Au cours d'une première réunion tenue dans l'après-midi, la commission procède à l'audition de M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, sur le projet de loi de finances pour 2014 - mission « Outre-mer ».
Nous sommes heureux de recevoir M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer, dans ce contexte législatif chargé. Je salue mes collègues ici présents qui ont à coeur l'outre-mer.
Je suis très heureux d'être devant un tel auditoire dont l'expertise sur les problèmes qui se posent à l'outre-mer est reconnue.
Alors que le budget 2013 était un budget de combat qui marquait le retour de l'État dans les outre-mer, le projet de loi de finances pour l'année 2014, que j'ai l'honneur de vous présenter, inscrit les territoires ultramarins comme une priorité pour l'action du Gouvernement. Pour preuve, les crédits de la mission Outre-mer augmentent de 1 %, tandis que le budget global de l'État connaît, pour la première fois, une baisse. Le budget des outre-mer enregistre ainsi une progression de 20 millions d'euros par rapport à son niveau de 2013.
Ce budget assure la consolidation de l'ensemble des priorités engagées lors de l'alternance, et ce, dans quatre secteurs prioritaires.
Tout d'abord, le logement, qui bénéficie de la hausse des crédits de paiement de la ligne budgétaire unique (LBU) pour s'élever à 244 millions d'euros, soit une progression enregistrée de l'ordre de 25 % depuis 2011, de 15 % depuis 2012 et de 8 % par rapport à 2013 et la loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.
Ensuite, la jeunesse et l'emploi forment une seconde priorité, qui vont bénéficier de la poursuite de la montée en puissance du service militaire adapté (SMA), tant en matière de rémunérations, de fonctionnement que d'investissement pour s'élever à 159 millions d'euros en autorisation d'engagement et à 151 millions d'euros en crédits de paiement, soit une progression respective de 6 % et de 8 % par rapport à l'année passée.
Une troisième priorité est l'investissement public que renforce une nouvelle enveloppe de 50 millions d'euros au titre du fonds européen d'investissement, l'augmentation de 10 millions d'euros des autorisations de paiement au bénéfice des contrats de plan État-régions, qui sont en train de s'achever, par rapport aux dotations triennales, l'augmentation de 10 millions d'euros des crédits de paiement du troisième instrument financier pour la Polynésie française et, enfin, le maintien d'une capacité d'engagement de 20 millions d'euros pour les constructions scolaires en Guyane et à Mayotte.
Enfin, les entreprises représentent une priorité que le Gouvernement assume pleinement. Ainsi, le montant des compensations d'exonérations est maintenu à un niveau proche de celui de 2013 pour s'élever à 1 131 millions d'euros, soit une baisse de 24 millions d'euros sur une ligne budgétaire de plus d'un milliard d'euros qui a été préservée à 98 % par rapport à son niveau de 2013.
De façon concomitante, les autres aides aux entreprises, dont les crédits supplémentaires seront fléchés dans le cadre du prochain projet de loi sur la compétitivité outre-mer, enregistrent une remarquable progression, avec 25 millions d'euros d'autorisations de paiement et 16,5 millions d'euros de crédits de paiement, soit une hausse respective de 178 % et de 83 % par rapport à 2013.
Je m'arrête un instant sur ce sujet, car la réforme des barèmes d'exonérations s'inscrit dans un recentrage assumé de l'action de l'État qui encourage le recrutement par la baisse du coût du travail. En effet, l'ensemble des études conduites sur le coût du travail démontre que les réformes les moins défavorables à l'emploi sont celles qui préservent les bas salaires - c'est-à-dire ceux inférieurs à 1,4 SMIC ou, dans les secteurs considérés comme prioritaires, à 1,6 SMIC. En effet, 73 % des salariés ont un salaire égal ou inférieur à 1,6 SMIC. De fait, la situation de près de 93 % des établissements et de 90 % des salariés s'améliore ou demeure inchangée suite à cette réforme que renforce le crédit d'impôts compétitivité et emploi avec son apport supplémentaire de 320 millions d'euros en 2014.
Les hauts revenus seront-ils pénalisés ? Pour un salarié percevant deux fois et demi le SMIC, la hausse du coût du travail induite par la refonte des exonérations couplée au crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) sera de 43 euros, soit une augmentation de 0,9 % ! Et ce sont près de 30 % des 90 millions d'euros, représentant une moindre dépense par rapport au prévisionnel de 2014, qui sont redéployés en faveur des entreprises ultramarines. Comme vous pouvez le constater, le Gouvernement soutient les entreprises !
2014 est l'année de la cohérence fiscale, fixée comme objectif par le président de la République et mise en oeuvre par le Premier ministre, comme en témoigne l'article 13 du projet de loi de finance sur l'aide fiscale à l'investissement , qui permet d'investir près de deux milliards d'euros pour une dépense fiscale de plus d'un milliard d'euros. S'agit-il d'une réforme risquée ? Nous ne le pensons pas, car nous avons respecté trois principes : le refus du désengagement de l'État- aucun euro d'économie ne sera réalisé sur le dos des entreprises ultramarines -, la recherche d'une plus grande efficience dans l'allocation de la dépense publique et la conduite de la réforme en concertation avec les acteurs concernés.
Cette réforme s'accompagne d'un meilleur encadrement de la défiscalisation qui demeure inchangée pour les petites et moyennes entreprises, dont le chiffre d'affaires est inférieur à 20 millions d'euros, les entreprises du secteur du logement social et dans les collectivités d'outre-mer à autonomie fiscale qu'il est de notre devoir de soutenir. Davantage, l'expérimentation d'un crédit d'impôt attractif, avec un taux de 38 % à l'impôt sur le revenu et de 35 % à l'impôt sur les sociétés - ce taux étant porté à 40 % pour le logement social - représente un avantage pour l'exploitant supérieur à celui de la défiscalisation.
Le projet de budget de mon ministère manifeste cette cohérence que l'on retrouve à l'échelle de l'État. L'effort budgétaire et financier de l'État pour les outre-mer est ainsi stable par rapport à celui de l'an passé, pour s'élever à 14,3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 14,2 milliards d'euros en crédit de paiement. Les dépenses fiscales s'élèvent, quant à elles, à 3,98 milliards d'euros dans le projet de loi de finances pour 2014, soit une progression de 1,9 % par rapport à la loi de finances intégrale pour 2013 et de 25 % par rapport au projet de loi de finances pour 2013, sous l'effet de la hausse de la défiscalisation au titre des investissements effectués dans le secteur du logement social.
Monsieur le président, messieurs les rapporteurs, mesdames et messieurs les sénateurs, je connais l'attention toute particulière que vous portez au processus de départementalisation de Mayotte. Vous avez accompli un travail considérable dans votre rapport présenté l'année passée pour définir les priorités de cette départementalisation et j'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, de souligner que je partageais largement votre avis.
En effet, deux ans et demi après le lancement officiel de la départementalisation, il est temps d'en dresser un bilan d'étape et d'envisager ses prochaines échéances. Beaucoup a déjà été accompli, particulièrement depuis ces dix-huit derniers mois, comme l'alignement sur les niveaux de métropole ou la montée en charge d'un certain nombre de prestations telles que le revenu de solidarité active, les allocations logements, le SMIC, la sur-rémunération des salaires des fonctionnaires. Nous avons également pris en compte les difficultés récurrentes qui se posent à Mayotte, comme l'immigration illégale, le manque de constructions scolaires, la situation des mineurs étrangers isolés et la coopération avec l'Union des Comores.
Nous avons aussi honoré les engagements jusqu'ici repoussés, en matière de transition fiscale notamment. À ce titre, nous pourrons compter sur la transformation de Mayotte en région ultra-périphérique (RUP) et les fonds européens qui compléteront les moyens financiers déjà mobilisés pour le développement du territoire. Mais une double critique se fait jour : pour ceux qui craignent que des changements trop brutaux ne déstabilisent un territoire aux équilibres fragiles et qui ne voient dans la départementalisation qu'une accumulation de contraintes nouvelles, nous allons trop vite tandis que pour d'autres, nous n'accordons que trop lentement des droits notamment sociaux.
Je reçois ces deux reproches comme une obligation pour le Gouvernement de donner plus de sens et de visibilité à l'action de l'État à Mayotte. Non pas que cette action en était jusqu'à présent dénuée, mais il nous paraît essentiel, à ce stade, de s'entendre sur un calendrier partagé. La feuille de route élaborée lors de la conclusion du pacte pour la départementalisation fixait des échéances parfois très lointaines - 25 ans pour certains droits que nous avons accordés en deux ans. C'est dans cet esprit que le Gouvernement, les élus et les représentants de la société civile doivent actualiser ensemble la feuille de route adossée à un calendrier plus réaliste. En ce sens, une clause de revoyure a été établie à mi-parcours pour que l'État, désormais représenté, en tant qu'autorité de gestion, par un nouveau secrétariat général aux affaires régionales, y évalue la consommation des crédits.
La départementalisation est aussi dénoncée par certains comme destructrice du tissu social mahorais et un facteur de déséquilibre en matière fiscale, s'agissant notamment du foncier et de la fiscalisation des indemnités d'éloignement. Il y a en ce moment une grève des fonctionnaires à Mayotte. Mais je tiens à vous dire que la fiscalité sera neutralisée pour les revenus perçus en 2013. Mais au-delà, il faut que chacun, dans le contexte difficile que traverse le pays, participe à l'effort commun.
A Mayotte, la fiscalité des ménages a été alignée sur le régime le plus favorable qui est celui de la Guyane, avec l'augmentation de l'indexation de 8 % cette année, soit de 40 % étalés sur quatre ans. Un abattement, correspondant à 40 % de l'impôt plafonné à 6 700 euros, sera également accordé, tandis que pour les autres collectivités ultramarines, l'abattement s'élève à 30 % et est plafonné à 6 200 euros.
A ceux qui reprochent que nous n'allons pas assez vite, je rappellerai que si nous avions appliqué le pacte initial de départementalisation signé en 2009, il eût fallu attendre 25 ans, au bas mot, pour que le salaire minimum se rapprochât du SMIC national alors que 18 mois auront suffi pour qu'il en atteigne 98 %. Et un effort exceptionnel a été consenti cette année pour le revenu de solidarité active (RSA), qui atteint désormais 50 % du niveau national, alors qu'un tel rattrapage était également prévu dans un horizon de vingt-cinq ans. Le gouvernement de Jean-Marc Ayrault envisage d'ailleurs d'atteindre la parité, voire l'égalité, en matière de RSA d'ici la fin du quinquennat.
Mais quel rythme imprimer à cette démarche ? Nous attendons des élus de Mayotte des propositions, qui feront l'objet de notre examen attentif, pour rénover le pacte de départementalisation.
Je souhaitais vous remercier, monsieur le ministre, et saluer votre pugnacité car ce n'est pas une mince affaire, par les temps qui courent, que d'avoir un budget en augmentation ! Je souhaite ne pas empiéter sur ce que pourront dire mes collègues, rapporteurs ou représentants des collectivités ultramarines comme Mayotte, mais vous connaissez l'intérêt que porte notre commission aux relations avec les Comores et à la situation tragique des migrants clandestins qui passent, au péril de leur vie, le bras de mer qui sépare l'archipel de Mayotte. Notre commission y a d'ailleurs consacré une mission d'information. Trouverons-nous une solution à ce problème ? Il serait sans doute plus judicieux de transférer des policiers et des douaniers aux Comores pour gérer le flux de migrants, mais une telle démarche reste tributaire des relations diplomatiques. Je sais que nous partageons cette même préoccupation, monsieur le ministre.
Je ne peux qu'être satisfait que le budget du ministère des outre-mer ait été non seulement préservé par rapport à son niveau de 2013, mais ait également augmenté de près de 10 millions d'euros ! Une telle augmentation tient compte de l'ampleur des tâches qu'il faut accomplir dans l'ensemble des outre-mer. Ma première question concerne le ministère de l'outre-mer et celui de la justice : nous sommes en effet inquiets de l'évolution de la situation des établissements pénitentiaires. Plusieurs rapports ont ainsi alerté l'opinion sur la situation catastrophique de la majorité des prisons en outre-mer. Quelles sont les actions que le Gouvernement entend engager pour redresser une situation si critique? Je viens en ce sens d'adresser une question écrite à Mme la garde des sceaux sur la situation carcérale en Guadeloupe, dans le contexte du meurtre d'un détenu survenu la semaine dernière au centre pénitentiaire de Baie-Mahault.
Ma deuxième question portera sur Mayotte : dans le cadre de la départementalisation, quelles actions le Gouvernement entend-il mettre en oeuvre pour améliorer les finances des collectivités territoriales - communes et départements -, la situation de l'éducation ou encore lutter contre l'immigration illégale ? A cet égard, l'envoi de douaniers ou de policiers aux Comores, qu'appelait de ses voeux le président Sueur, nous semble tributaire de l'état des relations diplomatiques avec Anjouan.
Vous avez évoqué le projet de loi de compétitivité emploi en outre-mer en cours d'élaboration. Nous disposons déjà d'un arsenal de mesures destinées à insuffler la croissance économique dans ces territoires, comme celles visant également à attraire l'investissement, la défiscalisation, le crédit d'impôt et tant d'autres. Ne pensez-vous pas que le moment soit venu de remettre à plat l'ensemble des dispositifs existants pour répondre efficacement aux besoins ?
Ma seconde question portera sur la Polynésie française. Lors de notre dernière audition de l'Institut d'émission d'outre-mer, nous avons appris que la Polynésie française, malgré son niveau d'endettement élevé, était de nouveau prisée par les investisseurs, ce dont on ne peut que se réjouir. Je souhaiterais savoir l'état du contentieux financier persistant entre les communes et la collectivité de la Polynésie française : pensez-vous que l'avance remboursable proposée par l'État de 42 millions d'euros à ce territoire puisse porter un terme à ce contentieux en respectant l'équité ?
Par ailleurs, je n'oublie pas la Nouvelle-Calédonie et la perspective, récemment rappelée par le Premier Ministre, d'un référendum d'autodétermination fixé avant 2018 par l'Accord de Nouméa, à moins que ne se dégage un consensus de l'ensemble des forces calédoniennes, une telle éventualité entraînant nécessairement une révision de la constitution. Vers quelle direction nous dirigeons-nous ? Allons-nous vers un ou des référendums ou nous acheminons-nous plutôt vers une solution consensuelle avec à la clé une révision de la constitution ?
Ma dernière question portera enfin sur Saint-Martin, que vous connaissez bien, monsieur le ministre, puisque cette collectivité se trouvait dans votre circonscription législative : Saint-Martin, déjà en proie à d'énormes difficultés, se trouve dans une situation paradoxale avec une frontière qu'elle n'a pas le droit de contrôler et qui, de fait, s'apparente à une sorte de « passoire juridique ». Comment sortir Saint-Martin de telles difficultés ?
Juste un dernier point cependant : bien que parlementaire de l'opposition, je compte voter votre budget, monsieur le ministre, car vous vous êtes bien défendu dans les arbitrages budgétaires et je tenais à le souligner !
Je tenais à remercier le ministre pour son exposé, mais aussi nos collègues de métropole dont l'intérêt pour nos collectivités territoriales françaises d'outre-mer est réel. L'augmentation du budget est en effet remarquable dans le contexte que nous connaissons, mais vous savez très bien que son niveau demeure insuffisant. Je partage d'ailleurs l'avis de notre collègue Christian Cointat quant à la nécessité d'envisager, de manière concertée, les raisons du retard accumulé par les outre-mer et les sources de leurs difficultés structurelles que de ponctuelles augmentations budgétaires ne peuvent aucunement résoudre.
A la suite des questions posées sur Mayotte par notre collègue Félix Desplan, je reviendrai sur la situation des collectivités mahoraises. Celles-ci ont, en effet, à peine une trentaine d'années d'existence, puisque nos premiers cantons datent de 1979 alors que les collectivités en métropole ont plus de deux siècles. Un tel décalage explique les problèmes qui se posent aux collectivités mahoraises en termes de maturité et d'expérience.
Monsieur le ministre, vous avez cité un grand nombre d'avancées significatives intervenues ces derniers mois. Je reviendrai, à ce titre, sur le projet d'agrandissement de la maison d'arrêt de Majicavo, dont plusieurs rapports avaient souligné par le passé les conditions indignes d'accueil de la population carcérale et qui sera prochainement le seul établissement carcéral outre-mer respectant les normes européennes en la matière.
Vous avez également rappelé la sur-rémunération de 40 %, sur une période de cinq ans, des fonctionnaires outre-mer, ainsi que l'avancée notable de la pérennisation de la dotation spéciale de construction et d'équipement des établissements scolaires, dont nous ne pouvons que nous féliciter. Pour autant, de nombreuses inquiétudes demeurent, à l'instar de la dotation mécanique, revue à la baisse, des fonds structurels européens qui s'avère dommageable pour l'ensemble des projets de développement de Mayotte, puisque seuls les grands projets, comme l'allongement de la piste d'aviation, devraient en être les bénéficiaires.
Vous avez insisté sur l'inquiétude que suscitait la capacité du département de Mayotte à consommer les crédits européens. À ce titre, la décision prise par le conseil général de confier la gestion de ces fonds à l'État mérite d'être rappelée.
Je reviendrai sur la grève générale des trois fonctions publiques qui paralyse l'île : de nombreux enfants ne peuvent aller à l'école et les tribunaux ont adopté une motion consistant à ne traiter que les affaires urgentes. Parmi les multiples revendications, deux me semblent devoir être soulignées : d'une part, l'incertitude que suscite la question de la sur-rémunération et, d'autre part, la fiscalisation de la prime d'éloignement des agents de l'État. Certes, l'égalité devant l'impôt doit être respectée. Néanmoins, les agents, signataires d'un contrat avant l'entrée en vigueur du nouveau dispositif fiscal prévue le 1er janvier 2014, revendiquent la non-rétroactivité de cette imposition. Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner votre point de vue sur ces deux revendications ?
Enfin, dans le cadre de la préparation du projet de loi sur la modernisation et le développement des outre-mer, tandis que le Sénat va bientôt débattre du projet de loi présenté par votre collègue Benoît Hamon, comptez-vous proposer une aide spécifique aux personnes publiques et privées qui vont engager des projets relevant de l'économie sociale et solidaire ?
Sur Mayotte tout d'abord, une instruction a été donnée par la chancellerie au Parquet pour régler le problème de la reconnaissance abusive de paternité, qui représente plus de trois mille cas annuels. S'agissant de la lutte contre l'immigration illégale, l'effectif maximal du centre de rétention administrative a été fixé à 100 personnes, par un arrêté préfectoral du 20 décembre 2012. Le règlement intérieur de ce centre a également été modifié pour prévoir de meilleures conditions d'accueil des familles et surtout des enfants. L'article 27 de la loi du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer a habilité le gouvernement, dans un délai de dix-huit mois, à adapter à la situation mahoraise l'ordonnance n° 2000-373 du 26 avril 2000 relative aux conditions d'entrée et de séjour des étrangers à Mayotte. S'agissant des mineurs étrangers isolés, un groupe de travail spécifique, piloté par le directeur général des outre-mer, auparavant délégué général à l'outre-mer et associé au secrétariat permanent des mineurs étrangers isolés installé par le préfet de Mayotte, s'est réuni à deux reprises et devrait rendre avant la fin de cette année ses préconisations.
La coopération avec les Comores, dans la lutte contre les trafics et l'immigration clandestine, connaît actuellement une pause. Des actions conjointes n'ont pas été prévues par la déclaration franco-comorienne signée à Paris, le 21 juin 2013. Certains Comoriens souhaitent la fermeture du territoire comorien, ce qui nous entraverait les opérations de reconduite à la frontière.
A qui appartiennent les avions qui assurent les opérations de reconduite à la frontière ?
Ces reconduites étaient d'abord assurées par le transport maritime auquel a été ajouté le transport aérien, après un accident mortel survenu à un migrant clandestin. Dans ce cadre, un marché a été passé avec une entreprise comorienne.
Mais les Comores viennent de s'opposer à ce qu'une compagnie mahoraise puisse obtenir des escales sur leur territoire et notre Gouvernement, en réaction, ne souhaite plus travailler avec la compagnie comorienne qui est chargée de cette mission de reconduite à la frontière.
Les Comores s'opposent-elles réellement à l'envoi d'un groupe de dix douaniers et gendarmes pour bloquer le trafic illégal ? C'est une question de souveraineté, et le gouvernement comorien ne le souhaite pas, c'est bien cela ?
La souveraineté est une question sensible, à l'instar de la délivrance des visas que le Gouvernement a assouplie en concertation avec les élus. Ainsi, les conditions d'obtention des visas sanitaires ont récemment évolué, avec la baisse à un demi-SMIC journalier, contre un SMIC journalier actuellement, comme justificatif de ressources, l'abaissement à 24 heures du délai de délivrance et la meilleure motivation de leur refus. La délivrance des visas de circulation pourrait également être à l'avenir simplifiée, en concertation avec Moroni qui pourrait nous fournir une liste de personnes susceptibles d'en être bénéficiaires.
Par ailleurs, le groupe de travail sur l'humanisation des conditions de vie des étrangers à Mayotte devrait rendre ses conclusions d'ici la fin de cette année. Les aides en nature aux demandeurs d'asile ont, quant à elles, bénéficié cette année d'un apport de 450 000 euros, via notamment l'accroissement des subventions octroyées à l'association « Solidarité Mayotte ». L'installation d'une antenne de l'office français de l'immigration et de l'intégration à Mayotte nous paraît cependant nécessaire et une expertise est actuellement conduite pour en définir les missions et en préciser les moyens.
Je partage le constat du sénateur Desplan sur la situation des prisons outre-mer. Le Gouvernement a érigé comme priorité la poursuite des travaux de reconstruction et d'extension en Martinique, à Mayotte, en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française. D'autres mesures sont également reconnues comme prioritaires : le développement des aménagements de peine, via la diffusion du bracelet électronique, l'amélioration des conditions de vie des détenus et d'accueil des familles, la lutte contre l'illettrisme et le recours au travail en détention. Le Gouvernement a l'ambition d'aller plus loin comme en témoigne le groupe de travail constitué à l'initiative de Mme la garde des sceaux et composé de onze parlementaires qui a vocation à débattre de l'ensemble des problématiques du secteur carcéral en outre-mer. Ce groupe de travail, qui devrait encore se réunir à deux reprises, devrait rendre un rapport courant mai 2014.
Voilà des années qu'une politique immobilière carcérale est attendue outre-mer ! Or, le Gouvernement a décidé, sur la période triennale 2013-2015, de financer les opérations prêtes à être lancées, comme la rénovation du Camp-Est en Nouvelle-Calédonie, la construction du centre pénitentiaire de Papeari en Polynésie française livrable fin 2016, la reconstruction de la prison de Majicavo à Mayotte et l'extension du centre pénitentiaire de Ducos en Martinique dont la livraison est prévue fin 2015. D'autres projets seront examinés dans le cadre de la prochaine programmation triennale 2016-2018 comme la reconstruction de la maison d'arrêt de Basse-Terre, l'extension du centre pénitentiaire de Baie-Mahault, la restructuration du centre pénitentiaire de Faa'a, en Polynésie française, la seconde extension du centre de Remire-Montjoly en Guyane et la construction d'un centre de courtes peines à Koné en Nouvelle-Calédonie.
En Guadeloupe, le centre pénitentiaire de Saint-Martin, promis depuis au moins une décennie, pose également un problème récurrent et l'ensemble des programmes, comme à Basse-Terre où l'actuelle prison avait été qualifiée de « honte pour la République », est en cours de finalisation.
S'agissant de l'aménagement des peines et du développement d'alternatives à l'incarcération, le déficit est réel, en raison du faible nombre d'associations susceptibles d'accueillir des peines d'intérêt général et de l'absence de centre de semi-liberté. Un nouveau marché doit d'ailleurs être lancé, début 2014, pour intégrer l'ensemble des réseaux d'opérateurs chargés d'assurer la surveillance des personnes disposant d'un bracelet électronique.
En ce qui concerne l'amélioration des conditions de vie des détenus et l'accueil des familles, la presque totalité des établissements pénitentiaires d'outre-mer ne dispose pas de parloirs familiaux. Les nouveaux établissements en cours de construction, à Papeari ou à Majicavo, en seront, quant à eux, pourvus. Sur la période 2013-2015, plusieurs établissements devraient faire l'objet d'études de faisabilité et d'aménagements spécifiques destinés à la surveillance électronique, comme ceux de Baie-Mahault en Guadeloupe, du Port à La Réunion, de Remire-Montjoly en Guyane, de Nouméa en Nouvelle-Calédonie, de Faa'a en Polynésie française et de Ducos en Martinique.
Le travail des détenus, souvent limité aux activités du service général, peine à se développer. Aussi, plusieurs ateliers sont en cours de création, comme au centre pénitentiaire du Port, à Baie-Mahault, ainsi qu'en Nouvelle-Calédonie. L'alphabétisation et l'éducation des détenus sont aussi considérées comme prioritaires par l'État qui en a la compétence.
La reconstruction et l'extension des centres pénitentiaires de la Guadeloupe me paraissent poser un problème de méthode. On évoque la reconstruction de la prison de Basse-Terre, sans avoir assuré au préalable l'extension du centre pénitentiaire de Baie-Mahault ni construit une prison à Saint-Martin susceptible d'accueillir les prisonniers qui en sont originaires et qui se trouvent actuellement en Guadeloupe. Que fera-t-on des prisonniers qui se trouvent à Basse-Terre ? Ne devrait-on pas plutôt débuter par l'extension du centre pénitentiaire de Baie-Mahault ?
Une solution simple avait, en son temps, été annoncée avec fracas par le secrétaire d'État à l'immobilier de la justice, M. Pierre Bédier : la fermeture pure et simple de Basse-Terre et la reconstruction, dans la commune voisine de Gourbeyre, d'un nouvel établissement pénitentiaire. Ce projet a été abandonné et les prisonniers sont toujours accueillis dans cette prison-couvent qui date, rappelons-le, de 1672 ! Je pense qu'on commencera d'abord par Baie-Mahault.
S'agissant de la question sur les finances des collectivités territoriales de Mayotte, je tiens à rappeler que la situation financière du Département de Mayotte demeure fragile. Les communes de Mayotte connaissent, elles aussi, de réelles difficultés puisqu'elles ne bénéficient pas de l'autonomie fiscale et elles éprouvent à leur tour les retombées des difficultés de la collectivité départementale. A la demande des élus, le code général des impôts sera appliqué à Mayotte dès le 1er janvier 2014. L'ordonnance fiscale, prise le 20 septembre dernier, prend ainsi en compte les spécificités territoriales de Mayotte et lui applique le régime fiscal le plus favorable, à savoir le régime de la Guyane avec des abattements de taxe foncière, de taxe d'habitation, d'impôts sur le revenu de l'ordre de 40 % et une taxe sur les salaires de 2 %. Cette ordonnance prévoit également un régime transitoire pour la régularisation de la situation des occupants sans titre avec, à terme, je l'espère avant la fin de l'année, la création d'un établissement public foncier d'État. Mais cette ordonnance n'aborde pas les mesures de compensation de la départementalisation qui sont, quant à elles, présentées à l'article 29 du projet de loi de finances initial pour 2014. En revanche, elle garantit aux communes les mêmes ressources qu'en 2012 et permet de pallier aux incertitudes quant au rendement de la fiscalité locale.
Mais un tel dispositif n'est pas sans poser problème, du fait de la limitation des ressources de ces communes à laquelle il conduit. En effet, l'excédent des recettes des communes sera reversé au Département, ce qui lui confère une plus grande part de ressources fiscales dynamiques, à l'instar des nouvelles ressources perçues au titre de l'octroi de mer. En 2014, les taux votés par les communes seront encadrés et tiendront compte du potentiel propre à chacune d'elles, et la liberté de taux, ainsi que l'usage du levier fiscal, leur seront reconnus dès 2015. Il faut ouvrir des perspectives, et la question du retour à la normalité comptable, budgétaire et fiscale du fonctionnement de ces collectivités est posée. Nous sommes d'accord sur le principe ; reste à trouver le véhicule idoine pour y parvenir.
Certains pourront certes critiquer la rapidité avec laquelle toute cette démarche a été conduite, mais je pense que nous avons bien amorcé à Mayotte la convergence avec la métropole qu'il aura fallu attendre près de soixante-cinq ans dans mon propre département ! J'ai rappelé aux élus de Mayotte qu'il fallait se concerter sur un projet de société et éviter la précipitation, faute de quoi une surenchère à visée électoraliste, exigeant l'égalisation à marche forcée, risquait de se faire jour. Afin d'éviter une telle réduction du débat public, je ne peux qu'inciter les élus Mahorais à s'associer au Gouvernement pour résoudre les problèmes sociétaux auxquels la départementalisation risque de se heurter.
S'agissant de la question du développement économique et social de l'outre-mer, j'ai reçu une autre feuille de route sur les thématiques de la compétitivité et de l'emploi, afin de convertir en normes les différents rapports parlementaires et en particulier ceux relatifs à la politique économique européenne, l'application de la loi pour le développement économique des outre-mer et de l'échéance qui frappe les zones franches d'activité en 2017. Mais comment réformer sans dépenser, compte tenu de la situation économique de la France ? C'est possible, à la condition de remettre à plat l'ensemble des dispositifs, mais encore faut-il avoir le courage politique de le faire.
Certaines solutions ont été esquissées pour s'émanciper, fût-ce provisoirement, des contraintes générées par le statut de région ultra-périphérique tout en restant dans l'Europe ? Sur les carburants par exemple, dans un secteur monopolistique contrôlé par l'État, comment dégager des marges de 10 à 15 % ? Ce n'est pas tant la compétitivité que la faiblesse de la fiscalité des régions qui explique le niveau de prix analogues entre la métropole et l'outre-mer. Le manque d'insertion économique dans les zones de voisinage immédiat est une difficulté indéniable pour les collectivités ultramarines. Il faut sortir d'un tel isolement. En ce sens, dans ma feuille de route figure l'actualisation des lois organiques relatives aux trois territoires que sont Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Saint-Pierre-et-Miquelon. Une mission est actuellement en cours pour redéfinir les dotations générales de décentralisation de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy qui est en contentieux avec l'État depuis 2008. Saint-Martin, quant à elle, pâtit de difficultés structurelles depuis l'obtention de son autonomie en 2007 et la passation de la convention avec l'État qui ne lui a pas octroyé les moyens techniques et humains d'assurer le recouvrement fiscal. Cette collectivité a d'ailleurs tout récemment voté une mesure fiscale dont la presse s'est faite l'écho, en imposant tous ses habitants à hauteur de cent euros, quelque soient leur situation ! Saint-Martin est donc loin d'être un paradis fiscal, avec une frontière fictive avec la partie hollandaise de l'île. Il faut réfléchir aux modalités de remise à parité de la partie française avec cette dernière qui est un pays et territoire d'outre-mer, au sens européen, à très large autonomie. Il faut trouver les dispositifs nécessaires pour assurer un juste équilibre entre les deux parties de l'île. En ce sens, l'approvisionnement en carburants peut constituer un début. Lorsque l'autonomie a été accordée en 2007 à Saint-Martin, j'étais alors président du conseil régional et siégeais en commission mixte paritaire au Parlement sur ce texte. Je me souviens de la dotation alors concédée à titre exceptionnel de dix-huit mois de recettes fiscales prélevées sur la région, octroi de mer compris, pour aider Saint-Martin. Au terme de ces dix-huit mois, le ministre d'alors, M. Yves Jégo a prorogé, de manière unilatérale, ce dispositif sur une même période, ce qui fut censuré, à la demande du groupe socialiste, par le Conseil constitutionnel. Depuis lors, il manque chaque année au budget de Saint-Martin quelque quatorze millions d'euros. L'absence de compensation, à laquelle s'ajoute le manque de recouvrement fiscal, alimente un déficit structurel.
Sur le crédit d'impôt, le dispositif demeure attractif et fera l'objet d'une évaluation courant 2016, lors de la préparation de la loi de finances initiale pour 2017. Si l'on peut toutefois éviter l'évaporation fiscale et la perte pour la collectivité de quelque trois cent millions d'euros, il faudra alors proposer d'autres solutions.
S'agissant de la Polynésie française, j'estime que la confiance est de retour, notamment parmi les investisseurs. Nous considérons que le plan de redressement proposé par le président Gaston Flosse va dans le bon sens à condition de s'assurer de sa bonne mise en oeuvre. Le Premier ministre vient d'ailleurs d'accorder le versement d'une avance de trésorerie de 41,9 millions d'euros à rembourser sur deux ans, dans le cadre d'une convention avec la Polynésie française, qui devrait figurer dans le prochain collectif budgétaire.
En Nouvelle-Calédonie, l'Accord de Nouméa, dont le contenu est constitutionnalisé, fournit la feuille de route suivie par l'État. Nous demeurons cependant ouverts à d'éventuelles concertations susceptibles d'être conduites à partir des élections de mai 2014.
Hors de l'espace Schengen, la libéralisation de la délivrance des visas a eu lieu dans la Caraïbe, dont se sont occupés, en leur temps, M. Novelli et Mme Penchard, à l'exception de trois pays qu'étaient Haïti, Saint-Domingue et la Jamaïque. Plus récemment, nous avons libéralisé la délivrance de visas touristiques pour l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud à destination des « Iles Vanilles » qui rassemblent notamment La Réunion, afin de capter les flux touristiques en provenance de ces importants pays.
Mesdames et messieurs les sénateurs, il est vrai que le budget, en termes relatifs, s'avère satisfaisant, mais nous savons qu'il reste un long chemin à parcourir. Je suis convaincu que la remise à plat, appelée de ses voeux par le sénateur Cointat, des dispositifs actuellement en vigueur nous permettrait de sortir des schémas pérennes qui n'ont pas jusqu'à présent permis de répondre durablement aux enjeux des outre-mer.
La dotation spéciale de construction et d'équipement des établissements scolaires à Mayotte devrait s'élever à 10 millions d'euros.
En ce qui concerne la grève dans les trois fonctions publiques au motif de la sur-rémunération des agents territoriaux, les syndicats se sont étonnés - et la presse s'est faite l'écho de cet étonnement - que le décret ne mentionnait pas la fonction publique territoriale parmi les bénéficiaires de ce dispositif. Il incombe aux collectivités elles-mêmes de prendre une délibération en ce sens, mais l'extension de la sur-rémunération aux agents de la fonction publique territoriale entraînerait pour Mayotte un coût de neuf à dix millions d'euros en fin d'année, si la décision est prise en prenant en compte la rétroactivité demandée. Dans les autres outre-mer, ce sont bien les collectivités qui payent cette sur-rémunération de l'ordre de 40 %, puisqu'elles assurent les recrutements.
Lorsque cette sur-rémunération a été instituée, un grand nombre de collectivités locales a refusé de la prendre en charge. Elle a ainsi été imposée, au-delà des textes réglementaires, par le Conseil d'État, pour l'ensemble des agents, y compris les contractuels de droit public. J'ai demandé aux services d'étudier la licéité d'un décret imposant une dépense supplémentaire aux collectivités territoriales ; cette démarche me paraissant, à première vue, constituer un sérieux accroc au principe de libre administration des collectivités territoriales.
La revendication de l'exemption fiscale de la prime d'éloignement, évoquée comme une sorte de contrat moral me paraît contestable, car cette prime est imposée dans l'ensemble des outre-mer. Et cette prime d'éloignement n'est pas le seul facteur de l'attractivité territoriale de Mayotte !
Si les dispositifs d'aide publique visés par le projet de loi actuellement défendu par M. Hamon seront applicables en outre-mer, la prochaine loi compétitivité que nous préparons devrait comporter un volet spécifiquement consacré à l'économie sociale et solidaire. En ce sens, dans le budget de la mission outre-mer, nous soutiendrons toutes les initiatives en faveur des centrales d'achat, les groupements d'achats de détaillants, les plateformes logistiques communes, la création de sociétés civiles d'intérêt collectif auxquelles les collectivités et les consommateurs peuvent être adhérents. Les actions de groupe en matière de santé ou d'environnement devraient également devenir applicables, comme l'a souhaité le président de la République qui a saisi Mme Marisol Touraine de cette question. Nous aurons l'occasion de vous revoir, à l'occasion de l'élaboration de ce projet de loi sur la compétitivité autour de problématiques précises comme l'aide à la personne, les filières d'approvisionnement ou encore la logistique.
Vous avez évoqué la question sensible de la coopération avec les Comores ainsi que la rencontre entre le président de la République et son homologue comorien du 21 juin dernier qui répondait à un double objectif : renouer le dialogue entre la France et l'archipel, interrompu depuis ces deux dernières années, et aboutir à la conclusion de cinq accords bilatéraux. L'évocation de ces accords bilatéraux par la déclaration finale diffusée au terme de cette rencontre n'a malheureusement pas été suivie d'effets. Certes, une nouvelle ambassadrice à la coopération dans l'Océan indien vient d'être nommée, ce qui ne peut qu'augurer du réchauffement des relations entre nos deux pays. Mais la France, principal bailleur de fonds des Comores, doit exiger des contreparties sans pour autant verser dans l'ingérence.
En outre, sur la question de la grève générale qui se déroule à Mayotte, le contrat moral invoqué par les grévistes ne repose sur aucun fondement juridique ; le principal motif de cette grève me paraissant plutôt résider dans le refus de la rétroactivité en matière fiscale.
Monsieur le sénateur, j'ai du mal à croire que, dans cette affaire, la loi des parties puisse supplanter la loi votée par le Parlement et que cette notion de « contrat moral » puisse s'imposer au détriment du statut général de la fonction publique revu en 1983, 1984 et 1986. Si les conditions de rémunération ont très partiellement contribué à l'attractivité du territoire de Mayotte, la solution proposée par le Gouvernement pour cette année est équilibrée, dans un contexte où chaque Français doit consentir à des efforts. Il importe de garder une vision objective de la réalité, et je ne comprends pas l'actuelle montée aux extrêmes constatables notamment dans ce dossier. S'il faut accepter le dialogue, il faut également respecter l'ordre public et assurer les conditions normales de la vie de nos compatriotes à Mayotte. Des instructions ont été données en ce sens, avec le souci de demeurer bienveillant, compréhensif, mais ferme.
On ne renonce pas aux accords avec les Comores et nous savons que la perspective de coopération a été bien accueillie par Anjouan. Mais tout ne doit pas être assujetti aux vicissitudes d'ordre politique perceptibles localement. D'ailleurs, la feuille de route assignée à la nouvelle ambassadrice régionale mentionne l'urgence de contribuer au réchauffement des relations entre les deux pays. Sur les 75 millions d'euros que coûtent les dispositifs de lutte contre l'immigration clandestine, le ministre des affaires étrangères, M. Laurent Fabius, et moi-même sommes d'accord pour prélever 20 millions d'euros destinés au financement de la coopération avec Anjouan, tout en poursuivant la réforme de la délivrance des visas.
Un premier plan anti-séisme a permis de mettre aux normes certaines écoles ici ou là, notamment eu Guadeloupe, mais nous sommes encore loin du compte ! Puisque la Guadeloupe est exposée au risque d'un grand séisme, je considère que la responsabilité des maires pourrait être engagée, faute de la mise aux normes des établissements scolaires. C'est pourquoi, monsieur le ministre, l'État compte abonder un nouveau plan séisme destiné à augmenter sensiblement le nombre d'établissements scolaires qui soient aux normes antisismiques ?
A cet égard, mon budget contient une ligne spécifique, de l'ordre de 3 à 4 millions d'euros, à laquelle peuvent s'ajouter les financements concédés au titre du fonds Barnier. Sur la base des estimations faites par le plan-séisme en 2006, il faudrait près d'un millénaire pour assurer la mise aux normes de l'ensemble des bâtiments menacés ! Nous avons décidé d'amplifier la mise aux normes des écoles, de l'ensemble des bâtiments publics et des logements sociaux. D'ailleurs, toute rénovation urbaine, comme à Pointe-à-Pitre, se doit de respecter les normes antisismiques. Mais le problème réside dans l'accélération de cette mise aux normes qui implique cependant le soutien des collectivités locales à hauteur de 20 %, dans un contexte budgétaire difficile. Je dois d'ailleurs consulter mon collègue, M. Philippe Martin, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, compétent également en la matière, pour optimiser les dispositifs existants.
Je voulais vous remercier, monsieur le ministre, pour la précision des réponses apportées.