Commission des affaires sociales

Réunion du 26 juin 2013 : 3ème réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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Au cours d'une seconde réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'audition de Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille, sur la politique familiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie David

Je remercie Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille, d'avoir bien voulu venir devant notre commission pour évoquer l'avenir de la politique familiale.

Vous le savez, le Premier ministre a présenté le 3 juin dernier un ensemble de mesures visant à réorienter les aides aux familles, qu'elles soient de nature fiscale ou sociale, avec l'objectif de résorber une partie du déficit de la branche famille, déficit dont nous savons qu'il résulte essentiellement de décisions prises ces dernières années en matière de recettes.

Par ailleurs, les discussions sont toujours en cours sur la prochaine convention d'objectifs et de gestion (COG) de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf) pour les années 2013 à 2017. Nous avons évoqué à de nombreuses reprises dans cette commission les difficultés actuelles des caisses d'allocations familiales (CAF), qui sont de moins en moins en mesure de faire face dans de bonnes conditions à leur charge de travail. C'est dire l'importance des choix qui seront effectués dans la prochaine COG en termes de moyens humains et de moyens d'intervention, au travers notamment du fonds d'action sociale.

Je souhaiterais, madame la ministre, que vous puissiez nous présenter les différentes décisions annoncées par le Premier ministre en matière de prestations familiales et d'avantages fiscaux liés à la situation familiale.

Nous voudrions également que vous fassiez le point sur l'état des discussions relatives à la prochaine COG, en distinguant peut-être ce qui est d'ores et déjà acquis et ce qui reste en débat.

Je vous propose de commencer par un exposé liminaire avant d'engager le débat avec nos collègues.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargé de la famille

Je reviendrai sur les grandes lignes de notre politique familiale qui repose sur deux piliers : les prestations financières et les services, au développement desquels nos concitoyens sont particulièrement attachés. Il existe en effet une aspiration à ce que les services d'accueil de la petite enfance et de soutien à la parentalité soient offerts à tous, conformément au principe d'universalité.

S'agissant de notre mobilisation en matière de services offerts aux familles, le Premier ministre a annoncé un plan quinquennal, la durée de la COG actuellement en préparation ayant été portée de quatre à cinq ans.

Dans ce cadre, les objectifs fixés sont à la fois quantitatifs et qualitatifs. Au plan quantitatif, nous visons 275 000 nouvelles solutions d'accueil pour les enfants de 0 à 3 ans. Elles se ventileront de la façon suivante : 100 000 places en crèche, 100 000 enfants supplémentaires accueillis par des assistant(e)s maternel(le)s et 75 000 places au titre de la préscolarisation des 2-3 ans. Cela se traduit par une augmentation substantielle, de l'ordre de 7,5 %, du fonds national d'action sociale (Fnas). Je rappelle que dans la précédente COG le niveau du Fnas est passé de 4 milliards à 4,6 milliards d'euros alors qu'il s'élèvera à 6,6 milliards à la fin de la prochaine COG.

Cet effort financier important est motivé par la volonté de corriger les profondes inégalités territoriales et sociales dont pâtit notre territoire : selon la Cnaf, les écarts vont de 1 à 10, les solutions d'accueil pour 100 enfants de moins de 3 ans variant selon les départements de 9 à 90 %. Ces inégalités territoriales sont jugées d'autant plus insupportables que l'on demande à nos concitoyens de faire preuve de mobilité.

Les inégalités sont également sociales. Dans les familles précaires, qui ont le moins accès aux modes d'accueil des enfants de 0 à 3 ans, plus de 90 % des enfants sont gardés par leur mère. Ces inégalités en génèrent d'autres. Je pense en particulier aux futures inégalités scolaires auxquelles seront exposés les enfants.

Je note d'ailleurs que les parents ne souhaitent plus aujourd'hui simplement faire « garder » leurs enfants mais veulent que ceux-ci soient accueillis dans un cadre qui contribue plus largement à leur éveil. A cet égard, tandis que 55 000 enfants de 0 à 3 ans ont été déscolarisés dans un passé proche, nous allons créer 75 000 places de préscolarisation.

L'effort portera également sur le soutien à la parentalité puisque le budget inscrit dans la précédente COG doublera pour s'élever à 100 millions d'euros. Nous faisons face à de véritables déserts territoriaux dans ce domaine : certaines zones du territoire ne sont pourvues d'aucune forme de soutien à la parentalité, que celui-ci soit assuré par des associations ou des collectivités. La demande est pourtant grande, en particulier chez les familles monoparentales.

Deux lignes budgétaires supplémentaires ont été créées. La première consiste en un fonds de correction des inégalités territoriales. Dans les zones où le déficit en matière d'accueil des enfants de 0 à 3 ans est particulièrement significatif, en sus des fonds traditionnels du Fnas, la Cnaf fournira ainsi un soutien financier aux initiatives visant à corriger les inégalités. La seconde prend la forme d'un fonds d'accompagnement destiné à aider plus spécifiquement les collectivités qui connaissent des difficultés dans la pérennisation de leurs structures, des difficultés de gestion ou des difficultés de mise en adéquation avec la circulaire de la Cnaf en matière de fourniture de repas.

Afin d'établir ces objectifs, nous avons suivi une nouvelle méthode qui privilégie la concertation de toutes les parties prenantes et la consultation citoyenne. Dans quatre régions, des parents ont été tirés au sort pour réfléchir à leurs attentes en matière d'accueil de la petite enfance et de soutien à la parentalité. Tous les acteurs locaux ont également été réunis.

Face au large éventail d'intervenants dans le secteur de la petite enfance (conseils généraux, communes et intercommunalités, associations gestionnaires), nous nous sommes ainsi aperçus que nous manquions d'un véritable pilote. Or, nous ne pouvons plus faire dépendre le développement de la politique de service en matière de petite enfance du bon vouloir des uns et des autres. A l'issue de la réflexion entreprise avec l'ensemble de ces partenaires dans le cadre de la modernisation de l'action publique, nous allons donc mettre en place au niveau de tous les départements des schémas territoriaux de la petite enfance et de la parentalité dont le préfet sera le pilote.

A cet égard, il reviendra aux communes ou aux intercommunalités de faire part au préfet de leurs choix et priorités. Le préfet réunira alors l'ensemble des partenaires, y compris les CAF et les conseils généraux, pour définir des objectifs. Dans chaque territoire, il faudra hiérarchiser les priorités et assortir leur réalisation d'un calendrier. Les fonds seront affectés en fonction des priorités définies dans le schéma territorial de la parentalité et de la petite enfance tel qu'acté par le préfet.

La consultation que nous avons menée a également montré la nécessité de professionnaliser les métiers de la petite enfance. S'agissant de la formation initiale, nous devrons nous pencher sur le contenu du certificat d'aptitude professionnelle (CAP), du brevet d'études professionnelles (BEP) ou encore du bac professionnel. Quant à la formation continue, celle-ci devra faire partie intégrante des obligations des assistant(e)s maternel(le)s. Dans cette perspective, nous devrons travailler avec les régions, compétentes en matière de formation professionnelle.

Enfin, s'agissant de la branche famille, le rapport Fragonard a évoqué de nombreuses pistes d'évolution. Dans l'avenir, il faudra s'interroger sur l'architecture des prestations. Dans l'immédiat, il s'agissait surtout de réduire le déficit de la branche famille et d'établir une plus grande justice. Ce rapport proposait soit une modulation des allocations familiales, soit une réforme du quotient familial. Le Gouvernement s'est engagé dans la voie d'un abaissement du quotient familial qui concernera 12 % des familles.

Parallèlement, cette mesure permettra de revaloriser deux prestations à destination des familles les plus précaires : le complément familial, destiné aux familles de plus de trois enfants, et l'allocation de soutien familial, visant les familles monoparentales. Ces mesures contribueront à lutter contre la précarisation, en particulier celle des familles monoparentales. Je rappelle que l'Unicef a pointé du doigt le taux de pauvreté des enfants encore bien trop élevé en France.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Pasquet

Les mesures annoncées par le Premier ministre lors de la réunion du Haut Conseil de la famille (HCF) du 3 juin dernier ont le mérite de dégager des économies pour redresser les comptes de la branche tout en renforçant le caractère redistributif de certaines prestations familiales. Cependant, elles ne répondent que très partiellement à la nécessaire modernisation de l'architecture et des outils de la politique familiale.

Lors de votre audition devant notre commission à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, vous aviez convenu que le système actuel était trop complexe et qu'il était indispensable que la prochaine COG prévoie des mesures de simplification. Qu'en est-il ?

Par ailleurs, dans un récent référé concernant l'action sociale de la branche famille à destination de la jeunesse, la Cour des comptes constate que cette politique, pourtant dotée de moyens financiers significatifs et en forte augmentation, est peu lisible et peu redistributive.

Quelles suites comptez-vous donner à ce référé ? La nouvelle COG tient-elle compte des recommandations formulées par la Cour ?

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Daudigny

J'ai eu l'occasion, ce matin, de rappeler mon soutien à l'orientation prise par le Gouvernement en matière de réduction du déficit de la branche famille.

Compte tenu de la conjoncture économique, le surcroît de recettes obtenu grâce à la diminution du plafond du quotient familial sera-t-il intégralement reversé à la branche famille ? Une partie des économies réalisées par le biais de cette réduction de niche fiscale pourrait-elle plutôt être utilisée pour financer le budget de l'État ? D'un point de vue technique, quelles seront les modalités retenues pour transférer les sommes issues de cette opération vers la Cnaf ?

A combien estimez-vous le surcroît de dépenses occasionné par la majoration de 50 % du complément familial et par la revalorisation de 25 % de l'allocation de soutien familial ?

Les prévisions réalisées par la commission des comptes de la sécurité sociale laissent entrevoir pour 2013 une dégradation des comptes de la branche famille supérieure à celle envisagée dans le cadre du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale : 3,2 milliards d'euros contre 2,5 milliards initialement prévus, soit 700 millions d'écart. D'autres mesures de résorption du déficit de la branche pourraient-elles être envisagées pour tenir compte de cette évolution inattendue ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille

La rénovation de la politique familiale que nous proposons entend effectivement enrayer la dégradation des comptes de la branche famille. Ce n'est pas pour autant que la modernisation de l'architecture des prestations familiales est mise de côté ; elle fait toujours partie de nos objectifs. Ce chantier reste à mener.

La simplification des outils de la politique familiale est une autre problématique, à laquelle la COG va apporter des réponses. Quels sont les enjeux ? D'une part, faciliter les démarches des allocataires, d'autre part, alléger le travail des personnels des CAF. Autrement dit, améliorer les conditions de travail dans les CAF pour offrir une meilleure qualité de service public.

Le développement de la dématérialisation est l'une des pistes envisagées. La CAF de Montbéliard, que je suis allée visiter, met ainsi à disposition de ses allocataires un accès à internet et leur fournit des explications sur le fonctionnement de cet outil.

L'objectif de simplification requiert, en tout état de cause, un engagement à la fois de la Cnaf, pour ce qui est des démarches administratives, et de l'Etat, pour ce qui concerne la réglementation relative aux prestations.

S'agissant du référé de la Cour des comptes, qui constate une utilisation imparfaite voire inefficace des crédits destinés au secteur de l'adolescence, je ne peux qu'abonder dans ce sens. Ce secteur est en déshérence car, ces dernières années, nous avons porté nos efforts sur la petite enfance et non pas sur la tranche d'âge des 11-16 ans. Se pose dès lors la question du financement d'actions qui n'ont pas prouvé leur efficacité.

Sur l'affectation à la branche famille des recettes nouvellement dégagées, il faut reconnaître que le scenario de la modulation des allocations familiales avait le mérite de ne pas poser ce problème ! Il est clair que les modalités techniques de ce mécanisme devront être définies à l'automne, dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale et du projet de loi de finances.

Enfin, pour ce qui est des autres sources d'économie envisageables, j'ai envie de vous dire : faites des propositions ! Toute la difficulté consiste à trouver un équilibre entre le maintien du niveau des prestations familiales et la résorption du déficit de la branche. Pour le moment, le Gouvernement n'envisage pas de réformer d'autres prestations.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

J'ai entendu parler de 250 000 nouvelles solutions d'accueil pour les jeunes enfants, or vous avez évoqué le chiffre de 275 000 places. Quelle est la bonne estimation ? Comment se répartissent ces places entre l'accueil collectif et l'accueil individualisé ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille

Nous parlons bien de 275 000 nouvelles solutions d'accueil, dont 100 000 places de crèches, 100 000 places auprès des assistant(e)s maternel(le)s et 75000 places en école maternelle pour les moins de trois ans.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les inégalités territoriales en matière d'offre d'accueil sont, il est vrai, un réel problème. Nous savons très bien qu'il existe des écarts de richesse entre les collectivités locales tels que toutes n'ont pas la capacité d'ouvrir de nouvelles places.

A la création de ces 100 000 places d'accueil collectif supplémentaires s'ajoute la réforme des rythmes scolaires. Nous sommes contactés par des maires, affolés par le coût que ces mesures vont engendrer. Avez-vous consulté l'association des maires de France (AMF) ?

En matière de petite enfance, nous manquons souvent de personnels qualifiés. Ne pourrait-on pas prendre appui sur le dispositif de la valorisation des acquis de l'expérience (VAE). Avez-vous envisagé cette piste ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

De nombreuses communes envisagent d'ouvrir des maisons d'assistant(e)s maternel(le)s, mais se pose la question du financement de telles structures. Quelles garanties pouvez-vous nous apporter sur ce sujet ? Par ailleurs, de plus en plus de parents se regroupent pour créer des structures d'accueil ; ce sont les micro-crèches.

Debut de section - PermalienPhoto de René-Paul Savary

Je suis sidéré par l'organisation territoriale que vous nous proposez, Madame la ministre ! Alors que les départements élaborent, en partenariat avec l'ensemble des acteurs, des schémas de la petite enfance contenant des objectifs précis, sont compétents en matière de protection maternelle et infantile (PMI) et ont la responsabilité de la protection de l'enfance, vous les dessaisissez du pilotage de cette politique au profit du préfet ! C'est un très mauvais signal que vous leur envoyez. Une tout autre solution aurait été de revaloriser leur action.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Je souscris totalement à la remarque de mon collègue. Dans mon département, le Loiret, nous définissons un schéma de la petite enfance tous les cinq ans et l'évaluons tous les deux ans. Cela fonctionne très bien. C'est une forme de recentralisation que vous nous proposez !

S'agissant des 275 000 nouvelles places, quel sera le montant de l'enveloppe financière affectée ? Il faudrait, par ailleurs, profiter de cette réforme pour supprimer certaines structures consultatives particulièrement redondantes.

Notre groupe n'est favorable ni à une réduction du plafond du quotient familial, ni à une modulation des allocations familiales. Je partage toutefois l'interrogation du rapporteur général quant aux modalités de réaffectation à la branche famille du surcroît de recettes attendu de cette réforme. Vous ne semblez pas pleinement assurée que ces économies seront bien réattribuées à la branche ! Je rappelle, à ce sujet, qu'une partie voire la totalité de ses difficultés financières résulte de la prise en charge de prestations auparavant assumées par la branche vieillesse. Dans l'hypothèse où la branche retrouverait à terme l'équilibre financier, reviendrez-vous sur la diminution du plafond du quotient familial ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargé de la famille

Nous ne sommes pas responsables de l'affectation à la branche vieillesse de recettes provenant de la branche famille, décidée par la précédente majorité. Ceci étant dit, nous devons surtout garder à l'esprit que la réduction du déficit de la sécurité sociale est un objectif commun. Cet objectif doit être apprécié toutes branches confondues ; chacun doit y prendre sa part.

Indépendamment du déficit de la branche famille, la politique familiale ne donne pas entière satisfaction puisque, après impôts, une famille modeste perçoit moins qu'une famille aisée. Nous devons y apporter des réponses.

S'agissant des schémas territoriaux, s'ils fonctionnaient si bien, nous ne ferions pas face aujourd'hui à de telles disparités dans la couverture par les services d'accueil des enfants et de soutien aux familles ! Certains territoires ruraux renoncent à développer des structures d'accueil.

Nous n'allons pas opérer de recentralisation. Le préfet assurera un rôle de chef d'orchestre et la partition sera écrite par les collectivités dans leur diversité. Nous avons besoin d'un opérateur qui soit le garant des objectifs de correction des inégalités territoriales. La concertation que nous avons menée avec l'ensemble des parties prenantes, y compris les représentants des départements, a permis de faire émerger cette vision des choses, partagée notamment par l'AMF. Le préfet a été choisi car il est perçu comme un interlocuteur neutre. Il ne donnera pas de directives à l'endroit des collectivités. Celles-ci continueront à exercer leurs responsabilités dans leur champ de compétences.

Vous affirmez que les schémas territoriaux existent déjà. Cependant, vos différentes interventions soulignent l'existence de divergences dans leurs modalités d'exécution et d'évaluation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Noël Cardoux

Nous refaisons des schémas tous les cinq ans et les évaluons tous les deux ans.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargé de la famille

Il n'en reste pas moins que si nous avons décidé d'allonger d'un an la COG, cela doit contribuer à ce que la notion d'évaluation devienne beaucoup plus commune. Nous ne pouvons attendre cinq ans pour corriger ce qui doit l'être.

Il ne s'agit ni de reconcentration, ni de recentralisation, mais d'une redéfinition du rôle qu'un État moderne doit assumer aujourd'hui dans le cadre de la décentralisation. Il s'agira de fusionner les comités départementaux en matière de petite enfance et de parentalité afin de permettre l'élaboration de véritables schémas territoriaux.

Pour l'ensemble de la France, nous disposons d'une enveloppe de 2,6 milliards d'euros en 2013. Cette enveloppe sera de 3,8 milliards en 2017, ce qui n'est pas négligeable. Les collectivités ne financent qu'une partie du tout ; elles bénéficient du concours des CAF ainsi que d'une hausse et d'une redistribution substantielles du budget du Fnas.

S'agissant de la réforme des rythmes scolaires, 250 millions d'euros ont été budgétés au titre de l'intervention de la Cnaf. Les communes qui s'engagent dans cette voie bénéficieront à la fois du fonds d'amorçage prévu dans la réforme et du fonds Cnaf. La volonté d'accompagnement est donc forte.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Les inégalités ne sont pas que financières mais aussi foncières.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargé de la famille

Vous avez raison. Il va être demandé aux CAF d'aider les petites communes, souvent les plus démunies, à établir leur diagnostic en matière de demande.

L'un de nos objectifs est d'établir de véritables passerelles en adaptant les formations et les équivalences. Nous savons, par exemple, que dans certains départements frontaliers du Luxembourg, des infirmières qui n'ont pas trouvé d'emploi en France et n'ont pu se reconvertir dans les métiers de la petite enfance sont accueillies à bras ouverts par le pays voisin.

Les maisons d'assistant(e)s maternel(le)s permettent à ces derniers de se regrouper en un même lieu, de mutualiser leurs compétences et de sortir de leur isolement tout en gardant le même lien contractuel avec les parents. S'agissant du cahier des charges, nous devons peut-être faire preuve d'une exigence accrue et nous attacher à mieux en expliquer le contenu aux parents. Ceux-ci ne s'intéressent pas forcément au statut juridique du mode d'accueil car cela est excessivement compliqué.

Debut de section - PermalienPhoto de Gisèle Printz

Ces maisons obtiennent-elles un financement par ailleurs ?

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargé de la famille

Non. Mais il n'existe aucun obstacle à la réflexion. Les modes de garde, qu'il s'agisse de micro-crèches, qui ne présentent d'ailleurs pas nécessairement le système de financement le plus idoine, ou de maisons d'assistant(e)s maternel(le)s, sont en évolution. La Cnaf doit également avoir les moyens d'évoluer.

Debut de section - PermalienPhoto de Michelle Meunier

Je ne vois pas en quoi la méthode de gouvernance proposée par le Gouvernement représente une menace pour les départements. Elle est, au contraire, gage d'une meilleure organisation de la politique familiale au niveau local. Les départements ont tout à gagner à ce que le préfet endosse un rôle de chef d'orchestre. Cette gouvernance permettra en outre de lutter plus efficacement contre les inégalités territoriales qui, j'ai pu le constater en tant que membre du HCF tout comme ma collègue Catherine Deroche, sont particulièrement fortes en matière d'accueil de la petite enfance. Une remarque toutefois : il ne faudrait pas que cette réforme ait pour effet pervers de pénaliser les bons élèves. Les collectivités, qui font des efforts en matière d'accueil, doivent être soutenues dans leur démarche.

Sur le dossier de la professionnalisation des métiers de la petite enfance, comment comptez-vous procéder ? Engagerez-vous une concertation sur le modèle de ce qui a été fait pour les structures d'accueil avec l'ensemble des acteurs du secteur (associations, régions, organismes de formation...) ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Deroche

Effectivement, les disparités territoriales sont importantes, mais il est vrai aussi que certaines collectivités sont très actives en matière d'accueil des enfants ; c'est le cas de mon département, le Maine-et-Loire. Veillons à ne pas les pénaliser.

Je rappelle que toutes les structures liées à l'enfance font l'objet d'un financement partagé entre la Cnaf et les collectivités. Les maires ont parfois le sentiment d'une course sans fin ; on leur demande d'ouvrir toujours plus de structures d'accueil alors qu'ils font face à des contraintes financières de plus en plus fortes !

S'agissant de l'accueil des enfants âgés de moins de trois ans, sur quel mode d'accueil allez-vous porter vos efforts ? J'ai constaté que les parents ont une nette préférence pour l'accueil collectif car il est plus rassurant que l'accueil individuel. Je ne suis toutefois pas sûre que ce soit la solution la plus adaptée au rythme biologique de l'enfant.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Je trouve votre objectif de 275 000 nouvelles places extrêmement positif, en particulier pour permettre aux femmes de concilier vie professionnelle et vie personnelle.

Les maisons d'assistant(e)s maternel(le)s, dispositif que - vous le savez - je soutiens avec conviction, ont l'avantage d'offrir pour les parents un cadre plus sécurisant que le domicile d'un(e) assistant(e) maternel(le) exerçant seul(e).

Bien sûr, en matière de mode d'accueil, le critère financier joue beaucoup : on sait que cela revient plus cher de confier son enfant à un(e) assistant(e) maternel(le) que de le faire garder en crèche.

Je ne conteste absolument pas l'objectif de 75 000 places en école maternelle pour les enfants de moins de trois ans, mais je m'interroge sur un point : on sait très bien qu'un enfant de moins de trois ans est encore un bébé, or les professeurs des écoles ne sont pas formés pour s'occuper des tout petits. La qualification des personnes qui seront chargées d'accueillir les enfants en préscolarisation est une question majeure.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille

Sur ce sujet, je rappelle que les classes passerelles fonctionnent très bien ; elles sont un « pont » entre les structures d'accueil et l'école. Je plaide fortement pour le développement de ce dispositif, notamment auprès de mon collègue de l'éducation nationale, car cela ne peut se faire que grâce à une organisation plus souple de l'école maternelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Isabelle Debré

Je suis tout à fait d'accord avec vous, mais il faut faire attention à ce que les parents n'en profitent pas pour demander que leur enfant, une fois âgé de trois ans, saute une classe sous prétexte qu'il a déjà une année de maternelle derrière lui.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille

Vous avez parfaitement raison. C'est pourquoi je crois préférable de développer ce dispositif dans les quartiers défavorisés afin que les parents, qui n'ont pas forcément les moyens financiers de recourir à un(e) assistant(e) maternel(le) ou à un placement en crèche, puissent eux aussi accéder à une solution d'accueil.

Il est vrai qu'il existe, chez les parents, une préférence pour le mode d'accueil collectif. La crèche est souvent perçue comme l'antichambre de l'école avec tout ce que cela emporte en termes de sécurité. Pour les parents, il est inconcevable qu'un incident puisse se produire dans une crèche, tout comme à l'école. Or le risque zéro n'existe pas...

N'oublions pas non plus que la crèche familiale constitue un bon intermédiaire entre l'accueil individualisé et l'accueil collectif.

Debut de section - PermalienPhoto de Muguette Dini

Tout à fait, mais ce mode d'accueil coûte cher aux collectivités !

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre chargée de la famille

Je précise que nous allons, par ailleurs, apporter un soutien financier accru au développement des relais d'assistant(e)s maternel(le)s, qui permettent de concilier accueil individualisé et temps collectif.

S'agissant du reste à charge pour les familles, le HCF a été saisi de cette question dont je mesure pleinement l'importance.

J'ai aussi annoncé l'abrogation prochaine du décret du 7 juin 2010 relatif aux établissements et services d'accueil des enfants de moins de six ans dit « décret Morano » qui, en encourageant le « surbooking » des crèches, a entraîné une baisse inacceptable du taux d'encadrement.

J'ai également conscience de l'essor grandissant du marché des crèches privées dont la logique de rentabilité financière ne manque pas d'interpeller.

Enfin, sur le « plan métiers », j'entends bien entendu mener ce chantier avec l'ensemble des partenaires concernés. Les consultations commenceront dès la signature de la nouvelle COG.