Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 28 février 2023 à 15h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Notre commission se saisit traditionnellement pour avis des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), au regard de leurs enjeux pour la trajectoire de nos finances publiques. Le projet de loi de financement rectificative déposé par le Gouvernement est cependant particulier, puisqu'il a pour objet quasi exclusif de mettre en oeuvre une réforme paramétrique de notre système de retraites. Aussi, il aura des incidences non seulement sur le régime général mais aussi sur les régimes de la fonction publique et sur les régimes spéciaux, sur lesquels notre collègue Sylvie Vermeillet rapporte chaque année au titre de la mission « Régimes sociaux et de retraite » et du compte d'affectation spéciale « Pensions ». Elle avait d'ailleurs, en juillet dernier, produit un rapport sur les régimes d'assurance vieillesse des agents de la régie autonome des transports parisiens et des marins.

Je lui laisse donc la parole pour nous présenter sa proposition d'avis sur la réforme présentée par le Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Le Gouvernement a présenté le 23 janvier dernier un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023, visant à mettre en oeuvre une réforme paramétrique du système de retraites.

La première partie prévoit notamment : la fermeture de cinq régimes spéciaux (RATP, industries électriques et gazières - IEG -, Conseil économique, social et environnemental, Banque de France et Clercs et employés de notaires) ; la création d'un index seniors destiné à objectiver leur place en entreprise ; la suppression du transfert à l'Urssaf du recouvrement des cotisations dues aux régimes complémentaires de l'Agirc-Arrco.

La deuxième partie prévoit : le recul progressif de l'âge légal de départ en retraite à 64 ans et l'accélération de l'augmentation de la durée d'assurance requise pour bénéficier d'une retraite à taux plein ; la révision du compte professionnel de prévention (C2P) ; la mise en place d'un Fonds d'Investissement dans la prévention de l'usure professionnelle ; la revalorisation des minima de pension pour atteindre 85 % du Smic net en cas de carrière complète ; la validation de trimestres pour certains stagiaires indemnisés par l'État ; la création d'une assurance vieillesse des aidants ; la généralisation des dispositifs de cumul emploi retraite et retraite progressive.

Faute d'avoir pu être examiné dans les délais, ce projet de loi n'a pas été adopté par l'Assemblée nationale et a été transmis au Sénat ce 18 février, en application de l'article 47-1 de la Constitution. Nous avons donc à nous prononcer sur un texte à peine modifié par rapport à sa version initiale.

Les dépenses de retraites se sont élevées en 2021 à 345,1 milliards d'euros et les recettes à 346 milliards dont 227 milliards de cotisations sociales et 46 milliards de sur-cotisations pour équilibrer les régimes des trois fonctions publiques.

Sur 1 000 euros de prélèvements obligatoires perçus par les administrations publiques en 2021, 248 sont affectés aux retraites, ce qui place la France en deuxième position dans le monde (après l'Italie) en part de dépenses publiques dans ce domaine.

Avec la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises (Pacte), la part du recours à la capitalisation est croissante : 280 milliards d'euros sont investis en épargne retraite en mars 2022.

Le Conseil d'orientation des retraites (COR), en appliquant la convention d'équilibre permanent des régimes, prévoit une dégradation substantielle du solde de notre système de retraite dans les dix prochaines années.

Le déséquilibre est d'abord démographique : 778 000 départs en retraite en 2021 pour 700 000 naissances. L'évolution de la population par génération est claire : pour espérer sauver un système par répartition, il faut encourager la natalité, à tout le moins, ne pas pénaliser financièrement les carrières des mères pour espérer remonter le taux de fécondité tombé à 1,8 ; commencer par créer des places de crèches et développer des systèmes d'accueil des enfants.

Le COR estime que le solde du système des retraites sera déficitaire dès cette année pour atteindre 13,5 milliards d'euros en 2030. Cette prévision est bien optimiste, car elle se fonde sur une hypothèse de croissance moyenne de 1 % et un taux de chômage de 4,5 % à long terme.

J'attire votre attention sur la progression étonnamment modérée des dépenses de retraites alors que le vieillissement de la population s'accentue. Ce phénomène s'explique par la baisse relative des pensions comparée à l'évolution de la rémunération des actifs. Les pensions sont indexées sur l'inflation qui est moins élevée que la progression des salaires.

Sans changement, on observera un décrochage du niveau de vie des retraités dans les prochaines décennies. La réduction, ces dernières années, du rendement technique du point Agirc-Arrco et le gel du point d'indice de la fonction publique ont amorcé cette baisse relative de niveau de vie. Le COR estime que si la pension représentait en moyenne 50,3 % des revenus d'activité en 2021, ce ratio chutera à 36,9 % d'ici 2070.

Côté ressources, trois facteurs conduisent à une diminution du taux de prélèvement : la diminution de la contribution de l'État compte tenu de la baisse de l'emploi public, une réduction de celle de la CNRACL, pour les mêmes raisons s'agissant des fonctions publiques territoriale et hospitalière, dont les agents contractuels plus nombreux cotisent à la CNAV ; et, enfin, le recul de la natalité et du chômage, qui affaiblit les contributions de la branche famille et de l'Unedic au système.

Concernant les mesures paramétriques de la réforme, le relèvement de l'âge de départ de 62 à 64 ans accélère un mouvement déjà constaté dans de nombreux régimes. S'ajoute une accélération de la mise en oeuvre de la réforme dite « Touraine » pour atteindre 43 annuités dès 2027. Pour les générations nées à partir de 1961, l'augmentation de la durée d'activité devrait engendrer une hausse de la pension servie.

En combinant ces mesures d'âge au relèvement du minimum contributif, le système devrait connaître, à partir de 2030, une majoration du montant de l'ensemble des pensions servies. Seules les personnes en situation de surcote dans le droit actuel verraient leurs pensions diminuer.

La prudence recommande la mise en oeuvre d'une clause de revoyure, car l'équilibre du système est fondé sur quelques paramètres conjoncturels qui, s'ils ne sont pas satisfaits, renouvelleront le besoin de financement.

Par ailleurs, avec une entrée en vigueur de la réforme dès le 1er septembre 2023, sans doute ne faut-il pas mésestimer les difficultés des entreprises ou des caisses de retraite pour l'appliquer techniquement tout d'abord, humainement ensuite.

Y a-t-il une alternative au scénario choisi ?

Une majoration de cotisation entraînerait bien sûr une baisse de pouvoir d'achat conséquente : 442 euros annuels en 2030 en moyenne par cotisant pour équilibrer le système.

Une baisse des pensions - 719 euros par an en moyenne par retraité en 2030 pour équilibrer le système - constituerait une rupture du pacte intergénérationnel, d'autant que les générations précédentes ont travaillé davantage : on estime que le surplus d'heures effectuées par les personnes nées en 1950 représente près d'une année et demie de cotisations supplémentaires par rapport aux personnes nées en 1980. De plus, au regard du financement de la dépendance de plus en plus coûteux, le niveau de vie des retraités est à protéger afin de préserver leurs capacités à honorer leur propre prise en charge.

La réforme fait le pari d'une progression de l'emploi des seniors. L'article 2 du projet de loi prévoit à cet effet la création d'un index senior, le taux d'emploi des 55-64 ans étant en France bien inférieur à la moyenne européenne. La sanction prévue de 1 % de la masse salariale vise la non publication de l'index et non l'absence de maintien dans l'emploi ou de recrutement des seniors. La mise en place d'un dispositif « Un senior, Une solution » sur le modèle de celui mis en place pour les jeunes, serait sans doute plus efficace. La commission des affaires sociales et son rapporteur, René-Paul Savary, feront sans doute des propositions sur le sujet.

Venons-en désormais à la question des réserves du système des retraites. Celles-ci s'établissaient à 180,4 milliards d'euros en 2021, dont 86,5 milliards détenus par l'Agirc-Arrco, laquelle devrait conforter ses ressources avec la réforme et sans doute réfléchir à leur utilisation.

Quand on entreprend une réforme, il faut s'interroger sur la pérennité du système qui en sort, et se prémunir pour l'avenir. Tel était l'objet du Fonds de réserve pour les retraites (FRR) créé en 2001 pour éviter les déficits que l'on constate aujourd'hui. Anticipant que la génération « papy-boom » serait surnuméraire donc coûteuse en pensions, le FRR devait mettre en réserve les cotisations vieillesse surnuméraires de l'époque ainsi que la soulte versée à l'État par les employeurs du régime spécial des IEG dans le cadre de l'adossement partiel au régime général. L'ambition était d'atteindre 150 milliards d'euros à l'origine, c'est précisément le montant du déficit cumulé auquel nous devons faire face dans les dix années à venir.

En 2011, cette trajectoire a été interrompue et la mission du FRR réorientée vers le financement de la dette sociale gérée par la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) : le FRR décaisse désormais chaque année 2,1 milliards d'euros pour la Cades, les sommes collectées jusqu'alors n'étant plus mises en réserve à compter du 1er janvier 2011. Le FRR n'est donc plus dédié à l'anticipation mais à la gestion d'une dette passée, agrégeant celles de la CNAV, du Fonds de solidarité vieillesse et de la CNRACL. Ces versements seront réduits à 1,45 milliards à partir de 2025. L'actif, de 26 milliards fin 2021, devrait disparaître d'ici 2033, sauf si une volonté se fait jour afin de redonner sa mission première au FRR et lui affecter tout ou partie des excédents induits par la réforme paramétrique, - pourquoi pas des cotisations de CSG supplémentaires ? - afin d'anticiper d'autres décrochages démographiques. Particulièrement bien géré, la performance annualisée du FRR s'élève à 4,7 % depuis 2010 : c'est un modèle.

Concernant les impacts de la réforme, nous ne disposons pas de son effet sur les comptes publics, ce qui parait pourtant indispensable.

Le Gouvernement estime que le coût des mesures d'accompagnement de la réforme devrait atteindre un montant total de 4,1 milliards en 2027 puis 5,9 milliards en 2030.

Le déficit prévisionnel ne sera que partiellement compensé en 2027 par les mesures paramétriques et les hausses de taux. À cette heure, le solde du système de retraites resterait négatif de 4,6 milliards à la fin du quinquennat. Il faudrait attendre 2030 pour parvenir à l'équilibre. Mais celui-ci est déjà fragilisé par les amendements déposés par le Gouvernement en première lecture à l'Assemblée nationale, qui, s'ils n'ont pas pu être examinés avant la transmission du texte au Sénat, ont vocation à être déposés de nouveau : élargissement du dispositif de départ anticipé pour les carrières longues aux cotisants ayant travaillé entre 20 et 21 ans ; plafonnement à 43 annuités pour les personnes ayant commencé à travailler avant 21 ans ; attribution de trois trimestres aux pompiers volontaires s'ils justifient de dix ans d'engagement...

Sans remettre en question la pertinence des amendements, je souligne que les mesures supplémentaires représentent 800 millions d'euros en 2030, dont 700 millions dédiés aux deux mesures visant les carrières longues. Dans ces conditions, l'équilibre ne serait pas atteint en 2030.

Concernant les régimes spéciaux, sur les 42 régimes de base ou intégrés, cinq sont appelés à disparaître car structurellement déficitaires ou équilibrés au moyen de financement définis par la loi. Pour mémoire, le budget de l'État finance 12 régimes à hauteur de 11,3 milliards d'euros via des taxes affectées ou des subventions d'équilibre. Or, la solidarité nationale ne peut financer des avantages spécifiques, elle doit compenser les déséquilibres démographiques seulement. Je note que les différents régimes qui perdurent tout en comportant des avantages spécifiques, s'autofinancent eux-mêmes, par exemple les avocats et toutes les professions libérales.

Comme les IEG, la Caisse de retraite et de prévoyance des clercs et employés de notaires (CRPCEN) ne peut justifier d'une situation excédentaire que par le reversement d'une taxe affectée qui représente 47,8 % des prestations versées. Le régime de la Banque de France peut sembler déroger à la logique puisqu'il ne bénéficie d'aucune subvention publique, mais il n'est à l'équilibre qu'au moyen d'une contribution employeur largement majorée : 473 millions d'euros en 2021. Le montant des cotisations stricto sensu a atteint en effet 36 millions d'euros en 2021 quand le montant des pensions servies s'est élevé à 508 millions d'euros. Les régimes devraient s'éteindre selon la « clause du grand-père », les affiliés actuels conservant l'ensemble de leurs droits à retraite ainsi que les dispositions des autres branches : maladie, maternité...

Il est indispensable qu'une convention avec la CNAV et les régimes complémentaires soit établie afin que ceux-ci, bénéficiant des cotisations des nouveaux entrants des régimes visés par la réforme, les reversent aux anciennes caisses pour subvenir aux pensions des anciens affiliés. Cette solution a été retenue pour faire face à la fermeture du régime SNCF en 2020 et je m'étonne qu'elle ne soit pas encore prévue. J'y serai vigilante.

Le relèvement d'âge d'ouverture des droits à 64 ans concerne également les fonctions publiques. La borne d'âge est relevée pour les catégories actives qui passeront à 59 ans et pour les catégories super actives à 54 ans. L'âge de départ à la retraite moyen des fonctionnaires civils était déjà de 63 ans et 8 mois en 2021. Sur demande du fonctionnaire, il sera possible de décaler de trois ans la limite d'âge du poste occupé : pourquoi pas 70 ans... Le dispositif de retraite progressive est transposé à la fonction publique.

En tout état de cause, la réforme devrait avoir pour effet mécanique une amélioration du solde du CAS « Pensions » de 0,7 milliard en 2027 puis 1,1 milliard en 2030. Avant réforme, le solde cumulé du CAS « Pensions » devait s'élever à 8,5 milliards d'euros en 2023. Cependant, cet excédent n'existe pas matériellement et je serais là encore favorable à la mise en place de véritables réserves, destinées à abonder le FRR.

Voici très synthétiquement les points que je souhaitais aborder, bien d'autres éléments pourraient compléter mon propos mais le temps m'est compté.

Je salue et remercie la commission des affaires sociales, en particulier sa présidente Catherine Deroche, la rapporteure générale Élisabeth Doineau et le rapporteur René-Paul Savary, pour le travail fructueux que nous avons mené ensemble, et les nombreuses auditions communes. Je souhaite que le Sénat s'illustre par la qualité de ses débats à l'occasion de l'examen de ce texte.

En dépit des doutes exprimés sur la validité du cadrage macro-économique et sous réserve de l'adoption des amendements déposés par la commission des affaires sociales, je donne un avis favorable sur un texte qui aurait pu, sans doute, être plus ambitieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Étant donné que nous aurons une dizaine de jours de débat en séance plénière, je vous propose que nous nous contentions ici de quelques questions utiles à notre information. Et je commencerai par celle-ci : avez-vous eu accès à l'avis du Conseil d'État sur ce texte, et si oui, que dit-il en substance ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Husson

Merci pour la qualité de ce rapport. Vous posez incidemment la question de la prévoyance et de la capitalisation, en particulier à travers le FRR, lequel n'entre pas dans le texte initial. Ne pensez-vous pas qu'il aurait fallu inclure ce sujet dans la réforme ? Vous parlez aussi de la démographie, et du rapport entre le nombre d'actifs et les pensions versées, vous soulignez les promesses qui ont été faites il y a 40 ans à ceux qui s'engageaient dans la vie professionnelle et qui, comme vous le dites, auront finalement travaillé plus que les cotisants actuels, mais à qui l'on va dire qu'on ne pourra pas leur verser les retraites auxquelles ils pensent avoir droit ; avez-vous des éléments plus précis sur cet aspect des choses, voire des propositions ? En avez-vous également pour consolider le dispositif qui sortira de la réforme, c'est-à-dire pour éviter que le déficit ne réapparaisse bientôt ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

L'avis du Conseil d'État n'a pas été rendu public, cependant je sais qu'il émet plusieurs réserves sur ce texte, en particulier sur l'index seniors et sur la prise en compte de la pénibilité.

Je n'ai pas d'éléments sur la capitalisation, hors ce constat que la loi Pacte a créé un appel d'air, le montant des contributions augmente.

J'ai interrogé Olivier Dussopt sur le devenir du FRR, il ne m'a pas semblé vouloir prolonger le fonds, alors que des cotisations supplémentaires vont abonder le système et pourraient être fléchées vers ce fonds - pourquoi pas la CSG -, pour éviter des déconvenues futures. Cependant, sur ce sujet, comme celui de la mise en place d'un régime par capitalisation, le PLFSSR ne me semble pas le bon véhicule législatif pour ce faire.

Enfin, la question se pose effectivement de l'après-2030 : le retour du déficit est possible du fait de la démographie et de la fin de l'effet comptable des mesures paramétriques contenues dans ce projet de loi de financement rectificative, c'est pourquoi je crois utile d'encourager la natalité, pour sauver le système par répartition. Je crains que si notre système n'était pas conforté, la capitalisation prendrait la suite.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Canevet

Merci pour ce rapport de grande qualité, il apporte des éclairages utiles pour aborder ce sujet important. Le FRR était une très bonne idée, mais il a été détourné de sa mission initiale. Pensez-vous qu'il puisse servir à nouveau pour financer l'équilibre de nos retraites ? Une question, ensuite, sur l'emploi des séniors : avez-vous une idée du coût des arrêts de travail intempestifs des séniors qui sont usés par le travail ? Ne pensez-vous pas qu'il serait utile de créer un dispositif spécifique pour ceux de nos concitoyens qui sont effectivement usés par le travail ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Merci pour ce travail d'investigation sur un sujet bien compliqué... Je m'interroge sur la situation patrimoniale du système des retraites, vous indiquez un patrimoine de 160 milliards d'euros pour les régimes complémentaires : de quoi s'agit-il, plus précisément ? Vous indiquez un volet retraite de la dette sociale de 43,2 milliards d'euros : quelle en est l'évolution prévisible ?

Enfin, sur les régimes spéciaux, nous constatons un mécontentement du monde cheminot, alors que le régime de la SNCF n'est pas concerné puisqu'il a déjà été réformé ; j'avoue ne pas bien comprendre... Et qu'en est-il des agriculteurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Je félicite à mon tour notre rapporteure, même si je ne suis pas d'accord avec cette affirmation que notre système de retraite « deviendrait » déficitaire cette année, comme s'il était à l'équilibre jusqu'ici : en réalité, il est déficitaire quand on prend en compte la surcotisation de l'État, qui correspond bien à un déficit. J'ai entendu le chiffre de 60 milliards d'euros de déficit effectif, le confirmez-vous ? Quand on parle de 14 % ou 16 % de PIB consacrés aux retraites, n'oublions pas que les deux points de différence représentent 50 milliards d'euros...

Enfin, Monsieur le président, lorsque la capitalisation est autorisée pour les fonctionnaires et les élus, je ne vois pas pourquoi en interdire l'accès au reste de la population. Savez-vous si les amendements sur ce sujet seront recevables au titre de l'article 40, sachant qu'ils n'entraineraient pas de dépense publique supplémentaire puisque les frais de gestion seraient pris en charge par les gestionnaires de ces fonds capitalisés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Je me permets de vous répondre tout de suite : ils ne passeraient sans doute pas les fourches caudines du périmètre de la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale et seraient donc déclarés irrecevables par la commission des affaires sociales.

Debut de section - PermalienPhoto de Rémi Féraud

Je remercie à mon tour notre rapporteure pour ce travail, qui met des chiffres sur une réforme paramétrique qui, en réalité, était contenue dans la loi de programmation des finances publiques et qui a le gros défaut de ne s'inscrire dans aucune réforme de société. Cette réforme vise seulement à faire face à un déficit qui apparaîtrait cette année, alors que le système était excédentaire jusqu'à l'an passé, et pour un montant prévu à 2030 qu'on pourrait compenser par d'autres moyens, c'est que nous proposerons.

Notre rapporteure propose un avis favorable, mais nous notons combien son avis est critique sur les régimes spéciaux, sur la clause dite de grand-père, sur l'absence de stratégie de réserve, sur la fragilité juridique de l'index séniors : cet avis favorable s'accompagne de bien des réserves !

Lorsque vous calculez le déficit public lié à la réforme, ne faut-il pas ajouter l'impact négatif de la réforme sur le régime d'assurance chômage et les minimas sociaux -avez-vous pu le chiffrer ? Ensuite, dès lors que des réserves importantes existent dans les régimes complémentaires, mais que ces régimes ne concernent pas les secteurs où il y a les besoins, un lien est-il envisageable, réaliste, pour mobiliser l'argent là où il est nécessaire ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sébastien Meurant

J'ai déjà posé la question au président du COR : quelles mesures ont-elles été prises après les constats, faits régulièrement dans des rapports, de fraudes à notre système de retraite, en particulier de citoyens étrangers qui résident surtout hors du territoire national ? J'ai aussi posé la question à notre président et à notre rapporteur général : quel suivi notre commission fait-elle de ces fraudes et des réponses qui leur sont faites ?

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Une question de vocable : on parle de réforme paramétrique, mais est-ce bien le cas quand on fait passer l'âge légal de 62 à 64 ans ? Les incidences en sont si importantes, que le terme de « paramétrique » paraît un peu étroit, pour le moins...

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Vermeillet

Le FRR dispose de 26 milliards d'euros, il abonde la Cades de 2,1 milliards par an, montant qui sera réduit à 1,45 milliard en 2025, et l'extinction du fonds est prévue pour 2033. Faut-il le prolonger ? Je pose la question dans mon rapport, la réponse dépend aussi des conséquences de cette réforme : va-t-elle produire des excédents ? La direction générale du Trésor dit oui, l'OFCE dit non - il faut compter aussi le fait, par exemple, que des cotisations chômage supplémentaires, vont devoir absorber du chômage supplémentaire par exemple des séniors.

Quel est le coût des arrêts de travail pour les séniors ? Dans les faits, les séniors sont moins en arrêt de travail que les salariés plus jeunes, je le montre dans mon rapport, mais les seniors sont davantage au chômage, et comme la réforme risque de se traduire par plus de chômage pour eux - comme cela s'est passé lors de la réforme de 2010 -, un dispositif particulier, comme « un sénior, une solution » pourrait se justifier, je crois savoir que la commission des affaires sociales nous le proposera. Cela dit, le FRR pourrait effectivement être abondé par d'autres voies, pour perdurer.

Les régimes complémentaires ont effectivement des réserves, en particulier Agirc-Arrco dispose de 86,5 milliards d'euros, et la réforme devrait leur apporter des cotisations supplémentaires : ils s'en défendent, arguant qu'ils verseront des pensions plus élevées, mais on sait déjà qu'ils vont bénéficier de la réforme et la question se pose de ces marges.

Le régime de retraite de la SNCF est effectivement fermé depuis le 1er janvier 2020 ; on observe un âge de départ différent que dans la réforme, je laisse chacun apprécier. Le régime de la RATP prévoit un âge de départ plus tôt que l'âge légal, mais il faut savoir que la RATP tend à re-contractualiser sur leur ancien poste à des chauffeurs partis à la retraite : c'est aussi une information à considérer. Pour mémoire, la RATP emploie environ 42 000 salariés sous statut.

L'estimation de la surcontribution de l'État est de 30 milliards d'euros, pas de 60 milliards, le taux de cotisation employeur de l'État est bien supérieur, à 74 % pour le volet civil de la fonction publique de l'État, pour compenser un déséquilibre démographique. Il faudrait effectivement rééquilibrer les choses.

Je n'ai pas de données particulières sur la fraude sociale, ni en particulier sur le nombre de retraités qui résident à l'étranger.

Enfin, je suis bien d'accord avec vous, Monsieur le Président, sur le fait que l'âge de départ à la retraite n'est pas un petit paramètre - et qu'on parle bien d'une dimension substantielle de la retraite...

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Raynal

Merci pour toutes ces précisions. Nous allons passer au vote. J'indique par avance que mon vote ne portera pas sur la qualité des travaux préparatoires conduits par notre rapporteure, mais sur le projet de loi qui nous est soumis.

La commission émet un avis favorable sur le projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023.

La réunion est close à 15 h 55.