Au cours d'une première réunion tenue le matin, la commission procède tout d'abord à la nomination de ses rapporteurs spéciaux conformément à la liste établie par son Bureau :
Roland du LUART Administration générale et territoriale de l'Etat Michèle ANDRÉ Agriculture, pêche, alimentation, forêt et affaires rurales
· Compte spécial : Développement agricole et rural Yannick BOTREL
Joël BOURDIN Aide publique au développement
· Compte spécial : Prêts à des États étrangers
· Compte spécial : Engagements en faveur de la forêt dans le cadre de la lutte contre le changement climatique Yvon COLLIN
Fabienne KELLER Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation Philippe MARINI Conseil et contrôle de l'Etat Charles GUENÉ Culture Yann GAILLARD Défense
· Compte spécial : Gestion et valorisation des ressources tirées de l'utilisation du spectre hertzien Yves KRATTINGER
François TRUCY Direction de l'action du Gouvernement
· Budget annexe : Publications officielles et information administrative Philippe DOMINATI Ecologie, développement et aménagement durables Gérard MIQUEL François FORTASSIN Marie-Hélène des ESGAULX Vincent DELAHAYE · Budget annexe : Contrôle et exploitation aériens François FORTASSIN · Compte spécial : Avances au fonds d'aide à l'acquisition de véhicules propres Gérard MIQUEL · Compte spécial : Contrôle de la circulation et du stationnement routiers Vincent DELAHAYE · Compte spécial : Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs Marie-Hélène des ESGAULX Economie
· Compte spécial : Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés Christian BOURQUIN
André FERRAND Engagements financiers de l'Etat
· Compte spécial : Accords monétaires internationaux
· Compte spécial : Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics
· Compte spécial : Participations financières de l'Etat Jean-Claude FRÉCON Enseignement scolaire Thierry FOUCAUD
Claude HAUT Gestion des finances publiques et des ressources humaines et Provisions
· Compte spécial : Gestion du patrimoine immobilier de l'Etat Albéric de MONTGOLFIER
Philippe DALLIER Immigration, asile et intégration Roger KAROUTCHI Justice Edmond HERVÉ Médias, livre et industries culturelles
· Compte spécial : Avances à l'audiovisuel public Claude BELOT Outre-mer Georges PATIENT Eric DOLIGÉ Politique des territoires Frédérique ESPAGNAC Pouvoirs publics Jean-Paul ÉMORINE Recherche et enseignement supérieur Michel BERSON
Philippe ADNOT Régimes sociaux et de retraite
· Compte spécial : Pensions Francis DELATTRE Relations avec les collectivités territoriales
· Compte spécial : Avances aux collectivités territoriales François MARC
Pierre JARLIER Remboursements et dégrèvements Marie-France BEAUFILS Santé Jean-Pierre CAFFET Sécurité Jean-Vincent PLACÉ Sécurité civile Dominique de LEGGE Solidarité, insertion et égalité des chances Eric BOCQUET Sport, jeunesse et vie associative Jean-Marc TODESCHINI Travail et emploi
Programmes 102 « Accès et retour à l'emploi » et 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi »
· Compte spécial : Financement national du développement et de la modernisation de l'apprentissage François PATRIAT Travail et emploi
Programmes 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail » et 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » Serge DASSAULT Ville et logement Jean GERMAIN Affaires européennes (article de 1ère partie) Marc MASSION
Je voudrais préciser que les deux programmes qui m'ont été attribués ne représentent qu'une petite partie de la mission « Travail et emploi ». Ils ne traitent ni de l'apprentissage, ni de Pôle Emploi et ni du financement de la politique de l'emploi qui représente près de 10 milliards d'euros, sujets sur lesquels je souhaite continuer à m'exprimer.
J'observe que le programme 155 qui vous est attribué est intitulé « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail ». Il présente un champ suffisamment large pour que vous puissiez vous exprimer, avec la liberté qui est la vôtre, sur ces sujets qui vous tiennent à coeur. J'ajoute que la formule des binômes de rapporteurs, que l'on peut souhaiter voir se développer, permet de nourrir un dialogue dans lequel chacun sera libre de son approche et de ses propositions. Après tout, ceux qui partent avec le sentiment d'être en profond désaccord constateront peut-être que ces désaccords sont moins profonds qu'ils ne l'imaginent. Ne préjugeons donc pas de l'avenir.
La commission procède ensuite à l'examen du rapport de M. Jean-Marc Todeschini, rapporteur spécial, sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
C'est la première fois que j'ai à vous présenter le rapport sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative » au nom de notre commission, cette charge étant auparavant dévolue à notre ancien collègue Michel Sergent.
Cette mission fait partie des plus petites du budget général. C'est encore plus vrai depuis l'année dernière : en effet, le programme de « soutien » de la mission, qui portait notamment l'ensemble des effectifs, a été fusionné au sein du programme 124, figurant dans la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances », pour y prendre l'appellation « Conduite et soutien des politiques sanitaires, sociales, du sport, de la jeunesse et de la vie associative ».
En conséquence, cette mission ne compte désormais plus que deux programmes, intitulés « Sport » et « Jeunesse et vie associative ». Ses crédits de paiement (CP) n'atteignent que 477,9 millions d'euros et elle ne rémunère plus directement aucun emploi. La marge d'arbitrage du Parlement sur ces crédits est donc réduite à la portion congrue.
Dans l'ensemble, à périmètre constant, les crédits de la mission sont en augmentation de 1 %. Comme ces dernières années, cette évolution résulte de deux mouvements opposés : d'une part, une diminution notable, de 5,6 %, de la dotation du programme « Sport » et, d'autre part, une hausse importante, de 7,7 %, des crédits du programme « Jeunesse et vie associative ».
Tout d'abord, s'agissant du programme « Sport », les moyens sont donc en baisse. Encore faut-il préciser que les 247,9 millions d'euros de CP demandés ne représentent guère que 30 % des fonds dévolus à la politique sportive de l'Etat.
Il faudrait, en effet, ajouter à la fois les crédits du programme support qui sont affectés à cette politique - soit 309,8 millions d'euros de crédits et 2 620 emplois en équivalents temps plein travaillés (ETPT) sous plafond - et les 276,6 millions d'euros de ressources affectées à l'établissement public « Centre national pour le développement du sport » (CNDS).
Hormis le constat de cette débudgétisation, mes principales observations sont les suivantes.
En premier lieu, il est indispensable de disposer d'une évaluation claire de l'action et de la gestion du CNDS. Comme nous l'avons vu, il dispose de davantage de crédits que le ministre des sports. De plus, l'article R. 411-2 du code du sport lui donne de vastes missions. Quant à sa gouvernance, elle est « collégiale », réunissant représentants du Gouvernement, représentants du « monde sportif », personnalités qualifiées et représentants des collectivités territoriales. Au vu des enjeux, il me semble que nous devons nous assurer que tout cela fonctionne bien et que l'action du CNDS s'articule de manière efficace avec celle du Gouvernement. C'est pourquoi j'estime qu'il serait utile de demander à la Cour des comptes de faire une enquête sur ce sujet, conformément aux dispositions de l'article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
Ensuite, pour ce qui concerne le budget stricto sensu, on observe un fort déséquilibre. Ainsi, les crédits de l'action 2 « Développement du sport de haut niveau », qui pesaient déjà 68 % des CP du programme en 2011, en représenteront 75,4 % en 2012. Dans le même temps, les crédits dévolus à l'action 1 « Promotion du sport pour le plus grand nombre », en baisse en valeur absolue, passeront de 8,3 % à peine 3,3 % des mêmes CP. D'après les documents budgétaires, l'augmentation du fonds de concours du CNDS devrait en partie compenser la diminution des crédits de l'action 1. Il serait néanmoins précieux d'entendre les explications du Gouvernement sur ce sujet : la politique du développement du sport de masse, qui comporte des enjeux en termes d'éducation et de santé publique, est-elle sacrifiée ou bien doit-elle être, à terme, entièrement sous-traitée au CNDS ?
S'agissant du problème du Stade de France, je vous rappelle qu'aux termes du contrat de concession conclu dans l'urgence en avril 1995, l'Etat doit verser chaque année une pénalité au concessionnaire en raison de l'absence d'un club de football résident. Cette pénalité, de 16 millions d'euros par an en valeur 2012, est réduite par une redevance due à l'Etat en cas de bénéfice supérieur à celui figurant dans la simulation de référence du contrat. Pour 2012, la pénalité nette de l'Etat apparaît en forte augmentation et devrait passer à 12 millions d'euros - contre 8,2 millions d'euros en réalisation probable 2011. Cette évolution s'explique, en partie, par le contexte économique, mais aussi, ce qui est plus inquiétant, par des raisons structurelles. Ainsi, l'annuité traduit surtout les effets du nouveau partage de ressources financières entre la Fédération française de football (FFF) et le consortium gérant le Stade de France, bien plus favorable à la FFF que le contrat antérieur. D'autre part, la Fédération française de rugby (FFR) est désormais très engagée sur le projet devant aboutir, vers l'horizon 2016 ou 2017, à la construction de son propre « grand stade ». Au vu des conséquences financières qu'aurait pour l'Etat une sous-utilisation du Stade de France, il est nécessaire que le ministre précise en séance publique sa position sur le sujet, et dise les mesures qu'il envisage de prendre pour garantir les intérêts financiers de l'Etat.
J'en arrive au programme « Jeunesse et vie associative ».
Celui-ci regroupe 230 millions d'euros d'AE et de CP, soit 48,1 % des CP de la mission. Comme je l'ai indiqué, à périmètre constant, les crédits affichent une augmentation de 7,7 % par rapport à 2011. Rappelons que cette hausse fait suite à une progression de 10 % l'année dernière et de 60,5 % en 2010. A l'instar du programme « Sport », ce programme ne comporte aucun emploi rémunéré inclus dans le plafond d'emplois du ministère. Mais il faut noter que 121,9 millions d'euros de crédits et 1 081 ETPT sont inscrits, au titre du soutien au présent programme, au sein du programme 124 de la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Au-delà de ces dotations, pas moins de treize dépenses fiscales, dont le coût cumulé pour l'Etat est évalué à 1 776 millions d'euros, sont rattachées à ce programme. Il s'agit, pour l'essentiel, des différentes réductions d'impôts accordées au titre des dons aux « bonnes oeuvres ».
Comme pour le sport, on relève un grand déséquilibre des choix budgétaires avec, d'un côté, un service civique qui monte en puissance et capte entièrement (et même au-delà) la hausse des crédits et, de l'autre, une politique d'austérité.
Ainsi, 108 millions d'euros sont destinés à assurer le financement de la subvention pour charges de service public de l'Agence pour le service civique (ASC), devenue, en un an, le principal opérateur du programme. Pour avoir le « coût complet », il faut ajouter les 26 millions d'euros de remboursement à l'ACOSS de cotisations de retraite non-perçues pour les volontaires du service civique. Les chiffres fournis par le Gouvernement sur l'évolution du nombre des volontaires sont éloquents : après avoir atteint 5 195 volontaires en 2010, le service civique devrait concerner 15 000 volontaires en 2011 et 25 000 en 2012. Lors de la communication qu'elle a effectuée sur ce sujet en Conseil des ministres, le 23 mars 2011, Jeannette Bougrab, secrétaire d'Etat chargée de la jeunesse et de la vie associative, a qualifié le dispositif de « réel succès ». J'en prends acte tout en considérant qu'à terme, l'objectif est plus flou. Certes, l'ambition d'atteindre 10 % d'une classe d'âge dès 2014 a été réaffirmée par la secrétaire d'Etat mais la contrainte budgétaire va peser de plus en plus lourdement. En effet, selon la loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, les crédits de la mission doivent progresser, à périmètre constant, de 50 millions d'euros sur trois ans. Cela ne permet absolument pas de financer 75 000 volontaires du service civique. Il conviendrait donc que le Gouvernement précise dès à présent le format que devra présenter ce dispositif en « régime de croisière ».
Le Fonds d'expérimentations pour la jeunesse (FEJ), qui est l'autre grand « chantier » lancé par Martin Hirsch, lorsqu'il était haut commissaire à la jeunesse, ne semble pas aussi favorisé que le service civique. Il s'agissait, je vous le rappelle, de favoriser la réussite scolaire des élèves et d'améliorer l'insertion sociale et professionnelle des jeunes de moins de 25 ans par le financement d'expérimentations d'actions innovantes en faveur des jeunes. En cas de réussite, ces expérimentations pouvaient éventuellement être généralisées. Si aucune annonce n'a été faite, la trajectoire budgétaire du FEJ laisse à penser qu'il pourrait lui-même n'avoir été qu'une expérimentation. Certes, la diminution de ses crédits, de 25 millions à 6 millions d'euros, s'inscrit dans une trajectoire globale. Toutefois, cette évolution pose clairement la question de la pérennité de cette structure. Dans sa contribution à la dernière loi de règlement, Michel Sergent s'était interrogé à la fois sur le respect par l'Etat de son engagement à verser 150 millions d'euros à ce fonds et, plus encore, sur sa vocation à moyen terme. Je partage ces doutes et je souhaite que le Gouvernement s'exprime en séance publique sur sa vision de l'avenir de cet outil.
Enfin, comme ces deux dernières années, de nombreuses actions traditionnellement financées par le présent programme subissent de nouvelles coupes. Au mieux, les crédits sont maintenus en euros courants, ce qui correspond à une diminution de moyens. Parfois, ils sont en baisse en valeur absolue, comme, par exemple, pour les subventions aux associations agréées. Cet état de fait pourrait encore être aggravé par les 400 millions d'euros d'économies que l'Assemblée nationale est invitée à réaliser sur les crédits des missions du budget général.
A l'issue de cet examen, j'avoue être réticent face à ce budget déséquilibré, dans lequel le gonflement d'une ligne ne saurait masquer le choix de faire porter l'ensemble des efforts aux acteurs de terrain, qu'il s'agisse du financement du sport pour tous ou des associations de proximité. En l'état, du fait du peu de temps dont j'ai disposé pour procéder à cet examen, et dans l'attente des arbitrages que devra rendre l'Assemblée nationale, je recommande à la commission de réserver sa position sur l'adoption des crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Merci au rapporteur spécial pour sa présentation argumentée. Je pense aussi que nous pouvons rendre hommage à notre ancien collègue Michel Sergent, qui, en plus de sa convivialité, était très efficace dans sa mission de rapporteur spécial. Pour revenir au sujet, je vois que de nombreux commissaires ont des questions à poser...
Je partage les inquiétudes de Jean-Marc Todeschini concernant la pénalité due au Stade de France. Nous savons tous combien l'équilibre financier est difficile à atteindre pour les grandes infrastructures sportives. Dans ces conditions, l'Etat n'est-il pas fondé à mettre la FFR devant ses responsabilités sur son projet de grand stade ?
A propos du même sujet, je voudrais savoir quelles modalités de financement sont prévues pour ce stade de rugby. L'Etat doit-il participer financièrement à ce projet ?
Une problématique voisine concerne les « grandes salles » de sport, également appelées « Arenas ». Je crois que le monde sportif attend plusieurs dizaines de millions d'euros d'aides publiques à ce titre. Ce budget contient-il des financements de tels équipements ?
Ma question concerne le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (FONJEP), qui apporte une aide indispensable à l'emploi associatif. Le rapporteur spécial pourrait-il préciser comment évoluent les crédits dont il bénéficie dans ce budget 2012 ?
A propos du « grand stade » de rugby, je voudrais préciser, en tant qu'élu de Massy, site d'accueil possible de cette infrastructure, que la FFR n'envisage pas de solliciter une aide financière de l'Etat. Pour boucler son opération, elle compte essentiellement sur ses fonds propres et sur l'apport d'investisseurs privés qui l'accompagneraient dans cette démarche. Cela dit, la construction d'un nouveau stade affecterait bien le budget de l'Etat, ne serait-ce qu'au travers de la pénalité qu'il doit verser au consortium « Stade de France ». Celle-ci augmente d'ailleurs déjà hors « effet rugby ». Est-il possible d'évaluer le coût pour l'Etat d'un éventuel retrait du rugby du Stade de France ?
D'autre part, je voudrais exprimer mon inquiétude face au coût des mises aux normes des équipements sportifs, que l'on peut constater, par exemple, dans les stades devant accueillir l'Euro 2016 de football. Ces dépenses peuvent-elles constituer une priorité dans notre situation budgétaire actuelle ? J'estime, pour ma part, que les normes édictées par l'Union des associations européennes de football (UEFA) ne sont plus en rapport avec nos moyens...
Au sujet du CNDS, je voudrais simplement préciser que les ressources dont il bénéficie proviennent, dans leur grande majorité, de prélèvement sur les mises des jeux de la Française des jeux ou des paris sportifs en ligne. L'action du CNDS consiste ensuite à redistribuer ces fonds, en lien avec le ministère des sports.
Le rapporteur spécial a justement proposé de demander à la Cour des comptes une enquête sur le CNDS au titre de l'article 58-2° de la LOLF et, en anticipant un peu, je considère que c'est une demande opportune. Nous devons y voir plus clair sur la gestion des sommes qui transitent par cet établissement public.
La Guyane doit accueillir un institut de formation et d'accès au sport de haut niveau, afin de faire émerger et de préparer nos athlètes de demain. Est-il possible d'avoir des détails sur les crédits consacrés à ce chantier ?
J'en reviens au Stade de France, pour indiquer que si la pénalité de l'Etat augmente, c'est notamment parce que la région Ile-de-France lui verse moins d'argent ! Elle reçoit, en effet, des sollicitations très nombreuses afin de financer des spectacles de toute sorte devant se dérouler dans un Stade de France qui accueille moins d'événements sportifs qu'auparavant, mais je veille à ce qu'elle se montre parcimonieuse. La région n'a pas vocation à assurer l'équilibre financier du consortium.
Par ailleurs, je voudrais préciser à Vincent Delahaye que la FFR ne compte peut-être pas demander de subvention à l'Etat pour construire son propre stade, mais qu'elle en a, en tout cas, demandé une - conséquente - à la région. Je m'y suis opposé car je suis persuadé que, si l'on construit un autre stade de ce niveau en Ile-de-France, on multipliera les demandes de financement de manifestations en tout genre uniquement destinées à rentabiliser ces équipements. A mes yeux, un tel chantier ne correspond pas au besoin de la région parisienne en matière d'organisation d'événements sportifs.
Je voudrais prolonger le propos de Vincent Delahaye relatif aux fédérations sportives qui édictent une grande quantité de normes, par exemple sur l'encadrement des sportifs, la taille des vestiaires ou les locaux réservés aux arbitres... En pratique, ces fédérations sont des activatrices de dépenses publiques locales et je crois que nous devrions leur adresser un « message ».
Au sujet du Stade de France, je crois que la pénalité de l'Etat est plafonnée à 16 millions d'euros. En outre, je m'interroge car la FFF semble gagnante dans l'opération, au détriment des finances publiques. J'aimerais bien comprendre par quel mécanisme on aboutit à ce résultat.
L'origine de la pénalité due par l'Etat au consortium « Stade de France » est l'absence de club résident. Or, aux yeux des habitants de la région, le « vrai » stade de football de la région reste le Parc des princes. Certes, celui-ci doit être rénové, ce qui emmènera peut-être le Paris Saint-Germain à Saint-Denis pendant une saison. Mais, à moyen terme, seul le club de rugby du Stade français serait en mesure de remplir régulièrement le Stade de France... à ce détail près qu'il construit, lui aussi, son propre stade, à côté du Parc des princes ! Je crois donc qu'il faut que le monde du rugby, à commencer par la FFR, s'accorde avec le consortium.
Je vais aller dans le sens de la plupart des observations des commissaires en étant assez bref, certains intervenants ayant déjà répondu aux questions des autres.
Est-il raisonnable d'envisager la construction d'un autre grand stade en région parisienne ? C'est bien en ces termes que la question se pose et il faudra que le ministre nous réponde lors de la séance publique, d'autant que ce chantier devrait comporter une part de financement public, que celui-ci vienne de l'Etat, de la région ou d'autres collectivités.
Juste une remarque. Le coût de cet équipement serait de l'ordre de 600 millions d'euros. Mais il serait bien plus fonctionnel que le Stade de France, dont la conception n'est pas extraordinaire. En tout cas, c'est un vrai sujet et il serait utile que nous entendions les initiateurs du projet.
Au sujet du contrat de concession liant l'Etat au consortium, je rappelle qu'il a été signé, pour une durée de trente ans, entre les deux tours de l'élection présidentielle de 1995, à un moment où il fallait absolument lancer le chantier dans la perspective de la coupe du monde de football de 1998. L'Etat n'était donc pas en position de force.
Ensuite, les fédérations de football et de rugby ont-elles-mêmes conclu des conventions avec le consortium afin de disposer d'un cadre pour l'organisation de leurs matchs. La FFF vient de renégocier la sienne et d'obtenir un partage plus avantageux des bénéfices. Mais cela aboutit à minorer le résultat du consortium qui, lui-même, diminue le montant de la pénalité pour absence de club résident. C'est pourquoi cette pénalité versée par l'Etat doit augmenter en 2012. Cependant, comme l'a indiqué Yannick Botrel, elle est plafonnée et ne peut pas excéder 16 millions d'euros en valeur de 2012.
Au sujet des Arenas, aucune ligne budgétaire n'est prévue l'an prochain.
Sur les postes FONJEP, il est proposé de reconduire la ligne budgétaire de l'année dernière, soit 25 millions d'euros.
A propos du CNDS, je confirme ce qu'a dit François Trucy : ses financements proviennent, pour l'essentiel, de prélèvements sur les mises de la Française des jeux ou sur les paris sportifs. Il dispose également d'une fraction de la taxe sur les droits de diffusion des événements sportifs. Au vu des sommes en jeu, un éclairage de la Cour des comptes nous serait précieux.
Pour répondre à Georges Patient, je n'ai pas vu de ligne budgétaire spécifique sur le futur institut de formation et d'accès au sport de haut niveau guyanais, mais cette dépense relève sans doute des contrats de plan Etat-régions et transite peut-être par le CNDS. Le ministre devrait pouvoir vous le confirmer.
Enfin, je partage le sens de l'intervention du président Jean Arthuis sur les conséquences financières des normes édictées par les fédérations sportives.
Je voudrais simplement souligner que la France dispose déjà d'une base sportive nationale, à Font-Romeu. Or l'Etat tend à se décharger de ses responsabilités sur la région et à laisser cette remarquable infrastructure se dégrader. C'est pourquoi plusieurs fédérations choisissent d'entraîner leurs athlètes à l'étranger, alors même que nous disposons d'un tel site. Cela n'est pas acceptable et je le dirai.
Mes chers collègues, il est temps de conclure. Je pense que notre commission s'associe aux interrogations du rapporteur spécial ainsi qu'à sa demande d'enquête à la Cour des comptes sur le CNDS. Peut-être que, par ailleurs, s'il le souhaite, la question des grands stades pourrait faire l'objet d'un de ses contrôles ultérieurs.
Sur cette mission, qui implique plusieurs grands opérateurs, nous devrons veiller à ce qu'ils soient bien soumis aux mêmes normes de rigueur que l'Etat. Et nous devrons aussi nous montrer attentifs au résultat des dépenses fiscales, dont Jean-Marc Todeschini a justement souligné le poids.
Je prêterai une grande attention à l'ensemble des niches fiscales dans nos prochains débats sur le projet de loi de finances pour 2012.
A l'issue de ce débat, la commission décide de réserver sa position sur les crédits de la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
Puis la commission demande à se saisir pour avis du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, sous réserve de son examen par l'Assemblée nationale et de sa transmission, et nomme M. Jean-Pierre Caffet rapporteur pour avis sur ce texte.
Présidence de Mme Michèle André, vice-présidente -
La commission procède ensuite à l'audition de M. René Ricol, commissaire général à l'investissement, et de M. Jean-Luc Tavernier, commissaire général adjoint sur la mise en oeuvre du programme des investissements d'avenir.
Il y a maintenant plus d'un an et demi, nous donnions notre aval à une opération d'investissement exceptionnel de 35 milliards d'euros sur les investissements porteurs d'avenir.
Si la commission des finances avait alors approuvé cette réhabilitation de la notion d'investissement public, elle n'en avait pas moins regretté la voie choisie, avec la mise en place d'un financement public parallèle à celui du budget de l'Etat.
Elle a toujours néanmoins été attentive au suivi de l'utilisation de ces fonds. Ce suivi se concrétise notamment, comme aujourd'hui, par l'audition des personnes en charge de ce dossier : M. René Ricol, commissaire général à l'investissement et M. Jean-Luc Tavernier, commissaire général adjoint.
Cette audition devrait permettre de faire utilement le point sur l'avancement du programme d'investissements d'avenir, ainsi que sur les deux projets d'avenants à des conventions qui m'ont été récemment adressées par lettre et que j'ai transmis immédiatement à l'ensemble des commissaires. Ces deux projets d'avenant concernent, d'une part, la mise en place d'un nouvel appel à projets pour les « formations innovantes » et, d'autre part, la création d'un pôle de recherche hospitalo-universitaire en cancérologie.
Nous vous avons, en effet, transmis deux projets d'avenant et un troisième devrait vous parvenir prochainement sur la sûreté nucléaire, car nous avons établi trois constats :
- le jury international devant sélectionner les instituts hospitalo-universitaires (IHU) n'a pas retenu de projet sur la thématique du cancer ce qui nous est apparu impensable. C'est pourquoi, un nouvel appel à projet sera lancé qui sera faiblement doté par redéploiement de crédits à hauteur de 20 millions d'euros ;
- s'agissant de la sélection des initiatives d'excellence et des laboratoires d'excellence, l'accent a été, dans certains cas, insuffisamment mis sur le volet « formation ». C'est pourquoi, nous proposons de lancer un nouvel appel à projet spécifique sur les formations innovantes. C'était une demande de la conférence des présidents d'université (CPU) et de madame Valérie Pécresse, alors ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche. La procédure sera sélective. Il s'agit de ne retenir qu'une vingtaine de projets sous le contrôle d'un jury international. Il y a, par exemple, beaucoup de progrès à faire en matière de médecine afin d'éviter les échecs des étudiants en deuxième année ;
- il nous est, enfin, apparu indispensable, après la catastrophe nucléaire de Fukushima, de consacrer, par redéploiement, des fonds à la sûreté nucléaire. C'est un souci de sécurité publique, mais cela permet également de préserver notre filière industrielle.
En ce qui concerne l'état d'avancement du programme des investissements d'avenir, il convient de noter que nous respectons le rythme fixé en termes d'engagements, soit environ 15 milliards d'euros en cumulé à la fin d'année. Ce rythme peut paraître lent, mais il ne s'agit pas de « jeter l'argent par les fenêtres ».
En revanche, la phase de décaissement est un peu plus lente qu'annoncée, ce qui résulte notamment de la difficulté à contractualiser avec les lauréats. Cette phase peut prendre du temps et, parfois, trop de temps. Certains points de blocage ont pu être identifiés. Nous rencontrons l'ensemble des opérateurs à ce sujet, la semaine prochaine.
Je répète ensuite que les décisions du programme des investissements d'avenir ne reposent pas sur des critères d'aménagement du territoire ni de politique industrielle, mais d'identification de l'excellence des projets. Ce n'est que, dans un second temps, que ces éléments peuvent être éventuellement pris en considération. Pour l'instant, nous avons, en tous les cas, de formidables surprises : des projets émergent dans des zones inattendues.
Enfin, pour conclure, je tiens à souligner que nous avons été heureusement surpris par la mobilisation que l'emprunt national a suscitée partout en France.
Il serait intéressant de pouvoir disposer d'un tableau comparant la prévision et la réalisation effective des engagements et des décaissements.
Ces rendez-vous réguliers avec le commissaire général à l'investissement (CGI) permettent de pallier quelque peu le problème de départ, à savoir que le programme des investissements d'avenir se situe en dehors du budget général de l'Etat. J'ai plusieurs questions.
Dans son discours du 27 juin dernier sur le programme des investissements d'avenir, le Président de la République a souligné principalement trois éléments : la nécessité de valoriser davantage les initiatives d'excellence en matière de formation ; son regret que la thématique du cancer n'ait pas été retenue dans le cadre de la sélection des instituts IHU et sa volonté de renforcer la recherche dans le domaine de la sûreté nucléaire. Ces trois éléments ont, ou vont très probablement, donn[é]er lieu à des projets d'avenant aux conventions afin de permettre leur financement par le Programme des investissements d'avenir.
N'y a-t-il pas ainsi une tentation de faire financer par l'emprunt national tout un ensemble de dépenses au gré des événements ? N'y a-t-il pas un nouveau risque d'éparpillement des crédits ?
La tendance au « saupoudrage » des crédits dénoncée par la commission, dès l'examen du projet de loi de finances rectificative, avait également été analysée par elle comme une éventuelle réponse au risque d'incompatibilité du programme des investissements d'avenir avec le droit communautaire et les règles de l'Organisation mondiale du commerce. Pouvez-vous dresser un bilan des démarches effectuées par le CGI auprès de la commission européenne en termes d'information et de notification des financements assurés par l'emprunt national ?
Vous avez indiqué dans votre propos général que vous respectiez votre rythme d'engagements de crédits. Qu'en est-il des décaissements ? Lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2010, le Gouvernement prévoyait des décaissements de l'ordre de 4 milliards d'euros par an entre 2010 et 2014. Or, selon le dernier relevé trimestriel des engagements et des décaissements du programme des investissements d'avenir reçu par la commission, seul 1,4 milliard d'euros de dotations consommables a été décaissé en cumulé sur 2010-2011.
Lors de l'examen des conventions passées entre l'Etat et les opérateurs, la commission des finances a toujours été attentive à la question des « effets de leviers » que devait entraîner l'emprunt national. Pouvez-vous donner le détail de ce montant par type de co-financeurs (entreprises, opérateurs, collectivités territoriales,...) ?
Vous avez également parlé de la phase de conventionnement avec les lauréats. Comment concrètement pourra-t-on être assuré d'un suivi efficace des projets ? L'Agence nationale de la recherche (ANR), un des principaux opérateurs, en a-t-elle les capacités matérielles ? Disposez-vous d'une estimation du « coût de gestion » lié à la mise en place et au suivi de l'emprunt national ?
Dans son rapport sur les résultats et la gestion budgétaire de l'Etat en 2010, la Cour des comptes dresse un bilan assez sévère du programme des investissements d'avenir et indique notamment, je la cite : « le défaut d'articulation d'ensemble de plusieurs actions, associé à l'empilement actuel des dispositifs de soutien à la recherche et à l'innovation comporte deux types de risques : un risque opérationnel, le suivi et l'évaluation de projets en multi partenariats reposant sur l'efficacité des opérateurs, au premier rang desquels l'ANR, un risque budgétaire et financier, dès lors que la traçabilité des fonds n'est pas parfaitement assurée et pourrait conduire au financement de dépenses non éligibles et à la création d'emplois publics ». Quelle réponse apportez-vous à ces remarques de la Cour ?
Dans un entretien que vous accordiez à l'agence de presse AEF le jeudi 13 octobre dernier, vous indiquiez également à propos des Instituts de recherche technologique (IRT) : « Aujourd'hui certains industriels sont bien dans le cadre des projets qu'ils ont déposés, mais d'autres ne le sont pas du tout, envisageant une mise en oeuvre différente de ce qu'ils avaient annoncé dans le seul souci d'optimiser leurs intérêts ». Combien de projets sont concernés ? Comment comptez-vous sanctionner ces « effets d'aubaine » ?
J'ai enfin une dernière question à propos de Saclay. Après la démission de Paul Vialle à la tête de la Fondation de coopération scientifique du plateau de Saclay, Jean-Marc Monteil a été chargé par François Fillon d'une « mission temporaire pour la finalisation du Projet Saclay ». Nous avons été très surpris que Saclay n'ai pas été retenu lors de la première vague des « Initiatives d'excellence ». Saclay redépose un dossier pour le deuxième appel à projets. Où en est aujourd'hui ce dossier ?
Vous souhaitez que l'on vous transmette un tableau des décaissements effectifs année après année. Cependant, au stade où nous en sommes, je pense qu'il serait plus efficace de vous donner un tableau des engagements.
On pourrait faire un double tableau, avec les engagements et les décaissements, mais il faut rapprocher la réalisation de la prévision.
Il me paraît plus important de considérer les engagements, car les décaissements vont s'échelonner sur dix à douze ans.
Je ne refuse pas de donner les décaissements, mais il faut les mettre en perspective avec les engagements, sinon, personne n'y comprendra rien. A cet égard, je tiens à souligner que nous effectuons un rapport annuel, qui vous sera envoyé, qui présente le détail de nos actions. Vu le nombre de projets que l'on sélectionne, il est important que l'on vous informe sur les engagements, avant de regarder ce qui se fait projet par projet, au niveau des décaissements. Cela vous permettra d'apprécier si notre gestion est rigoureuse.
Madame Bricq, sur la question de la ratification a posteriori, je suis en désaccord avec vous. Aucune convention n'a été signée sans obtenir l'accord préalable des commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat, dont les commentaires ont été intégrés dans les conventions.
En ce qui concerne la sûreté nucléaire, l'IHU cancer et les « formations innovantes », je rappelle la procédure : le commissariat général a constaté que nous avions trois sujets. Il a alors saisi son conseil de surveillance, qui a approuve et a à son tour saisi le Gouvernement pour les modifications nécessaires. Au terme de cette démarche, tout est suspendu à la validation des deux commissions des finances. Nous suivons cette procédure dans le souci d'avoir une gestion transparente.
En ce qui concerne la Cour des comptes, nous avons eu de nombreuses discussions avec l'institution. Je leur ai demandé de venir voir comment nous travaillons. La question est de savoir si nous serons en mesure, demain, de justifier l'ensemble de nos décisions, ce qui n'a encore jamais été fait dans le détail, au stade où nous sommes, dans nos relevés de diligence.
Il ne m'appartient pas de décider s'il faudrait une autorisation annuelle du Parlement pour chacune des dépenses. Ce qui est certain, c'est que ? par nature, le programme des investissements d'avenir est pluriannuel, et cela implique forcément des ajustements permanents. On ne peut tenir dans la durée que si notre conseil de surveillance regarde précisément ce que l'on fait. Cela dit, je n'ai encore jamais entendu parler d'un rapport où celle-ci adressait un satisfecit... Ces critiques nous permettront certainement de progresser.
La Cour relève avec justesse la complexité du système, que nous compliquons peut-être davantage. C'est sans doute vrai, mais, d'après mon expérience depuis trente-cinq ans, la simplification n'est pas propice à l'action. Nous avons donc décidé de mettre les gens en réseau, afin de remédier à cette complexité.
Par exemple, dans le domaine de la recherche, les opérateurs sont multiples : le Centre national de recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l'énergie atomique (CEA), l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) et d'autres. Il s'agit de créer un réseau d'opérateurs pour que les acteurs travaillent ensemble. Je suis convaincu que l'on peut répondre à la complexité à travers une action en réseau.
En ce qui concerne la Commission européenne, nous lui posons systématiquement une question préalable pour vérifier la conformité des projets au droit communautaire, et nous attendons son feu vert pour avancer. Nous sommes très transparents et ne cherchons pas à fausser les règles du jeu de la concurrence en cachant ce que l'on fait. Par exemple, pour le fonds national d'amorçage, nous nous sommes adressés à la Commission, ce qui a retardé le lancement du dispositif de six mois, le temps que le dossier soit examiné.
Ce fonds a une utilité. En effet, il existe une multiplicité d'organismes de recherche. Lorsqu'un chercheur effectue une découverte, il dépose son brevet, généralement avec le CNRS, mais il doit ensuite faire le tour des différents fonds d'innovation pour apporter la preuve du concept, ce qui n'est pas toujours facile. Or, une fois que cette étape est réalisée, il vend assez vite, généralement à l'étranger. L'objet du fonds national d'amorçage est de financer les chercheurs au stade de la preuve du concept, de manière plurirégionale et décentralisée, avant la phase d'amorçage elle-même. Ce seront des fonds apportés par l'Etat. Ensuite, l'amorçage sera effectué selon nos conditions avec des règles de rémunération qui inciteront les fonds à favoriser davantage l'industrialisation en France qu'à l'étranger.
Quelle est la nature des interventions financières effectuées au titre du fonds national d'amorçage ? S'agit-il de fonds propres ou de prêts à des conditions privilégiées par exemple ? Comment cela fonctionne-t-il ?
Il s'agit plutôt de fonds propres. La phase primordiale est celle qui précède l'amorçage. Nous consacrons ainsi, via le fonds national d'amorçage, quelque 900 millions d'euros au financement de la preuve du concept. Actuellement, cinq sociétés d'accélération des transferts technologiques, qui permettent de faire la preuve du concept, sont en cours de constitution. Nous en aurons une douzaine au bout du compte. Nous décentralisons la gestion auprès des organismes de recherche et des universités, et le contrôle sera opéré par des gens de terrain et non pas par l'Etat.
Une fois la preuve du concept apportée, le fonds national d'amorçage apporte une aide à hauteur de 400 millions d'euros. Nous souhaitons investir dans des fonds existants, afin de faire effet de levier. Comme je l'ai déjà dit, nous leur posons des conditions. Beaucoup de gens se sont récriés en nous expliquant que nous n'aurions jamais aucun partenaire, tant celles-ci étaient drastiques. Or nous avons obtenu de multiples réponses et l'on pourrait, si on le souhaitait, débloquer tout de suite les 400 millions d'euros.
En termes d'effet de levier, sur 35 milliards d'euros, nous attendons un retour global de 4 à 6 milliards d'euros de l'Europe et des collectivités locales, et de 20 à 27 milliards d'euros du financement privé. Actuellement, la répartition des co-financements, hors projet relatif à l'Agence national de la recherche, pour lequel nous ne disposons pas d'éléments suffisants, est la suivante : 2,4 milliards de la part des collectivités locales, 6 milliards du secteur privé, et 272 millions d'euros en provenance des opérateurs.
Je reviens aux décaissements effectifs et aux engagements, sur lesquels nous avons besoin d'un suivi régulier, d'autant plus que ces investissements ne sont pas retracés dans le budget général. Les chiffres que vous venez de nous communiquer concernent bien les engagements signés, et non des prévisions ?
Il est intéressant que nous ayons connaissance du type de collectivités concernées. Vous avez dit tout à l'heure que votre mission ne comprenait pas l'aménagement du territoire ni la politique industrielle, mais à travers ces co-financements, c'est tout comme.
Je n'ai pas dit qu'il ne doit pas y avoir au final une politique d'aménagement du territoire. Notre préoccupation principale est d'abord d'identifier et de faire remonter les bons projets. Peut-être Jean-Luc Tavernier peut-il apporter quelques précisions sur les co-financements ?
Seule une minorité d'appels à projets attendent des co-financements des collectivités locales, co-financements qui font partie des projets eux-mêmes. C'est le cas dans le domaine du développement de la fibre optique ou de l'action « ville de demain ». Mais, pour la majorité des appels à projets, les co-financements peuvent être présents sans pour autant représenter une condition nécessaire de leur réussite. Les 2,4 milliards d'euros cités concernent l'action « ville de demain », avec les transports en commun en site propre. Plus 200 millions d'euros sont dédiés aux écocités, par exemple pour le projet du métro de Rennes.
Un investissement public n'a d'intérêt que s'il induit un effet de levier par rapport aux investissements privés. L'un des problèmes de notre pays est bien son incapacité à produire un tel effet de levier. C'est la participation effective du privé dans ces projets qui montrera la pertinence du choix effectué il y a deux ans.
Nous allons vous proposer un tableau de bord de suivi facile à lire et efficace, qui vous permettra de suivre les investissements chaque trimestre. Nous nous mettrons d'accord sur les modalités de ce suivi.
Je tiens à préciser que dans le reporting trimestriel que nous réalisons et que nous vous envoyons depuis un an, les co-financements attendus sur les projets sélectionnés sont indiqués.
Nous constatons avec satisfaction que, sur de nombreux projets sélectionnés, les collectivités locales participent. Toutefois, lorsque des dossiers nous parviennent, mais que les collectivités concernées ne veulent pas s'engager, comment voulez-vous que nous ayons foi en ces projets ?
Quand j'étais médiateur du crédit, j'avais souhaité la création d'un poste de médiateur de la sous-traitance et des relations entre les grandes entreprises et les PME. Je pense que si les grandes entreprises ne jouent pas le jeu des PME pour les aider à se structurer, elles se détruisent elles-mêmes à moyen terme. La force des grandes entreprises allemandes et japonaises tient précisément à la puissance de leurs sous-traitants et de leurs fournisseurs. Nous devons développer une telle culture en France. C'est bien dans cette solidarité intelligente que résidera le succès des investissements d'avenir à terme.
Les pôles de compétitivité sont un succès. Plusieurs appels à projets les concernent. Notre but est de les renforcer, mais aussi d'inciter l'Etat et les collectivités locales à abandonner ceux qui ne fonctionnent pas. Nous avons une démarche constructive, illustrée par le domaine aéronautique. Une compétition avait eu lieu entre Bordeaux et Toulouse. Cette dernière a gagné, mais nous avons réuni les autres acteurs et conclu un accord gagnant-gagnant pour tous. Du coup, nous avons aujourd'hui un pôle de compétitivité implanté à Bordeaux et à Toulouse, mais qui aura une envergure nationale. A l'inverse, lorsque l'on constate que le pôle de compétitivité ne tourne pas, nous émettons des recommandations. La question est de renforcer ceux qui fonctionnent bien, et de s'interroger sur ceux qui ne donnent pas les résultats escomptés.
En ce qui concerne le conventionnement, il est vrai que l'ANR a dû faire face à une masse de travail à laquelle elle n'était sans doute pas habituée. Mais force est de constater qu'elle a fait un « sans faute » avec assez peu d'effectifs en plus. Pour l'instant, il n'y a pas lieu, je pense, de dégager des moyens supplémentaires. Il est vrai que nous devons faire face à certains blocages, mais il faut que tout le monde fasse des efforts.
S'agissant des lauréats qui ne respecteraient pas leurs engagements, il est clair qu'ils devront renoncer à leurs projets.
Enfin, au sujet de Saclay, nous avons été « ravis» de la décision du jury qui a expliqué que Saclay ne pourrait être sélectionné tant qu'un projet solide ne sera pas présenté. Il est vrai que ce serait sans doute dramatique que Saclay ne soit pas au final sélectionné. Il y a plusieurs vagues d'appels à projets. Mais je ne sais pas quelle sera la décision prise par le jury.
Je suis d'accord avec la rapporteure générale sur la nécessité d'éviter le saupoudrage. Je me réjouis également, comme le commissaire général à l'investissement, de tous les projets présentés. Je souhaite simplement que l'on fasse attention de ne pas décourager les jeunes équipes.
Trois choses m'importent :
- je souhaiterais que l'ADEME, comme d'autres agences, ait une capacité d'entraînement industriel. Il n'est pas normal que dans la construction des éoliennes, par exemple, seuls 10 % des composants soient français ;
- j'ai été sensible à ce que vous indiquez s'agissant de Saclay. Nous ne pouvons pas continuer à fonctionner comme nous fonctionnons aujourd'hui. Il faut, sur chaque site, des rapprochements entre grandes écoles et universités ;
- il faudrait enfin que chaque année, à l'occasion de la remise du rapport d'activité du Programme des investissements d'avenir, nous consacrions un temps d'approfondissement à ces questions.
Dans le domaine de l'enseignement supérieur et de la recherche, il y a des endroits en France où la greffe prend et nous assistons à des projets formidables dès lors qu'il y a concertation entre les acteurs.
En ce qui concerne l'ADEME, je ne peux pas être plus en accord avec vous. Nous nous sommes, par exemple, battus sur un programme aéronautique pour imposer qu'il y ait systématiquement des sous-traitants français.
Toujours au sujet de l'ADEME, nous avons réussi à diminuer ses délais d'instruction des dossiers de dix-huit à neuf mois. Cependant, pour de petits projets, neuf mois demeurent une durée trop longue. C'est pourquoi, nous souhaitons que ces petits projets soient financés par un fonds géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC). Afin de coordonner les travaux de la CDC et de l'ADEME, un comité d'investissement réunissant ces deux acteurs devra sans doute être créé.
S'agissant des décaissements, il convient également de distinguer les dotations consomptibles et dotations non consomptibles. Il nous faut donc trouver des indicateurs adéquats pour vous aider dans le suivi du programme des investissements d'avenir.
Le véritable problème auquel nous sommes confrontés est que les industriels sont encore trop habitués à une logique de subventions, ce qui n'est pas la logique du programme des investissements d'avenir.
Je souhaite intervenir sur le volet numérique du programme des investissements d'avenir et notamment sur celui du développement du très haut débit sur l'ensemble du territoire et son équation financière.
Les départements sont aujourd'hui dans l'expectative sur ce sujet. Il y a en fait deux types de territoires : on va sans doute avancer rapidement dans les zones denses, en revanche, la question demeure entière pour le reste de la France. L'équation financière ne tient pas dans les zones sous-denses. Tous les opérateurs m'ont alerté sur ce sujet.
J'appuie notre collègue sur cette question. Ces problématiques valent pour tous les départements. La couverture en très haut débit, par ailleurs, est vécue par nos concitoyens comme un facteur d'inégalité profonde.
Sur ce sujet, nous avons reçu tous les acteurs. Personne ne nous a convaincus. En fait, le vrai problème est que les zones sous-denses n'ont même pas encore le haut débit.
En tous les cas, nous ne subventionnerons que les schémas départementaux ou pluri-départementaux afin que toutes les collectivités discutent entre elles.
Par ailleurs, nous avons fait acter par le Gouvernement que si les délais ne sont pas tenus année par année par un opérateur, la collectivité territoriale reprend ses droits.
Enfin, selon notre analyse, nous pensons raisonnable de considérer que d'ici 2020, si tout le monde respecte ses engagements, nous aurons une couverture de 65 % grâce à un apport de 6 milliards d'euros du secteur privé, 2 milliards d'euros des collectivités territoriales et 1 milliard d'euros du programme des investissements d'avenir. Pour le reste du territoire, 15 milliards d'euros au moins seront nécessaires.
Enfin la commission procède à l'examen du rapport de M. Charles Guené, rapporteur spécial, sur la mission « Conseil et contrôle de l'Etat ».
La mission « Conseil et contrôle de l'Etat » se compose de trois programmes très indépendants les uns des autres et correspondant au Conseil d'Etat et aux autres juridictions administratives, à la Cour des comptes et aux autres juridictions financières, et au Conseil économique, social et environnemental (CESE).
Elle s'appuie sur une enveloppe budgétaire totale de 601,4 millions d'euros consacrée à 58 % à la justice administrative, les juridictions financières pesant pour près de 36 % de ces crédits et le CESE pour « seulement » 6 %.
Avant d'en détailler les orientations, je tiens à souligner qu'en raison de leurs spécificités, ces trois programmes dérogent à la règle générale fixée par le Gouvernement de réduction des effectifs par non remplacement d'un fonctionnaire sur deux partis en retraite.
Le programme « Conseil d'Etat et autres juridictions administratives » comporte 349,4 millions d'euros de crédits de paiement, soit un budget en progression de 3,4 % par rapport à 2011. Dans le contexte budgétaire tendu que nous connaissons, cette progression confirme l'importance attachée aux moyens de la justice administrative.
Poursuivant la tendance engagée depuis déjà plusieurs années dans le but de réduire les délais de jugements, les effectifs des juridictions augmentent de 62 emplois équivalent temps plein travaillé (ETPT) en 2012.
Afin de rétablir un niveau de performance très dégradé, la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) a fait l'objet d'un renforcement conséquent de ses moyens humains depuis 2010. Pour 2012, 15 recrutements supplémentaires sont prévus, avec un plafond d'emplois fixé à 318 ETPT. Alors que le délai moyen de jugement devant cette Cour s'élève à neuf mois actuellement, l'objectif consiste à réduire ce délai à six mois en 2012. Cet objectif paraît à la fois raisonnable et atteignable.
Par ailleurs, votre rapporteur spécial se félicite de l'introduction, répondant au souhait formulé par la commission des finances en 2010, de la mesure du nombre d'affaires traitées par chaque rapporteur de la CNDA dans le volet « performances » du programme. Cet ajout permettra ainsi, à l'avenir, un suivi efficace de l'efficience au sein de cette Cour.
Le CESE disposera en 2012 d'un budget de 37,4 millions d'euros, en diminution de 0,3 % par rapport à 2011.
Ce budget pour 2012 peut donc être qualifié de « budget de stabilité », en ce qu'il ne prévoit aucun moyen supplémentaire pour faire face aux nouvelles missions du CESE, issues de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Celles-ci seront donc mises en oeuvre, soit par redéploiement des moyens existants, soit par économie nette. Toutefois, en l'absence de précisions sur la mise en application concrète de la réforme, celle-ci apparaît toujours délicate à évaluer budgétairement. Il en est ainsi par exemple du coût de traitement des pétitions citoyennes ou de la durée de nomination des membres associés, tous les décrets chargés de mettre en oeuvre la réforme n'étant pas encore parus.
Par ailleurs, la problématique du financement de la caisse de retraite du Conseil, dont le fragile équilibre est menacé par le rajeunissement et la féminisation résultant du dernier renouvellement, demeure un sujet de préoccupation. Une réforme salutaire a toutefois été amorcée en 2011, permettant d'assurer l'équilibre jusqu'en 2017.
Il semble que cela ne soit qu'une première étape, vers le processus de transparence et de clarté qu'a souhaité mettre en oeuvre le président Delevoye, au plan des effectifs.
Le programme « Cour des comptes et autres juridictions financières » est doté de 214,6 millions d'euros en crédits de paiement, soit un budget maîtrisé en progression d'à peine 0,2 % par rapport à 2011.
Hors dépenses de personnels, les crédits diminuent globalement de 13 %. A elles seules, les dépenses d'investissement chutent de 80 %.
Ce budget est élaboré à « périmètre constant », c'est-à-dire hors impact de la réforme des juridictions financières, dont la mise en oeuvre est toujours en suspens et l'impact financier difficile à évaluer.
S'appuyant sur une stabilité des effectifs, la Cour des comptes poursuit sa politique de recrutement d'« experts extérieurs » qui donne entière satisfaction et a permis de véritablement professionnaliser les missions de certification des comptes de l'Etat et de la sécurité sociale.
En conclusion, je propose, à titre personnel, à la commission d'adopter, sans modification, les crédits proposés pour la mission et chacun de ses programmes. Je souhaite, enfin, remercier le Conseil d'Etat, le Conseil économique, social et environnemental et la Cour des comptes pour la qualité et le sérieux de leurs réponses au questionnaire budgétaire qui leur a été adressé.
Le CESE connaît désormais une parité réelle. Avant que les femmes membres de ce Conseil n'atteignent l'âge de la retraite, la caisse de cette institution sera certainement à l'équilibre.
À l'issue de ce débat, la commission décide de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Conseil et contrôle de l'Etat ».
- Présidence de Mme Michèle André, vice-présidente -