujourd'hui. Lorsque nous avons discuté sur-le-champ de cette enquête avec le Premier président de la Cour, M. Didier Migaud, nous avons convenu que, compte tenu de l'ampleur du sujet, celle-ci pourrait faire l'objet de deux volets : un premier consacré aux missions de formation et de recherche, un second consacré à la politique de soins et permettant de dresser une conclusion générale. C'est le premier volet de l'enquête qui va nous être présenté ce matin. Le second le sera en fin d'année.

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Je suis heureux de vous présenter aujourd'hui le premier volet de l'enquête sur le rôle des CHU dans le système de santé. L'ampleur du sujet imposait en effet de le diviser en deux parties. Cette première enquête a été conduite par une formation inter-chambres associant des représentants de la troisième chambre, compétente pour l'enseignement supérieur et la recherche, et de la sixième, qui s'occupe des questions de santé et, depuis le 1er janvier, du secteur médico-social. Nous ne traitons pas, dans cette première partie, de la formation continue, mais uniquement de la formation initiale, qui répond à une logique organisationnelle différente.

Parmi le millier d'établissements publics de santé, 30 établissements répondent aux critères de l'ordonnance du 30 décembre 1958, à savoir qu'ils sont liés par convention avec une ou plusieurs unités de formation et de recherche médicale au sein d'une université. La très grande majorité d'entre eux ont signé leur convention initiale entre 1965 et 1975.

Des disparités importantes existent cependant parmi les CHU. L'AP-HP fait figure d'exception avec plus de 7,3 milliards d'euros de produits, mais elle est composée de 12 groupements hospitaliers qui fonctionnent chacun avec une des 7 facultés de médecine franciliennes et dont le budget et la taille sont souvent proches de ceux des CHU de province. Loin derrière, 5 CHU ont un budget supérieur à un milliard d'euros, compris entre 1,1 et 1,7 milliard d'euros. Les 8 CHU les plus petits ont des budgets de moins de 500 millions d'euros. Depuis plusieurs années, le résultat consolidé des CHU est négatif et la baisse de leur capacité d'autofinancement a un impact négatif sur le niveau de leurs investissements. Leur activité de proximité, de recours et de référence représente près de 38 % des séjours de l'hospitalisation publique. À ce titre, ils prennent en charge 25,5 % des passages aux urgences, 40 % des séjours les plus graves et 30 % des séjours des patients de moins de 5 ans et de plus de 80 ans du secteur public. Plus de 68 % de leur financement est assuré par les produits issus de l'activité de soins et les personnels hospitalo-universitaires représentent 7,5 % des ETP rémunérés par les CHU.

Depuis l'introduction en 2004 de la tarification à l'activité (T2A), les missions d'enseignement et de recherche qu'ils remplissent sont financées au sein des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation (Migac) par les recettes des missions d'enseignement, de recherche, de référence et d'innovation (Merri). En 2016, ces financements Merri s'élèvent à 3,5 milliards d'euros, dont la très grande majorité est versée aux CHU. Le modèle d'allocation de ces recettes est de plus en plus fondé sur des critères de performance, appuyés sur les scores produits par le système d'interrogation, de gestion et d'analyse des publications scientifiques (Sigaps) et le système d'information et de gestion de la recherche et des essais cliniques (Sigrec), qui sont des indicateurs d'activité de recherche, déterminés sur la base, respectivement, des publications scientifiques des établissements et des essais cliniques à promotion hospitalière dans lesquels sont impliqués les établissements.

En même temps que les CHU a été créé le statut des médecins hospitalo-universitaires par fusion des deux hiérarchies qui existaient alors, l'une universitaire - docteurs, assistants, agrégés et professeurs - et l'autre hospitalière - externes, internes, chefs de clinique, chefs de service. Le personnel hospitalo-universitaire est défini dès 1958 comme du personnel médical et scientifique exerçant à plein temps des fonctions universitaires et hospitalières. En 2015-2016, les ministères chargés de la santé et de l'enseignement supérieur dénombraient un total de 5 666 postes de personnels hospitalo-universitaires titulaires en médecine, dont 4 020 professeurs des universités-praticiens hospitaliers (PU-PH) et 1 646 maîtres de conférences des universités-praticiens hospitaliers (MCU-PH).

Notre enquête a été conduite, classiquement, à partir de questionnaires et d'entretiens avec l'ensemble des acteurs concernés. En outre, nous avons consulté des personnalités éminentes du milieu hospitalo-universitaires, comme les professeurs Alain Fischer, Olivier Lyon-Caen, Jacques Marescaux, Lionel Collet ou Jean-François Delfraissy. Au total, près de 200 personnes ont reçu les rapporteurs dans toute la phase d'instruction. Un échantillon de six sites a été retenu, au sein desquels la qualité de la coordination entre les différents partenaires - CHU, université, EPST - a été particulièrement étudiée : l'AP-HP, en lien avec les universités Pierre et Marie Curie et Paris-Sud, Bordeaux, Strasbourg, Angers et Saint-Étienne. Cet échantillon a permis d'examiner la situation de quatre des six instituts hospitalo-universitaires (IHU) : deux IHU rattachés à la Pitié-Salpêtrière, l'Institut du cerveau et de la moelle et l'Ican pour les maladies cardiaques, un rattaché à l'hôpital Necker, Imagine, pour les maladies génétiques, et le dernier, LiRYC, à Bordeaux, pour les maladies cardiaques. Les deux derniers n'étaient pas dans notre échantillon, mais n'en ont pas moins été analysés : Polmit pour les maladies infectieuses à l'AP-HM et Mix-Surg aux hôpitaux universitaires de Strasbourg, sur la chirurgie mini-invasive. Mais nous n'avons pas traité du modèle économique des IHU, car il venait de donner lieu à un rapport de l'Igas et de l'IGAENR. Enfin, des comparaisons internationales ont été réalisées avec plusieurs pays européens et avec les États-Unis. Elles font l'objet de l'annexe n° 4 du rapport, qui montre que le modèle des CHU a quelque peu vieilli.

Le rapport est organisé en trois chapitres. Le premier présente les constats de la situation actuelle, portant sur les trois missions des CHU. Le deuxième chapitre identifie les fragilités du système. Il porte principalement sur les défaillances de l'organisation et du financement de la recherche biomédicale, sur la nécessité de redéfinir la place des CHU dans le système de formation médicale et sur le statut des personnels hospitalo-universitaires, qui apparaît moins attractif pour les jeunes générations. Enfin, le troisième chapitre est plus prospectif. Il identifie les enjeux d'avenir pour les CHU en matière de formation et de recherche, présente les enseignements que l'on peut tirer des exemples étrangers et, dans sa dernière partie, dessine des évolutions possibles pour le système français.

Le premier chapitre dresse un état des lieux. Des trois missions de soins, de recherche et de formation, les soins concentrent l'attention et les moyens des CHU. Cette priorité a été renforcée par la généralisation de la T2A et les difficultés financières rencontrées par la majorité de ces établissements, sans que l'on puisse mesurer l'impact de ces évolutions sur les missions d'enseignement et de recherche.

La qualité de la coordination entre les CHU et leurs universités de rattachement apparaît contrastée selon les sites et dépend souvent de facteurs historiques et des relations personnelles entre les dirigeants. Les nouvelles responsabilités des présidents d'université, issues de la loi de 2007, ainsi que la part croissante des autres disciplines dans la recherche médicale, incitent à un renforcement des relations entre le président de l'université et les dirigeants du CHU, au-delà du lien traditionnel avec le doyen de la faculté de médecine.

Les dernières années ont vu l'émergence d'une nouvelle ambition des CHU en matière de recherche, avec une gouvernance plus intégrée et une organisation interne progressivement adaptée. Celle-ci a été marquée par le développement progressif des structures de soutien à la recherche financées par le ministère chargé de la santé : délégations à la recherche clinique et à l'innovation, centres d'investigation clinique et centres de ressources biologiques. Au cours des dernières années, l'activité de recherche des CHU s'est développée, accompagnée par la mise en oeuvre du programme hospitalier de recherche clinique (PHRC) et la définition de stratégies de recherche des établissements. Des instances de coordination ont été créées au niveau local, sous la forme de comités de la recherche en matière biomédicale et de santé publique, et interrégional, avec les groupements interrégionaux de recherche clinique et d'innovation, mais la qualité des relations avec les partenaires - université, Inserm, CNRS - est inégale et dépend souvent de facteurs locaux.

L'augmentation des publications des CHU n'a cependant pas permis de maintenir le rang de la France en matière de recherche biomédicale, dans un contexte de dynamique importante de pays émergents : notre pays se situe désormais au cinquième rang concernant la part mondiale des publications à fort impact en biologie fondamentale et au huitième rang en recherche médicale. Avec une part qui progresse peu pour la recherche médicale depuis 2011, la France a été récemment doublée par les Pays-Bas et la Chine. Au niveau national, l'activité de recherche des CHU est de plus en plus concurrencée par d'autres établissements de santé : certains CHU ont une activité comparable ou moindre que celle des centres de lutte contre le cancer les plus importants, ou que certains centres hospitaliers ou certaines cliniques privées. On constate une baisse régulière de la part des CHU dans les scores Sigaps, à l'exception de l'AP-HP, qui en représente à elle seule 31,1 %, et des Hospices civils de Lyon. L'activité de recherche des CHU implantés dans les métropoles les plus importantes - Lyon, Marseille, Lille, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nantes - apparaît prédominante. C'est également le cas dans la réussite au PHRC : l'AP-HP obtient plus de 29 % des financements, tandis qu'un groupe de neuf CHU en obtient ensemble 33 %.

Concernant la formation des médecins, l'évolution des études, caractérisée par la généralisation de l'internat et le renforcement de la dimension pratique des apprentissages, confère aux CHU un rôle central. En 2016-2017, hors effectifs de la première année, 144 389 étudiants étaient inscrits en médecine et odontologie, tous niveaux confondus, soit 8,9 % du total des étudiants des universités. L'accès au cursus médical et le niveau de réussite aux examens nationaux, comme la répartition des personnels hospitalo-universitaires, restent toutefois marqués par de fortes inégalités. En 2013, pour une moyenne nationale de 19,7 places de numerus clausus pour 100 000 habitants, les chances d'accès aux études médicales étaient plus fortes en région Limousin - 31,1 places pour 100 000 habitants - qu'en Corse, où ce ratio était de 10,7, en Bretagne, où il était de 15,6, ou en région Centre, avec 18,5. Ces inégalités n'ont pas été supprimées par la hausse générale du numerus clausus entre 2004 et 2013. Le niveau d'encadrement par des enseignants en santé des étudiants entrés dans le cursus médical est hétérogène selon les sites.

En 2015-2016, un poste d'enseignant (titulaires et non-titulaires confondus) correspondait à moins de six étudiants à l'université Paris 5 Descartes, mais à plus de quinze à l'université Lille 2. Un taux d'encadrement défavorable ne permet pas de proposer aux étudiants l'accès à l'ensemble des enseignements de spécialité, ce qui pose la question de l'homogénéité des formations médicales sur le territoire national. Seules deux universités - Paris 5 Descartes et Paris 6 Pierre-et-Marie-Curie - disposent de PU-PH et de MCU-PH dans la quasi-totalité des disciplines. En revanche, de nombreuses universités en région, à Amiens, Caen, Rouen, Brest ou Nantes par exemple, ne disposent pas de postes hospitalo-universitaires titulaires, et notamment de MCU-PH, dans toutes les spécialités.

Ces disparités ne font pas l'objet d'actions correctrices fortes de la part des pouvoirs publics. Elles affectent les CHU tant en raison de leur rôle de référence dans la formation pratique des étudiants que de la proximité entre les activités de soins, de formation et de recherche. Ainsi, un niveau d'encadrement défavorable des étudiants réduit le temps disponible pour la recherche et diminue les capacités d'accompagnement des activités de soin des étudiants par les personnels hospitalo-universitaires.

La relation entre niveau d'encadrement et réussite aux épreuves classantes nationales (ECN) n'est cependant pas automatique. En 2015-2016, l'université de Nice a fait accéder 12,3 % de ses étudiants dans les 500 premiers aux ECN, soit le même taux que l'université Pierre-et-Marie-Curie, avec un ratio d'encadrement de 10,6 contre 7,5 pour Paris 6. Les étudiants des universités de Grenoble, Aix-Marseille, Montpellier et Nice obtiennent des niveaux de réussite supérieurs à ceux de certaines universités - Paris 7, Paris 12, Paris 13, notamment - qui bénéficient d'un niveau d'encadrement pourtant supérieur.

Dans un contexte d'augmentation de la demande de formation liée au relèvement du numerus clausus, ces déséquilibres conduisent à associer davantage d'acteurs non hospitalo-universitaires à l'exercice de la mission de formation.

Le deuxième chapitre identifie les fragilités du système. Le cloisonnement et l'érosion des concours alloués à la recherche, intrinsèquement liés à la nature des crédits qui lui sont affectés, la nécessité de partager la formation avec d'autres établissements du territoire et les signes perceptibles d'une perte d'attractivité du statut de PU-PH en sont les composantes principales.

L'organisation et le financement de la recherche sont trop cloisonnés. Au niveau national, la double tutelle du domaine hospitalo-universitaire, assurée par les ministères chargés respectivement de la santé et de l'enseignement supérieur et de la recherche, est marquée par un manque de coopération entre les administrations centrales concernées, même si la situation s'est récemment améliorée. Plusieurs éléments illustrent les difficultés de pilotage général de la recherche en santé : l'absence de vision consolidée de l'ensemble des moyens qui lui sont consacrés, la faiblesse du financement de la recherche translationnelle malgré les financements du programme d'investissements d'avenir (PIA), le caractère fragmenté et mal évalué du PHRC, enfin l'échec du plan de programmation de la recherche en santé, lancé sur l'initiative du Président de la République lors de la célébration du cinquantième anniversaire de l'Inserm.

Ensuite, les recettes Merri sont un modèle à réformer. En 1995, à la suite du rapport sur la réforme du financement des hôpitaux, le ministère de la santé a retenu un taux forfaitaire de 13 % pour les CHU, représentant la sous-productivité liée à l'exercice des missions d'enseignement et de recherche. Cela représente pour les CHU 1,74 milliard d'euros à la veille de la réforme de 2004. La mise en oeuvre de la T2A en 2004 dans le cadre de la réforme du financement des établissements de santé a imposé la création de recettes spécifiques pour couvrir ces surcoûts, les Merri.

Quatre réformes ont affecté le périmètre de ces recettes depuis 2011 : la publication d'un référentiel des actes innovants hors nomenclature (RIHN), la nette revalorisation du financement lié aux activités de formation initiale, en particulier la rémunération des internes, la fusion de la part fixe et de la part modulable qui s'est achevée en 2016, enfin la sortie des Migac des produits de santé sous autorisation temporaire d'utilisation (ATU).

L'agrégat Merri est très hétérogène dans ses composantes, ce qui le rend peu lisible. Il est de plus en plus déterminé par des scores de publications, d'essais et d'enseignement, à hauteur de 1,573 milliard d'euros en 2016, soit 45 % de son montant total. Les deux tiers de ce montant sont calculés par les seuls scores Sigaps et Sigrec relatifs à la recherche.

Ce mode de financement présente de nombreux inconvénients. L'élargissement progressif du nombre de bénéficiaires des recettes Merri - 40 établissements en plus des 30 CHU - entraîne une dispersion des crédits et une érosion régulière du financement des CHU pour leur mission de recherche. Par ailleurs, les crédits Merri sont répartis à partir de critères d'activité alors qu'ils sont censés compenser des surcoûts, ce qui provoque de l'incompréhension chez les chercheurs. Les pouvoirs publics peinent à tirer toutes les conséquences de la jurisprudence française et européenne qui impose une égalité de traitement de l'ensemble des établissements de santé, quelle que soit leur nature juridique. Elle pose également la question du principe même d'indicateurs d'activité de recherche comme fondement d'une méthodologie pour estimer des surcoûts ou des pertes d'exploitation liées à la recherche.

En 2010, les pouvoirs publics ont créé un nouveau mode d'organisation de la recherche biomédicale, l'IHU, et de le financer par le PIA. Les six IHU créés représentent des outils très intéressants de dynamisation de la recherche biomédicale et de transfert pour l'amélioration des soins. Les ressources qui leur ont été affectées ont permis de moderniser les plates-formes technologiques et d'augmenter les moyens de recherche, notamment par le recrutement international. Cependant, la création de structures juridiques autonomes a induit une complexité de gouvernance et les difficultés ne sont pas encore levées. Plusieurs questions restent à traiter, sur le plan des relations entre les IHU et leurs membres fondateurs, sur le modèle économique et sur la pérennisation des emplois. En outre, le modèle de fondation n'a pas atteint ses objectifs d'équilibre économique.

Ces difficultés incitent désormais à la prudence quant aux modalités de création de nouveaux instituts. En tout état de cause, le modèle spécifique des IHU ne peut avoir qu'une portée limitée et ne peut pas être considéré comme le futur mode d'organisation de l'ensemble des CHU. En 2014, le lancement de l'appel à projets de recherche hospitalo-universitaire (RHU), financé également par le PIA, a traduit un réel effort de décloisonnement et a été accueilli très favorablement par l'ensemble des partenaires. C'est ce type d'appels à projets qu'il serait souhaitable de privilégier à l'avenir.

La place des CHU dans la formation médicale pratique reste prédominante, mais s'est réduite au cours des dernières années. Deux évolutions se sont conjuguées : la poussée de la démographie étudiante induite par le relèvement historique du numerus clausus, et la prise en compte renforcée de la diversité des modes d'exercice professionnel dans la conception des apprentissages. Le système de formation médicale initiale est ainsi appelé à former de plus en plus de médecins pour un exercice de moins en moins hospitalier. Ces évolutions, à la fois subies et inscrites dans les stratégies nationales de santé, ont eu pour effet de diffuser largement les lieux de stage en dehors des seuls établissements hospitalo-universitaires et d'associer davantage les praticiens de santé non hospitalo-universitaires à l'encadrement des étudiants.

Le statut des personnels hospitalo-universitaires suscite des interrogations. Depuis 1958, le choix de la carrière hospitalo-universitaire par les éléments les plus prometteurs de leur génération a contribué significativement à l'accroissement de la qualité des soins, à l'excellence de la recherche et à la diffusion de la formation. Cependant, les souplesses ouvertes par le statut ne suffisent plus à masquer les difficultés d'exercice professionnel de ces personnels, les plus jeunes hésitant désormais à s'engager dans cette carrière. Au niveau individuel, l'exercice à haut niveau des trois missions est aujourd'hui présenté comme illusoire, la réalité pratique étant souvent celle d'une bispécialisation, voire d'une monospécialisation. Certains hospitalo-universitaires publient peu, voire pas du tout, et sont de fait des cliniciens enseignants, quand d'autres ne font que de la recherche et quasiment plus de soins ni d'enseignement. Certains professeurs de médecine ont pu faire état de séquences successives au cours de leur carrière : d'abord chercheurs, puis plutôt enseignants et cliniciens.

Au-delà des trois missions inscrites dans la loi, deux catégories d'activité se sont ajoutées au fil du temps. Le management des services ou des pôles, ou des fonctions de représentation au sein de l'établissement ou de l'université, et des activités annexes comme l'expertise auprès d'institutions publiques ou la participation à des groupes de travail réunissant différents acteurs du champ de la santé.

Cette hétérogénéité des pratiques offre une souplesse qui est appréciée par les personnels hospitalo-universitaires. Elle met cependant les établissements hospitaliers dans l'incapacité de quantifier le temps médical affecté à chacune des missions, à établir leurs coûts analytiques et à rapprocher de ces coûts les recettes Merri. Or, la nécessité juridique de connaître les coûts de la recherche et de l'enseignement, notamment au regard du droit communautaire, implique une meilleure connaissance de la répartition effective du temps médical hospitalo-universitaire. Enfin l'exercice professionnel des personnels hospitalo-universitaires apparaît peu évalué alors que les textes en vigueur le prévoient et que tous les enseignants-chercheurs sont soumis à un processus d'évaluation.

Même si l'administration fait valoir que les recrutements se font normalement au regard du nombre de postes à pourvoir, de nombreuses personnalités consultées lors de l'enquête ont exprimé leur crainte d'une perte d'attractivité du statut des personnels hospitalo-universitaires, qui reste difficilement mesurable. Des difficultés de recrutement semblent apparaître dans certaines spécialités et certains établissements, notamment dans les plus petits CHU. Les candidats aux fonctions hospitalo-universitaires perçoivent une dégradation des conditions d'exercice dans les CHU, tenant aux difficultés hospitalières, aux tensions financières et sociales, à l'accès plus difficile aux équipements de pointe - ce qui est un paradoxe - aux postes vacants, à la lourdeur de la gestion, au poids croissant des tâches administratives dans un contexte de financement à l'activité et d'exigences accrues de performance. Attirer les plus hauts potentiels implique désormais d'adapter la pratique de la triple mission.

De façon générale, la répartition des personnels hospitalo-universitaires est très inégale, avec une forte différence entre la région parisienne et la province, ou entre les spécialités médicales. La nomination des PU-PH suit une logique de reproduction à l'identique et intègre peu de rééquilibrage ou de vision prospective sur l'évolution des spécialités, alors que la médecine connaît une accélération du progrès. De même, la fixation du numerus clausus n'est pas suffisamment fondée sur des analyses prospectives : elle prend plus en compte les capacités d'accueil des universités que les besoins des territoires.

Notre troisième chapitre est plus prospectif. Depuis soixante ans, le modèle des CHU a montré son efficacité, mais son organisation actuelle doit impérativement évoluer pour répondre aux nouveaux enjeux de la recherche et de la formation médicales.

La particularité du système français est de confier aux CHU des missions de soins de haut niveau mais aussi de proximité. Les comparaisons internationales montrent qu'à l'étranger les CHU sont moins nombreux et n'ont pas systématiquement une fonction de soins de proximité, comme c'est le cas en France. Le partage des missions avec les autres établissements de santé apparaît plus précisément défini, notamment pour la formation pratique. Ainsi aux États-Unis, on dénombre environ un hôpital universitaire pour douze hôpitaux d'apprentissage. De manière similaire, les hôpitaux universitaires allemands signent des conventions avec des hôpitaux d'apprentissage qui accueillent les étudiants au cours de l'année d'études réservée à la réalisation d'un stage pratique en établissement de santé. Leurs modes de gouvernance sont divers, pouvant aller, notamment dans le champ de la recherche, jusqu'à une gouvernance purement universitaire. Le financement de la compensation des surcoûts liés à l'exercice de ces missions est supporté en général par des crédits ministériels, alors qu'il est pris en charge par l'assurance maladie chez nous.

L'évolution du positionnement des CHU doit répondre à des logiques différentes, mais complémentaires, entre le domaine de la formation et celui de la recherche. En matière de recherche biomédicale, l'organisation des CHU doit évoluer afin de rester compétitive et visible sur le plan international. Elle doit faire face à trois enjeux majeurs : créer des pôles de recherche ayant une masse critique suffisante, s'ouvrir sur d'autres disciplines dont l'apport est essentiel dans les innovations médicales et améliorer la capacité d'inclusion de patients dans des essais cliniques.

En matière d'enseignement, même si les CHU disposent d'atouts importants, leur rôle prééminent dans la formation pratique s'est banalisé avec la diffusion des lieux de stage en dehors du cadre hospitalo-universitaire. Ce mouvement de diffusion en dehors du CHU est à la fois imposé par la poussée de la démographie étudiante et souhaitable pour permettre aux étudiants d'appréhender plus largement la diversité des modes d'exercice. Dans ce domaine, la Cour ne propose pas de remettre en cause la structuration actuelle des 30 CHU, dont l'existence est liée au conventionnement avec l'une des trente-quatre universités comprenant une faculté de médecine. Elle préconise, en revanche, de mieux associer les autres acteurs de la santé - médecins libéraux, centres hospitaliers, GHT - aux parcours de formation des étudiants dans un cadre piloté conjointement par l'université et le CHU.

Le rapport propose quatre orientations générales qui portent sur l'organisation et le financement de la recherche, le pilotage national des activités hospitalo-universitaires, la coordination locale des acteurs et la problématique spécifique des corps hospitalo-universitaires. Chaque orientation est déclinée en plusieurs recommandations, qui répondent aux constats de l'enquête.

La première orientation est de favoriser dans le domaine de la recherche l'émergence de 5 à 10 CHU disposant d'une visibilité internationale en leur confiant une responsabilité de tête de réseau et en concentrant les moyens de financement. Cette orientation ne doit pas conduire à réserver à ces CHU l'activité de recherche mais à en améliorer l'organisation entre les établissements. Pour ce faire, la Cour recommande d'accroître de manière significative la part des recettes Merri réservée au financement des appels à projets et des structures de recherche. Dans l'attente de cette réforme, il est nécessaire de modifier sans délai les modalités de répartition des recettes Merri en procédant à certains réglages.

La deuxième orientation est d'améliorer le pilotage national des activités hospitalo-universitaires. Sur le plan financier, il convient de consolider dans une annexe commune à la loi de finances et à la loi de financement de la sécurité sociale les crédits budgétaires, les dépenses fiscales et les emplois affectés à la recherche biomédicale et à la formation initiale des médecins. Sur le plan de la recherche, il faut rénover le PHRC en confiant la gestion des appels à projets à l'Agence nationale de la recherche (ANR) et intégrer un représentant des CHU au bureau exécutif de l'alliance Aviesan.

Sur le plan de la formation, il faut veiller à la prise en compte des données prospectives pour améliorer la régulation démographique et territoriale des professions de santé, organiser les parcours de formation à partir des CHU vers les autres établissements de santé et la médecine de ville afin de définir des parcours de formation cohérents avec les parcours de soins, et renforcer l'évaluation des formations médicales en étendant les évaluations du Haut Conseil d'évaluation de la recherche et de l'enseignement supérieur (HCERES) à la formation pratique des étudiants et des internes.

La troisième orientation est d'améliorer la coordination stratégique des acteurs au niveau régional et local. La qualité de la coordination entre les CHU et les universités, ainsi qu'avec les organismes de recherche, apparaît contrastée selon les sites. Les nouvelles responsabilités des présidents d'université, ainsi que la part croissante des autres disciplines dans la recherche médicale, incitent à un renforcement des relations entre le président de l'université et les dirigeants du CHU, au-delà du lien traditionnel avec le doyen de la faculté de médecine. L'amélioration de la coordination stratégique entre le CHU et l'université passe par la mise en place d'une instance commune de concertation et par la synchronisation des calendriers de leurs contrats pluriannuels.

Parallèlement, la définition au niveau régional d'un cadre de coordination des actions menées dans le domaine de la recherche associant notamment les CHU, les universités, les organismes nationaux de recherche, l'agence régionale de santé (ARS) et les collectivités territoriales permettrait d'améliorer les grands choix stratégiques, notamment en matière d'investissement.

La quatrième orientation porte sur la gestion des corps hospitalo-universitaires. Des ajustements doivent être recherchés pour garantir l'adaptation du statut à la réalité d'aujourd'hui, avec une extension continue à des missions supplémentaires, alors même que l'exercice simultané à un haut niveau des trois premières - soins, enseignement, recherche -apparaît de plus en plus difficile.

La Cour recommande que les obligations de service des personnels hospitalo-universitaires soient définies et mises en oeuvre dans un cadre contractuel, afin de prendre en compte la diversité des missions. Sur cette base, une évaluation systématique de leurs activités, y compris managériales, doit être mise en place.

Ces constats, orientations et recommandations que la Cour est amenée à soumettre à votre commission devront être complétés par la deuxième phase des travaux consacrée au rôle des CHU dans l'organisation du système de soins.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Merci pour ce rapport de qualité. Nous attendons le second volet avec impatience ! Avez-vous étudié la part des cofinancements privés dans les programmes de recherche ? L'idée d'un fort élargissement du numerus clausus est dans l'air ; mais avons-nous une capacité suffisante de formation ? Quelle est la marge de manoeuvre ? Dans les Pays de la Loire, nous commençons à mettre en place des maisons de santé pluridisciplinaires universitaires dont nous soutenons les programmes de recherche.

Debut de section - PermalienPhoto de Florence Lassarade

Merci pour cet exposé très clair. À quel moment des études le classement des étudiants survient-il ? L'autonomie des universités a-t-elle modifié l'évolution des CHU ?

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Amiel

Si l'on supprimait le numerus clausus, les CHU pourraient-ils absorber le flux ? Pourrait-on, conformément aux principes hippocratiques, permettre à de simples praticiens d'enseigner ?

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Arnell

Merci pour ce rapport de qualité. Avez-vous porté une attention particulière au CHU de Pointe-à-Pitre et à celui de la Martinique ? Ils connaissent des difficultés récurrentes, notamment financières. Le premier se spécialise dans l'insuffisance rénale et les greffes, le second dans les maladies cardio-vasculaires. La gestion du personnel soulève des difficultés également. Après quelques années, quel regard portez-vous sur la relation entre CHU et facultés de médecine ?

Debut de section - PermalienPhoto de Elisabeth Doineau

L'accès territorial ne doit pas concerner que les soins mais aussi la recherche. La mise en place de maisons et de pôles de santé nous donne l'occasion d'intéresser les professionnels de santé à la recherche de demain, notamment sur le sujet du vieillissement. Le numerus clausus a été fortement desserré depuis quelques années. C'est heureux, car les années où il était faible se refléteront dans la pyramide des âges de la profession pendant encore une dizaine d'années. Quelles sont les marges de manoeuvre pour l'augmenter encore, au vu des capacités de formation ? Les besoins des territoires sont importants et l'évolution des pratiques fait que, pour remplacer un médecin d'autrefois, il en faut deux ou trois d'aujourd'hui ! Le numerus clausus régional a-t-il été une bonne mesure ?

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Le tableau qui figure en page 78 du rapport donne quelques chiffres sur la part du financement privé de la recherche. Les appels à la générosité publique procurent 6 millions d'euros par an à la lutte contre le cancer et 25 millions d'euros au Généthon. La collecte de fonds privés était le but des fondations, et le projet économique des IHU. Nous sommes loin de l'équilibre initialement visé : l'essentiel du financement est toujours public.

Debut de section - Permalien
Michel Clément, conseiller maître

Ce tableau est estimatif, car il n'existe pas actuellement de recensement de l'ensemble des financements consacrés à la recherche médicale et à l'enseignement médical, compte tenu du fait que le pilotage incombe à deux ministères différents.

Du fait des difficultés rencontrées pour établir ce tableau, nous avons recommandé la création d'un document - un jaune budgétaire, par exemple - rassemblant les différents financements consacrés à la recherche médicale et à l'enseignement, annexé soit à la loi de finances, soit à la loi de financement de la sécurité sociale.

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Le fond de la problématique du numerus clausus ne peut pas être traité uniquement du point de vue des problématiques de l'enseignement supérieur et de la recherche, car elle est liée à l'évolution de l'ensemble du système de santé. Le graphique retraçant l'évolution du numerus clausus (p. 114 du rapport) révèle que les choix qui ont présidé à sa fixation ne sont pas empreints d'une forte dimension prospective. Puisqu'il faut dix ans pour former un médecin, les arbitrages ont été le plus souvent rendus en fonction des capacités disponibles des universités.

Nous relevons un problème d'encadrement - le nombre des personnels hospitalo-universitaires titulaires en médecine est resté stable alors que le numerus clausus a significativement augmenté -, avec des situations très inégalitaires d'un site à l'autre. Il est donc très important que les besoins soient appréhendés grâce à une connaissance fine du terrain et les ARS ont certainement un rôle à jouer dans ce domaine. Il faut prendre en compte les capacités de formation disponibles et intégrer la problématique des stages pratiques (articulation entre le CHU et la médecine de ville ou les centres hospitaliers). Notre marge de progression est très importante par rapport aux exemples américain ou allemand, où les hôpitaux d'apprentissage sont beaucoup plus nombreux que les hôpitaux de pointe en matière de recherche.

La conséquence logique est de se demander qui doit enseigner. À ce stade, nous ne voulons pas trancher la question de savoir s'il y a trop peu de postes de PU-PH ou de MCU-PH, tant que n'ont pas été abordées les problématiques d'organisation des soins. Quoi qu'il en soit, on ne peut que constater des faiblesses d'encadrement ; les fonctions de ces PU-PH étant très larges, ils n'exercent plus trois métiers, mais plutôt quatre ou cinq. Il convient de réfléchir aux conditions dans lesquelles cet enseignement pratique va pouvoir s'effectuer et, par conséquent, d'engager une réflexion de fond sur la manière d'optimiser cette formation dans l'intérêt des étudiants et de réduire ainsi les inégalités d'accès aux études de médecine.

Le cas d'Angers démontre l'intérêt d'intégrer un certain nombre de critères. Notre choix a été effectué en fonction d'une grille d'analyse permettant de prendre en compte des hôpitaux présentant une problématique d'environnement régional. Ce qui se fait dans le Grand Ouest est extrêmement intéressant de ce point de vue. Je précise que le tableau n° 9 concerne une sélection d'établissements, il n'est pas exhaustif.

Le CHU de Pointe-à-Pitre ne figure pas dans ce tableau, parce que les critères retenus pour constituer notre échantillon n'ont pas permis de le retenir. Ce CHU est le plus petit et rencontre des difficultés. Le sujet de la santé outre-mer a été traité dans un rapport public thématique rendu en juin 2014. Lorsque j'étais président de la troisième chambre de la Cour des comptes, j'ai été auditionné par la commission de la culture du Sénat sur la situation de l'université des Antilles et de la Guyane, notamment celle des facultés de médecine. Le présent rapport ne permet pas d'apporter une réponse aux questions posées, mais il est envisageable de se pencher sur la situation de ce CHU dans le cadre des contrôles organiques programmés par la Cour.

Pour revenir à la question de savoir qui doit enseigner, il faut considérer que, de plus en plus, l'enseignement pratique est dispensé en dehors des PU-PH et des MCU-PH. Cela implique des procédures de contrôle, la reconsidération de la problématique des parcours de formation, qui ne peut pas être laissée à la discrétion des ARS, mais doit être intégrée dans un réseau reliant la faculté de médecine, le CHU et les établissements situés dans son orbite. De ce point de vue, la structuration autour des GHT qui ont une fonction de formation devra être traitée. Nous devrions y être très attentifs lors de nos premiers contrôles des GHT.

Debut de section - Permalien
Michel Clément, conseiller maître

Les universités ont connu des réformes successives : l'autonomie financière - sujet sur lequel, à la demande du Sénat, la Cour a produit en 2015 un rapport établissant un bilan plutôt positif - et les fameux regroupements, notamment par le biais des initiatives d'excellence. Au passage, notre préconisation tendant à favoriser l'émergence de 5 à 10 grands CHU s'inscrit dans la logique des initiatives d'excellence : il s'agit non pas d'isoler certains CHU en leur donnant tous les moyens, mais au contraire de favoriser cette émergence dès lors que ces CHU sont des têtes de réseau et font travailler d'autres hôpitaux autour d'eux.

La Cour préconise également de renforcer les relations entre les CHU et les universités, puisque les facultés de médecine jouissent encore d'une certaine autonomie au sein des universités. Le rapport indique bien que la recherche clinique ou la recherche translationnelle doivent s'inspirer des modes d'action et d'évaluation de la recherche fondamentale (appels à projets, évaluation des laboratoires) à l'image de ce que font aujourd'hui l'INSERM ou le CNRS. Ce rapprochement doit être favorisé et accéléré.

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Une autre question portait sur le moment où intervient le classement. Les études de médecine sont très sélectives, dès la première année commune aux études de santé (PACES), mais le moment clé est le passage des ECN. Ce concours national est maintenant totalement numérisé, ce qui représente un grand succès du point de vue des progrès des systèmes d'information, tout en garantissant la confidentialité requise. Ce système contribue à établir une hiérarchie relativement stable entre les spécialités ; il est intrinsèquement lié au mode d'organisation des études médicales.

En ce qui concerne l'appropriation de la recherche par les territoires, elle est prise en compte par la recommandation n° 10 au sein de l'orientation n° 3 : « définir au niveau régional un cadre de coordination des actions menées dans le domaine de la recherche, associant notamment les CHU, les universités, les organismes nationaux de recherche, l'agence régionale de santé et les collectivités territoriales ». Cette problématique représente un enjeu très important : pour exister au niveau international, on ne peut pas créer partout des plates-formes lourdes et sophistiquées, qui ne peuvent être accueillies que dans un petit nombre d'établissements ; en revanche, l'essaimage, la coordination des actions, les problématiques d'essais cliniques nécessitent une logique de réseau, où le CHU joue un rôle d'animation par rapport aux autres établissements - même si cette logique est encore assez étrangère à la mentalité des établissements français.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadine Grelet-Certenais

Pour favoriser la cohérence des parcours de formation entre CHU et autres lieux de stage, vous préconisez, pour permettre aux étudiants d'appréhender plus largement la diversité des modes d'exercice, de renforcer les stages, notamment en médecine générale. Ces stages ne devraient-ils pas être effectués dès les premières années de formation ? En effet, plusieurs étudiants m'ont indiqué qu'ils ne connaissaient, en fin d'études, que la pratique hospitalière. Prévoir plus tôt des stages en médecine générale devrait contribuer à une meilleure connaissance de ce métier et à une meilleure appréhension de la spécificité de la profession de médecin généraliste en milieu rural.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

Concernant le lien entre vos travaux et la problématique des déserts médicaux, vous êtes au coeur du sujet lorsque vous écrivez qu'il faut « permettre aux étudiants d'appréhender plus largement la diversité des modes d'exercice ». Des stages sont prévus pendant les trois premières années, ensuite pendant l'internat. Je voudrais attirer votre attention sur les difficultés liées à la non-concordance des limites administratives et les zones d'influence des CHU. Certains territoires sont éloignés du CHU de leur circonscription administrative et les étudiants sont réticents à s'y rendre afin de suivre un stage pour des raisons de commodité évidentes ; en revanche, ces territoires sont parfois proches d'un CHU situé dans une autre circonscription administrative, mais ses étudiants ne peuvent pas y effectuer de stage parce que la loi l'interdirait. Avez-vous été sensibilisé à ce problème ? Faut-il qu'une modification législative intervienne ou suffirait-il de prendre une mesure réglementaire pour surmonter cet obstacle ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Chasseing

Le numerus clausus a été une très grosse erreur : nous avons vu arriver en France des médecins étrangers reçus avec une moyenne de 10, pendant que nos enfants étaient recalés avec parfois plus de 12 en PACES... D'après votre rapport, l'ancienne région Limousin paraît favorisée. Pourtant, nous sommes au bord de la catastrophe, parce que beaucoup de médecins, notamment en zone rurale, ont plus de 60 ans.

Pour moi, il faudrait un internat par faculté. Si le nombre d'étudiants pour 100 000 habitants est élevé à Limoges, beaucoup d'entre eux viennent d'autres régions et ne connaissent absolument pas le Limousin ; ils sont totalement hospitalo-centrés. Il faut absolument casser ce modèle et prévoir plus de places d'internes en médecine générale, les faire travailler dans les maisons de santé avec des maîtres de stage mieux considérés et revalorisés. Bref, il faudrait imaginer des stages équivalents à l'internat, avec un praticien maître de stage reconnu. Vous dites que « le mouvement de diffusion en dehors du CHU est à la fois imposé par la poussée de la démographie étudiante et souhaitable », mais pour l'instant il est très peu développé, en tout cas en Limousin.

Debut de section - PermalienPhoto de Nassimah Dindar

Votre rapport est très intéressant quant au constat d'un modèle qui s'essouffle et sur les réformes à engager. Vous reconnaissez la fragilité du statut des personnels hospitaliers, l'hétérogénéité des pratiques universitaires et des missions dévolues aux médecins selon les régions ou les CHU. Nous sommes tous à peu près d'accord sur le bien-fondé du choix pragmatique d'un bon partenariat entre le public et le privé.

Sur la base de quel constat estimez-vous que le modèle nouveau des IHU ne doit pas être pérennisé ?

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Il me semble également que vous n'associez pas assez le secteur privé, alors que des établissements hospitaliers privés sont très importants. Les GHT ont également négligé le privé. Je serais plutôt partisan d'un rapprochement, tant pour l'activité hospitalière que pour la formation, avec des centres d'enseignement très territorialisés, comme l'indiquait Mme Doineau.

En outre, vous préconisez l'émergence de 5 à 10 grands CHU, et de 6 IHU, c'est-à-dire même pas un par région... Politiquement, je ne vois pas comment les présidents des 13 régions pourraient l'accepter.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

L'un des points d'amélioration que vous proposez peut paraître marginal, mais je le crois important : il s'agit de la capacité d'inclusion des patients dans les essais cliniques. Trop souvent, en France, des molécules innovantes ne peuvent pas être mises à disposition par manque de recul sur les essais cliniques, alors qu'elles le sont dans d'autres pays.

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Une première série de questions a porté sur la problématique des études médicales. Monsieur le président, peut-être pourriez-vous, en fin d'année, passer commande d'un travail sur les études de santé envisagées globalement (médecine, odontologie, pharmacie et maïeutique) à la troisième chambre et à la sixième chambre ? Nous disposons désormais d'un recul suffisant sur la réforme du troisième cycle et sur les ECN pour le faire.

Nous avons envisagé les solutions alternatives aux ECN, même si ce n'était pas la cible de notre travail. L'adoption d'une logique régionale ne réglerait pas le problème. Les ECN permettent un classement, mais sans note à la clé. Il me semble stimulant, pour les étudiants, de savoir où ils se situent ; l'organisation des ECN permet des économies d'échelle ; enfin, le système est plus égalitaire. Toutefois, cette question pourrait faire l'objet d'un travail spécifique, si vous le demandiez.

En ce qui concerne l'articulation entre les territoires de santé et le découpage régional, il ne vous aura pas échappé que nous disposons de 30 CHU et de 2 CHR pour 13 régions. Certains CHU sont-ils condamnés ? Tout dépendra de la manière dont les GHT vont structurer demain le paysage hospitalier, en fonction des populations actuelles et de leurs flux. Évidemment, les GHT ne peuvent se fonder sur une problématique hospitalo-centrée : il faut intégrer la médecine de ville, les établissements privés à but non lucratif et les cliniques privées, qui sont souvent des établissements de pointe - sans parler des établissements de lutte contre le cancer, comme l'Institut Curie ou l'Institut Gustave Roussy. L'adoption de cette perspective globale relève de la responsabilité des ARS ; nous l'avions mis en évidence dans notre rapport thématique sur l'avenir de l'assurance maladie.

Cessons d'opposer médecine de ville et médecine hospitalière : elles s'entrecroisent, il est important que s'établisse une bonne articulation entre elles, car la médecine évolue très vite - c'est aussi un enjeu de formation continue. Il est logique que, dans sa formation pratique, le futur médecin passe un temps suffisant à l'hôpital pour connaître les techniques de pointe, mais on ne peut pas se limiter à cela. La solution trouvée paraît assez équilibrée, mais il faut la structurer en ayant à l'esprit que c'est la logique de parcours qui comptera demain, qu'il s'agisse des médecins ou des patients.

Concernant l'inclusion des patients dans les essais cliniques, le syndicat professionnel des entreprises du médicament -le Leem- a relevé une perte d'attractivité. Il faut noter que les contraintes sont de plus en plus fortes depuis une affaire célèbre à l'origine de difficultés sérieuses, mais la logique à l'oeuvre, en particulier dans les IHU, consiste à donner à un patient le maximum de chances d'accès à des thérapies innovantes. Il faut cependant pouvoir collecter toute l'information nécessaire sur les effets secondaires. Le plus souvent, sous la pression des associations de patients, mais aussi des laboratoires pharmaceutiques, on n'attend pas l'issue des essais et la pharmacovigilance n'évalue pas de manière suffisamment exhaustive l'ensemble des effets secondaires. Or cette démarche est absolument indispensable pour progresser, parce que chaque patient est un cas particulier. Cet enjeu dépasse le cadre de notre travail, mais il a été très présent dans notre réflexion.

La problématique des IHU est d'abord budgétaire. Le programme d'investissements d'avenir a des vertus, mais il est branché directement sur la dette publique : on pourrait dire que c'est de la dette publique affectée... Ces fonds doivent donc être distribués avec parcimonie et sélectivité et avoir un véritable effet de levier.

Pour nous, le modèle des IHU est intéressant, mais il n'a pas trouvé son point d'équilibre. Nous avons été très heureux de constater que le Gouvernement était revenu sur son arbitrage initial en passant de trois IHU à deux, et en augmentant corrélativement l'enveloppe de la RHU. Il nous semble que cette approche devrait avoir un effet d'entraînement plus fort. Quoi qu'il en soit, l'IHU n'est pas le modèle des CHU de demain.

Debut de section - Permalien
Michel Clément, conseiller maître

Les IHU sont des structures dotées de la personnalité juridique, avec une autonomie budgétaire et de gouvernance. Ils sont assez différents les uns des autres, en fonction de la présence de lits hospitaliers en leur sein. Les relations avec les CHU ne sont pas toujours très bonnes, car la création d'un IHU entraîne des phénomènes de démutualisation budgétaire. Dans un certain nombre de cas, ils ont permis à des équipes ayant déjà pignon sur rue d'obtenir des moyens supplémentaires, mais ce modèle n'est pas généralisable à l'ensemble des CHU.

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Pour préciser mon propos, la RHU regroupe les financements accordés dans le cadre d'appels à projets, conformément au modèle de la recherche au niveau mondial. L'écueil auquel se sont heurtés les PHRC et les crédits Merri est la mauvaise prise en compte des coûts de structure : nous formulons des recommandations précises pour faire évoluer l'enveloppe des crédits Merri pour intégrer cette dimension.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

La recherche sur appel à projets est très satisfaisante intellectuellement, administrativement et financièrement, mais beaucoup de chercheurs nous disent que les découvertes interviennent aléatoirement dans le cadre d'un développement, sans rapport avec l'objectif de départ. Faut-il s'entêter à procéder à des appels à projets sur des programmes très ciblés ? Comment développer la recherche sans savoir au départ ce que l'on va trouver ? Si tel était le cas, il n'y aurait plus besoin de chercher !

Debut de section - Permalien
Patrick Lefas, président de chambre maintenu à la Cour des comptes

Lors d'un contrôle, Serge Haroche, prix Nobel de physique, alors administrateur du Collège de France, me disait : « Le problème de la recherche, c'est qu'on n'a rien découvert de fondamental depuis cinquante ans. » Vous avez parfaitement raison, les découvertes se font au confluent des disciplines : de plus en plus, la médecine a besoin de compétences en informatique, en ingénierie, en biologie très poussée, etc. Il doit donc y avoir un continuum entre la recherche fondamentale, dans le cadre des unités mixtes de recherche (UMR), la recherche translationnelle, qui fait le lien entre la recherche clinique et la recherche fondamentale, et la recherche clinique elle-même.

Il est important que les laboratoires pharmaceutiques soient les seuls dépositaires de la force de recherche. Il faut que nous disposions d'une recherche publique très poussée. La Cour a toujours dit qu'il ne fallait pas lésiner sur les moyens et que l'objectif de 3 % du PIB consacrés à la recherche-développement impliquait des conséquences - pour le moment, nous sommes à un peu plus de 1 % seulement pour la recherche publique.

La commission autorise la publication de l'enquête ainsi que le compte rendu de la présente réunion en annexe à un rapport d'information de M. Alain Milon.

La réunion est levée à 12 heures.