La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Au cours d'une première réunion tenue le matin, la commission entend tout d'abord une communication de M. Philippe Marini, rapporteur général, sur la situation économique et financière de la République tchèque, du Royaume-Uni et de la République d'Irlande.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Mes chers collègues, le bureau de la commission vient de rencontrer une délégation de la commission des finances du Bundestag. Nos échanges ont été très fructueux, et nous avons convenu de nous retrouver régulièrement pour discuter de sujets qui nous sont communs, tels que la gouvernance européenne, les enjeux de la dette souveraine ou la restructuration ou pas des dettes grecques, irlandaises et portugaises.

Dans le prolongement de ce rendez-vous, le premier point de l'ordre du jour de ce matin est relatif à la communication du rapporteur général sur la situation économique et financière de la République tchèque, du Royaume-Uni et de la République d'Irlande.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Mes chers collègues, je débuterai ma présentation par une série d'informations globales sur les finances publiques de nos partenaires européens. Ces données confirment la sortie de crise et le fort potentiel de la croissance allemande, ainsi qu'un phénomène de reprise plus lent au Royaume-Uni qu'en France. De plus, je dirai que le débat sur le réalisme des prévisions de croissance concerne nos deux pays. Les chiffres que je vous présente démontrent également la question de l'ampleur des réductions de déficit public que nous devons réaliser, et notamment la profondeur du « creux » irlandais. De ce point de vue, je sous-estimais la gravité de la situation irlandaise avant de me rendre dans ce pays.

Les graphiques indiquent également que, malgré une récession deux fois plus forte en Allemagne qu'en France, le déficit public de celle-ci n'a jamais dérapé au-delà de 3,3 % du PIB. Les finances publiques allemandes sont indéniablement plus robustes que celles de notre pays.

En outre, contrairement à ce que l'on entend ici ou là, l'Italie s'impose une réelle discipline sur la trajectoire de ses finances publiques, et ce depuis le milieu des années 2000. Elle y est en effet contrainte par une forte pression des marchés.

L'ensemble de ces chiffres m'amène à poser la question suivante, à laquelle il est aujourd'hui difficile de répondre : quel peut être l'effet macroéconomique sur l'économie réelle de la réduction simultanée de l'ensemble de ces dettes publiques ?

Je terminerai cette présentation liminaire en abordant l'enjeu essentiel, à savoir la soutenabilité de la dette. La France et l'Allemagne ont des courbes d'endettement proches, même si on ne peut exclure un risque de décrochage de la France. Les pays d'Europe centrale et orientale se maintiennent à un niveau de dette inférieur à 60 % du PIB. Enfin, la Grande-Bretagne et l'Irlande dépassent nettement le plafond de 60 %, alors qu'elles maîtrisaient leur dette publique avant la crise. Ainsi, le Royaume-Uni a rejoint le niveau d'endettement public de la France et de l'Allemagne, tandis qu'en deux ans, l'Irlande a rejoint celui de l'Italie.

De même, le graphique relatif à la balance des paiements souligne le lien existant entre le solde extérieur d'un pays et la soutenabilité de ses finances publiques. On constate la dégradation de la situation irlandaise depuis 2004, et le fait que la Grèce et le Portugal sont entrés dans l'euro avec des situations de balance extérieure déjà dégradée. Le solde extérieur de l'Espagne a quant a lui plongé - coïncidence ou non ? - avec la création de l'euro. A l'inverse, la Belgique n'a connu un déficit courant qu'en 2008. De fait, ce pays n'est pas encore menacé par la sanction des marchés. Pourtant, il s'agit à ce jour du seul État membre qui n'est pas en mesure de faire voter par le Parlement son programme de stabilité et de croissance.

J'en viens maintenant à quelques observations sur la République tchèque. De façon générale, ce pays se caractérise par la prudence de son engagement politique européen, en raison notamment de la personnalité du Président de la république, Vaclav Klaus. Depuis juillet 2010, le Gouvernement rassemble une coalition sous le leadership du parti de l'ODS, qui s'est allié avec deux autres partis, dont l'un est pro-européen et a fait campagne sur le thème du redressement des comptes publics. La République tchèque a pris l'engagement d'adhérer à la zone euro dès 2004. Cependant, aucune date précise n'a été fixée pour le moment. Ce pays entretient une relation ambivalente avec la Slovaquie, partenaire aux positions européennes souvent individualistes.

Sur certains sujets, la République tchèque est un allié pour la France. A cet égard, il me semble qu'il ne faut pas négliger l'importance des relations bilatérales dans la mécanique européenne, notamment pour construire des majorités au sein de l'Union. Antifédéraliste, la République tchèque privilégie l' « intergouvernementalisme » et se méfie de tout renforcement des pouvoirs de la Commission européenne. De plus, elle est favorable à l'énergie nucléaire, position qu'elle a confirmée après la catastrophe de Fukushima, et qui se traduit par des relations étroites avec la France dans ce domaine. Les Tchèques sont heureux de se distinguer de l'Allemagne sur certaines positions stratégiques. C'est un moyen pour eux de s'individualiser par rapport à leur grand voisin.

Cependant, des sujets de désaccord existent également entre la France et la République tchèque. C'est le cas notamment sur la question de l'effort demandé à l'Irlande en matière d'impôt sur les sociétés.

La République tchèque s'est profondément transformée, à un rythme soutenu, depuis le milieu des années 1990. Il s'agit aujourd'hui d'un pays ouvert et exportateur, notamment en direction de l'Union européenne. Sa santé économique est très dépendante de l'Allemagne. Son niveau de vie moyen a rejoint celui de l'Europe de l'ouest, même si de fortes disparités demeurent entre la capitale et la province. Le PIB par habitant atteint 82 % de la moyenne de l'Union européenne. Sur ce même critère, la région de Prague dépasse l'Ile-de-France. Elle est la cinquième région européenne derrière le Grand Londres, Luxembourg, Bruxelles, et Hambourg.

Malgré tout, les salaires restent 3,7 fois inférieurs à ceux de la France, même si l'écart s'est réduit, puisqu'il était encore de 1 à 7,5 en 1997. J'en déduis que la République tchèque se verra vite confrontée aux même problèmes de compétitivité que nous, et qu'elle ne restera pas une terre d'accueil pour les délocalisations.

Je voudrais maintenant insister sur la bonne santé du système bancaire tchèque, caractérisé par son excès de liquidité, ce qui doit être souligné ! Les prêts représentent 70 % des dépôts. La plupart des banques appartiennent à l'étranger, mais elles agissent avec prudence. En revanche, les investissements marquent le pas et le pays est menacé par le risque récurrent de poussées inflationnistes. La Slovaquie est beaucoup plus aventureuse que la République tchèque et parvient à attirer plus d'investissements.

J'en viens à la stratégie fiscale du nouveau gouvernement tchèque, dont l'objectif est de stabiliser les charges pesant sur le travail, en majorant les impôts indirects. En mai 2011, le Parlement a ainsi voté la mise en place d'un taux unique de TVA à 17,5 % à compter de 2013. Aujourd'hui, il existe un taux réduit à 10 % et un taux normal à 20 %. Le taux réduit passera à 14 % en 2012. De plus, une réforme de la fiscalité des personnes est en cours de réflexion, qui serait fondée sur une harmonisation de l'assiette de l'impôt sur le revenu et de l'assiette des prélèvements sociaux. Enfin, le gouvernement tchèque entend supprimer les niches fiscales qui mitent l'impôt sur le revenu, en conservant seulement quelques dépenses fiscales correspondant à des politiques d'intérêt général (recherche, dépendance, politique familiale, dons aux oeuvres).

Pour conclure ma présentation sur la République tchèque, j'indique rapidement qu'elle a su trouver en matière de quotas de CO2 un dispositif, qui me semble à la limite de la conformité avec le droit communautaire, pour rendre une fraction des quotas payants dès 2011.

En ce qui concerne le Royaume-Uni, je voudrais tout d'abord souligner que ce pays s'est livré à quelques gestes européens. Tout d'abord, un programme de convergence budgétaire a été lancé. En effet, même sans être lié par les obligations du pacte de stabilité, Londres subit les mêmes menaces sur sa dette souveraine que les membres de la zone euro. En outre, le pays participe au dispositif de soutien à l'Irlande, ce qui s'explique notamment par les liens économiques entre les deux pays.

Le nouveau gouvernement issu de l'alternance politique s'est également lancé dans la rénovation de l'architecture de la supervision financière, qui passe par l'abandon du modèle britannique de l'autorité unique (FSA) et par la création de trois nouvelles structures : un régulateur macro-prudentiel, un régulateur micro-prudentiel, sous l'autorité de la banque d'Angleterre, et une autorité de protection des consommateurs. Le pays s'est aussi rallié à la création de l'autorité européenne des marchés financiers (AEMF), dont le siège est à Paris. Malgré tout, les Britanniques restent fidèles à leurs spécificités nationales dans un certain nombre de domaines, à commencer par la politique monétaire. Il existe en effet une forte divergence entre la politique monétaire de la banque d'Angleterre et celle pratiquée par la Banque centrale européenne (BCE). Malgré le niveau de l'inflation, le débat sur la hausse des taux n'est pas encore tranché Outre-manche. Il existe une vraie vie collégiale au sein du comité de politique monétaire britannique, caractérisé par sa grande culture de la transparence.

Enfin, Londres ne s'est pas associée au pacte euro + et à une politique de concurrence fiscale. Au contraire, dans le cadre du budget 2011-2012, le gouvernement britannique s'est lancé dans une politique de concurrence fiscale, à travers la réduction progressive de 27 % à 23 % du taux nominal de l'impôt sur les sociétés et l'instauration de mesures en faveur des entreprises, notamment dans le domaine du capital-investissement. Enfin, le Royaume-Uni a récemment relevé son taux de TVA de 17,5 % à 20 %. De ce point de vue, il me semble que l'on peut parler de convergence à la hausse des taux de TVA en Europe.

S'agissant de l'Irlande, je voudrais tout d'abord rappeler l'origine de la crise. On ne peut pas comparer ce pays au cas de la Grèce, car l'Irlande était un pays très vertueux sur le plan budgétaire, mais elle a laissé se développer une bulle immobilière au coeur de son système financier. C'est le système du crédit à taux variable alloué à des débiteurs sans véritable appréciation des capacités réelles de remboursement, qui, avec l'effet de levier du crédit hypothécaire, a été dévastateur, d'autant plus que les banques irlandaises, contrairement à la République tchèque, étaient toutes sous contrôle irlandais. Ce pays ne compte que 4,4 millions d'habitants. Il a été victime d'un aveuglement collectif, d'une faillite de la régulation financière, voire de l'endogamie d'un petit système et de la fascination du modèle américain. La pratique des subprimes à l'échelle irlandaise a ainsi eu des effets beaucoup plus dévastateurs et dramatiques qu'à l'échelle du territoire américain. Enfin, la politique budgétaire procyclique du pays n'a rien arrangé.

Aujourd'hui, le système bancaire est sous perfusion et l'Etat est insolvable. Les problèmes de liquidité étaient apparus dès 2008. La décision du gouvernement irlandais de l'époque de garantir la totalité du système bancaire a transformé les dettes privées en dettes publiques. On estime que le total des recapitalisations effectuées à ce titre pourrait atteindre 100 milliards d'euros. Le déficit public s'élève à 32 % du PIB en 2010, et la dette devrait dépasser les 120 % du PIB en 2012.

Le retour en arrière a ainsi été très brutal, tant en termes de PIB nominal que réel. De plus, le marché du travail irlandais s'est avéré très volatil, puisque le pays comptait en 1990 le deuxième plus fort taux de chômage en Europe, puis le deuxième taux le plus faible dans les années 2000. Aujourd'hui, son taux de chômage est à nouveau parmi les plus élevés de la zone euro.

Les Irlandais considèrent que le fait de bénéficier d'un programme d'assistance mené par l'Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international (FMI) est normal, et que les conditions ne leur sont pas favorables. En outre, l'image du FMI est meilleure aujourd'hui en Irlande que celle des institutions européennes perçues comme responsables de l'austérité actuelle.

Le pays est donc engagé dans un plan d'ajustement budgétaire très sévère, dont le premier objectif est le retour à l'équilibre primaire pour rendre la dette soutenable. Il reste deux inconnues : le taux de croissance et la date de retour de l'Irlande sur le marché, ce qui pose aussi la question du besoin potentiel de financements additionnels du Fonds européen de stabilité financière (FESF) et des autres créanciers. L'ajustement budgétaire engagé repose aux deux tiers sur les dépenses, tandis qu'est également initiée la reconstruction du système fiscal, lequel était avant la crise beaucoup trop dépendant du secteur immobilier. De fait, plusieurs mesures ont été prises ou sont envisagées : l'augmentation du taux normal de TVA, de 21 % à 23 %, la création d'un deuxième taux réduit en faveur du tourisme, à 9 %, un élargissement de l'assiette de l'imposition des revenus, à travers la création d'une sorte de CSG progressive, d'une taxe foncière et d'une taxe sur l'eau.

En revanche, l'impôt sur les sociétés reste le tabou irlandais. Le taux de cet impôt y est en effet considéré comme un élément de compétitivité, au même titre que le coût du travail dans d'autres Etat, dont l'économie est désormais « structurellement dépendante ». Pour mémoire, ce taux était passé de 32 % à 12,5 % entre 1998 et 2003. Il se caractérise par une assiette non « mitée », avec un taux réel proche du taux nominal. Il existe aussi un taux majoré de 25 % applicable aux bénéfices « passifs », mais le produit de ce dernier taux ne représente que 10 % du total. L'Irlande s'est également résolue à instaurer en 2010 une législation sur les prix de transfert au sein d'un groupe.

Au total, ce pays est devenu fortement dépendant des multinationales qui s'en servent de « base » en Europe, ce qui crée un écart important entre le PIB, c'est-à-dire la production dans un pays donné, et le revenu national brut, qui mesure les entrées et les sorties de revenus dans un pays. Les sorties de bénéfices excèdent largement les entrées, alors qu'en France et en Allemagne, les deux s'équilibrent.

Le modèle économique irlandais pose donc de réels problèmes. Certes, la présence de nombreuses multinationales non affectées par la crise, tels les grands groupes pharmaceutiques, offre de meilleures perspectives de reprise, mais dans quelle proportion en profite réellement l'économie irlandaise ?

La crise a créé un désenchantement européen en Irlande. Le gouvernement issu des dernières élections a dû aligner ses positions sur celles de son prédécesseur. Je souligne au passage l'attitude ambivalente des représentants du FMI dans cette affaire, qui considèrent que le relèvement du taux de l'impôt sur les sociétés ne serait pas cohérent avec les objectifs du plan de redressement, en oubliant de rappeler que, si la zone euro ne converge pas sur le plan fiscal, elle implosera et la solidarité européenne ne pourra donc plus bénéficier à l'Irlande.

Au total, nous nous trouvons aujourd'hui dans une situation très confuse et contradictoire de la relation entre l'Union européenne et l'Irlande.

En conclusion, on peut s'interroger sur les leçons que l'on peut en tirer pour la zone euro. Je crois qu'il faut mettre l'accent sur les questions fondamentales suivantes : pourra-t-on tenir jusqu'en 2013 sans défaut d'un Etat souverain, et combien de temps la zone euro peut-elle s'accommoder d'Etats qui ne se financent pas sur les marchés ? A l'inverse, quelles seraient les conséquences sur le système financier d'un défaut avant 2013 ? Comment faire pour disposer de scénarii clairs et chiffrés ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

A défaut d'être rassurante, votre présentation est éclairante. Elle nous incite à adopter une vision plus globale des dettes souveraines détenues par les banques des différents pays, afin de mieux apprécier le risque systémique, et à nous interroger sur la soutenabilité des plans qui excluent toute restructuration de la dette. Il ne faut pas se leurrer. Nous sommes à un moment crucial pour l'Europe, et il ne faut pas se cacher que l'euro pourrait imploser avec des conséquences très graves. Il serait intéressant de pouvoir explorer les différentes hypothèses résultant d'une implosion de l'euro. La voie la plus prometteuse est sans doute celle qui consiste à renforcer la gouvernance européenne. Votre communication complète la vision européenne, que nous avions commencé à nous forger en nous rendant aux Pays-Bas, en Allemagne et en Belgique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Sergent

Peut-on savoir à quel niveau sont engagées les banques françaises en Irlande ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Existe-t-il des études comparatives des crises immobilières qui ont secoué les Etats-Unis, l'Irlande et l'Espagne ?

En outre, la presse a annoncé ce matin que l'Allemagne semblait vouloir aider la Grèce et donc ne pas restructurer sa dette.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

La question de M. Sergent recoupe les demandes que nous avons présentées au gouverneur de la Banque de France. Nous ne disposons pas encore de ces réponses en ce qui concerne le montant des créances sur les différents Etats en difficulté, groupe par groupe, pour chacun des six grands groupes bancaires français.

Il existe des similitudes entre les trois crises immobilières citées par Pierre Bernard-Reymond : le crédit à taux variable, le crédit hypothécaire, l'emballement des valeurs d'actifs, et l'absence de surveillance, sur ce point, de la part des banques centrales concernées. Il est tout à fait clair que notre système de financement de l'immobilier est beaucoup plus sain et solide que celui des pays anglo-saxons, repris par l'Espagne. Notre dispositif a su tirer les conséquences de la crise immobilière des années 1990. De fait, celle de 2008-2009 a été beaucoup moins pénalisante en France. Il n'y a pas eu de rupture financière importante cette fois-ci. Cependant, je relève l'emballement des ordres de grandeur à quinze ans d'écart, qui est un phénomène impressionnant, dû à l'amplification des marchés et à l'effet de levier notamment. Nous n'avons plus les mêmes unités.

La commission entend ensuite une communication de M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, sur les délégations de compétences dans le domaine du logement (aides à la pierre et contingents préfectoraux).

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Le rapport de contrôle que je vous présente fait suite à une « interpellation » de Gérard Miquel, lors de la présentation du rapport sur le projet de budget 2011 de la mission « Ville et logement ». Il s'était interrogé sur l'existence d'un bilan de la délégation des crédits d'aide à la pierre aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ou aux départements. La période est également propice puisque l'année 2011 marque l'entrée dans une phase de renouvellement des conventions de délégations dont les premières ont été signées en 2005 et qui ont une durée de six ans. J'évoquerai également le sujet beaucoup plus limité des délégations des contingents préfectoraux de réservation de logements sociaux, qui présentent des similitudes puisqu'il s'agit de la même modalité juridique et que leur création figurait dans le même texte législatif.

Un bref rappel du cadre d'exercice des délégations d'aides à la pierre est nécessaire. C'est une faculté ouverte à l'occasion de l'acte II de la décentralisation par la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 qui se distingue juridiquement du transfert de compétence, l'Etat restant garant du droit au logement. Toutefois la délégation avait été présentée à l'époque par le Gouvernement comme une étape sur la voie de la décentralisation.

La délégation couvre le financement global des aides à la pierre en direction du parc de logement locatif social (LLS) et du parc privé, à travers les subventions de l'agence nationale de l'habitat (ANAH). Les bénéficiaires sont les EPCI dotés d'un programme local de l'habitat (PLH) et départements qui n'interviennent que sur les territoires non couverts par des EPCI délégataires. La durée des conventions est de six ans renouvelables, sans que ce renouvellement ait un caractère systématique.

Le premier volet du bilan des délégations est quantitatif. En 2011, il y a 108 délégataires, 27 départements et 81 EPCI. Cet effectif a connu une montée en puissance rapide surtout pour les départements. Mais on constate une stagnation du nombre des délégataires depuis 2008. En 2011, un département, les Côtes d'Armor, s'est retiré à la suite de la prise de délégation par une communauté d'agglomération. Ce tassement s'explique par le fait que le potentiel des délégataires est « saturé », tous ceux qui avaient un réel intérêt à se saisir de cette opportunité l'ayant déjà fait. Toutefois, la prise de délégations est assez hétérogène sur le territoire. On note en particulier que l'implication des départements est plus forte dans les régions de l'Ouest et de l'Est de la France et que la signature d'une convention de délégation est exceptionnelle en Ile de France.

La part des crédits délégués dans l'ensemble des aides à la pierre montre l'importance de la délégation. Elle est supérieure à la moitié depuis 2007 en ce qui concerne les crédits à destination du logement locatif social ; pour les subventions de l'ANAH, elle évolue entre 43 % et 50 %.

Le volet qualitatif du bilan des délégations est plus délicat à établir.

La délégation a eu un effet d'entrainement certain sur l'implication croissante des EPCI et des départements dans la politique du logement et de l'habitat depuis 2004. Cet engagement se vérifie par plusieurs paramètres : la création de services spécifiques au sein des collectivités, l'approfondissement des exercices de programmation et l'effort financier des collectivités venant en complément de celui de l'Etat. Pour les départements, l'effort budgétaire a été doublé entre 2004 et 2007 et atteignait en 2007, selon l'Association des départements de France, entre 1 et 1,3 milliard d'euros. Il en est de même pour les EPCI qui ont multiplié par 3,5 leur apport financier. Pour autant, les résultats obtenus en termes de construction de logements sont difficilement attribuables avec certitude aux vertus du mode de gestion en délégation.

Depuis 2007, le nombre de logements financés en territoire délégué est supérieur à celui des logements financés hors territoire de délégation et la production en territoire délégué atteint 49 % du total de la production de logements sur 2005-2010

De même depuis 2007, les sommes engagées par les territoires délégués sont supérieures à celles engagées hors territoires de délégation et représentent 54 % de l'ensemble des financements, soit 1,6 milliard sur 3,024 milliards d'euros sur la période 2005-2010.

Mais ces chiffres sont aussi dus au fait que les territoires les plus tendus sont en régime de délégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Comment déterminer si la délégation donne de meilleurs résultats ?

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

C'est bien là que réside la difficulté. L'examen plus fin des territoires délégués et des territoires gérés par l'Etat ne permet pas de dégager des conclusions générales si l'on compare les résultats obtenus au regard des objectifs de production de logements.

Les résultats sont contrastés à l'extrême entre les territoires de programmation, indépendamment de leur mode de gestion et la délégation n'est pas déterminante. Les écarts résultent plutôt des difficultés propres aux territoires et parfois du manque de réalisme des objectifs qui reflétaient les ambitions du plan de cohésion sociale.

En termes de performance purement qualitative de l'action publique, le bilan des délégations est mitigé. On note une complexité accrue des procédures dans le circuit administratif de programmation des aides à la pierre qui doit s'adapter à la coexistence de plusieurs types de territoires de programmation. Pour les subventions de l'ANAH, il m'a été indiqué que les temps moyens de traitement d'un dossier d'aide sont augmentés de trois jours supplémentaires pour le délégataire compte tenu des délais de transmission.

Plus fondamentalement, on peut déplorer, de la part de l'Etat, le refus de modifier ses pratiques, notamment pour la répartition régionale des crédits d'aides à la pierre. La détermination des enveloppes régionales n'a pas évolué par rapport à ce qu'elle était avant la délégation.

Quant au bilan en termes de dépenses de fonctionnement et de personnel, il n'a jamais été fait. Mais s'il est sûr que les délégataires ont recruté, l'Etat n'a pas forcément réduit d'autant ses effectifs. D'abord, parce que ses services assurent toujours l'instruction des dossiers de financement sur près de 80 % des territoires de délégation. Mais aussi parce que la délégation de compétence induit une activité supplémentaire liée au pilotage des conventions qui doit être assurée par les agents des services déconcentrés ou de l'ANAH, que l'instruction des dossiers ait été prise par le délégataire ou non.

Enfin, de la part des délégataires comme du côté de l'Etat, on note des lacunes importantes dans le suivi des résultats, la remontée d'information et l'appréciation de la performance qui reste une préoccupation mineure. Ce point a particulièrement été mis en valeur par un audit national de la Direction générale des finances publiques en 2010.

Depuis les années 2009-2010, après une phase d'engouement, on observe un désenchantement des collectivités territoriales à l'égard des délégations. Cela s'explique à la fois par un changement de contexte et par une évolution du modèle des conventions devenu moins attrayant pour les collectivités.

Les premières délégations d'aides à la pierre ont été mises en place dans le contexte favorable et sans doute déterminant du Plan de cohésion sociale (PCS) marqué par une très forte ambition de l'Etat en faveur du logement social. C'était aussi la période de la création ou du renforcement des instruments de la politique locale de l'habitat : programme local de l'habitat (PLH) et plan départemental de l'habitat (PDH). Ce contexte a changé ; il est marqué désormais par la restriction des aides à la pierre, que le plan de relance aura compensé momentanément. Ainsi, après le chiffre record de 131 509 logements sociaux financés au cours de l'exercice 2010, la nouvelle programmation pour 2011 est établie sur un total de 119 000 logements, en diminution dans toutes les régions sauf l'Ile de France et Provence-Alpes-Côte d'Azur. La baisse des crédits se double en outre d'un recentrage accentué sur les zones tendues qui ne sont pas nécessairement les territoires en délégation.

Ces nouvelles orientations concernent aussi l'ANAH qui avait connu des années fastes avec le PCS. Un nouveau régime d'aides est entré en vigueur le 1er janvier 2011. Il a été l'occasion de revoir les priorités en réduisant les aides vis-à-vis des propriétaires bailleurs au profit des propriétaires occupants modestes.

Les délégataires, notamment les départements, se trouvent placés dans une situation plus difficile et moins prévisible. Ils sont confrontés en premier lieu à des incertitudes budgétaires mais aussi à l'impact de la révision de la carte intercommunale et à la redistribution des délégations qui pourrait en résulter. L'intervention des départements n'étant que supplétive, l'émergence de communautés plus puissantes pourrait remettre en jeu les attributions de délégations entre le niveau départemental et celui de l'intercommunalité.

A ce contexte tendu s'ajoutent les conditions plus restrictives des conventions de délégation qui résultent à la fois des modalités de financement de l'ANAH et des nouvelles conventions types.

Le financement de l'ANAH étant désormais assuré sur les fonds d'Action logement, ex-1% patronal, et non plus sur crédits budgétaires, aucune fongibilité n'est plus autorisée entre les crédits LLS et les crédits pour le parc privé. C'est une contrainte supplémentaire qui retire de la souplesse puisqu'auparavant, les conventions autorisaient le basculement partiel des crédits entre les deux formes d'action.

Par ailleurs, faisant suite aux critiques formulées par plusieurs audits, la gestion budgétaire des délégations est devenue plus stricte. De nouvelles clauses ont été introduites pour mettre un terme à certaines dérives et lacunes. Ainsi, par exemple, les conventions dites de « première génération » ne comportaient aucune clause de réajustement budgétaire en cas d'insuffisance de réalisation d'un ou des objectifs fixés. Le représentant de l'Etat n'avait que la possibilité de résilier la convention, disposition qui n'a jamais été mise en oeuvre. Ce point a été très récemment corrigé et désormais le montant des droits à engagement alloués au délégataire pourra être révisé en cas de résultats insuffisants.

Il en est de même des avances de trésorerie dont pouvaient disposer les délégataires compte tenu des règles particulières de versement. L'échéancier de paiement sur quatre ans des crédits de paiement qui était intégré aux conventions obligeait les services de l'État à verser 77,5 % des crédits sur cette durée, quel que soit l'état de réalisation de la convention. De ce fait, certains délégataires avaient bénéficié d'avances de trésorerie qui atteignaient 238 millions d'euros à fin 2009.

Sur un plan plus anecdotique, les nouvelles conventions doivent intégrer une communication sur les autres aides de l'Etat (TVA à taux réduit, exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties et aides de circuit) et les obligations de remontée d'information ont été renforcées.

Tous ces éléments pèsent sur les relations entre l'Etat et les délégataires. Selon les informations qui m'ont été données quelques retraits du système de délégation sont envisagés principalement du côté des départements, même s'il faut rester prudent sur ces annonces.

Evidemment on peut s'interroger sur la capacité de l'Etat à reprendre la gestion de ces aides à la pierre dans l'ensemble des territoires où il les a déléguées.

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Dassault

Qui peut profiter de ce système de délégation d'aides à la pierre ? Les communes en ont-elles le bénéfice ? Je voudrais également redire à quel point je trouve choquant que les communes qui apportent leur garantie aux emprunts contractés pour la construction de logements sociaux ne bénéficient pas, en retour, de réservations de logements dans les mêmes proportions.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Les seules collectivités qui peuvent demander la délégation des aides à la pierre sont les EPCI disposant d'un PLH et les départements. En ce qui concerne les garanties, il faut relativiser le risque encouru par les communes car il existe, en cas de défaillance d'un bailleur, la caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS). Enfin, sur les réservations, il y a aussi des contingents pour l'Etat - nous allons les évoquer - et ceux du 1% Logement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Jégou

De plus, la garantie apportée par la collectivité ne compte pas dans l'endettement de la commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le système de garantie est en effet extravagant. Mais j'ai toujours eu sur ce point un « conflit » avec la CGLLS...

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Revenons aux propositions qui pourraient être formulées pour améliorer la situation des délégations d'aides à la pierre. Il conviendrait en premier lieu que l'Etat se dote des instruments de connaissance qui permettent un vrai suivi des délégations et des comparaisons incontestables.

La deuxième piste consiste à offrir une palette de choix au délégataire. En examinant la situation du département du Lot et celle des Hauts-de-Seine, on voit bien à quel point l'application uniforme d'orientations nationales peut être inadaptée aux circonstances locales. Il faut introduire plus de souplesse dans la définition des objectifs et les modalités de mise en place des aides. Cela passe peut être par le découplage des conventions LLS et parc privé. Des collectivités peuvent être intéressées par un aspect seulement, notamment dans les zones les moins tendues. L'ANAH doit également faire preuve de plus de souplesse dans la définition de ses priorités et mieux prendre en compte des besoins des territoires. Il faut aussi ne plus imposer des changements d'orientation de manière brutale sans égard pour les actions engagées par les délégataires sur la base des priorités initiales.

Enfin, les délégataires ont besoin de visibilité budgétaire et l'Etat doit adapter les durées de conventionnement à sa propre capacité de programmation des crédits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Il faudrait aussi songer à adapter les moyens en personnels.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Faut-il pour autant aller au-delà et reposer la question du passage de la délégation au transfert de compétence ? Il me semble qu'aujourd'hui ni l'Etat ni les collectivités n'y sont prêts. Et cela me semble inenvisageable compte tenu du contexte budgétaire. Mais il faut que l'Etat fasse des efforts pour redonner de l'attractivité aux délégations.

Dans le domaine du logement, l'Etat applique également le procédé de la délégation de compétence à la gestion des contingents préfectoraux de réservation de logements sociaux, dont je rappelle qu'il représente 30 % au plus des logements d'organismes d'HLM, dont 5 % au bénéfice des fonctionnaires.

Historiquement, la délégation a été proposée par certaines préfectures, à titre expérimental, à quelques collectivités en avance en termes de politique de l'habitat parmi lesquelles trois communes des Hauts-de-Seine et celles du syndicat mixte du Mantois dans les Yvelines.

Cette expérimentation a été « légalisée » par la loi du 13 août 2004, à l'initiative du Sénat et après un débat agité qui a abouti à un compromis. Alors que l'idée de départ était celle d'un transfert de compétence sans condition de l'Etat aux maires, le texte prévoit qu'il s'agit d'une délégation très encadrée par l'Etat dont le préfet reste juge de l'opportunité.

Force est de constater que l'Etat n'a pas favorisé cette faculté dont la mise en oeuvre reste très localisée à quatre-vingt-cinq communes, toutes en Ile-de-France, essentiellement dans les Hauts de Seine et le Val d'Oise, et à un seul EPCI, celui de Compiègne.

Pourtant ce type de délégation a obtenu d'excellents résultats. Son principal avantage a été de permettre la reconstitution des contingents mal connus grâce à un travail d'inventaire préalable.

Les collectivités délégataires sont également mieux impliquées et associées notamment grâce au bilan annuel contradictoire et à l'obligation de justifier des résultats des affectations de logements au regard de priorités clairement fixées dans la convention de délégation et ses avenants.

Enfin, ce système permet une bonne application du droit au logement opposable que j'ai pu constater dans le département des Hauts-de-Seine en particulier.

Le préfet intègre ses propres priorités dans les objectifs des conventions. Il peut également s'assurer du respect des priorités du Plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD).

Je pense donc qu'une généralisation de ce type de délégation aux communes qui le souhaiteraient serait tout à fait profitable.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Votre analyse donne quelques arguments aux collectivités pour ne pas aller vers la délégation des aides à la pierre. Quelle est l'opinion du Président du Conseil général du Lot ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Je remercie Philippe Dallier d'avoir choisi d'illustrer son enquête avec l'exemple du Lot. Je signale en préambule que nous n'avons pas bénéficié d'avances de trésorerie mais que nous avons un stock de dossiers important. Le département n'aurait pas pris la délégation si la communauté d'agglomération de Cahors l'avait obtenue. Elle demandait 30% des crédits. Finalement, avec la délégation au département, elle en a consommé 80% ! Nous avons beaucoup de dossiers en instance, liés à des opérations programmées et il est toujours difficile, alors que des démarches ont été engagées auprès des habitants, d'opposer des refus faute de crédits. Pourtant nous avons passé des conventions avec la région qui contribue au financement. Ce qui me semble nécessaire c'est plus de souplesse dans les choix pour le niveau local et nous redoutons la tentation centralisatrice de l'Etat.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

La délégation a-t-elle entraîné la création d'emplois dans le Lot ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Miquel

Nous nous sommes appuyés sur les services existants. Mais nous sommes prêts à prendre l'instruction des dossiers si l'Etat nous accorde de la souplesse !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Sur les contingents préfectoraux, les communes des Hauts-de-Seine peuvent, dans le cadre du droit au logement opposable, appliquer une priorité aux demandeurs qui habitent la commune ou y travaillent.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

C'est bien encore une marque des différences de traitement des communes selon les préfectures d'Ile-de-France. La généralisation des délégations aux communes volontaires permettrait d'harmoniser les pratiques de l'Etat en retenant les plus performantes.

A l'issue de ce débat, la commission, à l'unanimité, donne acte de sa communication à M. Philippe Dallier, rapporteur spécial, et en autorise la publication sous la forme d'un rapport d'information

Puis la commission procède à l'audition de M. Claude Guéant, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration (missions « Administration générale et territoriale de l'Etat », « Immigration, asile et intégration » et « Sécurité ») dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de règlement des comptes et rapport de gestion pour l'année 2010.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je vous remercie d'avoir répondu à notre invitation, à la veille de l'examen du projet de loi de règlement, qui revêt pour nous une importance particulière puisqu'il constitue le moment de vérité budgétaire. Pour préparer ce moment, nos rapporteurs spéciaux, qui ont travaillé tout au long de l'année, y compris sur pièces et sur place, pour évaluer les politiques publiques, entreprennent d'interroger les ministres. Je ne doute pas que vous vous livrerez au jeu de leurs questions, dès après votre exposé liminaire.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. - C'est avec plaisir que je retrouve bon nombre de personnalités avec lesquelles j'ai eu l'honneur de travailler ces récentes années. Je souhaiterais, tout d'abord, dresser le bilan des réformes conduites par ce ministère au long de l'année 2010, sous la houlette de M. Hortefeux, avant d'évoquer, sans préjuger de l'examen du texte financier à venir devant vous, deux réformes en cours pour l'année 2011, celle de la garde à vue, d'une part, et le projet de création d'un conseil national des activités privées de sécurité, d'autre part.

Parler de réformes, c'est avant tout parler de la révision générale des politiques publiques (RGPP). La charge de la dette représente chaque année 45 milliards d'euros soit deux fois le budget du ministère de l'intérieur, rémunérations comprises. Le financement de la dette, c'est un milliard d'euros à émettre chaque jour sur les marchés financiers.

Je salue la manière dont les agents de l'Etat s'investissent dans la RGPP. C'est grâce à eux que les changements sont acceptés. La RGPP exige une implication forte et des changements d'attitude radicaux : elle demande des efforts et pourtant, cela marche.

Cet ambitieux mouvement de modernisation, le ministère de l'intérieur en prend pleinement sa part. Avec soixante-sept réformes, il est, au sein du Gouvernement, le premier contributeur à la RGPP.

Notre premier objectif va à renforcer les capacités opérationnelles et la présence sur le terrain des forces de sécurité en les recentrant sur leur coeur de métier. Pour 2010, je pense plus particulièrement aux discussions fructueuses engagées avec le ministère de la justice : la sécurité du ministère de la justice, la protection des magistrats et la gestion des scellés sont désormais pris en charge par la chancellerie. Je pense également au transfert de la gestion des centres de rétention administrative à la police aux frontières, qui a permis d'économiser l'équivalent de huit escadrons de gendarmerie mobile. Lorsque l'on sait que pour une tâche donnée, là où il faut un fonctionnaire de police, c'est 1,7 CRS ou gendarme mobile qui doit être mobilisé, on mesure l'économie réalisée. Citons encore la fermeture de quelques écoles de police pour tenir compte des évolutions démographique du corps.

Deuxième objectif : nous modernisons et améliorons le service rendu aux usagers. La modernisation des titres, tout d'abord, vise à rendre leur délivrance plus sûre et plus efficace. Lancé en 2009, ce chantier a trouvé, en 2010, son régime de croisière et vu venir les résultats en termes de qualité et de délais. Le passeport biométrique, ensuite, dont plus de 5 millions ont été délivrés depuis l'entrée en vigueur du dispositif, en juin 2009, tandis que 2 075 communes étaient équipées de stations d'enregistrement et le délai moyen de délivrance ramené à sept jours. Le nouveau système d'immatriculation à vie des véhicules (SIV), ensuite, progressivement entré en service en 2009, a donné lieu à l'immatriculation de près de 20 millions de véhicules : plus d'une carte grise sur deux est désormais délivrée sans déplacement en préfecture, le délai d'envoi à domicile étant réduit à trois jours. Preuve que l'on peut conjuguer amélioration du service public et recherche d'économie.

Dans le même souci d'efficacité, le déploiement de l'application ACTES dans l'ensemble des préfectures a permis de tester l'envoi de courrier sous forme dématérialisée. Les résultats obtenus ont largement dépassé les objectifs initialement assignés : fin 2010, 15 % des actes étaient télétransmis, et 19 % des collectivités territoriales étaient raccordées à l'application, qui, en même temps qu'elle leur permet de gagner du temps, facilite la transmission des actes engageant un contrôle de légalité.

De même, le déploiement du dispositif PARAFES, favorisant le passage rapide des contrôles transfrontières, contribue à la qualité de l'accueil dans les aéroports français. En 2010, 19 sas ont été installés à Roissy et Orly, permettant à plus de 80 % des voyageurs préparés de passer les contrôles aux frontières en moins de quinze minutes.

Notre troisième objectif va à rationaliser notre organisation. Celle des services de sécurité, tout d'abord. Premier exemple, l'adaptation des zones de compétence territoriale de la police et de la gendarmerie aux réalités du terrain et le déploiement de polices d'agglomération - celle de l'agglomération parisienne, entrée en fonctionnement fin 2009, produit ses premiers effets opérationnels en 2010, année qui a également vu s'engager la concertation avec les élus des agglomérations de Lille, Lyon et Marseille afin d'étendre ce dispositif. Autre exemple, la recherche de complémentarités opérationnelles et logistiques entre la police et la gendarmerie nationales. Citons la création, en juin 2010, de l'unité de coordination de la sécurité routière, de l'unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun et de l'unité de coordination des forces d'intervention, Raid et GIGN, notamment via le rapprochement des réseaux de soutien automobile qui servent les deux directions.

J'en viens, pour répondre aux préoccupations qui sont les vôtres, aux données financières. Le ministère de l'intérieur a exécuté le budget 2010 à hauteur de 24 milliards d'euros, en augmentation de 2 % par rapport à 2009, principalement sous l'effet, comme cela est le cas dans l'ensemble de la fonction publique, du dynamisme de la masse salariale, dont le taux de consommation des crédits a atteint 99,79 %, tandis que celui des crédits de fonctionnement et d'investissement, passait à 96,48 %.

Globalement, l'écart de consommation entre les crédits ouverts et les dépenses réelles, de 370 millions en 2009, s'est réduit à 330 millions en 2010, ce qui traduit une meilleure budgétisation initiale et un meilleur pilotage de l'exécution budgétaire en cours d'année.

Le ministère de l'intérieur a contribué à la réduction de l'emploi public, avec 2 410 suppressions d'emplois en 2010, tout en maintenant un bon niveau de performance opérationnelle dans la lutte contre la délinquance et les délais de délivrance des titres.

Ce rapide panorama révèle bien les deux éléments stratégiques de ce budget triennal 2009-2011 : retour à l'équilibre des finances publiques et efficacité de l'action de l'Etat.

J'en viens aux deux dossiers qui seront bientôt soumis à votre examen. La réforme de la garde à vue, tout d'abord, qui entrant pleinement en vigueur aujourd'hui même, doit modifier la façon de travailler des policiers et des gendarmes.

L'assistance de l'avocat avait été anticipée dès le 15 avril. Les craintes initiales ont été surmontées, même s'il conviendra de rester attentif, afin que la garde à vue participe bien à la manifestation de la vérité. S'il convenait de prendre acte des décisions de la Cour de cassation et du Conseil constitutionnel, et des dispositions de la loi renforçant les droits des victimes, il ne faut pas non plus oublier que la garde à vue constitue un moment de l'enquête judiciaire, dont l'objet est de rechercher le coupable, donc de protéger la victime : tel est l'équilibre auquel il nous reviendra de veiller.

La proportion de personnes gardées à vue qui sollicitent l'assistance d'un avocat est d'une sur trois environ, en légère progression depuis le 15 avril, étant entendu que c'est pour les affaires les plus graves, traitées par les services spécialisées de police judiciaire, qu'il est le plus élevé. Les avocats restent en moyenne entre deux et quatre heures dans les locaux d'enquête.

Pour faciliter les entretiens, nous avons réalisé les travaux les plus urgents dès la mi-avril, pour une dépense de 1,9 million d'euros mais il est clair qu'il faudra encore améliorer les 3 000 lieux de garde à vue.

J'ai signé ce matin même l'arrêté concernant la restriction de la pratique des fouilles à corps. Afin de maintenir un bon niveau de sécurité, j'ai demandé que des détecteurs de métaux soient installés chaque fois que nécessaire, ce qui évitera des fouilles.

Etant entendu qu'elle fait désormais une règle de la présentation de la personne gardée à vue au magistrat avant toute décision de prolongation, la loi autorise, pour faciliter cette procédure, l'usage de la visioconférence. J'ai donc demandé l'équipement de nouveaux sites, notamment les plus éloignés des palais de justice, ce qui présentera de surcroît l'avantage d'éviter des déplacements onéreux. J'ai également demandé aux services de police et de gendarmerie de prévoir la distribution de kits d'hygiène à chacun des gardés à vue.

La mise en oeuvre matérielle de ces trois évolutions fait l'objet d'une demande d'ouverture de crédits de 15 millions d'euros dans le projet de loi de finances rectificative.

Le Sénat aura aussi à se pencher bientôt sur la mise en oeuvre financière de la création du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Le Gouvernement souhaite mieux encadrer le secteur de la sécurité privée et aider à sa professionnalisation, en créant ce Conseil, chargé de trois missions principales : une mission de police administrative en vertu de laquelle il délivrera, suspendra et retirera les titres, agréments, autorisations et cartes professionnelles ; une mission disciplinaire, qui lui donnera faculté de prononcer des sanctions en cas de manquement aux lois, règlements et obligations professionnelles ; une mission de conseil et d'assistance à la profession, enfin. Cette création a été inscrite dans la LOPPSI 2 du 14 mars 2011. Administré par un collège, le Conseil emploiera 200 agents et disposera d'un budget de 16,8 millions d'euros. A cet effet, le projet de loi de finances rectificative prévoit la création d'un mécanisme fiscal en deux volets : une taxe sur les entreprises de sécurité, à laquelle seraient assujetties les personnes physiques et morales exerçant une activité privée de sécurité, fixée à 0,5 % de leur chiffre d'affaires, et obéissant au même mode de fonctionnement que la TVA ; une taxe sur la masse salariale des services internes de sécurité, dont s'acquitteraient les entreprises disposant d'un service interne de sécurité, égale à 0,7% de la masse salariale des personnels du service. La différence de taux est calculée pour rester neutre sur les choix d'organisation. Cette taxe, recouvrée par les services fiscaux, figurera sur la facture de l'entreprise de sécurité, ce qui lui permet de faire supporter cette charge par son client, sur le modèle de la TVA.

Les organisations professionnelles de la sécurité privée se sont montrées favorables à ce dispositif fiscal.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Je vous remercie d'avoir souligné la volonté de réforme de votre ministère, pour une meilleure performance publique à moindre coût. Nous ferons un effort de bienveillance en faveur de cette nouvelle taxe affectée, étant entendu que sa création n'est guère conforme à l'esprit de la Lolf...

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

J'ai trois questions à vous poser. La première porte sur la règle du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite, qui a conduit, dans la loi de finances pour 2010, à prévoir une réduction des effectifs de la mission dont j'ai, comme rapporteure spéciale, la charge, de 736 équivalents temps pleins travaillés - 73 pour les missions relatives aux titres d'identité, 140 pour le SIV, 156 pour le contrôle de légalité et 367 pour les fonctions support. Cet objectif a-t-il été atteint ? Les préfectures, m'ont dit nombre de mes interlocuteurs à tous les niveaux de la hiérarchie préfectorale, considèrent ne plus disposer d'aucune marge de manoeuvre pour assurer le service public : elles sont réduites « à l'os » !

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Oui, l'objectif a été atteint. Cela représente, pour les préfectures, un important effort, car la diminution des moyens s'accompagne d'une profonde réorganisation, la réduction du nombre de directions départementales exigeant une redistribution des tâches qui a un impact sur la vie professionnelle de chacun. Je salue l'engagement des personnels pour y parvenir. Je ne dirai pas cependant que les préfectures en sont « à l'os », car des marges de manoeuvre sont à attendre. Le déploiement en cours de certaines applications destinées à la distribution des titres marquera notamment une nouvelle étape dans l'automatisation des tâches en même temps qu'il améliorera la qualité du service rendu. Il y a donc bien de nouvelles perspectives de progrès.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Les suppressions de poste anticipaient sur l'automatisation, je doute qu'il faille en attendre beaucoup de marge, ainsi que le concluait la mission de contrôle que j'ai conduite l'an passé...

Ma deuxième question concerne la difficile entrée en vigueur du SIV. Pouvez-vous nous donner une idée de la répartition entre délivrance par les garages et par les préfectures ? Quelles sont, enfin, les évolutions dans la façon de travailler des garages ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Cette réforme conjugue économie de moyens pour l'État et amélioration du service rendu, puisque c'est le professionnel, vendeur du véhicule, qui fait le nécessaire pour la carte grise. Je confirme qu'elle concerne une carte grise sur deux, soit 20 millions de véhicules sur un parc de 40 millions à immatriculer ; les 29 000 professionnels inscrits comme partenaires habilités réalisent 92% des immatriculations de véhicules neufs. Il est vrai que le taux est plus faible pour les véhicules d'occasion (33,5 %), vendus par d'autres catégories de professionnels ou directement par les particuliers. Les difficultés rencontrées, pour les véhicules d'occasion notamment, tiennent au fait que les textes disposent que le propriétaire est responsable des infractions constatées, si bien que certains vendeurs se sont trouvés poursuivis pour des infractions commises par le nouveau propriétaire. Le système informatique a été corrigé en conséquence et un texte en cours d'examen vise à transférer la responsabilité sur l'utilisateur.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

Un mot sur la délivrance des titres : confirmez-vous la date d'entrée en vigueur du décret disposant que seuls les photographes professionnels sont habilités à prendre des photos d'identité ?

Dernière question, enfin, sur la dotation pour frais de contentieux et de réparation civile, sous-évaluée, à 80,2 millions d'euros. Entendez-vous la ramener à niveau ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je vous confirme que le décret auquel vous faites référence sera examiné dans les prochains jours par le Conseil d'État et sera publié au début de l'été.

En ce qui concerne les frais de contentieux et de réparation, la situation, structurelle, est ancienne. Ces dépenses sont difficiles à évaluer précisément. Le contentieux le plus lourd est celui qui concerne le refus du concours de la force publique pour les expulsions locatives. Relever les crédits n'encouragerait pas à leur gestion rigoureuse, l'effet n'en serait guère vertueux.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Beaucoup des réponses que j'attendais m'ayant été données, je m'exercerai à l'art d'accommoder les restes... Je souhaiterais tout d'abord lever un doute sémantique. Police de proximité, puis unités territoriales de quartier, puis compagnies de sécurisation, puis, enfin, patrouilleurs : pouvez-vous nous éclairer, afin de nous permettre de savoir en toute connaissance de cause à quoi vont les crédits que nous sommes appelés à voter ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

La politique qui est à l'origine de la police de proximité, et qui date d'avant 2002, reposait sur une intuition qui mérite considération : rapprocher la police des usagers. Mais elle s'est développée sans embrasser la totalité des missions de la police : prévention, dissuasion, répression. Ce dernier volet, qui vise la recherche des contrevenants et leur présentation à la justice, a été négligé. Les rapports alors commandés par le ministre en charge ont souligné cette difficulté, relevant que la méthode retenue n'aurait de chances de succès qu'avec un personnel en nombre considérablement renforcé.

Ce que j'entends développer avec les patrouilles, c'est une police de présence embrassant la totalité des fonctions de la police, y compris la répression, clairement assumée. Pourquoi ? Parce que la sécurité passe d'abord, selon moi, par la lutte contre la délinquance et la criminalité, dont le volume doit continuer de diminuer - je rappelle que le reflux a été de 17 % depuis 2002, ce qui représente, pour être plus parlant, 500 000 victimes de moins en 2010 qu'en 2002. Les résultats sont là. Nous sommes, en 2010, à un niveau inférieur à celui de 1997, alors même que la population s'est accrue de six à sept millions d'habitants.

La sécurité passe aussi par le volet prévention, pour traiter les comportements délictueux ou incivils, qui, pouvant marquer une entrée dans le cycle de la délinquance, appellent une réponse rapide. C'est cette réponse qu'a entendu apporter la loi de mars 2007, qui créait le conseil des droits et devoirs des familles et donnait aux maires une responsabilité élargie : elle mériterait d'être mieux mise en oeuvre.

La sécurité, enfin, passe par la présence visible des policiers ou des gendarmes, qui tranquillise les citoyens. D'où la création des patrouilleurs, en cours d'expérimentation dans cinq ou six circonscriptions. Des binômes, voire des trinômes, au lieu de rester dans leurs locaux, patrouillent ainsi dans les quartiers à des heures où le public s'y rassemble. Cette présence, ainsi mécaniquement renforcée de 25 %, montre aux citoyens que nous sommes sensibles aux préoccupations qui sont les leurs. A Mantes-la-Jolie, où je me suis rendu après le début de l'expérimentation, j'ai pu constater combien les usagers et les commerçants étaient satisfaits de voir ces patrouilles dans leur rue, en particulier à l'heure où les commerçants font leur caisse et se rendent à leur banque.

Quant aux unités territoriales de quartier, elles sont complémentaires, destinées aux zones plus difficiles, où des équipes de deux ou trois ne suffisent pas : elles doivent être plus nombreuses, et mieux formées.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Je me félicite de constater que les recommandations de la commission des finances sont ponctuellement mises en oeuvre par les ministres de l'intérieur successifs. En particulier celles qui visent à une meilleure coordination des policiers et des gendarmes - je relève que celle-ci s'est traduite dans les esprits des intéressés, puisque les uns ne disent plus « ils » en parlant des autres, mais bien, désormais, « nous ».

La dégradation de la sécurité exigeait une mise à niveau des effectifs, qui a permis une utile réorganisation administrative. Je m'interroge, cependant, sur le recrutement de 4 000 adjoints de sécurité : n'y a-t-il pas là un détournement de la RGPP ? Je comprends que les citoyens souhaitent une présence toujours renforcée des forces de sécurité, mais la comparaison avec nos voisins européens m'interpelle : nous sommes le pays où leur densité est la plus forte.

Debut de section - PermalienPhoto de Roland du Luart

Cela tient aussi au temps de travail des policiers.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

J'ai constaté avec grand bonheur, en retrouvant le ministère de l'intérieur, qu'une collaboration spontanée entre gendarmes et policiers s'était tout naturellement nouée, qui a des effets pratiques sur la qualité des prestations de sécurité. J'ai pu en constater, il y a quelques jours, en Eure-et-Loir, les bénéfices en matière de lutte contre les cambriolages, perpétrés par des bandes venues de la région parisienne et qui frappent tant les milieux urbains que ruraux. En l'absence de coopération, la lutte était vouée à l'échec. Autre coopération d'intérêt, la mise à disposition de la police, qui n'en possède pas, des hélicoptères de la gendarmerie, très utiles dans les opérations de surveillance délicates, y compris nocturnes, et qui permettent jusqu'à l'organisation de poursuites ou des interventions sur les toits.

En ce qui concerne les effectifs, il est vrai qu'après une augmentation importante jusqu'en 2007, le nombre d'emplois a été réduit de 3 700 dans la police, et de 4 800 dans la gendarmerie, dans le cadre d'une meilleure maîtrise des finances publiques. La délinquance n'en continue pas moins de baisser, de 2,5 % l'an passé, grâce à un certain nombre de réformes structurantes. C'est ainsi que les effectifs des forces mobiles sont en diminution, quinze escadrons de gendarmes ayant été supprimés et un nombre équivalent en effectifs pour les CRS, soit 1 300 à 1 400 emplois. Nous avions un dispositif aussi étoffé qu'après-guerre alors que la France est sortie depuis longtemps des grèves insurrectionnelles qui ont marqué cette période : les rapports sociaux se sont apaisés. Or, les forces mobiles coûtent cher. Nous prenons donc le parti d'en reverser le maximum dans les forces destinées à assurer la sécurité quotidienne. C'est ainsi que les effectifs des gendarmeries départementales n'ont guère été affectées par la RGPP, puisqu'elles se sont vu reverser les escadrons de gendarmes mobiles supprimés.

Les 4 000 équivalents temps plein (ETP) déployés dans la police et la gendarmerie ne représentent que 1 000 créations d'adjoints de sécurité ou gendarmes volontaires, en contrats à durée déterminée de trois à cinq ans, immédiatement opérationnels grâce à une rapide formation, tandis que les 3 000 emplois restants ne sont pas des créations, mais résultent du recours aux heures supplémentaires ou aux réserves de la police et de la gendarmerie, faites de jeunes retraités compétents et encore équipés, dont beaucoup se sont portés volontaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Le président Arthuis a souligné que la taxe sur les sociétés de surveillance privée n'était guère dans la logique de la Lolf. Vous nous avez dit que ces sociétés sont favorables à cette taxe, je ne suppose pas, cependant, que cette faveur aille jusqu'à l'enthousiasme.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

J'ai rencontré, dans mes fonctions antérieures, les fédérations professionnelles, qui m'ont confirmé leur accord.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

D'autant que ces taxes sont déductibles de leur revenu imposable...

Debut de section - PermalienPhoto de Aymeri de Montesquiou

Un mot sur la garde à vue. Le montant des crédits engagés pour aménager les commissariats me semble bien faible au regard des besoins.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je ne dispose pas, aujourd'hui, d'une évaluation complète. Il est certain qu'il faudra encore consentir des efforts.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le coût sera encore supérieur pour le ministère de la justice.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

rapporteur spécial de la mission « Immigration, asile, intégration ». - En 2010, les crédits du programme « immigration et asile » ont progressé de 117 millions d'euros en cours de gestion - 60 millions en décret d'avance et 57 millions en loi de finances rectificative - ce qui représente un tiers des crédits ouverts en loi de finances initiale. Chaque année, je mets l'accent sur la sous-évaluation des crédits de ce programme, qui se reproduit en 2011, puisque le projet de loi de finances rectificative propose encore d'ouvrir 50 millions supplémentaires, conformément aux prédictions de mon dernier rapport. Au point que l'on ne peut attribuer cela au hasard, à l'incertitude ou à l'erreur. J'y vois bien plutôt le fruit d'une volonté délibérée, peu conforme à l'exigence de sincérité et de transparence budgétaire. Entendez-vous, à l'avenir, mettre les crédits initialement programmés mieux en phase avec la réalité ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Il est difficile d'établir des prévisions précises en matière de demande d'asile. Cette situation est aussi le résultat du mauvais fonctionnement du système de l'asile, dont la dépense s'élève à quelque 500 millions.

Les procédures sont trop longues, l'Ofpra est embouteillé, et la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) plus encore : les délais globaux sont de l'ordre de deux ans - même si l'on dit dix-neuf mois. C'est pourquoi le Premier ministre a décidé d'un renforcement sensible de leurs moyens, et que quarante agents supplémentaires ont été affectés à l'Ofpra et cinquante à la Cour nationale, afin de limiter à neuf mois le délai de traitement des 50 000 demandes d'asile annuelles, encore en augmentation cette année. Notre pays est certes attractif pour son respect des libertés publiques, mais aussi parce que l'on sait que la procédure y est longue et qu'après deux ans de séjour, il devient difficile de renvoyer un demandeur.

Il importe donc de travailler à réduire les délais, en particulier par un traitement rapide des demandes infondées et abusives, constat partagé par nos partenaires européens, au point que la Commission a émis des propositions destinées à ouvrir des possibilités de traitement en urgence. J'ajoute que l'encombrement des instances de décision a cette conséquence fâcheuse, ainsi que me le rappelait le haut commissaire aux réfugié des Nations unies, qu'il retarde le traitement des demandes les mieux fondées. Enfin, la réduction des délais sera source d'importantes économies de frais d'hébergement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Quels correctifs envisagez-vous pour remédier aux difficultés que posent de tels dépassements de crédit au regard de la loi de programmation pluriannuelle ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Il me semble réaliste d'essayer d'obtenir une certaine augmentation de crédits dans la prochaine loi de finances initiale. Je dois rencontrer, ce soir même, le ministre du budget.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je ne saurais vous répondre dès à présent mais je vous ferai parvenir une note.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Il est vrai que la réduction des délais, sur laquelle je m'apprêtais à vous interroger, est incontournable. La situation ne cesse de se dégrader à l'Ofpra : 118 jours en 2009 ; 145 en 2010. Même chose à la CNDA. Les moyens supplémentaires dégagés commencent-ils à porter leurs fruits ?

Il est clair qu'il est plus difficile de renvoyer un débouté qui se trouve en France depuis deux ans - et certaines procédures ont même duré jusqu'à sept ans.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

L'aspect humain et l'aspect financier sont, en effet, liés. Nous constatons, année après année, l'insuffisance des crédits. Le renforcement des moyens produit déjà ses effets : la moyenne générale de traitement des dossiers s'est réduite d'un mois depuis le début de l'année. Si nous parvenions à une réduction de dix mois, nous gagnerions autant en frais d'hébergement

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

C'est le cas de certains pays européens, comme l'Autriche. Un mois de gagné, ce sont dix millions d'économies sur l'hébergement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

En matière de lutte contre l'immigration illégale, on constate une importante sous-consommation des crédits d'investissements, de 16 % en autorisations d'engagement et 3 % en crédits de paiement, liée essentiellement au report de la construction d'un nouveau centre de rétention administrative à Mayotte, pourtant demandé depuis longtemps étant donné l'état lamentable de l'existant. Peut-on espérer un démarrage rapide des travaux ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Après le lancement de l'appel d'offre ce mois-ci, la mise en service est prévue pour 2014, pour un coût de 25 millions d'euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

L'objectif fixé en loi de finances, en matière d'immigration économique, était une part de 37 % de l'immigration durable. Or, le taux de réalisation n'est que de 18 %. Sans doute la crise a-t-elle eu un impact, mais ne serait-il pas bon de mettre en place un indicateur fiable quant aux résultats de cette politique ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Les chiffres que vous citez sont la conséquence d'une politique privilégiant l'immigration à caractère économique plutôt que familial. Les résultats sont allés dans le sens annoncé. Nous avons noué, en la matière, un certain nombre d'accords, dont celui passé avec la Tunisie, inégalement mis en oeuvre, s'est trouvé placé sous les feux de l'actualité. Aux termes de cet accord, le gouvernement tunisien mènera une action résolue pour faciliter le retour des immigrants illégaux - il faut savoir que la Tunisie est le pays qui délivre le moins d'autorisations consulaires - en même temps que nous sommes convenus d'organiser une immigration coordonnée pour faciliter la formation professionnelle des jeunes Tunisiens.

La France n'est pas un pays fermé. Elle n'est pas hostile à une immigration de travail. L'an passé, 200 000 personnes ont été admises au séjour. Mon souci est cependant de maintenir l'unité sociale du pays. J'entends donc diminuer un peu ce nombre, car il faut du temps et des moyens pour intégrer les nouveaux arrivants, pour une immigration réussie.

L'immigration de travail portait l'an passé sur 25 000 personnes. Ce chiffre ne correspond pas à nos besoins. Ce que j'ai dit sur le bâtiment a sans doute suscité des commentaires déplaisants, ainsi que l'ire du Medef, mais j'ai pu constater, dans l'édition récente d'un journal du matin, que la Fédération du bâtiment s'était ralliée à mes vues... L'an dernier, la venue de 730 maçons étrangers a été autorisée, alors qu'une offre pour dix emplois, en ce domaine, suscite 100 candidatures. La même observation vaut pour d'autres métiers, comme celui d'analyste en informatique, réputé bien à tort en tension puisque le taux de chômage y est dix fois supérieur à la moyenne des cadres.

Il faut bien reconnaître que globalement, l'immigration de travail n'est pas un succès : 24 % des étrangers hors Union européenne présents sur le territoire français sont demandeurs d'emplois. A quoi bon faire venir chez nous de futurs chômeurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Le ministre de l'intérieur est aussi ministre des cultes. Or, on sait que l'Eglise fait aujourd'hui appel à des prêtres venus de l'Afrique francophone. Considérez-vous qu'il s'agit là d'une immigration professionnelle, et est-elle nombreuse ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je fais usage de mon joker... Les effectifs ne doivent pas être bien importants. Je ne manquerai pas de vous faire parvenir un courrier.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Une mission de contrôle menée avec Philippe Dallier, rapporteur spécial pour les crédits de la ville et du logement, a fait apparaître qu'alors que les places en centre d'hébergement des demandeurs d'asile manquent, d'autres solutions d'hébergement d'urgence doivent être recherchées. Elles le sont sans règles claires. Ne serait-il pas plus pertinent de réunir au sein d'une même mission l'ensemble des crédits consacrés à l'hébergement d'urgence ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

L'hébergement d'urgence est à ce point sollicité en raison de l'embouteillage du système de demande d'asile. Les conséquences en sont fâcheuses. L'accueil en urgence s'en trouve saturé, à l'approche de l'hiver, au point que les centres d'hébergement d'urgence ne peuvent plus satisfaire les besoins pour lesquels ils ont été créés. Comment les désengorger ? Pour ce qui est de l'articulation budgétaire, gardons-nous de tomber d'une incohérence à l'autre. A une fusion des crédits, je préfèrerais un système de facturation interne, qui présente l'avantage de faire clairement apparaître la réalité des coûts.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

L'objectif premier du programme « Intégration et accès à la nationalité » est d'améliorer les conditions d'accueil et d'intégration, notamment via l'apprentissage du français. Or, les contrats d'accueil et d'intégration enregistrent un taux de réussite de 60 %, quand l'objectif était de 67 %. C'est encore insuffisant. Comment surmonter la difficulté ?

Question subsidiaire, enfin : le projet de création d'un nouvel hôtel de police à Gap est-il définitivement enterré ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Du temps que j'étais préfet des Hautes-Alpes, on recherchait un terrain. Cela remonte à quelques années...

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bernard-Reymond

Depuis, l'État en a choisi un, qui a été mis à sa disposition. Mme Alliot-Marie m'avait indiqué, en son temps, que des crédits seraient dégagés pour une étude architecturale. Il y a de cela deux ou trois ans. Je n'ai plus eu de nouvelles depuis.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Vous m'incitez à reprendre positivement ce dossier, cas particulier qui illustre les problèmes structurels qui pèsent sur le ministère de l'intérieur : son budget, dans lequel les rémunérations comptent pour la plus grosse part, est soumis à la norme générale, d'où bien des difficultés en matière de fonctionnement et d'investissement.

En ce qui concerne la formation en langue française, il est vrai qu'un résultat inférieur de dix points à l'objectif n'est pas satisfaisant. Cela renforce ma détermination de faire plus. La maîtrise de la langue française constitue un moyen incontournable d'intégration. C'est pourquoi la loi sur laquelle le Conseil constitutionnel se prononcera prochainement prévoit un dispositif destiné à s'assurer d'une connaissance minimale par le conjoint de la personne naturalisée. Mme André sait comme moi que les femmes, surtout lorsqu'elles viennent d'une culture qui les cantonne au foyer, si elles ne maîtrisent pas un tant soit peu notre langue, ne peuvent pas suivre l'éducation de leurs enfants, ni travailler, et se trouvent totalement isolées en cas de problème familial. Il faut leur faciliter l'apprentissage.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Certaines jeunes femmes immigrées gardent des enfants. Or l'accueil des enfants, ce sont les crèches, qui coûtent horriblement cher aux municipalités. Au reste, l'essentiel de la garde d'enfants est assuré par les assistantes maternelles, qui accueillent les enfants à leur domicile. Précisément, quelques unes, en Mayenne, sont venues proposer au président du conseil général de se regrouper pour accueillir les enfants. Les services de la PMI ayant fait observer qu'une telle organisation était illégale, on a fait usage du droit à l'expérimentation. Quand la ministre en charge de ce secteur a dit tout le bien qu'elle en pensait, il s'est agi de légaliser. Cela s'est fait à l'occasion de la loi de financement de la sécurité sociale, laquelle a prévu une convention. La CNAM a établi un document de onze pages et sept annexes.... Tout ce qu'il fallait pour tuer l'opération. Une proposition de loi a donc été votée - immense soulagement ! Las, la sous-commission ERP de la commission centrale de sécurité de la direction de la sécurité civile du ministère de l'intérieur a, le 2 décembre 2010, classé ces maisons en établissements accueillant du public de quatrième catégorie, ce qui obligerait 95 % d'entre elles à mettre la clé sous la porte.

N'y a-t-il pas là de cette folie règlementaire dont le président de la République a déclaré le 10 février dernier qu'il fallait y mettre un terme ? Faut-il qu'un colonel des sapeurs- pompiers au cabinet du ministre vienne exiger « ceinture et bretelles » des présidents de conseils généraux ? Il est bon de travailler à maîtriser la dépense publique, mais quand laissera-ton enfin les élus prendre part à l'innovation administrative pour assurer un service public dans des conditions financièrement soutenables ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je vous rejoins entièrement. Cette formule est extrêmement intéressante. Nous devons avoir des règles raisonnables. Je vais me ré-emparer de ce dossier et y apporter une réponse favorable. Il faut être raisonnable !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

Une question, monsieur le ministre, sur la mise en place des procès-verbaux électroniques. Les collectivités locales étant incitées à se doter de boîtiers, j'ai demandé à rencontrer la société Atos, qui a développé le logiciel. Quand nous avons parlé coûts, j'ai eu l'impression qu'elle prenait les collectivités locales pour des « vaches à lait » : au-delà de cinq ans, le coût de maintenance dépasse le coût d'acquisition !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Dallier

L'on voit bien le gisement d'économies pour l'Etat, mais à l'autre bout de la chaîne ? Si l'Etat est propriétaire du contenu, mais que le service associé est supérieur au coût d'acquisition, on n'y arrive plus. Qu'avez-vous négocié pour les collectivités locales ?

Nous avons des stations pour les passeports électroniques. Pourront-elles traiter également les nouvelles cartes d'identité ? J'espère que la réponse est positive car les stations demandent de l'espace et elles ont un coût.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Les stations seront les mêmes. Il en faudra toutefois 300 de plus, que nous installerons.

Quant aux PV électroniques, six millions d'euros sont prévus pour aider les collectivités à acheter ces lecteurs. Nous allons y regarder de près et vous faire profiter de nos préférences d'achat.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

Dans la ville de 20 000 habitants dont je suis maire, nous avons bénéficié d'un diagnostic gratuit par la gendarmerie sur la vidéoprotection. Très bien faite, cette étude a mis en évidence les points clefs à surveiller dans la ville, qui se trouvent recouper les flux stratégiques auxquels les gendarmes doivent être attentifs. Ma question porte sur l'accompagnement financier, qui mérite d'être durable. Or, on est déjà passé de 80 % à 50%.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Les subventions couvrent aujourd'hui de 30 % à 50% des coûts.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Hélène Des Esgaulx

J'attire votre attention sur la réelle coopération entre la gendarmerie et la police municipale qui en découlera.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

Je vous remercie de soutenir ma conviction et ma politique. Très utile en milieu urbain dense, la vidéosurveillance est en effet déterminante dans les enquêtes judiciaires. Lorsqu'il y a peu, un jeune a été roué de coups dans les transports en commun, en Seine-Saint-Denis, nous avons ainsi pu déférer tous les responsables à la justice dans les 48 heures. La vidéosurveillance a également une fonction de prévention. Un financement de 30 % à 50 % est possible par le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), qui est peut-être sous-doté.

Debut de section - PermalienPhoto de Michèle André

A l'approche de l'été et de ses festivals, les organisateurs nous demandent de les aider à obtenir des visas pour les troupes venues de pays étrangers. Dans le Puy-de-Dôme, des festivals de folklore rencontrent des difficultés, et celui de Gerzat risque de connaître un échec parce qu'une chorale de République démocratique du Congo ne peut obtenir ses visas. Je ne dois pas être la seule à solliciter le ministère. On m'a dit qu'on avait même demandé un test de grossesse aux jeunes femmes membres de la troupe ! Je n'ose le croire. Cette politique est très difficile à admettre. La peur, qui isole, serait-elle plus forte que la culture, qui est ouverture et rayonnement ?

Un mot enfin sur la maîtrise du français : je sais que les mères apprennent souvent notre langue quand leurs enfants sont scolarisés. Il faut faire confiance à l'immersion.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

La scolarisation des enfants offre en effet aux mamans un bons accès à notre langue. La semaine prochaine, je visiterai avec Luc Chatel une école des parents.

Quant aux visas, la direction de l'immigration a adressé le 16 mai des instructions aux préfets pour qu'ils apportent quelques assouplissements. Il faut toutefois savoir raison garder. On a beaucoup glosé sur les deux artistes marocaines invitées au festival de Cannes : si elles n'ont pas été admises, c'est parce qu'elle n'avaient pas d'hébergement, pas un centime en poche, et pas de billet de retour.

Debut de section - PermalienPhoto de Albéric de Montgolfier

Pouvez-vous nos parler des contrôles numériques aux frontières et de PARAFES ? Les crédits sont sous-consommés, la généralisation reste-t-elle l'objectif ?

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

PARAFES se développe le plus possible. Il apporte une assurance de sortie aux personnes qui ont rempli les conditions et offre une garantie technique presque totale. Cependant, nous devons nous reposer sur les aéroports pour le financement. Fin juin, nous aurons cent cinquante stations pour la lecture des visas biométriques sur le territoire, et pas seulement aux frontières. Les contrôles à l'intérieur du territoire sont essentiels : ils apportent la seule preuve scientifique de nationalité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Fourcade

Il a été question du commissariat de police de Gap, mais voilà dix à quinze ans que l'affaire de celui de Boulogne a commencé.

Debut de section - Permalien
Claude Guéant

J'en prends bonne note.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Arthuis

Sa durée et le nombre de questions disent tout l'intérêt de cette audition, dont je vous remercie, monsieur le ministre.

- Présidence de M. Jean Arthuis, président, puis de M. Yann Gaillard, vice-président -