Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 29 janvier 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • bachar-el-assad
  • peuple
  • peuple syrien
  • syrie
  • syrien

La réunion

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

Messieurs, soyez les bienvenus en France en général et au Sénat en particulier. Nous vous remercions d'avoir bien voulu accepter d'éclairer notre commission sur une question qui se complique de jour en jour et où les interrogations sont plus nombreuses que les certitudes.

Première certitude : votre pays est déchiré par une atroce guerre civile et le peuple français est de tout coeur auprès du peuple syrien pour partager sa peine et sa douleur. De tous les conflits, la guerre civile en est la forme la plus atroce. Il y aurait eu plus de soixante six mille morts en Syrie. C'est effrayant !

Seconde certitude ou plutôt confirmation : Bachar-el-Assad est un dictateur qui n'a pas hésité à faire bombarder son propre peuple, lui faire tirer dessus avec des armes lourdes et ordonné des actes de torture. La France ne le considère plus comme un interlocuteur. Nous vous soutenons. Pas seulement en paroles, mais aussi en actes puisque notre pays a été le premier à vous reconnaître et a entraîné derrière lui la plupart des grandes diplomaties occidentales.

Troisième certitude : les ennemis de Bachar-el-Assad sur le terrain n'ont pas, jusqu'à présent, réussi à conquérir les esprits et les coeurs. C'est du reste la une de l'International Herald Tribune le 16 janvier dernier. Notre pays ayant gardé beaucoup d'amis et de contacts en Syrie, certains témoignages jettent le trouble sur le comportement d'une partie des forces d'opposition. Je pense en particulier au front Al Nosra. Il est évident que nous ne souhaitons ni le chaos interne, ni la contagion à la région, ni le remplacement d'une dictature par une autre.

D'où des questions que tout le monde se pose et sur lesquelles vous allez, je l'espère, nous apporter un peu de lumière.

Première série de question : pourquoi l'opposition n'arrive-t-elle pas à s'unir et à former un gouvernement d'unité nationale ? Quand la patrie est en danger, il faut savoir faire taire les querelles et unir les forces. Nous ne sommes pas en train de vous dire de tout accepter sur l'autel des compromis. Il y a peut être de telles divergences entre vous sur la vision politique du « jour d'après » qui rendent impossible tout accord sur « le jour d'avant ». Mais nous avons besoin de comprendre. Nous avons besoin de savoir pour pouvoir mieux vous aider et savoir qui nous aidons.

Deuxième série de questions : comment arrêter cette guerre civile ? Bachar-el-Assad n'est ni Ben Ali, ni Moubarak. Le régime syrien n'est pas la dictature d'un homme seul, ni même d'une famille, comme l'étaient les régimes tunisien, égyptien, libyen ou irakien. S'il en était ainsi il ne serait plus là où il est depuis longtemps. Tout comme son père, Bachar-el-Assad est la partie visible d'un iceberg communautaire complexe que vous connaissez bien mieux que nous et son éventuel départ ne changerait peut être pas grand-chose à la réalité des rapports de force et de pouvoir dans le pays. Vu de Paris, nous comprenons qu'il a derrière lui deux millions de personnes appartenant à des minorités ethniques alaouites, mais pas seulement, encore plus résolues que lui à se battre pour leur survie. Et ce n'est pas les images de combattants islamistes, dont beaucoup ne sont même pas syriens, qui vont inciter ces minorités à changer de camp. Quelle est votre stratégie pour les convaincre à vous faire confiance ? Je pense bien sûr aux druzes et aux chrétiens.

Troisième série de questions : est-ce qu'une intervention occidentale pourrait changer quelque chose ? Les opinions publiques s'émeuvent mais nous écartons à ce jour une intervention directe. Alors que faire ? Beaucoup d'entre vous ne souhaitent pas d'intervention occidentale, mais souhaitent des livraisons d'armes. Ce serait contraire au droit international, et, pourtant, certains pays n'hésitent pas à le faire, ce qui leur donne une influence déterminante sur le terrain. Comment sortir de cette situation ? Quelle est votre position sur les propositions de négociations qui sont poussées, notamment par les Russes, avec pour base le document de Genève ?

Debut de section - Permalien
George Sabra, vice-président de la Coalition nationale syrienne

La France a allumé, il y a plus de deux siècles, la flamme de la Révolution, elle reste pour nous une référence. Je vous apporte le salut d'un pays libre qui voudrait atteindre la liberté mais qu'un régime d'oppression sanguinaire empêche, d'un peuple qui sacrifie chaque jour de nombreuses victimes pour sa liberté, qui a commencé à réagir lors des « printemps arabes » après des décennies d'oppression, d'un peuple qui fut l'un des premiers à obtenir son indépendance après la Seconde Guerre mondiale, fut membre fondateur des Nations-unies et de la Ligue arabe.

La révolution a commencé par des manifestations pacifiques auxquelles il a été répondu par des balles. Des militaires ont refusé de tirer sur les manifestants, ont déserté et constitué une nouvelle armée. C'est ainsi que la révolution a constitué son bras armé. Le régime a commis des actes de barbarie qui ont été dénoncés par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

La communauté internationale a hésité. Le régime disposait de nombreuses relations, mais la majorité des États ont soutenu politiquement et médiatiquement notre peuple. Cependant, le régime a bénéficié du soutien, y compris matériel, d'alliés forts. La Russie lui apporte un soutien politique qui a empêché le Conseil de sécurité de l'ONU d'agir. L'Iran appuie le régime de toutes ses forces et le Hezbollah libanais participe aux opérations. Le peuple syrien est resté seul. Le changement en Syrie va apporter le changement dans la région et notamment modifier la position de l'Iran car malheureusement le régime actuel a permis à l'Iran de constituer un pont vers le Proche-Orient et vers la Méditerranée.

Face à cette répression sanglante, un nombre croissant de Syriens ont rejoint l'opposition qui bénéficie du soutien du monde arabe. Des combattants, en provenance des pays arabes (Arabie saoudite, Libye) se sont joints à l'opposition. Ce n'est pas un fait nouveau, certains arabes ont combattu avec les Palestiniens au Liban. Le régime syrien a abandonné la garde de ses frontières et les forces de sécurité ne font plus que protéger le régime, ceci a permis à des combattants d'entrer dans le pays. Ils sont très minoritaires par rapport aux combattants syriens.

Le peuple syrien est déçu par le soutien de la communauté internationale. Elle nous a reconnu, lors de la conférence de Marrakech, le droit de nous défendre mais elle ne nous en donne pas les moyens. Le problème n'est pas seulement politique. Il est aussi de nature éthique et humaine. Comment refuser d'armer les combattants alors que le régime agit avec une telle brutalité et reçoit des soutiens de l'extérieur (comme celui de la Russie) alors que l'opposition et les combattants ne sont appuyés que par des déclarations médiatiques.

Il est du devoir de la communauté internationale pour préserver les vies humaines. Aujourd'hui on dénombre officiellement plus de 65 000 morts, mais ce nombre est probablement supérieur à 100 000. Lorsque le monde découvrira la vérité, il sera effrayé par la réalité.

Nous serons attentifs à recueillir l'avis libre d'un pays qui nous a soutenu quelque que soit son gouvernement. La France a toujours été du bon côté, notre peuple s'en souviendra. L'aide humanitaire de la France est reconnue. Nous avons beaucoup d'espoir dans la relation qui nous unit.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Goulet

Je souhaitais vous demander si vous n'étiez pas déçu de l'attitude des pays occidentaux, mais vous avez en partie répondu à ma question. Aussi, je voudrais simplement savoir quelle est votre position sur le déploiement des missiles Patriot à la frontière turque ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Vial

Je vous remercie, Monsieur le président, d'avoir invité le président du groupe d'amitié France-Syrie. J'aurais voulu avoir des précisions sur la composition de la Coalition. On a le sentiment que pour que la crise se dénoue, le pouvoir en place est encore trop fort et l'opposition trop faible. On observe de part et d'autre des interrogations sur la capacité de la Coalition telle qu'elle est à exerce le pouvoir.

Debut de section - PermalienPhoto de Christiane Kammermann

Si au début de sa présidence, Bachar el-Assad a manifesté des signes d'ouverture, nous allons vite déchanter. Nous n'aurions cependant pas pu imaginer les horreurs qui sont en train de se dérouler. Je pense aux dizaines de milliers de morts, aux 500 000 réfugiés, au désespoir du peuple syrien. La France doit se mobiliser pour aider ces réfugiés, pour favoriser une issue à une crise qui peut s'étendre à l'ensemble de la région.

Debut de section - Permalien
Georges Sabra, vice-président de la Coalition nationale syrienne

L'opposition syrienne est unique. Elle rassemble 80 à 85 % des opposants qui sont aujourd'hui unis par un pacte national et la volonté de créer un État démocratique et pluraliste. Cette opposition rassemble toutes les composantes de la société syrienne et toutes les sensibilités politiques, y compris les Frères musulmans. Elle est néanmoins diverse à l'image de la Résistance française pendant l'Occupation.

Vous m'avez interrogé sur les solutions permettant de mettre fin à la guerre. Cette dernière est attisée par les armes russes et les Iraniens. Le peuple syrien s'est révolté et ne renoncera jamais à sa liberté. Quant au régime actuel, il semble croire pouvoir dompter le peuple uniquement par la force. Bachar-el-Assad n'a aujourd'hui que la force des avions et des chars.

Comment cette guerre va-t-elle s'achever ? Sur le terrain, l'équation est claire. Malgré les grands déséquilibres en termes d'armement entre l'armée du régime et l'armée libre, cette dernière remporte, chaque jour, des victoires. La guerre se poursuit depuis quatre jours au coeur même de Damas.

Bachar-el-Assad n'appartiendrait déjà plus à l'avenir de ce pays, sans les avions qui bombardent les villes de façon aléatoire et conduisent leurs habitants à l'exode. Comment imaginer que Bachar-el-Assad puisse continuer à présider aux destinées de la Syrie ? C'est inenvisageable car il n'est plus apte à exercer le pouvoir. Appuyer le régime en place conduirait à cautionner des massacres. En tentant de se maintenir ainsi, ce dernier permet la réalisation des objectifs de l'Iran et de la Russie, en versant le sang syrien.

Toutefois, nous ne souhaitons pas voir des soldats étrangers sur notre sol ou des forces étrangères intervenir pour provoquer la chute de Bachar-el-Assad. Les Syriens sont aptes à le faire. Nous avons libéré déjà plus de 60 % du territoire. Nous demandons à exercer notre droit à nous armer afin de nous défendre, ce qui n'est pas trop exiger. Le fait de s'armer n'est en rien contradictoire avec le respect du droit international car le régime de Bachar continue à s'armer. Pourquoi le ferait-il et pas nous ? Soit les deux parties peuvent s'armer, soit elles ne sont pas autorisées à le faire. Il est juste que l'opposition puisse s'armer pour se défendre.

Sur la question des minorités, qui est une grande question, j'appartiens personnellement à une minorité, j'ai été exposé à des souffrances, j'ai passé de nombreuses années en prison, j'ai été torturé, comme beaucoup de Syriens. Aucune communauté n'est épargnée. Des milliers de jeunes alaouites ont d'ailleurs été emprisonnés, car ils s'opposaient au régime d'Hafez-el-Assad. L'injustice s'est abattue sur toutes les communautés et sur toutes les religions sans distinction. Le système sécuritaire en Syrie a étendu l'emprise de la peur sur tous les Syriens, jusqu'aux Syriens vivant en France qui ont peur pour leur famille, pour leur retour au pays, qui craignent pour le renouvellement de leur passeport. Ce régime terroriste sans équivalent a frappé tous les Syriens.

Il est vrai que le rôle des églises a pu être négatif du fait d'infiltrations du système sécuritaire dans l'ensemble du système religieux, milieux chrétiens mais aussi druzes et musulmans. Aujourd'hui, le régime syrien tue des sunnites, et pourtant il est soutenu par le mufti des sunnites. Les jeunes sont avec la révolution, beaucoup sont emprisonnés, d'autres participent à la résistance armée. Certains groupes sociaux, certaines communautés, hésitent encore. La Syrie de demain, que nous appelons de nos voeux, doit rassurer tous les Syriens, comme dans les années 1950, quand le régime syrien démocratique permettait à chacun de trouver sa place. Notre histoire offre d'ailleurs de nombreux exemples. N'oublions pas que nous avons eu un Premier ministre chrétien par le passé, et plusieurs fois ministre, élu librement par des musulmans, un kurde a été très actif dans la commission de rédaction de la Constitution, au premier plan de la vie démocratique. La Syrie connaît, dans son histoire, dans sa culture, depuis toujours, la diversité. Depuis 1 500 ans, les chrétiens sont à Damas, et le bourdon de leur église y sonne encore tous les dimanches. Pourquoi avoir peur aujourd'hui pour les Chrétiens ? C'est le régime Assad qui a créé cette peur entre toutes les communautés !

Nous ne souhaitons pas une intervention internationale sur le sol syrien, mais un soutien en armes pour renverser l'équilibre des forces et nous permettre de nous défendre contre l'aviation de Bachar-el-Assad. Nous avons besoin d'armes défensives pour protéger non seulement la vie des combattants mais également la vie des Syriens qui meurent sous les bombes de l'aviation gouvernementale.

Debut de section - Permalien
Ryad Seif, vice-président de la Coalition nationale syrienne

Je remercie le président de la commission pour l'occasion qui nous est donnée de transmettre à nos amis français des informations sur la tragédie que vit notre peuple. Le soutien de la France nous est précieux. Je voudrais insister sur le fait que ce qui se joue aujourd'hui en Syrie n'est pas un combat entre communautés mais un combat pour la liberté face à la dictature. Le régime fondé par Hafez-el-Assad n'est en rien un régime confessionnel. Toute son habilité diabolique a consisté à sceller un lien entre son destin et celui de la communauté alaouite. Mais personne plus que lui n'a nuit à cette communauté qui, aujourd'hui, se détourne majoritairement du pouvoir en place. Je suis convaincu que nous réussirons, une fois la victoire acquise, à assurer la paix entre les communautés. C'est la poursuite de la crise qui pourrait nous entraîner dans une guerre civile. S'agissant de la capacité de la Coalition à exercer les responsabilités, je n'ai aucun doute, la réunion du Caire a montré que nous étions capables de nous réunir sur un pacte national et de représenter l'ensemble des composantes de la société syrienne.

La Coalition est aujourd'hui ouverte à tous ceux qui veulent la rejoindre. Les Kurdes y sont partiellement représentés. Le Conseil national kurde a assisté à la réunion qui a institué la Coalition. Il occupe trois sièges sur soixante-dix et dispose d'un vice-président. Malheureusement, ils ne sont pas parvenus à ce jour à en désigner les membres. De nombreux courants, organisations et partis sont membres de la Coalition, tels que le parti communiste, le parti socialiste et la tribune démocratique.

La Coalition représente, sous sa forme actuelle, le peuple syrien ainsi que les forces de l'opposition et de la révolution, Si certaines conditions propices à la Coalition sont réunies, elle sera apte à constituer une alternative au pouvoir actuel, ainsi qu'elle l'a annoncé lors de sa création. Elle mènera le peuple syrien.

Je voudrais insister sur les motifs de notre combat. Bachar-el-Assad ne représente pas une autorité légitime. J'ai été témoin, en tant que membre de l'Assemblée nationale, de la modification de la constitution syrienne en « dix minutes » permettant ainsi à Bachar-el-Assad d'accéder au pouvoir en 2000 grâce à l'abaissement de l'âge d'éligibilité de quarante ans à trente-quatre ans. En conséquence, Bachar gouverne le pays illégalement.

La souffrance que notre peuple a endurée pendant quarante années est indescriptible. Chaque Syrien a perdu au moins un membre de sa famille ou a passé des années en prison. J'ai personnellement enterré un frère et un fils. J'ai également été incarcéré en prison pendant sept années. D'autres ont subi de plus grands sacrifices encore.

Lorsque les printemps arabes ont éclaté, le peuple syrien s'est réveillé et a décidé de se libérer de ce dictateur et de ce régime familial oppresseur. Le peuple ne se bat pas pour le pouvoir mais pour sa liberté et sa dignité afin de se défaire des chaines, vieilles de quarante ans que la famille el-Assad lui a forgées. Je ne pense pas que le peuple acceptera de retourner, de quelque façon que ce soit, sous le joug de la famille el- Assad.

La situation syrienne est devenue très dangereuse. Chaque jour qui passe joue contre les Syriens, contre la région et contre la communauté internationale. Accélérer la solution, c'est permettre de lutter contre des dangers qui risquent d'être malheureusement difficilement maîtrisables à l'avenir et dont les effets peuvent être catastrophiques. Le danger augmente jour après jour. Je fais référence notamment au terrorisme, aux tensions communautaires et à la destruction du pays et de ses infrastructures. Tous ces facteurs font de la Syrie un véritable volcan qui peut ébranler toute la région. Un appui réel à l'armée libre consiste à lui permettre d'avancer car malgré les armes lourdes et les avions de guerre qu'utilise Bachar-el-Assad, l'opposition résiste et continue à marquer des points. Cette dernière avance lentement mais sûrement au nom de la révolution.

Debut de section - Permalien
Georges Sabra, vice-président de la Coalition nationale syrienne

En Syrie, nous ne nous sentons pas concernés par cette question, question stratégique, défensive, pour un pays voisin, la Turquie. La décision éventuelle d'emploi de ces armes se fera en d'autres lieux. Ils ne sont pas un élément de notre conflit. Leur déploiement résulte de la tentative d'implication de la Turquie dans le conflit syrien par le régime de Bachar-el-Assad. La Turquie a le droit de se défendre.

Bachar-el-Assad a pu produire, dans un premier temps, une impression favorable, mais tout comme Staline en son temps ! Ancien militant communiste, j'admirais Staline à ses débuts. J'ai changé d'avis en connaissant ses agissements en Union soviétique. Le véritable test qui a révélé la véritable personnalité de Bachar-el-Assad a été la survenue de la révolution, qui a montré qu'il n'était pas différent de son père. Beaucoup de Syriens pensent même que ce dernier n'aurait pas réagi aussi stupidement que son fils.

L'État ne s'occupe plus des citoyens en Syrie. Dans les régions encore contrôlées par le régime, les prix explosent, même le pain se fait rare. Toutes les communautés étrangères ont quitté le pays, y compris les Russes, les derniers en date. Les populations civiles sont aveuglement bombardées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

La relation entre le peuple syrien et le peuple français est ancienne et plonge ses racines loin dans l'histoire. Nous nous connaissons bien. Nous savons qu'il y a eu en 1982, une répression extrêmement dure par Hafez-el-Assad d'une rébellion des Frères musulmans, qui jouent sans doute aujourd'hui un rôle important dans le conflit en Syrie. Vous avez rappelé à juste titre que la Syrie était membre fondateur des Nations unies, dont la Charte consacre le principe de non ingérence dans les affaires intérieures d'un État. Cette position a certes été nuancée quelque peu par l'émergence, en 2005, du principe de la « responsabilité de protéger », appliquée dans l'intervention en Libye, mais contestée par la Russie et par la Chine. Aujourd'hui, toute intervention internationale nécessite l'accord de la Chine et, surtout, de la Russie et, compte tenu de ses liens anciens avec le régime el-Assad, à moins qu'elle ne se déroule en dehors du cadre de la légalité onusienne... Chacun doit avoir conscience de ce problème juridique réel.

Nous sommes tous pleinement conscients de la brutalité du régime, mais cela ne nous empêche pas de nous interroger sur la structuration de l'opposition syrienne. Vous avez fait un parallèle entre celle-ci et l'opposition en France au régime de Vichy. Elle était certes diverse, mais le général de Gaulle avait établi une autorité incontestée sur l'ensemble de ses composantes, y compris les communistes, ce qui n'était pas une mince affaire, et avait recréé un État, avec l'aide de Jean Moulin, d'abord. C'était une puissance d'ordre. En Syrie, beaucoup de questions se posent, à la lecture de la presse, sur le rôle des éléments djihadistes, importants, qui se renforcent. La question que nous nous posons est la suivante : cette affaire doit-elle se jouer sur le terrain, en fonction des rapports de forces, compte tenu de l'aide que vous apportent certains pays tels l'Arabie saoudite et le Qatar ? Et si, pour mettre fin aux souffrances des populations, et à ce drame, si la crise ne devait pas se dénouer sur le terrain, comment créer des conditions d'une autodétermination démocratique syrienne, qui doit rester notre objectif ? Comment envisager des négociations de la communauté internationale autour des États-Unis et de la Russie ? Medvedev a pris des positions récentes qui entrouvrent les perspectives d'une solution de négocier. Qu'en est-il ? Comment permettre au peuple syrien de s'exprimer dans des élections libres ? Comment garantir la liberté du processus électif et s'assurer que les groupes djihadistes ne feront pas demain la loi en Syrie ? Envisagez-vous concrètement une issue de ce type ? A quelles conditions ?

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Je souhaite que la Syrie connaisse la liberté. J'observe que la France a été aux côtés d'autres peuples dans ce combat. Et certains s'étonnent que ces peuples soient aujourd'hui très réticents à une intervention française au Mali.

Cette situation soulève des inquiétudes et des interrogations sur lesquelles j'aimerais avoir votre point de vue.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Vous dites souhaiter des armes, mais on peut se demander si l'afflux d'armes ne créera pas encore plus de morts. Peut-être une solution négociée au niveau international, avec notamment la Russie, ne permettrait-elle pas de faire taire les armes et de jeter les bases d'une solution politique. En un mot : comment voyez-vous cette sortie de crise ?

Debut de section - PermalienPhoto de Rachel Mazuir

Je suis admiratif de ce que vous faites. J'ai le sentiment que les minorités sont aujourd'hui les otages d'un conflit entre sunnites et chiites et, plus généralement, que la Syrie est l'otage du conflit entre l'Arabie saoudite et l'Iran.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Est-ce que, compte tenu de la situation régionale, il n'y a pas un risque de dislocation de la Syrie ?

Debut de section - PermalienPhoto de Josette Durrieu

Je salue votre combat pour la liberté. J'observe qu'il y a au sein de la Coalition les mêmes islamistes que nous combattons au Mali. J'ai pu lire les interviews du général Manaf Tlass qui était un proche du clan el-Assad avant de rejoindre la France. Pouvez-vous nous indiquer les relations que vous entretenez avec lui ? La Turquie fait un effort remarquable pour vous aider et pour aider les réfugiés syriens. N'y a-t-il pas dans cette générosité des arrières-pensées politiques pour un pays qui a une ambition régionale.

Debut de section - Permalien
Ryad Seif, vice-président de la Coalition nationale syrienne

Bien entendu, tous cherchent une solution rapide qui épargne le peuple syrien. Bachar-el-Assad, lors de son dernier discours, a réitéré son refus de toute solution politique. La Coalition, depuis sa création, ne s'oppose pas à une telle solution mais à la seule condition que Bachar n'en fasse pas partie, ni pendant, ni après la période transitoire. Le retrait de Bachar doit permettre aux membres ou non de l'opposition d'étudier l'ensemble des sujets qui seront sur la table.

Si l'opposition est dotée d'un armement approprié, elle pourra remporter des victoires. Elle serait en position de changer les rapports de force face aux Syriens sous domination de Bachar mais qui croient encore à la solution politique. Nous sommes ouverts à toute solution politique, à condition que Bachar-el-Assad n'en fasse pas partie.

Nous avons entretenu un dialogue avec les autorités russes qui détiennent la clé de ce conflit. Nous espérons que les amis de la Syrie, à la tête desquels figure la France, oeuvrent afin de trouver une solution acceptable avec notamment les Russes. Si les Russes sont convaincus que la solution est entre les mains des Syriens, ainsi qu'ils le prétendent, ils pourraient peut être coopérer et préparer le terrain de la négociation pour un accord global entre des représentants, d'une part, du régime actuel, comme ceux issus du parti Baas ou des officiers et, d'autre part, de la délégation de la Coalition. Il est toutefois impératif d'écarter, au préalable, Bachar-el-Assad. C'est une condition cruciale avant de déterminer les étapes transitoires qui s'achèveront par l'organisation d'élections libres.

Debut de section - Permalien
Georges Sabra, vice-président de la Coalition nationale syrienne

Jean-Pierre Chevènement a parlé du principe de non ingérence. Mais peut-on encore considérer qu'il s'agit d'une affaire intérieure quand 1 million de Syriens sont réfugiés dans les pays voisins, quand l'ensemble de la région est déstabilisé ? Avec ces niveaux de violence, d'intégrisme, de terrorisme, est-ce toujours une affaire interne ? Quand un peuple de 23 millions de personnes est martyrisé, quand le problème concerne toute la région, est-ce toujours une affaire interne ? Les frappes aériennes font 100 à 150 victimes par jour. Il faut paralyser l'aviation de Bachar-el-Assad pour diminuer le nombre de victimes !

Pour revenir sur le parallèle avec le général de Gaulle, ce dernier était légitime. Quand il a perdu le référendum, il est parti. Bachar-el-Assad reste depuis deux ans, alors que les Syriens ne veulent plus de lui.

Les minorités sont-elles les victimes du conflit entre sunnites et chiites ? Oui, certainement, mais c'est le régime qui a créé cette situation, en ouvrant la porte à l'Iran et en important la révolution iranienne en Syrie. Toutes les minorités doivent se tenir aux côtés de la liberté, car nous sommes tous Syriens avant d'être druzes, sunnites ou chiites.

La dislocation est une inquiétude, mais notre histoire a montré notre capacité à dominer les forces centripètes : en 1929, le schéma institutionnel de la création de trois États, l'un druze, l'autre alaouite, le dernier pour les autres communautés, a fait long feu car il n'avait pas de fondement social réel. Nous sommes les enfants de ce peuple syrien qui a déjà refusé, par le passé, la partition.

Il reviendra au peuple syrien de décider du sort du général Manaf Tlass.

La Turquie apporte un soutien essentiel au peuple syrien. Je voudrais, au nom de la Coalition, les remercier et remercier aussi la France pour son soutien. L'histoire des relations entre la Syrie et la France est ancienne. Ce n'est pas seulement une relation entre États mais c'est un dialogue entre les cultures et entre les sociétés.

Debut de section - Permalien
Monzer Makhous, ambassadeur de la coalition en France

Je vis en Europe depuis 35 ans. Aussi je comprends bien les préoccupations des Français sur deux questions qui me paraissent essentielles. La première est le terrorisme : le risque de voir la Syrie, à l'instar de l'Afghanistan ou de l'Irak, devenir un sanctuaire pour les terroristes. Le risque existe, notamment si nous laissons la situation pourrir.

C'est pourquoi, le peuple syrien a le droit de bénéficier de la solidarité internationale dans ce combat déséquilibré. Il est la cible d'une armée, composée d'un demi-million d'hommes alors qu'il a commencé sa révolution pacifiquement. Aucune balle n'a été tirée par les manifestants pendant sept mois, ce qu'a reconnu Bachar-el-Assad. L'armée syrienne libre s'est formée lors d'une scission au sein des forces du régime, face au dilemme de devoir tirer sur les manifestants dont certains sont membres des familles des soldats.

Ceux que l'on décrit comme des extrémistes ont rejoint l'armée libre depuis quelques mois seulement, en raison de l'atrocité des crimes commis ainsi que de la passivité et l'impuissance de la communauté internationale à fournir une quelconque aide au peuple syrien.

En revanche, le régime russe, qui se prétend démocratique aujourd'hui alors qu'il est le prolongement du régime soviétique, fournit le régime en armes et fournit des armes en Iran et aux Irakiens également. C'est bien là le fonds du problème.

- Présidence de M. Daniel Reiner, vice-président -

La commission examine le rapport de Mme Michelle Demessine et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 582 (2011-2012) autorisant l'approbation de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le Gouvernement de la République française et l'Institut international des ressources phytogénétiques (IPGRI) relatif à l'établissement d'un bureau de l'IPGRI en France et à ses privilèges et immunités sur le territoire français.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

Mes chers collègues, je vous présente rapidement, en remplacement de notre collègue Michèle Demessine, qui accompagne le président du Sénat dans un déplacement officiel, le rapport sur l'accord entre la France et l'Institut international des ressources phytogénétiques, ou IPGRI.

De quoi s'agit-il ? C'est un « accord de siège » conclu, par simple échange de lettres, entre notre pays et cette organisation internationale, implantée près de Montpellier et chargée de recherche agronomique. Les dispositions en sont classiques, il s'agit d'octroyer des privilèges et immunités traditionnellement accordés à une organisation internationale : inviolabilité des locaux et de la correspondance, immunité de juridiction et d'exécution. Je vous ferai grâce du détail du dispositif, d'ailleurs assez court, et me limiterai à deux remarques pour souligner l'importance de cet accord, malgré son objet limité.

D'abord, il contribue au rayonnement international du pôle de recherche « Agropolis » à Montpellier.

Ce n'est pas un hasard si Montpellier a été sélectionnée, au terme d'une compétition internationale lancée en 2010, l'opposant à Nairobi, New Dehli, Addis Abeba et Rome, afin d'accueillir le siège du Consortium international de recherche « CGIAR » qui est la « maison mère » de l'IPGRI.

Montpellier dispose en effet depuis plusieurs années d'un pôle d'excellence en matière de recherche agronomique. Plusieurs organismes de recherche y sont implantés comme le CIRAD, l'INRA, l'IRD, ou le CEMAGREF. L'installation du Consortium « CGIAR » donne une visibilité et une notoriété accrues au pôle scientifique montpelliérain et renforce la logique de constitution d'une communauté d'excellence, avec 2 300 scientifiques appartenant à plus de 25 établissements de recherche. A l'heure où nous souhaitons tous engager le redressement économique de notre pays, nous ne pouvons que nous féliciter de cette dynamique et de cette visibilité internationale, qui irrigue l'économie de nos territoires.

Deuxième intérêt de cet accord, il va contribuer à conforter la recherche sur la biodiversité.

Flambée des prix agricoles et chocs climatiques sont à l'origine de crises alimentaires et humanitaires, terreau des crises politiques au Sahel et dans la Corne de l'Afrique par exemple. Aujourd'hui, 1 milliard de personnes sont sous-alimentées, dont 650 millions en Asie-Pacifique et 250 millions en Afrique subsaharienne. Demain, avec 9 milliards d'individus en 2050, c'est un vrai défi alimentaire qui se pose à notre planète.

La recherche agronomique est susceptible d'apporter une réponse opérationnelle aux trois grands défis de la sécurité alimentaire :

Le défi de la production : prenons le cas de l'Afrique. Aujourd'hui les rendements céréaliers sur le continent stagnent à 13 quintaux par hectare. Pourtant l'Afrique possède un immense réservoir de terres cultivables. Ces atouts doivent être valorisés. Mais l'augmentation de la productivité devra se faire en préservant l'environnement, la santé des populations et des écosystèmes. Le second défi, c'est la gestion durable des ressources naturelles et des « biens publics mondiaux », c'est le développement d'une agriculture soutenable. L'évolution du climat va aggraver la situation dans les zones semi-arides, où vit un tiers de la population africaine, le troisième défi est de renforcer la résilience des systèmes de production.

La recherche est donc vitale, et il faut la diriger sur les petits producteurs, sur les secteurs de l'agriculture familiale et vivrière. Aujourd'hui, 60 % des personnes qui ont faim dans le monde sont des petits producteurs : ce sont eux qu'il faut aider. De « petites » innovations en matière agricole peuvent avoir un large effet pour plusieurs millions de personnes. C'est précisément l'objet des recherches de l'IPGRI : la durabilité des cultures, la résilience des systèmes de production, l'augmentation des espèces et des variétés pour lutter contre la malnutrition.

C'est pourquoi je vous recommande d'adopter le présent projet de loi, qui pourrait faire l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique le 5 février.

Puis la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

- Présidence de M. Jean-Louis Carrère, président -

La commission examine le rapport de M. Xavier Pintat et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 527 (2011-2012) autorisant la ratification de la convention relative à la construction et à l'exploitation d'un laser européen à électrons libres dans le domaine des rayons X.

Debut de section - PermalienPhoto de Xavier Pintat

Le projet de loi soumis à votre examen demande l'approbation d'une convention signée le 30 novembre 2009 à Hambourg dont l'objet est de fixer les conditions de construction et d'exploitation en commun par plusieurs Etats européens, actuellement au nombre de douze, d'une grande installation de recherche scientifique : le laser européen à électrons libres, le XFEL (X Ray Free Electron Laser).

Les lasers à électrons libres (FEL) créent une lumière considérablement plus puissante et plus précise que toutes les autres sortes de lasers. En outre, cette lumière peut être ajustée dans une gamme très large, allant de la lumière infrarouge aux rayons « X-durs ». Pour cette raison, ils ouvrent un vaste domaine d'expérimentation et de recherche dans plusieurs disciplines et constituent une porte d'accès au monde de l'infiniment petit et de l'infiniment rapide. Des lasers à électrons libres sont en développement aux USA et au Japon en utilisant des accélérateurs linéaires (LINAC) existants. Le projet des Etats-Unis, Linac Cohérent Light Source (LCLS) à l'Université Stanford est basé sur le Linac SLAC. Son exploitation a commencé en 2009. Le projet japonais, SPring-8 Compact SASE Source (SCSS) a produit ses premiers photons en 2011.

Le projet européen XFEL entrera en fonctionnement en 2013, sur le site DESY à Hambourg. Technologiquement, le projet XFEL devrait avoir des performances supérieures à celles du LCLS américain ou du SCSS japonais. Il intégrera en effet les avancées technologiques acquises de l'expérience des autres machines et en particulier du FLASH allemand. Il a par ailleurs été prévu dès l'origine qu'il utiliserait les technologies plus performantes de la supraconductivité.

La convention dont vous êtes saisie autorise la participation de la France à cette très grande infrastructure de recherche. La construction des bâtiments à Hambourg a débuté en 2009 et le forage des tunnels - qui s'élongeront sur 3,4 km - en juillet 2010. La mise en service est prévue pour fin 2015, début 2016.

S'agissant du cadre juridique, la convention prévoit que l'installation XFEL est gérée par une société à responsabilité limitée à but non lucratif de droit allemand avec des associés internationaux et dont les statuts constituent l'annexe de la convention. Les associés français de cette société, qui agiront pour le compte de l'État, seront deux grands organismes publics de recherche, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et le Commissariat à l'énergie atomique (CEA). La société est dirigée par un conseil, regroupant la totalité des associés, et un comité de direction.

La Convention XFEL a été négociée en même temps que la Convention « FAIR », que vous allez examiner dans quelques instants, et qui concerne la recherche sur les ions et les antiprotons. La Convention FAIR, qui intéresse aussi une infrastructure établie en Allemagne, est construite sur le même modèle juridique : convention intergouvernementale et société à responsabilité limitée à but non lucratif de droit allemand.

Les coûts de construction (l'investissement, le personnel et la mise en service) ont été ré-estimés en 2012 à 1,147 milliard d'euros (aux conditions économiques 2005). Sur cette somme, la France s'est engagée à fournir, pour la construction, 40 millions d'euros de contribution en nature aux conditions économiques 2009.

Au terme de cette phase, la participation au fonctionnement sera limitée à 2 %. En 2012, les coûts de fonctionnement étaient estimés à 103,3 millions d'euros par an. En tant que pays hôte, l'Allemagne couvre 54 % des coûts de construction. La Russie participe à 23 %, le reste se partage sur les autres membres, entre 1 % et 3,5 % chacun.

Pour la France, la participation à ce projet ouvrira, à un coût modeste, à nos chercheurs un accès à un instrument sans équivalent en Europe. Les chercheurs français intéressés à ces différents domaines relèvent pour l'essentiel du CNRS et du CEA, mais il est probable que les projets seront portés par des équipes multidisciplinaires et multinationales.

Le projet soumis à votre approbation oeuvre dans l'intérêt de notre pays et en particulier de notre communauté scientifique. Il renforce la coopération européenne.

Je vous recommande donc, sans hésitation, de l'adopter et de procéder à son examen sous forme simplifiée en séance publique.

Puis la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

La commission examine le rapport de M. Jean-Louis Carrère et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 375 (2011-2012) autorisant la ratification de la convention n° 187 de l'Organisation internationale du travail relative au cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Louis Carrère

La Conférence générale de l'Organisation internationale du travail (OIT) a adopté, le 15 juin 2006, une convention n° 187 concernant le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé du travail. La ratification de convention est soumise à l'autorisation du Parlement.

Je vous rappelle que l'OIT est l'institution chargée au niveau mondial d'élaborer et de superviser les normes internationales du travail. C'est la seule agence des Nations unies dotée d'une structure tripartite qui rassemble des représentants des gouvernements, des employeurs et des travailleurs. Depuis 1947, l'OIT a adopté une trentaine de textes dans le domaine de la sécurité et de la santé au travail.

Les accidents du travail et les maladies professionnelles sont un thème majeur de l'organisation, car ils constituent un véritable fléau mondial.

Quelques chiffres significatifs communiqués par l'OIT : « toutes les 15 secondes, un travailleur meurt d'un accident ou d'une maladie liés au travail ; toutes les 15 secondes, 160 travailleurs sont victimes d'un accident lié au travail ».

Chaque jour, 6 300 personnes meurent d'un accident du travail ou d'une maladie liée au travail - soit plus de 2,3 millions de morts par an. La plupart des 317 millions d'accidents qui se produisent chaque année se traduisent par des absences prolongées du travail.

Le coût humain de cette menace est donc considérable et on estime que le fardeau économique de ces mauvaises pratiques représente, tous les ans, 4 % du produit national brut mondial.

Les conditions de sécurité et de santé au travail varient très sensiblement selon les pays, les branches d'activité et les groupes sociaux. Le nombre de décès et de lésions est particulièrement élevé dans les pays en développement où une grande partie de la population travaille dans des secteurs dangereux tels que l'agriculture, la pêche ou l'exploitation minière. Ce sont les plus démunis et les moins protégés - en général les femmes, les enfants et les migrants - qui sont les plus touchés dans le monde.

L'adoption, par la Conférence internationale du Travail en 2006, de la convention (n° 187) sur le cadre promotionnel pour la sécurité et la santé au travail, et de la recommandation (n° 197), constitue une initiative nouvelle. Elle fixe les principes généraux et les objectifs essentiels auxquels les États sont invités à adhérer.

Outre le rappel des droits fondamentaux des travailleurs en matière de protection de leur intégrité physique et mentale au travail, le préambule réaffirme l'importance de promouvoir, de façon continue, une culture de prévention nationale.

Le dispositif fixe l'architecture générale du cadre promotionnel qui doit comprendre une politique nationale d'une part, un système et un programme national d'autre part. Les objectifs consistent à promouvoir l'amélioration continue de la sécurité et de la santé au travail et à prendre des mesures actives.

Le dispositif définit le cadre de la politique nationale avec :

- comme méthode, la consultation des organisations d'employeurs et de travailleurs les plus représentatives,

- et comme domaines, l'évaluation des risques et dangers, la lutte à la source contre ceux-ci, le développement d'une culture de prévention.

Il définit également le contenu d'un système national à mettre en place qui doit inclure :

- la législation, et le cas échéant les accords collectifs,

- une autorité ou un organisme responsable,

- des mécanismes assurant le respect des normes y compris des systèmes d'inspection,

- la promotion de la coopération entre employeurs et travailleurs,

- ainsi que, s'il y a lieu la mise en place : d'une offre de formation, de services de santé au travail, d'un secteur de la recherche, d'outils statistiques, d'une collaboration avec les régimes d'assurances et de sécurité sociale, et de mécanismes de soutien pour l'amélioration des conditions dans les petites entreprises et dans l'économie informelle.

Il donne des indications sur le contenu du programme national à élaborer, à mettre en oeuvre, à contrôler et à évaluer périodiquement avec les organisations les plus représentatives des employeurs et des travailleurs.

L'étude d'impact montre que la France satisfait d'ores et déjà aux exigences de la convention. Il n'y a donc aucun impact juridique ou économique pour notre pays, si ce n'est de maintenir ce cadre et de promouvoir une amélioration continue de la sécurité et de la santé au travail.

La convention appelle les observations suivantes.

La démarche est originale puisqu'il ne s'agit pas de prescrire des normes mais d'inciter les États à mettre en place des politiques publiques. Elle est sans doute la plus appropriée compte tenu de la diversité des situations en fonction du niveau de développement économique et social des États, de leurs approches et de leurs capacités d'intervention en ces domaines. Elle incite les États à mettre en oeuvre une démarche de progrès dont elle définit les instruments sans exiger d'engagements sur les normes à atteindre, ni en terme de calendrier, ce qui est acceptable pour le plus grand nombre. C'est ce qui a permis l'adoption de la convention à une très large majorité - 455 voix contre 2 et 5 abstentions- et devrait faciliter sa ratification.

Cette démarche est positive car elle est susceptible de conduire à l'amélioration de la protection des travailleurs dans les pays où celle-ci est inexistante ou insuffisante. On peut d'ailleurs se réjouir de tout ce qui contribue à une égalisation des conditions de travail dans le monde. J'ajoute que, de façon indirecte, les entreprises implantées dans les États qui ne disposent pas de législation sur la sécurité et la santé au travail bénéficient d'un avantage compétitif difficilement soutenable, car il se crée au détriment de la santé et du bien-être des travailleurs ou des populations locales. Sans méconnaître la nécessité d'une progressivité dans l'application de standards, il convient, malgré les critiques souvent mises en avant de « protectionnisme », de continuer à affirmer que cet avantage n'est pas acceptable. La démarche proposée, incitative plus que prescriptive, devrait engager tous les États à progresser en ce domaine.

Elle constituera un point d'appui pour les organisations de travailleurs pour susciter l'action des autorités politiques et des employeurs.

Cette convention suscite néanmoins des interrogations car elle est peu contraignante. Le dispositif ne comprend pas de véritables sanctions. La convention ne prévoit que la présentation à la Conférence générale d'un rapport sur son application. La publicité donnée à ce document pourrait constituer une forme de sanction. Mais sa portée paraît bien faible.

Sous réserve du droit national, on peut imaginer, dans certains États, que la carence dans la mise en oeuvre de la convention puisse susciter des recours de la part de travailleurs ou de leurs organisations ou puisse venir à l'appui de contentieux en cas de préjudice comme un élément de preuve supplémentaire.

Il n'existe pas plus de mécanismes d'incitation à la ratification de la convention par les États. D'ailleurs le processus de ratification est lent. Je constate que 25 États ont ratifié cette convention, à ce jour. Le Japon et la Corée du sud ont été les premiers à l'avoir ratifié. On ne compte que 10 pays membres de l'Union européenne dont l'Allemagne, la Grande-Bretagne et l'Espagne, et bien peu de pays en développement. On constate l'absence de nombre de pays émergents comme la Chine, le Brésil, l'Inde, les pays d'Asie du Sud-est (à l'exception de la Malaisie et de Singapour), mais aussi celle des États-Unis.

La France n'a d'ailleurs pas été très performante. Je regrette vivement, pour ma part, que notre pays, qui est le 2ème État de l'OIT à avoir ratifié le plus grand nombre de conventions et qui a milité au sein de cette organisation en faveur de cette convention, ait attendu près de six ans avant de solliciter des assemblées parlementaires l'autorisation de procéder à sa ratification, quels qu'en aient été les motifs.

Je me demande si des incitations ne pourraient pas être mises en place, par exemple en conditionnant à sa ratification préalable, l'adhésion à certaines organisations internationales comme l'OMC, ou le bénéfice de certaines politiques de coopération ou de voisinage de l'Union européenne (si tant est que l'ensemble des pays de l'Union ratifient la convention) ou encore la recevabilité de la candidature aux marchés publics. Je souhaiterais que la France entreprenne des démarches en ce sens auprès des institutions et de ses partenaires de l'Union européenne et que, parallèlement, elle réfléchisse à la mise en place d'une expertise pour aider les pays les plus pauvres à mettre en oeuvre cette convention.

En conclusion, et sous ces réserves, je propose que la commission se prononce en faveur de la ratification de cette convention et propose son examen par la Sénat sous la forme simplifiée.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

La commission examine le rapport de M. Michel Boutant et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 606 (2011-2012) autorisant l'approbation de la convention relative à la construction et à l'exploitation d'une infrastructure pour la recherche sur les antiprotons et les ions en Europe.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Boutant

Nous sommes appelés à nous prononcer sur un projet de loi autorisant l'approbation d'une convention relative à la construction et à l'exploitation d'une infrastructure pour la recherche sur les antiprotons et les ions en Europe.

Cette installation, baptisée « FAIR » (en anglais Facility for Antiproton and Ion Research - Infrastructure de recherche avec des antiprotons et des ions) est conçue comme un complexe d'accélérateurs de particules unique au monde.

Elle doit être construite sur le campus de GSI, le centre de recherche sur les ions lourds, situé à Darmstadt, en Allemagne.

Grâce à un ambitieux programme de recherche, FAIR se penchera sur des sujets fondamentaux tels que la naissance et l'évolution de l'univers, l'origine de la matière. On pourra étudier la matière dans le noyau à la plus petite échelle, étudier la manière dont les briques élémentaires du noyau s'organisent et se lient ensemble mais aussi la physique de l'atome et l'interaction mutuelle des différents composants et états de la matière, jusqu'à la physique des plasmas.

Ce projet est né d'une initiative du ministère fédéral allemand de l'Education et de la Recherche. Des négociations se sont engagées à partir de la fin de l'année 2004 avec les partenaires potentiels de ce projet, dont les représentants du ministère français en charge de la recherche. Son caractère prioritaire pour la recherche européenne a été reconnu dès 2006 par l'Union européenne.

Les négociations se sont poursuivies jusqu'à l'été 2010. Elles ont porté sur les aspects juridiques et financiers du dossier, et ont permis en outre d'en valider les éléments scientifiques et techniques, tels qu'ils avaient été étudiés par des chercheurs et ingénieurs venus des laboratoires compétents des différents Etats intéressés (comme le CEA et le CNRS pour la France).

La Convention dont nous sommes saisis a été signée à Wiesbaden le 4 octobre 2010 par neuf Etats (dont la France, l'Allemagne, la Russie et l'Inde). Elle a pour objet de fixer les conditions de construction et d'exploitation en commun par plusieurs Etats d'une grande installation de recherche scientifique, l'ensemble de sources et d'accélérateurs de particules massives FAIR.

Quelle sera la contribution de la France à ce projet ?

Sur un coût global de construction estimé à plus de 1 milliard d'euros, notre contribution aux coûts de construction y compris la mise en service de la machine, a été fixée à 27 millions d'euros. Elle sera apportée à parts égales par le CEA et le CNRS, sous la forme exclusive de contributions en nature.

La France sera ainsi le 4e contributeur au projet après l'Allemagne (705 millions d'euros), la Russie (178 millions d'euros) et l'Inde (36 millions d'euros).

Les coûts d'exploitation annuels sont estimés à 120 millions d'euros. La répartition fait actuellement l'objet de discussions entre les partenaires. D'ores et déjà, le gouvernement français a fait savoir par une déclaration jointe à l'Acte final que sa participation aux coûts annuels d'exploitation n'excédera pas 2 % de leur montant global.

Avec cette installation, les chercheurs français bénéficieront d'un outil unique de recherche. Leurs études ouvriront la voie à des applications économiques, comme par exemple l'utilisation de faisceaux de particules accélérées comme sondes de la matière en physique médicale (imagerie) et en science des matériaux, pour le traitement de certains cancers ou encore la construction de plateformes de test du milieu spatial.

Suivant l'avis du rapporteur, la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

La commission examine le rapport de d M. Bertrand Auban et le texte proposé par la commission pour le projet de loi n° 451 rectifié (2011-2012) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et l'Agence spatiale européenne relatif au Centre spatial guyanais et aux prestations associées.

Debut de section - PermalienPhoto de Bertrand Auban

La France a signé le 18 décembre 2008, à Paris, un accord avec l'Agence spatiale européenne relatif au centre spatial guyanais (CSG) et aux prestations associées. Cet accord se substitue à trois accords intergouvernementaux :

- L'accord relatif au centre spatial guyanais, conclu le 11 avril 2002, et qui concerne les installations de soutien aux lancements ;

- L'accord relatif aux Ensembles de Lancements (ELA) et aux installations associés de l'Agence au CSG, conclu le 11 avril 2002, qui concerne les moyens de lancement de l'Agence ;

- L'accord relatif à l'ensemble de lancement Soyouz, conclu le 21 mars 2005, qui vise à préciser les conditions dans lesquelles la France autorise l'ASE à implanter sur le site du CSG l'ensemble de lancement Soyouz.

Il a paru aux autorités plus judicieux de regrouper ces 3 accords en un accord unique qui se substituerait à eux. C'est ainsi que la France et l'ASE ont envisagé et négocié dès octobre 2007 la fusion des trois textes en un seul. Une attention particulière a été portée, lors des négociations, non seulement aux dispositions relatives à l'exploitation de trois lanceurs (Ariane, Soyouz et Vega) à partir du CSG, mais également à la prise en compte des dispositions de la loi française relative aux opérations spatiales adoptée le 3 juin 2008.

Plusieurs objectifs sont recherchés par l'adoption de ce nouveau texte :

- Fournir une base juridique unifiée et actualisée à l'utilisation par l'Agence du Centre spatial guyanais. Le présent Accord fusionne les trois anciens accords relatifs au CSG tout en mettant à jour leurs dispositions, en tenant compte en particulier de la loi relative aux opérations spatiales précitée ;

- Sécuriser l'utilisation des installations du CSG par l'ASE jusqu'à fin 2020. L'accord est conclu pour une durée longue (jusqu'en 2020), contrairement à l'accord relatif au CSG précédent, successivement reconduit pour des périodes de quatre ans. Il permet ainsi de pérenniser l'engagement de l'ASE en matière de financement et d'utilisation de la base de lancement ;

- Sécuriser pour tous les lanceurs la répartition de la prise en charge de la responsabilité financière, entre l'Etat français et l'ASE, en cas de dommages causés à des tiers.

Le centre spatial guyanais, également appelé « Port Spatial de l'Europe », désigne l'ensemble du site spatial, les installations et les moyens qui concourent à la réalisation des lancements d'Ariane, de Soyouz et de Vega, ainsi que les usines de production. Il regroupe des établissements de plusieurs acteurs du secteur spatial européen. Ses missions s'inscrivent dans les objectifs poursuivis par l'Europe en matière de transport spatial, à savoir :

- Garantir à l'Europe un accès indépendant à l'espace, afin de lui permettre de réaliser les missions qui relèvent de sa souveraineté.

- Occuper une place de premier plan sur le marché mondial des services de lancement et entretenir la prospérité et la compétence de son industrie.

Les effectifs attachés au CSG sont de plus de 1 500 personnes en 2011. Dans les années à venir, les prévisions font état d'une stabilisation des effectifs totaux de la base autour de 1 650 personnes.

Depuis trente ans l'activité du CSG s'est densifiée, pour atteindre, en 2012, 10 lancements réussis (7 Ariane 5, 2 Soyouz et 1 Vega) et une mise en oeuvre de trois pas de tir (ELA3, ELS et ELV). Cette activité soutenue devrait se pérenniser ces prochaines années, avec une prévision de 10 à 12 lancements par an et 3 pas de tir opérationnels. Les trois lanceurs Ariane, Soyouz et Vega présentent des performances complémentaires, et permettent à l'Europe de lancer tout type de missions en toute indépendance.

Mes chers collègues, je vous renvoie à mon rapport écrit pour de plus amples précisions, autant sur le contenu de l'accord article par article, que sur les trois programmes.

En conclusion, le texte qui nous est soumis aujourd'hui reprend pour l'essentiel les termes d'accords déjà en vigueur. Il s'agit d'un accord de clarification juridique que je vous recommande d'adopter. Le présent projet de loi pourrait faire l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique le 5 février.

Puis la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

La commission examine le rapport de M. Jean Besson et les textes proposés par la commission pour le projet de loi n° 664 (2011-2012) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg relatif à la coopération dans leurs zones frontalières entre les autorités de police et les autorités douanières et pour le projet de loi n° 665 (2011-2012) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française, le Gouvernement du Royaume de Belgique, le Gouvernement de la République fédérale d'Allemagne et le Gouvernement du Grand-Duché de Luxembourg concernant la mise en place et l'exploitation d'un centre commun de coopération policière et douanière dans la zone frontalière commune.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Besson

Monsieur le président, mes chers collègues, ce que la liberté fait perdre en sécurité, elle le gagne en coopération. Voici en quelque sorte le sujet des deux accords qui sont soumis aujourd'hui à votre approbation :

- un accord franco-luxembourgeois, conclu en 2001 ;

- un accord quadripartite franco-germano-belgo-luxembourgeois de 2008.

Tous deux prévoient la mise en oeuvre de procédés de coopération policière et douanière. Cette dernière tend à lutter contre la délinquance transfrontalière, dans le contexte de la suppression des contrôles fixes aux frontières avec les Etats voisins, dans la zone de Schengen.

L'accord de 2001 concerne à la fois la coopération bilatérale traditionnelle, à caractère direct, ainsi qu'une modalité plus récente que représente le centre commun de coopération policière et douanière, désigné par son acronyme CCPD.

Cet outil est apparu dans les années 1997. Il a été instauré par un certain nombre d'accords bilatéraux notamment avec l'Espagne, l'Italie mais aussi les pays concernés par l'accord de 2008, l'Allemagne et la Belgique. L'accord avec le Luxembourg de 2001 s'inscrit dans cette démarche bilatérale.

Le Centre commun de coopération représente une structure de proximité dont la vocation principale est de faciliter l'échange d'informations policières et douanières et accessoirement, d'aider à la coordination générale des opérations transfrontalières.

Son domaine d'intervention concerne essentiellement la petite et moyenne délinquance à caractère transfrontalier, telle que les trafics illicites, la lutte contre l'immigration irrégulière ainsi que tout autre fait se rapportant à la sécurité ou à l'ordre public.

Le Centre commun ne constitue pas une administration indépendante. En conséquence, les agents qui y collaborent ne peuvent effectuer de manière autonome des interventions de nature opérationnelle. Ils agissent sur instructions des autorités qui les ont détachés.

Les succès des centres bipartites ont conduit les gouvernements allemand, belge et luxembourgeois à créer également à Luxembourg une seconde structure, appelée « Bureau commun de coopération » compétent uniquement en matière policière.

Les statistiques les plus récentes ont démontré l'utilité d'un tel bureau, à Luxembourg. Les agents allemands, belges et luxembourgeois qui y sont en poste ainsi que ceux du détachement français ont traité 18 122 demandes de coopération, soit une progression substantielle de près de 30 %, en 2012.

Craignant toutefois que la coexistence d'un centre bipartite de coopération policière et douanière avec un bureau tripartite, qui ne traite que de coopération policière, ne réduise la portée effective des synergies recherchées, les quatre Etats ont alors souhaité simplifier le schéma organisationnel de la coopération transfrontalière multilatérale, à Luxembourg.

Ils ont conclu à cette fin, en 2008, un nouvel accord ayant pour objet de créer une seule base juridique à l'implantation du CCPD, à Luxembourg.

En conséquence, les stipulations de l'Accord de 2008 relatives au fonctionnement du Centre quadripartite tendent à se substituer à celles de l'Accord bipartite de 2001. Il en est de même, de facto, des dispositions du Bureau tripartite.

La ratification de l'accord de 2001 demeure pour autant nécessaire car ce dernier organise la coopération transfrontalière directe avec le Luxembourg.

Son champ d'application est de nature plus opérationnelle que celui du centre commun. Il consiste notamment dans le traitement répressif de faits délictueux ou encore dans la mise en oeuvre de plans d'intervention en zone frontalière, en cas de catastrophes naturelles, de recherche de malfaiteurs ...

S'agissant de l'état d'avancement des procédures de ratification, l'Accord quadripartite a été approuvé en Allemagne par une loi promulguée le 1er février 2011. La procédure en Belgique n'en est, en revanche, qu'à ses prémices. Le dossier accompagnant le projet de loi est en cours d'élaboration.

L'approbation conjointe des deux textes menée par le Grand-Duché du Luxembourg a franchi une étape importante. Les deux projets de loi de ratification ont été adoptés en Conseil de Gouvernement, le 27 janvier 2012, puis enregistrés à la Chambre des députés le 14 février 2012 et ont reçu le quitus du Conseil d'Etat le 8 mai 2012.

Puis la commission adopte le projet de loi et propose son examen sous forme simplifiée en séance publique.

Cette audition n'a pas donné lieu à un compte rendu.