Amendement N° 183 (Retiré avant séance)

Accès au foncier agricole


( amendements identiques : 12 13 14 15 34 55 57 63 95 98 115 117 125 144 )

Déposé le 28 octobre 2021 par : Mme Vérien.

Photo de Dominique Vérien 

Rédiger ainsi cet article :

Rétablir cet article dans la rédaction suivante :

L’article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

a) Au 2°, la référence : « au 1° » est remplacée par les références : « aux 1° et 3° » ;

b) Au 3°, les mots : « ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole » sont remplacés par les mots : « détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole ou détenant des droits sur de telles sociétés, » ;

2° Le 1° du III est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les engagements du cahier des charges portant sur les actions ou parts mentionnées au 3° du II du présent article, qui constituent la contrepartie des exonérations fiscales prévues aux articles 1028 à 1028 ter du code général des impôts, sont définis par décret en Conseil d’État ; ».

Exposé Sommaire :

Cet amendement vise à réintroduire l’article 2 dans sa rédaction issue de la lecture à l’Assemblée nationale.

Cet article poursuit un triple objectif : sur la substitution : il s’agit de permettre aux SAFER d’intervenir à l’amiable, par voie de substitution, sur les cessions de titres de société (comme pour les ventes d’immeubles) ; sur la transparence du marché sociétaire : il s’agit de faire disparaître toute référence à l’objet principal de la société, qui était source de difficultés d’interprétation (cf. avis du CE du 6 mai 2021, p. 12 ; La semaine juridique notariale et immobilière n° 25, 24 juin 2016, act. 753, p. 10), et remplacer cette expression par les titres de sociétés « détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole ou détenant des droits sur de telles sociétés » ; enfin, sur le cahier des charges : donner une base légale pour encadrer, par décret, le contenu des engagements inclus dans les cahiers des charges relatifs aux opérations sur titres de sociétés qui bénéficient de l’exonération de droits d’enregistrement en vertu de l’article 1028 ter du code général des impôts.

Cet article a été supprimé dans son ensemble en commission sur proposition du rapporteur (amendement n° COM-101 de M. RIETMANN). mais, la critique, centrée exclusivement sur le dispositif de substitution, repose tout à la fois sur une confusion et une erreur d’appréciation :

- Une confusion, tout d’abord, car le mécanisme de substitution est parfaitement étranger à la préemption. Il ne s’agit pas ici de permettre aux SAFER d’entrer au capital d’une société voire, par le biais de la substitution, d’imposer un associé ou un actionnaire dans une société, ou encore moins d’étendre le droit de préemption de la SAFER aux cessions partielles de parts de société (comme le laisse trop souvent entendre la presse, notamment, en dernier lieu, une tribune sur Lesechos.fr par Michel Veyrier, publiée le 20 octobre dernier et intitulée « La transmission des exploitations agricoles en danger »).

La possibilité laissée aux SAFER de se substituer un ou plusieurs attributaires pour réaliser la cession des droits sociaux qui leur sont conférés par une promesse de vente, s’organise dans un cadre amiable et en dehors de toute préemption (qui obéit à d’autres règles).

La substitution sur les cessions de titres sociaux ne risque absolument pas de contraindre les associés et le rétrocessionnaire, qui sera choisi par la SAFER, de s’associer, en méconnaissance du principe de l’affectio sociÉtatis qui découle de la liberté contractuelle. En effet, l’opération de cession, réalisée par voie de substitution, est une opération amiable qui ne peut se réaliser qu’en présence d’une volonté commune des associés et du rétrocessionnaire de collaborer ensemble à la conduite des affaires de la société.

Enfin, rappelons, d’une part, que s’agissant des modalités d’acquisition, les acquisitions amiables demeurent la voie de droit commun et la substitution le moyen principal (+ de 80 % des acquisitions amiables) et, d’autre part, que la substitution est un moyen de transmission d’un bien, permettant de supprimer un deuxième acte de mutation, c’est-à-dire en évitant de « titrer » la SAFER avant que celle-ci ne procède à la rétrocession du bien. L’attributaire devient, par l’intervention de la SAFER, directement le propriétaire du bien ou des parts de société sans que celui-ci soit entré dans le stock foncier de la SAFER. Ce dispositif permet de diminuer le coût du portage des opérations et, partant, d’alléger les frais d’intervention dans les dossiers ne nécessitant pas un stockage temporaire des biens ou des droits sociaux. La substitution est soumise à la même procédure qu’une rétrocession ordinaire (avis d’appel à candidatures, passage pour avis en comité technique départemental, demande d’autorisation auprès des commissaires du Gouvernement, publicité de la décision de rétrocession). Elle n’exonère pas la SAFER de son obligation de motivation des décisions de rétrocession. Elle n’exonère pas l’attributaire du respect d’un cahier des charges.

- Une erreur d’appréciation ensuite car la faculté de substitution ne doit pas être exclusivement réservée aux seules sociétés ayant pour objet principal la propriété ou l’exploitation agricole.

Ce n’est pas l’objet principal de la société qui doit restreindre les possibilités d’intervention foncière ; les SAFER doivent pouvoir intervenir, pour l’exercice de leurs missions, dans un cadre amiable uniquement et, si possible par voie de substitution, sur des opérations sociétaires avec toutes les sociétés détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole (rappelons que le périmètre du droit de préemption n’est pas modifié par cette PPL ; ce droit reste admis uniquement en cas d’aliénation à titre onéreux de la « totalité des parts ou actions d’une société ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole » et lorsque l’exercice de ce droit a pour objet l’installation d’un agriculteur : cf. art. L. 143-1 du CRPM).

Ce n’est pas non plus la surface agricole détenue en propriété ou en jouissance qui doit être un frein à la réalisation d’opérations foncières au travers l’acquisition de titre sociaux.

La politique d’installation et de transmission en agriculture nécessite et commande de pouvoir intervenir sur le foncier agricole, quels que soient l’objet social ou statutaire, la forme sous laquelle la société est constituée (civile ou commerciale) et la proportion des biens immobiliers agricoles exploités ou détenus par rapport à tous les actifs de la société.

Pour l’ensemble de ces raisons, il est proposé de maintenir dans cette proposition de loi la faculté de substitution aux opérations d’acquisition de droits sociaux et, par suite, de rétablir l’article 2 dans sa rédaction issue de l’Assemblée nationale.

Par ailleurs et enfin, sur la transparence du marché sociétaire, il convient de rappeler qu’il existe un lien très étroit entre le champ des opérations soumises à déclaration au titre de la transparence (réception des déclarations par la Safer, dites « DIA ») et les demandes d’autorisation au titre de cette PPL.

Dans la version issue de l’Assemblée nationale, si la demande d’autorisation est adossée aux DIA, ce n’est plus le cas avec la version du texte proposée par la commission au Sénat : la demande d’autorisation est déconnectée de la DIA.

L’article 2 doit donc être rétabli entièrement pour assurer la cohérence globale et l’efficacité du dispositif de contrôle puisque l’article 1erde la PPL prévoit qu’est soumise à autorisation préalable la prise de contrôle « d’une société possédant ou exploitant des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole » (art. L. 333-2-I) et que la « demande d’autorisation est présentée à la SAFER avec l’information prévue à l’article L. 141-1-1 » (art. L. 333-3-I), lequel fait référence aux déclarations d’intention aliéner (DIA) portant sur des « biens ou droits mobiliers ou immobiliers mentionnés au II de l’article L. 141-1 » (lequel vise aujourd’hui les sociétés « ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole »). C’est la raison pour laquelle l’article 2 prévoyait de remplacer cette expression par les titres de sociétés « détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers à usage ou à vocation agricole ou détenant des droits sur de telles sociétés »).

Aussi, si les dispositions de l’article 2 ne sont pas rétablies, la demande d’autorisation sera déconnectée de la DIA puisque la transparence du marché ne portera que les sociétés « ayant pour objet principal l’exploitation ou la propriété agricole ».

L’article 2 doit donc être rétabli dans son intégralité.

Le texte proposé par cet amendement est fortement soutenu par un large consensus au sein des organisations représentatives de la profession agricole (FNSEA, JA et Chambres d’agriculture France).

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