Séance en hémicycle du 23 février 2017 à 10h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • PME
  • déclaration
  • simplification

La séance

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La séance est ouverte à dix heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande de la délégation sénatoriale aux entreprises, sur le bilan du « choc de simplification » pour les entreprises » (rapport d’information n° 433).

La parole est à Mme la présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises, corapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Élisabeth Lamure

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, en demandant l’organisation de ce débat, la délégation aux entreprises a voulu se faire l’écho des centaines d’entrepreneurs qu’elle a rencontrés depuis sa création.

Depuis deux ans, nous sillonnons le territoire ; partout, le poids de l’administratif est vécu par les entreprises comme l’un des premiers blocages à leur développement.

Ce blocage se décline en excès de normes, en maquis de règles, en rigidité, en instabilité : plus les entreprises se voient imposer de règles, plus leur espace de liberté est réduit, ce qui nuit à leur créativité et à leur croissance. Ce poids pèse surtout sur les petites et moyennes entreprises, qui sont moins armées pour suivre l’emballement du droit.

Le coût du fardeau administratif est réel. L’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, l’estime à 60 milliards d’euros. Mais ce coût se mesure aussi en emplois perdus.

Selon le critère du poids de la réglementation, la France est classée 115e sur 138 pays par le Forum économique mondial. C’est une piètre performance ! Il s’agit donc d’un enjeu économique majeur, car notre compétitivité et notre attractivité sont affectées.

De nombreux pays européens l’ont bien compris et se sont saisis du problème. On peut se demander si la France a bien pris la mesure de l’enjeu, même si le Président de la République a annoncé en mars 2013 un « choc de simplification ».

Qu’en est-il quatre ans plus tard ? La délégation aux entreprises s’est saisie de cette question en adoptant le rapport Simplifier efficacement pour libérer les entreprises, qu’elle avait confié à Olivier Cadic et à moi-même.

Pour élaborer ce rapport, nous avons effectué des déplacements en Europe afin de comprendre la démarche de simplification menée par plusieurs de nos voisins : l’Allemagne, la Suède et les Pays-Bas.

Nous avons ensuite entendu à Paris une vingtaine d’acteurs qui sont au cœur du sujet : d’abord, les représentants des entreprises et de ceux qui les accompagnent pour gérer la complexité ; ensuite, les institutions chargées de la simplification, à commencer par le secrétaire d’État chargé de la réforme de l’État et de la simplification, M. Jean-Vincent Placé, qui aurait dû être présent aujourd’hui. Comment interpréter sa défection, monsieur le secrétaire d'État ? Vous nous direz si nous devons y voir un désintérêt pour le sujet, ce que je n’espère pas, ou, peut-être, l’expression d’une difficulté à assumer un bilan délicat…

Nous avons également entendu des acteurs extérieurs au Gouvernement, mais bien placés pour analyser la situation française, que ce soit à l’Assemblée nationale, à la Cour des comptes ou chez France stratégie. Enfin, nous avons exploré certaines idées avec les membres de think tanks et des universitaires.

La volonté de simplification, affichée en haut lieu, a-t-elle produit des résultats pour les entreprises françaises ?

L’inflation législative ne date pas d’hier, mais, fait nouveau, elle va en s’accélérant. Si le nombre de projets de loi évolue peu, leur volume augmente, notamment à la faveur de leur examen au Parlement : le nombre d’articles des projets de loi est en moyenne doublé à l’issue de la navette.

On a tôt fait d’accuser les parlementaires, mais le Gouvernement est comptable du cinquième de cette dérive imputée aux amendements. En outre, pour légiférer, le Gouvernement recourt à l’ordonnance aussi bien qu’au projet de loi, contribuant ainsi directement à l’hyperactivité législative, sans l’aide du Parlement. S’ensuit mécaniquement un emballement réglementaire, toutes ces normes enchevêtrées créant de la complexité et de l’insécurité juridique.

L’Union des industries chimiques nous a transmis une courbe frappante qui manifeste l’emballement normatif depuis une quinzaine d’années, et encore ne concerne-t-elle que le domaine de l’hygiène, de la santé et de la sécurité. Il aurait été intéressant d’avoir la même courbe en matière fiscale ou de droit du travail.

La France resserre encore un peu plus cet étau normatif en transposant souvent les directives européennes au-delà des obligations standards, ce qui disqualifie nos entreprises et, même, les incite à délocaliser leur production.

Cela fait des années que l’on tente d’améliorer la situation sans grand succès visible, malgré le pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, un secrétaire d’État dédié, un conseil de la simplification pour les entreprises et un gouvernement qui se félicite d’avoir initié 463 mesures de simplification.

Toutefois, l’élan initial s’est rapidement essoufflé. Le 10 juin 2015, M. Thierry Mandon annonçait, pour le 1er juillet 2015, la mise en place d’un comité permettant d’expertiser les études d’impact du Gouvernement. Ce comité n’a pas vu le jour, M. Mandon a changé de portefeuille une semaine plus tard et, depuis lors, trois ministres se sont succédé à ce poste en trois ans !

Le Conseil de la simplification pour les entreprises, malgré son dynamisme, a produit des mesures en tout genre. Notre rapport les classe en catégories : anecdotiques, symboliques, anti-Kafka, sans-papiers, sécurisantes, en trompe-l’œil, à la réputation simplificatrice carrément usurpée, voire à effet boomerang

Tout cela forme un tableau pointilliste : la politique de simplification n’arrive pas à convaincre, prise entre effets d’annonce et difficultés de mise en œuvre. D’ailleurs, 43 % des mesures annoncées par le Conseil de la simplification ne sont pas effectives. On évoquera des blocages, qui tiennent à la résistance au changement de ceux à qui profite la complexité, mais il faut aussi reconnaître que la volonté politique du Gouvernement a été défaillante.

Pourtant, le Gouvernement soutient que son action a dégagé une économie potentielle pour les entreprises d’environ 5 milliards d’euros annuels. Un tel chiffrage, effectué à partir des études d’impact produites par l’administration, reste invérifiable. Aucun audit préalable n’a été fait. Surtout, il néglige le coût qui résulte du flux parallèle d’obligations nouvelles : pénibilité, compte personnel de formation, transition énergétique… Si les entreprises ne ressentent pas un choc de simplification, elles ressentent assurément un choc de réglementation !

Or il est tout à fait possible de réussir : nos voisins d’Europe du Nord, eux, ont misé durablement sur l’amélioration de leur réglementation. L’Union européenne elle-même s’est engagée dans une telle démarche : sous l’impulsion du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, le flux de textes nouveaux a objectivement ralenti.

Que conclure de nos déplacements en Europe ? Là où elle fonctionne, la simplification est un objectif politique, généralement transpartisan, qui mobilise l’ensemble du Gouvernement. L’évaluation préalable des coûts y est perçue comme un moyen de rendre efficace la décision politique, pas de s’y substituer. La simplification obéit à une méthodologie rigoureuse et repose sur des objectifs et le suivi d’indicateurs. Surtout, des résultats chiffrés et vérifiés sont obtenus. L’Allemagne a ainsi allégé le coût de la bureaucratie pour ses entreprises de 14 milliards d’euros entre 2006 et 2011. Enfin, la réduction du stock de règles s’articule souvent avec une régulation du flux de normes, grâce à une règle de compensation entre création et suppression de normes.

Dans tous ces pays, un organe indépendant contrôle la qualité des études d’impact, sur lesquelles repose le pilotage de la simplification pour les entreprises. Chacun de ces organes est doté d’un collège de quelques membres experts issus du monde économique, sans mandat politique ni fonction administrative. Il rend un avis qui est publié en même temps que le texte du projet de loi ou de règlement envisagé.

La majorité sénatoriale s’est également saisie du sujet et a présenté de nombreuses propositions. Des mesures d’ordre général, comme le one-in, two -out ou la fin de la surtransposition des normes européennes.

Nous avons également fait adopter au Sénat des mesures attendues par les entreprises, malheureusement balayées d’un revers de main par le Gouvernement : la mise en place d’une date fixe annuelle pour l’application des nouvelles obligations pesant sur les entreprises, la diminution des délais de paiement à trente jours fin de mois ou encore la transformation du CICE, le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, en allégement de charges.

Sur le volet du droit du travail, la majorité sénatoriale a également été une force de propositions ; Jean-Baptiste Lemoyne y reviendra certainement.

Je laisse maintenant le soin à Olivier Cadic de présenter la suite du rapport de la délégation : il analysera la situation française, au regard des enseignements que nous avons pu tirer de nos observations à l’étranger, et vous présentera les propositions de la délégation aux entreprises.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. le corapporteur, dont l’intervention sera, à sa demande, accompagnée d’une présentation PowerPoint sur les écrans de l’hémicycle.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

M. Olivier Cadic, corapporteur de la délégation sénatoriale aux entreprises. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, la simplification en France, c’est comme la Pénélope d’Homère : elle travaille beaucoup, mais elle ne produit pas de résultat.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cadic

À l’étranger, la simplification est un processus méthodique. Chez nous, elle tient plutôt du mirage politique. C’est le fameux « choc de simplification », qui a eu trois visages en trois ans.

Si la démarche a le mérite de se vouloir pragmatique en cherchant à montrer des résultats immédiats et si elle est servie par des acteurs dynamiques, elle prend la simplification par le petit bout de la lorgnette.

La simplification, c’est un instrument de compétitivité qui doit s’imposer aux politiques sectorielles. Or les ministères continuent à élaborer des normes indépendamment les uns des autres, et à en rajouter par rapport aux règles européennes sans se soucier de l’impact économique global. Bref, les acteurs de la simplification s’épuisent en vidant la mer avec une cuillère.

Depuis la loi organique de 2009, une étude d’impact doit être présentée, de même que pour tout nouveau texte réglementaire pour vérifier l’opportunité d’une nouvelle législation. Le principe semble acquis, mais les ordonnances, les propositions de loi et les amendements y échappent encore.

Surtout, l’exercice reste trop formel pour être utile : ces études d’impact sont de qualité inégale et sont souvent réalisées au dernier moment. Le Parlement ne s’en est donc pas emparé. Et le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel, le Secrétariat général du Gouvernement et le Conseil d’État n’a pas permis d’en améliorer la qualité, si bien que notre pays continue à légiférer pour un oui, pour un non, avec entrain, ce qui rend fous les entrepreneurs !

Quant à l’évaluation rétrospective des lois, elle est loin d’être systématique. Même si tout n’est évidemment pas chiffrable, il n’y a que la comparaison dans le temps et dans l’espace qui permette de mesurer l’écart produit par une réglementation publique.

Dans ce contexte, annoncer la suppression d’une norme pour toute norme nouvelle, la fin des surtranspositions de textes européens et la généralisation des tests PME sans appliquer ces mesures ne peut que créer de la désillusion.

Pour s’attaquer à la simplification, la France traite le symptôme plutôt que le mal.

Nous devons assumer notre responsabilité collective et nous interroger sur nos méthodes, sans quoi le fardeau administratif des entreprises ne pourra pas être allégé.

Nous proposons donc quatre étapes dans l’odyssée qui nous mènera à bon port.

La première consiste à penser la simplification comme un processus qualité. Quelle entreprise peut fonctionner sans service qualité ? Ce n’est pas un hasard si certaines entreprises réussissent alors que d’autres disparaissent.

Nous devons créer ce service qualité pour la règle de droit. Sous la houlette du Premier ministre, un réseau dédié au sein du Gouvernement mobilisera tous les ministères sur cette question : pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

Sa première mission sera de chiffrer la charge administrative supportée par les entreprises : il s’agit de savoir où nous en sommes et de pouvoir nous comparer avec nos voisins. On nous oppose que ce chiffrage coûterait 3 millions d’euros. Qu’est-ce par rapport aux gains substantiels que nous pouvons attendre de cette méthode qui a fait ses preuves chez nos voisins ?

Nous pourrons ensuite arrêter des objectifs de réduction nette de la charge bureaucratique – comme l’a fait l’Allemagne, à hauteur de 25 % en quatre ans –, des indicateurs et des règles pour y parvenir.

L’établissement d’un plan de réformes globales, au début de chaque mandat, évitera que les dispositions juridiques applicables aux entreprises soient modifiées plus d’une fois par législature. Leur impact sera étudié en amont, leurs objectifs seront chiffrés et les indicateurs à suivre définis : l’étude d’impact deviendra ainsi l’outil principal de qualité de la norme.

Une clause de révision devra aussi être insérée dans chaque loi pour évaluer son efficacité dans les cinq ans suivant son adoption. Ainsi, l’élaboration des lois obéira à un processus d’amélioration continue. La roue de Deming décrit ce cercle vertueux : préparer, exécuter, contrôler, ajuster.

La deuxième étape consiste à alléger le stock normatif. Nous avons deux siècles de lois derrière nous : pour commencer, il faut élaguer le stock de normes et l’alléger des règles devenues obsolètes avant d’en créer de nouvelles.

La collaboration déjà engagée entre entreprises et administration doit se poursuivre : il faut réévaluer la nécessité des règles et procédures qui compliquent la vie des entreprises.

L’objectif est de parvenir à des simplifications substantielles.

Ce travail doit mieux être articulé avec l’échelon européen, à la fois avec Bruxelles et avec les autres États européens. Nous devons comparer la performance de notre réglementation avec celle d’États voisins qui partagent des exigences comparables aux nôtres, en termes de santé publique, de protection du consommateur et de sécurité industrielle.

Les salariés français sont-ils en meilleure santé que leurs voisins grâce à l’existence d’une médecine du travail ? Nos raffineries pétrolières sont-elles plus sûres grâce à une législation plus stricte ? Non : les raffineries françaises concourent pour 26 % des accidents en Europe alors qu’elles ne représentent que 10 % des sites. L’efficacité des règles juridiques doit s’apprécier à l’aune de résultats concrets.

La troisième étape consiste à concevoir la régulation au service des entreprises. Pourquoi faire porter la responsabilité à un fonctionnaire de déterminer ce qui est autorisé ou pas ? Passons d’un système où tout est interdit sauf ce qui est autorisé à un système où tout est autorisé sauf ce qui est interdit. Ainsi nous libérerons non seulement les entreprises, mais aussi l’administration.

La régulation doit se faire par objectif et non par moyen. Plus libre, l’entreprise sera plus responsable.

Il convient aussi de porter à l’échelon européen nos exigences nationales. La transposition de directive doit se faire de manière stricte. Si, ensuite, nous voulons poser des exigences supplémentaires, cela doit faire l’objet d’un texte distinct, dont l’impact devra être évalué.

Enfin, notre pays doit cesser d’anticiper sur les règles européennes à venir.

La quatrième étape consiste à mieux légiférer. Le Parlement est comme une usine à produire des lois. Seul un processus qualité pour leur élaboration peut garantir leur efficacité et leur simplicité.

En amont, il faut associer les entreprises à l’élaboration des lois : acceptons de prendre ce temps-là, car il est déterminant pour améliorer non seulement la qualité, mais aussi la légitimité, et donc l’effectivité de la loi.

La réalisation d’un test PME sur les projets de textes qui leur sont applicables doit devenir obligatoire. Faciliter les expérimentations en amont est aussi un moyen de mieux calibrer les règles avant leur adoption.

Nous devons également miser sur l’étude d’impact préalable, qui doit être approfondie, et poser d’abord la question de l’utilité d’une nouvelle règle. L’étude d’impact devrait être rendue également obligatoire pour les projets d’ordonnances et les propositions de loi inscrites à l’ordre du jour.

Surtout, sa qualité doit être contrôlée par le Conseil de la simplification pour les entreprises, dont nous proposons de transformer les missions et la composition pour en assurer l’indépendance. Le Conseil rendrait un avis consultatif, mais public sur l’étude d’impact, afin de créer du débat public et de l’émulation entre ministères.

Enfin, au Parlement, la procédure d’examen des textes pourrait être améliorée. Nous suggérons un débat d’orientation préalable avant d’attaquer l’examen d’un projet de loi concernant les entreprises. Nous proposons de réfléchir à de nouveaux outils pour endiguer le gonflement des textes au cours de la navette. Nous voulons qu'un nouveau regard soit porté sur l’activité des parlementaires, un regard qui ne se réduise pas à mesurer combien de textes ou d’amendements ils déposent. Nous demandons une mise à jour de l’étude d’impact après la première lecture. Enfin, nous voulons développer une culture d’évaluation préalable au Parlement.

Le contrôle de l’efficacité des lois adoptées doit également être renforcé. Leur déclinaison réglementaire doit mieux respecter la volonté du législateur.

Voici l’essentiel de nos propositions pour simplifier efficacement et libérer nos entreprises. Il s’agit de revoir en profondeur nos façons de faire, au bénéfice de la compétitivité de nos entreprises. « La folie, c’est de faire toujours la même chose et de s’attendre à un résultat différent », aurait dit Albert Einstein.

La délégation aux entreprises vous propose tout simplement de changer de manière de faire de la politique.

Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Patricia Morhet-Richaud, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Morhet-Richaud

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le 28 mars 2013, le Président de la République lançait le programme dit du « choc de simplification », censé rendre plus lisibles et plus rapides les normes et les procédures administratives pour les citoyens et les entreprises.

Un premier projet de loi relatif à la simplification de la vie des entreprises et portant dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives fut voté le 20 décembre 2014.

Le sujet n’est pas mineur pour notre pays. Un Français sur quatre estime ses relations avec l’administration complexes. Pis, selon le Global Competitiveness Report, le classement international de la France en termes de fardeau administratif s’est dégradé au fil des années pour atteindre la 121e place en 2015.

Du point de vue des entreprises, les contraintes administratives sont une réalité bien connue. Démarches longues, procédures complexes, multiplicité des interlocuteurs, renseignements inadaptés à des situations particulières, manque de réactivité des services sont des phénomènes qui pèsent particulièrement sur nos PME et nos TPE.

Pourtant une simplification de 25 % des charges ferait économiser 15 milliards d’euros aux entreprises, dégagerait des gains de productivité et, in fine, contribuerait à soutenir la croissance et à libérer l’emploi.

Les Français ne demandent qu’à entreprendre librement et à prendre des initiatives, comme l’a montré le succès du statut d’auto-entrepreneur, mais ils ne pourront le faire que dans un cadre administratif favorable susceptible de comprendre et de répondre à leurs attentes.

La loi du 20 décembre 2014 a mis en place un certain nombre de mesures allant dans le bon sens, mais largement insuffisantes. Elles sont mises en place pour la première fois par un secrétariat d’État dédié explicitement à la simplification depuis juin 2014.

Ont été ainsi votées, entre autres mesures, la réduction du nombre de commissions locales compétentes en matière d’aménagement du territoire et de services au public, la suppression ou la simplification des régimes d’autorisation préalable et de déclaration pesant sur les entreprises ; la simplification du code du commerce ; la transposition de deux directives sur les marchés publics ; la suppression d’obligation de déclaration pour la participation au développement de la formation professionnelle.

Au regard de l’immensité de la tâche de simplification à accomplir, au niveau tant local que national, cette loi paraît bien timide. Il faut d’ailleurs noter qu’en février 2016 seulement 56 % des mesures à destination des entreprises étaient effectives.

Lors du déplacement de la délégation sénatoriale aux entreprises, dont je suis membre, dans mon département des Hautes-Alpes le 30 juin 2016, avec sa présidente Élisabeth Lamure et nos trois collègues Michel Canevet, Guy-Dominique Kennel et Michel Vaspart, la rencontre avec les entreprises et les acteurs de terrain avait permis de mesurer que la complexité et, surtout, l’instabilité normative sont des griefs récurrents faits à l’État. Nous avons fait le même constat lors de chacun de nos déplacements.

Un an et demi après le vote de la loi, l’édiction permanente de nouvelles normes, notamment sur l’accessibilité, l’environnement ou les enseignes, réduit les marges et empêche la création d’emplois. Un dirigeant d’une PME locale ironisait également sur le fait qu’il aurait besoin d’un équivalent temps plein administratif uniquement pour s’adapter aux mises à jour normatives de notre législation !

Il apparaît enfin que l’inadéquation de notre réglementation à la réalité des PME reste un problème majeur. Le cadre réglementaire de l’accès aux marchés publics s’avère particulièrement difficile à appréhender. Les règles de rédaction écartent de fait nombre de PME par manque de compétences. La réglementation est bien souvent inadaptée au caractère saisonnier de l’économie locale. On pourrait évoquer aussi le manque d’interlocuteurs fiables capables d’aider des entreprises, qui ont le sentiment d’être livrées à elles-mêmes dans les abysses administratifs.

Si le « choc de simplification » a certes permis quelques avancées, elles sont systématiquement remises en cause par les législations et des contraintes supplémentaires. Dans les Hautes-Alpes comme dans les autres départements, le compte pénibilité et le futur prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu sont des sources d’inquiétudes pour nos entrepreneurs, car ces mesures sont non seulement difficiles à mettre en place, mais aussi très coûteuses.

Et ce ne sont pas seulement les entrepreneurs qui sont victimes de ce trop-plein normatif ! Ce sont d’abord les employés, dont les salaires pourraient augmenter si leurs entreprises ne subissaient pas un tel fardeau.

On assiste en réalité au mouvement suivant : un pas de simplification en avant, deux pas de complexité en arrière.

Le principal problème en France reste le volume de la législation, auquel le Gouvernement n’a jamais osé s’attaquer : 400 000 normes, 10 500 lois, 127 000 décrets… Et les parlementaires que nous sommes n’y sont pas étrangers ! Ces textes sont-ils tous nécessaires ?

Au Royaume-Uni ou en Italie, par exemple, l’édiction d’une nouvelle norme doit obligatoirement passer par la suppression d’une autre. La France devrait s’inspirer de ce système. Chaque loi votée devrait comporter un volet « simplification ». La fin de la surtransposition du droit communautaire, déjà prolifique en matière normative, relève également du bon sens.

Le numérique permet une rapidité d’exécution et une réduction des coûts impossibles auparavant. Par exemple, pourrait être mise en place une déclaration fiscale unique et dématérialisée regroupant les impôts, la TVA, la formation continue, les déclarations de cotisation sur la valeur ajoutée et de cotisation foncière des entreprises, ainsi que la déclaration sur les dividendes et intérêts.

En matière de droit du travail aussi la simplification tarde à aboutir. Permettre le référendum d’entreprise, instaurer une instance représentative unique fusionnant les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, les comités d’entreprise et les délégués du personnel, faire en sorte que les accords collectifs s’imposent effectivement au contrat de travail, instaurer la présomption de licéité de l’accord collectif sont autant de mesures qui simplifieraient réellement les relations des entreprises avec les administrations et libéreraient les énergies.

L’administration, quant à elle, doit se recentrer sur les rescrits en matière de droit du travail pour une meilleure adaptation aux réalités de terrain.

Pour toutes ces raisons, il est indispensable pour l’économie française que nous allions beaucoup plus loin dans la simplification afin que le « choc de simplification » ne reste pas une formule politique ou le nom d’un ministère, mais une réalité pour les Français.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l'UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Dominique Watrin, pour le groupe communiste républicain et citoyen.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Watrin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la simplification de la vie des entreprises est une question récurrente de cette législature.

Déclinée au gré des débats – simplification des normes agricoles, simplification administrative, création du Conseil d’évaluation des normes –, la simplification comme une incantation résoudrait à elle seule tous les maux dont souffre notre économie. Le débat de ce matin n’échappe pas à cette règle, puisqu’il faudrait, selon ses initiateurs, alléger le fardeau administratif des entreprises pour améliorer la compétitivité de celles-ci, et même leur vie.

Pourtant, malgré l’affichage, la prolifération normative n’a pas cessé de s’accentuer, comme M. Cadic l’a souligné : accord national interprofessionnel sur la compétitivité et la sécurisation de l’emploi, loi Macron, loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, loi Travail, loi Sapin – encore cette liste n’est-elle pas exhaustive. Pour faire moins de normes, faisons plus de normes, en somme !

Or cette inflation normative, bien réelle, n’est pas due qu’au zèle des administrations de l’État. Cette vision caricaturale minimise l’impératif constitutionnel de clarté du droit. Il n’y a pas de volonté perverse de quelques administrateurs, mais l’exigence de produire la norme la meilleure au service de la sécurité juridique, voire, parfois, de corriger des erreurs du Parlement.

De plus, si la norme peut être contraignante à l’égard de certains, il faut rappeler que, à plus long terme, elle en protège d’autres : c’est le cas au premier chef du droit du travail, mais aussi des procédures administratives.

Pour autant, nous ne nions pas les difficultés rencontrées quotidiennement par nos entreprises. Seulement, cette exacerbation est en grande partie liée à l’insuffisance des moyens mis au service des PME et des TPE, au retrait de l’État et, il ne faudrait pas l’oublier, à la diminution du nombre de fonctionnaires.

De fait, les restructurations des services administratifs s’intensifient, dans le sillage des orientations de la révision générale des politiques publiques : réduction de personnel, mutualisations de fonctions, privatisations larvées de services publics. Or ces évolutions, que nous constatons sur nos territoires, sont autant de moyens directs ou indirects en moins pour accompagner les entreprises.

Elles expliquent aussi les nombreuses dérogations au nouveau principe du droit administratif selon lequel le silence gardé par l’administration vaut consentement, alors qu’il valait traditionnellement rejet. En effet, la suppression de nombreux services ne permet pas une prise de décision administrative dans les deux mois. On peut le regretter, mais ce sont bien les politiques d’austérité qui ne permettent pas d’évolutions significatives en la matière.

C’est pourquoi nous craignons que, derrière le leitmotiv de la simplification, ne se cache en réalité une volonté pure et simple de déréglementation, de dérégulation, bref de « moins d’État » ; M. Cadic ne s’en est d’ailleurs pas caché.

Au demeurant, on peut lire dans un rapport d’information de la commission des lois, intitulé Le droit des entreprises : enjeux d’attractivité internationale, enjeux de souveraineté, que « la situation des entreprises françaises n’est pas préoccupante du point de vue du droit qui leur est applicable ». Ainsi, selon un sondage réalisé par KPMG en octobre dernier, seuls 16 % des chefs d’entreprise pensent qu’une simplification du code du travail contribuerait au développement de l’activité de leur entreprise, et ils sont seulement 8 % à penser que la simplification des procédures administratives pourrait retentir sur leur activité.

En revanche, l’inquiétude face à l’accès au crédit reste très vivace chez les entrepreneurs. Ainsi, pour de nombreuses PME, les solutions de financement proposées par les banques demeurent insatisfaisantes. Il est nécessaire, par exemple, que les conditions des crédits à court terme soient plus abordables, avec des frais bancaires allégés.

C’est pourquoi nous, sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen, pensons que, a minima, une concertation avec l’ensemble du secteur bancaire devrait être organisée, territoire par territoire, pour dresser un état des lieux, repérer les dysfonctionnements et tenter de les surmonter. Cela ne serait cependant qu’un minimum, car il faudrait en réalité une véritable réforme du système bancaire et de la politique monétaire de la Banque centrale européenne, ainsi que des critères de crédit aux entreprises, lequel devrait être réorienté vers l’investissement utile, avec des taux d’intérêt d’autant plus bas que le crédit serait destiné à l’emploi, aux salaires et à la formation.

Il faudrait aussi encadrer véritablement la sous-traitance, comme en Allemagne, et étendre la responsabilité des entreprises donneuses d’ordres.

De même, il est indispensable de mieux contrôler les circuits d’aide publique. En effet, les grandes sociétés, dont le chiffre d’affaires réalisé hors de France est de plus en plus important, canalisent une grande part des milliards d’euros d’aides publiques, sans pour autant créer de l’emploi ou assurer un rapport de sous-traitance fiable et équitable.

Enfin, il faut renforcer le pouvoir d’achat de nos concitoyens. Une des raisons des difficultés que rencontrent de nombreuses PME est la faiblesse de la demande intérieure : chômage, précarité, bas salaires, tous ces phénomènes minent la demande salariale, tandis que les politiques d’austérité budgétaire dépriment la demande publique.

Bref, vous l’aurez compris, si nous souscrivons à certains éléments de l’état des lieux dressé par Mme Lamure, comme la complexification du droit, la multiplication de textes législatifs sans réelle cohérence et la pratique contestable des ordonnances, nous n’approuvons pas toutes les propositions de la délégation sénatoriale aux entreprises.

Si la coproduction législative avec les entreprises peut être une piste, il ne faut pas oublier que l’État est le garant de l’intérêt général et de l’indépendance à l’égard du lobbying de certains grands groupes, qui est une réalité non contrôlée.

Le nombre de normes risque de continuer à croître, comme l’a souligné le Conseil d’État : « la multiplication des sources externes, le droit européen en particulier, en même temps que l’apparition de nouveaux domaines » sont naturellement des facteurs de la complexité croissante du droit. En réalité, le libéralisme économique entraîne une inflation de pans entiers du droit, par exemple dans les domaines de la bourse et de la concurrence, ou encore de l’énergie.

On le voit, ce débat n’est pas neutre politiquement. Il aura été utile, tout au moins si nous en tirons cette conséquence que l’évaluation qualitative doit l’emporter dans tous les cas sur une évaluation trop souvent faussement comptable !

Applaudissements sur les travées du groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Hermeline Malherbe, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Hermeline Malherbe

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, notre dernier débat de la mandature porte sur le bilan du choc de simplification pour les entreprises, sujet important à la fois pour notre économie et pour nos emplois.

La simplification vise notamment à réduire la charge administrative qui pèse sur les entreprises. Il y va de leur compétitivité, bien sûr, mais aussi de l’équité entre les différentes entités économiques, celles qui ont les moyens de répondre à la complexité administrative et celles qui ne les ont pas : il y a là aussi un enjeu de croissance, de développement et donc d’emploi.

Je remercie la présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises, Mme Élisabeth Lamure, qui nous donne l’occasion d’aborder ce sujet – une nouvelle fois, me direz-vous, mais il en vaut la peine.

En mai 2013, le Président de la République a déclaré : « Plus de simplification, c’est plus d’initiatives, plus d’activités, plus d’emplois ». Avec le choc de simplification pour les entreprises, nous faisons face à un vrai dilemme, résumé par cette question : comment libérer les entreprises du foisonnement des contraintes administratives de toute nature tout en préservant un environnement juridique, fiscal et social stable et sécurisé ?

Cette interrogation n’est pas nouvelle ; on en parle depuis au moins 1983 et la création d’une commission pour la simplification des formalités des entreprises. Aujourd’hui, quel est le constat ?

Malgré les efforts renouvelés des différents gouvernements, le résultat en matière de simplification pour les entreprises n’est pas médiocre – ce jugement, porté par certains, est excessif –, mais il est loin d’être optimal et, surtout, il reste vraiment beaucoup à faire !

Encore faut-il avoir conscience de l’importance de ce sujet pour notre économie. De ce point de vue, je me réjouis que François Hollande l’ait pris à bras-le-corps dès le début de son quinquennat. De fait, le choc de simplification annoncé en mars 2013 par le Président de la République a consisté à faire de la simplification, conçue de façon très générale, un pilier de la réforme de l’État. En l’espace de trois à quatre ans, nous avons fait évoluer les mentalités sur le sujet, ce qui était tout aussi essentiel.

Afin d’accélérer la mise en œuvre de cette politique, le Gouvernement a décidé de mettre en place, en janvier 2014, une organisation dédiée, le Conseil de la simplification pour les entreprises. Une vraie méthode collaborative a vu le jour au sein d’ateliers participatifs associant les acteurs économiques et les représentants de l’administration.

Composé de représentants des petites et des grandes entreprises, de parlementaires, d’experts, le Conseil de la simplification pour les entreprises s’apparente, pour reprendre une expression de Thierry Mandon, à une « fabrique à simplifier ». Cet organisme traduit ainsi la révolution qui s’opère, de la conception jusqu’à la mise en œuvre, dans les mesures de simplification, en vue de répondre aux besoins réels de tous les types d’entreprises.

À ce jour, comme Mme la présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises l’a souligné, 463 mesures de simplification à destination des entreprises ont été adoptées, en particulier le programme « dites-le-nous une fois ». Source d’une économie de 4 milliards d’euros par an pour les entreprises, ce programme se décline à travers, notamment, la déclaration sociale nominative, la DSN, les marchés publics simplifiés, la saisine de l’administration par voie électronique et le guichet Entreprises.

Les mesures mises en place doivent faire l’objet d’une évaluation pour vérifier que les objectifs visés sont bien atteints. J’ai à l’esprit un exemple dans lequel le dispositif Marché public simplifié a finalement conduit à un allongement des procédures, alors que le programme « dites-le-nous une fois » est supposé favoriser la réactivité !

Le Conseil de la simplification pour les entreprises a annoncé à l’automne quarante-huit mesures dont l’entrée en vigueur s’échelonnera de 2017 à 2018. Reste à ne pas introduire de la complexité supplémentaire d’un côté tandis que l’on simplifie de l’autre…

Dans le cadre du programme « dites-le-nous une fois », la mesure consistant à informer en une seule fois les entreprises de l’ensemble des démarches à effectuer pour leur installation sera prochainement expérimentée. Il y a là une autre révolution douce qui devrait faciliter la vie non seulement des entrepreneurs, mais aussi, j’y insiste, de l’entreprise dans son ensemble, donc des salariés.

Par ailleurs, il faut se garder d’oublier les TPE, les artisans et commerçants, ainsi que le monde agricole.

Il faut remettre au cœur de la réforme les différentes chambres interconsulaires qui accompagnent les entreprises.

Enfin, même si je ne souscris pas à l’intégralité du propos de M. Watrin, la problématique bancaire et financière qu’il a soulevée est une réalité pour l’ensemble de nos entreprises.

On a déjà simplifié, par exemple, les formalités dans le domaine de l’éolien et des parcs photovoltaïques, mais aussi de l’apprentissage, afin de faciliter l’accès à celui-ci. De manière générale, tout ce qui peut simplifier la vie des entreprises sans diminuer les droits et protections de celles et ceux qui les font vivre va dans le bon sens.

La majorité des membres du RDSE ne peut donc qu’appeler de ses vœux la poursuite de l’effort entrepris, sur la base notamment des propositions de la délégation sénatoriale aux entreprises, car, je le redis, il reste beaucoup à faire !

Applaudissements sur les travées du RDSE et sur plusieurs travées du groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la simplification administrative est une question récurrente dans notre pays : la lourdeur de notre administration est souvent moquée, parfois avec raison. Pourtant, ce n’est pas tant l’efficacité de l’administration qui est en cause que les nouvelles procédures qui s’accumulent sans que l’on se préoccupe suffisamment de leur cohérence ni de la suppression des plus anciennes.

Nous avons tenté d’y remédier dès 2013, en créant le Conseil national d’évaluation des normes, chargé de simplifier les normes applicables aux collectivités territoriales et à leurs établissements publics. Malheureusement, la saisine de cet organisme est encore trop complexe ; une proposition de loi visant à la simplifier est d’ailleurs encore en cours de navette…

Dans une perspective de démocratie numérique, nouvelle forme de la démocratie directe, le site participatif « faire simple » permet aux citoyens et aux acteurs économiques d’adresser des propositions au Gouvernement dans le domaine de la simplification. Il a déjà recueilli plus de 4 000 contributions et compte plus de 19 000 inscrits. Ces démarches participatives et contributives nous tiennent à cœur, à nous écologistes. Nous saluons donc les avancées de la démarche de gouvernement ouvert.

Quant au silence de l’administration, le principe selon lequel il vaut désormais accord, inscrit dans la loi du 12 novembre 2013 habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l’administration et les citoyens, concerne deux tiers des procédures administratives. Entré en vigueur le 12 novembre 2014 pour les services de l’État, il autorise les entreprises et les citoyens à considérer leur requête comme acceptée si l’administration ne leur répond pas dans un délai de deux mois, avec toutefois la réserve soulevée par notre collègue Dominique Watrin touchant aux moyens humains nécessaires aux services de l’État.

Pour ce qui est des processus de simplification concernant directement les entreprises, le site simplification. modernisation.gouv.fr en recense plus de 300, dans des domaines aussi divers que les procédures de création, les échanges avec l’administration, l’emploi, la formation et l’apprentissage, mais aussi la transmission des entreprises et les obligations comptables, sociales et fiscales.

Quant au dernier « train », comme dit Jean-Vincent Placé, des 415 mesures de simplification, il doit permettre aux entreprises d’économiser plus de 5 milliards d’euros en 2017. Ce sera donc un gain d’attractivité et de compétitivité considérable.

Je tiens à aborder le compte de prévention pénibilité, véritable bonne mesure pour les salariés. Sa création était nécessaire, mais elle a provoqué une levée de boucliers parmi les petites entreprises, notamment artisanales. Il fallait en simplifier l’application, ce qui a été fait, notamment par sa fusion au sein du compte personnel d’activité, après le report de son entrée en vigueur. La possibilité de se fonder sur les accords collectifs de branche étendus ou sur le référentiel professionnel de branche homologué est un axe qui doit être encouragé. Dans ce domaine, nous pouvons saluer les efforts d’écoute accomplis par l’État en vue d’une véritable simplification.

Reste qu’il est nécessaire d’avancer encore. Ainsi, les PME doivent bénéficier d’un accès plus ouvert aux marchés publics. L’effort entamé dans ce domaine doit être poursuivi, car les PME, qui représentent 99 % de notre tissu économique, n’obtiennent que 58 % des marchés publics en volume et 30 % seulement en valeur.

Il convient aussi d’adapter les normes aux différentes tailles d’entreprise, en particulier dans le domaine de l’agroalimentaire : les mêmes normes s’appliquent aux petits ateliers de transformation et aux grandes usines de l’agroalimentaire ! Nous avons déjà abondamment débattu et nous débattrons encore de la reterritorialisation de l’alimentation, car c’est un processus qui ne s’arrêtera pas et que nous, politiques, avons le devoir d’encourager. Or l’ancrage territorial de l’alimentation implique la construction de filières courtes d’abattage et de transformation, et donc une adaptation des normes à des ateliers de petite taille.

Il en va de même dans le secteur de la petite restauration collective, qui ne doit pas être soumise aux mêmes normes que la « cuisine-usine » de l’agroalimentaire. De façon générale, l’adaptation des normes est dans l’intérêt de nos concitoyens, de nos entreprises et de nos territoires.

Nous, écologistes, estimons que la France a bien avancé sur la voie de la simplification, même si, parce que nous partons de loin, il reste beaucoup à faire en matière d’efficacité administrative, chemin qui devra être parcouru sans que les principes fondamentaux et les nécessaires contrôles sur les entreprises soient remis en cause. Espérons que, au cours de la prochaine législature, le travail entamé sera poursuivi dans le même esprit !

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et républicain et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à Mme Nicole Bricq, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je me félicite de la tenue de ce débat, qui aurait mérité une assistance plus nombreuse…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Je ne reviendrai pas sur le constat, bien connu.

Le cycle funeste de la complexité des règles et de leur instabilité a un effet nocif sur les décisions non seulement des entreprises, mais aussi des ménages, qui sont des acteurs économiques essentiels.

Depuis vingt ans au moins, tous les gouvernements affichent leur volonté de simplifier, selon des modalités diverses. Toutefois, il faut bien reconnaître que, lors de ce quinquennat, cet objectif a été, très tôt, érigé en priorité.

Dès novembre 2012, en effet, à l’occasion du pacte national pour la croissance, la compétitivité et l’emploi, une politique de simplification était décidée puis rapidement traduite en actes.

En mars 2013, le Président François Hollande a mobilisé les préfets et les directeurs d’administration centrale afin d’accélérer la mise en œuvre des réformes pour la croissance et l’emploi.

Le 17 juillet 2013, soit dans un délai remarquable compte tenu de l’habituelle lenteur d’exécution des décisions, le Gouvernement a dévoilé les 200 premières mesures de son programme de simplification.

Le Conseil de la simplification pour les entreprises, créé le 8 janvier 2014 et coprésidé par un député et une chef d’entreprise, a proposé au Gouvernement des orientations stratégiques pour les entreprises. Depuis, il dresse régulièrement un bilan de l’avancement des mesures prises et des résultats obtenus.

Un ministère est créé, ce qui représente tout de même un saut qualitatif, puis, en juin 2015, Thierry Mandon est nommé secrétaire d’État auprès du Premier ministre, chargé de la réforme de l’État et de la simplification.

Les mesures de simplification, que je ne reprends pas, se sont dès lors engrangées : sur le plan quantitatif, le bilan est indéniablement positif.

Reste que, de l’aveu du Conseil de la simplification pour les entreprises, dont je fais partie, 56 % seulement des mesures proposées et adoptées sont effectives. Il y a donc une marge de progression.

Je ne sais pas, monsieur Cadic, si l’on a une petite cuillère ou une grande louche, mais je puis témoigner qu’il faut une énergie titanesque pour obtenir qu’une proposition fasse l’objet d’une décision qui devienne effective. Je me souviens de ce qui s’est passé pour le forfait jours : l’appareil administratif a laissé passer le délai de neuf mois prévu pour l’ordonnance ! J’ai donc déposé un amendement au projet de loi Travail. Adopté dans les deux chambres, il prévoit la remise d’un rapport au Parlement. Il faudra donc demander des comptes au Gouvernement lors de la prochaine législature…

La loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification du droit et des procédures administratives a introduit des mesures notables, notamment le guichet unique de paiement des cotisations et contributions de protection sociale et le développement du rescrit. Quant au principe « silence vaut accord », son importance a déjà été soulignée.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, comporte elle aussi de nombreuses mesures de simplification, notamment en ce qui concerne les relations interentreprises. Je pense en particulier à la mise en place de la facturation électronique et à la possibilité de prêts interentreprises. Je pense aussi à la réforme des conseils de prud’hommes, qui devait être entreprise depuis des années. Elle a accéléré les procédures et amélioré la visibilité des acteurs grâce au référentiel pour les dommages et intérêts.

Par ailleurs, la loi du 17 août 2015 relative au dialogue social et à l’emploi a regroupé les consultations annuelles du comité d’entreprise et les négociations obligatoires en entreprise.

Enfin, la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a instauré la dématérialisation, effective depuis le 1er janvier dernier, du bulletin de paie.

Permettez-moi d’insister sur le rôle de l’expérimentation, qui me paraît fondamental en matière de simplification. Je crois en effet que nous n’expérimentons pas assez.

Nous l’avons fait au niveau législatif, le Sénat ayant adopté, à l’unanimité, la proposition de loi dite Grandguillaume dont est issue la loi du 29 février 2016 d’expérimentation territoriale visant à résorber le chômage de longue durée, qui institue un fonds d’expérimentation territoriale. Il s’agit, à l’échelle de microterritoires et au travers d’accords entre les collectivités territoriales, les maisons de l’emploi et, bien sûr, les entreprises, d’encourager l’embauche de chômeurs de longue durée.

D’autres initiatives législatives sont venues du Gouvernement. Ainsi, sur le fondement de la loi Macron, deux ordonnances ont été publiées qui offrent un cadre juridique clair et stable aux porteurs d’un projet de construction, afin de lever toute incertitude sur l’application d’une réglementation susceptible d’entraîner une augmentation des délais d’instruction, donc des coûts supplémentaires. Dans cette affaire, je puis vous assurer que le Conseil de la simplification pour les entreprises a joué un rôle majeur, et qu’il a fallu une énergie colossale pour obtenir que les ordonnances soient conformes à la volonté du législateur.

On est passé par l’expérimentation, quatre régions s’étant portées volontaires pour tester pendant trois ans le certificat de projet. Par ce certificat, délivré par le préfet du département dans un délai de deux mois, l’administration s’engage à identifier les règles applicables au projet d’entreprise et à respecter un délai d’instruction pour la délivrance des autorisations nécessaires.

Je pense également à l’initiative réunissant plusieurs ministères, dont le vôtre, monsieur le secrétaire d’État, pour clarifier le bulletin de paie. Certes, on est passé de la simplification à la clarification, mais vous avez eu recours à l’expérimentation, dans dix entreprises volontaires. Un bilan a été établi, et la généralisation du dispositif sera normalement achevée au 1er janvier 2018. On en parlait, nous l’avons fait !

Par ailleurs, je tiens à insister aussi sur un autre dispositif, fruit de la volonté de l’actuel secrétaire d’État chargé de la simplification, qui n’est pas ici ce matin, car il est au Viêt Nam, ce qui me semble constituer une bonne raison, madame Lamure, et l’ancien ministre de l’économie Emmanuel Macron : je veux parler du dispositif France Expérimentation.

Le cadre réglementaire défini à l’échelon national n’étant pas toujours adapté aux nouveaux projets des territoires, il faut donner de l’air à l’expérimentation locale en levant temporairement certaines barrières, pour permettre à de nouvelles idées, de nouveaux projets et de nouveaux services de voir le jour et d’être testés. Ces dérogations doivent ensuite être évaluées et, si leur bilan est positif, généralisées.

Je pense qu’il y a là un cycle vertueux qui devrait être emprunté de façon systématique : expérimentation, évaluation, législation, application, nouvelle évaluation.

Pour conclure, puisque mon temps de parole est épuisé, je veux souligner que, au-delà de la boîte à outils – une norme supprimée pour une norme créée et autres règles de ce type, qui toutes me conviennent –, il y a un problème de gouvernance de la simplification.

On peut imaginer de créer une autorité indépendante, mais nous, parlementaires, n’aimons guère cette méthode. Je vous rappelle que nous avons mené un travail approfondi sur l’« agenciarisation » de la politique de l’État. Ce n’est donc pas la voie que j’emprunterais, même si ce modèle peut être vertueux, comme le montre l’exemple de l’ACTAL aux Pays-Bas.

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Il faudrait plutôt nommer un ministre de plein exercice disposant d’une administration spécifique. §(Ça suffit ! sur les travées du groupe Les Républicains.) De fait, dans le système actuel, le ministre n’a pas sa propre administration ; il faut donc qu’il ait le poids nécessaire pour amener ses collègues à s’engager dans une démarche de simplification.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Votre temps de parole est épuisé depuis près de deux minutes, ma chère collègue !

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Comme M. Cadic l’a dit, me semble-t-il, nous avons une réforme culturelle à mener et, comme vous le savez, ce sont souvent les plus difficiles, mais, si l’on a la volonté, la méthode…

Debut de section - PermalienPhoto de Nicole Bricq

Mme Nicole Bricq. … et les moyens du suivi, c’est possible !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

M. le président. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, tout d’abord, je me félicite que nous puissions débattre de ce sujet sur une base aussi sérieuse et étayée que le rapport de nos collègues Élisabeth Lamure et Olivier Cadic. Il s’agit en effet d’une véritable mine d’informations, d’un trésor de propositions, monsieur le secrétaire d'État…

Je m’étonne quelque peu de l’absence de notre ami Jean-Vincent Placé. J’ai cru comprendre qu’il serait en déplacement, alors que l’on débat d’un sujet qui est au cœur de ses attributions.

La France est dans le « top 10 » mondial des puissances économiques, mais pour combien de temps encore ? En effet, notre pays se situe dans le même temps dans le « top 30 » des pays dont le poids administratif est le plus élevé selon le classement du Forum économique mondial, cité dans le rapport.

Si je fais référence à ce type de classement, ce n’est pas par masochisme, mais parce qu’il détermine certaines décisions en matière de localisation de la production, et donc en matière de création d’emplois et de valeur ajoutée.

Les causes de ce mauvais classement sont connues et s’expliquent notamment par une instabilité réglementaire et l’insécurité juridique qui en découle, par des arbitrages gouvernementaux puis législatifs pris en l’absence d’études d’impact – il existe en effet un contournement possible de cette procédure via le dépôt d’amendements, qui permet d’échapper aux contraintes constitutionnelles – et, naturellement, par une surtransposition régulière des directives européennes, phénomène pour lequel il y aurait bien des exemples à donner, en matière agricole en particulier.

Si je le dis, ce n’est pas pour faire du poujadisme facile ! Certains pensent, détournant ainsi la citation de Sartre, que l’enfer, ce n’est pas les autres, mais les normes ! Je serai plus nuancé, parce que je distingue la bonne de la mauvaise norme. La norme n’est pas mauvaise en soi, mais ses modalités d’application sont parfois kafkaïennes.

De même, je ne ferai pas le procès de la multiplication des codes. Disposer d’un code est utile dans la mesure où cela permet de rassembler l’ensemble des règles applicables. Certains de nos voisins n’utilisent pas ce type de recueil, ce qui oblige à chercher les règles applicables dans diverses sources.

Comme le rappelle Philippe Lentschener dans son livre intitulé Marque France, livre que je vous recommande et qui reprend certaines des préconisations qui figuraient dans son rapport au Gouvernement, la norme peut aussi être un standard de qualité.

Notre histoire économique nationale est intimement liée à ce constat. Prenons un exemple concret : normer le point sellier Hermès revient à valider un savoir-faire. La France, c’est avant tout la patrie de l’amour des gestes et des savoir-faire. C’est ce qui caractérise notre roman économique national et ce qui fait que la « marque France » véhicule quelque chose de positif à l’international.

De la même façon, normer un processus en matière administrative revient à garantir et à fiabiliser une procédure. Je le répète, une norme n’est pas mauvaise en tant que telle ; ce sont les modalités de sa mise en œuvre qui méritent souvent d’être revisitées. Sur cette question, le rapport de la délégation propose à la fois une méthode et un contenu.

Une fois ce constat posé, reconnaissons que de nombreux créateurs, entrepreneurs, chefs d’entreprise de TPE, de PME et d’ETI dans nos territoires – cela doit être la même chose en Lorraine, monsieur le secrétaire d'État – sont lassés de devoir jongler avec ce qui ne constitue pas le cœur de leur métier.

Évidemment, une entreprise du CAC 40 dispose d’une armada de conseils et d’avocats pour amortir le choc de complexification. Ce n’est pas le cas en revanche des plus petites structures. Or c’est dans ces petites entreprises que résident des gisements d’emplois et de croissance considérables.

Dans un tel contexte, ce gouvernement qui « aime l’entreprise » a annoncé sortir l’artillerie lourde en 2013. On allait voir ce qu’on allait voir ! En réalité, avouons-le, on n’a pas vu grand-chose…

Certes, Guillaume Poitrinal et Laurent Grandguillaume ont plutôt fait du bon travail au sein du Conseil de la simplification pour les entreprises en procédant à un toilettage méthodique des normes et en avançant des propositions de bon sens, comme l’extension du titre emploi service pour les entreprises d’un à dix-neuf salariés.

Toutefois, « l’optimisme de la volonté » invoqué hier par Jean-Vincent Placé à l’Assemblée nationale dans sa réponse à une question sur la simplification ne suffit pas ! J’en veux pour preuve les témoignages que nous recevons ou les expériences que nous vivons au quotidien.

Mes chers collègues, pour ne pas être partial, je vais prendre le seul et unique commentaire posté sur le dernier article du site gouvernemental www.simplifier-entreprise.fr.

Qu’écrit M. Guérin, artisan en menuiserie dans le Morbihan ? « Je n’en peux plus des nouvelles complications administratives qui nous sont imposées sans explication et surtout sans interlocuteurs compétents et joignables !!! Tout semble fait pour que toutes ces tâches administratives et juridiques ne puissent être réalisées par notre secrétaire mais confiées à des logiciels coûteux ou à des cabinets comptables qui se créent des rentes et grèvent les budgets des TPME comme la mienne… Quelle énorme déception cette soi-disant SIMPLIFICATION ! »

Alors, en effet, mettons-nous à la place de M. Guérin !

Que vaut le principe selon lequel le « silence vaut acceptation » lorsqu’il faut continuer à se renseigner pour savoir si l’on entre dans l’une des 3 600 procédures éligibles ou au contraire dans l’une des 1 200 autres qui ne le sont pas ?

Que vaut la simplification face à l’impératif de mise en place du compte de prévention pénibilité ? Nous ne renions pas le concept de pénibilité, puisque nous en avons été à l’origine et l’avons inscrit dans le droit lors des réformes des retraites Woerth et Fillon. Simplement, les modalités retenues ne conviennent pas ! Parlez avec M. François Asselin de ce que cela représente dans la vie concrète d’une entreprise comme la sienne. Il est intarissable sur le sujet !

Que vaut enfin la simplification face à l’impératif de mise en place du prélèvement à la source, qui plus est lorsque l’on sait que la déclaration sociale nominative n’est pas totalement digérée ?

Alors que notre assemblée suspend aujourd’hui ses travaux en séance publique et que nous arrivons, en fait, au terme de la mandature 2012-2017, cela doit nous inciter à réfléchir aux voies et moyens pour parvenir à une réelle simplification, laquelle pourrait être débattue par le nouveau Parlement dès l’été prochain, et cela dans un esprit transpartisan, à l’image de la réforme budgétaire qu’avaient portée MM. Lambert et Migaud.

Le rapport le montre très bien, nos voisins britanniques et allemands ont réussi leur désinflation normative. C’est également à notre portée, mes chers collègues, mais il faut peut-être pour cela simplifier la simplification !

Le test PME constitue une très bonne idée, mais il existe d’autres mesures à mettre en œuvre prioritairement. Voilà quelques propositions simples.

Tout d’abord, il faudrait muscler les fonctions d’évaluation et de contrôle du Parlement. J’ai eu la chance de vivre dans la cabine de pilotage la révision constitutionnelle de 2008. À l’époque, j’ai vu de hauts responsables au Parlement refuser de se doter des moyens d’exercer un véritable pouvoir d’évaluation et de contrôle. Nous aurions pourtant vraiment besoin de ces moyens pour discuter sérieusement des études d’impact.

Ensuite, la simplification doit devenir une hygiène de vie, un réflexe à tous les étages de l’administration. Il y a des hauts fonctionnaires de défense et de sécurité. Nommer un fonctionnaire de simplification dans chaque ministère me paraîtrait sain et permettrait d’animer un réseau, non seulement au niveau de l’administration centrale, mais également au niveau des services déconcentrés. Les auteurs du rapport proposent d’ailleurs que les secrétaires généraux des préfectures puissent fournir des retours d’expérience sur les procédures mises en place et la meilleure façon de les simplifier. Le haut fonctionnaire de simplification pourrait typiquement remplir ce rôle.

Ces dix dernières années, un grand nombre de Premiers ministres ont rédigé des directives appelant à la simplification. Mais, en réalité, ces directives ne sont pas toujours suivies d’effet. Une volonté déterminée à la fois politique et administrative est donc nécessaire.

Parmi les autres pistes à creuser figure la possibilité de créer des normes à durée de vie limitée. En 2005, nous avions créé des commissions à durée de vie limitée afin de pouvoir nous réinterroger régulièrement, tous les cinq ans, sur leur utilité.

On peut également imaginer une nouvelle méthode de transposition des directives, comme la transposition immédiate et littérale de celles-ci dans une partie provisoire du code avant de procéder à leur transposition raisonnée et plus approfondie.

Monsieur le président, je vois que le temps s’écoule vite et j’en appelle donc à votre mansuétude et à l’application de la jurisprudence Bricq !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Baptiste Lemoyne

Pour terminer donc, j’évoquerai la nécessité d’une administration orientée « service client ». La dématérialisation entraîne beaucoup de gains de productivité. Les personnels pourraient donc être « recyclés » en front office pour délivrer des conseils et un accompagnement aux chefs d’entreprise, mais aussi aux citoyens et aux administrés, plutôt que de les cantonner à « surveiller et punir », pour reprendre le titre de l’ouvrage de Michel Foucault.

Parvenir à ce résultat, cela veut dire que l’on garantit à chacun en France un droit à entreprendre aisément, faculté combinée à notre tradition nationale faite de savoir-faire et d’excellence. Si nous y arrivons, la France sera créatrice de valeur comme jamais auparavant, et la « marque France » rayonnera de nouveau !

La tâche est ambitieuse, la mission est ardue, mais passionnante. Relevons le défi tous ensemble : c’est le serment que nous pouvons prêter à l’aube de la prochaine législature !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, de l'UDI-UC et du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

La parole est à M. Martial Bourquin, pour le groupe socialiste et républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, le choc de simplification annoncé par le Président de la République en 2013 représente l’un des chantiers prioritaires de ce quinquennat. Il a pour vocation de relancer l’activité économique dans notre pays.

Cette simplification administrative est largement attendue par l’ensemble des acteurs économiques et, plus particulièrement, par les petites et moyennes entreprises et les très petites entreprises, si indispensables à nos territoires, que ce soit en milieu rural ou en milieu urbain.

Or une étude menée par IPSOS et American Express en avril 2014 montre que 32 % des dirigeants de PME et de TPE ont comme premier souhait, loin devant tous les autres, d’être accompagnés dans la gestion des formalités administratives. Ces mêmes dirigeants estiment qu’il leur manque trois heures et dix-huit minutes en moyenne par jour pour accomplir leurs missions quotidiennes, dont près de la moitié concernent des tâches administratives !

La simplification est donc un véritable enjeu pour les PME et TPE, et, plus généralement, pour l’ensemble de l’activité économique française. On sait en effet que ces entreprises représentent 38 % du chiffre d'affaires global de notre pays, 49 % de la valeur ajoutée et 43 % de l'investissement.

Nous le savons, cet enjeu n’est pas franco-français. Il concerne l’ensemble de l’Union européenne, puisque la Commission européenne estime qu’une réduction de 25 % des charges administratives pesant sur les entreprises permettrait une augmentation de 0, 8 % du produit intérieur brut européen à court terme et de 1, 4 % à plus long terme.

Loin de vouloir vous assommer de chiffres, je voulais simplement que l’on prenne acte de la prise en compte par le Gouvernement des difficultés rencontrées par les PME et TPE, d’une part, et de l’importance de ces entreprises dans l’activité économique, d’autre part.

Parfois, il est utile de retirer les lunettes de l’idéologie et, quand les choses vont dans le bon sens, de s’en féliciter ensemble ! J’ai entendu le numéro deux du Conseil national de l’industrie déclarer qu’il y avait un début de choc de simplification. Quand les choses avancent dans le bon sens, disons-le : cela ne nous écorchera pas la bouche !

Sur la base de ces deux éléments indiscutables, je vais revenir sur trois exemples de mesures.

Premier exemple, la déclaration sociale nominative : elle fait économiser à elle seule 3, 5 milliards d’euros par an aux entreprises. Cette déclaration unique et dématérialisée remplace vingt-quatre déclarations sociales : déclarations à l’URSSAF, attestations employeur destinées à Pôle emploi, attestations de salaire, etc.

Deuxième exemple, l’allégement des obligations comptables, qui s’adresse directement aux très petites entreprises. Plus de 3, 7 millions de microentreprises sont concernées par la suppression de l’annexe aux comptes annuels. De même, le Gouvernement a décidé la généralisation des états financiers simplifiés pour 170 000 entreprises. Il existe désormais une garantie « zéro charge nouvelle » pour les enquêtes statistiques, mesure prise à la demande du Conseil de la simplification pour les entreprises en 2014.

Troisième exemple, le titre emploi service, qui lève les freins à l’embauche en réduisant à la fois les charges administratives et le coût pour les entreprises. Ce dispositif fait l’objet d’un premier élargissement, afin de couvrir les cotisations des entreprises employant entre un et dix-neuf salariés.

Je me permets d’insister aussi sur le dispositif des marchés publics simplifiés, expérimentés depuis le mois d’avril 2014 dans le cadre du programme « dites-le-nous une fois », ayant rédigé, dans le cadre de la mission commune d’information présidée par Philippe Bonnecarrère, le rapport Passer de la défiance à la confiance : pour une commande publique plus favorable aux PME.

Grâce à ce dispositif, les entreprises peuvent se porter candidates à un marché public en ne transmettant que leur numéro SIRET. Ainsi, le décret n° 2014-1097 du 26 septembre 2014 prévoit que « les candidats ne sont pas tenus de fournir les documents et renseignements que le pouvoir adjudicateur peut obtenir directement par le biais d'un système électronique de mise à disposition d'informations ».

Toutes ces mesures cumulées nous autorisent à dire que les choses vont dans le bon sens !

On estime que les marchés publics simplifiés font gagner aux entreprises candidates deux heures en moyenne par marché et permettent de dégager une économie de 5 millions d’euros par an. Depuis le lancement du dispositif, 15 000 marchés publics simplifiés ont été publiés et 55 000 candidatures simplifiées enregistrées. Cela représente 15 000 acheteurs publics impliqués dans le développement de la simplification de l’accès des PME et TPE à la commande publique. La procédure simplifiée entraîne sans conteste un gain de temps et d’argent pour les PME et TPE.

Il est également à noter que l’augmentation du seuil en dessous duquel les entreprises sont mises en concurrence est de 25 000 euros. La mission commune d’information proposait que ce seuil soit porté à 40 000 euros. Je faisais le point sur ce qui se passe dans l’ensemble de l’Union européenne : le seuil pour les marchés simplifiés se situe en moyenne à hauteur de 60 000 euros…

Pour progresser, il faut éviter toute surtransposition des directives européennes. Cette recommandation a été respectée en matière de marchés publics.

J’ajoute que nous ne devons pas perdre de vue que les délais de paiement, véritable cancer pour nos entreprises, doivent également être optimisés. Monsieur le secrétaire d'État, je sais que Bercy et la DGCCRF, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, ont pris des mesures très dures à l’égard de certains donneurs d’ordres.

M. le secrétaire d'État opine.

Debut de section - PermalienPhoto de Martial Bourquin

Nous pourrions enfin aborder le rôle des banques ou celui de la fiscalité. Sur ce dernier sujet, les chefs de PME et de TPE que nous avons rencontrés ont été nombreux à nous dire que le CICE constituait une importante avancée.

Surtout, si nous voulons garder nos entreprises, nous devons créer des écosystèmes productifs, qui permettent aux donneurs d’ordres et aux petites et moyennes entreprises de travailler ensemble, et à la France d’avoir un socle industriel robuste, afin qu’elle puisse rester parmi les pays dont l’économie est suffisamment solide pour faire face à la mondialisation qui nous est imposée.

Sur ces questions, reconnaissons-le entre nous, mes chers collègues, les choses avancent : même s’il y a encore beaucoup à faire, le Gouvernement les a prises en main !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.

Debut de section - Permalien
Christian Eckert

Monsieur le président, madame la présidente de la délégation, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je ferai trois remarques préliminaires.

Première remarque, je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de Jean-Vincent Placé, qui est en effet en route pour le Viêt Nam et qui ne peut donc être parmi nous ce matin, ce qu’il regrette profondément. Ne voyez donc dans son absence aucune frilosité de sa part.

Deuxième remarque, je voudrais rebondir sur ce que vient de dire Martial Bourquin. On peut toujours répéter qu’il y a encore beaucoup de travail à faire. Bien sûr, mais le nombre d’items cités ce matin montre bien que de nombreux progrès ont été accomplis. Valorisons ce qui a été fait sans perdre de vue, bien entendu, le chemin qu’il reste à parcourir !

Je n’aurai pas le temps de développer tous les sujets, mais je voudrais rappeler quelques-unes des mesures prises, dans mon domaine d’activité en particulier : la facturation électronique, la dématérialisation, le télépaiement, la DSN, le programme « dites-le-nous une fois », le principe « silence vaut acceptation », l’uniformisation d’un certain nombre de déclarations fiscales, avec le CESU, le chèque emploi service universel, par exemple…

Il faut le reconnaître, ces dernières années, et je le dis sans aucun esprit polémique, nous avons accompli de grandes avancées en matière de simplification.

Notre débat est centré sur les entreprises. Ma troisième remarque consistera cependant à dire que les économies faites par les entreprises grâce à la simplification s’accompagnent la plupart du temps d’économies pour nos administrations. La mise en œuvre de procédures dématérialisées est profitable pour l’entreprise, mais aussi pour l’administration ! Les économies liées à la simplification sont faites dans l’intérêt commun.

Comme l’a indiqué M. Watrin, la simplification va également bien souvent dans le sens de l’intérêt des salariés, pour parler de l’entreprise, et dans celui de nos concitoyens, pour parler plus généralement.

La mise en place des déclarations d’impôt en ligne, plus aisées et conviviales – mot qui peut faire sourire, s’agissant d’impôts, et je le prononce d’ailleurs toujours en souriant –, constitue un gain de temps pour nos administrations comme pour nos concitoyens. Qui n’a pas passé un après-midi à rechercher les justificatifs nécessaires pour remplir sa déclaration d’impôt ? Aujourd'hui, les choses sont tout de même beaucoup plus simples avec les déclarations préremplies !

Mon collègue Jean-Vincent Placé a souvent eu l’occasion d’échanger avec votre délégation aux entreprises. Votre intérêt renouvelé pour la simplification en faveur des entreprises témoigne d’un enracinement de la politique de simplification dans les mœurs administratives et politiques. C’était d’ailleurs le vœu formé par le Président de la République lors du lancement du choc de simplification, voilà maintenant près de quatre ans.

Le Gouvernement a toujours conçu la simplification comme un mouvement permanent en faveur de la compétitivité de notre pays. La simplification n’est pas un élément accessoire des politiques publiques. Bien au contraire, il s’agit d’une politique structurelle qui stimule l’activité économique, en rendant les procédures plus rapides et plus aisées, sans diminuer les protections ou les droits essentiels des entreprises, des salariés ou des particuliers.

À la différence de ce que certains souhaiteraient, simplifier n’est pas déréguler ou porter atteinte à la santé et à la sécurité de nos concitoyens, ou encore à l’environnement. Simplifier, dans un environnement international toujours plus compétitif, c’est s’attacher à démêler les nœuds complexes qui entravent souvent les entreprises, notamment les plus petites.

Le Gouvernement n’a jamais entendu conduire cette politique de simplification seul, sans concertation avec les acteurs économiques. Appuyé par le Conseil de la simplification pour les entreprises, il a fait reposer les réformes sur deux axes simples et originaux.

Le premier axe est le recours à une méthode collaborative permanente : la création du Conseil de simplification pour les entreprises en janvier 2014 a associé chefs d’entreprise, élus, experts et hauts fonctionnaires. Elle a permis d’engager un travail réaliste, pragmatique, concret, de nature à simplifier la vie des entrepreneurs.

Le second axe se caractérise par la présentation d’un plan d’action qui s’accompagne toujours d’un calendrier. Chaque mesure fait l’objet d’un suivi depuis son annonce jusqu’à sa mise en œuvre, ce qui garantit l’efficacité de notre démarche et évite de voir une bonne idée s’évanouir dans la nature, même si l’on peut toujours relever, ici ou là, telle ou telle insuffisance.

Notre méthode se caractérise également par l’attention accordée à la transparence : la mise en œuvre de l’ensemble des mesures proposées dans le cadre de la simplification fait donc systématiquement, je l’ai dit, l’objet d’un suivi.

Elle se caractérise enfin par un chiffrage solide et étayé des effets de la réforme : l’étude du cabinet d’audit EY commandée à l’automne 2016 par le Conseil de la simplification pour les entreprises estime à plus de 5 milliards d’euros le gain net réalisé par les entreprises grâce à notre programme de simplification.

Sur ces 5 milliards d’euros, 3, 5 milliards d’euros sont dus à la mise en place de la déclaration sociale nominative, mesure qui m’est particulièrement chère, et dont j’ai coutume de dire qu’elle représente une véritable révolution.

Puisque certains ont parlé du prélèvement à la source, je précise que la DSN est un facteur essentiel dans la réussite de la mise en œuvre de cette mesure. D’ailleurs, je le dis régulièrement, la DSN n’est ni de gauche ni de droite ! Elle a été mise en place bien avant l’arrivée du gouvernement actuel et sera maintenue au-delà des échéances électorales à venir, quelle que soit la majorité qui sortira des urnes. La DSN, qui remplace foultitude de déclarations manuelles, constitue un véritable progrès.

Certes, comme certains l’ont souligné, son déploiement n’est pas encore achevé. Toutefois, nous nous trouvons dans la phase 3. J’aurai l’occasion de communiquer sur le sujet dans les prochains jours.

Aujourd'hui, plus de 1, 3 million d’entreprises, évidemment les plus grandes, qui emploient une part déjà considérable des salariés, bénéficient d’ores et déjà de la DSN, laquelle, je le rappelle, relie toutes les entreprises à l’ensemble des organismes de collecte des cotisations, et bientôt de collecte d’impôts grâce au prélèvement à la source. Il s’agit donc bien d’une « révolution » !

Je le répète, cette mesure a représenté une économie de 3, 5 milliards d’euros. Je reviens sur le chiffrage : il a été réalisé par un cabinet totalement indépendant du Gouvernement, et ce à la demande non pas du Gouvernement, mais du Conseil de la simplification pour les entreprises. De plus, il a été conduit selon la méthode du Standard Cost M odel, reconnue par l’OCDE, utilisée par nos partenaires européens et d’ailleurs citée dans le rapport de votre délégation.

Vous vous interrogez également, à juste titre, sur le flux des nouvelles mesures. La propension à créer de nouvelles normes, dont certaines sont parfois nécessaires, par voie d’amendement, me semble assez largement partagée, y compris par les parlementaires.

Il serait vain de s’attaquer au stock sans œuvrer à la réduction du flux : c’est probablement le volet le plus difficile de l’action de simplification, tant la tentation est grande de réguler ou de modifier la réglementation, pour les administrations comme pour les politiques.

Comme vous le savez, j’ai plus particulièrement suivi les lois de finances, comme député, en particulier comme rapporteur général, puis comme secrétaire d'État, depuis près de cinq ans. J’ai pu mesurer combien la tentation était grande d’apporter un soutien à des secteurs donnés par le biais de la fiscalité et de nouveaux dispositifs qui conduisent, la plupart du temps, à davantage de complexité… Le Gouvernement n’est pas le dernier responsable de cette situation, mais, reconnaissons-le, les parlementaires y contribuent également largement.

Pour remédier à cette tendance générale, nous avons mis en place un « atelier impact entreprises », qui se saisit en amont des projets de loi et de décret. Cet atelier a déjà permis des avancées significatives. Je pense notamment à la réglementation en matière d’enquête publique ou de performance énergétique. Cette méthode mérite à l’évidence d’être renforcée.

Notre méthode de simplification a donné des résultats concrets : plus de 460 mesures pour les entreprises ont déjà été annoncées depuis le début du choc de simplification, outre les mesures prises à destination des particuliers et des collectivités. C’est considérable. Certaines de ces mesures sont législatives, d’autres réglementaires, d’autres enfin découlent de simples évolutions des processus de gestion. Toutes ont été élaborées en concertation totale avec les acteurs concernés. Les énumérer de façon exhaustive se révélerait particulièrement fastidieux. Je me bornerai à citer quelques exemples.

En ce qui concerne l’innovation, nous avons clarifié les règles en matière de propriété intellectuelle, à travers un guide de bonnes pratiques. J’évoquerai également la simplification du droit des marchés publics, la charte de non-rétroactivité fiscale, que nous avons signée en 2014 avec Michel Sapin et qui est respectée, la création et le développement de nouveaux rescrits, comme le rescrit de branche, le titre emploi service entreprise, la simplification des règles de qualification professionnelle, la déclaration sociale nominative ou encore la simplification de l’emploi des apprentis en matière de travaux dangereux.

Je ne résiste pas à l’envie de vous rappeler quelques exemples de ce que nous avons fait en matière fiscale et douanière pour les entreprises.

Je pense tout d’abord à l’instauration du « moment déclaratif unique », qui permet un alignement sur la déclaration d’impôt sur les sociétés, au début du mois de mai, pour la taxe sur la valeur ajoutée et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Cette réforme, qui était réclamée par les experts-comptables, est en œuvre.

Par ailleurs, il sera procédé, dès l’an prochain, à la centralisation de la déclaration et du paiement de la taxe sur les surfaces commerciales, la TASCOM, impôt dont la gestion était jusqu’à présent difficile pour les entreprises comptant beaucoup de grandes surfaces. Cela fait 400 imprimés en moins !

Je mentionnerai également la fin des déclarations spécifiques d’une dizaine de crédits d’impôt, dont le CICE, reportées vers les déclarations principales.

Pour le CICE, les entreprises remplissent désormais leur déclaration de résultat, sans autre formalité. Elles peuvent, dès le 1er janvier, télédéclarer leur impôt sur les sociétés, ce qui implique qu’elles peuvent, dès cette date, demander leur CICE, au lieu d’attendre le mois de mai. Cela leur est favorable en termes de trésorerie.

En outre, nous avons étendu le télérèglement à la matière douanière, notamment pour les impôts qu’elle recouvre, comme la taxe spéciale sur certains véhicules routiers, la TSVR, anciennement dénommée « taxe à l’essieu ».

Enfin, pour les entreprises important et exportant des biens, nous avons facilité les régimes dits de suspension de droits et de taxes, en supprimant toutes les formalités et cautions inutiles.

J’arrête là cette énumération, pour mieux me concentrer sur un chantier emblématique auquel votre assemblée ne manquera pas d’accorder une attention toute particulière : la prise en compte des petites entreprises dans la politique de simplification.

C’est un enjeu essentiel, car les PME sont le poumon économique de la France et représentent un ensemble de talents remarquables que nous devons protéger, valoriser et développer. Or les PME sont souvent aussi – vous ne me démentirez pas sur ce point – les plus exposées à la complexité.

C’est pour cette raison que nos actions en faveur des petites entreprises se sont concentrées, en priorité, selon trois axes.

En premier lieu, nous nous attachons à alléger les obligations sociales et comptables de tous ordres qui pèsent sur elles. À titre d’exemple, depuis avril 2014, les très petites entreprises n’ont plus à établir l’annexe aux comptes annuels. Cette mesure concerne un million de microentreprises, de moins de dix salariés. En outre, les petites entreprises de moins de cinquante salariés ont la possibilité d’établir des états simplifiés. On estime l’économie engendrée pour les entreprises concernées à 1, 1 million d’heures de travail. Je pourrais également évoquer la réduction des enquêtes statistiques pour les petites entreprises, à laquelle nous avons travaillé avec l’INSEE.

En deuxième lieu, au-delà de ces allégements importants de procédures, le Gouvernement a œuvré à garantir une meilleure sécurité juridique, via le développement du rescrit, par exemple. De la même manière, nous avons demandé à la Direction de la législation fiscale qu’elle publie ses circulaires fiscales à périodicité fixe, le premier mercredi de chaque mois, et ce afin d’éviter aux TPE et aux PME de se livrer à une veille juridique fastidieuse et coûteuse pour être informées des dernières évolutions de la réglementation.

En troisième lieu, outre les mesures sectorielles que nous promouvons, un axe important de notre action en faveur des petites entreprises consiste en la facilitation des formalités d’embauche. Ainsi, nous avons pris des mesures « apprentis » permettant de lever les freins à l’embauche rencontrés par les apprentis mineurs, qui ne pouvaient être facilement recrutés pour des travaux en hauteur ou sur des machines dangereuses. Je citerai également le simulateur des coûts d’embauche. Cet outil numérique innovant développé par notre administration, malheureusement méconnu, permet en quelques « clics » de connaître le coût total d’un salarié, qu’il s’agisse d’un salarié en contrat à durée indéterminée ou d’un apprenti.

Les mesures que je viens d’évoquer n’épuisent bien entendu pas le champ de la politique de simplification. En collaboration avec les acteurs économiques, nous continuons de travailler sur des dispositions en faveur des petites entreprises, particulièrement dans le domaine de l’innovation, à travers le dispositif France Expérimentation, dont les lauréats seront présentés le mois prochain.

Simplifier, sécuriser, faciliter : tels sont les trois mots d’ordre de l’action du Gouvernement s’agissant des entreprises. L’exercice est souvent difficile, mais nous demeurons convaincus de son efficacité pour développer notre tissu productif, assurer le rayonnement international de nos entreprises et renforcer l’attractivité de notre territoire.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Hermeline Malherbe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Nous en avons terminé avec le débat sur le bilan du « choc de simplification » pour les entreprises.

Debut de section - PermalienPhoto de Thierry Foucaud

Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il a été saisi le 23 février 2017, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante sénateurs, de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.

Le texte de la saisine est disponible au bureau de la distribution.

Acte est donné de cette communication.

Mes chers collègues, l'ordre du jour de ce matin étant épuisé, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Gérard Larcher.