La réunion est ouverte à 16 h 30.
Mes chers collègues, depuis notre réunion constitutive du 4 mars dernier, les travaux de notre mission d'information ont avancé à un bon rythme, que je me propose de vous retracer très brièvement.
Certes nous avons été conduits à reprogrammer, à la fin de ce mois, la table ronde initialement prévue le 9 mars - en format plénière - avec les syndicats agricoles, car certains étaient malheureusement indisponibles. Mais nous avons d'ores et déjà mené à bien cinq auditions, toutes très intéressantes.
Pour prendre une image, en guise de « levée de rideau », nous avons tout d'abord entendu plusieurs responsables des deux directions générales compétentes du ministère de la Transition écologique. Il s'est agi, plus précisément de la directrice de l'énergie à la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC), Mme Sophie Mourlon, et de M. Philippe Bodenez, chef du service des risques sanitaires liés à l'environnement, des déchets et des pollutions diffuses à la Direction générale de la prévention des risques (DGPR).
Dans la foulée, nous avons pu interroger, au titre cette fois du ministère de l'agriculture et de l'alimentation, M. Sylvain Réallon, sous-directeur filières forêt-bois, cheval et bioéconomie à la Direction générale de la performance économique et environnementale des entreprises.
Enfin, hier, le 15 mars, nous avons entendu successivement :
- en premier lieu, le délégué général de l'association Amorce, laquelle constitue le premier réseau français d'information et de partage d'expériences dans le domaine de la méthanisation ;
- en second lieu, M. Christian Couturier de l'association NégaWatt, dont l'objectif consiste à promouvoir, pour reprendre ses propres termes, « une transition énergétique réaliste et soutenable » ;
- en dernier lieu, le second vice-président de l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA), M. François Beaupère.
Voilà donc, mes chers collègues, où nous en sommes !
Et naturellement, aujourd'hui, nous avons le plaisir de nous retrouver pour cette réunion plénière avec les professionnels des énergies renouvelables.
Merci Monsieur le Président, mes chers collègues. Nous auditionnons effectivement aujourd'hui des professionnels des énergies renouvelables, autour de :
- M. Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), en visioconférence ;
- et de M. Jacques-Pierre Quaak, co-président de France Gaz Renouvelables (FGR).
Nous aborderons successivement les cinq grands thèmes suivants, lors de cette table ronde :
- les stratégies énergétiques et les dispositifs de soutien à la méthanisation ;
- les procédés de production du biogaz ;
- les perspectives d'évolution du biogaz ;
- la prévention des risques ;
- la méthanisation non agricole.
Nous vous avons adressé un questionnaire écrit très détaillé sur ces sujets, que vous pourrez compléter par toute documentation que vous jugerez utile.
Je souhaite attirer votre attention sur deux questions précises, qui assurément me tiennent à coeur :
- que pensez-vous de la réalité du dérèglement climatique et de la stratégie nationale bas carbone ?
- qu'en est-il du bilan énergétique du processus de méthanisation ?
Quoi qu'il en soit, avec mes 21 collègues de la mission d'information, nous cherchons collectivement à établir un travail solide, étayé sur des éléments rationnels et scientifiques.
Nous avons également pu mesurer, dès nos premières auditions, toute l'importance de l'acceptabilité sociale, pour appréhender notre sujet, car il suscite des débats très vifs dans nos territoires. Nous y observons souvent une opposition tranchée entre d'une part les tenants d'une méthanisation espérée comme « idéale », et, d'autre part, les opposants à une méthanisation perçue comme « cauchemardesque », alors qu'il existe aussi, sur le terrain, une grande variété de situations et des projets de taille et de nature très diverses.
Bonsoir à tous, mesdames et messieurs les Sénateurs, je me propose de vous exposer notre vision du développement de la méthanisation sous forme d'injection de gaz ou de cogénération, ce qui recouvre une partie des thèmes que vous avez évoqués.
Nous allons publier avec les gestionnaires de réseaux de gaz, le 1er avril prochain, la cinquième édition de notre Panorama du gaz renouvelable, où figureront beaucoup des informations demandées dans votre questionnaire, à commencer par l'état du gaz sous ses diverses formes, sa répartition régionale, les perspectives de développement, ainsi qu'un « état de l'art » des nouveaux modes de production de gaz renouvelables, tels que la pyrogazéification (chauffage de déchets à plus de 1000 degrés en présence d'une faible quantité d'oxygène aboutissant à une conversion en gaz), le power-to-gas (production d'hydrogène par électrolyse de l'eau, combinée ensuite à du CO2, via le processus de méthanisation pour générer un méthane de synthèse) et la gazéification hydrothermale.
S'agissant, en premier lieu, de la situation du gaz renouvelable à fin de l'année 2020, on constate que les productions d'électricité en cogénération françaises représentent aujourd'hui un peu plus de 500 mégawatts/heure (MWh) de puissance installée, soit 0,6 % de la production d'électricité nationale. Ce secteur connaît une faible dynamique de développement, car les priorités publiques sont ailleurs.
Cela contraste, en effet, avec l'essor de l'injection de biogaz (devenu biométhane) dans le réseau de gaz, dont le nombre d'installations a bondi de 123 à 214 entre fin 2019 et fin 2020, pour atteindre une puissance installée de 4 térawatts/heure (TWh). Cela correspond, pour le moment, à une injection effective de seulement 2,2 TWh, en raison de la progressivité de la mise en service des capacités de production. La part du gaz renouvelable dans les réseaux n'atteint que 0,5 %, mais la « liste d'attente » - ou registre de capacité - compte presque 1 200 projets représentant l'équivalent d'une capacité de production de 26 TWh, dont un volume de 14 TWh a fait l'objet de contrats déjà signés (y compris les installations déjà en fonctionnement).
En second lieu, la stratégie française en matière de gaz renouvelable s'inscrit dans la stratégie nationale bas-carbone (SNBC), déjà présentée ici par Mme Sophie Mourlon, tablant, à l'horizon 2050, sur une baisse de la consommation globale de gaz, aujourd'hui d'environ 480 TWh par an, qui reviendrait dans une fourchette comprise entre 195 et 295 TWh par an.
La nouvelle programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) fixe un objectif de 6 TWh de biométhane injecté en 2023, puis de 14 à 22 TWh en 2028, ce qui est très décevant et inférieur aux dispositions de la précédente PPE de 2016. Ces chiffres apparaissent également déconnectés de la dynamique observée sur le terrain, susceptible de se traduire par 60 TWh en 2030. Qui plus est, aucun objectif n'a été fixé pour la pyrogazéification, même s'il est prévu un démonstrateur pour le power-to-gas en 2023. D'une façon générale, il est à noter que la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui n'est qu'un texte réglementaire, est en passe d'entraîner un non-respect des dispositions votées par le législateur, dans le cadre de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.
En troisième lieu, les perspectives de développement de la méthanisation résident dans la priorité donnée à l'injection. Comme ce n'est pas possible sur tout le territoire, puisque le réseau de gaz n'est pas présent partout, la cogénération demeure toutefois une solution de valorisation.
S'il existe un tarif de rachat de la puissance électrique jusqu'à 500 KW/h pour la méthanisation, il n'existe plus aucun dispositif de rachat pour les installations de stockage de déchets non-dangereux et les stations d'épuration. Les appels d'offres de la CRE (Commission de régulation de l'énergie) n'ont pas été renouvelés : ce segment est donc complètement délaissé.
Le tarif de rachat pour l'injection établi en 2011, sur lequel s'est engagée la dynamique que j'ai précédemment décrite, a été abrogé, au profit d'un dispositif provisoire : il s'agit de l'arrêté du 23 novembre 2020 fixant les conditions d'achat du biométhane injecté dans les réseaux de gaz naturel. Le tarif définitif, qui ne s'appliquera qu'aux installations de méthanisation, fait actuellement l'objet de discussions avec la Commission européenne (DG Concurrence). Son contenu semble proche de celui de l'arrêté précité du 23 novembre 2020. La consultation officielle de la Commission européenne interviendra dans les prochaines semaines. Pour les stations d'épuration des eaux usées (STEP) et les installations de stockage non-dangereux, des discussions sont en cours entre la filière et la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) du ministère de la Transition écologique, mais il n'existe rien de plus abouti pour le moment.
La nouvelle formule de tarification prévoit :
- une baisse initiale du tarif de 1 à 15 % selon les catégories d'installations et les types de puissances, ce qui est important et pourrait mettre à mal le développement de la filière ;
- ensuite, une trajectoire de réduction du tarif d'achat de 2 % par an, comme pour la filière électrique ;
- une suppression des primes pour l'utilisation de biodéchets résidus ou pour l'utilisation de résidus et co-produits végétaux, agricoles et agroalimentaires, y compris les cultures intermédiaires à vocation énergétique (CIVE) ;
- en revanche, le maintien de la prime aux effluents d'élevage ;
- une diminution de 5 euros par MG/h en cas de subvention à l'investissement par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) ;
- un mécanisme de réduction dynamique du tarif d'achat, en fonction du volume de signatures de contrats d'entrée dans le registre de capacités.
Le nouveau tarif est réservé aux installations de moins de 300 Normo m3/h, ce qui correspond à peu près à une capacité de 25 GWh par an. Les autres projets de plus grande puissance devront passer un appel d'offres, sachant qu'aucun cahier des charges n'a été notifié à ce jour à la Commission européenne.
Pour atteindre et développer des volumes supplémentaires, la filière a proposé des mécanismes extrabudgétaires, consistant à ce que le budget de l'État compense le prix d'achat en fonction du prix du gaz sur le marché. Il existe notamment un dispositif de certificats verts émis par les producteurs de gaz proportionnellement au gaz naturel qu'ils livrent à leurs clients finaux, qui bénéficierait aux producteurs de plus de 300 normo m3 ne relevant pas des tarifs. Ces mécanismes extrabudgétaires constituent à nos yeux une solution très pertinente pour financer des projets, pourvu qu'ils soient couplés à des mesures incitatives portant sur l'ensemble de la chaîne du biométhane, et notamment sur l'aval, et que les ressources de l'État ainsi économisées se reportent intégralement sur les projets bénéficiant des mécanismes de soutien déjà prévus tels que les guichets ouverts et les appels d'offres à venir.
Enfin, on constate un basculement du soutien au gaz renouvelable vers une logique de rentabilité pour la collectivité, prenant en compte les externalités positives de la méthanisation, ce qui suppose de mettre en place des méthodologies robustes d'évaluation. Le comité stratégique de filière a ainsi identifié quatre externalités prioritaires :
- les émissions de gaz à effet de serre ;
- les charges liées au traitement des déchets ;
- la qualité de l'eau ;
- et la résilience des exploitations agricoles.
Bonsoir à tous. France Gaz Renouvelables est une association créée en 2018. Elle rassemble, la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA), les chambres d'agriculture, l'Association des agriculteurs méthaniseurs de France (AAMF) dont je suis vice-président, la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), Gaz Réseau Distribution France (GRDF) et GRT Gaz. Nous portons la volonté de développer le gaz vert à travers le réseau et le territoire français.
La France compte aujourd'hui plus de 214 sites en injection, lesquels peuvent produire soit de l'électricité, soit du gaz et ont une dominante agricole. On compte entre 750 et 850 méthaniseurs au total, avec un développement d'environ 150 sites par an d'ici à 2023, grâce au changement de tarif et à la PPE. La production devrait atteindre un peu plus de 3,5 TWh en 2021.
On observe une forte progression de la méthanisation en injection depuis 2016. J'ai eu la chance, avec mon frère d'être l'un des premiers méthaniseurs agricoles à injecter dans le réseau de gaz de GRDF, dès 2013.
Le changement tarifaire évoqué par Jean-Louis Bal induit un sérieux « coup de frein » dans le développement de notre filière. Le mécanisme extrabudgétaire actuellement à l'étude est similaire à celui qui est déjà mis en oeuvre pour les carburants de première génération : il n'a aucune incidence sur le budget de l'État.
Pouvez-vous développer votre propos sur les modalités de ce mécanisme extrabudgétaire ?
Il s'agit d'une obligation d'incorporation de gaz vert dans les réseaux, qui serait portée par les fournisseurs. Ces derniers seraient donc dans l'obligation de produire du gaz renouvelable. Un mécanisme de certificat vert permettrait de compenser, pour le producteur, l'écart de prix entre le gaz naturel fossile et le biométhane injecté.
Une étude de l'Ademe laisse entrevoir un potentiel de 130 TWh pour un objectif de 100 % « gaz vert » à l'horizon 2050, en prenant en compte la méthanisation et les autres technologies que sont la pyrogazéification et la méthanation (procédé industriel mettant en contact du dioxyde ou du monoxyde de carbone avec de l'hydrogène, conduisant à la production de méthane et d'eau).
Les perspectives de développement de la filière méthanisation résident dans le traitement des déchets et dans la décarbonation liée aux quatre externalités positives précédemment évoquées par Jean-Louis Bal. Il ressort d'après les premiers éléments d'une nouvelle étude de France Gaz Renouvelables que la production d'un MWh par méthanisation ne rejette que 23 grammes de CO2, contre 227 grammes pour la production du gaz à partir d'énergies fossiles. Nos études laissent entrevoir des économies de gaz à effet de serre très significatives. La méthanisation est aussi génératrice d'une économie circulaire qui, dans les territoires, est un vecteur d'emplois directs, mais aussi indirects, par le biais de la mise au point par des entreprises françaises de « briques technologiques » nécessaires à l'abaissement des coûts.
La méthanisation est un processus naturel, à l'image du gaz de marée. En pratique, une installation de méthanisation fonctionne comme une panse de vache en béton, puisqu'il s'agit de provoquer la dégradation de matières organiques dans un environnement fermé, à l'abri de l'oxygène ambiant, pour obtenir une fermentation à 38 °C dont se dégage un biogaz composé de 50 à 60 % de méthane, le reste étant essentiellement du CO2.
Soit on utilise le biogaz à l'état brut, à la sortie du méthanisateur, en le mettant dans un moteur adapté capable de le brûler pour produire de l'électricité en le couplant à une génératrice, soit on lave le gaz pour qu'il ait les mêmes propriétés que le gaz naturel. Outre la production d'énergie verte, la matière organique une fois digérée constitue un formidable engrais vert qui nourrit les bactéries du sol, contrairement aux engrais industriels.
Il est impératif d'être très vigilant quant à la matière qui entre dans un méthaniseur. Certains prennent un méthanisateur comme une simple poubelle, alors que les matières plastiques ne sont pas dégradables. Un mauvais tri des matières entrantes peut conduire à une stérilisation des sols. Après huit ans de retour d'expérience, je constate, pour ma part, les bénéfices d'une méthanisation bien faite pour la régénération des sols : nous sommes très exigeants sur la matière qui rentre dans les méthaniseurs, d'autant plus que la destination finale de cette matière, c'est nos sols.
Quel est, selon-vous, le juste prix du kWh de gaz issu de la méthanisation ? Comme pour le photovoltaïque, il faut que le prix soit incitatif pour les agriculteurs, à titre d'activité complémentaire, sans néanmoins constituer pour ceux-ci une rente trop importante. L'atteinte du juste équilibre conditionne l'acceptabilité du gaz vert. Sans doute, d'ailleurs, existe-il plusieurs justes prix et non un seul.
Il m'est difficile de vous répondre, car il n'existe pas un méthaniseur, mais des méthanisateurs.
Selon moi, un méthaniseur doit, pour être légitime, apporter des bénéfices collatéraux tels que le traitement de déchets et d'effluents d'élevage d'un territoire. Chaque jour qui passe, l'injection fait davantage ses preuves à cet égard et c'est la condition pour le maintien d'un tarif avantageux. Les constructeurs adaptent aussi leurs machines. La PPE et le récent changement des tarifs ont précipité des projets, de façon un peu anarchique.
L'approche en termes d'externalités positives favorise le travail d'explication que nous avons à conduire vis-à-vis de nos concitoyens. D'ailleurs, au terme d'une visite de notre installation par France Nature Environnement, a priori opposée à la méthanisation, il semble que nos interlocuteurs soient sortis plutôt ravis, au point de laisser sous-entendre qu'il faudrait un méthaniseur par commune, vu les bénéfices qu'ils peuvent apporter, à condition que l'opération soit faite intelligemment. Nous sommes également sensibles au fait que la méthanisation amène, par l'intermédiaire des Cultures intermédiaires à valorisation énergétique (CIVE), une diversification des cultures, une augmentation de la richesse organique des sols, ainsi qu'un accroissement de la biodiversité.
Pour répondre à votre question, monsieur le rapporteur, le prix moyen du MWh issu de la méthanisation est de l'ordre de 95 euros, contre 20 euros pour le MWh issu du gaz fossile.
Il existe toutefois de fortes différences, selon la taille et le type d'installation et selon le type d'intrants. En outre, ce prix a chuté pendant la crise sanitaire. En tenant compte de la monétisation des externalités positives, le comité stratégique de filière arrive à une première estimation d'environ 70 euros le MWh, ce qui réduit considérablement l'écart avec les gaz fossiles. Des progrès sont encore possibles par la rationalisation des équipements.
La dynamique de la méthanisation dans notre pays ne doit cependant pas être surestimée. On ne peut pas parler « d'explosion » du nombre des méthaniseurs. Nous sommes loin d'en avoir un dans chacune des 36 000 communes de France !
Nous avons commencé avec des technologies en provenance du Danemark et d'Europe du Nord. Aujourd'hui, la construction d'une filière industrielle française, à laquelle s'emploie ce comité, devrait en outre permettre de réduire d'environ 30 % les coûts de la méthanisation. C'est l'occasion de construire une industrie française compétitive avec des emplois français.
Le facteur coût n'est, j'en conviens, que l'un des aspects à prendre en compte lorsque l'on étudie la méthanisation. Quel est le prix du rachat du MWh en cogénération, sachant que cette technique permet de valoriser la production des méthaniseurs situés loin des villes en dehors de l'autoconsommation ?
Je ne dispose pas de ce chiffre à l'instant, mais nous vous le ferons parvenir.
Quels sont les risques environnementaux liés à la méthanisation, notamment en cas d'accident sur les installations ? Ce sont des équipements semi-industriels, qui nous conduisent à la question de la prévention des risques. À ce sujet, nous avons tous en mémoire celui qui est survenu en août 2020, à la centrale biogaz de Châteaulin dans le Finistère et qui a privé d'eau potable 180 000 personnes pendant trois semaines. Comment peut-on prévenir de tels risques ?
Les principaux risques sont liés au digestat. Celui-ci doit être considéré, non pas comme un déchet de déchets, mais comme un fertilisant organique. Une bonne certification de ce coproduit permet qu'il ne soit plus une menace pour l'environnement, mais l'occasion d'une diminution des intrants chimiques.
Les sites de méthanisation étant classés comme des sites ICPE (Installation classée pour la protection de l'environnement), ils répondent à des normes strictes. L'une d'elles porte sur la rétention sur site obligatoire en cas de rupture de la cuve en béton. La capacité de la plus grosse cuve doit être retenue sur le site, ce qui n'a pas dû être le cas à Châteaulin. Comme tous les outils industriels, nos installations sont sujettes à des accidents.
Pour les prévenir l'Association des agriculteurs méthaniseurs de France et GRDF procèdent actuellement à de multiples audits. L'AAMF a établi une charte de bonnes pratiques à laquelle tous ses adhérents doivent souscrire. Il s'agit de professionnaliser les exploitants agricoles afin qu'ils maîtrisent un nouveau métier. Le partenariat passé entre l'AAMF et GRDF nous permet de bénéficier du savoir-faire de ce dernier en matière de gestion des risques sur les sites en injection. Afin d'éviter les risques d'explosion, le label Qualimétha, certifié par l'Afnor, permet un référencement des constructeurs et il a vocation à devenir un standard pour la méthanisation agricole ou industrielle, à l'instar par exemple du système ABS (Système d'antiblocage des roues) en matière de freinage automobile. Des démarches de formation et d'accompagnement sont nécessaires.
Une filière de formation à la méthanisation existe en Bretagne. Comme je ne crois pas à l'auto-contrôle, pouvez-vous nous dire combien de fois vos installations ont été contrôlées ?
La filière est jeune et notre profession est en train de se structurer et de se professionnaliser. En tant que site ICPE, nous sommes astreints à des déclarations auprès de la préfecture tous les ans, notamment en ce qui concerne les matières entrantes, sur la base d'un registre d'entrées. L'administration préfectorale procède à des contrôles inopinés. Surtout, GRDF contrôle toutes les deux minutes la qualité de notre gaz en injection et procède à une analyse complémentaire approfondie tous les deux mois. Ce délai a tendance à s'étendre du fait de la qualité très stable de notre production.
En termes de procédés industriels, France Gaz Renouvelables mène en interne des études pour suivre et qualifier les constructeurs. Les torchères avec déclenchement automatique sont désormais obligatoires sur les nouveaux sites de méthanisation.
On assiste également à une importante mobilisation des chambres d'agriculture et d'organismes comme Arvalis (Institut du végétal) pour étudier le digestat. France Gaz Renouvelables publiera très prochainement une étude basée sur des essais dans les champs sur les externalités et sur la qualité de l'eau. Cette étude montre que le digestat issu de la méthanisation pollue globalement autant que le lisier ou le fumier. D'une façon générale, les aléas météorologiques imposent 10 ans de retour d'expériences, pour établir une théorie agronomique à ce sujet. Ce travail est en cours.
On me dit que le digestat produit d'importants dégagements d'ammoniac (NH3), tandis que l'azote qu'il contient est très soluble et provoque un risque de production d'algues vertes en cas de grosse pluviométrie. C'est une problématique importante en Bretagne.
Il est vrai que l'ammoniac contenu dans le digestat est volatile et très soluble. Dans le digestat, il y a une partie ammoniacale, qui est très soluble et volatile, on ne s'en cache pas. Sa composante organique a besoin de temps pour se dégrader avant d'être disponible pour la plante. Nous sommes en train d'établir des bonnes pratiques d'épandage du digestat. La technique consistant à projeter le digestat dans l'air, afin de le répartir au sol, conduit à ce que l'ammoniac reste fixé dans l'air, ce qui produit une odeur caractéristique, qui pique le nez. Cette évaporation est une perte pour l'alimentation de nos plantes. Il est donc fortement souhaitable d'enfouir le digestat dans la terre, grâce à des techniques d'incorporation. Ces techniques sont très bien maîtrisées par les élevages laitiers des pays du Nord et nous nous inspirons de leur savoir-faire.
Les CIVE destinées aux méthaniseurs permettent, sans modifier le cycle habituel de la production agricole alimentaire, d'occuper nos sols entre juillet/août et le printemps suivant, ce qui correspond à la période critique en matière de lessivage de l'azote à travers le sol, alors qu'auparavant il fallait fixer l'azote disponible dans le sol en ensemençant rapidement. Enfin, nous cherchons à appliquer le digestat au moment où la plante en a le plus besoin.
Disposez-vous d'une capacité de stockage du digestat, pendant les périodes de forte pluviométrie, dans la mesure où il n'est pas possible alors d'aller sur les sols ?
C'est le cas, puisque les périodes d'épandage du digestat à respecter résultent de dispositions législatives. Lorsqu'un exploitant ne peut se rendre dans les champs du fait des conditions climatiques, il doit disposer de stocks. Le coût du stockage est largement compensé par le fait d'avoir à acheter moins d'engrais industriels.
Quels sont les autres modes de méthanisation en dehors de la méthanisation agricole ? Quel est leur potentiel ?
Les autres modes de méthanisation seront exposés dans le panorama que nous allons vous adresser le 1er avril prochain. On observe une méthanisation dite « territoriale », qui peut consister à regrouper plusieurs agriculteurs et/ou d'autres fournisseurs d'intrants, comme les collectivités ou les restaurants. Il existe aussi une récolte de méthane issue des installations de stockage de déchets non dangereux - dans ce que l'on appelait auparavant les décharges de classe 2 - et des stations d'épuration. L'industrie alimentaire produit également des déchets animaux et végétaux qui peuvent être méthanisés. La méthanisation agricole reste cependant majoritaire en termes de production d'énergie.
Ces différents types de méthanisation conduisent à considérer les digestats en fonction des différents intrants associés. À cet égard, la méthanisation agricole et la méthanisation industrielle sont complémentaires. D'où la collaboration étroite qui existe déjà entre les industriels représentés au sein du syndicat des énergies renouvelables et le monde agricole.
La fixation d'un premier tarif pour l'injection du gaz issu de la méthanisation dans les réseaux a permis le déploiement conjoint des méthaniseurs industriels et des méthaniseurs agricoles.
Que pensez-vous de la possibilité de mettre jusqu'à 15 % de cultures vivrières, comme le maïs, dans les méthaniseurs ?
Ce taux, qui est issu d'une longue réflexion entre les professionnels et les parlementaires, me paraît être un très bon compromis. Du point de vue de l'image de notre profession, nous ne sommes pas prêts à ce qu'une plus grande partie de la production alimentaire soit détournée de sa finalité, pour produire de l'énergie.
Ce taux de 15 % a été fixé pour sécuriser un minimum d'approvisionnement, alors que l'on pâtissait d'un réel manque de retour d'expérience sur les cultures intermédiaires. Il est à noter que celles-ci ont toujours été utilisées pour nourrir les animaux entre la fin de l'été et la rentrée à l'étable. Par le biais des CIVE, la méthanisation nous amène à nous intéresser à nouveau à des cultures oubliées. C'est le cas de nouvelles espèces de sorgho, une céréale jusqu'alors réservée au Sud de la Loire qui a besoin de beaucoup moins d'eau que le maïs au moment de sa végétation, alors que l'arrosage des cultures est de moins en moins bien accepté par les urbains. Ce type d'alternatives explique qu'une étude menée par le loueur de machines agricoles AEB ait montré que seulement 6 % de cultures dédiées rentrent dans la méthanisation. Enfin, France Gaz Renouvelables a lancé une étude, au niveau du territoire français, pour établir s'il existe une dérive consistant à utiliser du maïs d'ensilage pour la méthanisation.
Étant conseiller départemental de l'un des plus grands cantons ruraux de France (700 km2) et agriculteur, je partage avec MM. Bal et Quaak leur présentation des aspects positifs de la méthanisation, notamment parce qu'elle permet la valorisation des effluents d'élevage et des déchets en produisant de l'énergie verte. Je souhaite toutefois vous alerter sur les deux conséquences négatives de la multiplication des méthaniseurs dans mon canton, où l'on en compte 10. En premier lieu, ils ont entraîné la fermeture d'une coopérative céréalière avec 4 emplois en raison d'un déficit de céréales à traiter et notamment de maïs à sécher. En second lieu, ils ont été à l'origine d'un doublement des prix du foncier, car les agriculteurs « se battent » pour pouvoir planter des CIVE, récolter du maïs en herbe (45 centimètres de haut) ou récupérer de la paille. Les jeunes ne peuvent plus s'installer aujourd'hui. Dans mon secteur le taux de 15 % de cultures vivrières dédiées à la méthanisation est sans doute dépassé, en raison notamment des apports de kiwis et de bananes, dont 400 tonnes ont encore été livrées dernièrement en provenance de la Martinique.
Les industriels commencent par ailleurs à protester à l'encontre des avantages fiscaux accordés à la méthanisation agricole, au point que Bercy pourrait décider de rééquilibrer les choses, au risque de remettre en cause l'équilibre économique de la filière.
La molécule de méthane étant la même, qu'il s'agisse de gaz fossile ou de biométhane produit dans les méthaniseurs, je n'ai pas bien compris comment vous arrivez à un dégagement de 24 grammes de CO2 contre 221 grammes pour le gaz fossile, sauf à prendre en compte le fait que la culture a emmagasiné du CO2 en poussant, ce qui a toujours été le cas.
S'agissant des intrants en provenance des magasins alimentaires, il faut prendre garde à ce que les matières plastiques qui constituent leurs emballages n'entrent pas dans la méthaniseurs. J'ai ainsi été interpellée, lors de la mission que j'ai menée sur la pollution plastique, par des riverains qui voyaient arriver beaucoup de plastique dans les digestats.
J'ajoute que le méthane est un gaz à effet de serre 34 fois plus important que le CO2 et qu'il faut par conséquent se prémunir contre toute fuite provenant des méthaniseurs.
Il ne faut pas oublier, enfin, que la fertilisation est un processus naturel qui était utilisé, avant que l'on produise du digestat à partir de la méthanisation.
La fiscalité qui pèse aujourd'hui sur les installations de biométhane relève du foncier et de la taxe carbone. Il apparaît au demeurant paradoxal que le gaz biométhane, dont le bilan en CO2 est à peu près équilibré, puisque les émissions sont similaires aux captations pendant la croissance de la plante, soit soumis à la contribution climat-énergie, qui est de l'ordre de 44 euros par tonne de CO2.
Quant à la compensation, assumée par le budget de l'État, entre un coût de production de 95 euros par MWh et un prix de gros de marché de 20 euros par MWh, elle correspond à une subvention avoisinant les 500 millions d'euros en 2021. Ce coût pour les finances publiques n'est pas négligeable, mais il faut le mettre en balance avec les externalités positives.
Enfin, il faut effectivement faire très attentions aux fuites de méthane puisqu'il génère un effet de serre à ma connaissance 23 fois supérieur à celui du CO2. Force est de constater que de telles fuites existent elles aussi, et en beaucoup plus grand nombre, sur les réseaux de gaz fossile.
Vous serez destinataires, prochainement, d'études établies par France Gaz Renouvelable sur les rejets de CO2 au cours du cycle de vie de la plante.
Sur le digestat, je vous confirme que l'on mettait auparavant nos cultures en jachère, et que le petit lait associé à la production fromagère était jadis donné aux cochons dans la cour de ferme. On ne perdait rien, et tout revenait au sol. Plus récemment, avant la méthanisation, le petit lait partait dans les stations d'épuration, dont seulement une vingtaine sont équipées en installations de méthanisation. Aujourd'hui, sur notre site, nous récupérons les deux tiers du petit lait de la fromagerie voisine. On retrouve avec la méthanisation ce que l'on avait mis de côté, soit par l'enfouissement, soit par l'incinération. Nous répondons à l'obligation d'un retour au sol de la matière. Et au lieu d'avoir un effluent d'élevage, j'en ai dix avec le méthaniseur, parce que je fais venir d'autres déchets de l'industrie agroalimentaire, quitte à accepter, en pleine Brie, des camions de bananes refusés à la douane. Sans cette prise en charge, ces cargaisons auraient terminé dans un centre d'enfouissement.
Je vous remercie tout d'abord pour vos interventions et vos retours d'expérience. Vous avez peu évoqué la micro-méthanisation utilisant comme intrants des effluents d'élevage, des CIVE ou d'autres cultures et qui présente l'avantage de ne pas nécessiter de transport. J'y vois un intérêt en termes d'aménagement du territoire, que ce soit en cogénération ou en injection, ainsi qu'un moyen de pérenniser l'élevage dont la disparition va à l'encontre de la présence humaine, des emplois et de la préservation des prairies. Certains nous expliquent que ce modèle autonome n'est pas compétitif, mais ce raisonnement ne prend pas en compte ses effets induits, qui ont une valeur. Comment aider les agriculteurs à boucler leurs plans de financement ?
Quel a été le laps de temps qui s'est écoulé entre le moment où vous avez décidé de créer un méthanisateur sur votre ferme et le jour où vous avez pu injecter ? Vous-êtes-vous heurté à des freins ou des blocages ?
Le prix du gaz issu de la méthanisation varie en fonction de l'ancienneté de la conclusion du contrat. Une prime d'effluents d'élevage de 5 centimes au KWh est versée, en complément des 17 centimes versés par kWh pour une méthanisation inférieure à 250 KW/h, ce qui est assez faible, pour un total donc de 22 centimes par KWh.
Lorsque le fonctionnement d'une installation est normal, il n'y a pas d'échappement de gaz sur une méthanisation, puisque l'agriculteur fait tout pour produire du gaz. Il peut arriver cependant que survienne, par exemple, un arrêt du moteur de cogénération. C'est pourquoi on prévoit une torchère qui brûle le méthane, ainsi qu'une seconde sortie par une cheminée naturelle visant à éviter une explosion du méthaniseur. Quant à la rupture d'une fosse de digestat observée à Châteaulin, elle aurait été la même avec du lisier.
Certes, mais le fait que les méthanisateurs collectent des effluents en provenance de plusieurs élevages conduit à ce que les quantités traitées, et donc les dégâts en cas d'accident, soient plus importants.
C'est vrai, mais dans tous les cas, la fosse explose quand elle est pleine. D'où l'importance de faire vérifier les structures dont la construction bénéficie de la garantie décennale.
Il faut comprendre que le digestat issu d'une méthanisation est l'équivalent d'un fumier que l'on aurait composté en le retournant régulièrement, comme je le faisais à mes débuts d'agriculteur, ce qui avait pour effet de faire partir tout l'ammoniac dans l'atmosphère. C'est une différence considérable du point de vue de l'environnement. Aujourd'hui, un agriculteur va épandre son digestat uniquement quand la plante sera capable de l'utiliser : il l'utilisera et gèrera ses stocks au mieux.
Il faut mener une réflexion territoriale, sachant que l'idée de doter chaque commune d'un méthaniseur n'a aucun sens. Je suis par ailleurs opposé aux 15 % d'intrants issus des cultures vivrières, car selon moi la méthanisation ne doit pas du tout empiéter sur la fonction agricole des territoires, avec ce que cela induit comme inflation du prix du foncier. Le législateur devra s'interroger sur les priorités qu'il souhaite défendre.
Ayant été un des premiers présidents de chambre d'agriculture à embaucher un technicien spécialisé dans la méthanisation, j'affirme qu'il faut privilégier la gestion territoriale et la valorisation des déchets, dont ceux qui sont générés par les collectivités et les entreprises. En tout état de cause, les solutions doivent éviter les transports de matières à travers le territoire. Dans mon département, les Vosges, qui est le « premier méthaniseur » de France, beaucoup de maires s'opposent à des transferts qui ont pour effet de faire transiter sur des voies communales des convois ayant des charges supérieures à des semi-remorques, avec de lourds dégâts pour la voirie.
Qu'en est-il de la proportion de gaz issue de la méthanisation utilisée comme carburant ? Que pensez-vous du sainfoin comme culture intermédiaire ?
Un méthaniseur, c'est comme une panse de vache. Sa production dépend de la richesse de ce que l'on y met. Le lisier n'a pas la même efficacité énergétique, en tant qu'intrant, que du maïs ou de la prairie. Sans doute de nouvelles technologies permettront-elles de maximiser cette efficacité.
Nous n'avons pas évoqué la méthanisation sur une seule exploitation en employant le terme de « micro-méthanisation », mais celle-ci relève pleinement de la méthanisation agricole qui nous occupe. Et elle présente effectivement un intérêt au regard de l'aménagement du territoire.
En ce qui concerne la capacité du monde agricole à investir, l'État a mis en place une capacité d'accès au crédit à la suite du groupe de travail constitué par Sébastien Lecornu, alors qu'il était ministre chargé des collectivités locales. L'Ademe accorde également une aide à l'investissement permettant de réduire les fonds propres apportés par l'agriculteur, avec en contrepartie une baisse de 5 euros par MWh du tarif octroyé par l'État.
Le tarif mis en place en 2011 pour l'injection n'a pas évolué jusqu'en 2020, avant que n'intervienne une récente diminution, qui pourrait créer beaucoup de perturbations.
L'expression « un méthaniseur par village » ne correspond évidemment pas à un objectif que l'on s'est donné. La méthanisation doit faire l'objet d'une répartition territoriale des différents objectifs de la transition énergétique. Encore faut-il que les différents outils de planification des collectivités prévoient de manière la plus fine possible, par exemple au niveau des communautés de communes, les endroits où l'on va implanter une éolienne, du photovoltaïque ou des méthaniseurs.
Le gaz carburant, qui est appelé bio-GNV (gaz naturel pour véhicule), mobilise une petite partie du biométhane, à hauteur de 280 GWh, ce qui correspond à plus de 15 % du GNV. Malheureusement, la PPE ne prévoit aucun objectif de développement pour le biocarburant.
La micro-méthanisation n'est pas mise en avant, en raison d'un manque de rentabilité économique. Elle a cependant tout son sens si l'on prend en compte ses externalités positives. Pour qu'elle se développe, il faut donc rémunérer ces externalités, ce qui suppose de nouveaux outils d'évaluation.
L'autofinancement reste un enjeu fondamental pour les méthaniseurs, puisque les installations ont un coût colossal à notre échelle, entre 3 et 8 millions d'euros. D'où la mise en place de partenariats entre 3 ou 4 exploitations agricoles et la nécessité de prévoir un maillage intelligent des méthaniseurs sur le territoire français.
J'ai eu l'idée d'installer un méthaniseur avec mon frère en 2006, à une époque où l'injection n'existait pas et il nous a fallu attendre le 27 août 2013 pour actionner la vanne d'ouverture au réseau. Aujourd'hui un porteur de projet bien accompagné doit patienter 3 à 4 ans. En Allemagne, où les projets se raréfient, ce délai est de moins d'un an.
Les textes initiaux encadrant la méthanisation à partir de culture vivrière en France visaient à éviter la création « d'océan de maïs », comme on en voit en Allemagne. Il n'est d'ailleurs pas possible de rentabiliser la méthanisation sur la base d'une culture dédiée.
L'idée d'utiliser le sainfoin comme CIVE pourrait être bonne, car nous retournons vers les cultures oubliées. Nous avons d'ailleurs commandé de la semence de sainfoin pour la première fois cette année, à titre d'essai.
Le droit à l'injection a permis le développement du gaz carburant. Dans notre cas de figure, le réseau a été saturé et cela nous a conduits à freiner la production. Étant situés non loin de la nationale 36 et de la nationale 19, nous réfléchissons, comme bon nombre de méthaniseurs, à installer une station GNV (Gaz naturel véhicule), de façon à fournir ce carburant vert demain. De tels projets ont tout leur sens à proximité des grandes villes du fait des contraintes environnementales qui empêcheront demain les véhicules diesel. Le développement des véhicules au gaz va être très rapide.
Je tiens à remercier Messieurs Bal et Quaak pour leurs apports, qui vont éclairer notre mission d'information.
De nombreuses questions restent en suspens. Plusieurs sujets évoqués ce jour l'ayant déjà été lors de précédentes auditions, je vous invite à rejoindre les prochaines, qui sont ouvertes à tous, à commencer par celle des industriels du gaz prévue demain, mercredi 17 mars. Nous essayons, d'une façon générale, de « croiser » les interventions des personnes que l'on auditionne, pour construire notre point de vue.
Je me joins aux remerciements de notre rapporteur et ajoute que l'installation de notre mission d'information a donné lieu à un communiqué de presse qui a fait l'objet de bonnes retombées. L'intérêt que suscite notre mission est réel.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.
La réunion est close à 18 h 35.