La mission commune débat des orientations et des conclusions de son rapport.
Nous allons examiner le projet de plan pour le rapport de notre mission commune d'information. Dans notre esprit, ce rapport doit apporter une aide concrète à nos collègues élus amenés à prendre pour le traitement des déchets - domaine technique s'il en est - des décisions qui engagent financièrement leurs collectivités sur le long terme : j'espère que nous parviendrons à un document consensuel et pratique, qui éclairera leurs décisions !
Le document s'ouvrira en rappelant son périmètre volontairement restreint aux modes de traitement des déchets ménagers. La réduction de la production de déchets, par le tri, le recyclage, la responsabilité élargie des producteurs (REP) et l'éco-conception ne feront pas l'objet de développements approfondis.
La première partie sera consacrée à un état des lieux. Nous y rappellerons les objectifs ambitieux tant de la directive-cadre de 2008 sur les déchets que du Grenelle de l'environnement et nous y préciserons les particularités françaises, en particulier l'importance du stockage et les contraintes qui pèsent sur les collectivités locales obligées de renouveler le parc déjà ancien de leurs équipements, ce qui nécessite des investissements lourds.
Un état des lieux s'impose, compte tenu des nouvelles normes nées des Grenelle 1 et 2. Dans l'avant-propos, j'inverserais volontiers l'ordre des techniques de réduction des déchets, soit REP, éco-conception, tri, réemploi et « valorisation », plutôt que recyclage.
Le terme de recyclage est en usage pour les financements, plutôt que celui de valorisation. Les deux termes sont complémentaires.
Disons que le réemploi vient avant la valorisation matière, dont le recyclage.
La valorisation énergétique vient en fin de vie du produit, puisque celui-ci est brûlé, alors que le recyclage lui donne une seconde vie. Par l'incinération, on récupère l'énergie produite par l'élimination des produits.
Je ne suis pas tout à fait d'accord. La valorisation énergétique a toute sa place, elle valorise véritablement le produit : voyez les combustibles solides de récupération. Quant à la terminologie, le mieux serait de se régler sur la directive-cadre.
Le Grenelle de l'environnement est précis sur la chaîne valorisation des matières (réemploi, recyclage), puis valorisation énergétique.
Le Grenelle est très ambitieux pour la valorisation matière, avec, par exemple, l'objectif de recycler 80 % des emballages...
Oui, mais les emballages ne représentent qu'une petite partie des déchets.
C'est également mon sentiment : le document devrait présenter la composition de la poubelle moyenne française, avec la part des fermentescibles, des emballages, etc. pour établir les enjeux de la valorisation. Il faut aussi se régler sur la directive-cadre, qui présente le traitement des déchets par rubriques, en mentionnant la valorisation et l'éco-conception. Notre document doit être didactique, le bilan doit permettre à chacun de savoir où il en est, quelles sont les techniques possibles, avec quels avantages et quels inconvénients et pour quel coût, compte tenu des normes actuelles.
Il faudrait saisir l'occasion de ce rapport pour tordre le cou à quelques élucubrations, comme la redevance incitative, qui est parfaitement inapplicable, ou encore l'obligation faite aux grandes surfaces d'installer un conteneur à emballages, issue d'un amendement adopté au Sénat et qui se traduira par une perte de recettes pour les collectivités locales...
Un amendement voté contre l'avis du rapporteur, et je regrette que vous ne m'ayez pas apporté votre soutien en séance, mon cher collègue ! L'Assemblée nationale en a réduit la portée, en portant le seuil de l'obligation aux seules surfaces commerciales d'au moins 2 500 mètres carrés.
Au catalogue des mauvaises idées, il y a aussi la collecte séparée de la fraction fermentescible...
Cette collecte séparée peut être une réussite, comme nous l'avons vu avec le syndicat Centre-Hérault. Notre rôle est de rapporter les expériences réussies, de dire dans quelles conditions elles se sont déroulées, en toute neutralité, afin que chacun décide pour sa commune ou son groupement de communes, avec la meilleure information possible. Le traitement des déchets forme une chaîne de la valorisation à l'enfouissement.
Notre rôle est effectivement celui de conseiller les élus, chacun restant libre de choisir la voie qu'il préfère, selon le contexte local et ses engagements ou ses convictions. Les personnes motivées pour telle ou telle technique peuvent aller plus loin, si elles le souhaitent.
Notre état des lieux doit être neutre et didactique, nous devons indiquer quelles sont les contraintes propres à chaque technique et prévenir, en particulier, les élus des risques qui pèsent sur la commercialisation des produits. Nous devons dire à nos collègues élus ce que nous avons vu et leur donner l'information la plus complète et la plus claire possible, sans, bien sûr, empiéter sur le principe de libre administration des collectivités locales.
Par exemple, de grandes incertitudes entourent le compost issu du tri mécano-biologique, pour lequel les normes pourraient devenir plus sévères, et que l'ADEME ne veut pas subventionner.
Je me demande si le titre proposé pour l'état des lieux, « Les collectivités locales sous pression », est bienvenu : il donne le sentiment qu'elles seraient le dos au mur, alors qu'elles sont généralement très volontaires et très engagées pour le traitement des déchets.
Les collectivités locales sont sous pression en ce sens qu'elles ne savent pas si les techniques sont pérennes ou non, alors que les investissements qu'elles doivent réaliser les engagent pour plusieurs décennies.
Je crois indispensable de tenir compte, non seulement de la réglementation européenne, mais aussi de la réglementation française. Or, le code des douanes ne reconnaît que trois techniques pour le traitement des déchets : l'incinération, le bioréacteur et le centre d'enfouissement technique. Le compostage et la méthanisation apparaissent dans notre pré-rapport, mais ils ne figurent pas dans le code des douanes, qui est le document juridique de référence pour les déchets ménagers. Il faudrait à tout le moins faire sa place au bioréacteur, qui ne se confond pas avec la méthanisation, contrairement à ce que croit le ministère !
Le code des douanes reconnaît trois techniques, qui entrent dans l'assiette de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), mais nous devons aller bien au-delà dans notre rapport, en mentionnant les diverses techniques qui sont utilisées en France.
Ou bien il faudra aussi modifier la législation. Mais ce qui compte aujourd'hui, c'est de ne plus confondre le bioréacteur et la méthanisation : ce n'est pas du tout la même chose !
Je ne crois pas que nous devions rédiger une proposition de loi, mais j'espère que notre rapport pourra ensuite inspirer d'autres textes qui traiteront peu ou prou des déchets ou de l'environnement, comme cela fut le cas avec le rapport sur la crise du logement que j'ai cosigné avec Thierry Repentin.
Les techniques sont diverses, qu'il s'agisse du bioréacteur ou de la méthanisation ; ce qui compte, c'est de faire passer un message : il ne doit plus y avoir de stockage sans production d'énergie, par exemple sous la forme de biogaz qui est ensuite transformé en électricité, ou bien utilisé directement.
Je le dis depuis des années : le bioréacteur n'a rien à voir avec le stockage ni avec la méthanisation. L'ADEME distingue parfaitement les choses, en donnant une définition par type d'acte. Les définitions de l'Agence ont été validées par le ministère, et il n'y a aucune raison d'entretenir la confusion, qui est permanente, à tous les niveaux !
Le code des douanes définit en fait l'assiette de la TGAP et c'est pourquoi il ne mentionne que les trois techniques taxées ; son objectif n'est pas qualitatif.
Nous ne traitons pas de la fiscalité des déchets, mais des différents modes de traitement. Peut-être pourrait-on faire figurer le bioréacteur et la méthanisation dans un chapitre sur la production de biogaz ?
Ce n'est pas satisfaisant, les techniques sont trop différentes : j'espère vous en convaincre lorsque, prochainement, vous visiterez notre bioréacteur tarnais !
Le bioréacteur aura sa place. Reste à savoir dans quelle catégorie le ranger : celle du stockage, avec récupération ?
Il s'agit, si j'ai bien compris, de produire du gaz à partir des fermentescibles restés avec les autres résidus. Le méthane ainsi produit peut servir à la production d'électricité, ou être employé tel quel.
La définition de l'ADEME est très précise, elle convient tout à fait, elle a été approuvée par les opérateurs comme Veolia et la Sita, et j'espère que notre rapport la reprendra, pour mettre fin à une confusion qui n'a que trop duré et que le ministère entretient : mon vote sur ce rapport en dépendra !
Nous avons largement commenté l'état des lieux, passons à la deuxième partie, sur les modes de traitement.
Consacrée aux modes de traitement, la deuxième partie commence par la présentation du compostage et invite à lever rapidement les incertitudes sur cette technique.
Nous présentons d'abord les avantages de la collecte séparée de la fraction fermentescible, en particulier la production d'un compost de bonne qualité, comme nous l'avons observé avec le syndicat Centre-Hérault ; nous présentons aussi les inconvénients, en particulier les faibles quantités collectées, la forte saisonnalité, l'inversion des flux avec les déchets verts et le surcoût lié à la collecte en porte-à-porte. De fait, les équipements réalisés, par exemple à Lorient, paraissent souvent surdimensionnés. En conclusion, la collecte des biodéchets est indispensable, mais on doit l'envisager auprès des gros producteurs, de cuisines collectives, notamment celles des écoles, davantage qu'auprès des particuliers, où une telle collecte semble trop coûteuse. A Lille, pourtant exemplaire sur ce chapitre, on a abandonné la collecte de biodéchets auprès des particuliers : en zone rurale, les particuliers compostent ou enfouissent eux-mêmes, tandis qu'en ville, la collecte est très difficile à cibler. Même à Stockholm, où la collecte est proposée partout, on nous a indiqué qu'elle nécessitait qu'on prenne rendez-vous, et qu'elle était en fait très rare. La question qui se pose à nous, dès lors, est de savoir si l'ADEME doit aider financièrement de telles collectes et dans quelles conditions.
Je ferai un premier commentaire sur l'entame de cette deuxième partie : je crois qu'il faudrait en changer l'ordre, en plaçant la méthanisation avant le compostage, et qu'il serait judicieux de trouver des sous-titres accrocheurs. Nous soulignons le surcoût de cette technique, les difficultés pratiques d'organisation de la collecte, la saisonnalité, le réglage subtil avec les déchets verts : dès lors, à quelles conditions le compostage est-il judicieux ? Il semble qu'il soit à recommander plutôt dans les agglomérations disposant de plusieurs gros équipements comme des cantines scolaires ou d'entreprises, prêtes à jouer le jeu, et qu'il suppose une forte implication pour la collecte en porte-à-porte.
Au syndicat Centre-Hérault, nous avons constaté que la collecte auprès des particuliers représentait effectivement une toute petite partie de l'ensemble collecté.
C'est vrai, et elle ne concernait de surcroît que certaines zones pavillonnaires de l'agglomération. De fait, en plus de devoir être acceptée par la population, une telle technique, pour fonctionner - car elle fonctionne, M. Muller nous l'a dit - suppose l'organisation d'une collecte sur les zones les plus propices à s'y intéresser, par exemple les zones pavillonnaires.
Au centre national du recyclage, on estime que 80 % des composteurs particuliers ne font pas un bon compost, au point que l'ADEME, on imagine à quel coût, a recruté des « maîtres composteurs » et autres ambassadeurs du tri pour expliquer aux particuliers comment faire...
Nous examinons ensuite, toujours dans la deuxième partie, le tri mécanico-biologique (TMB). Ici, les performances techniques s'améliorent et, par rapport au compost, la captation de matière organique est meilleure, elle présente une valeur agronomique supérieure, moins riche en azote comme en phosphore. Cependant, le TMB exige des installations coûteuses et les retours d'expériences sont encore en faible nombre.
Toujours sur le compostage, nous nous interrogeons ensuite sur le risque de durcissement des normes de qualité des composts : des professionnels de l'agroalimentaire imposent des normes « sans compost d'ordures ménagères » ; la réglementation nationale, la norme NFU, pourrait devenir plus stricte, ce qui est souhaitable pour la qualité des sols, et la réglementation européenne pourrait se durcir également et imposer une obligation de moyens, alors que la France est avec l'Espagne un des derniers pays européens à considérer comme un amendement organique un compost issu des OMR. Aussi, nous paraît-il souhaitable de prévoir une reconversion possible des équipements de TMB, comme cela se fait en Allemagne, avec les combustibles solides de récupération, ou encore, comme en Angleterre, avec la production de compost pour une valorisation sur des terres non agricoles.
il faut prévenir les élus de ce que le compostage donne peu de sorties monnayables, sinon, plus d'un risque de déchanter !
De fait, tout système devrait être évalué au préalable au regard des débouchés. Sur le TMB, je crois que le titre devrait être davantage centré sur les incertitudes de cette technique pour les élus.
Sans parler même de valorisation, il est déjà bon de pouvoir écouler le produit...
C'est, en effet, déjà beaucoup que de pouvoir s'en débarrasser pour rien.
Certains le mettent en décharge, mais nous savons tous que la norme va se durcir. Un compost à la norme sera d'autant plus facile à écouler.
Si les déchets toxiques sont collectés en amont, on obtient des produits à peu près équivalents à ce que l'on obtient avec la collecte séparée.
Ce n'est pas exactement ce que nous avons entendu au cours des auditions : tout dépend du produit entrant.
Il y a de bons composts issus des stations d'épuration. Le tri mécano-biologique permet de récupérer les produits recyclables, comme l'acier ou l'aluminium, qui ne méritent pas d'aller en bioréacteurs.
En ne conservant que ce qui reste, on accroît le taux de valorisation active.
L'espoir est que l'opération de tri puisse se faire plus en amont, sur les déchets ménagers, pour éliminer les toxiques mais nous en sommes encore loin.
L'intérêt du tri mécano-biologique, nous a dit une chercheuse de l'INRA, est qu'il permet d'éliminer la contamination des sols par les inertes - comme les plastiques ou le verre -, qui, à quinze ans, remontent en surface. C'est un point important à considérer quand on répand beaucoup de compost sur le terrain.
Le tri mécano-biologique a mauvaise presse parce que l'on a commencé, il y a dix ans, sur les ordures brutes. Les choses ont bien progressé depuis.
A Angers, Daniel Raoul a mis en place un système de collecte sélective poussée. Reste que si l'ADEME ne subventionne pas le tri mécano-biologique, c'est qu'elle estime que pèse encore sur lui une véritable incertitude.
Je vais assister à l'inauguration, cette semaine, d'un « bioréacteur stabilisateur » à Villers-la-Montagne. Il semble que soit utilisé, en amont, un système élaboré de tri mécano-biologique, avec une sorte de prémacération utilisant les bactéries et la chaleur. Je vous dirai ce qu'il en est.
Sans doute, mais leur prix de revient, hors collecte, est de 240 à 250 euros la tonne.
L'ADEME a édité une note très bien faite sur le tri mécano-biologique : c'est peut-être la première conséquence positive de notre travail.
Ce qui intéresse le contribuable, c'est ce que cela va coûter à la fin de chaque mois. On peut créer des synergies. C'est ce qui s'est fait, dans le Haut-Rhin, entre les deux villes de Thann et de Cerney, qui comptent respectivement 30.000 et 15.000 habitants. La collecte hebdomadaire des biodéchets permet de réduire celle des ordures ménagères résiduelles non triées. Cela fait baisser la facture et diminue de surcroît l'incinération : on est passé de 180 à 150 kilos d'ordures ménagères résiduelles par habitant et par an. Cela ne fonctionne, bien sûr, que si l'on facilite les choses pour les habitants, en mettant à leur disposition un bac plastique et des biosacs spécifiques. Et puis la redevance incitative vient comme la cerise sur le gâteau : si l'on trie bien, on paye moins cher.
Grâce à une telle approche intégrée, les Allemands ne produisent plus que 140 kilos d'ordures résiduelles par habitant et par an, et fabriquent de surcroît un compost très recherché des agriculteurs. Cela vaut la peine de les imiter.
Il est en effet important d'avoir un projet global : Mme Jouanno y a insisté, lorsque nous l'avons entendue en audition. Les habitants sont sensibles au coût global, collecte et traitement confondus. Il faut que la solution qui, au bout du compte, leur est offerte soit la plus écologique au moindre coût, et que la collecte reste pour eux confortable : sinon, cela ne marche pas.
Et si les gens sont motivés, on peut aller encore plus loin dans la collecte sélective.
Traitera-t-on, dans le rapport, de cette question des coûts, pour aider la décision des élus ?
On ne peut donner que des exemples : les coûts peuvent beaucoup varier d'une collectivité à l'autre.
L'ADEME doit pouvoir présenter aux élus, sur un secteur donné, les différentes solutions envisageables, avec des références de coût.
Passons à présent à la méthanisation, dont nous rappellerons qu'elle est apparue sur des déchets homogènes, les boues dans les années 1940, puis les effluents d'élevage et industriels dans les années 1970, avant de se développer sur les biodéchets, en Europe du Nord, la méthanisation sur ordures ménagères résiduelles après tri mécano-biologique restant d'apparition plus récente, en France et en Espagne. Il s'agit d'un processus théoriquement vertueux sur le plan environnemental, autorisant une double valorisation, énergétique et organique.
Elle reste aujourd'hui un choix par défaut, quand il n'est pas possible de créer des unités d'incinération ou de stockage.
La méthanisation n'est pas une méthode de traitement, mais de prétraitement. A Montpellier, en 2009, 9 % des ordures ménagères résiduelles qui entrent étaient valorisés sous forme de biogaz ou de compost, les objectifs pour 2011 étant fixés à 25 % : « on trie pour méthaniser, on méthanise pour trier. »
La méthanisation n'est pas une alternative à l'incinération ou au stockage et doit impérativement être couplée avec des exutoires finaux : c'est la différence entre Lille, où le procédé paraît vertueux, et Montpellier, où des problèmes sont apparus.
Il faudra rappeler que les coûts sont importants, pour des résultats aléatoires. Le surcoût par rapport au compostage est évalué entre 25 et 30 %, les installations sont complexes à gérer, les risques de panne sont à prendre en compte, de même que les nuisances : l'usine de Montpellier reste mal acceptée par la population.
La valorisation énergétique reste problématique : certaines unités consomment plus d'énergie qu'elles n'en produisent, en particulier en cas de surcapacité.
Pour ce qui concerne la valorisation organique, la méthanisation est plus coûteuse que le compostage et se heurte au problème de la saisonnalité. La question des déchets verts pose un problème supplémentaire.
Le rapport rappellera ce que sont les préalables à tout projet de méthanisation. Au stade de la conception, il faut prévoir un montage juridique liant intimement construction et exploitation : il faut éviter que les constructeurs se désintéressent de l'exploitation.
Il ne faut pas non plus que les élus se désintéressent de leurs équipements...
La collecte doit faire l'objet d'une évaluation réaliste. En ce qui concerne les débouchés, des discussions doivent être engagées avec le monde agricole pour le compost, tandis qu'il convient de s'assurer de l'existence, à proximité, de consommateurs pour le biogaz. L'installation, enfin, doit être intégrée dans une chaîne de traitement : on ne peut pas se lancer dans la méthanisation sans usine d'incinération, sauf à se condamner à faire voyager les résidus sur nos routes.
On l'a vu à Montpellier : pour quatre camions qui entrent, il en ressort trois pleins.
C'est la même chose à Lille. Les deux tiers doivent être incinérés : il faut deux équipements complémentaires.
Il fonctionne bien sur des produits organiques à flux continu et homogène - ceux de l'élevage ou de l'agro-alimentaire.
Le problème est que l'on a partout surestimé le tonnage entrant : toutes les usines fonctionnent en sous-capacité.
La méthanisation ne fait pas disparaître la matière. Elle valorise le biogaz. Il faut donc une autre technique pour traiter le reste.
Seules la France et l'Espagne autorisent le compostage sur zone agricole, mais les normes vont se durcir.
Si l'on collecte les déchets verts auprès des gros producteurs, on sort du tri mécano-biologique et on fait un compost valorisable, y compris pour l'agriculture biologique.
Pour valoriser et le biogaz et le compost, les produits entrants doivent être de bonne qualité et en quantité suffisante. Les usines existantes consomment plus d'énergie qu'elles n'en produisent, parce que l'on a surévalué la quantité de produits à l'entrée. En Europe, certains pays ont autorisé les collectivités locales à aller chercher des produits favorables à une bonne méthanisation, comme les boues des stations d'épuration, ce qui aide à améliorer le rendement. Si nous voulons faire de même, il faut donner à des exploitants privés une délégation de service public afin qu'ils aillent se procurer les tonnages nécessaires, car les collectivités locales n'ont que la compétence « ordures ménagères ». On a vu un exemple à Stockholm, où cela marche bien.
Passons maintenant à l'incinération. Nous avons là « un tabou à lever ». Pour certains responsables du CNIID, décider entre incinération et enfouissement, c'est devoir choisir entre la peste ou le choléra. Reste qu'aujourd'hui, l'incinération constitue un mode de traitement des déchets pertinent dans 80 % des cas. Avec un réseau de chaleur, il peut même devenir un mode de valorisation à 80 ou 90 %. Contrairement à l'idée reçue, c'est donc bien en plein centre-ville, couplé à un réseau de chaleur que l'incinérateur est utile. On l'a vu en Suède, à Vienne, à Monaco...
Des erreurs ont certes été commises, à Gilly-sur-Isère, par exemple, mais elles appartiennent au passé.
Il n'est pas inutile de recommander aux élus de contrôler, en particulier, les fumées.
Et de tout mettre en place pour une démocratie participative avec les associations environnementales.
Il faut une coaction : les élus n'ont pas la science infuse. Je reconnais - pour une fois - à Noël Mamère le mérite d'avoir eu la subtilité de faire vérifier les dioxines par le milieu associatif, en lui déléguant le budget correspondant : les associations ont ainsi une responsabilité dans la vérification...
On entend souvent dire que l'incinération nuit au recyclage : c'est faux. Les pays européens qui incinèrent le plus sont aussi ceux qui trient le plus. Ce qui compte, c'est d'éviter le surdimensionnement.
Le problème tient souvent au délai entre la phase de conception et la réalisation. J'ai vu le cas dans ma ville. Une capacité avait été retenue au moment de la conception, mais le tri s'est amélioré entre-temps, et elle s'est révélée excessive.
Aucune usine ne doit avoir une capacité supérieure à 60 % des déchets du bassin. Et l'on sait déjà que, dans cinq à six ans, on sera à 50 %. L'un des effets de la crise a été de réduire la production de déchets : dès lors que l'on consomme moins, on produit moins de déchets. La courbe de la croissance et celle de la production de déchets ménagers sont parfaitement corrélées.
Un mot sur la TGAP, à laquelle nous devrons consacrer une réunion spécifique : il faut demander un moratoire de l'augmentation.
D'autant que le système est injuste pour certaines collectivités locales.
Nous avions imaginé une TGAP incitative, liée au pourcentage de recyclage : c'est ce qui est prévu dans le Grenelle 2. Mais on s'aperçoit aujourd'hui que ce dispositif n'est pas idéal.
Il faut moduler la TGAP en fonction de l'éco-conception et de la valorisation de la matière.
En veillant à ce que le prélèvement sur les producteurs soit directement redistribué vers les collectivités locales. S'il transite sous forme de taxe par le budget de l'État, on sait bien ce qu'il en sera...
Je suis d'accord pour retenir le critère de valorisation de la matière, mais n'oublions pas la valorisation énergétique, qui est, elle aussi, incluse parmi les critères du Grenelle. Il est facile de traiter sans tenir compte de la valorisation énergétique. La difficulté à lever, pour une bonne valorisation, est celle du dimensionnement. Peut-être faut-il dire un mot, dans le rapport, de la limite géographique des plans départementaux. Mieux vaudrait raisonner en termes de bassins.
Le mâchefer est valorisable, de même que la fraction minérale, dans les centres de traitement des déchets ultimes, les CSDU.
Venons-en à la question du stockage, qui constitue un mode de traitement désormais contraint, puisque le droit communautaire et la législation nationale prévoient la diminution de la quantité de déchets enfouis. Grâce aux nouvelles normes, l'impact des centres d'enfouissement sur le milieu naturel reste limité, tandis que la technique présente des atouts en matière de captation du méthane et de séquestration du carbone. En ce qui concerne l'effet de serre, la supériorité de la méthanisation et du tri mécano-biologique sur le stockage n'est pas démontrée.
Il faut insister, enfin, sur le fait que les autres modes de traitement ne dispensent pas du stockage. Nous aurons besoin de nouveaux sites, sachant que tous les sites devront répondre aux nouvelles normes, depuis la récupération jusqu'à la couverture en passant par le traitement des lixiviats et la récupération des gaz.
D'accord sur la méthanisation, d'accord sur le stockage, mais reste la question des bioréacteurs, qui devrait, elle aussi, faire l'objet d'une entrée dans le rapport. Je vous ai tous invités à venir voir le fonctionnement du procédé dans mon département, non pas parce que je tiens à tout prix à vendre cette technique, mais afin que tout le monde comprenne qu'il s'agit là d'une troisième voie.
Le procédé, on le connaît. Il s'agit de réunir les ordures ménagères résiduelles, de fermer les alvéoles, de récupérer un peu de biogaz...
C'est un peu plus que cela. Venez donc voir. J'insiste. Nous sommes en phase d'orientation : je souhaite qu'une partie du rapport soit consacrée à cette technique.
Nous savons tous combien elle vous est chère. Pour nous, c'est simplement une forme améliorée de stockage.
C'est plus que cela. Les OMR sont reprises au terme de douze ans. Elles sont passées au tamis. On produit deux tiers de compost et un tiers de déchets ultimes. Je l'ai vu faire aux États-Unis, où la technique est utilisée depuis trente ans. Je sais bien qu'elle ne plaît pas à beaucoup de gens...
C'est que l'on sait bien qu'une bonne partie du biogaz part dans la nature.
Si c'est le cas, cela doit se sentir tout de suite : l'odeur du méthane est très caractéristique.
Venez voir, et vous constaterez que tel n'est pas le cas. Le siège de la société se trouve juste à côté de l'installation. Personne ne se plaint des odeurs.
Les centres techniques qui ne produisent pas d'électricité collectent le méthane et le brûlent.
Une technique comme la méthanisation exige de recourir à des opérateurs privés. Les bioréacteurs, au contraire, peuvent être gérés directement par les collectivités locales. L'autre avantage est que c'est une technique modeste, qui permet de changer son fusil d'épaule : les investissements n'ont rien à voir avec ceux qu'exige une usine de méthanisation, que l'on n'amortit qu'en 25 ans, ou un incinérateur, que l'on ne va pas changer au bout de trois ans.
Pourquoi vouloir en changer, si c'est une technique aussi excellente que vous le dites ?
Elle a, comme toute technique, ses inconvénients. Mais elle a l'avantage, encore une fois, d'être modeste, basique, donc facile d'utilisation. C'est pourquoi je comprends mal l'opposition que manifestent à son égard et le ministère et l'ADEME. Chicago l'utilise depuis 30 ans, Melbourne depuis 25 ans, et vous seriez étonnés de voir combien de gros opérateurs, en France, y ont recours.
Nous n'avons rien contre les installations modestes et qui fonctionnent bien. Nous avons encore le temps d'approfondir la question avant la remise du rapport, le 18 juin.