Séance en hémicycle du 11 décembre 2014 à 16h15

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PPRT
  • danger
  • moratoire
  • riverain
  • seveso
  • technologique

La séance

Source

La séance, suspendue à quinze heures cinquante-cinq, est reprise à seize heures quinze, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

J’informe le Sénat que les commissions mixtes paritaires chargées de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 et du projet de loi de finances pour 2015 ne sont pas parvenues à l’adoption d’un texte commun.

Par ailleurs, j’informe le Sénat que la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière est parvenue à l’adoption d’un texte commun.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

En application de l’article 45, alinéa 2, de la Constitution, le Gouvernement a engagé la procédure accélérée pour l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité, déposé sur le bureau de l’Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

L’ordre du jour appelle, à la demande du groupe CRC, l’examen de la proposition de résolution relative à un moratoire sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques issus de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages et des lois subséquentes, présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par Mme Marie France Beaufils et plusieurs de ses collègues (proposition n° 128).

Dans le débat, la parole est à Mme Marie-France Beaufils, auteur de la proposition de résolution

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-France Beaufils

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, les noms d’AZF, de Seveso ou de Bhopal portent en eux des drames ayant marqué l’histoire du monde industriel. Ces catastrophes ont traumatisé des milliers de salariés et détruit des familles entières habitant à proximité de ces entreprises.

Ces catastrophes technologiques ne relèvent pas de la fatalité ; elles ne sont pas le résultat de je ne sais quel phénomène non prévisible. Plusieurs millions de nos concitoyens – 8 millions en 2012 – côtoient au quotidien le risque industriel. Ils méritent que nous leur portions une attention particulière, d’autant qu’ils ne portent aucune responsabilité dans cette prise de risque imposée par l’activité industrielle.

Je me félicite que nous puissions défendre aujourd’hui, devant notre assemblée, cette proposition de résolution relative à un moratoire sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques, les PPRT. Souhaitons que ce texte soit également inscrit à l’Assemblée nationale, pour qu’il puisse entrer en vigueur. Ce ne serait là que justice rendue à tous les riverains qui vivent aujourd’hui dans l’angoisse de situations non résolues.

Les causes de ces sinistres, une fois analysées, nous montrent qu’ils auraient pu être évités. Pour le moins, leurs conséquences auraient pu être atténuées. Malheureusement, les mesures adéquates n’ont pas toujours été prises en amont. L’information, la prévention, les mesures de sécurité, la réglementation, l’investissement nécessaire, la formation des salariés, l’écoute des riverains, rien de cela n’a été suffisamment traité au niveau nécessaire, afin d’en mesurer les conséquences.

Le fonctionnement des entreprises concernées a souvent répondu à d’autres critères que celui du développement économique et humain et du respect de l’environnement.

Certaines de ces sociétés – des multinationales – ont eu pour seule motivation le profit maximum et immédiat. Souvent, dans ces entreprises, les salariés n’ont pas vraiment leur mot à dire. Le voisinage commence tout juste à pouvoir s’exprimer sur les nuisances subies, à partir des discussions mises en place dans les comités locaux d’information et de concertation, devenus des « commissions de suivi de site », une appellation qui n’a ni le même sens ni le même contenu.

L’urbanisation galopante a concentré les habitations autour des usines. Bien souvent, pour les sites les plus anciens, ce sont les salariés eux-mêmes qui ont été installés à proximité. Dans d’autres cas, c’est l’activité qui s’est développée et rapprochée de l’habitat. Ces proximités non maîtrisées ont fini par créer des zones où les dangers sont réels. Il était utile de réglementer.

La gravité des catastrophes a contraint les instances européennes et chaque gouvernement à réagir et à prendre des mesures. Après la publication d’une série de rapports et la constitution de plusieurs commissions d’enquête, des décisions réglementaires ont été prises et une loi relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages, dite aussi « loi Bachelot », a été débattue au Parlement et promulguée en juillet 2003.

Qu’en est-il aujourd’hui de ce texte ? Répond-il aux besoins ? Est-il conforme avec le contenu du rapport parlementaire rendu en janvier 2002, dit « rapport Loos » ? Nous sommes-nous donné les moyens de protéger les riverains et de maîtriser l’urbanisation autour de ces entreprises ? Les situations sont diverses, mais il semble bien que l’on soit encore loin du compte.

Tout d’abord, ce texte remet en cause des principes constitutionnels fondamentaux. Depuis la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, le droit de jouir de sa propriété est établi, et cette liberté de l’un – l’industriel, en l’occurrence – s’arrête là où commence celle de l’autre – les riverains, dans le cas présent. L’industriel qui crée le risque doit donc prendre les mesures pour le contenir dans les limites de son usine. Les riverains et collectivités locales concernés sont en droit d’attendre que l’État les accompagne pour faire respecter ce principe et, ainsi, assurer la sécurité publique.

On le voit, notre pays a une longue tradition législative en la matière, mais la loi Bachelot reporte les obligations et la responsabilité sur les victimes potentielles.

La directive Seveso 3, applicable le 1er juin 2015, rappelle ces principes fondamentaux, en précisant la responsabilité de l’industriel dans la maîtrise des risques dont il est lui-même à l’origine. Dans son article 5, alinéa 1, la directive précise que « les États membres veillent à ce que l’exploitant soit tenu de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour prévenir les accidents majeurs et pour en limiter les conséquences pour la santé humaine et l’environnement. »

Aux termes de Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, l’atteinte portée à la propriété privée, lorsqu’elle est justifiée par le critère d’utilité publique, doit trouver une compensation dans « une juste et préalable indemnité ». Quant à la loi Bachelot, elle oblige les collectivités et les riverains à des dépenses importantes pour assurer la sécurité des biens ainsi exposés et impose aux collectivités d’y participer.

La Coordination nationale des associations riveraines des sites Seveso s’est fait le porte-voix des associations qui représentent les habitants de ces sites. Elle constate aujourd’hui que la loi Bachelot et les textes qui la sous-tendent n’ont pas répondu aux demandes des riverains.

Après plus de dix ans, quel bilan dresser de ce texte ? À ce jour, 80 % des plans prescrits ont été approuvés. De nombreux sites font actuellement l’objet d’une instruction et quelques-uns, très complexes, n’ont pas de PPRT prescrit. L’objectif du ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie – que 95 % des PPRT soient réalisés avant la fin de l’année – ne peut être atteint dans de telles conditions.

Une révision de la loi est urgente. Reporter les coûts des mesures de protection sur les habitants et sur les communes n’est pas la solution. C’est ce que les riverains nous disent, et nous devons les écouter. Ce sont les premiers concernés ! Leurs associations doivent être associées à la définition de leur sécurité.

Pour que les riverains puissent enfin faire respecter leurs droits, la loi doit être revue. À cet égard, le moratoire ne serait en aucune façon une perte de temps : il permettrait d’analyser avec pertinence les raisons des difficultés rencontrées et d’apporter les modifications nécessaires pour que le texte, dont la fonction est d’assurer aux habitants une réelle sécurité, soit applicable. Il permettrait de redéfinir de façon précise les responsabilités et de clarifier la question du financement.

L’année supplémentaire que nous gagnerions en votant la proposition de résolution permettrait de régler les situations les plus difficiles à résoudre, qui représentent 20 % du total.

Les collectivités locales ne sont, en général, pas responsables de la présence des habitations à côté de ces sites industriels, comme je l’ai dit tout à l'heure. Les permis de construire ont été bien souvent délivrés, en leur temps, par l’État. Ces collectivités ne voient donc pas pourquoi on leur demande de participer aujourd’hui à des financements, alors qu’elles ne portent aucune responsabilité.

Les habitants, qui, je le répète, sont des victimes potentielles, ne sont pas plus habilités à régler des factures pour se protéger des dangers qu’une entreprise leur ferait subir. Faire payer le tiers à l’entreprise et les deux autres tiers aux riverains et à la collectivité ressemble à la recette du pâté d’alouette… La clarification du financement est donc cruciale.

Comment admettre qu’on laisse aux seuls industriels le soin de déterminer à quelle hauteur doit se faire la diminution du risque à la source ? L’industriel a l’obligation de limiter les dangers à la source autant que les risques, l’État ayant pour responsabilité de faire respecter le principe de prévention et de veiller à la sûreté de l’installation.

Pourquoi laisser la notion de « travaux économiquement acceptables » pour l’industriel prendre le pas sur la définition « du danger acceptable » et, par conséquent, de la sécurité maximale possible ? Il est évident que c’est bien la réduction du danger à l’intérieur de l’usine qui déterminera, à l’extérieur, l’intensité des travaux à exécuter, les différentes zones d’expropriation, de délaissement ou de renforcement des habitations.

Si l’industriel est tenu de financer lui-même tous les moyens d’alerte en direction des riverains et des salariés, c’est bien qu’on le considère comme responsable de ce qui pourrait arriver dans l’environnement de l’usine ! Il est donc admis, a priori, que son activité économique peut porter atteinte à la jouissance des propriétés voisines. Faudra-t-il construire des « bunkers » à proximité de ces sites dangereux, sans avoir de certitude ni de garantie de leur pérennité ?

Je prendrai un exemple, que je connais bien, puisqu’il est situé sur ma commune de Saint-Pierre-des-Corps, où les riverains du site de stockage et de mise en bouteille Primagaz auront l’obligation de réaliser des travaux de renforcement du bâti. Ils devront remplacer les portes et les fenêtres pour résister, en cas d’explosion, à des surpressions de l’ordre de 50 millibars à 140 millibars. Or aucun matériel, sur le marché, ne résiste à de telles pressions ! Les fabricants de portes et de fenêtres garantissent leur matériel aux surpressions de 15 à 18 millibars maximum. Dans ces conditions, les travaux obligatoires et coûteux ne protègent ni les personnes ni les biens.

Lors d’une explosion, qu’en est-il de la protection des personnes se trouvant à l’extérieur des maisons ? Celles qui sont dans leur jardin ou qui ont laissé les portes et fenêtres de leur maison ouvertes ne sont pas protégées. Toutefois, les riverains situés dans ces zones doivent-ils vivre enfermés dans les maisons aux portes et fenêtres closes vingt-quatre heures sur vingt-quatre, au nom d'une sécurité qui ne les protège pas ? Nier ces évidences pourrait être qualifié de mise en danger d’autrui.

L’industriel peut se sentir exonéré de ses obligations d’assurer la sûreté des installations en faisant participer les riverains au financement des travaux sur leurs habitations. La loi Bachelot implique, de fait, la responsabilité de ces derniers. Ne serait-ce pas un subterfuge pour leur refuser, en cas d’accident, des indemnités compensatoires auxquelles ils pourraient prétendre ?

Comme nous l’avons souligné dans l’exposé des motifs, « la loi, votée après bien des versions, inverse cette tradition législative au bénéfice exclusif des industriels. » Les travaux imposés aux habitants devraient être totalement financés. Un logement équivalent devrait leur être proposé, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Pourquoi ne pas instituer, comme le rapport Loos le préconisait, un fonds spécial dédié à la réduction des risques à la source, ce qui amoindrirait la charge des riverains ?

Comment comprendre que l’industriel puisse refuser des prescriptions qu’il estime trop onéreuses sans qu’une analyse technico-économique indépendante ait été menée ? Cela ne fait que renforcer la colère des riverains et leur sentiment d’injustice. Le respect du droit de propriété, inscrit dans notre Constitution, ne peut être aliéné par un industriel. L’État doit faire respecter ce droit !

La diminution du risque à la source est la prescription portée dans la loi Bachelot. Cette notion est-elle suffisante ? Prend-elle réellement en compte le danger encouru par les populations ?

La directive Seveso 3, qui remplacera Seveso 2, pose la question en termes de danger, qu’elle définit comme « la propriété intrinsèque d’une substance dangereuse ou d’une situation physique de pouvoir provoquer des dommages pour la santé humaine ou l’environnement », le risque, quant à lui, n’étant que « la probabilité » qu’un effet dommageable « se produise dans une période donnée ou dans des circonstances déterminées », soit un élément statistique ! C’est donc bien le danger qu’il faut diminuer à la source, et pas seulement le risque.

On le voit, l’évaluation des risques est un outil de gestion, certes utile, qui permet de calculer si, comment et dans quelle situation précise un effet dommageable se produira, mais c’est la suppression du danger à la source, lorsqu’elle est possible, qui constitue la solution.

Je reviens au site de Primagaz à Saint-Pierre-des-Corps. La notion de réduction du danger est primordiale. Une rupture de canalisation est à la base de l’étude de danger du site : une explosion du gaz qui s’en échappe déclencherait un effet domino, compte tenu des bouteilles de gaz qui y sont stockées et pourraient être projetées vers les habitations.

Si, au contraire, les bouteilles de gaz étaient stockées au nord-est de l’usine, à proximité d’une zone sans habitation, le danger à la source serait réduit et les zones du PPRT seraient modifiées, avec moins de maisons touchées. Cependant, selon le critère de « l’économiquement acceptable », le coût de participation de l’entreprise à l’expropriation est moins élevé que celui de la restructuration du site…

On voit bien que la réduction du danger à la source éviterait une double peine pour les habitants. Ceux-ci ne souhaitent pas seulement savoir quelle sera la probabilité d’un tel sinistre. Ils veulent qu’on en élimine les causes, surtout lorsque c’est possible. Il faut les écouter !

Dans la mesure où la directive Seveso 3 modifie l’approche de ces situations, il serait raisonnable d’attendre sa transposition complète et de partir de ce nouveau texte.

Les modifications de normes et de textes faisant évoluer les contraintes, les travaux effectués aujourd’hui seront-ils encore valables demain ? On pourrait en douter…

L’expérience nous montre que les différentes études de dangers accumulées au cours des ans conduisent à faire payer des sommes disproportionnées à des habitants qui ne font que subir, pour des résultats qui ne sont pas toujours à la hauteur. Ne faudrait-il pas se poser la question, lorsque cela est possible, du déplacement de ces activités industrielles qui pourraient d’ailleurs réduire le danger dans un site repensé ? C’est dans l’intérêt de l’entreprise, des riverains et des salariés qui trouveraient ainsi des conditions de travail plus sécurisantes.

Le moratoire se justifie d’autant plus que la directive Seveso 3 arrivera dans la même période. Donnons-nous un peu de temps, ce ne pourra qu’être profitable.

En diminuant la probabilité d’accidents, on ne fait qu’atténuer les conséquences d’un accident éventuel. C’est donc bien à la dangerosité qu’il faut s’attaquer, en ayant malheureusement toujours à l’esprit que le risque zéro n’existe pas.

Si les textes législatifs et réglementaires sont souvent complexes à décrypter, le maquis des financements est aussi obscur. La loi Bachelot ne permet pas une approche directement lisible par les citoyens, ce qui permet à certains industriels de se cacher derrière des formules dont seuls quelques spécialistes détiennent les codes de lecture.

Donner la possibilité aux riverains et aux collectivités de pouvoir faire des contre-propositions en s’entourant d’organismes experts indépendants permettrait certainement de négocier différemment des mesures adaptées.

Le moratoire permettrait de se donner du temps pour mieux préciser ces éléments du financement. Je n’entrerai pas dans le maquis des textes qui, pour le riverain d’un site Seveso, s’apparente à un parcours du combattant indescriptible. Les diverses lois de finances ont modifié les modalités et placé les habitants dans des processus de financement toujours différents.

On arrive quelquefois à des situations extrêmes où l’expulsion du logement est la seule solution préconisée. Si effectivement la réduction du danger est jugée suffisante pour des raisons de coût financier, c’est le riverain qui paye le prix fort. Cela conduit à prendre des décisions inhumaines pour des habitants, souvent de condition modeste et qui sont là depuis des décennies.

Dans ma ville, 106 maisons sont concernées. Je connais un couple de modestes retraités âgés de 85 ans. Ils habitent leur maison depuis cinquante-cinq ans, l’ont aménagée au fil des années et en sont devenus propriétaires. Aujourd’hui, ils risquent d’être expropriés. Quitter cette maison serait un drame humain pour eux. Ils souhaitent rester vivre dans leur maison, dans le quartier qu’ils connaissent et où ils sont connus. Même avec les indemnités d’expropriation, ils n’auront pas les moyens financiers de se reloger à l’identique dans l’agglomération tourangelle, les coûts ayant fortement augmenté ces dernières années. De nombreux autres exemples de personnes habitant ce quartier ou d’autres quartiers similaires connaissent la même situation. L’expropriation est vécue comme une violence d’autant plus importante que les personnes sont là depuis longtemps et sont âgées.

La loi Bachelot, si elle est une avancée, est néanmoins perçue par de nombreux riverains comme très injuste et peu respectueuse de leurs droits fondamentaux. Elle ne devrait pas faire participer financièrement les riverains à des travaux de sécurisation dont l’unique responsabilité, je le répète, repose sur les industriels. Ce sont en général de grosses sociétés qui sont en capacité d’assurer la sécurité maximale, en réduisant le danger à la source, pour leurs salariés comme pour les riverains.

Bien souvent, les riverains connaissent les sites qui sont à proximité ; ils ont toujours porté de façon tranquille leurs revendications, les soumettant dans les réunions publiques, les faisant partager par leurs maires, les exposant aux différents préfets, aux élus, les adressant aux industriels, en tentant de les présenter aux ministres successifs. Ils se sont constitués en associations puis regroupés au sein d’une coordination nationale, pour mener une réflexion en profondeur et défendre les intérêts de tous les riverains des sites Seveso. Il est temps que leur voix soit entendue et que ce ne soit pas seulement une consultation comme celle à laquelle on se livre dans le cadre des PPRT.

Les riverains de ces sites ont toujours tenté de convaincre par le dialogue, et n’ont pas été entendus. Écoutez les riverains des sites Seveso, monsieur le secrétaire d’État, écoutez leurs élus. Ils comptent aujourd’hui sur les parlementaires que nous sommes pour que leurs voix soient prises en compte, que leurs conditions d’existence soient complètement respectées et que les entreprises prennent enfin les mesures adéquates pour leur bon fonctionnement et le respect de l’environnement.

Ils comptent sur vous tous, chers collègues, pour que le moratoire soit voté au Sénat puis, dans un deuxième temps, à l’Assemblée nationale. Une remise à plat de la loi Bachelot doit être amorcée pour rendre applicable un texte dans l’intérêt commun des entreprises et des riverains de ces sites.

Cette loi votée en 2003 devait être mise en œuvre dans sa totalité en 2008 et les PPRT finalisés. Nous sommes en 2014 et l’inquiétude est grande chez nombre de nos concitoyens. Cette loi, les règlements, les innombrables circulaires, montrent qu’il ne suffit pas d’ajouter des textes réglementaires pour qu’une loi qui n’est pas adaptée le devienne subitement.

La loi Bachelot, si elle a bien acté une situation, n’a pas donné complètement les moyens de la résoudre ; elle a probablement été une étape. Nous sommes au milieu du gué et avons besoin de passer le mauvais cap dans lequel se trouvent de nombreux concitoyens. Quelques rustines ont été posées à la hâte, comme dernièrement encore le crédit d’impôt qui pourrait paraître séduisant mais qui contraint les riverains à débourser des sommes importantes. D’autres, comme le plafonnement du coût à 20 000 euros, traduisent bien l’impossibilité d’imposer aux riverains le prix réel de leur sécurité.

Il est temps de mettre entre parenthèses jusqu’au 1er septembre prochain l’application de ce texte et de se mettre autour de la table avec les représentants des associations riveraines, les entreprises et l’État pour lever les obstacles à un véritable traitement de la situation vécue dans l’angoisse par nos concitoyens qui vivent à proximité de ces zones dangereuses, et de réviser la loi Bachelot pour que la vie des riverains redevienne vivable pour tous.

Pourquoi se polariser sur les travaux concernant les habitations alors que c’est la réduction du danger à la source qui peut réduire d’autant les dépenses sur les habitations ? Réduire les dangers à la source, c’est réduire les risques pour les habitants de se voir touchés par un accident aux conséquences incalculables.

C’est bien de ce principe qu’il faut partir afin de maîtriser au mieux la sécurité dans ces entreprises, utiles pour l’emploi, utiles pour la croissance, utiles pour notre économie. Ce ne sont pas les activités de ces entreprises qui sont remises en cause, mais bien les conditions de la production, qui ne peut se faire au détriment des salariés, des riverains, de l’environnement.

On entend souvent dire qu’il y aurait trop de normes, trop de code du travail, trop de code de l’environnement. L’exemple des PPRT nous montre une fois de plus que si nous voulons vivre dans une société civilisée, ce ne peut pas être au détriment des conditions de vie des habitants et des conditions de travail des salariés. L’investissement dans la sécurité de nos entreprises relève de l’intérêt des entreprises elles-mêmes, de l’intérêt général.

Vouloir nous faire croire que la compétitivité ne peut se réaliser que dans une jungle économique où tous les coups seraient permis, c’est prôner un type de société peu respectueux de ses habitants, de tous ceux qui créent les richesses, de tous ceux qui participent au développement de notre pays. Il est temps que nous puissions réfléchir à produire autrement pour que les hommes et la nature soient au centre de nos préoccupations économiques, tout en privilégiant les productions socialement utiles.

Je réduis mon propos afin de respecter mon temps de parole, monsieur le président.

Ce qui est inacceptable, aujourd’hui, c’est de laisser des milliers de nos concitoyens vivre dans l’insécurité et dans l’incertitude du lendemain. C’est pourquoi la révision des PPRT est une véritable épée de Damoclès.

La recherche et l’innovation ne peuvent être réservées à la seule recherche de rentabilité de la production. Elles doivent être développées pour que les dangers soient réduits au maximum, pour que l’environnement soit respecté. Ce ne sont pas des dépenses superflues, ni somptuaires, ce sont des dépenses utiles socialement, écologiquement et économiquement.

Applaudissements sur les travées du groupe CRC . – MM. Joël Labbé et Pierre-Yves Collombat applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Billon

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la gestion et la prévention des risques industriels et technologiques se sont brutalement imposées à nous après l’accident survenu à l’usine AZF de Toulouse le 21 septembre 2001. Les pouvoirs publics, que ce soient l’État, les parlementaires ou les collectivités, ont souhaité en tirer immédiatement les conséquences par la loi dite Bachelot du 30 juillet 2003. Son objectif était de renforcer les modalités de prévention des risques technologiques et naturels, et d’améliorer l’indemnisation des victimes de catastrophes technologiques.

L’insuffisante prise de conscience de l’existence du risque à tous les niveaux de la société et le fait que le risque zéro n’existe pas ont poussé le législateur à mettre en œuvre des mesures responsabilisant tous les acteurs : industriels, élus et citoyens. Parmi celles-ci, la mesure essentielle de cette loi fut l’élaboration des plans de prévention des risques technologiques, ou PPRT.

Ces PPRT sont des outils de maîtrise de l’urbanisation qui doivent normalement permettre de résoudre les situations difficiles en matière d’urbanisme héritées du passé et de mieux encadrer l’urbanisation future, en déterminant un zonage en fonction du type de risques et de leur gravité.

Ils concernent tous les établissements soumis au régime de l’autorisation avec servitudes s’apparentant aux sites Seveso seuil haut et visent à améliorer la coexistence des sites industriels à hauts risques existants avec leurs riverains, en améliorant la protection de ces derniers tout en pérennisant les premiers.

C’est tout cet équilibre entre prévention du risque et maintien de l’activité économique et de l’emploi qui constitue la principale difficulté des PPRT. Un subtil mélange qui a parfois fait naître des tensions entre les différents acteurs, y compris avec les collectivités et leurs élus, qui jouent un rôle de modérateur et de conciliateur défendant au mieux les intérêts de leur territoire et de leurs habitants.

La proposition de résolution qui nous est présentée pointe du doigt de réelles difficultés, mais prévoit une solution excessive.

Nos collègues du groupe CRC, auteurs de cette proposition de résolution, considèrent que les PPRT ne sont pas adaptés aux objectifs qui leur sont attachés. Ils estiment que les difficultés de mise en place de ces PPRT se traduisent par de fortes insécurités pour les riverains des sites Seveso et qu’ils ne respectent pas l’esprit de la loi initiale. Ils considèrent qu’il faut revoir la législation pour améliorer la sécurité et la sûreté des citoyens, diminuer le danger à la source, revoir les modes de financement et redéfinir la notion d’« économiquement acceptable ».

Les objectifs sont louables et peuvent être partagés ; néanmoins la solution prévue par cette proposition de résolution, à savoir un moratoire sur les PPRT, est disproportionnée.

Un moratoire signifie un arrêt total de la mise en place des plans de prévention pour les 25 % restants. Ce serait nuisible aux riverains, aux industriels, aux collectivités et, au final, à la sécurité générale. Un moratoire signifie que ce qui avait été proposé, et donc les PPRT existants, ne répond pas aux objectifs de prévention des risques. Tel n’est pas le cas.

Un moratoire introduit selon nous une véritable insécurité juridique préjudiciable aux riverains et à l’économie locale. Ce n’est donc pas la bonne méthode pour traiter des questions de sûreté industrielle.

De premières adaptations de la loi de 2003 ont été mises en œuvre, mais une réflexion plus globale est nécessaire. Eu égard aux difficultés déjà exprimées ici, des mesures d’adaptation ont été prises, tout en garantissant l’attractivité et la compétitivité de notre pays.

Ainsi, une circulaire du 25 juillet 2013 fixe les modalités particulières pour l’élaboration des PPRT des principales plateformes économiques du territoire. Il s’agit de permettre l’implantation de nouvelles activités dans certains grands ensembles industriels tout en maintenant un haut niveau de sécurité. Les PPRT sont alors envisagés comme un atout pour le développement industriel.

La circulaire définit les principales règles qui seront applicables aux grandes plateformes industrielles. Pour ces entreprises disposant d’une culture du risque technologique, les extensions ou nouvelles implantations seront autorisées sous réserve de protéger les salariés exposés aux risques.

De plus, dans le cadre du projet de loi de simplification des entreprises récemment adopté, un amendement gouvernemental visant à adapter les dispositions PPRT aux activités économiques a été voté.

Deux nouvelles dispositions visent donc à lever les difficultés d’application pour les entreprises riveraines des sites à risques.

La première consiste à offrir la possibilité à ces entreprises de mettre en œuvre des mesures alternatives aux mesures d’expropriation et de délaissement. Celles-ci pourront bénéficier d’un financement tripartite - industriels à l’origine du risque, État, collectivités -, dans la limite du montant des mesures foncières évitées.

La seconde disposition consiste à assouplir les obligations de travaux de renforcement des locaux des entreprises riveraines, en ouvrant le recours à d’autres méthodes de protection des personnes, telles que des mesures organisationnelles dans le cadre des autres réglementations applicables.

Ces nouvelles mesures ont déjà permis d’approuver 300 PPRT sur les 407 à réaliser en France. Leur nombre a donc significativement augmenté depuis le moment où nos collègues ont déposé leur proposition de résolution.

Ces adaptations par petites touches viennent tout de même conforter l’analyse globale de la nécessaire adaptation de la loi Bachelot de 2003. Il nous revient, en tant que sénateurs, de contrôler la bonne application de la loi et de son esprit. C’est pourquoi, mes chers collègues, plutôt qu’un moratoire, je vous propose que notre assemblée se saisisse de ce sujet et réalise un véritable travail de contrôle, sous la forme d’un rapport d’information.

À l’issue de ce travail, nous pourrions proposer toutes les mesures législatives nécessaires pour améliorer le droit existant. Nous ferions ainsi œuvre de production législative sans créer de rupture avec ce qui existe déjà.

En conclusion, mes chers collègues, vous comprendrez que le groupe UDI-UC sera défavorable à l’adoption de cette proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en septembre 2001, l’usine AZF de Toulouse explose, causant 31 décès, 2 242 blessés et détruisant 30 000 foyers. La France découvre alors qu’une partie de ses citoyens vit exposée à des risques industriels majeurs, conséquence d’une urbanisation toujours plus proche des sites industriels.

En mars 2013, le dégagement accidentel, dans l’usine de Lubrizol, près de Rouen, d’un produit dont l’odeur est proche de celle du gaz naturel est ressenti jusqu’à Paris, provoquant la panique dans son sillage ; de nombreux services de secours seront submergés.

Entre ces deux accidents aux origines et conséquences bien différentes, douze ans ont passé. Douze ans pendant lesquels la question des risques industriels a fait l’objet de plans d’action gouvernementaux mis en musique via des lois, décrets et autres circulaires... Douze ans de construction d’une culture du risque en France qui peine encore à se développer.

Toutefois, force est de constater que les acteurs locaux concernés que sont les collectivités et les industriels semblent avoir entamé un dialogue à travers les PPRT.

Cet outil ne concerne pour l’instant que les sites les plus dangereux de type Seveso, classés comme tels du fait de la présence en quantité importante de substances dangereuses.

La directive européenne 96/82/CE, dite « directive Seveso », distingue deux types d’établissements selon la quantité totale de matières dangereuses stockées ou utilisées : les établissements Seveso « seuil haut » et les établissements Seveso « seuil bas ».

Si les mesures de sécurité et les procédures prévues par la directive varient selon le type d’établissements afin de conserver une certaine proportionnalité, l’étude de dangers constitue la clef de voûte du dispositif. Elle sert de base à l’élaboration des PPRT en France, et vise à minimiser les risques à la source, à prévoir les effets d’un accident, à limiter les dégâts humains et matériels sur site et en dehors et à organiser le recours aux services de secours, le tout en relation avec les collectivités.

Les industriels doivent également, depuis peu, travailler de concert. C’est en tout cas ce que souhaite l’État français à travers sa nouvelle doctrine, présentée en avril 2013, en matière de gestion des risques industriels : mutualisation des procédures, des équipements de protection, des études de dangers... L’exercice semble déroutant pour les industriels : alors qu’ils commencent seulement à maîtriser le dialogue avec les collectivités, les voilà sommés d’échanger entre eux ; un exercice à l’épreuve du terrain.

Que ce soit en France ou en Europe, les politiques de gestion des risques industriels se construisent donc au rythme des accidents. Ce retour d’expérience est nécessaire et participe progressivement à la mise en place d’un dialogue entre les acteurs locaux concernés.

Votée à la suite de la catastrophe d’AZF de 2001, la loi du 30 juillet 2003, dite « loi Bachelot », prévoit la mise en place de PPRT autour des installations à « haut risque » et une meilleure maîtrise de l’urbanisation autour de ces sites via des actions de protection.

L’usine AZF, classée Seveso 2, propriété de la société Grande Paroisse, filiale de Total, avait alors été entièrement détruite. L’ancien site chimique, qui s’étendait sur soixante-dix-huit hectares, a aujourd’hui fait place à un projet de cancéropôle, après une opération de dépollution de la zone – menée par Total – qui aura duré trois ans, de la fin de l’année 2004 à 2007.

L’explosion de l’usine AZF a donc mis en lumière les failles de la gestion du risque industriel en France. Si, jusqu’à la catastrophe, la législation visait avant tout une prévention du risque à la source dont l’effort portait essentiellement sur l’exploitant, la loi Bachelot a impliqué l’État, les collectivités locales et les citoyens.

Quelle est la méthodologie des PPRT ?

La loi Bachelot a fixé un nouveau cadre méthodologique autour de ses sites à risque en créant les PPRT. Ces plans délimitent un périmètre d’exposition aux risques autour des installations classées à haut risque, à l’intérieur duquel différentes zones peuvent être réglementées en fonction des risques.

L’étude de dangers constitue la base de la maîtrise de l’urbanisation et de la délimitation du périmètre des plans, dans le but d’assurer la coexistence des sites avec leur environnement, dans des conditions sécuritaires.

Il s’agit de prévenir les risques d’accident et de pollution liés aux installations industrielles et agricoles – notamment les installations classées pour la protection de l’environnement –, aux canalisations de transport de fluides dangereux, à l’utilisation d’explosifs, au transport de matières dangereuses, aux équipements sous pression et à la distribution et à l’utilisation du gaz.

Après une phase de réduction des risques à la source, le PPRT est ainsi prescrit sur un périmètre d’étude issu de l’étude de dangers du site.

Après instruction technique, concertation et enquête publique, le PPRT est approuvé par le préfet et annexé aux différents documents d’urbanisme – plan local d’urbanisme, ou PLU, schéma de cohérence territoriale, ou SCOT, et programme local de l’habitat, ou PLH.

Il prévoit des restrictions sur l’urbanisme futur : restrictions d’usage et règles de construction renforcées. Des aménagements ou des projets de construction peuvent être interdits ou subordonnés au respect de prescriptions. Dans ces zones, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents peuvent instaurer un droit de préemption urbain.

Les PPRT peuvent également prescrire des mesures foncières de protection des populations sur l’urbanisation existante la plus exposée. Ces mesures doivent être prises par les propriétaires et exploitants. Des mesures supplémentaires sont prévues pour réduire le risque à la source sur les sites industriels, si elles sont moins coûteuses que les mesures foncières qu’elles évitent.

Les plans peuvent encore définir des secteurs à l’intérieur desquels l’expropriation peut être déclarée d’utilité publique pour cause de danger très grave menaçant la vie humaine, et ceux à l’intérieur desquels les communes peuvent instaurer un droit de délaissement.

Un plan ministériel a été mis en œuvre pour lever les « blocages » des PPRT.

Les PPRT prévoient des travaux de renforcement à effectuer sur les constructions voisines existantes pour en réduire la vulnérabilité. Toutefois, le financement tripartite – État, industriels, collectivités – de ces travaux a été au cœur des blocages : 407 plans devaient être validés au 31 juillet 2008 ; ils n’étaient que 248, soit un taux de 61 %, à être mis en place au 1er novembre 2013, selon les chiffres du ministère de l’écologie.

L’incident de l’usine chimique Lubrizol, à la fin de l’année 2013, à Rouen, a poussé le ministère à présenter le 11 avril 2013 un nouveau plan d’action afin d’accélérer la mise en œuvre des PPRT : l’objectif est que 75 % d’entre eux soient approuvés à la fin de 2013, et 95 % à la fin de 2014. Nous ne pouvons que nous en réjouir.

Quelles sont les raisons de ce retard ? Outre le financement des travaux prescrits chez les riverains, on regrettera l’absence de mesures d’accompagnement des propriétaires des biens concernés par la mise en œuvre des PPRT.

On pourra évoquer également la complexité des études préalables à mener et la difficulté éprouvée par certains industriels pour finaliser la réduction du risque à la source.

Je tiens ici à saluer l’effort de la plupart des industriels, qui ont investi 200 millions à 300 millions d’euros par an afin de réduire les risques de leurs établissements.

Ces investissements ont permis à ce jour de réduire les zones soumises aux mesures foncières d’environ 350 kilomètres carrés, tandis que près de 2 000 études de dangers ont été instruites.

Autres obstacles pointés : les procédures actuellement applicables sont redondantes et les collectivités de taille modeste ne disposent pas toujours des compétences pour les mener à terme.

Face à ces retards, un nouveau plan de prévention des risques technologiques prévoit douze mesures visant à répondre aux attentes des riverains, élus et industriels.

Il s’agit d’abord de mobiliser les moyens de l’État, notamment par l’élaboration d’un planning ambitieux inscrit dans la circulaire datée du 11 avril 2013 adressée aux préfets.

J’en viens aux pistes de financement des travaux riverains.

Côté financement, l’adoption d’un amendement de notre collègue député Yves Blein en juillet 2013, lors de l’examen du projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable, a porté à 90 % le taux de la prise en charge des travaux imposés aux riverains selon la clé de répartition suivante : 40 % à la charge de l’État sous forme de crédit d’impôt, 25 % à la charge des industriels et 25 % à la charge des collectivités locales.

La loi prévoit désormais que les travaux de protection ne peuvent être prescrits que pour des aménagements dont le coût n’excède pas 20 000 euros pour un particulier – ou 10 % de la valeur vénale du bien –, 5 % du chiffre d’affaires lorsque le bien est la propriété d’une société, et 1 % du budget lorsqu’il est la propriété d’une collectivité.

Le plan prévoit en outre un accompagnement des riverains afin qu’ils bénéficient de micro-crédits et des aides de l’ANAH.

Nous devons donc mieux articuler la politique de prévention des risques avec la politique du logement.

Parmi les pistes de financement, nous pourrions mobiliser les fonds « 1 % logement » pour créer des aides complémentaires ou des prêts à taux zéro et étendre aux bailleurs sociaux et à la maîtrise d’ouvrage d’insertion le crédit d’impôt instauré au profit des propriétaires privés pour financer les travaux de protection prescrits.

Pour notre groupe, les PPRT, qui sont un bon outil, ne doivent pas empêcher le développement des activités économiques. Il s’agit surtout d’éviter que les interdictions et restrictions prévues par les plans de prévention des risques technologiques n’empêchent l’implantation ou le développement d’activités économiques dans les zones concernées.

Dans ces zones, les règles relatives à l’élaboration des PPRT peuvent être adaptées, en tenant compte de la vocation de ces plateformes et de la culture de sécurité des entreprises concernées.

Le 25 juin 2014, soit quelques jours avant son limogeage, Delphine Batho a signé une circulaire mettant en œuvre cette nouvelle doctrine : elle dresse la liste des dix-sept plateformes industrielles concernées et fixe les règles d’acceptation des nouvelles activités industrielles, de protection des salariés exposés aux risques et de gouvernance collective.

Six mois plus tard, cette nouvelle doctrine a-t-elle produit des résultats ? Il existe encore un écart entre la circulaire et la capacité du terrain à y répondre.

S’il y avait bien une demande initiale des industriels à ce que la mise en place du PPRT autour des sites Seveso ne pénalise pas les autres activités économiques, il semble que les plans soient aujourd’hui un peu plus complexes, ce qui nécessite un véritable travail de concertation.

En vérité, le risque zéro n’existe pas, à moins de vouloir vivre dans un environnement confiné, qui rejette tout type de développement.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Il faut non pas nier la dangerosité de certaines installations, mais tenter au contraire d’en maîtriser les risques de façon lucide et responsable.

Les membres du groupe UMP considèrent que les PPRT sont indispensables, car ils permettent aux industriels de poursuivre leurs activités tout en préservant et protégeant les riverains et tout en procédant à une réduction du risque à la source. C’est pourquoi ils voteront contre cette proposition de résolution. §

Debut de section - PermalienPhoto de Nelly Tocqueville

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, tout le monde a encore en mémoire les trop nombreux drames industriels de ces dernières décennies qui ont coûté la vie à des milliers de personnes à travers le monde. Bophal, en Inde, c’était il y a trente ans…

Force est de constater que ce phénomène n’est malheureusement pas encore éradiqué, puisque l’usine chimique ayant explosé en Argentine le 7 novembre dernier a fait plusieurs blessés. D’autres accidents ont eu lieu plus récemment encore, comme en Belgique ou en Allemagne, la semaine dernière.

En France, les plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, ont été introduits par la loi, dite « Bachelot » ou loi « Risques », du 30 juillet 2003, à la suite de la terrible catastrophe survenue dans l’usine AZF de Toulouse, en septembre 2001.

Comme cela a été rappelé, parce que c’est leur objet même, ces plans constituent un outil de maîtrise de l’urbanisation autour des établissements industriels à haut risque, qualifiés de « Seveso seuil haut ». Leur finalité est de délimiter des périmètres d’exposition aux risques et de protéger les riverains en agissant non seulement sur la maîtrise de l’urbanisation future, mais aussi sur l’urbanisation existante autour des installations classées AS, ou autorisation avec servitudes.

Au 1er août 2014, 406 PPRT ont été prescrits et 311 approuvés. Ainsi, sur les 407 bassins industriels et plus de 800 communes concernés, 99 % des PPRT prévus sont désormais prescrits et 76 % approuvés.

Si je prends l’exemple de ma région – la Haute-Normandie –, sur les quatorze PPRT, tous sont prescrits et, depuis décembre 2012, six ont été approuvés.

Certes, les premiers cas de mise en œuvre ont révélé des difficultés d’application pour un certain nombre de raisons, parmi lesquelles une concertation insuffisante, collectivités locales, entreprises riveraines et habitants concernés ayant été écartés.

De plus, l’instruction des PPRT est très longue ; en effet, les documents techniques sont nombreux et d’une grande complexité, sans compter le manque d’expertise de l’ensemble des acteurs. Tous ces obstacles ont posé d’indéniables difficultés dans la mise en œuvre de ces plans.

À ces complications générales s’ajoutent des problématiques territoriales qui ralentissent davantage encore leur mise en place. Ainsi, un PPRT peut entraver un projet structurant pour une collectivité du fait de contraintes d’urbanisme imposées. Et on peut regretter un manque d’accompagnement des élus dans certains cas.

Ces retards pris laissent dans l’expectative l’ensemble des forces en présence, en particulier les entreprises riveraines, dont le risque de délocalisation fait peser sur les zones industrielles un phénomène de paupérisation.

En outre, les propriétaires riverains ne peuvent pas accepter de supporter seuls la charge des travaux prescrits sur leurs habitations. Cette charge est jugée très lourde par des habitants qui sont déjà souvent confrontés à des difficultés sociales. Ils rappellent que si le risque existe, ils n’en sont pas responsables et que les conséquences doivent être assumées par les industriels.

À l’énoncé de ces difficultés, la proposition émise par le groupe CRC relative à un moratoire sur la mise en œuvre des PPRT peut paraître légitime, mais elle ne prend pas en compte les nombreuses améliorations introduites depuis 2013 et qui vont permettre d’accélérer la mise en œuvre des PPRT.

Il est intéressant précisément de rappeler les différentes mesures que prescrivent ces plans.

Premièrement, des mesures foncières qui se concentrent sur l’urbanisation existante la plus exposée et pouvant imposer à une collectivité d’acquérir un terrain, dans des périmètres définis.

Deuxièmement, des mesures supplémentaires de réduction du risque à la source sur les sites industriels, plus drastiques que les exigences réglementaires.

Troisièmement, des travaux de renforcement à mener sur les constructions voisines existantes.

Quatrièmement, des restrictions ou des règles sur l’urbanisme futur et les aménagements structurants à proximité du site.

Concernant le financement de ces mesures, je rappelle que les deux premières font l’objet d’un financement tripartite, réparti par convention entre les exploitants des sites industriels, les collectivités territoriales et l’État.

De même, s’agissant des travaux obligatoires, il est à noter que, désormais, la loi prévoit également un financement tripartite au bénéfice des riverains, ce qui n’était pas le cas auparavant, puisqu’ils étaient financés exclusivement par les propriétaires des biens.

Ces mesures ont été saluées comme d’autres, par exemple en Seine-Maritime, où les associations de riverains, en particulier au Havre, approuvent le principe de l’accord AMARIS-UIC-UFIP, qui impose une participation minimale en deux parts égales, entre les industriels à l’origine des risques et les collectivités percevant tout ou partie de la contribution éco-territoriale dans le périmètre couvert par le plan. Ces contributions doivent assurer un financement de 50 %.

Cet ensemble de dispositions a été complété en avril 2013 par le plan Batho, à la suite de l’incident survenu dans la périphérie de Rouen, dans l’usine Lubrizol, et qui facilite aussi l’accélération nécessaire de l’approbation des PPRT, en mobilisant les moyens de l’État.

Je pense ici à la mise en place d’une force d’intervention rapide, la FIR, à la suite de cet incident, tout du moins qualifié comme tel par les autorités et l’entreprise Lubrizol ; au recensement des cas « d’incommodités » via les études de dangers ; enfin, à une meilleure organisation de la communication et de l’information.

Ces trois dispositifs avaient fait cruellement défaut, en particulier auprès des élus.

Pour l’avoir vécu dans ma commune en tant que maire, nous n’avons pas pu prendre les mesures qui auraient dû s’imposer en matière d’information auprès des populations. Ces dispositifs s’inscrivent donc dans une stratégie qui impose aux industriels et à toutes les parties prenantes des partenariats et une mutualisation des ressources.

Ce plan permet, également, le développement économique des plateformes industrielles soumises à PPRT. Il s’agit ici d’accroître l’attractivité de ces zones en permettant l’implantation d’activités industrielles nouvelles.

Une autre évolution à laquelle il faut faire référence concerne la circulaire du 25 juin 2013 relative au traitement des plateformes économiques.

En effet, cette circulaire recommande, notamment, au préfet de « réserver un traitement spécifique aux entreprises qui disposent d’une culture du risque technologique ».

Il faut noter aussi une évolution récente ; en effet, la loi dite « DADUE » du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine du développement durable contient plusieurs avancées majeures.

Elle dispose que les propriétaires riverains peuvent bénéficier d’un droit de délaissement automatique, et ainsi mettre en demeure les collectivités de procéder à l’acquisition de leurs biens, dans un délai de six ans.

Quant au coût de démolition des biens, en cas d’expropriation, par exemple, qui auparavant était à la seule charge des collectivités, il est désormais intégré dans la convention tripartite de financement des mesures foncières. Le financement des travaux à la charge des propriétaires d’habitations voisines des sites industriels devient aussi tripartite.

De plus, il faut se féliciter de la simplification, pour les communes, de la procédure d’enquête publique, en cas d’expropriation.

Force est de constater que cette dernière loi contribue à l’amélioration du dispositif d’accompagnement des riverains, lesquels, à partir de 2015, pourront également bénéficier d’aides de l’ANAH. Ainsi, les travaux engagés dans le cadre de la mise en œuvre des PPRT pourront s’accompagner de rénovations permettant, surtout, de réaliser des économies d’énergie.

Enfin, une dernière amélioration notable dans la mise en œuvre de ces plans peut être relevée au travers du très récent projet de loi relatif à la vie des entreprises.

En effet, dans le cadre de l’examen de ce projet de loi, le 4 novembre 2014, le Sénat a adopté un amendement déposé par le Gouvernement, relatif aux PPRT.

Cet amendement non seulement vise à adapter les dispositions de ces plans aux activités économiques, mais autorise également le Gouvernement à prendre par ordonnance les dispositions afin d’assouplir la mise en œuvre des PPRT. Il est habilité à « préciser, clarifier et adapter les dispositions [relatives à ce PPRT] afin d’améliorer et de simplifier l’élaboration, la mise en œuvre et la révision ou modification des plans de prévention des risques technologiques ».

Je veux rappeler que le groupe CRC du Sénat a voté ici même cet amendement !

Pour conclure, je ne nie pas le fait que la mise en œuvre des PPRT a été compliquée et complexe, et ce d’autant plus que certaines problématiques sont humainement et économiquement difficiles.

Pour autant, il serait malvenu d’occulter les évolutions passées – certaines sont récentes – et à venir, qui ont, depuis la loi de 2003, comme je l’ai expliqué, fait évoluer considérablement la mise en œuvre des PPRT.

Ainsi, un moratoire ne se justifie pas alors que plus de dix ans se sont écoulés depuis que des collectivités locales se sont engagées. Une telle décision porterait au contraire un préjudice grave non seulement aux communes qui sont confrontées au gel de leurs projets d’aménagement et de développement, aux riverains dont certains attendent la finalisation de la procédure d’expropriation afin de pouvoir partir, mais également aux industriels. Enfin, cela aurait des conséquences économiques néfastes pour les zones concernées.

Il faut plutôt continuer à mener une réflexion centrée sur la cohabitation entre les entreprises à haut risque et les habitants et mettre en œuvre la loi dans une démarche d’accompagnement sur le terrain.

Pour toutes ces raisons, le groupe socialiste ne votera pas cette proposition de résolution relative à un moratoire sur la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les membres du groupe CRC ont demandé l’inscription à l’ordre du jour de notre assemblée de cette résolution souhaitant un moratoire concernant les plans de prévention des risques technologiques.

Pour ma part, j’ai fait quelques recherches, afin de mieux comprendre les risques auxquels mon territoire, le département du Morbihan, est exposé.

J’ai donc tout d’abord navigué sur le site du Gouvernement, risques.gouv.fr, que j’ai trouvé très pédagogique mais un peu simpliste. J’ai finalement trouvé les informations très pertinentes sur le site de la préfecture du Morbihan, à savoir les cartographies détaillées des risques départementaux.

Sur ma commune de Saint-Nolff, nous ne sommes concernés, en termes de risques technologiques, que par le transport de marchandises dangereuses par la voie ferrée Paris-Quimper, qui traverse le bourg de part en part, un risque qui fut l’un des arguments pour nous empêcher d’agrandir une école publique.

Pour le Morbihan dans son ensemble, les risques technologiques majeurs sont liés aux sites industriels – ils ne sont pas en grand nombre mais peuvent malgré tout présenter des risques –, au transport de matières dangereuses, aux barrages, qui peuvent se rompre, au dépôt de munitions près de l’école militaire de Saint-Cyr-Coëtquidan, aux dépôts de carburants, de gaz, d’engrais et de produits phytosanitaires.

On constate que, entre le dépôt de la résolution le 18 octobre 2013 et aujourd’hui, l’État a progressé, car le pourcentage des PPRT approuvés est passé de 56 % à 73 %. C’est indéniablement un progrès.

Approuver ces plans, c’est une chose ; les mettre en œuvre, c’en est une autre… Nous entendons bien les critiques formulées par nos collègues à l’égard de la mise en œuvre de ces plans de prévention des risques technologiques.

Tout d’abord, la concertation laisse trop souvent à désirer – une remarque qui vaut d’ailleurs bien au-delà des PPRT.

Pourtant, la concertation, une véritable concertation, est aujourd’hui indispensable. C’est une condition nécessaire pour aboutir à l’acceptabilité des populations concernées.

Le Gouvernement nous a rappelé à plusieurs reprises ses engagements pour une plus grande transparence, une meilleure association des citoyens aux processus de décision et un raccourcissement des délais d’instruction.

Nous soutenons ces engagements et nous plaidons pour leur mise en œuvre rapide, notamment en ce qui concerne une véritable concertation citoyenne.

L’enquête publique comme unique moyen de démocratie locale est aujourd’hui une procédure dépassée, tout comme une concertation réunissant principalement des élus, des fonctionnaires, la société concernée et seulement deux ou trois associations locales, comme on a pu le voir dans certains arrêtés de prescription.

De la même manière, un financement tripartite – entreprises, État, collectivités –, qui limite de fait la participation du premier responsable au tiers seulement du financement, est dommageable pour les finances publiques des collectivités locales.

Il est essentiel de reconnaître la responsabilité de l’État, mais également des collectivités locales lorsqu’elles ont approuvé l’implantation de ces projets, mais aussi le développement de l’urbanisation alentour.

De même, faire peser une partie du coût des travaux de mise en conformité sur les habitants eux-mêmes semble méconnaître certains principes fondamentaux de notre droit. Ici, les riverains supporteront des frais dont ils ne sont en aucun cas responsables. Les subventions et crédits d’impôt alloués ne couvrent que très partiellement les coûts engendrés.

Nous n’entrerons pas non plus dans les méandres du principe de précaution, qui est largement évoqué dans l’exposé des motifs. Nous connaissons bien les critiques qu’une partie de notre assemblée formule à son encontre, mais nous aurons d’autres occasions d’en débattre.

Après une phase de réduction des risques à la source, dont nos collègues ont très bien montré les limites dans l’exposé des motifs de leur proposition de résolution, le PPRT est prescrit sur un périmètre d’étude issu de l’étude de dangers du site.

Après instruction technique, concertation et enquête publique, le PPRT est approuvé.

Il peut prévoir plusieurs types de mesures : des mesures foncières sur l’urbanisation existante, des mesures supplémentaires de réduction du risque à la source, des travaux de renforcement à mener sur les constructions voisines existantes, des restrictions sur l’urbanisme futur – ce point est très important, de même que l’obligation d’information aux acquéreurs et locataires sur les communes concernées par les risques majeurs.

Si nous, les écologistes, soutenons la démarche qui conduit à réaliser les PPRT, nous sommes également sensibles aux arguments de nos collègues du groupe CRC.

Nous constatons les efforts déployés par le Gouvernement pour accélérer l’approbation de ces plans, et nous espérons qu’il déploiera autant d’efforts, si ce n’est plus, afin d’améliorer les processus de concertation et le financement de ces mises en conformité pour que ce ne soient pas les riverains qui assument encore une fois les risques que les industriels leur font courir.

Mieux que dans le cadre d’un moratoire, on pourrait envisager ces évolutions à travers un processus de révision de ces plans qui prendrait en compte l’ensemble des critiques que nous avons formulées, ou en poursuivant un processus d’amélioration continue du texte.

Aussi, pour ces raisons, mais presque à contrecœur, les écologistes s’abstiendront.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le groupe CRC a déposé cette proposition de résolution afin de demander un moratoire et une refonte de la réglementation encadrant les plans de prévention des risques technologiques.

Plus de dix ans après l’adoption de la loi dite « loi Bachelot » sur la réduction des risques, son bilan d’application n’est pas à la hauteur des enjeux de sûreté sur les sites industriels à hauts risques, pour les riverains comme pour les salariés.

À ce titre, une circulaire de la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, publiée le 30 avril 2013, constatait que seulement « un peu plus de la moitié » des PPRT avaient été approuvés. La ministre avait alors décidé, à juste titre, de lancer un plan de mobilisation nationale avec un objectif chiffré : 75 % des PPRT devraient être approuvés d’ici à la fin de 2013 et 95 % à la fin de 2014. Au 1er août 2014, 76 % des plans ont été approuvés. C’est mieux mais il y a encore beaucoup à faire.

Selon le rapport pour avis sur le programme 181 de la mission « Écologie » dans le projet de loi de finances pour 2015, d’une part, les crédits ouverts à l’action « Prévention des risques technologiques et des pollutions » sont en baisse de plus de 30 % pour les autorisations d’engagement, d’autre part, l’objectif du Gouvernement est désormais d’atteindre les 95 % de plans approuvés à la fin de l’année 2015. On perd un an, mais ce n’est pas encore dramatique.

Au-delà de la mauvaise application de la loi et des blocages souvent dus, il faut bien le dire, aux manœuvres dilatoires de certains industriels, de nombreuses voix se sont élevées, du côté tant des riverains que des élus locaux ou des associations de défense de l’environnement, pour alerter les autorités et dénoncer les conditions d’élaboration des PPRT et leurs conséquences pour la vie de nos concitoyens.

C’est ce débat de fond que nous souhaitions porter devant notre assemblée. Ma collègue et amie la sénatrice Marie-France Beaufils a détaillé plusieurs défaillances de la réglementation qui nous conduisent à demander ce moratoire.

Pour ma part, je centrerai mon intervention sur la question des mesures de sûreté des installations. Comme vous le savez, la réalisation par l’exploitant d’une étude de dangers constitue un élément essentiel de la réglementation de la prévention du risque industriel.

Exigée par l’article L. 512 du code de l’environnement, elle doit justifier, selon les modalités prévues à l’article R. 512-9, que le site doit atteindre, « dans des conditions économiquement acceptables, un niveau de risque aussi bas que possible, compte tenu de l’état des connaissances et des pratiques et de la vulnérabilité de l’environnement de l’installation. »

La notion d’« économiquement acceptable » nous semble restreindre la réduction des dangers à la source puisque les industriels peuvent l’invoquer pour refuser les modifications lourdes nécessaires parfois pour réduire effectivement les dommages potentiels encourus.

Pourtant, au-delà de la mise en danger des personnes, si l’accident survient, les coûts sont souvent bien plus importants. L’argument économique ne devrait donc pas entrer en ligne de compte.

C’est dans la même logique, dans la loi relative au renforcement de la protection de l’environnement de 1995, que contrairement à la définition du principe de précaution retenue dans la déclaration de Rio de 1992, le législateur français avait utilisé cette mention.

Ainsi, il précisait que « l’absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l’adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l’environnement à un coût économiquement acceptable ; le principe d’action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable. » La formulation « économiquement acceptable » est employée à deux reprises.

La France a ainsi ajouté à la définition de Rio les notions de réaction proportionnée et de coût économiquement acceptable.

Ensuite, la notion d’« économiquement acceptable » semble incompatible avec les lois constitutionnelles et européennes. Ainsi, lorsque le Parlement réuni en Congrès a inscrit dans la Constitution la charte de l’environnement, installant par là même le principe de précaution au niveau le plus élevé de la hiérarchie des normes juridiques, il n’était alors pas question de limites économiques.

L’article 5 énonce très précisément que « lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »

Ces réserves de compatibilité que nous formulons à l’égard de la législation nationale relative aux PPRT valent également pour le droit européen. Nous avons ajouté dans le droit français la notion « économiquement acceptable », qui n’était pas dans la définition de Rio et qui ne sera pas dans le droit européen.

En effet, à compter du 1er juin 2015, de nouvelles exigences seront applicables à certaines activités industrielles, de stockage, d’exploitation de transport, détaillées à l’article 2 de la directive, afin de prévenir et de mieux gérer les accidents majeurs impliquant des produits chimiques dangereux.

Or, au titre des « obligations générales de l’exploitant » mentionnées à l’article 5 de la directive, il est précisé que « les États membres veillent à ce que l’exploitant soit tenu de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour prévenir les accidents majeurs et pour en limiter les conséquences pour la santé humaine et l’environnement. »

Quant à la définition de la « politique de prévention des accidents majeurs », on peut lire à l’article 8 : « La politique de prévention des accidents majeurs est conçue pour assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement. Elle est proportionnée aux dangers liés aux accidents majeurs. Elle inclut les objectifs globaux et les principes d’action de l’exploitant, le rôle et la responsabilité de la direction, ainsi que l’engagement d’améliorer en permanence la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs et d’assurer un niveau de protection élevé. » C’est vraiment le seul objectif. Il n’est jamais fait mention de la limite exprimée dans la loi française par le recours au principe d’« économiquement acceptable ».

Dans le cadre d’échanges mondialisés où la concurrence libre et non faussée est la règle économique, la question se pose légitimement de savoir si le législateur n’a pas été tenté d’introduire cette notion d’« économiquement acceptable » pour protéger les industriels au détriment des particuliers et des salariés.

Il serait donc souhaitable de revoir notre législation. Les acteurs industriels ne doivent plus être juge et partie si nous voulons renforcer encore le niveau de protection, en particulier la prévention des accidents majeurs sur les sites industriels à hauts risques.

Venant d’un département dans lequel les conséquences sociales et environnementales de dizaines d’années d’exploitation minière se font encore sentir – en tant que maire de Trieux, vous êtes également bien placé pour en avoir conscience, monsieur le secrétaire d’État –, je sais combien les populations sont souvent délaissées alors même qu’elles sont lourdement impactées par les activités industrielles passées ou présentes.

C’est dans ce sens que nous vous demandons d’adopter cette proposition de résolution afin de revoir la réglementation relative aux plans de prévention des risques technologiques en tenant compte de l’expérience dans chaque territoire. §

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Yves Collombat

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il semble plutôt contradictoire de militer pour la protection des populations contre les dangers induits par l’activité industrielle et, en même temps, de proposer un moratoire de la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques censés précisément apporter ladite protection.

Cependant, à y regarder de plus près, la contradiction est moins évidente. La question est en effet de savoir si les PPRT, tels qu’ils sont théoriquement conçus et réellement mis en œuvre, atteignent leurs objectifs. Pour m’être intéressé de plus près aux PPRN, les plans de prévention des risques naturels, aux PPRI, les plans de prévention des risques d’inondation, et aux PPRIF, les plans de prévention des risques d’incendies de forêt, je constate que leur conception et leur mise en œuvre posent le même type de problèmes que ceux qui sont soulevés en matière de risques dits « technologiques » – en réalité, ce sont plutôt des risques industriels.

Dans tous les cas, on fait deux constats.

Premièrement, la mise en œuvre d’une procédure laborieuse et conflictuelle à l’origine de retards importants dans l’application des plans de prévention. Ainsi, nous dit-on, seuls 225 PPRT prescrits ont-ils été approuvés, ce qui d’ailleurs ne signifie pas acceptés et encore moins mis en œuvre.

Deuxièmement, des plans de financement complexes, pour ne pas dire hasardeux.

Dans tous les cas, les principaux intéressés, les collectivités et la population, ne sont associés ni à la définition des risques et des méthodes permettant de les mesurer, ni à l’élaboration de la carte des aléas.

Dans le cas des PPRN, cela relève uniquement de l’administration ou plutôt de ses cabinets sous-traitants. Aucune information n’est fournie sur les principes de fabrication des modèles qui serviront aux simulations.

S’agissant des PPRT, c’est l’exploitant lui-même, sous la surveillance de l’administration – on respire ! –, qui est chargé de l’étude de dangers. Avouez que l’on doit pouvoir trouver mieux en matière de garantie d’objectivité. Mais cela pose aussi la question de l’obsolescence de la capacité de l’État dans ses missions d’expertise.

C’est une fois que la carte des risques, dans un cas, l’étude de dangers, dans l’autre, est achevée, une fois donc que la messe est dite, que débute la concertation puis l’approbation. Je dis bien : une fois que la messe est dite car il est clair que les mesures de protection à prendre découlent directement de l’évaluation des risques et de leur localisation.

Ce qui, d’ailleurs, – et ce n’est pas le moindre des paradoxes – conduit à cet étrange échange de risques contre des droits à construire ou des réductions de niveau de protection à quoi se réduit en général la concertation. Il y a de quoi en être quelque peu surpris.

Pas étonnant que cette concertation prenne l’apparence d’un dialogue de sourds sur fond de conflit. Pas étonnant que la procédure patine et s’éternise.

La seule manière d’en sortir, à mon avis, c’est que collectivités locales et représentants des personnes directement intéressées soient associés, avec leurs experts, à la définition et la mesure des risques ainsi qu’à l’élaboration de leur traduction cartographique. C’est d’ailleurs, si j’ai bien compris, ce que proposent les auteurs de la proposition de résolution.

L’accord peut plus facilement se faire sur des éléments objectifs et cet accord réalisé, l’approbation du plan sera plus facile à obtenir.

Je constate cependant que l’administration n’est absolument pas disposée à accepter cette démarche. Seuls les savants, même d’une science incertaine, et la bureaucratie céleste sont habilités à dire ce qu’il convient de voir et de penser. J’en ai fait l’expérience en déposant une proposition de loi sur la prévention des inondations qui n’a pu être votée en première lecture au Sénat qu’une fois expurgée des dispositions que je viens d’évoquer. Proposition de loi qui, je viens de le rappeler à M. le secrétaire d’État tout à l’heure, attend depuis un an d’être inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Mais l’actualité montre qu’il n’y a pas le feu au lac.

J’en viens à la question du financement, qui, dans les deux cas, pose problème.

Sur ce point, une amélioration essentielle a été apportée par la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, dite « loi MAPTAM », avec l’institution possible d’une taxe pour financer les politiques de prévention de l’inondation.

S’agissant de la prévention des risques technologiques, la complexité des montages financiers et le fait qu’une part de la charge revient aux riverains – comme dans l’ancien système pour le risque inondation – impose à l’évidence des mesures nouvelles. Ce serait la garantie d’une exécution effective dans des délais raisonnables des mesures de protection légitimement imposées par le PPRT.

En tout cas, mon intime conviction est qu’il faut changer la façon de poser la question du risque si l’on veut avoir une chance de lui apporter une réponse pérenne partout où le problème se pose. Il faut élargir la question de la protection à celle de l’aménagement d’un territoire pour permettre à celui-ci de continuer à vivre et se développer en maîtrisant les effets du risque.

Toutes les questions soulevées par les auteurs de la proposition de résolution sont pertinentes. Qu’un moratoire soit la réponse, même provisoire, je suis loin d’en être convaincu. Je crois nécessaire et urgent de faire évoluer la législation dans le sens indiqué quel que soit le type de risque concerné. Plus on sera à pousser dans cette direction, plus on aura de chance d’aboutir.

Tel est le sens de mon abstention et de celle de mon groupe sur cette proposition.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre des finances et des comptes publics, chargé du budget

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs, je vous prie d’excuser l’absence Mme Ségolène Royal qui est à Lima pour une conférence dont vous avez certainement toutes et tous entendu parler.

Je m’efforcerai de répondre en son nom à vos interrogations qui peuvent, comme beaucoup l’ont dit, apparaître légitimes. Légitimes, parce que la sécurité des sites industriels français est un impératif, comme nous le rappellent l’accident de Toulouse le 21 septembre 2001 ou, plus récemment, l’incendie dramatique de la raffinerie d’Amuay au Venezuela ou l’explosion meurtrière d’une usine de fabrication d’engrais à West au Texas.

La bonne maîtrise des risques inhérents à l’activité industrielle est également un facteur de compétitivité pour les entreprises, étroitement associé au maintien sur notre territoire d’activités à forte valeur ajoutée.

Le Gouvernement est bien entendu mobilisé sur ce sujet, afin d’assurer aux populations le meilleur niveau de sécurité et d’accompagner les industriels dans la mise en place des investissements, avec des modalités d’organisation adaptées.

Les plans de prévention des risques technologiques, les PPRT, sont des outils efficaces pour intégrer les sites industriels dans leur environnement. Comme cela a été rappelé, la loi du 30 juillet 2003 est née, après la catastrophe d’AZF, du constat de l’existence de situations héritées du passé : l’urbanisation s’était dangereusement rapprochée des sites industriels à risques. Au vu de la diversité des cas rencontrés, la responsabilité de cette proximité ne pouvait être imputée à un seul acteur, qu’il s’agisse de l’industriel, de la collectivité, des riverains ou de l’État. C’était un héritage partagé.

C’est pourquoi la loi de 2003 a entendu faire porter la charge des actions à mener de la manière la plus équilibrée possible, afin que chacun contribue à un objectif commun : améliorer la sécurité, en sachant bien entendu – plusieurs d’entre vous l’ont souligné – que l’on ne peut pas atteindre le risque zéro, car seul l’arrêt de toute activité industrielle permettrait – et encore… – de garantir l’absence totale de danger.

Les PPRT, élaborés pour les sites à plus hauts risques – les sites dits « SEVESO seuil haut » –, prévoient une palette de mesures. Certaines d’entre elles visent à protéger les riverains exposés aux risques : il s’agit, d'une part, de mesures foncières touchant à l’urbanisation existante, qui se composent d’expropriations, dans les zones à plus forts risques, et de droits à délaissement volontaire des biens, et, d'autre part, de travaux à mener sur les constructions existantes dans le voisinage des sites industriels pour en réduire la vulnérabilité. D’autres mesures visent à garantir un maintien du niveau de risque dans la durée : il s’agit de restrictions ou de règles relatives à l’urbanisation future autour des sites.

Aujourd'hui, – vous êtes nombreux à l’avoir relevé – sur les 407 PPRT à réaliser, plus des trois quarts – 313 –, dont de nombreux plans jugés très complexes, sont approuvés. Les PPRT restants sont maintenant en bonne voie, de sorte que la très grande majorité d’entre eux devraient être approuvés d’ici à la fin de l’année 2015. Cette progression démontre que, grâce aux améliorations législatives successives et à l’engagement des acteurs, le dispositif est maintenant largement applicable.

Pour autant, votre résolution pose des questions légitimes, qui concernent les obligations fixées aux industriels, les modalités de financement des mesures ou encore leur mise en œuvre opérationnelle. Je répondrai à ces questions de manière détaillée.

Je commencerai par l’obligation faite aux industriels de réduire les risques à la source. La réglementation relative aux installations classées repose sur le fait que les industriels, via la réalisation d’études de dangers, sont tenus de réduire autant que possible les risques à la source, par le recours aux meilleures techniques disponibles à un coût « économiquement acceptable ».

Madame Didier, je ne partage pas complètement votre analyse s'agissant du droit constitutionnel ou de l’adaptation au droit européen. Le principe de la réduction des risques à la source, qui repose sur la notion de comportement économiquement responsable, découle directement de principes constitutionnels, au même titre que le principe de précaution, qui est cité dans votre proposition de résolution. Il est notamment inscrit dans la définition du principe de prévention qui figure au tout premier article – l’article L. 110-1 – du code de l’environnement.

J’ajoute que l’évaluation du caractère « économiquement acceptable » des mesures de réduction du risque n’est nullement laissée à la seule appréciation de l’industriel : elle est soumise à l’expertise des services de l’État, qui en sont garants. Les obligations sont in fine prescrites par le préfet à l’industriel, et elles s’imposent à lui.

Contrairement à ce que j’ai entendu, cette phase est bien un prérequis à l’adoption d’un PPRT. Il n’est fait appel à des mesures foncières qu’en l’absence de solutions relevant de la responsabilité de l’industriel. Ce sont ainsi près de 2 000 études de dangers qui ont été instruites. Les investissements réalisés par les industriels pour la réduction du risque à la source ont été compris entre 200 millions et 300 millions d'euros par an – à leur seule charge – durant les premières années ayant suivi la promulgation de la loi.

En complément, les PPRT peuvent prévoir d’autres mesures de réduction du risque, allant au-delà des exigences réglementaires – un déplacement d’installation, par exemple –, lorsque leur mise en œuvre est moins coûteuse que les mesures foncières qu’elles permettent d’éviter. Le processus d’élaboration des PPRT ne fait donc pas obstacle à la responsabilité première de l’industriel de maîtriser ses risques.

J’entends également vos interrogations, légitimes, là aussi, concernant les modalités de financement des PPRT. Ces modalités, inscrites dans la loi de 2003, reflètent la responsabilité partagée des acteurs, que j’ai évoquée au début de mon propos.

Pour les mesures foncières ou les mesures supplémentaires de réduction du risque à la source – ce sont les mesures les plus lourdes, puisque leur montant total est estimé à un peu plus de 1 milliard d'euros –, la loi prévoit un financement tripartite entre les exploitants à l’origine du risque, les collectivités locales percevant la contribution économique territoriale des sites industriels et l’État.

Pour les travaux sur les constructions existantes dans le voisinage, les particuliers peuvent – vous l’avez souligné – bénéficier d’un crédit d’impôt représentant 40 % du montant des travaux, ainsi que de contributions des industriels et des collectivités représentant chacune 25 % de ce montant. Cela porte l’aide à 90 % du montant des travaux, dans une limite de 20 000 euros, qui est suffisante dans la très grande majorité des cas pour mettre en sécurité un logement non couvert par une mesure foncière.

Ces modalités de financement, ajustées plusieurs fois depuis 2003 – vous vous en souvenez certainement, et le secrétaire d’État au budget que je suis s’en souvient également –, sont équilibrées. C’est l’accompagnement des travaux qui doit nous mobiliser.

J’entends aussi dire que le cas particulier des entreprises riveraines justifie des aménagements complémentaires. Les premiers cas de mise en œuvre des PPRT ont effectivement révélé – cela a été rappelé à juste titre – des difficultés d’application pour les entreprises riveraines des sites à risques. Les mesures foncières d’expropriation et de délaissement et les prescriptions de travaux peuvent mettre les entreprises en difficulté, et ne constituent pas toujours la meilleure façon de mettre les salariés en sécurité ; ce point a été évoqué à raison par certains d’entre vous.

Une disposition habilitant le Gouvernement à légiférer par ordonnance en ce sens est incluse dans le projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises, en cours d’examen par le Parlement. Il s’agit, d'une part, de permettre, pour les entreprises riveraines, la mise en œuvre de mesures alternatives aux mesures d’expropriation et de délaissement. Le mode de financement jusqu’à présent réservé aux mesures foncières serait maintenu dans la limite du montant des mesures foncières évitées ; c’est un dispositif classique. Cette souplesse permettra de trouver des solutions moins chères que les mesures foncières, ce qui profitera aux collectivités, à l’État et à l’industriel à l’origine du risque. Il s’agit, d'autre part, d’assouplir les obligations de travaux de renforcement des locaux des entreprises riveraines, afin de permettre le recours à d’autres méthodes de protection des salariés, par exemple via des mesures organisationnelles.

Vous avez également émis des interrogations légitimes concernant l’accompagnement de la mise en œuvre des PPRT. Le projet de résolution souligne à juste titre que l’accompagnement des acteurs dans la mise en œuvre des PPRT est un enjeu fondamental. Le Gouvernement partage ce point de vue, même s’il ne lui semble pas pour autant nécessaire de prendre des dispositions législatives ou réglementaires additionnelles, et il s’emploie à organiser une mise en œuvre structurée des PPRT, en particulier pour la réalisation des travaux de renforcement chez les particuliers ; 30 000 logements sont potentiellement concernés.

Un programme de formation des artisans amenés à conduire les diagnostics préalables et un référentiel pour la réalisation des travaux sont opérationnels depuis l’été 2013. En outre, le Gouvernement expérimente actuellement, sur sept plateformes industrielles, un dispositif d’accompagnement collectif des riverains par des opérateurs du logement dans chacune des étapes nécessaires à la réalisation des travaux. Ce dispositif sera généralisé en lien avec l’Agence nationale de l’habitat.

Enfin, le ministère de l’écologie organisera dès 2015 un accompagnement des collectivités chargées de la mise en œuvre des mesures foncières.

En conclusion, mesdames, messieurs les sénatrices et sénateurs, le Gouvernement n’est pas favorable à cette proposition de résolution. Le dispositif issu d’améliorations législatives successives apparaît désormais équilibré et applicable, même s’il a rencontré – c’est bien compréhensible – des difficultés de mise en œuvre les premières années. Le remettre en cause aboutirait à retarder la mise en sécurité des riverains et pourrait fragiliser l’activité économique du pays.

En conséquence, le Gouvernement estime que les forces de l’ensemble des acteurs doivent désormais être employées à la mise en œuvre effective des plans, dans une démarche d’accompagnement des riverains et des collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Nous allons procéder au vote sur la proposition de résolution.

Le Sénat,

Vu l’article 34-1 de la Constitution,

Vu les articles 1er à 6 de la loi organique n° 2009–403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34–1, 39 et 44 de la Constitution,

Vu le chapitre VIII bis du Règlement du Sénat,

Vu les difficultés de mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques dont un nombre important ne sont pas approuvés ou font l’objet de recours contentieux,

Souhaite instamment un moratoire de la mise en œuvre des plans de prévention des risques technologiques issus de la loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages et des lois subséquentes jusqu’au 1er septembre 2015 afin de procéder à une nouvelle concertation avec les acteurs concernés.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Mes chers collègues, la conférence des présidents a décidé que les interventions des orateurs valaient explication de vote.

Je mets aux voix la proposition de résolution.

J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.

Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.

Le scrutin est ouvert.

Le scrutin a lieu.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Personne ne demande plus à voter ?…

Le scrutin est clos.

J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.

Il est procédé au dépouillement du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Claude Bérit-Débat

Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 74 :

Le Sénat n'a pas adopté.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de cet après-midi étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à dix-sept heures quarante-cinq, est reprise à vingt-et-une heures trente.