Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 3 juillet 2019 à 10:5

Résumé de la réunion

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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Nous examinons les amendements de séance sur le texte de la commission relatif à la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, tendant à créer un droit voisin au profit des agences de presse et des éditeurs de presse.

EXAMEN DES AMENDEMENTS DU RAPPORTEUR

Article 3

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

La commission a adopté la semaine dernière un amendement établissant des critères de détermination de la rémunération du droit voisin. Il était notamment important de tenir compte des investissements consentis par les éditeurs de presse et de l'audience de leurs titres.

La presse d'information politique générale (IPG) a vivement réagi car elle considère que cette rédaction risque de la priver d'un droit pour lequel elle s'est fermement battue. Nous avons conçu le droit voisin pour que la presse puisse continuer à vivre. Or un journal régional aurait pu se voir spolié par un titre people.

La presse professionnelle et la presse magazine ont également réagi très fortement, en faisant valoir que Google, par exemple, pourrait spolier leurs contenus au motif que leurs titres ne sont pas estampillés comme relevant de l'IPG.

L'amendement n° 7 que je vous propose d'adopter, a reçu l'aval des deux « familles » qui s'opposaient très violemment et la précision qu'il apporte satisfait ceux qui se sentaient lésés par la rédaction adoptée la semaine dernière.

L'autre bonne nouvelle, c'est que l'Assemblée nationale examinera cette proposition de loi le 23 juillet selon la procédure de législation en commission. Les députés ont la possibilité d'amender le texte en commission avant qu'il soit adopté conforme ou rejeté en séance publique. Il s'agit donc d'une procédure rapide.

EXAMEN DES AMENDEMENTS AU TEXTE DE LA COMMISSION

Article 1er bis

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L'amendement n° 3 vise à transposer l'article 3 de la directive sur les droits d'auteur, qui prévoit une exception pour les « fouilles » de texte dans le cadre de la recherche scientifique.

Cette exception est déjà prévue à l'article 38 de la loi pour une République numérique de 2016. Cependant, le décret d'application prévu a reçu un avis négatif du Conseil d'État, qui a indiqué qu'une exception au droit d'auteur devait être explicitement prévue par le droit européen, ce qui n'était alors pas le cas. Les auteurs de l'amendement souhaitent procéder à la transposition de cet article 3 maintenant que la directive a été adoptée.

Il s'agit d'un amendement qui exprime une préoccupation très légitime mais un peu éloignée du texte. Je vous propose donc de solliciter l'avis du Gouvernement, et si le ministre est en mesure de nous apporter des précisions sur le calendrier de la parution du décret, de retirer cet amendement. Dans le cas contraire, j'y serais personnellement favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Ouzoulias

Je ne partage pas l'analyse juridique du rapporteur. Le système instauré par la loi de 2016 ne concerne que les publications scientifiques. Or la directive que nous transposons concerne l'utilisation par des scientifiques de la totalité de la matière publiée par la presse. La directive introduit un élément nouveau dans le droit européen qui n'a pas d'équivalent dans le droit français.

Par ailleurs, il faut que mes collègues scientifiques qui citeraient des articles de presse ne soient pas considérés de la même manière que Google. Si nous n'adoptons pas mon amendement que se passera-t-il d'ici à l'adoption d'un texte transposant ce point de la directive ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Vous proposez de transposer l'article 3 de la directive. Or nous transposons l'article 15. Pourquoi choisirions-nous d'ajouter le seul article 3 alors que l'ensemble des articles doivent être transposés d'ici à juin 2021 ?

La commission demande l'avis du Gouvernement sur l'amendement n° 3.

Article 3

L'amendement n° 5 rejoint ma première intuition sur le sujet : pour que la gestion collective soit efficace, il faut que le plus grand nombre d'éditeurs et d'agences de presse s'allient. Une gestion obligatoire pourrait donc s'imposer comme gage d'efficacité.

La proposition de loi privilégie toutefois une gestion collective volontaire, et ce pour deux raisons.

Premièrement, le droit européen et le droit constitutionnel encadrent strictement les conditions dans lesquelles les États peuvent imposer une gestion collective, la gestion collective obligatoire n'étant en pratique admise que dans des cas très particuliers.

Deuxièmement, le caractère facultatif de cette gestion a constitué, lors de l'élaboration de ma proposition de loi, l'un des points qui a conditionné l'accord des éditeurs et des agences de presse qui n'ont pas souhaité être « enfermés » dans les négociations. Il s'agit d'un point d'équilibre.

Je proposerais donc à notre collègue de retirer son amendement, et à défaut j'émettrai un avis défavorable.

Je suis toutefois persuadé que la clé du succès reposera non pas sur une obligation juridique, mais sur une obligation que je n'hésite pas à qualifier de morale. Il est impératif que la profession soit unie, et que les plus gros ne jouent pas leur partition de leur côté. Il nous appartiendra d'y veiller et de soutenir l'unité quand les négociations seront lancées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Il serait souhaitable que tous les éditeurs et toutes les agences de presse aient l'obligation d'adhérer à une société de gestion collective. Cela permettrait une forme de transparence. Il pourrait du reste y avoir plusieurs sociétés de gestion collective. Je comprends toutefois les arguments du rapporteur.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 5.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Les amendements n° 2 et 1 sont identiques.

Ils visent à obliger les organismes de gestion collective à mettre à disposition les éléments permettant d'identifier les publications couvertes par les droits voisins, et à prévoir que la responsabilité des plateformes ne saurait être engagée si elles n'avaient pas connaissance de la qualité d'éditeur ou d'agence de presse.

Cependant, comme je l'ai expliqué aux représentants de Qwant - une plateforme vertueuse qui propose une alternative à Google - la solution proposée paraît insatisfaisante et juridiquement risquée.

En effet, la directive consacre un droit exclusif au profit des éditeurs et des agences de presse. Ce droit est opposable à toutes les plateformes.

Or cet amendement implique que le droit voisin ne serait pas opposable aux plateformes dans l'hypothèse où les éditeurs et les agences de presse n'auraient pas confié leurs droits à un organisme de gestion collective et n'auraient pas publié une liste des publications de presse concernées par le droit voisin.

La négociation contractuelle avec les éditeurs et agences devrait permettre de lever les principales difficultés soulevées. Et la jurisprudence tiendra nécessairement compte de l'information dont auront disposé les plateformes concernant les publications pour lesquelles une rémunération est demandée.

Je tiens cependant à souligner l'intérêt de cette proposition. Le ministre pourra nous apporter des éclairages et les auteurs de l'amendement le retirer, sinon, j'émettrai un avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je tiens à préciser que cet amendement a été déposé par les représentants de Qwant.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Leleux

Il me semble normal que les petits opérateurs prennent leurs précautions en prévision des contentieux à venir.

Si l'éditeur appartient à une société de gestion collective ou qu'il gère directement ses droits avec les moteurs de recherche, il n'y a pas ou peu de problèmes. Les contentieux peuvent survenir dans le cas où la qualité de l'éditeur n'est pas claire. Nous défendrons cet amendement en séance.

En ce qui concerne Qwant, nous ne soutenons pas ce moteur de recherche plus qu'un autre, mais ses représentants méritent notre écoute attentive.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

J'ai reçu les représentants de Qwant qui comprennent très bien ma position et souhaitaient simplement que nous ayons ce débat en séance.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Il me paraît légitime d'avoir le débat en séance publique et que le Gouvernement nous donne son avis sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Si j'ai insisté sur l'origine de l'amendement, c'est parce que je crois que dans un contexte où nous sommes très sollicités par les groupes de pression et les lobbies, il est bon d'être transparent.

La commission émet un avis défavorable aux amendements n° 2 et 1.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

L'amendement n° 6 a pour objet de prévoir que la négociation menée entre les éditeurs et les plateformes prévoie également un délai pour la transmission des informations permettant de garantir l'évaluation de la rémunération.

Il semble conditionner la transmission des informations aux éditeurs à la tenue de négociations, alors que les informations doivent actuellement être transmises sans condition.

Les négociations vont nécessairement prévoir des délais et des modalités de remise des informations, qui pourront d'ailleurs être différentes selon les éditeurs et les cas de figure. Il me paraît donc préférable de laisser se mener la négociation sans l'entourer de trop de contraintes.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Duranton

Il me semble très important de s'assurer qu'une négociation équilibrée ait lieu et qu'elle débouche sur un accord. Compte tenu du rapport de force qui existe entre les Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft) et les éditeurs de presse, il est possible que cette négociation n'apporte pas toutes les garanties nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Ce n'est pas ce que dit votre amendement. La rédaction que vous proposez vise à conditionner la transmission des informations aux éditeurs à la tenue d'une négociation. C'est le serpent qui se mord la queue ! S'il n'y a pas de négociation, il n'y aura pas de transmission. Or nul ne doute que les négociations auront lieu rapidement.

La commission émet un avis défavorable à l'amendement n° 6.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je vous remercie.

Le sort de l'amendement du rapporteur examiné par la commission est retracé dans le tableau suivant :

La commission donne les avis suivants :

La réunion est close à 10 h 40.