La commission auditionne M. Jean-Baptiste Mattéi, directeur général de la Mondialisation, du développement et des partenariats (DGM) au ministère des affaires étrangères, sur le projet de loi de finances pour 2013 (programme 185 : Diplomatie culturelle et d'influence de la mission « Action extérieure de l'État » et programme 209 : Solidarité de la mission « Aide publique au développement »).
Monsieur le Directeur général, mes chers collègues, je suis heureux de vous accueillir devant notre commission pour cette audition consacrée au projet de loi de finances pour 2013.
Nous avons entendu le ministre des Affaires étrangères et européennes sur le cadre général du budget du ministère des affaires étrangères et européennes. Nous souhaiterions vous entendre plus particulièrement, Monsieur le Directeur général, sur les deux programmes dont vous avez la responsabilité :
- le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » de la mission « Action extérieure de l'Etat » ;
- le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » de la mission « Aide publique au développement » ;
Ces programmes sont l'occasion d'évoquer l'agenda international et la mondialisation.
Les crises qui se succèdent et les tensions qui se développent depuis 1990, financières et monétaires, alimentaires, énergétiques, déséquilibres mondiaux de toutes sortes, sans oublier le combat si difficile contre le changement climatique, conduisent à un même constat : la difficulté de traiter efficacement ces crises et ces tensions et d'y apporter des solutions aussi bien dans un cadre national que dans les cadres de l'ordre international existant. Nous sommes dans cet entre-deux. Votre mission est notamment d'imaginer les évolutions souhaitables pour une gouvernance plus efficace au niveau mondial, une adaptation des organisations existantes et une meilleure coordination entre elles.
De ce point de vue, au-delà des aspects budgétaires, pouvez-vous nous indiquer les progrès que vous avez constatés en matière de gouvernance mondiale dans l'année en cours et les perspectives offertes par l'agenda international de l'année 2013 ?
Votre mission est aussi de défendre l'influence de la France. Avec la mondialisation, tous les pays, quelle que soit leur latitude, sont aujourd'hui confrontés aux mêmes défis : notamment celui de la croissance, mais d'une croissance soutenable, compatible avec des ressources naturelles plus rares et la préservation de la planète. Celui de la lutte contre les épidémies qui ne connaissent pas les frontières et tuent aussi bien au Sud qu'au Nord, comme l'a tristement illustré la pandémie du sida. Celui de la lutte contre le terrorisme qui déstabilise les sociétés du Nord comme du Sud.
Pour autant, dire que nous partageons la même planète, que nous sommes confrontés aux mêmes défis, ne signifie pas que nous partageons nécessairement la même vision du monde, ni les mêmes intérêts. La mondialisation c'est aussi une confrontation, des rapports de force, une mise en concurrence de nos économies, de nos modèles de société. Il y a une compétition internationale, dans laquelle nous souhaitons maintenir haut la place de la France.
Nous avons ici la conviction que la puissance et le rayonnement d'une nation tiennent, au-delà de son poids propre, à la somme des liens qu'elle tisse, au fil de son histoire, avec le reste du monde : liens d'affaires, liens culturels, liens académiques, liens scientifiques et d'innovation, et évidemment liens humains, de partage et de métissage. La capacité de la France à être entendue tient aussi au respect qu'elle inspire, non seulement par sa capacité de mobiliser sa force lorsque c'est nécessaire, mais aussi par sa capacité à défendre son modèle de société, sa culture, mais aussi la solidarité et la justice. C'est tout le sens de l'action extérieure de l'Etat, de notre politique d'influence et de notre coopération au développement.
S'agissant du programme 209, la commission a organisé, il y a quelques semaines, une table ronde sur l'avenir de la coopération au développement française. Il s'agissait de dresser des perspectives sur la base des évaluations dont nous disposons, tant celle de la Cour des comptes, que celles du Cabinet Ernst and Young. Ces dernières dressent un tableau assez sévère de notre outil de coopération. Elles décrivent en creux une politique marquée par des effets d'annonce, un éclatement administratif qui semble nuire à son efficience, une évaluation de son impact assez incertaine. Cette situation aux dires des évaluateurs semble empêcher le déploiement d'une stratégie cohérente de long terme permettant la synergie des ambitions, des moyens et d'une structure de pilotage politique et administratif adaptée. Vous nous direz quelles sont les réponses susceptibles d'améliorer nos performances dans ce domaine.
S'agissant du programme 185, nos différents déplacements nous permettent d'apprécier la diversité des actions qui sont menées par notre réseau culturel et par les établissements d'enseignement français à l'étranger. Celles-ci contribuent incontestablement à établir des liens durables avec une partie influente de la population des pays concernés, au-delà des vicissitudes politiques. Il s'agit donc d'un investissement. Pour autant, cet investissement doit être conduit avec rigueur et avec efficacité. Votre intervention pourrait être l'occasion de nous dire où nous en sommes de la mise en oeuvre de la loi du 27 juillet 2010 qui confie à des opérateurs l'animation de cette politique et rationalise les réseaux et comment vous envisagez leurs activités dans un cadre budgétaire, mais aussi un cadre économique global, plus contraint. Pour ce qui concerne l'enseignement français à l'étranger, qui fait preuve d'un dynamisme certain, et qui est relativement préservé compte tenu de la priorité donné à l'éducation dans le budget 2013, vous nous direz comment vous voyez son développement. En bref, comment définir des priorités en matière de diplomatie culturelle et d'influence ?
A l'issue de votre intervention, je donnerai d'abord la parole aux rapporteurs budgétaires de notre commission, nos collègues Jean-Claude Peyronnet et Christian Cambon pour le programme 209, et pour le programme 185 Jean Besson et René Beaumont, avant de laisser s'exprimer ceux d'entre vous qui le souhaiteront.
Je vous remercie de me donner l'occasion de venir vous présenter les deux programmes 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » et 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement » dont je suis le responsable.
Je me propose de revenir sur les priorités de nos politiques publiques de diplomatie d'influence et d'aide publique au développement, les réformes qui sont menées et les résultats des discussions budgétaires sur le PLF 2013. Mais avant cela, je souhaiterais revenir sur certaines de vos remarques liminaires. Comme vous l'avez justement indiqué, le monde actuel est à la fois plus interdépendant et plus compétitif. Les pays émergents en particulier prennent une place de plus en plus importante non seulement dans les enceintes de discussions internationales comme en témoigne désormais leur poids au sein du G20, mais aussi dans les pays en développement, à la fois en tant que bailleurs de fonds et comme partenaires commerciaux. C'est pourquoi nous privilégions le dialogue avec eux en considérant qu'ils doivent prendre leur place dans les enceintes internationales mais aussi assumer les responsabilités qui vont de paire. Dans le cadre du Partenariat global pour l'efficacité de l'aide au développement de Busan par exemple, nous promouvons leur association étroite, en dépit de l'opposition de certains de nos partenaires du G8, afin de parvenir à des standards d'action proches. C'est d'ailleurs aussi dans cette optique que la France fait un investissement important dans les institutions multilatérales, qui constituent un forum de dialogue privilégié avec les pays émergents sur l'aide au développement mais aussi sur les grands enjeux économiques et sociétaux.
2012 a ainsi vu le centre de gravité de la gouvernance économique se déplacer un petit peu vers les pays émergents, ce qui correspond à ce que nous promouvons depuis plusieurs années : pour ne citer qu'un exemple, les pays du G20, réunis à Los Cabos en juin dernier, ont renforcé les capacités d'action du FMI en augmentant les ressources avec une contribution importante des pays émergents. Les pays émergents prendront d'ailleurs un poids plus important au Conseil d'administration du FMI après l'entrée en vigueur de la réforme des quotes-parts de 2010 et grâce aux pays européens qui leur ont cédé une partie des leurs.
Par ailleurs, comme vous le notiez, la puissance et le rayonnement d'une nation tiennent entre autres à sa capacité à mobiliser les forces. C'est ce qu'elle a fait pendant sa présidence du G20 sur des sujets d'importance pour tous, comme la sécurité alimentaire, ou la recherche de nouveaux modes de financement de la lutte contre le changement climatique. C'est ce qu'elle fait au quotidien à l'ONU, à la Banque mondiale ou au FMI, lorsqu'elle défend les valeurs propres à son modèle et à sa vision du monde, notamment la défense des plus vulnérables.
C'est tout l'objectif du programme 209 dont j'ai la charge. Vous mentionniez les critiques adressées à notre dispositif d'aide. Elles ne sont pas toutes infondées, mais ne prennent pas non plus la pleine mesure des progrès accomplis en termes de pilotage de l'aide depuis la création de la DGM qui a notamment permis de renforcer la cohérence de l'action de la France en articulant régulation économique internationale et développement.
Permettez-moi de m'attarder un instant sur deux thèmes transversaux prioritaires pour la France dans les années à venir : les OMD et l'efficacité de l'aide.
Nous arrivons à un moment clef pour le bilan des OMD qui arrivent à leur échéance en 2015. La réflexion sur leur bilan est déjà très avancée. La dynamique associée aux OMD est jugée positive. Le rapport des Nations unies sur la réalisation des OMD de 2011 fait état de « progrès substantiels » depuis 2000. Les progrès diffèrent néanmoins en fonction des pays et des thématiques. Plusieurs objectifs, relatifs à la lutte contre la faim, à la réduction de la mortalité infantile et maternelle, à l'assainissement, ne seront pas atteints. Des disparités croissantes entre les pays et au sein des pays sont observées, l'Afrique subsaharienne restant très éloignée de certains objectifs. La France et l'Union européenne ont en conséquence renforcé leur action en faveur des pays les plus en retard depuis 2010.
La réflexion sur l'agenda post-2015 progresse. Le Secrétaire général des Nations unies a mis en place un dispositif structuré autour d'une équipe spéciale et d'un Panel de Haut niveau. La conférence des Nations unies sur le développement durable ou Rio+20 a lancé un processus de définition d'Objectifs du Développement Durable, destinés à faire partie intégrante de l'agenda post-2015. La France dispose d'un membre qui siège à titre personnel au Panel de Haut niveau, en la personne de Jean-Michel Severino, ancien directeur de l'AFD, et a présenté la candidature de M. Canfin pour le groupe de travail sur les ODD. Elle souhaite que les différents processus aboutissent à un agenda unique intégrant les piliers économique, environnemental et social du développement durable.
En parallèle, l'attention doit porter également sur l'efficacité de l'aide qui sera un thème à part entière des Assises du développement. La France a joué un rôle important dans le processus qui a conduit à la déclaration de Paris sur l'efficacité de l'aide puis au 4ème forum sur l'efficacité de l'aide de Busan qui a consacré un changement majeur dans la manière d'aborder la question de l'efficacité non plus centrée sur les modalités de gestion de l'aide, mais sur une conception plus large de l'efficacité du développement, axée sur l'impact pour les pays partenaires et intégrant l'ensemble des politiques de développement. Cette vision du développement est tout à fait en ligne avec la vision française. Ce thème est par ailleurs l'une des priorités du nouveau Ministre délégué chargé du développement.
Les trois années qui viennent sont fondamentales pour l'aide au développement. 2015 marquera en effet à la fois le rendez-vous fixé en 2000 pour le bilan des OMD, et la date butoir pour l'atteinte des 0,7 %. Lors de la conférence Rio+20, le Président de la République a d'ailleurs tenu à ne pas éluder la question en rappelant l'importance des financements innovants pour le développement.
Lors des négociations internationales à venir, la question financière sera donc centrale.
La France est le quatrième contributeur mondial d'APD en 2011, derrière les Etats-Unis, l'Allemagne et le Royaume-Uni et devant le Japon.
L'APD française a connu une forte augmentation depuis 2007 pour atteindre en 2011, plus de 9 Mds€.
En 2011, l'effort français d'APD rapporté au RNB (0,46 %) se situe dans la moyenne des pays européens. L'objectif international de porter l'APD à 0,7 % du RNB d'ici 2015 semble difficilement atteignable dans le contexte budgétaire actuel, compte tenu de la diminution prévisible des annulations de dettes à compter de 2015 et des flux de remboursement d'emprunt de l'AFD notamment. La trajectoire du ratio d'APD / RNB devrait se stabiliser autour de 0,47 % en 2015. Tout en restant déterminée à tracer un cheminement crédible vers cet objectif quantitatif, la France souhaite que ses engagements d'APD soient aussi jugés en fonction d'objectifs qualitatifs, notamment d'efficacité, conjointement déterminés avec les partenaires publics et privés du monde du développement.
L'APD française devrait continuer à augmenter jusqu'en 2015, dépassant pour la première fois de son histoire les 10 Mds€ en 2014. Cela s'explique par la stabilisation des crédits budgétaires de la mission APD, qui sont maintenus en valeur sur la durée du triennum par rapport à leur niveau de 2012, par l'annulation de dette du Soudan et l'augmentation des prêts de l'AFD, et par la décision d'affectation de 10 % de la TTF au développement.
Comme vous le savez, le PLF 2013 prévoit en effet l'affectation d'une fraction de 10 % du produit de la taxe sur les transactions financières (TTF) au fonds de solidarité pour le développement (FSD), géré par l'Agence française de développement. Ce fonds accueille déjà le produit de la taxe sur les billets d'avion.
Conformément aux engagements du Président de la République qui a annoncé devant l'Assemblée générale des Nations unies que 10 % au moins des recettes de la taxe française sur les transactions financières seront consacrés au développement et à la lutte contre les fléaux sanitaires et les pandémies, le projet de loi de finances pour 2013 met en oeuvre cette affectation à hauteur de 10 %. Ainsi, en 2013, la France sera en mesure de prendre 160 M€ d'engagements en faveur de projets qui seront financés grâce à la TTF. En termes de décaissements, la montée en charge de la TTF sera progressive : 60 M€ en 2013, 100 M€ en 2014, 160 M€ en 2015, soit un total de 320 M€ de ressources sur la période 2013-2015.
Cette taxe viendra également compléter la taxe sur les transactions financières au niveau européen. Onze pays sont prêts à participer à une coopération renforcée pour instaurer cette taxe. Il faudra discuter avec nos partenaires sur l'affectation du produit de cette taxe dont une partie pourrait contribuer à l'aide au développement.
J'en viens au cadrage budgétaire du programme 209 en PLF 2013. La dotation du programme 209 connait une baisse limitée par rapport à la norme gouvernementale.
Les actions du programme 209 suivent les priorités définies par le document cadre :
- la lutte contre la pauvreté et l'atteinte des OMD ;
- l'appui à une croissance économique équitable, durable et créatrice d'emplois, facteur essentiel de progrès social ;
- la bonne gestion des biens publics mondiaux, en particulier la maîtrise du changement climatique et de ses conséquences, de l'érosion de la biodiversité et de la propagation des maladies contagieuses, enjeux collectifs d'importance croissante ;
- la promotion de la stabilité et de l'État de droit comme facteurs de développement.
Le programme 209 met en oeuvre l'aide bilatérale française selon quatre partenariats différenciés :
- l'Afrique subsaharienne (au moins 60 % de l'effort financier de l'État), avec une attention particulière aux 17 pays pauvres prioritaires que la France soutient dans l'atteinte des OMD et l'amélioration de la gouvernance démocratique ;
- les pays de la Méditerranée (20 % de l'effort financier de l'État) ;
- les pays émergents : les instruments du programme 209 visent à accompagner les progrès des systèmes économiques et sociaux locaux, notamment dans une perspective de préservation des biens publics mondiaux ;
- les pays touchés par les crises, soit catastrophes naturelles, soit conflits politico-militaires.
Les effectifs de 2 380 ETP du programme 209 sont diminués de 90 ETP en 2013, soit -3,7 %. Les suppressions sur le triennum sont de -180 ETP, soit -7,7 %, ce qui est conforme à la norme gouvernementale de -2,5 % par an sur trois ans.
Les crédits du programme 209 sont arrêtés à 1 938 M€ en AE et à 1 963 M€ en CP en PLF 2013, soit -7 % en AE et CP par rapport à la LFI 2012. Mais Hors FED et C2D qui s'analysent comme des dépenses non pilotables, le programme 209 diminue de seulement -2 % en AE et CP en PLF 2013.
Sur la période 2013-2015, la dotation du programme 209 connaît une diminution limitée, soit -4 % en AE et -6 % en CP (y compris masse salariale), contre une norme d'évolution gouvernementale de près de -15 %.
L'engagement du Président de la République de doubler l'aide transitant par les ONG françaises sur cinq ans se traduit par une hausse nette de 9 M€ par an des autorisations d'engagement allouées aux ONG. La dotation en LFI 2012 est de 45 M€ en AE et de 40 M€ en CP.
Après des années d'augmentation continue de l'aide multilatérale, le redressement de l'aide bilatérale a permis d'arriver à un point d'équilibre satisfaisant qui est aujourd'hui confirmé par stabilisation des crédits.
Les moyens sont, en effet, stabilisés sur trois postes majeurs de l'aide française :
- le don-projet dans toutes ses composantes : subventions de l'AFD, assistance technique et FSP. Cela participe à la stabilisation en 2013 de la part consacrée aux moyens bilatéraux par rapport à 2012 et à une diminution faible du ratio en 2014 et 2015. Cette mesure répond à la priorité de conserver une part significative de dons en parallèle aux prêts et d'une aide pilotable selon la préconisation de la Cour des comptes ;
- l'aide directe aux populations les plus fragiles, prioritaires dans l'allocation de nos moyens les plus concessionnels, notamment l'aide alimentaire, 37 M€ en AE et CP, le fonds d'urgence humanitaire, 8,9 M€ en AE et CP, la ligne Haïti 10 M€ en CP, les contributions volontaires aux Nations unies, 51 M€ en AE et CP ;
- la Francophonie 56 M€ en AE et CP.
De fortes évolutions sont constatées sur les enveloppes dites non pilotables qui échappent à la logique de la norme gouvernementale d'évolution des crédits :
- la contribution française au FED qui est calée sur les appels à contributions de la Commission européenne.
Il faut noter un ralentissement préoccupant des décaissements ces deux dernières années qui résulte de plusieurs facteurs devenus structurels. La mise en oeuvre des nouvelles lignes directrices dans le domaine de l'aide budgétaire européenne se traduit par une baisse des décaissements par ce canal. Les nouvelles orientations et les secteurs de concentration de l'Agenda pour le changement ne sont pas favorables à l'accélération des décaissements. La seconde orientation activement promue par le Commissaire Piebalgs est la recherche d'effets de levier, compte tenu de l'ampleur des besoins au regard des volumes d'APD, et les mécanismes de mixage prêts-dons qui devraient prendre de plus en plus d'importance dans des domaines comme les énergies renouvelables ou les infrastructures.
La négociation du 11ème FED s'engagera dans les semaines qui viennent sur la base de la proposition de la Commission européenne d'un montant de 34 Mds€ pour sept ans (2014-2020). Cette proposition représenterait un fort ressaut par rapport au 10ème FED qui représentait 22,6 Mds€ sur 6 ans. Les discussions sur le volume devront prendre en compte la contrainte budgétaire des Etats membres.
Sur les priorités du 11ème FED, la France soutient une approche équilibrée dans la définition des enveloppes nationales et régionales. Prendre en compte les critères économiques mais aussi de développement humain, de fragilité et de vulnérabilité sera nécessaire pour s'assurer que l'aide au développement soit dirigée vers ceux qui en ont le plus besoin.
- les contrats de désendettement et de développement (C2D) qui diminuent progressivement à hauteur de 102 M€ en 2013, notamment pour les C2D du Cameroun et de Côte d'Ivoire.
D'une ampleur sans précédent, soit un peu moins de 3 Mds€, le C2D Côte d'Ivoire constitue une occasion historique de refonder notre coopération dans ce pays. Un premier C2D « sortie de crise » de 630 M€ sur trois ans et demi visera en priorité le retour de l'Etat de droit et des services de base sur l'ensemble du territoire. Les secteurs déterminés d'un commun accord en seront la justice, l'éducation, la formation, l'emploi, la santé, l'agriculture, le développement rural et la biodiversité, le développement urbain et l'eau, et les infrastructures de transport. La signature du C2D devrait intervenir d'ici fin 2012.
Enfin, les actions de co-développement jusque là rattachées au ministère de l'intérieur sont transférées au programme 209 pour des activités sans lien avec les accords migratoires.
En quelques mots, le programme 185 comporte l'ensemble des moyens à diplomatie culturelle et d'influence. Il se caractérise ces dernières années par une rationalisation en profondeur de ses modalités d'intervention avec :
- un champ d'intervention qui couvre désormais depuis 2012 l'ensemble du monde alors qu'auparavant prévalait une réparation géographique avec le programme 209 dédiée désormais exclusivement à l'aide au développement ;
- un dispositif qui repose sur des opérateurs : l'AEFE pour l'enseignement français à l'étranger, l'Institut français pour la coopération culturelle et linguistique et France Expertise Internationale pour l'expertise.
- des sources de financements complémentaires aux crédits budgétaires qui sont issues des ressources propres des établissements (cours de langue, par exemple) et de la mobilisation de cofinancements de partenaires tiers qui représentent un montant important, plus de 170 M € en 2011.
Comme vous le savez, le ministre a décidé de mettre l'accent sur le renforcement de la diplomatie économique. Il est prévu de créer une nouvelle direction des entreprises au sein de la DGM qui n'a pas pour but de faire de l'ombre à Bercy mais qui sera le point de convergence entre les entreprises et notre réseau à l'étranger, compte tenu du niveau de notre déficit commercial. Les Ambassadeurs seront particulièrement mobilisés, en tant que responsable de l'ensemble des services de l'État à l'étranger, y compris UbiFrance. Des objectifs leurs seront fixés, ils seront vérifiés tous les six mois, et ils seront évalués sur leurs résultats.
Le programme 185 s'articule autour de trois priorités principales :
Tout d'abord le service public d'enseignement français à l'étranger, qui est important pour notre communauté résidant à l'étranger, mais aussi pour notre diplomatie d'influence puisque nous accueillons dans ces établissements une large proportion d'élèves étrangers.
L'AEFE entre pleinement dans le cadre de la priorité du gouvernement donnée à l'éducation, ce qui a facilité la sanctuarisation de ces crédits. Sa subvention est augmenté de 5,5 M€ pour couvrir les cotisations pour les pensions du personnel. De même, la création d'une centaine d'emplois hors plafond a été autorisée. Elle devrait enfin bénéficier d'avances de l'agence France-Trésor à hauteur de 12,5 M€ à des taux compétitifs et sur des durées intéressantes pour financer l'immobilier.
Deuxième priorité, notre politique d'attractivité. La situation est de plus en plus concurrentielle. La France a accueilli prés de 300 000 étudiants étrangers en 2010-2011 et est le quatrième pays d'accueil des étudiants internationaux. Il importe d'être compétitif sur ce marché, ce qui suppose d'avoir un cadre ouvert, ce qui explique l'abrogation de la circulaire Guéant.
Cela suppose aussi de maintenir nos moyens financiers. Le niveau des bourses sera maintenu en 2013 (71 M€), ce qui permet de servir environ 16 000 bourses à des étudiants étrangers. Ces bourses doivent être mieux encadrées, orientées vers des disciplines qui nous intéressent comme les sciences, le droit et sciences politiques, l'économie et la gestion, en privilégiant les niveaux master et doctorat.
Campus France a été mis en place à la fin de l'année dernière. Campus France qui offre aux étudiants et aux chercheurs étrangers, une gamme complète de services, depuis l'orientation à l'étranger jusqu'à l'accueil en France et à l'hébergement. Campus France gère à la fois des bourses du gouvernement français, mais également des bourses de gouvernements étrangers dans le cadre de conventions. La rentrée s'est semble-t-il bien passée, l'ensemble des conventions ont pu être reprises, à quelques exceptions prés.
J'en termine par notre coopération culturelle à l'étranger et la promotion du français. Il s'agit de promouvoir un continuum entre enseignement du français dans nos Instituts et Alliances françaises. 900 000 élèves sont inscrits en cours de français dans notre réseau culturel, enseignement en français dans nos lycées à l'étranger, cursus francophones dans les systèmes éducatifs locaux. 1,7 million d'élèves sont scolarisés dans ces cursus bilingues. Ainsi depuis dix ans, on a formé 60 000 fonctionnaires de l'UE au français en liaison avec l'OIF, ce qui est important pour maintenir la place du Français dans les instances communautaires.
Notre coopération culturelle repose sur notre réseau à l'étranger formé de 161 SCAC, 98 Instituts français, 445 Alliances françaises conventionnées, et un certain nombre d'instituts de recherche. Notre but est de développer une complémentarité entre le réseau public, les instituts français et le réseau associatif des alliances françaises.
Pour sa part, l'Institut français que préside M. Xavier Darcos a pris un bon départ et il très actif en matière culturelle, de coopération linguistique et de débats d'idées. L'Institut a développé des plateformes numériques accessibles aux instituts et alliances françaises.
L'expérimentation du rattachement à l'agence parisienne de douze instituts français locaux a été mise en oeuvre. Un bilan doit en être tiré en 2013 et une décision définitive sera prise sur l'opportunité et les modalités d'un éventuel rattachement. Des rapports seront présentés au Parlement en mars et octobre 2013. Le secrétaire général du MAE a été chargé d'animer un groupe de travail et de faire des recommandations.
Je souhaiterais à présent détailler plus précisément les enjeux du PLF 2013 pour le programme 185.
Au total, la dotation du programme 185 ne diminue que de 1 % par rapport à la LFI 2012, avec une dotation de 747 M€ en PLF 2013. Le maintien de la subvention de l'AEFE, qui représente à elle seule 56 % du programme, explique cette baisse limitée. S'agissant des effectifs, il est prévu une réduction de 100 ETP (pour l'essentiel de contractuels expatriés) sur 2013-2015 mais ce qui reste supportable.
La priorité reste le maintien de la subvention de l'AEFE (425 M€). La politique d'attractivité est poursuivie avec également la stabilisation des crédits de bourses (71 M€) et d'échanges d'expertise et les échanges scientifiques (16 M€). En contrepartie, les autres secteurs, comme l'Institut Français, devront faire des efforts pour recueillir des cofinancements afin de préserver leurs capacités opérationnelles.
En matière de santé, la France a pris un engagement auprès du GAVI de 100 millions d'euros additionnels. Il s'agit d'un secteur important de l'aide au développement, comment cela va-t-il s'organiser dans les prochaines années ?
Ensuite concernant la gouvernance, des critiques ont été émises autant par la Cour des comptes que par le Parlement, qui la trouvent peu lisible. Avec la définition d'une nouvelle priorité en matière de diplomatie économique, comment pourra-t-elle être mise en oeuvre avec une telle diversité d'intervenants ? Une réelle coopération va-t-elle s'opérer ?
A propos du climat, quelle sont les perspectives de réduction des émissions de carbone à l'horizon du prochain sommet de Doha ?
Enfin, nous ne constatons pas d'améliorations sur les prêts et les subventions. Une liste de 14 puis 17 prioritaires a été définie, or ces pays sont insolvables ! L'organisation de notre budget fait que les prêts augmentent tandis que les subventions baissent. Quelles solutions peuvent être apportées ? Faut-il faire glisser les crédits en valorisant les aides projets ? Nos sommes ridicules avec nos annonces fières et une réalité peu glorieuse !
Concernant la politique d'évaluation des actions, il y a une volonté d'aller vers plus de transparence, quel que soit le Ministre. Cette transparence est également réclamée par nos concitoyens. Or, ces appels semblent vains, aucun effort particulier n'est fait ! Les indicateurs sont des moyens et non une évaluation. Certes, il est difficile méthodologiquement d'évaluer, pourtant d'autres pays y arrivent très bien. Vous devez offrir au Parlement des moyens d'évaluation des politiques menées, comme celle de l'eau, de la scolarisation, des vaccinations.
Ensuite, le fonds européen de développement (FED) et l'Europe. Vous avez évoqué, en la regrettant, l'économie de 200 millions d'euros réalisée sur le FED, sans que nous puissions avoir d'éléments concrets. Cette non-dépense est d'autant plus étonnante que le 11ème FED envisage une augmentation très substantielle, donc une hausse de notre contribution ! Certes, le 10ème FED a jusqu'à 2013 pour décaisser, néanmoins considérant l'importance des sommes en jeu, nous devons mettre en place des systèmes d'évaluation.
Enfin, et ce point a été évoqué devant le Ministre des affaires étrangères et le sera également devant M. Canfin, une initiative forte est à promouvoir en matière de coopération entre les pays européens. Il y a une grande différence entre les propos énoncés à Bruxelles et la mise en place effective dans des pays comme le Mali, le Niger ou encore le Burkina Faso, dans lesquels on dénombre parfois jusqu'à 10 ou 15 politiques de coopération différentes. Il est nécessaire d'avoir une organisation européenne sur le terrain, de désigner des chefs de file dans certains secteurs en fonction des actions identifiées, comme la France dans le domaine de l'eau. Notre pays peut-il porter ce message fort d'une organisation optimisée des budgets européens afin de tendre vers une meilleure lecture, compréhension et donc efficacité ?
Notre participation au FED est de 19 % aujourd'hui, contre 25 % auparavant. Ces chiffres valent-ils sur le constaté ou l'inscription ?
Pour répondre à M. Peyronnet, les appels à contribution sont calculés sur cette assiette.
A propos de la santé, vous avez évoqué GAVI, mais l'effort consenti par la France va au-delà, il s'élève à 1 milliard d'euros par an dans ce domaine considéré comme prioritaire. Plusieurs objectifs du millénaire pour le développement (OMD) relèvent de la santé, et il existe un savoir-faire français en la matière. Notre contribution au fonds SIDA se monte à 360 millions d'euros par an, et nous nous sommes engagés à verser 100 millions supplémentaires à GAVI en 2012. Le financement sera assuré à hauteur de 28 millions d'euros par programme FSP dans le cadre des engagements de Muskoka, de 20 millions d'euros décaissés en 2011 suite à la récupération des reliquats du FED. Il reste 30 millions à trouver en 2012, là encore nous espérons pouvoir utiliser une partie du reliquat du FED. Enfin, le solde de 22 millions d'euros sera réparti en 2014 et 2015 pour financer cet engagement de 100 millions.
Concernant la gouvernance, nous distinguons celle du développement de la diplomatie économique. Pour la première, elle n'est pas satisfaisante. Nous n'avons pas de grand ministère intégré comme dans certains pays, mais 3 grands acteurs qui doivent travailler ensemble : le ministère des affaires étrangères, le ministère de l'économie et des finances, et l'AFD. Une prochaine réunion du CICID serait la bienvenue, ainsi qu'une définition des stratégies sectorielles lorsqu'elles s'avèrent nécessaires. Pour la seconde, ce n'est pas complètement nouveau, mais un nouvel élan est donné. La nouvelle direction des entreprises et de l'économie internationale du Quai d'Orsay travaille avec Bercy, afin de donner des plans d'action aux ambassadeurs coordonnés avec ceux que Bercy donne à ses conseillers économiques. Aujourd'hui, ceux-ci sont absents d'une soixantaine de pays, le rôle de l'ambassadeur en matière économique en est d'autant plus important.
A propos du climat, une étape positive a été franchie à Durban avec l'idée de trouver dès 2015 un accord afin de mettre en oeuvre les engagements pris dès 2020. Nous avons encore 3 ans pour négocier cet accord, et la France a proposé d'accueillir la conférence des parties en 2015. L'étape de Doha, sans être décisive, implique de bien négocier la séquence qui va nous conduire à 2015 ainsi que l'architecture du futur accord et de la phase transitoire jusqu'en 2020. Cela sous-tend également un certain nombre de questions. Que faire du protocole de Kyoto ? L'Union européenne souhaite rester liée par cet accord, et il est préférable qu'un grand nombre de pays le soit. Quels engagements prendre pour tenter d'enrayer la hausse des températures ? L'objectif des 2 degrés semble irréalisable. Concernant le volet financier, le fonds vert sera accueilli en Corée, il faudra l'alimenter et donc trouver des ressources dédiées.
Sur les subventions et les prêts, vous prêchez des convertis ! Un des éléments du prochain triennum est l'objectif de maintien des dons projets à 320 millions d'euros par an en autorisations d'engagement. Cela permettra d'enrayer la baisse des dons projets au profit des prêts de l'AFD, qui ont beaucoup augmenté. Il ne faut pas oublier que le remboursement des prêts fait de l'aide publique au développement en moins ! Nous avons différents types de partenaires, qui doivent bénéficier d'instruments différenciés. Ainsi en Amérique latine, nos prêts sont très proches des données du marché, tandis que dans les 17 pays prioritaires, il ne s'agit pas de prêts mais de subventions. La prise en compte de l'effort de la France doit regrouper la totalité de nos contributions, bilatérales comme multilatérales, celles au FED ou au fonds SIDA.
A propos de l'évaluation, nous menons un travail continu sur les indicateurs. Vous avez souligné les problèmes de méthodologie, certains indicateurs ont été validés par le dernier CICID, comme le nombre d'enfants achevant un cycle primaire d'éducation, néanmoins c'est insuffisant car ces indicateurs sont ex-ante. La Grande-Bretagne et l'Allemagne sont en avance sur ces questions de mesure, nous allons donc les rencontrer. Ce sera également un des chantiers des Assises du développement, qui seront organisées prochainement, afin d'afficher des indicateurs dès 2013. Néanmoins, nous souhaitons votre indulgence aussi sur ce point, car si nous voulons avancer, nous ne devons pas être liés par des scrupules méthodologiques. Il est intéressant de voir ce que l'action de la France permet, comme le nombre de personnes vaccinées, qui a accès à l'eau ... C'est l'objectif vers lequel nous tendons, mais cela implique de prendre en compte autant l'aide bilatérale que multilatérale.
Concernant le FED, la sous-consommation de 200 millions d'euros n'est pas acceptable. On comprend la suspension dans certains cas extrêmes, comme un coup d'État dans un pays, néanmoins c'est moins compréhensible quand il s'agit de lenteur de déboursement des programmes régionaux car les accords de partenariat n'ont pas été conclus, ou de décaissement de l'aide budgétaire ... Il faudra s'efforcer de corriger ces défauts dans le 11ème FED.
Enfin, la coopération avec les autres pays européens est un aspect auquel nous apportons beaucoup d'attention. La commission européenne a mis en avant la notion de programmation conjointe dans un pays donné, des expériences sont en cours dans des pays pilotes qui sont l'Éthiopie, le Ghana, le Guatemala, le Laos et le Rwanda. L'idée est d'analyser le pays, voir ses priorités, puis se répartir les secteurs. Le 8 novembre, un séminaire sera organisé à Bruxelles sur ce thème de la programmation conjointe.
Vous avez parlé d'améliorer l'attractivité de l'enseignement du français. Il s'agit effectivement d'un chantier important, car dans certains pays comme l'Albanie ou le Monténégro, les étudiants préfèrent étudier en Suisse !
Ensuite, je suis très favorable aux Assises du développement et à la mise en place d'une diplomatie économique dans les deux ministères concernés. Il était temps ! Il faut coordonner les efforts régionaux autour de projets et non d'initiatives particulières. Dans les collectivités territoriales, nous avons aussi besoin d'organisation, de propositions de votre part, de projets pilotes et de contrats à développer.
Enfin, concernant la diplomatie culturelle et d'influence, je voudrais citer l'exemple des maisons du savoir, projet que j'ai porté il y a quinze ans pour la première fois. J'ai dupliqué ce projet en Slovaquie, et j'ai également essayé au Mali. Ce type d'outils est important, mais c'est à vous de les coordonner.
Pourquoi ne s'inspirerait-on pas du centre de crise du Quai d'Orsay pour organiser la diplomatie économique, en la faisant fonctionner, s'appuyant sur notre administration, comme un réseau de partenaires (régions, chambres de commerce, ONG, entreprises, Ubifrance), souple, réactif et adaptable à la réalité des marchés. Certains pays comme la Corée du Sud sont très efficaces.
Je partage les observations de Mme Durrieu sur la coopération décentralisée. N'y voyez pas une demande de recentralisation mais de mise en cohérence et de coordination de l'aide au développement car les collectivités territoriales ne sont pas toujours bien outillées et elles attendent des suggestions.
Les États-Unis contribuent-ils toujours aux organismes de la mouvance des Nations unies ?
En matière d'attractivité, nous ne tirons pas trop mal notre épingle du jeu. Il faut aussi constater, s'agissant des étudiants en provenance des Balkans, l'existence dans certains pays, comme la Suisse, de fortes communautés originaires de ces pays, ce qui est aussi un facteur d'attractivité pour les étudiants.
Les étudiants originaires du continent africain restent nettement en tête (avec 40 % des bourses). Le continent asiatique est en nette progression (18 % des bourses), ce qui répond à une stratégie en direction des pays émergents. Il en va de même pour le continent américain (12 %). Les pays d'Europe restent stables (18 %), mais en raison de la montée en puissance en parallèle des boursiers pris en charge sur les crédits communautaires (au premier rang desquels Erasmus), cette proportion n'est guère significative.
Ces bourses sont en priorité accordées dans les domaines où la France dispose d'une réputation d'excellence : les sciences, le droit et sciences politiques, l'économie et la gestion, en privilégiant les niveaux master et doctorat et les mobilités encadrées, gage d'un meilleur parcours académique.
Nous essayons de répondre à des demandes de pays émergents. Par exemple, le Brésil a demandé à la France d'accueillir 10 000 étudiants supplémentaires sur 4 ans (sur financement brésilien), dans le cadre du programme « Science sans Frontière » lancé par la présidente Dilma Roussef et qui va permettre de former 50 000 étudiants brésiliens à l'étranger. Dans ce cas, les programmes sont financés par le Brésil mais nous devons mettre en place les dispositifs nécessaires pour les recevoir.
La coopération décentralisée est un point important. Le Ministre a confié une mission à M. Laignel. La délégation à l'action extérieure des collectivités territoriales est rattachée à ma direction générale. Nous avons des crédits (9 M€) pour réaliser des cofinancements de projets avec les collectivités territoriales, cela permet de développer des synergies. Il s'agit d'un levier. Il est important de conjuguer nos forces dans une période de contrainte budgétaire. Il ne s'agit pas d'assigner des objectifs aux collectivités locales mais il importe surtout d'éviter la concurrence et la redondance. Nos ambassadeurs devraient aussi s'impliquer dans ce sens sachant qu'en certains domaines (services publics locaux), l'action des collectivités est très attendue.
S'agissant du numérique, l'Institut Français s'y engage par le développement de plateformes de services.
En matière de diplomatie économique, l'idée est bien d'avoir une tête de pont à Paris, la direction « entreprise » avec une sous-direction qui sera chargée du soutien général aux entreprises et d'animer le réseau (soutien des plans d'action des ambassadeurs, les liens avec Ubifrance et les Chambres de commerce) et une seconde qui suivra les secteurs plus stratégiques (industries de défense, nucléaire, transports).
S'agissant des États-Unis, ils ne financent plus l'Unesco. Sur les arriérés, je n'ai pas d'information précise. Ils étaient souvent en retard sur les contributions obligatoires mais ils sont en revanche beaucoup plus généreux sur les contributions volontaires.
Je me fais l'interprète des rapporteurs du programme 185. Avec la baisse des crédits au réseau et à l'opérateur culturel, peut-on raisonnablement compter sur des cofinancements alors que les entreprises françaises réduisent leurs dépenses de communication et de mécénat pour palier ces réductions de crédits ? Ont-ils un fonds de roulement suffisant ?
Sur l'expérimentation du rattachement du réseau culturel à l'Institut Français : une expérimentation est en cours dans 12 postes. Avez-vous estimé un surcoût qui serait la conséquence du rattachement des personnels fonctionnaires à l'Institut alors que ceux-ci restent actuellement, même dans les postes soumis à expérimentation, dans les cadres du ministère ?
L'AEFE et le réseau disposent-ils de fonds de roulement et de capacité d'avances de l'agence France-Trésor suffisants pour faire face à la fois aux besoins de sécurisation de certains immeubles, je pense à la zone du Sahel ou du Maghreb, aux besoins de rénovation et de mises aux normes des immeubles mis à disposition ? Un assouplissement du système d'avances est-il envisagé ?
Quelle cohérence y a-t-il entre une politique qui limite la contribution publique au développement du réseau et repose sur l'augmentation des frais de scolarité d'une part, et une politique de développement des aides à l'accès au réseau par l'attribution de bourses, d'autre part. Le réseau d'enseignement est-il victime de son succès ? Faut-il limiter son développement, fermer des établissements, hiérarchiser des priorités ?
Les dotations aux EAF baissent de 4 %. Pour les cofinancements, 170 M€ ont été levés en 2011, mais nous prévoyons 145 M€ pour 2012, c'est une hypothèse prudente. Il existe aussi des moyens d'autofinancement notamment pour les activités de cours de langue. Ces ressources me paraissent stables. Le fonds de roulement des établissements est de 80 jours en moyenne mondiale, alors que l'obligation est de 60 jours. Donc hormis quelques postes, comme la Grèce en raison de la crise, il n'y a pas d'inquiétude, mais il faut rester vigilant.
Cela implique une plus grande attention dans la gestion des établissements, qui ont davantage d'autonomie financière et deviennent de petites entreprises, mais il n'est pas illégitime de faire financer une partie des activités autrement que par le contribuable.
L'expérimentation du rattachement du réseau à l'Institut français est en cours, nous n'en sommes pas encore à l'heure du bilan qui sera effectué selon toute une série de critères. Le coût financier du transfert des personnels, en raison des charges patronales, est certain et représentera un montant non négligeable selon nos estimations actuelles.
Les établissements d'enseignement ont une politique immobilière à conduire. L'AEFE ne peut plus emprunter directement mais elle peut bénéficier d'avances de l'Agence France-Trésor à des taux intéressants. Il est vrai que se pose ensuite la question du remboursement des emprunts, ce qui peut induire une augmentation des frais de scolarité d'où l'importance de la rénovation du système des bourses.
La contribution publique est à un niveau important, 425 M€, à laquelle il faut rajouter les bourses. C'est un effort très significatif. Cet enseignement a beaucoup de succès. Doit-on répondre à toutes les demandes ou s'interroger sur nos priorités. C'est le sens de la mission confiée à Mme Conway-Mouret, ministre déléguée qui doit rendre un rapport au printemps prochain. On peut aussi encourager des systèmes alternatifs comme la labellisation de certains établissements locaux car on ne pourra pas satisfaire indéfiniment la totalité de la demande en créant des établissements.
Puis la commission entend une communication de Mme Josette Durrieu sur la conférence interparlementaire sur la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) qui s'est tenue à Paphos (Chypre) les 9 et 10 septembre 2012.
La Conférence interparlementaire sur la politique étrangère et de sécurité commune et la politique de sécurité et de défense commune s'est réunie pour la première fois à Paphos (Chypre) les 9 et 10 septembre dernier. La délégation du Sénat à cette conférence était composée de nos collègues Josette Durrieu, Michèle Demessine et Alain Gournac.
Il me paraît important que nous puissions entendre le compte rendu de cette réunion à un double titre. D'une part, il s'agissait de la première réunion de cette instance et c'est l'occasion de nous rappeler son origine, son objet et son mode de fonctionnement. D'autre part, un débat s'est déroulé sur le thème des « printemps arabes », et il nous importe de connaître l'appréciation des instances européennes et des différentes sensibilités au sein des parlements nationaux sur cette situation nouvelle qui affecte l'immédiat voisinage de l'Europe.
Il faut tirer de cette première conférence des enseignements, car la démarche et le contenu ne nous ont pas convaincus, mais cela peut être une initiative intéressante, qu'il faut poursuivre. Je vous rappelle que la Conférence est née à la suite de la disparition de l'Assemblée parlementaire adossée à l'Union de l'Europe occidentale, qui a été présidée par notre collègue Jean-Pierre Masseret, et supprimée à la suite de l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Il y avait là un manque, car cette Assemblée, qui rassemblait des parlementaires de 28 États, avait un rôle important. Le risque était que cette suppression ne se traduise par un amoindrissement du rôle des parlements nationaux dans le suivi des questions de sécurité et de défense à l'échelle européenne. Certains, comme les Français et les Allemands, mais aussi le dernier Président de cette Assemblée, M. Walter, ont milité pour recréer une nouvelle instance.
Cette initiative était d'ailleurs soutenue par les États sur la base du protocole n° 1 sur le rôle des parlements nationaux annexé au traité de Lisbonne. Elle avait aussi pour but d'intégrer le Parlement européen qui ne participait par l'Assemblée de l'UEO.
Le principe de la création d'une Conférence interparlementaire a très vite émergé, mais les divergences entre le Parlement européen et les parlements nationaux sur leur poids respectif au sein de cette instance n'ont permis sa mise en oeuvre qu'après qu'un compromis a été trouvé sur sa composition. Ce compromis, adopté lors de la Conférence des présidents des Parlements réunie Varsovie en avril 2012, assure une représentation prépondérante des parlements nationaux (6 sièges par État quelle qu'en soit la taille) alors que le Parlement européen se voit accorder une représentation a minima de 16 sièges.
Pour la France, chaque assemblée est représentée par 3 membres, ce qui n'est pas le cas dans d'autres pays ; ainsi le Bundesrat, qui n'a pas de compétences propres en ces matières, ne participe pas à la délégation allemande. Pour le Sénat, c'est notre commission qui occupe les trois sièges ; à l'Assemblée nationale, la délégation est composée d'un représentant de chaque commission concernée (défense, affaires étrangères, affaires européennes).
Le premier point à l'ordre du jour de la Conférence était l'adoption d'un règlement intérieur qui concrétisait la naissance de cette instance. Mais ce projet de règlement était léger et son contenu était verrouillé puisqu'il ne permettait pas d'aller au-delà du compromis de Varsovie. Il a donné lieu à un débat mais avec des conclusions décevantes puisqu'on ne pouvait rien changer. Cependant ce débat a été intéressant car des amendements ont été déposés par les délégations. J'avais pour ma part souhaité que la Conférence ne soit pas seulement une petite structure qui vole d'État en État au gré des présidences tournantes, mais qu'elle dispose d'une structure minimale, puisse adopter des conclusions et des recommandations à la majorité et non par consensus, et que les chefs de délégations en constituent en quelque sorte le bureau.
Nous nous sommes retrouvés, avec les Allemands et pour partie les Italiens, sur cette approche consistant à doter cette Conférence d'une organisation minimale et de rapprocher le fonctionnement de la Conférence de celui d'une assemblée parlementaire de plein exercice. A l'inverse, le Royaume-Uni, l'Estonie et le Danemark souhaitaient alléger le dispositif pour le limiter à un forum sans adoption de conclusions même par consensus.
La Présidence chypriote n'a accepté que les amendements en accord avec une stricte interprétation du compromis établi lors de la Conférence de Varsovie et a proposé de renvoyer les autres propositions à la révision des règles de procédure et de fonctionnement qui interviendra dans deux ans.
Cela en dit long sur la dynamique de l'Europe de la défense et sur la détermination de quelques uns : Allemands, Italiens, Français. C'est probablement parmi les pays de Weimar + que l'on pourra trouver les partenaires les plus déterminés.
La Conférence a ensuite entendu une présentation de Mme Catherine Ashton, haute-représentante de l'Union européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité au cours de laquelle elle a décrit sa mission et ses interventions notamment dans le cadre de la politique de voisinage et son action en Afrique (Sahel, Somalie...). Elle a insisté sur l'aide économique, sur la promotion de la démocratie et des droits de l'homme. Elle a également abordé succinctement sa mission de négociation avec l'Iran sur le nucléaire et l'action de l'Europe face à la situation de la Syrie. Elle a aussi rappelé la nécessaire coordination et complémentarité avec l'OTAN, indiquant que le secrétaire général de l'OTAN souhaite que l'Europe joue un rôle accru sur la scène internationale et en matière de défense. Il importe donc de pousser dans le sens du développement des synergies entre États. Ce développement m'a paru intéressant pour sensibiliser nombre de pays, peu enthousiastes en la matière, à la nécessité pour l'Europe de prendre en charge la défense de l'Europe, à l'heure où les Américains s'éloignent, comme le montre le débat Obama-Romney sur la politique étrangère dont l'Europe a été très absente. Il est bien que Mme Ashton ait pu rappeler cela. Je suis intervenue pour lui demander d'expliciter sa position sur l'initiative de Weimar +. Mme Ashton a salué celle-ci et incité les États-membres à prendre des initiatives de coopération, seule manière, dans un contexte économique difficile, de faire progresser l'Europe de la défense.
Dans la table ronde sur les printemps arabes sont intervenus la ministre des affaires étrangère de Chypre, et présidente en titre du conseil des ministres de l'Union européenne, le Dr Erato Kozakou-Markoullis et M. Bernardino Leon, représentant spécial de l'Union européenne pour la région du sud de la Méditerranée. Des représentants des Parlements du Liban et de la Jordanie y ont également participé.
Tous ont indiqué le besoin de coopération pour soutenir les pays de la Méditerranée du Sud. Une telle coopération doit se baser sur le partenariat, ainsi que sur un accompagnement pour mettre en place de nouvelles institutions, à affermir et stabiliser les changements. Ces pays ont besoin d'encouragements. Aujourd'hui, ils sont en proie à des difficultés économiques graves, parfois dépourvus, pour certains, de structures administratives ou judiciaires solides. M. Léon estime que les pays de la région considèrent l'Union européenne comme un partenaire important. Les premières visites du président Morsi et du Premier ministre tunisien ont été à Bruxelles avant de se rendre à Washington. Il a annoncé qu'une réunion se tiendrait en novembre au Caire, ce qui vient d'être confirmé, pour examiner le soutien à l'Égypte, dans la même veine que celles qui ont déjà eu lieu pour la Jordanie et la Tunisie.
Il a souligné le rôle que les Parlements nationaux peuvent jouer dans la consolidation des réformes à travers le dialogue avec les Parlements de ces pays, notamment pour les aider à rédiger leurs constitutions.
Au cours du débat, M. Alain Gournac a posé une question sur l'évolution de la situation des femmes et Mme Michèle Demessine a interrogé les intervenants sur la question de la Palestine et sur l'accord commercial passé par l'Union européenne avec Israël en juillet dernier, qui met en cause la crédibilité de l'Union dans ses relations avec les pays arabes.
Nous avons évoqué également mais brièvement les problèmes de Chypre avec en perspective le développement d'un contentieux supplémentaire entre les deux parties à propos de l'exploitation des ressources (pétrole) du plateau continental.
Enfin, par consensus, la Conférence a adopté les conclusions présentées par la présidence chypriote sous forme d'un document sans contenu politique véritable, ce qui a été bien rappelé par M. Lamberto Dini, président de la commission des affaires étrangères du Sénat italien. Nous avons formulé l'espoir que, sous la présidence de l'Irlande, cette conférence prenne une dimension un peu plus consistante et plus significative. Il faut persévérer et compter sur la mise en dynamique de cette assemblée et son noyau actif.
Pour pouvoir jouer un rôle actif, compte tenu de la structure très légère de cette conférence, il est important d'assurer une stabilité dans la composition de notre délégation d'une session à l'autre, la capacité d'influence dans ce type d'organisation repose largement sur l'aptitude des parlementaires à tisser des liens entre eux, au besoin en adjoignant des suppléants. Il faut également préparer en amont les discussions et être porteurs de propositions, au besoin en concertation avec la délégation de l'Assemblée nationale, et une concertation préalable pourrait être organisée avec d'autres délégations d'États membres. La discussion avec les Allemands pourrait se poursuivre à l'occasion de la réunion des commissions de la défense qui se déroulera au Sénat le 10 décembre prochain. Cette Conférence sera ce que ses membres en feront.
Je partage les conclusions de Mme Josette Durrieu. Au sein de cette assemblée qui est née aux forceps et alors que l'idée était plutôt d'en limiter le rôle, la surprise est venue de l'envie exprimée par de nombreux représentants de parlements nationaux que cette conférence soit utile et soit un moyen de contrôler l'action de la haute-représentante. Ce fut aussi un moyen de rencontrer les délégations qui étaient pluralistes, mais qui malgré ce pluralisme s'exprimait souvent avec une certaine unité. Il faut continuer à se battre pour que cette conférence puisse être porteuse de message, alors qu'on avait un peu le sentiment que les possibilités d'évolution sur le rôle de la Conférence semblaient très limitées, voire verrouillées. La présidence chypriote a bien joué le jeu et la tonalité a évolué au cours de la conférence. Il est probable qu'en dialoguant en amont avec la prochaine présidence, il sera possible de faire avancer les choses.
Il est important de profiter de cette ouverture pour exprimer nos points de vue faire évoluer cette Conférence.
Il me paraît important pour acclimater l'idée de l'Europe de la défense, qui s'imposera à nous de façon inéluctable, d'être présents dans cette instance qui constitue un outil de contrôle et que les Parlements nationaux y soient actifs car il s'agit d'une compétence intergouvernementale.