Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 1er mars 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

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La réunion

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La commission examine les amendements au texte n° 307 (2010-2011) pour le projet de loi n° 70 (2010-2011) relatif au contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et de matériels assimilés, à la simplification des transferts des produits liés à la défense dans l'Union européenne et aux marchés de défense et de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Nous sommes saisis de six amendements que nous allons examiner, plus un septième qui rectifie une erreur matérielle, que je vous proposerai d'adopter. Je passe la parole à Madame Demessine pour nous présenter son amendement n° 1.

Article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

Cet amendement vise à inscrire dans la loi les conditions de contrôle des exportations fixées dans la « position commune » de 2008.

Il permettrait ainsi de mieux encadrer l'octroi des licences d'exportation de matériels de guerre vers des Etats non-membres de l'Union européenne. Il s'agit de prévenir les risques d'usage et de diversion de ces matériels dans un sens contraire au droit international, aux droits de l'homme et au droit international humanitaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Sur ce domaine du contrôle, je crois qu'il est nécessaire de bien préciser les choses. La « position commune » adoptée en 2008 sous présidence française de l'Union européenne, issue du « code de conduite » de 1998, fixe huit critères à respecter pour l'exportation d'armement. C'est un acte juridiquement contraignant, qui s'impose donc au Gouvernement dans la délivrance des autorisations.

Juridiquement, la position commune ne nécessite pas en droit français de transposition législative. Elle est d'application directe.

Elle est appliquée au quotidien par l'administration avec la plus grande vigilance : les directives données aux ministères chargés de l'instruction des demandes d'exportation reprennent les huit critères de la position commune.

Lors de sa réunion mensuelle, la commission interministérielle (CIEEMG) instituée auprès du Premier ministre examine les demandes d'agrément notamment à l'aune de ces critères. Cette vigilance explique des délais d'instruction qui sont longs : il faut au total aujourd'hui plus de 110 jours pour obtenir les deux phases de l'autorisation...

D'après le rapport au Parlement sur les exportations d'armement, 79 demandes d'exportation ont été refusées en 2009 sur le fondement des critères de la position commune, dont près d'un tiers sur la base du « fameux » 7ème critère, celui du risque de détournement ou de réexportation ultérieure. La plupart des refus concernaient le Moyen Orient, l'Afrique subsaharienne ou l'Asie du Nord Est.

Enfin, la position commune prévoit, dans son article 15, qu'elle soit réexaminée tous les 3 ans. Son texte devrait donc en conséquence être bientôt appelé à évoluer ; si nous le transposons dans la loi, le texte risquerait d'être obsolète à peine promulgué. Ce sont les raisons pour lesquelles je vous demanderai de retirer votre amendement ou, à défaut, je lui donne un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Ces amendements nous ont également été proposés par les organisations non gouvernementales ; mon groupe n'a pas souhaité les déposer mais je pense qu'il serait très utile que puisse être rappelé, dans le débat en séance publique, notre attachement aux critères fixés par la position commune.

La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 1.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

L'amendement n° 2, en complétant l'article 1er par les mots : « leur maintenance, leur conservation et leur contrôle a posteriori, ou leur réexportation », vise à inscrire dans la loi, certaines des conditions inscrites dans la « position commune » pour prévenir les risques de réexportation vers un Etat qui détournerait ces matériels d'un usage normal.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Le texte de loi prévoit que les licences d'exportation en dehors de l'Union européenne pourront comporter des conditions ou restrictions concernant l'utilisation finale des matériels.

Cette disposition est capitale puisque c'est par le biais de ces réserves et restrictions d'usage que l'administration peut contrôler très finement certaines exportations sensibles.

Je rappelle que des sanctions pénales très lourdes sont prévues en cas de manquement : par exemple un exportateur qui ne reproduirait pas dans son contrat de vente les réserves d'utilisation contenues dans sa licence est passible de 3 ans d'emprisonnement et 45 000 euros d'amende.

Cet amendement veut détailler la terminologie, en ajoutant les termes de « maintenance », « conservation », et « réexportation » à ceux d'« utilisation finale » proposés par le projet de loi.

Le terme d'« utilisation finale » est la terminologie en vigueur ; elle est d'ailleurs employée par la Position commune, dans son article 5. La précision proposée est donc superfétatoire.

Pour ce qui est du contrôle a posteriori, il a été renforcé par la nouvelle rédaction de l'article 2 du texte adopté par la commission. Ce n'est pas dans les licences délivrées aux industriels que doivent figurer les dispositions relatives au contrôle mais au contraire dans le code de la défense. Faire référence ici au contrôle ne conduirait pas à un renforcement de ce contrôle.

La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 2.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

L'amendement n° 3 est le symétrique de l'amendement précédent en ce qui concerne les transferts intra-communautaires.

La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 3.

Article additionnel après l'article 1er

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

L'amendement n° 4 concerne le rapport annuel sur les exportations d'armement de la France : actuellement, il manque de précision. Nous souhaitons plus de transparence en cette matière. Nous proposons une traduction en droit national de l'engagement pris au titre de l'article 8 alinéa 3 de la « position commune » de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Cet amendement concerne le contenu du rapport qui est remis chaque année au Parlement sur les exportations d'armement. Ce rapport très complet, d'une centaine de pages, est d'ores et déjà une mine d'informations.

L'amendement prévoit que l'intégralité des licences octroyées ou refusées soit désormais publiée dans ce document.

Je suis naturellement sensible à un amendement qui contribue à l'information du Parlement, toutefois, dans le cas présent, je me demande s'il est réaliste de publier l'intégralité des autorisations et des refus : cela fait près de 13 000 actes... Trop d'information tue l'information.

Enfin, j'aurais peur que nous livrions ainsi une source d'informations sur les contrats passés par nos industriels, ce qui pourrait servir la concurrence, sur un marché dont nous savons qu'il est très épié, très copié... il faut être prudent.

La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 4.

Article 2

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Demessine

L'amendement n° 5 prévoit que les agents habilités de l'Etat, ou la représentation diplomatique de l'Etat, doivent s'assurer régulièrement que l'usage par les utilisateurs finaux du matériel exporté se fait dans le respect des dispositions du code de la défense. Aujourd'hui, le matériel de guerre exporté peut facilement être détourné de son usage normal et être réexporté vers des zones de conflits. Ceci est essentiellement dû à un système de contrôle peu efficace. L'objet de cet amendement est donc de le renforcer.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Pour des raisons évidentes de territorialité, le contrôle par l'administration française s'exerce en France et non pas en dehors de nos frontières. Le projet prévoit donc de passer par une mise en cause de l'exportateur situé quant à lui sur le territoire national.

Pour traiter le problème au niveau international, il faut un instrument de droit international : d'où l'importance de soutenir les initiatives pour établir, par un traité, un socle de droit international avec des règles partagées par le plus grand nombre d'Etats, avec, si possible, des mécanismes de contrôle.

La route sera longue, nous le savons, mais il faut s'attaquer à ce problème avec les bons instruments, au bon niveau.

C'est l'espoir soulevé par l'actuelle négociation dans l'enceinte de l'ONU d'un traité sur le commerce des armes, initiative soutenue dès l'origine par la France, qui a déjà fait l'objet d'une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies en 2009, adoptée par 151 Etats, dont les Etats-Unis. L'objectif est de faire adhérer la Russie et la Chine, notamment. Une conférence des Nations unies est convoquée pour 2012.

La commission donne un avis défavorable à l'amendement n° 5.

Debut de section - PermalienPhoto de André Trillard

Le code de la défense prévoit un avis du ministère de la défense avant l'engagement de poursuites judiciaires.

L'amendement n° 6 étend l'exemption d'avis à l'acquisition et à la détention d'armes à feu (disposition figurant dans le chapitre VI), ainsi qu'à la conservation, à la perte et au transfert de propriété des armes à feu (dispositions figurant dans le chapitre VII).

La limite actuelle est en effet un peu floue ; les trafiquants pourraient l'utiliser. Il convient que les poursuites judiciaires puissent être engagées sans tarder.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Cette précision quant au champ d'application de l'avis du ministère de la défense me semble bienvenue.

La commission donne un avis favorable à l'amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Je vous propose un amendement à l'article 4 qui a pour seul objet la qualité grammaticale de la rédaction de l'article 219 du code des douanes : sans cette correction purement matérielle une phrase de cet article n'aurait pas de sens.

La commission adopte l'amendement, qui devient l'amendement n 7.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Qu'est-il advenu de mon sous-amendement à l'amendement du Gouvernement, tendant à maintenir la mention expresse du rôle du Contrôle général des armées dans le contrôle a posteriori des entreprises d'armement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Il a été intégré au texte de la commission, dont l'article 2 a bien conservé la rédaction actuelle de l'article L 2334-4 du code de la défense, qui prévoit explicitement que le contrôle est notamment exercé par « des agents relevant du contrôle général des armées ».