Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation

Réunion du 25 mai 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Au cours d'une première réunion tenue le matin, la commission entend tout d'abord une communication de M. Roland du Luart, rapporteur spécial de la mission « Justice », sur le fonctionnement de la justice à La Réunion et à Mayotte.

L'idée de départ de ce contrôle tire notamment sa source de mes échanges avec M. Delarue, le contrôleur général des lieux de privation de liberté, et du diagnostic alarmant qu'il m'avait dressé de la situation à la maison d'arrêt de Majicavo, sur Mayotte : conditions de détention difficiles, surpopulation carcérale, taux d'occupation de 280 % à la fin de l'année 2009... Il y avait en outre une certaine logique, dès lors que la décision était prise de se rendre sur place à Mayotte, d'étendre le contrôle à La Réunion. A une certaine unité géographique (la justice française dans l'océan indien) répondait une comparaison utile entre deux départements d'outre-mer placés dans des conditions très différentes : l'un (La Réunion) devenu département en 1946 et l'autre (Mayotte) ayant accédé à ce statut très récemment (le 31 mars dernier).

Autant le dire tout de suite, ce contrôle débouche sur un contraste saisissant. Pour tout « métropolitain » découvrant ces deux îles, la situation est frappante de différences.

Du côté de La Réunion, le département fonctionne bien, bénéficiant notamment encore de l'action menée par Michel Debré en son temps. Le constat d'ensemble renvoie à une justice, si j'ose dire, en état de marche. Celle-ci s'y trouve naturellement confrontée aux difficultés malheureusement bien connues de l'institution, mais elle y bénéficie également d'un climat social relativement apaisé malgré les difficultés économiques que traverse aujourd'hui l'île. J'ai même été frappé de constater que la CGT pénitentiaire n'y est pas particulièrement revendicative.

La Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion comprend dans son ressort le tribunal de grande instance de Saint-Pierre, ainsi que les tribunaux d'instance de Saint-Denis et de Saint-Pierre. Elle compte également une chambre d'appel à Mayotte, sur laquelle je reviendrai.

Le budget de fonctionnement de la Cour d'appel s'appuie sur une dotation initiale pour 2011 de 2,2 millions d'euros en crédits de paiement et en autorisations d'engagement. Comme dans le cas d'autres Cours d'appel, cette dotation se révèle toutefois en deçà des besoins. Il est d'ailleurs symptomatique d'observer que les dépenses exécutées en 2008 se montaient à 2,8 millions d'euros, puis à 2,9 millions d'euros en 2009 et à 2,6 millions d'euros en 2010. On peut certes interpréter cette baisse tendancielle des dépenses exécutées comme le résultat d'efforts d'économies substantielles et d'une rationalisation souhaitable des moyens. Mais cette lecture ne peut occulter les vraies difficultés de gestion auxquelles est désormais confrontée la Cour d'appel. Les témoignages sont à ce sujet sans ambiguïté. Je veux notamment citer le Président du TGI de Saint Denis : « Sur le terrain, nous n'avons aucune marge de manoeuvre ». D'autres expressions m'ont également frappé lors de mes échanges : « on fonctionne sur la corde raide, en équilibriste... », « on a atteint l'os... ». La révision générale des politiques publiques (RGPP) a atteint ses limites avec la justice, notamment dans l'océan indien.

Cette insuffisance de crédits présente de multiples conséquences sur le fonctionnement au quotidien des juridictions de La Réunion. On redoute qu'un climatiseur tombe en panne (car les crédits manqueraient pour le remplacer ou le réparer), mais on s'inquiète aussi pour le simple maintien en l'état des Palais de justice. A cet égard, il faut ainsi signaler que le poste consacré à l'entretien immobilier a chuté de 139 000 euros en 2010 à 78 000 euros pour 2011. L'exemple est emblématique. Il amène à s'interroger sur les critères de ce qu'est une bonne gestion de la ressource publique : plutôt que de rogner à court terme sur les crédits d'entretien immobilier, ne vaudra-t-il pas mieux allouer des crédits suffisants pour éviter des dépenses encore plus onéreuses à moyen terme lorsque les bâtiments seront vraiment très dégradés ?

Du point de vue des effectifs, la situation est également limite. Le tribunal d'instance de Saint-Pierre, par exemple, souffre d'un déficit de greffiers et de fonctionnaires : là où les ratios de la Chancellerie prévoiraient treize greffiers et fonctionnaires, ils ne sont que onze. A lui seul, le service des tutelles justifierait la création de deux emplois de fonctionnaire et de presque un poste de magistrat. Ce service n'est pas en mesure de remplir correctement l'obligation, née de la loi du 5 mars 2007, qui impose une révision des dossiers de tutelle tous les cinq ans. Et pourtant, malgré tout, la justice avance à La Réunion...

Ce constat est encore plus fondé s'agissant de l'administration pénitentiaire. Elle a bénéficié du programme « 13 200 » et compte désormais, notamment, un nouveau centre de détention à Saint-Denis de la Réunion. 492 personnes y sont écrouées, dont 452 personnes hébergées. Les capacités théorique et opérationnelle de l'établissement étant fixées à 573 places, le taux d'occupation ainsi obtenu est de 79 %, soit un taux tout à fait acceptable. Je veux d'ailleurs souligner à quel point cet établissement est réussi, tant du point de vue architectural que des couleurs utilisées, et combien il pourrait inspirer d'autres réalisations à venir.

Le dernier maillon de l'institution judiciaire à La Réunion, la protection judiciaire de la jeunesse, sait également faire preuve d'efficacité. S'appuyant sur plusieurs unités en milieu ouvert, sur un centre éducatif renforcé et sur un centre éducatif fermé, elle souffre toutefois de difficultés réelles à trouver des familles d'accueil.

Du côté de Mayotte, le tableau est, hélas, plus sombre.

La maison d'arrêt de Majicavo réserve toutefois une « relativement » bonne surprise. Son taux de sur-occupation n'est plus aussi élevé qu'il y a encore quelques mois : il n'est « plus » que d'environ 200 %, avec un effectif de 212 personnes fin avril pour 105 places. Par ailleurs, les conditions de détention sont bien évidemment difficiles, mais pas autant qu'on pourrait le redouter. Le climat y est étonnamment apaisé. Malgré une extension prévue pour 2014, il est toutefois à craindre que cet établissement ne souffre encore durablement de sur-occupation. En effet, environ 75 % des détenus sont étrangers et bien souvent impliqués dans les réseaux d'immigration clandestine venant d'Anjouan. Ce sont les pilotes des « kwassa-kwassa », les clandestins arrêtés étant, eux, envoyés dans le centre de rétention administrative de Mayotte dans l'attente de leur reconduite à Anjouan.

Parmi les problèmes les plus urgents à régler s'agissant de la maison d'arrêt de Majicavo, je veux insister sur la nécessité d'intégrer rapidement les personnels issus de la collectivité territoriale de Mayotte et exerçant au sein de l'administration pénitentiaire. Cette intégration est prévue à l'horizon 2019. Or, ce délai est trop long et risque de dégrader le bon climat social au sein de l'établissement, déjà soumis à de fortes contraintes comme je viens de l'indiquer. Trente-trois agents sont concernés et l'enjeu financier est modeste : entre 35 000 et 40 000 euros. Je viens d'ailleurs d'adresser un courrier dans ce sens au secrétaire d'Etat chargé de la fonction publique.

L'autre difficulté majeure que je voudrais souligner correspond à la très difficile maîtrise des frais de justice à la chambre d'appel de Mamoudzou. En effet, dans le cadre de la lutte contre l'immigration clandestine, la justice sur l'île doit avoir recours à des traducteurs, et cette tendance va s'accentuant avec l'accroissement des clandestins. Ce problème se répercute sur la Cour d'appel de La Réunion, puisque la chambre d'appel relève, depuis la départementalisation, de cette Cour d'appel.

Au total, selon les informations qui m'ont été communiquées, la dotation initiale accordée en 2011 pour couvrir les frais de justice dans le ressort de la Cour d'appel de La Réunion se monte à 2,183 millions d'euros. Or, les charges restant à payer à la fin de l'exercice 2010 s'élevaient à 589 000 euros. Par ailleurs, au cours de ce même exercice 2010, 2,859 millions d'euros ont été au total consommés au titre des frais de justice.

L'insuffisance de dotation pour l'année 2011 apparaît donc clairement : il manque 1,2 million d'euros. Cette insuffisance met en péril le bon fonctionnement de la Cour d'appel de La Réunion et des juridictions relevant de son ressort, avec le risque, notamment, de ne plus pouvoir recourir aux experts dont les travaux tardent à être payés. Aussi me paraît-il essentiel que la Chancellerie puisse remédier à cette situation très préoccupante, en « sanctuarisant » par exemple une enveloppe complémentaire dans laquelle la Cour d'appel pourrait puiser. Un tel principe trouverait d'ailleurs utilement à s'appliquer au niveau national, pour toutes les juridictions, lors de la loi de finances pour 2012.

En conclusion, je voudrais saluer l'engagement des magistrats, des greffiers et des fonctionnaires qu'il m'a été donné de rencontrer au cours de ce contrôle. Confrontés à des situations difficiles, devant faire face à des moyens de plus en plus contraints, ils savent toutefois, pour la plupart, faire preuve de beaucoup d'abnégation au service de l'Etat. Si la justice parvient à « tourner » à La Réunion et à Mayotte, c'est aussi grâce à eux. Il faut en avoir conscience.

Je veux également redire que le RGPP a, me semble-t-il, atteint ses limites dans le domaine de la justice.

Enfin, il faut aussi rappeler l'impérieuse nécessité d'évaluer l'impact des lois avant de les voter.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le Parlement contrôle l'action du Gouvernement et évalue les politiques publiques. La RGPP constitue un exercice séduisant en soi, mais dont on voit aujourd'hui les limites. Il faut revoir l'organisation de l'Etat et ses missions.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Dans le cas de Mayotte, nous sommes un peu tous coupables de la situation actuelle puisque le Parlement a voté la départementalisation de ce territoire sans en anticiper le coût. Dans le domaine de la justice par exemple, la juridiction de Mayotte a beaucoup plus recours à des interprètes que les juridictions en métropole.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Les conséquences de la RGPP amènent à s'interroger sur les pratiques parlementaires : nous votons des lois et nous sommes donc en quelque sorte des activateurs de la dépense publique.

N'y a-t-il pas ce qu'on pourrait considérer comme une justice parallèle sur l'île de Mayotte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Effectivement la justice à Mayotte a longtemps reposé sur les cadis, mais les choses évoluent de manière étonnante. La population y est encore fortement marquée par la polygamie, mais la diffusion du mode de vie métropolitain tend progressivement à y mettre un terme. En effet, l'homme polygame se doit d'assurer un même niveau de vie à ses femmes. Or, celui-ci est de plus en plus élevé à Mayotte ce qui a un fort effet dissuasif...

Il n'y a toutefois pas encore d'état civil et la population de l'île varie selon les estimations entre 200 000 et 300 000 habitants. En réalité, personne n'en sait rien.

Je dois confesser qu'il m'est difficile de comprendre comment on a pu être assez léger pour faire de Mayotte le 101e département de la France. Les dérapages financiers vont assurément être importants.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Il y a bien une activité touristique, mais son potentiel reste faible. Le travail clandestin demeure important, beaucoup de Mahorais embauchant des immigrés en situation irrégulière venant d'Anjouan.

Je veux souligner qu'en prison, si un détenu travaille, il perçoit une rémunération d'environ 120 euros, ce qui correspond au salaire d'un enseignant à Anjouan. Il faut aussi constater que le climat dans la maison d'arrêt est très apaisé. Il en va de même à La Réunion où il existe un profond respect de l'ordre : les Réunionnais ont coutume d'appeler le gendarme sous le vocable de « la loi ».

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

C'est en tout cas un fait dans l'océan indien. En revenant de Mayotte, j'ai voyagé dans un avion qui transportait également une vingtaine de détenus placés sous la garde de quatre-vingts gendarmes. Imaginer une situation analogue en métropole ne serait pas possible, et pourtant au cours de ce vol, aucun incident ne s'est produit. Les détenus sont restés calmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Oui. L'établissement du Port à La Réunion accueille des détenus de la maison d'arrêt de Majicavo, car il ne souffre pas de surpopulation carcérale contrairement à la prison de Mayotte. La cohabitation entre les Anjouannais et les Mahorais est toutefois difficile, même si la situation à la maison d'arrêt du Port est toujours restée calme jusqu'à présent.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Vous nous avez indiqué le problème de l'intégration des trente-trois personnels exerçant à la maison d'arrêt de Majicavo en estimant le coût de cette intégration dans une fourchette de 35 000 à 40 000 euros. Mais, si l'on prend en compte l'ensemble de leur carrière, il faut probablement multiplier ce coût par dix ou vingt.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le directeur de la maison d'arrêt de Majicavo assure que, s'il en avait la possibilité juridique, il pourrait assumer ce surplus de dépenses de personnels sur son budget actuel. Il semble que la difficulté réside en fait plus dans le souci de Bercy de ne pas créer un précédent. Mais il faut rapidement résoudre ce problème, car il est malsain qu'une partie du personnel de cette maison d'arrêt n'ait pas le même niveau de traitement que le reste des agents.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le point que vous soulevez renvoie à un problème plus général qui est celui de l'intégration des agents issus des collectivités d'outre-mer au sein de la fonction publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

A Mayotte, le cas est particulier puisque les gendarmes et les policiers ont déjà fait l'objet d'une telle intégration depuis le vote de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (LOPSI). Les agents de la pénitentiaire, eux, sont jusqu'à présent soumis à un traitement différent. Le souhait du Garde des sceaux est de raccourcir le délai d'intégration en le faisant passer de 2019 à 2013. Je vais, pour ma part, m'employer à pousser ce dossier.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Je me suis rendue à Mayotte dans le cadre de la mission de la commission des lois sur la départementalisation et j'ai fait le même constat que Roland du Luart. En particulier, la maison d'arrêt est bien tenue mais il faut faire attention : la cohabitation entre Mahorais et Anjouanais peut se révéler explosive.

Il n'y a plus lieu de s'étonner de la départementalisation de Mayotte, qui est désormais un fait acquis.

A propos de la mise en oeuvre de la RGPP, je tire pour ma part des conclusions identiques à celles de Roland du Luart, mais s'agissant des préfectures. Dans mon département du Puy-de-Dôme, le tribunal de Clermont-Ferrand connaît les mêmes difficultés que celles rencontrées au niveau de la Cour d'appel de La Réunion : problèmes de paiement des frais de justice, portiques de sécurité cassés et qu'il est difficile de remplacer...

A Mayotte, le chantier de l'état civil n'avance que lentement du fait de moyens humains insuffisants. Il faut rappeler que sur l'île, on peut très facilement changer de nom, ce qui pose des difficultés pour le bon fonctionnement de la justice. Par ailleurs, lors de mes échanges avec les cadis, ceux-ci m'ont fait part de leurs revendications pour bénéficier du même statut que le clergé en Alsace-Moselle. Où en est-on à cet égard ?

Les défaillances de l'état civil sont d'autant plus gênantes qu'elles constituent un frein pour les jeunes Mahorais souhaitant étudier hors de leur île et voyager.

Dans le domaine de l'enfance délinquante et de la protection de l'enfance, j'avais pu observer, lors de mon déplacement à Mayotte, une indifférence relative de la part du département. Qu'en est-il aujourd'hui ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

De nouveaux magistrats ont pris leurs fonctions à Mayotte et les moyens humains paraissent désormais bien calibrés. Mais, la question de l'état civil est encore loin d'être réglée, ce qui rend encore un peu plus nécessaire le recours aux interprètes et alourdit donc les frais de justice.

S'agissant de la protection de l'enfance, les conseillers généraux sont très peu formés à ces enjeux et connaissent très mal l'action de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ). On estime que des milliers de jeunes vivent clandestinement sur l'île. Lors de notre rencontre, le directeur de la PJJ à Mayotte a reconnu ce grave problème. Il faut absolument former les cadres et les élus sur l'île.

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Lorsque j'étais inspecteur général de finances, j'ai eu à travailler sur l'outre-mer. Je suis frappé par l'optimisme de notre collègue Roland du Luart et il me semble que les difficultés ne sont plus aussi importantes que celles qu'on pouvait craindre à l'époque.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Méfions nous de l'eau qui dort ! Les détenus sont effectivement calmes dans la maison d'arrêt de Majicavo, mais une étincelle pourrait suffire... Les réseaux mafieux sont également à l'oeuvre dans le domaine de l'immigration clandestine.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Effectivement, une étincelle suffirait. Mayotte n'est pas une île paradisiaque, elle souffre d'un climat difficile. Ce climat dégrade d'ailleurs les documents d'état civil rendant le chantier d'autant plus ardu dans ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Il faut assurément mettre des moyens suffisants pour mener à bien la départementalisation de Mayotte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

Je suis surpris de la fourchette de 35 000 à 40 000 euros que vous évoquez en ce qui concerne le coût de la mesure d'intégration des agents de la maison d'arrêt de Majicavo. Il n'y a donc pas plus de différence que cela entre la fonction publique d'Etat et le traitement prévu par l'ancien statut de Mayotte ?

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Cet écart est effectivement faible, mais il s'explique par un certain écrasement des traitements au sein de l'administration pénitentiaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Lorsque vous parlez d'intégration, vous envisagez bien un statut de titulaires pour ces agents ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

En tant que président de la commission nationale d'évaluation du recensement de la population, je suis inquiet de constater qu'il est impossible de connaître précisément le nombre d'habitants à Mayotte.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Le problème tient à l'immigration clandestine mais aussi à l'absence d'un état civil fiable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

Si je comprends bien, chaque personne peut donc avoir plusieurs identités.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

L'évolution qu'a connue cette île en vingt ans est cependant considérable. Certes, il faut déplorer l'absence de cadastre et l'influence des cadis reste grande. Mais l'école et l'enseignement du français fonctionnent très bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Dans le secteur de l'enseignement, 340 postes supplémentaires sont d'ailleurs prévus pour la prochaine rentrée scolaire d'après les informations que j'ai recueillies sur place.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Il existe aussi des filières d'immigration clandestine pour des adolescentes comoriennes qui viennent accoucher en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

La maternité de Mamoudzou se classe au premier rang en Europe pour le nombre de naissances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le rapporteur spécial, je vous remercie de cette communication qui nous permet de mieux prendre la mesure des enjeux pour la justice dans l'océan indien. Maintenant que Mayotte est devenue un département, il faut lui donner des moyens correspondants. Nous ne manquerons pas d'interpeller le Gouvernement sur ces questions.

A l'issue de ce débat, la commission, à l'unanimité, donne acte de sa communication à M. Roland du Luart, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Philippe Marini, rapporteur, et à l'élaboration du texte proposé par la commission sur la proposition de résolution européenne n° 481 (2010-2011), présentée au nom de la commission des affaires européennes par M. Jean Bizet, sénateur, sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA.

EXAMEN DU RAPPORT

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Le 28 avril 2011, la commission des affaires européenne a déposé, à l'initiative de notre collègue Jean Bizet, une proposition de résolution sur l'application du principe de subsidiarité en matière de TVA. Cette résolution s'inscrit dans le cadre de la consultation lancée par la Commission européenne sur le système de TVA. Elle vise à élargir la faculté pour les Etats membres de l'Union européenne de recourir à des taux réduits de TVA, dès lors que ce recours « ne crée pas de dysfonctionnement dans le marché intérieur et qu'il n'y a pas de risque de distorsion de concurrence ». Sous cette condition, le principe de subsidiarité trouverait à s'appliquer en matière de TVA et dans certains secteurs. Parmi ces secteurs, la filière équine est explicitement visée par la proposition de résolution.

Quel est le contexte de cette proposition de résolution ?

Tout d'abord, il convient de rappeler qu'au regard des recettes fiscales, la TVA représente actuellement l'impôt le plus « productif » dans notre pays. Son produit est évalué à 177,2 milliards d'euros en 2011, soit 52 % du total des recettes fiscales au cours de cet exercice.

Essentielle à l'équilibre budgétaire de par son rendement, la TVA représente également un impôt d'avenir. La Commission européenne le souligne dans son Livre vert de décembre 2010. Elle relève que, dans les années à venir, « il est possible que le financement de l'Etat-providence doive reposer moins qu'aujourd'hui sur l'imposition du travail et des revenus du capital (épargne), ce qui plaide (...) en faveur d'un basculement vers la fiscalité indirecte ». Cette analyse est bien connue de notre commission, qui s'est depuis déjà fort longtemps prononcée en faveur de la création d'une « TVA sociale »... Un nombre croissant de pays européens s'y rallient : le Danemark, l'Allemagne et, plus récemment, le Royaume-Uni ainsi que le Portugal, ou dans un futur proche la République tchèque. D'une certaine manière, on peut d'ailleurs interpréter le Livre vert de la Commission européenne sur l'avenir de la TVA comme procédant d'un souci d'anticiper et de préparer le « basculement » des systèmes de prélèvements obligatoires en modernisant le principal impôt d'avenir qu'est la TVA.

Dans cette perspective d'ensemble, les taux réduits de TVA constituent autant de niches fiscales, qui plus est très coûteuses. Faut-il rappeler que la dépense fiscale se concentre aujourd'hui dans notre pays à hauteur de 26 % sur la TVA ? Parmi les vingt-et-un dispositifs les plus coûteux (c'est-à-dire à plus d'un milliard d'euros) figurent cinq mesures ayant trait à la TVA. L'augmentation d'un point de TVA à taux réduit rapporterait 2,3 milliards d'euros.

Actuellement, les directives européennes encadrent strictement le recours aux taux réduits, mais de manière très insatisfaisante. Reposant sur le principe d'unanimité, la procédure de révision de la liste des biens et des services pouvant faire l'objet d'un taux réduit souffre à la fois d'une extrême longueur, d'une grande complexité et d'une certaine opacité. Elle incite en réalité les gouvernements à avoir recours à un double langage, en prenant des engagements au niveau national tout en sachant qu'il y aura blocage au niveau communautaire. D'autre part, elle crée de l'incertitude dans les secteurs économiques concernés compte tenu des délais très longs. Enfin, elle peut engendrer des « coûts cachés », puisque l'accord unanime des Etats membres ne peut généralement être obtenu sans concessions sur d'autres sujets.

Il paraît donc souhaitable de souligner dans la proposition de résolution ces motifs d'insatisfaction, qui sont autant d'éléments essentiels à prendre en compte dans le cadre d'une réflexion d'ensemble sur le recours aux taux réduits de TVA par les Etats membres.

Dans sa proposition de résolution, la commission des affaires européennes prône l'application du principe de subsidiarité dans le domaine de la TVA. Si ce principe mérite d'être exploré, les conséquences qui pourraient en découler doivent cependant être évaluées de manière approfondie : notamment les fortes pressions de la part des groupes d'intérêts qui ne manqueraient pas de formuler des demandes reconventionnelles (qu'on pense au chocolat, à la margarine...). C'est la raison pour laquelle il est nécessaire (et plus prudent...) de compléter la rédaction de la présente proposition de résolution en demandant au Gouvernement d'« étudier les avantages et les inconvénients d'une application du principe de subsidiarité à la détermination des taux réduits de TVA ».

L'autre enjeu soulevé par la proposition de résolution déposée par nos collègues de la commission des affaires européennes réside dans la question du taux intermédiaire. En France, la création d'un taux intermédiaire présenterait l'avantage de réduire l'écart important (14,1 points) qui existe aujourd'hui entre le taux normal et le taux réduit, et donc le coût budgétaire de certains taux dérogatoires.

Cette solution pourrait trouver, par exemple, un terrain d'application dans le cas de la TVA sur la filière équine, dont le coût du taux réduit est estimé à 200 millions d'euros. Sur ce point, je vous propose un amendement rédactionnel, pour faire apparaître la référence à un taux intermédiaire pour la filière équine à une place plus pertinente dans le texte.

En tout état de cause, la politique conduite en matière de taux réduit de TVA doit devenir plus cohérente. Nous avions déjà eu l'occasion de le dire lors des débats autour du prix du livre numérique, et cette proposition de résolution nous donne l'occasion de le répéter s'agissant de la filière équine. Actuellement, en France, cette filière est considérée, à juste titre, comme faisant partie intégrante de la filière agricole. Elle est donc soumise au taux réduit de TVA. Cependant, la Commission européenne conteste cette application du taux réduit et a engagé un certain nombre de procédures en manquement contre des Etats, dont la France. Plusieurs arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) semblent lui donner raison. Pour autant, dans un souci de cohérence fiscale, il paraît éminemment souhaitable de s'associer au souhait de la commission des affaires européennes que le taux réduit de TVA, ou un éventuel taux intermédiaire, puisse continuer d'être appliqué à l'ensemble de cette filière.

Enfin, il est impératif de rappeler dans la proposition de résolution la doctrine de notre commission en matière d'équilibre des finances publiques. De la règle d'équilibre que la France a commencé de mettre en oeuvre avec la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, il découle un principe simple de compensation : si de nouveaux taux réduits de TVA devaient être décidés, il conviendrait d'accroître l'effort discrétionnaire annuel d'un montant équivalent à celui du coût des nouvelles niches en matière de TVA. Cette règle de compensation et d'équilibre budgétaire pourrait d'ailleurs, dans les semaines à venir, devenir une obligation constitutionnelle.

Je propose donc à la commission d'adopter la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, modifiée et complétée par deux amendements traduisant les observations que je viens de vous exposer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Monsieur le Rapporteur général, je vous remercie d'avoir bien voulu rappeler la position de principe de notre commission en matière d'équilibre budgétaire et d'application des taux de TVA. Aujourd'hui, le monde du cheval est inquiet de se voir appliquer une TVA à 19,6 %. Cette filière se classe au quatrième rang des exportateurs dans le monde, mais il est vrai qu'en matière d'exportations, la TVA est sans incidence.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Frécon

Je veux m'exprimer en tant que membre du groupe d'études sur le cheval constitué au sein de notre assemblée et présidé par notre collègue Ambroise Dupont. Je suis par ailleurs élu dans un département où les éleveurs sont nombreux et où l'on trouve deux hippodromes. Lors de l'une de ses dernières réunions, le groupe « cheval » a pris position en faveur des recommandations figurant dans le projet de résolution déposé par la commission des affaires européennes. Une question se pose toutefois quant à la référence à un éventuel taux intermédiaire de TVA qui pourrait s'appliquer à la filière. A cet égard, je veux rappeler que cette filière comprend différentes composantes. Parmi celles-ci, les courses sont fréquemment mises en avant. Si les chevaux de course sont certes finalement destinés à l'abattage, il n'est cependant pas contestable qu'auparavant leur destination est toute autre. La CJUE a effectivement condamné très récemment les Pays-Bas, mais d'autres affaires sont en instance et le moment ne me paraît pas venu de baisser la garde.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

S'agissant d'un taux intermédiaire de TVA, je veux rappeler que cette référence figure déjà dans la résolution déposée par la commission des affaires européennes. L'amendement que je propose à la commission n'est donc nullement une innovation et présente simplement un caractère rédactionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

A titre personnel et devant une importante association d'éleveurs, j'ai déjà eu l'occasion, il y a quelques mois, de dire qu'il fallait se préparer au passage à un taux intermédiaire pour la filière équine. Il en va du rétablissement de l'équilibre de nos finances publiques.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La commission des affaires européennes fait à juste titre référence à l'éventuelle application d'un taux intermédiaire de TVA à la filière équine comme l'une des solutions au problème posé. Cependant, la mention du taux intermédiaire serait plus pertinente à l'alinéa relatif aux orientations préconisées, plutôt qu'à l'alinéa relatif à la description de l'analyse de la Commission européenne.

L'amendement n° 1 est adopté.

La procédure prévue au niveau communautaire pour accorder aux Etats membres la faculté d'appliquer un taux réduit de TVA à certains biens ou à certaines prestations de services est à la fois longue et complexe. Elle engendre par ailleurs des « coûts cachés » puisque l'accord unanime des Etats membres ne peut être généralement obtenu sans concessions sur d'autres sujets.

Dès lors, la solution alternative proposée par la commission des affaires européennes (l'application du principe de subsidiarité) mérite d'être explorée. Il faut cependant être conscient que l'application de ce principe engendrerait un grand nombre de demandes sectorielles et serait donc potentiellement source de nouvelles niches fiscales.

Si de nouveaux taux réduits de TVA devaient être décidés, il appartiendrait au Gouvernement d'accroître l'effort discrétionnaire annuel d'un montant équivalent à celui du coût des nouvelles niches en matière de TVA.

Une telle compensation correspond d'ailleurs aux engagements pris par la France vis-à-vis de ses partenaires européens en matière de finances publiques, déclinés dans la loi n° 2010-1645 du 28 décembre 2010 de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014. Cette règle d'équilibre pourrait être portée au plus haut niveau de la hiérarchie des normes grâce à son inscription dans le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques.

L'amendement n° 2 rectifié est adopté.

La proposition de résolution européenne est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Puis, la commission entend une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur les niches fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La communication que je m'apprête à effectuer trouve son origine dans un amendement déposé par Nicole Bricq dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2011. Nous nous sommes alors engagés, avec le président Arthuis, à travailler sur la définition et le chiffrage des niches en 2011, le bureau de notre commission ayant ensuite acté cette démarche le 25 janvier dernier.

Ces travaux apparaissent d'autant plus nécessaires qu'aux termes de l'article 9 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, les dépenses fiscales et les « niches sociales » doivent être gelées à périmètre constant, ce qui implique de s'assurer de la pertinence du périmètre actuel.

Or il n'est pas forcément simple de déterminer si une mesure particulière est une « niche » ni de chiffrer son coût de manière adéquate. Je prendrai l'exemple emblématique de la « mesure particulière n° 320103 », relative à la non-imposition à l'impôt sur les sociétés (IS) des plus-values sur titres de participation, dite « niche Copé ». Du projet de loi de finances (PLF) pour 2004 au PLF pour 2010, son estimation a varié de 1,8 milliard à 12,5 milliards d'euros. En 2011, l'estimation pour 2010 a été revue à 2,2 milliards d'euros en prenant pour référence non le taux normal d'IS de 33,1/3 % mais le taux de 19 % applicable antérieurement à la réforme. En outre, le PLF pour 2009 a « déclassé » cette niche, devenue depuis lors une « modalité de calcul de l'impôt ». Enfin, j'observe que les différentes estimations ne prennent pas en compte les mécanismes économiques, même s'il est évident, en l'espèce, que les holdings concernés se délocaliseraient si la mesure n'existait pas - faisant ainsi s'évaporer l'assiette de l'impôt servant de base de calcul du coût de la mesure.

Une dernière précision avant d'en venir au fait : qu'un allégement soit classé parmi les « modalités de calcul de l'impôt » n'implique pas qu'il soit « intouchable ». Et, à l'inverse, le fait qu'un allégement soit classé parmi les dépenses fiscales n'implique pas qu'il soit condamné à être remis en cause. Il s'agit là, évidemment, de choix de nature politique.

Tout d'abord, j'ai procédé à quelques comparaisons internationales. Il en ressort que la définition des dépenses fiscales varie selon les Etats. Si l'on schématise, il y a trois définitions possibles des dépenses fiscales, pouvant viser :

- les seuls allégements à visée incitative (comme en Belgique ou en Allemagne) ;

- les allégements à visée incitative, mais aussi ceux à visée redistributrice (comme au Royaume-Uni et, en pratique, en France) ;

- ou tous les allégements (comme aux Etats-Unis, au Canada et en Australie).

Par rapport aux autres, le système français n'est pas sans mérite. Ainsi, s'agissant des allégements fiscaux, il couvre un champ plus large que dans la plupart des pays développés, les Etats-Unis ne chiffrant que les dépenses fiscales d'IS et d'impôt sur le revenu (IR), l'Allemagne n'estimant que les mesures correspondant à sa définition restrictive des dépenses fiscales. De plus, depuis 2007, conformément à l'article LO 111-4 du code de la sécurité sociale, les principales « niches sociales » font l'objet d'un chiffrage figurant dans l'annexe 5 des projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). J'ajoute que la France procède à une nomenclature fine des différentes mesures, à l'inverse des Britanniques, qui se contentent d'un tableau de quelques pages détaillé par grands agrégats.

Cependant, notre système comporte des points faibles.

S'agissant des niches fiscales, en premier lieu, le système de référence n'est pas publié en France - contrairement à la pratique des Etats-Unis, du Canada ou de l'Australie par exemple. On ne sait donc pas par rapport à quoi les allégements sont chiffrés. De ce fait, certains chiffres sont dénués de signification. Ainsi, les dispositions de « taux super-réduit » de 2,1 % de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sont chiffrées par rapport au taux réduit de 5,5 % et non au taux normal de 19,6 % (ce que n'indique d'ailleurs pas le fascicule des « Voies et moyens » annexé au PLF). Or la référence devrait être le taux normal, sauf à vider cette notion de son sens...

En deuxième lieu, les dépenses fiscales font l'objet d'une définition vague et évolutive, au gré des décisions des gouvernements - ou de leur administration. Initialement, de 1981 à 1997, les dépenses fiscales étaient définies en fonction de quatre critères non cumulatifs : l'ancienneté (un allégement ancien pouvant ne pas être considéré comme une dépense fiscale), la généralité (une règle générale n'étant pas une dépense fiscale), la doctrine et le caractère incitatif (qui était une « présomption » de dépense fiscale). Puis, de 1998 à 2008 seuls demeuraient les critères de généralité et d'ancienneté. Enfin, depuis 2009, à la suite d'un rapport d'information de la commission des finances de l'Assemblée nationale, seul reste le critère de généralité. Mais ces critères, et notamment celui de « généralité », ne sont eux-mêmes pas clairement définis. Ainsi, les « grands déclassements » de 2006, qui ont vu la moitié du montant total des allégements « reclassés » en « modalités de calcul de l'impôt, se sont faits simplement en modifiant l'interprétation des critères alors en vigueur (ancienneté et généralité), et en 2009, le passage au seul critère de généralité n'a eu aucune conséquence significative.

En troisième lieu, certains déclassements de niches fiscales peuvent être contestés. Par exemple, à propos du quotient familial, la demi-part supplémentaire à compter du troisième enfant était considérée comme une dépense fiscale jusqu'à son déclassement en modalité de calcul de l'impôt en 2006. Mais, si les critiques sont intéressantes, elles ne sont guère plus objectives que la classification elle-même si l'on ne construit pas un cadre général suffisamment objectif...

En quatrième lieu, les documents actuels sous-estiment de manière importante les niches en matière de TVA. Comme je l'ai indiqué, le coût des taux super-réduits est calculé par référence au taux réduit, et non au taux normal. J'ajoute que tous les taux réduits ne sont pas considérés comme des niches, en particulier le taux réduit sur les produits alimentaires. On arrive, au total, à une sous-estimation de 26,7 milliards d'euros.

S'agissant de l'équivalent social des niches fiscales, le système français présente également des points faibles.

Cette situation tient d'abord à une définition peu satisfaisante de ces mesures dérogatoires. Celle-ci se limite aux régimes obligatoires de base, et ne prend donc en compte ni l'assurance-chômage ni les régimes complémentaires de retraite. Et elle permet au Gouvernement comme à la Cour des comptes de déterminer chacun son propre système de référence, et donc sa propre définition des niches. De manière générale, on note une absence d'harmonisation avec la méthodologie utilisée pour les dépenses fiscales.

Un autre point faible réside dans la forte sous-estimation du montant de ces allégements. Ainsi, alors que, selon le Gouvernement, ce coût s'élève à 41 milliards d'euros, il est de 67 milliards d'euros aux yeux de la Cour des comptes et j'estime même, pour ma part, qu'il s'établit à 80 milliards d'euros. En effet, le Gouvernement ne considère pas que les allégements sur des revenus autres que ceux du travail salarié (moindre imposition des prestations sociales, moindres cotisations des employeurs publics...) constituent des niches. Et, dans le cas des cotisations sociales, il calcule le coût des allégements en appliquant au montant de l'assiette exonérée un taux plus faible que le taux des cotisations sociales en dessous du plafond, qui est pourtant celui qu'il faudrait retenir pour être proche du taux moyen effectivement constaté (il retient le taux de cotisation au dessus du plafond). Par rapport à la Cour des comptes, je prends en compte l'ensemble des administrations de sécurité sociale au sens de Maastricht, ce qui a pour conséquence d'inclure, en particulier, l'assurance chômage et les régimes complémentaires de retraite.

A partir de ces constats, comment repartir sur des bases, sinon consensuelles, du moins plus incontestables ?

Tout d'abord, à court terme, il convient de préciser la norme de référence. A cet égard, le Gouvernement m'a répondu qu'il est « tout à fait envisageable qu'à l'occasion du prochain PLF, [il] présente pour chaque impôt une définition de la norme de référence, la liste des dépenses fiscales estimées au regard de cette norme commune et, le cas échéant, celles dont le chiffrage y déroge pour des raisons particulières ».

Ensuite, j'insiste sur la nécessité de considérer l'ensemble des taux réduits de TVA comme des dépenses fiscales.

Il faut également prendre en compte la totalité du coût de l'équivalent social des niches fiscales ainsi que les niches relatives à la fiscalité transférée.

Par ailleurs, il faut savoir se poser à temps les bonnes questions et se demander, par exemple, si une future « barémisation » des exonérations de cotisations sur les bas salaires - d'un montant de quelque 30 milliards d'euros - n'entraînerait pas la disparition du chiffrage de cet allégement, dès lors qu'elle reviendrait à fixer un nouveau cadre de référence.

Une fois tout cela fait, il faudra réfléchir à d'autre mesures afin d'éviter, autant que possible, les polémiques et les contestations et afin d'informer le Parlement à partir de bases légitimes, reconnues par tous.

Dans cette optique, la première étape consiste à définir le système de référence comme celui correspondant à une assiette aussi large que possible et au taux ou au barème de droit commun. Il s'agit concrètement, pour chaque impôt ou chaque grande catégorie d'impôts, de définir explicitement ce qu'on considère comme « l'impôt sans les allégements », à l'instar des Etats-Unis, du Canada, de l'Australie ou de la Belgique. La deuxième étape consiste à affirmer le principe selon lequel tout allègement par rapport au système de référence doit figurer au sein du fascicule « Voies et moyens » annexé au PLF - alors qu'aujourd'hui, seuls sont recensés les dispositifs considérés comme des niches par le Gouvernement et les « niches déclassées » depuis 2006. Ensuite, il faut déterminer si un allégement donné est ou non une dépense fiscale. Pour ma part, je propose de définir la dépense fiscale comme tout allégement qui « poursuit un objectif incitatif ou de redistribution en faveur des ménages à faibles revenus ou concerne des domaines d'activité ou produits spécifiques ». Dès lors, les allègements d'impôt qui ne seraient pas des niches relèveraient donc soit des modalités de calcul de l'impôt, soit d'une nouvelle catégorie « mixte » dans laquelle seraient classés les cas douteux. Ce système, pratiqué par le Royaume-Uni et la Belgique, permettrait d'éviter les polémiques. Il devrait, en effet, « y avoir accord sur le fait que l'on n'est pas d'accord ». Pour cette catégorie, je pense, par exemple, à la demi-part supplémentaire au titre du troisième enfant ou à l'abattement de 40 % sur les dividendes...

Cette méthode de recensement exhaustif des allègements d'impôt par rapport au système de référence permettrait de réintégrer dans les documents budgétaires - et donc dans le « radar » du contrôle parlementaire - environ 72 milliards d'euros d'allègements fiscaux aujourd'hui non pris en compte dans le calcul des niches ou des modalités de calcul de l'impôt.

Au passage, pour enlever toute connotation péjorative de nature à nuire à la sérénité des débats tout en gardant l'image paradoxale des niches ou dépenses sur recettes, je vous propose d'adapter la terminologie que nous employons pour parler désormais de « dépenses de prélèvements obligatoires », qui se diviseraient en deux catégories : les « dépenses fiscales » et les « dépenses de prélèvements sociaux ».

La méthode serait la même pour traiter des allégements sociaux. On aboutirait ainsi à la création :

- d'une catégorie « modalités de calcul des prélèvements sociaux », regroupant les allégements qui n'ont manifestement ni un objet incitatif, ni un objet de redistribution en faveur des ménages à faibles revenus, et qui ne concernent pas des domaines d'activité ou produits spécifiques. Cela concerne par exemple les moindres cotisations des employeurs publics, les exonérations de la plupart des prestations sociales (retraites...), ou encore le plafonnement des cotisations sociales ;

- et d'une catégorie intermédiaire « d'allégements mixtes », ne comprenant a priori que peu de choses, mais où pourraient trouver place les prestations familiales, dont le caractère incitatif ou de redistribution en faveur des ménages à faibles revenus ne va pas de soi.

Enfin, si l'actuelle approche comptable du coût des allégements est indispensable, afin que chacun ait bien en tête les coûts bruts des mesures en vigueur ou proposées, il faudrait la croiser avec des approches prenant en compte le comportement prévisible des acteurs.

En conclusion, le système français actuel a le mérite d'exister. Cependant, il faut le clarifier, l'harmoniser, et le rendre exhaustif. Il convient également de corriger des anomalies manifestes dans le cas de certains allégements. Et, pour les principaux allégements, il serait bon d'introduire des chiffrages complémentaires « par rapport au prochain allégement le plus favorable » ou, si c'est possible, prenant en compte les modifications de comportement.

Nous pourrions ainsi éviter des chiffrages concurrents du Gouvernement et du Parlement - ou encore de la Cour des comptes, etc.

Reste à savoir si nous devrions laisser au Gouvernement le soin de mettre en oeuvre les propositions qu'il juge pertinentes, ou adopter une disposition législative, s'agissant de ce que le projet de loi constitutionnelle relatif à l'équilibre des finances publiques, en cours d'examen par le Parlement, qualifie de « règle de gestion des finances publiques »... Dans cette dernière hypothèse, j'ai préparé un projet de texte qui figurera dans le rapport écrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Voilà qui devrait nous aider à avancer dans la définition et l'élaboration de procédures et de méthodes destinées à cadrer objectivement nos débats. Nous ne pouvons que suivre votre conclusion, à savoir la définition d'une « règle de gestion des finances publiques ». Si la révision constitutionnelle que nous examinons a un sens, c'est parce qu'elle vise à créer des procédures et celles-ci doivent permettre aux parlementaires de mieux appréhender les problématiques budgétaires et de décider en toute connaissance de cause.

Nous avons besoin d'une convergence de nos méthodes au vu de l'urgence du rééquilibrage de nos finances publiques. Les méthodes et les procédures répondent à une exigence d'amélioration de la gouvernance publique. Cette tâche incombe aussi au Parlement.

Nous aurions pu également parler des coûts cachés de certaines dépenses de prélèvements obligatoires, comme par exemple celles induites par des négociations européennes...

J'ajoute que nous sommes victimes de la séparation entre le PLF et le PLFSS : il sera un jour souhaitable que l'on présente au Parlement un article d'équilibre unique reprenant l'ensemble des prélèvements obligatoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je tiens à remercier le rapporteur général pour son travail qui - il l'a d'ailleurs rappelé - est issu d'une demande du groupe socialiste lors de l'examen de la dernière loi de finances. Ce rapport va venir utilement compléter celui que devrait rendre l'Inspection générale des finances sur l'évaluation des niches fiscales. Nous pourrons alors vérifier et comparer la pertinence des critères proposés par le rapporteur général.

Vous avez souligné que la critique des niches fiscales est bien souvent subjective mais c'est surtout parce que le critère de généralité, à l'aune duquel on apprécie les niches fiscales, est lui-même subjectif. Vous faites également remarquer qu'il ne faut pas s'arrêter à une classification administrative des niches. Certes, mais lorsque nous débattons d'une niche fiscale en séance publique, le ministre nous renvoie précisément à cette classification. Ce fut le cas, par exemple, lors du débat sur la demi-part des femmes seules. M. Woerth avait alors justifié sa suppression au nom de l'équité car, selon la classification, il s'agit bien d'une niche.

Le tableau comparatif des classifications retenues par différents pays est intéressant. Je m'interroge seulement sur la manière dont les Etats-Unis et le Canada présentent leurs dépenses fiscales. Les répartissent-ils entre plusieurs catégories ?

Si nous raisonnons à partir de ces critères de classification, qu'en est-il de l'exonération, tant fiscale que sociale, des heures supplémentaires votée dans la loi TEPA ? A partir de la grille proposée, comment la classerait-on ?

A ce propos, vous avez parlé de consensus et justement souligné que le consensus ne se décrète pas, il se construit... encore que je lui préfère le compromis. Il faut voir comment, à partir de la grille que vous nous proposez, nous pouvons aboutir à ce consensus, y compris par voie législative. Néanmoins, j'écarte totalement l'idée qu'il puisse en résulter un choix à la carte pour le Gouvernement. Un travail doit être mené comme cela avait été fait au moment de la LOLF, c'est-à-dire un vrai travail parlementaire conduit par les deux assemblées.

Votre proposez un dispositif en vue d'un meilleur rendement des prélèvements obligatoires. Je suis d'accord dans la mesure où il faut protéger nos recettes, ce qui devient un impératif. En revanche, je suis un peu plus sceptique sur votre proposition de raisonner « à droit constant ». Nous savons que le débat fiscal sera un des débats cardinaux des futures élections. Il me semble donc difficile de raisonner à partir du système tel qu'il est alors même que nous voulons le changer.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Quand je vois le remarquable et très éclairant travail du rapporteur général, je me demande pourquoi il n'a pas été fait plus tôt.

Nous voyons qu'il y a une matière à creuser si nous voulons rééquilibrer nos finances publiques, même si nous retenons le chiffrage le plus faible des niches fiscales et sociales !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Il est important que nous essayions de trouver un cadre commun pour discuter des réformes futures. Je crois qu'il faut évidemment associer dépenses fiscales et niches sociales qui sont, plutôt que des « dépenses de prélèvements obligatoires », des « atténuations de prélèvements », comme le révèle la disposition relative à l'exonération des heures supplémentaires.

Néanmoins, certains exemples montrent que l'exercice peut rapidement atteindre ses limites. Ainsi, lorsque l'on substitue un taux libératoire à un taux progressif, comme pour l'imposition des plus-values à l'impôt sur le revenu, s'agit-il d'une atténuation ou d'une modalité de calcul de l'impôt ? De même, notre système de financement de la sécurité sociale repose sur le plafonnement des cotisations sociales. Ces plafonds sont-ils une niche ou un mécanisme de taxation propre au système ?

Ma dernière interrogation sera de nature plus ontologique : si l'on ajoute vos chiffrages des « allégements fiscaux », soit plus de 220 milliards d'euros, et sociales, soit environ 92 milliards d'euros, le total atteint plus de 300 milliards d'euros, soit 15 points de PIB. Si nous appliquions, sans aucune atténuation, le régime fiscal et social qui existe en France, notre taux de prélèvements obligatoires atteindrait près de 58 % du PIB !

A partir de là, sommes-nous capables de revenir à un taux d'environ 40 %, c'est-à-dire la moyenne de l'Union européenne ? Quelles sont les incitations les plus efficaces économiquement et les plus justes socialement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Ce sujet est un véritable maquis. J'ai du mal à croire que la France ait pu rester aussi longtemps dans une situation inextricable, qui relève plutôt d'un pays en voie d'organisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

En même temps, nous découvrons un gisement de productivité considérable pour l'équilibre de nos finances publiques. Dans un deuxième temps, il faudrait analyser les conséquences d'une vaste suppression des niches ou d'une réorganisation en profondeur de nos recettes publiques. Quelles seraient les répercussions macro-économiques et sociales de l'exploitation de ce gisement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Ce type de proposition doit-il émaner du Gouvernement ou du Parlement ? Doit-on, suivant l'exemple américain, avoir une concurrence entre les deux pouvoirs ? En tout état de cause, je pense que ce serait plutôt le rôle du Gouvernement de faire une étude de ce genre et de la proposer au Parlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Je ne suis pas tout à fait d'accord. Si nous en avons les moyens humains et financiers, il serait hautement utile que le Parlement prenne l'ascendant ou, à tout le moins, qu'il se dote des capacités d'un dialogue solide avec le Gouvernement et avec l'administration du ministère des finances.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

C'est l'heure de la révision générale de nos pratiques parlementaires !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le Parlement n'est-il pas complice de certains dysfonctionnements de l'Etat ? Il est de notre responsabilité de revoir nos pratiques parlementaires. Il faudra beaucoup de pédagogie pour faire avancer les réformes nécessaires et il faudra donc que l'on mette un terme à ces débats illusionnistes lorsqu'il s'agit de finances publiques. Pour ce faire, seule la méthode nous le permettra. Et la méthode doit être aussi consensuelle que possible. Il est de notre responsabilité de dire au Gouvernement ce que nous voulons ; de poser nos impératifs méthodologiques. Nous devons par conséquent engager le dialogue avec nos collègues députés, c'est ainsi que s'est élaborée la loi organique relative aux lois de finances.

La dépense fiscale est la complexité fiscale, c'est-à-dire l'inégalité devant l'impôt. Au surplus, elle fausse la formation des prix et la perception des consommateurs sur le juste prix qu'ils acquittent pour l'achat d'un bien. Nous devons arracher la mauvaise herbe fiscale. En supprimant les niches fiscales, nous pourrons réduire les barèmes. Il faut vraiment mettre un terme à cette pagaille qui rend totalement incompréhensible les débats budgétaires et fiscaux.

Est-ce que votre analyse comprend les dépenses fiscales locales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Je suis heureux de toutes ces réactions qui prouvent que, bien qu'austère, le sujet porte des enjeux importants pour nos finances publiques.

Nous sommes en réalité au coeur des responsabilités du pouvoir législatif, en rappelant que sous la Ve République, le pouvoir législatif est partagé entre le Gouvernement et le Parlement. Or ce pouvoir a besoin d'être mis en mouvement : il faut qu'il y ait une initiative. Et je souscris sur ce point à la vision de Pierre Bernard-Reymond, nous pouvons avoir un rôle important pour lancer l'initiative.

Le travail de l'Inspection générale des finances sera très fouillé mais sans se permettre, car ce n'est pas dans son périmètre, de redessiner l'édifice. Il va nourrir de manière très précise chaque case d'un système de coordonnées de plus en plus complexe mais sans en repenser les bases. Ce travail de réflexion est au coeur des responsabilités du Parlement, qui est apte à le faire.

Il serait utile que nous imaginions un texte pour une proposition de loi et que nous le fassions circuler. Nous pourrons voir s'il est possible de cheminer à partir de ce projet. Le texte - que j'ai qualifié par avance de martyr - qui se trouve dans mon rapport écrit pourrait être ainsi diffusé aux membres de la commission.

Mme Bricq, les Etats-Unis et le Canada considèrent tous les allégements comme des dépenses fiscales.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Dans le même ordre d'idée, et pour rebondir sur les propos de Jean-Pierre Fourcade, la Suède affiche le taux de prélèvements obligatoires le plus élevé en Europe. Il serait intéressant de savoir ce que recouvre ce taux. Existe-t-il beaucoup de niches ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Ce sont des modèles différents. Chaque Etat est en droit et a le devoir d'opérer la meilleure combinaison possible.

Les allègements sur les heures supplémentaires sont bien des dépenses de prélèvements sociaux, prises en compte en tant que telles.

Je reviens d'ailleurs à cette expression de « dépenses de prélèvements obligatoires » qui peut être contestée. Je tiens à ce qu'apparaisse le mot « dépense » parce que cela me semble pédagogique vis-à-vis de l'opinion publique. L'expression est paradoxale et contre-intuitive : elle doit donc être expliquée.

Sur la question du droit constant, évoquée par Mme Bricq, je voudrais simplement dire qu'il ne s'agit que de la base de référence. Celle-ci est effectivement amenée à évoluer chaque année en fonction des votes effectués durant la loi de finances. Nous avons besoin de reconnaître une base de données commune.

Je comprends l'interrogation de Marie-Hélène Des Esgaulx : nous sommes collectivement coupables ! Il faut aussi avouer que le débat a mûri au fil des années et nous sommes probablement plus audibles aujourd'hui compte tenu de la situation des finances publiques.

Jean-Pierre Fourcade a cité quelques exemples dont il me semble qu'ils pourraient relever de la catégorie « mesures mixtes » que j'ai définie précédemment. Justement, si nous voulons une base commune, il sera difficile d'opérer une répartition exhaustive et exempte de reproches.

L'enjeu économique est effectivement considérable. Rien que le fait de constater que les niches fiscales et sociales représentent quinze points de prélèvements obligatoires contribue à accréditer l'idée que le système fiscal doit être considéré comme un tout. Nous avons un problème de stratégie et pas seulement de modifications à la marge de tel ou tel élément. C'est aussi un sujet de compétitivité et d'attractivité pour un pays. Bien sûr, personne ne veut soumettre les contribuables à la soupe amère de ces quinze points supplémentaires du jour au lendemain. C'est une impossibilité économique, physique, sociale, politique et de toute nature !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Sommes-nous en voie d'organisation sur ce sujet comme l'évoquait précédemment Pierre Bernard-Reymond ? Mutatis mutandis, nous constatons que nos principaux partenaires ne sont guère plus avancés. Personne dans l'échantillon étudié n'est parvenu à une approche incontestable, neutre, pédagogique et suffisamment large telle que nous pouvons la souhaiter.

Yann Gaillard a posé la question d'évaluations compétitives. Dans le modèle américain, il est normal que le Congrès, très strictement séparé du pouvoir exécutif, réalise des évaluations concurrentes de celles de l'administration. Il y a compétition entre les pouvoirs et le Parlement s'appuie sur ses propres données car il entretient un rapport de force avec le Président. Notre système constitutionnel ne se prête pas à une telle démarche. D'ailleurs, nous n'en avons pas les moyens. Voilà pourquoi je préconise un support législatif qui serait le cadre à une méthode.

S'agissant des dépenses fiscales locales, elles sont comprises dans le périmètre lorsqu'elles sont compensées par le budget de l'Etat. Pour le reste, il n'existe pas d'évaluation, ni de centralisation des données. En la matière, nous devrions d'ailleurs suivre les préconisations du Conseil des prélèvements obligatoires, qui propose de combler cette lacune. Nous pourrions ainsi diffuser le résultat de ce travail aux collectivités territoriales afin qu'elles aient mieux conscience de l'étendue de la dépense fiscale locale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Peut-être faudrait-il prévoir une réunion informelle avec nos collègues de l'Assemblée nationale pour mettre en débat vos propositions et prendre le temps d'aller vers le consensus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Il faut prendre date et lancer rapidement cette réflexion.

A l'issue de ce débat, la commission donne acte de sa communication à M. Philippe Marini, rapporteur général, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information.

Adrien Gouteyron est ensuite nommé rapporteur des projets de loi :

n° 511 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Costa Rica relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

n° 512 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Libéria relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

n° 513 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de Sa majesté le Sultan et Yang Di-Pertuan de Brunei Darussalam relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

n° 514 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Belize relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

n° 515 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Commonwealth de la Dominique relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale ;

n° 516 (2010-2011) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement d'Anguilla relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale.

Enfin, la commission désigne M. Jean-Jacques Jégou comme candidat proposé à la nomination du Sénat pour siéger au sein du comité de surveillance de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades).