Commission des affaires sociales

Réunion du 4 juin 2008 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • ARH
  • ARS
  • hôpital
  • pilotage
  • régional

La réunion

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Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Philippe Ritter, préfet honoraire, auteur du rapport sur la création des ARS, chargé de mission au cabinet de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, de la jeunesse, des sports et de la vie associative.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicolas About

a rappelé que la création d'agences régionales de santé (ARS) a été suggérée dès 1993 par un rapport du commissariat général du plan, qui a proposé de confier aux ARS la régulation des dépenses d'assurance maladie au niveau régional. Cette proposition n'a alors connu aucune traduction législative.

En octobre dernier, le Président de la République a souhaité la mise en place de ces agences dès le 1er janvier 2009. Deux rapports ont alors été respectivement établis par M. Philippe Ritter et par M. Yves Bur, dans l'objectif de tracer les contours de ces nouvelles structures. Ces documents dressent un tableau peu flatteur de l'état du système de santé : inégalités d'accès aux soins, parcours de soins ville-hôpital insuffisamment coordonné, faiblesse des politiques de prévention, croissance des dépenses difficilement soutenable et émiettement institutionnel. Ils concluent tous deux à la nécessité de mettre en oeuvre des agences régionales de santé afin de rationaliser l'intervention des acteurs du système de santé au niveau régional, mais selon des modalités différentes qu'il convient d'analyser dans la perspective d'un projet de loi annoncé pour l'automne prochain.

Debut de section - Permalien
Philippe Ritter, ministre de la santé

préfet honoraire, auteur du rapport sur la création des ARS, chargé de mission au cabinet de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, a confirmé que le plan Juppé de 1996 a constitué une première étape vers les agences régionales de santé (ARS). La création des agences régionales d'hospitalisation (ARH), alors décidée, a permis de placer sous une même tutelle l'ensemble des établissements de santé. Ce mode de gestion s'avère aujourd'hui insuffisant, car il consacre l'hospitalo-centrisme du système de santé, la France étant le pays européen qui consacre la part la plus importante de ses dépenses de santé à l'hôpital. Or, cette répartition des dépenses ne permet pas d'optimiser les modes de recours aux soins et se fait au détriment des autres composantes du système de santé, dont la gestion est aujourd'hui excessivement cloisonnée.

Une réforme institutionnelle est donc nécessaire afin de placer sous une même autorité les secteurs ambulatoire et hospitalier. La plupart des interlocuteurs consultés ont par ailleurs estimé indispensable d'inclure dans le périmètre de compétences des futures ARS les établissements du secteur médicosocial bénéficiant d'un financement total ou partiel de l'assurance maladie. Un consensus s'est également dégagé pour adjoindre à ces missions la santé publique, la veille et la sécurité sanitaires. Les ARS se voient ainsi confier des compétences très larges, pour l'exécution desquelles une structure administrative plus opérationnelle que celle des ARH, administrations de mission très légères ne disposant que de moyens limités pour exercer leurs compétences, doit être définie.

Le point essentiel de la réflexion relative à la création des ARS est, à son sens, de savoir s'il est pertinent de confier à des opérateurs distincts les compétences en matière d'organisation de l'offre de soins et celles relatives à la maîtrise des dépenses.

Or, le Gouvernement a considéré que ces deux fonctions ne peuvent pas être dissociées sans risquer d'une part de réduire le rôle des ARS, d'autre part de donner la priorité aux questions financières au détriment de la répartition géographique de l'offre de soins. La contrepartie de ces compétences doit résider dans une responsabilisation de ces structures, sur des objectifs à la fois de santé publique et de régulation des dépenses d'assurance maladie.

Compte tenu de l'ampleur des compétences attribuées aux ARS, le choix du directeur prend alors une dimension capitale. Ce dernier sera nommé en conseil des ministres et assisté d'un directoire présidé par le préfet de région. Une conférence régionale de santé reconfigurée, disposant de compétences plus larges que celles qui lui sont dévolues actuellement, viendra compléter le dispositif de gestion des agences.

a jugé indispensable de créer une structure disposant d'une véritable tutelle sur les soins ambulatoires et l'hôpital. Pour ce faire, les ARS doivent être constituées sous la forme d'un établissement public et être dotées de nouveaux outils de régulation du système de santé. En effet, jusqu'à présent, l'assurance maladie ou les ARH n'ont pas disposé des moyens d'action nécessaires pour corriger les inégalités en matière d'offre de soins. La création des ARS entraînera en outre une profonde restructuration des services de l'Etat au niveau régional et départemental (directions régionales et départementales de l'action sanitaire et sociale), mais également de l'assurance maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

a fait part de ses doutes sur l'opportunité de confier à un opérateur unique des compétences en matière de maîtrise de l'offre de soins et de régulation des dépenses de santé.

Il a rappelé que l'assurance maladie et les ARH n'ont pas disposé des outils nécessaires pour faire face aux tâches que les pouvoirs publics leur ont confiées, notamment dans le domaine de l'organisation de l'offre de soins ambulatoires. Malgré cela, des évolutions importantes peuvent être constatées depuis la réforme de l'assurance maladie en 2004 en matière de maîtrise des dépenses, même si des progrès sont encore à réaliser pour optimiser la régulation des dépenses hospitalières. Le regroupement au niveau régional des compétences détenues par l'Etat et l'assurance maladie soulève la question du recours à un opérateur de proximité pour la mise en oeuvre des politiques de gestion du risque, domaine où l'assurance maladie a développé un véritable savoir-faire. La ministre de la santé a évoqué la possibilité de recourir aux services des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM). Or, cette solution suppose de définir des modalités de collaboration précises entre les CPAM et les ARS afin d'éviter des dysfonctionnements liés à la multiplicité des tutelles. Des procédures de collaboration sont également nécessaires afin de coordonner les stipulations conventionnelles nationales conclues entre les professions de santé et l'assurance maladie et les mesures décidées au niveau régional par les ARS, ainsi que pour associer les organismes d'assurance maladie complémentaire à la politique de gestion du risque. Ces deux derniers points sont assez peu évoqués dans les propositions transmises à la ministre de la santé.

Il a enfin voulu savoir comment est envisagée la coordination des interventions des ARS et des départements dans le domaine médicosocial.

Debut de section - Permalien
Philippe Ritter, ministre de la santé

a souligné que, même si des propositions ont été soumises au Gouvernement à la suite des Etats généraux de l'offre de soins ou par la commission de concertation sur les missions de l'hôpital, les outils de régulation mis à la disposition des ARS devront être définis par le Parlement.

Il a estimé que la politique de gestion du risque prendra une dimension nouvelle en étant coordonnée avec les politiques d'organisation de l'offre de soins au sein des ARS. Ces nouvelles structures ont vocation à fédérer l'Etat et l'assurance maladie, ce qui favorisera un meilleur suivi des performances du système de santé, notamment des dépenses hospitalières, domaine où aujourd'hui les directeurs d'ARH ne disposent pas des moyens nécessaires pour accompagner les établissements sur la voie du retour à l'équilibre financier. Le développement d'une politique régionale de gestion du risque ne remettra pas en cause les stipulations prévues par les conventions nationales conclues entre les professionnels de santé et l'assurance maladie, et la collaboration entre ARS et CPAM n'aura aucun impact sur les compétences de l'assurance maladie en matière de liquidation et de contrôle des prestations servies aux assurés. Par ailleurs, les complémentaires doivent se voir accorder une place dans la gouvernance des ARS.

Il a précisé que les ARS vont reprendre les compétences aujourd'hui détenues par l'Etat et l'assurance maladie dans le domaine médicosocial. Les compétences de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et des conseils généraux ne subiront aucune modification, mais le succès de cette évolution institutionnelle est lié à la capacité des pouvoirs publics à faire émerger une collaboration étroite entre les ARS et les départements. A titre personnel, il s'est prononcé pour des rapports bilatéraux sur une base contractuelle plutôt qu'en faveur d'une représentation des conseils généraux au sein des structures de l'agence, formule qui nécessite un accroissement des effectifs du directoire de l'ARS afin d'accorder une place à tous les départements figurant dans le ressort de l'agence.

Debut de section - PermalienPhoto de Louis Souvet

a voulu savoir si la création des ARS entraînera la disparition des ARH.

Debut de section - PermalienPhoto de Guy Fischer

a rappelé les propos de la ministre de la santé assurant que la création des ARS n'entraînera pas la fermeture d'établissements de santé, alors que plusieurs rapports publiés récemment estiment au contraire nécessaire la restructuration du tissu hospitalier. Il s'est interrogé sur le rôle qui sera confié aux ARS en ce domaine.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

s'est inquiété des problèmes de gestion de ressources humaines liés à la création des ARS, d'une part, du point de vue de la mobilité des personnels actuellement en poste, d'autre part, pour le maintien de structures de proximité.

Debut de section - PermalienPhoto de Paul Blanc

a estimé que le regroupement au sein d'une même structure de compétences relatives à l'organisation de l'offre de soins et à la régulation des dépenses de santé peut modifier l'approche des dossiers et déboucher sur la promotion d'une politique uniquement fondée sur le contrôle des dépenses au détriment des besoins de santé exprimés localement par les populations.

Il s'est interrogé sur le rôle des directions régionales de l'administration des services sanitaires et sociaux (Drass) dans la nouvelle architecture institutionnelle, sur les délais nécessaires pour la mise en place des ARS et sur le rôle des préfets de région au sein des ARS.

Il a rappelé que les structures régionales sont aujourd'hui chargées de définir les zones sous-médicalisées où des mesures incitatives peuvent être mises en oeuvre pour favoriser l'installation et le maintien des professionnels de santé. Or, durant la période au cours de laquelle laquelle les ARS se substitueront aux structures précédentes, l'Etat devra veiller à la pérennité des mesures visant à limiter localement les effets de la crise de la démographie médicale afin d'éviter que cette période transitoire ne se traduise par une dégradation de l'accès aux soins.

Debut de section - Permalien
Philippe Ritter, ministre de la santé

a précisé que les ARS ont pour objet de simplifier le paysage institutionnel en se substituant aux ARH, aux unions régionales des caisses d'assurance maladie (Urcam), aux missions régionales de santé (MRS) et en récupérant les compétences sanitaires des directions départementales de l'action sanitaire et sociale (Ddass) et des directions régionales de l'action sanitaire et sociale (Drass), ainsi que les compétences hospitalières détenues par les caisses régionales de l'assurance maladie (Cram).

Cette réorganisation prévoit la création d'antennes territoriales des ARS afin de développer des politiques de proximité et de relations approfondies avec les conseils généraux. Ces regroupements institutionnels rendus nécessaires par la création des nouvelles agences, démarche qui aujourd'hui suscite l'adhésion des personnels, nécessitent effectivement d'accorder une importance particulière à la gestion des ressources humaines.

Il a souhaité que la mise en oeuvre des ARS puisse débuter dans le courant de l'année 2009. Selon le modèle retenu lors de la création des ARH, les directeurs peuvent être nommés par anticipation afin de leur permettre d'organiser l'agence en amont avec l'objectif d'être prêts pour le 1er janvier 2010. Le préfet de région présidera l'agence, mais le directeur conservera la responsabilité opérationnelle de l'établissement.

Il a souligné qu'il n'existe aujourd'hui aucune enveloppe régionale des dépenses d'assurance maladie, mais qu'une telle création, sous la forme d'un objectif régional des dépenses d'assurance maladie (Ordam), peut être envisagée afin de fixer un cadre à la régulation des dépenses opérée par chaque ARS.

La vocation nouvelle des établissements de santé est d'adapter leur offre à l'évolution des demandes et des techniques. Cela peut passer par des évolutions des activités des établissements, sans se traduire par leur fermeture définitive.

Par ailleurs, il a indiqué que, dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, le comité de modernisation réuni le 4 avril dernier a prévu la création de directions régionales de la cohésion sociale intégrant les compétences non sanitaires des Drass.

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Marie Payet

a voulu savoir si des adaptations spécifiques sont prévues pour les départements d'outre-mer qui présentent des caractéristiques sanitaires et institutionnelles spécifiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

a estimé que les ARS ne peuvent pas être de simples ARH améliorées mais doivent faire preuve d'une efficacité supérieure. Il s'est étonné que les départements, qui financent le secteur médicosocial, ne puissent être membres du directoire de l'ARS et a fait part de son opposition au regroupement, dans une même structure, de compétences relatives à l'organisation de l'offre de soins et à la régulation des dépenses de santé, car cet opérateur sera juge et partie.

Il a voulu savoir comment seront formés les directeurs d'ARS et si l'objectif régional de dépenses d'assurance maladie (Ordam) comprendra également les dépenses de l'Etat consacrées aux politiques régionales de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

a estimé que cette réforme comporte des aspects positifs pour l'amélioration des relations ville-hôpital, mais soulève également de nombreuses difficultés, notamment en cas d'extension de la compétence des ARS à la santé publique et au secteur médicosocial. Par ailleurs, cette réforme ne permet pas de répondre aux principaux défis auxquels le système de santé doit faire face, c'est-à-dire celui de son financement, d'une part, et des réponses apportées aux attentes de nos concitoyens en matière d'accès aux soins, d'autre part. L'organisation de la permanence des soins illustre cette situation : le manque de médecins volontaires et l'absence d'un financement suffisant ne seront pas réglés par la seule création de l'ARS. La réunion des compétences relatives à la gestion du risque et à l'organisation de l'offre de soins au sein d'une même structure soulève d'autres difficultés, tout comme la réunion de personnels qui n'ont ni le même statut, ni la même culture professionnelle. En conséquence, la prudence commande de procéder à une montée en charge par palier afin d'éviter de provoquer des dysfonctionnements supplémentaires dans le système de santé.

Enfin, il a souligné que la création des ARS nécessite une réflexion sur le pilotage national de ces structures qui, aujourd'hui, n'est prévue qu'à travers un comité de coordination réunissant l'Etat et l'assurance maladie.

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

a voulu connaître le rôle de l'Etat dans le pilotage des ARS.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Leclerc

a souligné qu'il est nécessaire d'aller au bout de la réflexion sur la gouvernance en s'interrogeant sur la légitimité actuelle d'un financement de l'assurance maladie assis sur les cotisations salariales. La logique de la fusion des services de l'assurance maladie et de l'Etat devrait s'accompagner d'un basculement des modes de financement vers l'impôt, solution d'ailleurs plus conforme à la dimension solidaire de l'assurance maladie.

Debut de section - Permalien
Philippe Ritter, ministre de la santé

a reconnu la nécessité de tenir compte des spécificités des régions monodépartementales.

Il a estimé que la mise en oeuvre des ARS doit être précédée d'une réflexion sur les relations qu'entretiendront ces structures avec les conseils généraux pour la gestion des établissements médicosociaux, en estimant que ces derniers doivent plutôt être considérés comme des partenaires que comme des membres du directoire de l'agence, quitte à mettre en place des structures de concertation permanente.

Il s'est prononcé en faveur d'un comité de sélection chargé de détecter les futurs directeurs d'agences régionales de santé ; il a préconisé de dispenser une formation initiale et continue, qui devra être mise en place.

En conclusion, il a souligné que le rapport qu'il a remis à la ministre de la santé souligne la nécessité d'améliorer le pilotage national du système de santé et une meilleure coordination des politiques menées par l'Etat et l'assurance maladie, la dichotomie actuelle étant source d'inefficacité.

La commission a ensuite procédé à l'audition de M. Yves Bur, député, rapporteur de la mission d'information de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale sur les ARS.

Debut de section - Permalien
Yves Bur, député

a d'abord insisté sur la conviction largement partagée par l'ensemble des acteurs de la nécessité de revoir l'organisation du pilotage du système de santé. Celui-ci est aujourd'hui illisible, en particulier pour les professionnels de santé et les patients, qui ne savent pas qui décide et où se situent les responsabilités. Le diagnostic de la situation actuelle fait l'objet d'un vrai consensus, de même que l'importance de retenir, pour le nouveau système de pilotage, un périmètre large comprenant à la fois les soins de ville, l'hôpital et le secteur médicosocial ainsi que la politique de santé publique. En effet, on estime aujourd'hui à cinq millions le nombre de journées d'hôpital inutiles, soit 20 % des séjours hospitaliers ou encore 2 milliards d'euros de dépenses qui pourraient être redéployés vers des structures en aval.

Par ailleurs, même si des progrès ont été enregistrés, notamment avec la loi de 2004, on constate encore beaucoup d'inégalités en matière de santé avec le creusement des déséquilibres entre des catégories privilégiées qui peuvent profiter pleinement du système et des classes défavorisées qui ont plus de difficultés à y accéder. C'est pourquoi il est impératif d'avoir une approche plus globale et plus efficace de l'ensemble des politiques et d'en assurer la régionalisation. La question de la proximité est désormais impérative pour pouvoir tenir compte de la diversité des situations de terrain. De ce point de vue, les agences régionales de santé (ARS) ne doivent pas être de simples transpositions des agences régionales de l'hospitalisation (ARH) car il faut leur confier un véritable pouvoir d'appréciation et de décision local.

La question centrale, qui fait d'ailleurs l'objet de quelques divergences avec le rapport du préfet Ritter, est celle du lien entre la mission d'organisation et la mission de régulation des dépenses au sein des ARS. Il faut en effet tenir compte de l'évolution du rôle de l'assurance maladie qui, depuis la réforme de 2004, n'est plus seulement un liquidateur mais aussi un rembourseur avisé et un gestionnaire du risque. Il serait dommage de remettre en cause cette nouvelle dynamique qui est le principal acquis de la dernière réforme.

Par ailleurs, il est très important de ne pas faire de l'organisation la seule réponse au problème actuel de la régulation du système de santé. Cela signifie que la simple réorganisation des structures ne pourra être suffisante. La création d'une administration unique de la santé, qui serait à la fois responsable du système comme employeur, organisateur et régulateur, serait un cas unique en Europe. Partout ailleurs, que ce soit en Grande-Bretagne, dans les pays nordiques ou en Allemagne, les responsabilités sont partagées, en particulier avec l'implication des échelons administratifs locaux. De même, si les moyens des Drass, des Ddass, des missions régionales de santé (MRS) et des ARH devront être regroupés, il faut avoir conscience que ce ne sera pas forcément un gage d'efficacité puisque les performances actuelles de chacune de ces administrations sont déjà insuffisantes. Il ne faudrait pas que les problèmes d'organisation deviennent prioritaires par rapport aux questions de régulation. De ce point de vue, le récent rapport de l'Igas sur les contrats de retour à l'équilibre des hôpitaux est très éclairant. Il montre bien les limites de tout exercice institutionnel si celui-ci n'est pas accompagné d'une démarche réellement vertueuse.

a ensuite souligné la nécessité de prévoir un pilotage national des ARS. Si le rapport de l'Assemblée nationale a d'emblée écarté, dans ses conclusions, un pilotage par le ministre de la santé, il a tout de même insisté sur l'importance d'un travail étroit entre les services du ministère et ceux de l'assurance maladie. C'est pourquoi il suggère la mise en place d'un secrétaire général qui aurait pour charge de piloter les ARS. Un triple enjeu se pose en effet à l'échelon national : l'organisation de l'offre de soins, la gestion des hôpitaux publics par un Etat à la fois propriétaire et employeur, enfin, la régulation des dépenses du système. La difficulté est de coordonner et de rendre cohérente cette triple mission à laquelle s'ajoutent les responsabilités de l'Etat stratège et normateur dans le domaine de la santé publique. C'est de l'efficacité de l'organisation nationale que dépendra l'efficacité des ARS. Il est donc impératif de clarifier les responsabilités à cet échelon.

Au niveau régional, il paraît essentiel de mettre de véritables outils de gestion entre les mains des ARS afin que celles-ci puissent agir dans des délais relativement brefs. Ainsi, sur l'ensemble du territoire, de graves problèmes de présence médicale vont très bientôt se poser avec des risques élevés en termes de sécurité sanitaire ; les ARS devront pouvoir les résoudre à leur niveau. Pour le pilotage de la gestion du risque, la question des conventionnements entre les ARS d'une part et les CPAM, le régime social des indépendants (RSI) et la mutualité sociale agricole (MSA) d'autre part, devra être résolue. Cela suppose une réforme préalable de l'assurance maladie et, en particulier, de ses structures régionales, Urcam et Cram. Le rapport de l'Assemblée nationale propose la création d'une direction régionale de la gestion du risque qui ferait l'interface entre la caisse nationale et les caisses primaires. Les relations entre les ARS et les directions régionales de la gestion du risque devront ensuite être formalisées. Il faut avoir conscience des grandes différences de culture entre les 11 000 fonctionnaires de l'Etat intervenant sur ces questions et les 80 000 agents de l'assurance maladie.

Un dernier élément apparaît essentiel pour la réussite de la réforme, celui de la création d'une nouvelle culture de responsabilité dans l'organisation qui sera mise en place. A l'échelon national, il est important que le Parlement ait une vision claire de ses responsabilités. Pour pouvoir assurer un pilotage fin du système de santé, il faudrait sans doute prévoir chaque année, à côté de la loi de financement de la sécurité sociale, le vote d'une loi d'organisation et d'accompagnement. Par ailleurs, les responsables du pilotage national des ARS devront disposer de feuilles de route claires permettant un contrôle et une évaluation approfondis par le Parlement. A l'échelon régional, les directeurs des ARS devront également disposer d'objectifs détaillés et bénéficier d'une rémunération en grande partie liée au mérite. Cette nouvelle culture de responsabilité devra s'étendre à chacun des acteurs sur le terrain et notamment aux directeurs d'établissement de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Vasselle

a insisté sur le défi fondamental de la nouvelle réforme qui sera de trouver un pilote efficace pour coordonner à la fois l'offre de soins et la régulation des dépenses. Il est essentiel que les futures ARS ne soient pas calquées sur les ARH, c'est-à-dire que la priorité ne soit pas celle de la politique de l'emploi au lieu de la politique de santé publique. De ce point de vue, l'organisation d'une meilleure coordination entre les soins de ville et l'hôpital est une nécessité. Il a souhaité savoir si la gestion du risque doit être assurée par les ARS elles-mêmes ou par l'assurance maladie qui aurait un lien conventionnel avec les nouvelles agences. Il a voulu connaître la nature des outils qui pourraient être mis en oeuvre par les ARS pour assurer une meilleure organisation de l'offre de soins à l'hôpital. Il s'est enfin interrogé sur la place des assurances complémentaires dans la nouvelle architecture et sur le rôle qui pourrait être attribué aux départements dans les instances des ARS pour la partie médicosociale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Milon

est convenu de l'importance du renforcement du rôle du Parlement ainsi que de la régionalisation du système et de la meilleure prise en compte des questions de proximité. Toutefois, il s'est interrogé sur l'esprit « régional » de fonctionnaires de l'Etat nommés par le Gouvernement et sur l'absence des départements dans le pilotage du système. Enfin, ne serait-il pas utile de dissocier l'offre de soins et la régulation des dépenses ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bernard Cazeau

s'est également interrogé sur la nécessité de distribuer l'organisation de l'offre de soins et le contrôle des dépenses. Il a fait valoir les intérêts actuels des gestionnaires syndicaux dans les structures de l'assurance maladie. Enfin, il a souhaité savoir quelle serait la position des élus locaux, s'ils auraient un simple rôle dans le conseil d'orientation des ARS ou bien un rôle plus actif dans la gestion du système.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

a demandé si la création de vingt-deux ARS n'est pas excessive et si la moitié seulement ne suffirait pas. Il a voulu savoir quel sort serait réservé aux directeurs d'hôpitaux qui, en dépit de la signature de contrats de retour à l'équilibre, continuent à afficher des déficits dans leurs établissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Etienne

a souhaité savoir si les ARS disposeraient réellement des moyens de résoudre les problèmes de démographie médicale et d'organisation de l'offre de soins sur le terrain.

Debut de section - PermalienPhoto de François Autain

a estimé que la réforme des ARS ne pourrait à elle seule résoudre les problèmes du système de santé, ceux-ci nécessitant avant tout des mesures d'accompagnement financières. Ainsi, les problèmes de désertification médicale ou de permanence de soins ne sont pas seulement d'ordre organisationnel ; ils se posent d'abord en termes de moyens humains et financiers. Il s'est interrogé sur les éventuels conflits de compétences entre le préfet de région et le directeur de l'ARS, par exemple en cas de crise sanitaire. Il a soulevé un paradoxe dans la proposition de l'Assemblée nationale qui souhaite créer une autorité administrative indépendante pour le pilotage national des ARS tout en plaçant celle-ci sous la présidence du ministre de la santé. Enfin, il a rappelé l'excellente proposition du rapport du Sénat sur le médicament qui consiste à donner à l'assurance maladie la compétence de fixer le prix des médicaments.

Debut de section - Permalien
Yves Bur, député

a souligné l'importance d'insuffler une nouvelle culture de responsabilité dans l'ensemble du système. Certes, aujourd'hui, un centre de gestion a été créé, et quelques directeurs d'hôpitaux ou d'ARH ont été relevés de leurs fonctions. Mais il faut que les élus locaux aient des positions courageuses et que les directeurs d'établissements dressent des tableaux réels de leur activité. La future loi « santé, patients, territoires » devra mettre en place les outils adaptés et renforcer les pouvoirs et les responsabilités des directeurs d'hôpitaux, en particulier à travers l'élaboration de plans stratégiques pluriannuels qui devront comporter des éléments d'évaluation précis avec des déclinaisons dans chacun des pôles de l'hôpital. L'absence de mouvement est une des causes des difficultés de l'hôpital public qui doit donc se réformer, comme les cliniques privées l'ont fait au cours des dernières années.

En matière de démographie médicale, beaucoup de mécanismes ont déjà été expérimentés mais avec des résultats largement insuffisants. Il faudra donc que les ARS disposent d'outils réellement incitatifs mais sans doute aussi coercitifs.

Une place devra être trouvée pour les partenaires sociaux au niveau régional. Il est important qu'une réelle démocratie sanitaire puisse exister à cet échelon, ce qui devrait entraîner la réforme des conférences régionales de santé. Pour les ARS, à côté de l'exécutif et du directeur, il faudra créer un conseil tout en réfléchissant bien à la nature de celui-ci. En effet, il ne faut pas donner un signal de confusion sur l'autorité décisionnelle régionale. A cet égard, on peut rappeler le regret de certains préfets d'avoir perdu un certain nombre de prérogatives au moment de la mise en place des ARH.

La cohérence entre les soins de ville, l'hôpital et le secteur médicosocial est un impératif car une des clés de la crise hospitalière actuelle réside dans la mauvaise coordination entre ces secteurs. Cela rend obligatoire d'associer les départements aux décisions de l'ARS mais la question de la gestion des ARS au niveau départemental ne doit pas conduire à recréer l'équivalent des Ddass. Aussi pourrait-on peut-être envisager de mettre à la disposition des départements les agents de tarification des Ddass.

a considéré que la véritable finalité de la réforme est l'optimisation du parcours de soins du patient qui doit être plus efficace et plus cohérent en évitant les journées d'hôpital inutiles et les consultations multiples. C'est autour de cet objectif que l'ensemble des acteurs du système de santé doivent être mobilisés. Il ne s'agit donc pas seulement d'une réforme administrative et d'organisation mais de la mise en place d'une politique mieux coordonnée et de proximité. Même si l'échelon régional n'est pas parfait, c'est le niveau auquel aujourd'hui se structurent la plupart des politiques publiques.

Il a déclaré n'être pas hostile au fait que le ministre de la santé puisse présider l'agence nationale qu'il appelle de ses voeux.

Enfin, s'agissant du prix des médicaments, le système actuel est relativement stable et lisible ; toutefois on peut aussi imaginer que l'assurance maladie fixe elle-même le prix des médicaments, en absorbant le comité économique des produits de santé (Ceps).