Mes chers collègues, notre commission s'est saisie pour avis du projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.
En outre, elle s'est vu déléguer par la commission des lois l'examen au fond de l'article 3 de ce texte, relatif à la centralisation de fonds auprès du Trésor public. En plus de l'amendement FINC.1 que le rapporteur nous proposera dans quelques instants, huit amendements ont été déposés sur cet article.
Je remercie notre collègue Muriel Jourda, rapporteur sur ce texte au nom de la commission des lois, d'être présente parmi nous.
Les délais d'examen de ce projet de loi, qui comprend plusieurs mesures d'habilitation du Gouvernement à prendre des ordonnances, sont très resserrés : déposé le 7 mai, il a été adopté par l'Assemblée nationale le 15 mai, et nous l'examinerons en séance publique à compter du 26 mai.
Je salue nos collègues qui participent à cette réunion à distance : qu'ils n'hésitent surtout pas à prendre la parole !
Nous examinons ce matin le projet de loi relatif à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes, ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.
La commission des lois a délégué à notre commission l'examen au fond de l'article 3, qui vise à centraliser les trésoreries publiques.
Ce projet de loi comportait initialement quatre articles et trente-six demandes d'habilitation à légiférer par ordonnances, dans des domaines extrêmement variés : justice, droit du travail, gestion du personnel des armées, droit d'asile, compétences des fédérations sportives, indemnisation des victimes des essais nucléaires, fonctions confiées aux volontaires internationaux, conséquences de la fin de la période de transition avant le Brexit. Il s'agit donc d'un texte quelque peu fourre-tout, dont l'urgence serait nécessitée par la crise sanitaire.
À l'Assemblée nationale, le projet de loi est passé de quatre à trente et un articles. Pour une fois, cet accroissement va plutôt dans le bon sens, un certain nombre d'articles ayant consisté à inscrire dans la loi des mesures que le Gouvernement prévoyait d'adopter par voie d'ordonnance. Sans doute le Gouvernement avait-il vu trop large pour ses demandes d'habilitation ; j'y reviendrai en ce qui concerne l'article 3.
Avant d'en venir à cet article, j'aborderai rapidement les dispositions incluses dans le projet de loi, qui sans appeler d'opposition de principe, de propositions de modifications ou encore de remarques spécifiques de la part de notre commission, sont susceptibles d'entrer dans son champ de compétences.
Ainsi, l'article 2 ter, introduit par l'Assemblée nationale pour remplacer une habilitation initialement prévue à l'article 2, harmonise le traitement des demandes d'indemnisation des victimes des essais nucléaires en précisant l'interprétation de l'article 232 de la loi du 28 décembre 2018 de finances pour 2019. Il reprend une disposition adoptée par le Sénat en mars dernier, sur l'initiative du Gouvernement, lors de l'examen du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique (ASAP), afin de tirer les conséquences de deux décisions du Conseil d'État.
Par ailleurs, sur le modèle de la loi du 19 janvier 2019 habilitant le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures de préparation au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne pour anticiper une éventuelle sortie non négociée, l'article 4 sollicite du Parlement une habilitation à légiférer par ordonnances pour répondre aux risques juridiques qu'entraînerait une absence d'accord sur le terme des relations futures entre le Royaume-Uni et l'Union européenne. Dans le domaine économique et financier, il s'agit notamment de sécuriser les conditions d'exécution des contrats d'assurance conclus par des ressortissants français auprès d'entités britanniques et d'introduire des règles adaptées pour la gestion des placements collectifs et des plans d'épargne en actions. Ces mesures n'appellent pas de remarques particulières de ma part.
En revanche, je formulerai un certain nombre d'observations sur l'article 3, dont l'examen au fond nous est délégué.
Cet article habilite le Gouvernement à prendre par ordonnances, dans un délai de douze mois, les mesures relevant du domaine de la loi destinées à prescrire le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique, ainsi que des organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public.
L'Agence France Trésor (AFT) est chargée d'assurer la gestion au quotidien de la trésorerie de l'État, qui englobe l'activité des correspondants du Trésor, c'est-à-dire de tous les organismes tenus de déposer leurs fonds auprès de l'État.
Certains de ces organismes sont visés par l'article 1er du décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique : l'État, les établissements publics de santé et certaines personnes morales de droit public, ainsi que certaines personnes morales de droit privé, selon leurs statuts. Par ailleurs, l'article 26 de la LOLF impose aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics de déposer leurs fonds auprès du Trésor, sous réserve de dispositions expresses d'une loi de finances - quelques dérogations peuvent s'appliquer, s'agissant notamment des libéralités ou des produits de cessions d'éléments de patrimoine, mais aussi d'emprunts dont l'emploi est différé et de recettes dites exceptionnelles. Enfin, des conventions de coopération monétaire ont été conclues entre la France et les pays membres de la Zone franc, prévoyant le dépôt par les banques centrales de cette zone d'une partie de leurs réserves de change auprès du Trésor.
Le Trésor réalise aujourd'hui la synthèse de 5 548 comptes d'opérations, avec environ 100 000 opérations exécutées chaque jour. Les dépôts des correspondants du Trésor ont atteint 128,4 milliards d'euros au 31 décembre 2019 ; ils ont quasiment doublé en quinze ans. Il est très difficile pour l'AFT de prévoir la tendance et le volume de variation des dépôts au cours de l'année, les organismes dépositaires bénéficiant d'une large autonomie de gestion.
Je rappelle, pour dissiper l'inquiétude de plusieurs de nos collègues, que la centralisation des dépôts des organismes soumis aux règles de la comptabilité publique ne revient en aucun cas, pour l'État, à s'approprier les dépôts des correspondants du Trésor : l'État joue en quelque sorte le rôle d'un teneur de compte, à l'image d'une banque pour un particulier. Les correspondants sont libres de leurs opérations, y compris de retrait ; leur seule obligation est de prévenir l'AFT la veille de toute opération monétaire dont le montant dépasse 1 million d'euros.
Par ailleurs, l'obligation de centralisation connaît plusieurs aménagements : les organismes qui y sont soumis peuvent demander une dérogation s'ils ont des besoins financiers et bancaires spécifiques et s'ils requièrent des services que ni le Trésor ni la direction générale des finances publiques (DGFiP) ne peuvent fournir. D'autres organismes ont été autorisés, par une disposition législative ou règlementaire, à déroger à l'obligation de dépôt des fonds auprès du Trésor.
En outre, l'article 5 du décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique exclut formellement l'Institut de France, certaines académies, les autorités publiques indépendantes, les chambres de métiers et de l'artisanat, les chambres de commerce et d'industrie, la Monnaie de Paris et la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) : tous ces organismes ne sont pas tenus de déposer leurs comptes auprès du Trésor.
Principe ancien, la centralisation des trésoreries publiques est obligatoire pour les entités soumises aux règles de la comptabilité publique. Elle présente des avantages indéniables, notamment celui de diminuer le volume des emprunts émis par l'État pour couvrir ses besoins de financement, avec une incidence positive sur le coût du financement, particulièrement utile en ce moment. Cette année, de fait, le besoin de financement de l'État devrait s'élever à 324,6 milliards d'euros - je le précise notamment pour Philippe Dallier, qui s'interrogeait récemment sur ce montant. Mais ce dernier peut encore augmenter...
Concrètement, l'AFT devrait emprunter cette année environ 245 milliards d'euros à moyen et long terme. La variation nette de l'encours des titres d'État à court terme devrait, selon les prévisions de la deuxième loi de finances rectificative, atteindre 64,1 milliards d'euros, contre 10 milliards d'euros prévus en loi de finances initiale, soit une augmentation tout à fait inédite. L'agence a dû rehausser ses appels de fonds au marché : elle a multiplié par deux la taille des émissions des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF) - nous empruntons chaque semaine entre 9 et 10 milliards d'euros - et augmenté de moitié ses émissions d'obligations assimilables du Trésor (OAT) - nous empruntons de l'ordre de 10 à 11 milliards d'euros tous les quinze jours.
La centralisation des fonds auprès du Trésor assure également aux correspondants la sécurité de leurs dépôts. Sauf exception, ces dépôts ne sont toutefois pas rémunérés. Dans le contexte actuel, ces conditions peuvent s'avérer tout de même avantageuses, le marché pouvant proposer des taux négatifs.
Je ne suis donc pas opposé au principe de la centralisation des trésoreries publiques. En revanche, je suis beaucoup plus dubitatif devant la méthode employée par le Gouvernement avec l'introduction de ce dispositif dans le projet de loi. Nous avons du mal à obtenir des réponses précises et publiques, ce qui peut laisser soupçonner des intentions cachées.
Tout d'abord, le champ de l'habilitation est particulièrement large, puisqu'elle vise tous les organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public. Or le Gouvernement n'est pas en mesure de citer ne serait-ce qu'un seul organisme qu'il souhaite voir contraint, dans un délai proche, à centraliser sa trésorerie. Nous aimerions savoir exactement qui est visé. Le manque actuel de précision ne peut que susciter des interrogations et des réticences.
Le Gouvernement, sur la défensive, a dû démentir vouloir inclure dans le champ de l'habilitation de structures telles que les fédérations sportives et les organismes gérant des régimes de retraite, ou encore les ordres professionnels et les organismes gérant des fonds pour le compte de tiers. La liste des exemptions est donc longue, mais non exhaustive. Par ailleurs, l'Assemblée nationale a explicitement exclu les organismes gérant un régime de retraite.
Il n'est pas davantage possible de savoir dans quelle mesure une ordonnance devra effectivement être prise, dans la mesure où le principe de centralisation de la trésorerie revêt de manière générale un caractère règlementaire. Par ailleurs, la centralisation n'est pas un principe nouveau: entre 2011 et 2019, près de 14 milliards d'euros ont été rapatriés auprès du Trésor. Le processus de centralisation s'est donc poursuivi à un rythme soutenu ces dernières années, sans qu'une loi d'habilitation soit nécessaire.
Enfin, il me semble prématuré d'inscrire cette demande d'habilitation dans le présent projet de loi. S'agit-il vraiment d'une urgence liée à la crise sanitaire ? Le Gouvernement doit aussi mener avec les organismes concernés des concertations indispensables, qu'il n'est pas même certain qu'il ait commencées. D'autres textes pourraient prochainement accueillir cette disposition, qui ne me paraît pas présenter un caractère d'urgence tel qu'il faille l'inscrire dans celui-ci, avec un champ d'application aussi large.
L'intégration de ce dispositif dans le projet de loi pourrait être purement opportuniste, le Gouvernement s'offrant une faculté avant d'envisager ce qu'il en fera. Enfin, améliorer la gestion de la trésorerie de l'État est un objectif que l'on peut comprendre, mais le chiffre de 10 milliards d'euros de rapatriements, avancé par le Gouvernement, doit être pris avec précaution ; il me paraît difficile d'estimer ce montant si les organismes visés ne sont pas connus...
Sans être hostile, je le répète, au principe de la centralisation, mais compte tenu de ce flou et de la méthode employée par le Gouvernement, je propose à la commission de supprimer l'article 3 du projet de loi.
D'autres amendements ont été déposés, visant, pour les uns, à supprimer l'article et, pour les autres, à exclure du dispositif certains organismes ; tous seront satisfaits par l'adoption de l'amendement que je présente.
Ce texte n'étant pas un projet de loi de finances, je vous rappelle que l'adoption de mon amendement de suppression entraînera la disparition de l'article 3 du texte porté en séance publique ; nous pourrons néanmoins interroger le Gouvernement sur les questions qui se posent, en espérant obtenir quelques réponses...
Je me félicite de pouvoir recueillir l'avis de la commission des finances sur un certain nombre de sujets que la commission des lois doit traiter, sujets d'ailleurs extrêmement divers - d'aucuns parlent du projet de loi « gloubi-boulga »...
La commission des lois devant se réunir demain matin, je ne saurais vous en dire davantage sur sa position. À titre personnel, je partage l'approche qui vient d'être présentée : il n'y a pas d'opposition de principe quant aux dispositifs, mais une demande d'habilitation doit être précise. Je proposerai à la commission des lois de traiter de la même façon les habilitations lorsqu'elles paraissent trop générales ou que nous n'arrivons pas à savoir ce que souhaite véritablement le Gouvernement - à charge pour lui de bien vouloir le préciser.
J'ai moi aussi déposé un amendement de suppression de l'article 3 ; il sera naturellement satisfait si celui du rapporteur est adopté.
L'urgence sanitaire ne doit pas servir de prétexte commode pour retirer des compétences au Parlement dans tous les domaines. En l'occurrence, j'ai contacté un certain nombre d'organismes publics : pas un seul n'est demandeur d'un transfert de ses comptes au Trésor... Par ailleurs, pourquoi le Gouvernement n'agit-il pas par décret ? Tout cela n'est pas clair.
Bien sûr, le Gouvernement a exclu un certain nombre d'organismes - on avait un temps imaginé qu'il voulait faire main basse sur les matelas financiers des ordres professionnels... Reste que la mesure ne paraît pas présenter un intérêt majeur pour les organismes demandeurs. Je soutiens donc sans réserve la position du rapporteur.
La loi de finances initiale prévoyait 38 milliards d'euros d'intérêts versés aux marchés financiers au titre de 2020. Est-il d'ores et déjà possible, compte tenu de toutes les inconnues, d'estimer l'évolution de ce volume d'intérêts ?
La meilleure solution me paraît être la suppression de l'article 3 - au moins pour tenter de faire sortir le Gouvernement du bois. Je ne crois pas un seul instant qu'il n'ait pas déjà en tête une idée précise de la liste des organismes concernés... Seulement, n'ayant informé personne, il a jugé préférable de ne rien dire à l'Assemblée nationale, ce qui est tout de même assez étonnant.
Je souhaite obtenir une précision en ce qui concerne les bailleurs sociaux. Les offices publics ont déjà leur compte au Trésor, mais pas les entreprises sociales pour l'habitat : pourraient-elles être concernées par ce dispositif ? Vu l'ambiance dans le secteur du logement social, si on les oblige à déposer leurs fonds auprès du Trésor...
Si nous supprimons l'article, le Gouvernement sera bien obligé de déposer ou de faire déposer un amendement pour le rétablir. Nous pourrons alors lui poser toutes nos questions.
Mon groupe n'est pas opposé au principe de la centralisation, mais nous nous interrogeons sur la nécessité de recourir à des ordonnances, surtout dans une période où nous avons le sentiment que la place du Parlement n'est pas exactement ce qu'elle devrait être. Au surplus, le lien avec la crise en cours ne paraît pas évident. Le Parlement devrait avoir son mot à dire sur le périmètre d'application de cette disposition, ce qui n'est pas le cas. Pour toutes ces raisons, nous sommes favorables à la suppression de l'article 3, qui ne présente aucun avantage financier compte tenu des taux auxquels l'État emprunte aujourd'hui.
Combien d'organismes pourraient être concernés par ce dispositif et quelles sont les masses financières en jeu ?
Je ne peux pas répondre aux différents orateurs qui m'interrogent sur le périmètre des organismes visés, car le Gouvernement lui-même est incapable de nous donner les réponses. Compte tenu du nombre important d'organismes de droit privé remplissant une mission de service public, ce périmètre est potentiellement très large. Si nous n'avons pas d'opposition de principe, nous souhaitons clarifier le champ de l'habilitation et son caractère d'urgence. Comme l'a dit Roger Karoutchi, la crise sanitaire ne doit pas être un prétexte pour déroger à certaines règles, la centralisation ne se fera pas sans concertation. Il faudra que le Gouvernement sorte du bois.
Pour répondre à Éric Bocquet, la charge de la dette s'élèvera cette année à 36 milliards d'euros, deux milliards d'euros ayant été annulés dans la deuxième loi de finances rectificative. Malgré ce besoin de financement considérable, le coût de la dette ne devrait pas varier sensiblement cette année du fait du niveau très bas des taux d'emprunt, de la maturité de la dette française et de la politique d'injection massive de liquidités menée par la Banque centrale européenne (BCE). En revanche, la question se posera à moyen terme.
EXAMEN DE L'ARTICLE
Article 3 (délégué)
L'amendement FINC.1 ( COM-74) et les amendements identiques COM-1 rectifié, COM-5 rectifié bis et COM-7 sont adoptés.
En conséquence, les amendements COM-36, COM-16 rectifié, COM-12, COM-14 et COM-11 tombent.
La commission proposera à la commission des lois de supprimer l'article 3.
Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :
TABLEAU DES SORTS
Nous en venons maintenant aux amendements de séance déposés sur les articles 23 à 30, qui nous ont été délégués au fond par la commission des lois, de la proposition de loi relative aux Français établis hors de France.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 23
L'amendement n° 25 vise à supprimer l'article 23 afin de ne pas faciliter les exonérations fiscales sur les plus-values réalisées lors de la vente de la résidence principale. Il s'agit d'un amendement de principe, ses signataires étant par principe hostiles aux exonérations sur les plus-values, pour les Français de l'étranger comme pour les non-résidents.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 25.
Article 27
La transformation de l'impôt sur la fortune (ISF) en impôt sur la fortune immobilière (IFI) crée des effets de bord. Les redevables sont contraints, même pour leurs participations très minoritaires, de se rapprocher de l'ensemble des sociétés et fonds dans lesquels ils ont investi pour évaluer la composante immobilière de leur patrimoine. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté un dispositif, que l'amendement n° 26 vise à supprimer, permettant d'exclure de l'assiette de l'IFI les participations des non-résidents inférieures à 1 %.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 26.
Article 28
L'amendement n° 15 vise à restreindre le champ du dégrèvement de majoration de taxe d'habitation sur les résidences secondaires prévu à l'article 28 en le réservant aux seuls Français de l'étranger établis dans une zone considérée comme « peu sûre ».
Si l'on peut souscrire aux intentions des signataires du présent amendement, il paraît difficile de définir le champ d'application d'une telle mesure. L'Italie était-elle une zone peu sûre au début de la crise du Covid-19 ? Les États-Unis sont-ils aujourd'hui une zone peu sûre ? La liste des pays considérés comme « à risque » évolue au cours de l'année, il est donc en pratique difficile de limiter le dispositif aux seuls non-résidents en provenance de pays dont la liste est arrêtée avant le 31 décembre de chaque année.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 15.
Articles additionnels après l'article 29
L'amendement n° 17 a pour objet d'octroyer aux contribuables scolarisant leurs enfants dans un établissement français de l'étranger une réduction d'impôt à hauteur des frais de scolarité engagés. Or, tel qu'il est rédigé, le dispositif octroie cette réduction d'impôt à tous les contribuables, les Français de l'étranger comme les résidents français. Ainsi, un Français résidant en France et scolarisant ses enfants au lycée français de Londres ou de Washington pourrait en bénéficier. Par ailleurs, le coût d'une telle mesure n'est pas évalué.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 17 et, à défaut, y sera défavorable.
L'amendement n° 18 vise à permettre aux affiliés de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le revenu à hauteur des cotisations afférentes aux assurances de base proposées par la Caisse des Français de l'étranger. Une telle mesure créerait une rupture d'égalité avec nos compatriotes résidant sur le territoire national. J'émets donc un avis défavorable.
Nos compatriotes résidant sur le territoire national bénéficient pour la plupart du régime de sécurité sociale.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 18.
L'arrêt « Schumacker » de la Cour de justice de l'Union européenne impose une réciprocité des réductions et crédits d'impôt au sein de l'Union européenne.
L'amendement n° 31 rectifié vise à étendre le statut de non-résident « Schumacker » aux personnes résidant dans un État tiers n'appartenant pas à l'Union européenne, quelle que soit la convention fiscale que nous avons contractée avec cet État. Le principe de réciprocité ne serait dès lors plus garanti.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 31 rectifié.
L'amendement n° 16 vise à étendre le mécanisme de la décote applicable au titre de l'impôt sur le revenu aux non-résidents. Un amendement similaire avait été déposé lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2020. Toutefois, l'article 29 de la proposition de loi supprime la réforme de la retenue à la source spécifique sur les revenus de source française des non-résidents. Cela conduit à revenir sur le passage au prélèvement à la source des non-résidents et donc à l'harmonisation des conditions d'imposition des non-résidents et des résidents, ce qui pouvait justifier qu'on réfléchisse à étendre aux non-résidents des dispositifs comme celui de la décote. Dès lors, cet amendement n'a plus lieu d'être.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 16 et, à défaut, y sera défavorable.
Articles additionnels après l'article 30
L'amendement n° 32 vise à permettre à tous les contribuables non-résidents de déduire les pensions alimentaires même s'ils n'ont pas opté pour le taux moyen. Le taux minimum étant déjà avantageux, il ne paraît pas opportun d'octroyer un avantage supplémentaire aux contribuables qui en bénéficient déjà.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 32 et, à défaut, y sera défavorable.
L'amendement n° 33 vise à permettre à tous les contribuables non-résidents de déduire les prestations compensatoires, faisant suite à un divorce, et l'amendement de repli n° 34 a pour objet de permettre une telle déduction aux seuls contribuables ayant opté pour le taux moyen, comme pour les pensions alimentaires.
La commission demande le retrait de l'amendement n° 33 et, à défaut, y sera défavorable.
La commission s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 34.
Articles additionnels avant l'article 31
Le droit au compte bénéficie à tous, y compris aux Français résidant à l'étranger. Les banques disposent, dans certaines situations très spécifiques, d'un pouvoir de résiliation unilatéral du compte ouvert après exercice du droit au compte : il s'agit en particulier des cas de soupçons d'activités illégales au regard de la lutte contre le blanchiment. L'amendement n° 24 vise à permettre à un Français résidant à l'étranger et s'étant vu notifier une résiliation unilatérale par sa banque d'être, dès la notification, à nouveau éligible au droit au compte. Au regard de la règlementation relative à la lutte contre le blanchiment d'argent, je ne peux pas émettre un avis favorable sur cet amendement. Il s'agit toutefois d'un sujet majeur et je sais que la Banque de France y travaille.
Nous disposons de tous les moyens nécessaires pour détecter les flux financiers illicites. Je trouve donc étonnant qu'on nous oppose l'argument de lutte contre le blanchiment. Il faudrait interroger le Gouvernement sur la motivation de ce refus.
La commission demande l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 24.
L'amendement n° 8 a pour objet d'empêcher tout établissement de crédit de résilier unilatéralement le compte d'un Français résidant à l'étranger. Une telle disposition entraverait la lutte contre le blanchiment et la responsabilité des banques peut être engagée lorsqu'elle ne respecte pas ses obligations de vigilance. Il en va de même pour les amendements n° 9 et n° 10, qui prévoient un dispositif légèrement différent puisque la résiliation unilatérale d'un compte par un établissement de crédit ne pourrait intervenir, sauf accord du titulaire, qu'une fois un nouvel établissement désigné par la Banque de France au titre du droit au compte.
La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 8, ainsi qu'aux amendements n° 9 et 10.
L'amendement n° 11 prévoit de porter de deux à quatre mois le délai de préavis qu'une banque doit respecter avant de clore un compte d'un Français non-résident de sa propre initiative, tandis que l'amendement de repli n° 12 ne vise que les « petits comptes ». Encore faut-il définir ce qu'est un « petit compte » !
La commission demande l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 11 et s'en remet à la sagesse du Sénat sur l'amendement n° 12.
Je regrette que les amendements visant à ouvrir une réduction d'impôt sur le revenu au titre des frais de scolarité ou de protection sociale aient été rejetés alors que nous avons adopté un article qui étend le dégrèvement de majoration de taxe d'habitation sur les résidences secondaires en zones tendues aux résidences détenues par des Français résidant à l'étranger. C'est pour cette raison que nous avions proposé un amendement visant à fixer la liste des pays concernés par un décret pris chaque année.
Comme le montre le rapport de Jérôme Bascher, il est difficile d'appréhender la fiscalité des Français de l'étranger dans son ensemble. Il y a un vrai problème sur la réforme de l'impôt sur le revenu qui a été engagée et qui a d'ailleurs été reportée.
Nous tenons, pour notre part, à prendre en compte l'ensemble des frais, notamment pour les Français modestes. La surtaxe sur les résidences secondaires ne concernant que les plus aisés d'entre eux, il nous semble préférable de préserver la fiscalité locale dans la mesure où aucune compensation de l'État n'est prévue pour les collectivités locales dans la proposition de loi. Nous aurons le débat en séance.
TABLEAU DES AVIS
La réunion est close à 15 h 30.