Notre Assemblée a été saisie d'un texte qui comprenait cinquante-neuf articles. Elle en a ajouté cent quatre-vingt-quatre et supprimé un (l'article 19), adoptant le texte en première lecture le 17 novembre dernier.
Le Sénat, pour sa part, a adopté cent vingt-six articles conformes et a maintenu la suppression de l'article 19. Il a supprimé par ailleurs vingt-neuf articles, en a modifié quatre-vingt-sept et en a ajouté cent soixante-neuf, adoptant hier le texte en première lecture.
Notre commission mixte paritaire est donc chargée d'élaborer un texte sur les deux cent quatre-vingt-cinq articles restant en discussion.
Si vous en êtes d'accord, je donnerai d'abord la parole au président Raynal, puis nous entendrons Jean-François Husson, rapporteur pour le Sénat, et Laurent Saint-Martin, rapporteur pour l'Assemblée nationale, qui nous diront s'il leur paraît envisageable que la commission mixte puisse trouver un accord sur un texte.
Je remercie le président Woerth pour son accueil et salue nos collègues députés, que nous avons toujours plaisir à rencontrer lors de ces réunions destinées à trouver des points de convergence entre nos deux assemblées.
Je voudrais néanmoins souligner le défi que représenterait pour notre commission mixte paritaire de conclure un accord sur les deux cent quatre-vingt-cinq articles restant en discussion.
J'ai d'ailleurs noté que le Gouvernement, avant même le début de l'examen de ce texte en séance au Sénat, tout début novembre, mentionnait déjà le dépôt d'amendements en nouvelle lecture devant l'Assemblée nationale, anticipant sans doute un échec de nos travaux. Une réussite serait donc presque vécue comme un contretemps !
Quoi qu'il en soit, comme vous le savez, les annonces gouvernementales se sont multipliées ces dernières semaines pour compléter le plan de soutien - concernant le fonds de solidarité, l'aide aux travailleurs précaires, la garantie jeunes, etc. - sans que nous n'en ayons encore vu la traduction budgétaire devant nos assemblées.
Celle-ci pourrait sans doute porter sur la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire qui n'est à ce jour pas dotée de crédits pour 2021. Je forme donc le voeu qu'après notre commission mixte paritaire - je n'ose dire son échec - et la prise en compte d'un certain nombre d'apports du Sénat par nos collègues députés, les annonces gouvernementales se concrétisent rapidement pour que le Parlement puisse enfin en délibérer.
Je salue nos collègues députés. À l'issue de son examen par nos deux assemblées, le projet comporte un nombre très significatif d'articles. D'un point de vue global, nous avons regretté qu'avant l'épidémie, le Gouvernement n'ait pas réalisé les efforts nécessaires pour redresser les comptes publics afin que la France retrouve des marges de manoeuvre budgétaires tant que les indicateurs économiques étaient encore au vert et puisse ainsi se préparer à toute nouvelle crise. Nous y sommes désormais, et sans doute pour un long moment...
Ce projet de loi de finances, qui devait être celui de la relance et du « budget vert », a beaucoup évolué à la suite de la deuxième vague et du reconfinement, avec de nouvelles prévisions macroéconomiques dont l'impact a été intégré au Sénat, à l'article liminaire et à l'article d'équilibre.
Finalement, l'urgence est encore au soutien aux ménages et au tissu économique : M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, nous a d'ailleurs annoncé vouloir « recharger » certains dispositifs au cours de la nouvelle lecture - ce qui, vous en conviendrez, n'augure rien de bon sur la réussite de notre commission mixte paritaire. Le Sénat ne peut que déplorer ce calendrier, même s'il s'explique par le contexte tout à fait particulier.
Au-delà, le plan de relance du Gouvernement nous est apparu trop tardif et mal calibré ; et il ne s'imprègne ni ne s'appuie suffisamment sur la réalité de nos territoires.
Il ne faut pas non plus, je pense, perdre de vue l'impact qu'auront toutes nos décisions sur l'état de nos finances publiques à moyen terme.
À ce titre, les nombreuses mesures pérennes du plan de relance constituent une indéniable faiblesse, alors qu'il eût fallu privilégier davantage des mesures temporaires, puissantes et bien ciblées pour favoriser la sortie de crise.
Concrètement, je rappellerai juste qu'il faudra déjà réaliser environ 75 milliards d'euros d'économies en sortie de crise simplement pour ramener le déficit structurel à son niveau de 2019, c'est-à-dire 2,2 points de produit intérieur brut.
De même, l'État se finance désormais autant par l'endettement que par l'impôt ; vous en conclurez facilement que, si les taux remontaient, l'effort à produire pourrait s'avérer insurmontable.
Au-delà de ces dispositions générales, le Sénat a modifié, inséré ou supprimé bon nombre de mesures en première lecture. Je ne vais pas toutes les mentionner, bien sûr, et concentrerai mon propos sur quelques-unes d'entre elles.
Je commencerai par le plan de relance, que nous avons souhaité compléter pour qu'il puisse mieux porter ses fruits à court terme, en proposant notamment, pour les entreprises, le report en arrière des déficits dans la limite de 5 millions d'euros, l'amélioration des coefficients d'amortissement dégressif ainsi que des dispositifs spécifiques de suramortissement. Nous avons également souhaité renforcer la réduction d'impôt sur les sociétés pour les petites et moyennes entreprises (PME), par rapport au dispositif adopté à l'Assemblée nationale.
Nous proposons aussi de rendre contemporains les versements du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA), afin de soutenir l'investissement local.
Le Sénat a également voulu renforcer l'aide aux plus précaires et à celles et ceux qui se trouvent le plus en difficulté face à la crise, avec par exemple l'adoption d'une aide à l'embauche pour six mois supplémentaires, un fonds de solidarité renforcé pour mieux couvrir les charges fixes, ou encore le prolongement pour un an du plafond à 1 000 euros de la réduction d'impôt au titre des dons dit « dispositif Coluche ».
De nombreuses mesures visent aussi à soutenir les secteurs économiques les plus touchés, dans le domaine de la culture notamment.
J'en viens maintenant aux finances des collectivités territoriales : je dirais presque que c'est le « morceau de choix ».
Parce que les entreprises, et notamment celles du secteur industriel, doivent voir leur niveau d'imposition se réduire pour rester compétitives, le Sénat n'a pas souhaité revenir sur la réforme des impôts de production. Mais il importe aussi d'assurer une juste et pérenne compensation aux collectivités territoriales et c'est la raison pour laquelle le Sénat a prévu une compensation de la perte de recettes de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour les départements et le bloc communal, identique à celle mise en oeuvre par le Gouvernement pour les régions.
En outre, nous avons souhaité reconduire en 2021 le mécanisme de garantie des ressources fiscales et domaniales du bloc communal initialement prévu dans la troisième loi de finances rectificative pour 2020.
Par ailleurs, nous nous sommes opposés à la modification des règles de calcul et d'évolution des fractions de TVA versées aux départements et aux établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), en compensation des pertes de recettes résultant de la réforme de la taxe d'habitation. Le Gouvernement y voit un effet d'aubaine ; nous y voyons un État qui revient sur sa parole.
Au nom de la solidarité nationale, le Sénat a également créé deux contributions exceptionnelles visant, d'une part, les assureurs, en raison du faible taux de sinistralité enregistré pendant le confinement, et, d'autre part, les grandes plateformes de vente à distance, compte tenu de l'incroyable opportunité qui s'est offerte à eux avec la fermeture des commerces physiques pendant le confinement.
Je m'attarderai d'ailleurs un peu plus longuement sur le rôle des assureurs dans le traitement de la crise épidémique, au regard des dernières actualités sur ce sujet.
À long terme, me semble-t-il, seule une couverture assurantielle applicable au risque sanitaire et une répartition des responsabilités entre les assureurs, d'une part, et l'État, d'autre part, sont susceptibles de garantir la sécurité de nos entreprises. Tel est l'objet de la proposition de loi que le Sénat a adoptée dès juin dernier et que nous avons réintroduite dans la seconde partie du projet de loi de finances.
Dans cette perspective, les récentes annonces de M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance - que nous n'avons pas eu la chance d'accueillir pendant nos travaux - sur l'exclusion d'une future assurance pandémie ne sauraient nous satisfaire, en dépit de ce qu'il avait pu affirmer à l'occasion du reconfinement et alors qu'un groupe de travail, assorti d'une consultation publique, a réfléchi ces derniers mois à la mise en place d'une telle couverture assurantielle.
La proposition d'un dispositif facultatif pour les entreprises, reposant sur une incitation fiscale à constituer des provisions, ne permettra de mettre à l'abri que les entreprises qui pourraient éventuellement avoir les moyens de le faire.
Dans l'immédiat, ces réflexions n'épuisent pas complètement la question d'une contribution financière exceptionnelle des assureurs que le Gouvernement ne souhaite pas conserver dans le texte. Certes, en contrepartie, les assureurs ont annoncé le gel des cotisations en 2021 pour quelques-uns, mais il s'agit malheureusement d'un accord a minima.
Autre sujet : la fiscalité énergétique et écologique. Les mesures prises par le Gouvernement ne permettent pas véritablement d'accompagner le changement nécessaire.
Ainsi, la hausse du malus automobile sur trois ans, cumulée à la création du malus poids, intervient alors que le secteur automobile traverse difficilement la crise et que les ménages ne pourront pas tous adapter leur comportement d'achat. Il faut, selon nous, inciter les automobilistes à faire le choix de la transition écologique, sans tomber dans la fiscalité punitive - raison pour laquelle le Sénat préconise un étalement de la hausse du malus sur cinq ans, avec parallèlement un renforcement de la prime à la conversion.
Il faut parfois savoir entendre le Sénat, lorsqu'il dit qu'une trajectoire de hausse de fiscalité est trop brutale, au risque de ne pas obtenir l'adhésion des Français, ou lorsqu'il préconise certains aménagements pour rendre les dispositifs plus efficaces. Ainsi, dès l'an dernier, nous avions voté le maintien d'un soutien au financement des travaux de rénovation énergétique les plus lourds pour l'ensemble des ménages, y compris des derniers déciles, ainsi qu'une ouverture de ces aides aux propriétaires bailleurs. Après les avoir fermement combattues l'an dernier, le Gouvernement a intégré ces mesures dans son plan de relance...
Enfin, le Sénat s'est montré défavorable à certains projets de budgets prévus pour l'an prochain, rejetant ainsi les crédits des trois missions Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, Immigration, asile et intégration et Sport, jeunesse et vie associative, ainsi que du compte d'affectation spéciale Participations financières de l'État, faute de véritable stratégie de l'État actionnaire.
Compte tenu de ces éléments, je laisserai bien sûr M. Saint-Martin présenter son point de vue sur le texte transmis par le Sénat mais je crois que nos positions seront, cette fois, trop éloignées pour obtenir le même résultat que pour les derniers projets de loi de finances rectificative. Pour autant, si nous ne parvenons pas à un accord aujourd'hui, je formule le voeu que le plus grand nombre possible de mesures adoptées par le Sénat puissent utilement prospérer auprès de vous, chers collègues députés.
Je veux tout d'abord redire notre satisfaction mutuelle à savoir aboutir à un compromis quand cela est nécessaire, en cas d'urgence, comme nous avons su le faire à l'occasion de l'examen des projets de loi de finances rectificative successifs.
Le Sénat a achevé hier son examen du PLF pour 2021 et y a apporté des modifications substantielles. Comme cela ressortait déjà des propos de Jean-François Husson, nous serons hélas sans nul doute amenés à conclure rapidement que la CMP ne peut aboutir.
Je souhaite expliquer pourquoi il me semble inévitable que nous ne puissions aboutir, même si certains apports du Sénat me paraissent intéressants.
Le texte tel que voté au Sénat fait perdre de vue l'objectif premier du PLF ; nous constatons que le texte du Sénat porte un plan de relance et des missions budgétaires dénaturés, il s'agit aussi d'un texte avec moins de recettes et plus de dépenses. Je ne peux y trouver satisfaction, ni en matière budgétaire ni en matière fiscale.
En matière de fiscalité des entreprises, les propositions ne vont pas dans le sens de ce que nous avons proposé, pas plus que sur la fiscalité des ménages ou sur la fiscalité des collectivités territoriales.
En matière budgétaire, le rejet par le Sénat des crédits de trois missions non des moindres - Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, Immigration, asile et intégration et Sport, jeunesse et vie associative - et de deux comptes d'affectation spéciale - Développement agricole et rural et Participations financières de l'État - traduit un désaccord effectif.
Enfin, surtout, le plan de relance a été très largement modifié : ainsi, les crédits du programme Écologie de la mission Plan de relance ont été initialement divisés par deux au Sénat.
Notamment pour ces raisons, nous n'aboutirons pas ce soir.
Ceci étant posé, je tiens à saluer quelques avancées issues de l'examen au Sénat.
Deux mesures permettront de mieux lutter contre la crise sanitaire : la mise en place d'un taux zéro de TVA sur les vaccins et sur les tests pour le Covid-19 - et nous souhaitons d'ailleurs que le taux zéro sur les vaccins puisse s'appliquer dès 2021 ; la suppression du jour de carence pour les agents publics dont l'arrêt maladie est directement lié à l'épidémie de covid-19.
D'autres mesures me semblent aller dans le bon sens : la prolongation du dispositif Coluche renforcé avec un plafond de 1 000 euros en 2021, la mise en place d'un crédit d'impôt pour la sortie du glyphosate, le basculement en première partie du crédit d'impôt bailleur avec certaines avancées, la prolongation de l'annulation de la taxe sur les spectacles due au Centre national de la musique, l'extension temporaire du crédit d'impôt en faveur des investissements productifs outre-mer aux entreprises en difficulté, l'extension des exonérations fiscale et sociale des aides versées aux indépendants et à certaines professions libérales, l'aménagement de l'imputation fiscale des déficits transférés dans le cadre du régime de groupe, la création d'un régime de neutralité fiscale pour les fondations d'actionnaires reconnues d'utilité publique, la simplification des dispositions fiscales relatives aux prêts de titres financiers.
Attaché au dialogue, je proposerai donc que ces avancées soient préservées et consolidées en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale.
Un élément important pour finir : considérant la crise sanitaire telle qu'elle se déroule au jour le jour, nous savons que le Gouvernement sera sans doute conduit à proposer de relever certains crédits en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale, notamment ceux de la mission Plan d'urgence face à la crise sanitaire. Je tiens à ce que nos deux chambres, par l'intermédiaire des présidents et rapporteurs généraux de nos commissions des finances, soient dûment informées simultanément et dès que possible des intentions du Gouvernement une fois qu'il les aura fixées. On sait bien que nos nouvelles lectures respectives se déroulent rapidement, mais il me semble que cette année, eu égard à ce contexte et aux décisions que le Gouvernement doit encore nous soumettre, un effort d'information le plus en amont possible est nécessaire.
Parmi les mesures introduites par le Sénat que le rapporteur général de l'Assemblée nationale envisage de reprendre en nouvelle lecture, confirmez-vous que figurera l'article relatif au régime de fiscalité locale du centre d'enfouissement de Cigéo ? Il me semble que le Gouvernement avait appuyé cet amendement au Sénat...
Sous le contrôle du rapporteur général du Sénat, il me semble que le Gouvernement a émis un avis défavorable en séance sur l'amendement de notre collègue sénateur Gérard Longuet concernant Cigéo. Nous examinons ce sujet depuis bientôt quatre ans. À ce stade, il est possible que je dépose un amendement de suppression en nouvelle lecture mais je reste ouvert à la discussion sur ce sujet.
Je souhaite attirer votre attention sur l'article 54 sexies, supprimé par le Sénat, relatif aux tarifs de rachat d'électricité produite par les centrales photovoltaïques. Le rétablissement éventuel de cet article par l'Assemblée nationale aurait des conséquences défavorables pour les agriculteurs qui sont liés aux opérateurs par le moyen d'un bail à construction. En cas de réduction du tarif de rachat de l'électricité produite, les opérateurs pourraient dénoncer les baux à construction et ceci exposerait les agriculteurs au risque d'une reprise fiscale, en raison de l'autonomie du droit fiscal par rapport au droit civil. J'attire donc votre attention sur le risque que cela représenterait pour un certain nombre d'exploitations agricoles.
Il me semble que le rapporteur général de l'Assemblée nationale n'envisage pas de reprendre le moindre des nombreux apports du Sénat concernant le financement des collectivités territoriales. Pourtant, le Sénat a amélioré les clauses de sauvegarde des recettes en identifiant notamment le statut des régies qui, contrairement aux activités en délégation de service public, n'ont pas pu bénéficier du régime de l'activité partielle.
Concernant la métropole du Grand Paris (MGP), visée par l'article 61, les hypothèses d'évolution de la CVAE transmises par la direction générale des finances publiques (DGFiP) présentent des baisses très faibles : il ne faudrait donc pas prendre beaucoup plus aux territoires dont les dépenses sont certaines et touchent au quotidien.
Mes regrets sont nombreux. Cependant, comme ma collègue Christine Lavarde, j'insisterai sur les ressources des collectivités territoriales, qui importent particulièrement aux sénateurs.
Nous avons proposé la prorogation en 2021 du système de garantie des ressources mis en place pour 2020. Je crois le risque limité pour les finances publiques, les ministres indiquant eux-mêmes que les pertes attendues de CVAE seront moins fortes qu'estimées. Cependant, il s'agirait d'un signal envers les collectivités, afin de les rassurer et qu'elles s'engagent dans le plan de relance. Le bénéfice politique serait important, pour un risque financier faible : il me paraîtrait donc utile de faire un geste en ce sens lors de l'examen en nouvelle lecture.
Je me réjouis que certains apports du Sénat puissent être repris en nouvelle lecture, mais je regrette amèrement que le rapporteur général et la majorité n'entendent pas les justes commentaires du Sénat et de son rapporteur général sur la filière automobile. Dans un contexte difficile pour l'emploi, les deux hausses combinées du malus automobile constituent une erreur profonde. Le Sénat a trouvé les mots justes dans l'expression de son sentiment et nous devrions nous en inspirer.
En adoptant l'article 22 bis A, le Sénat a souhaité compenser une partie des pertes de recettes tarifaires des services publics locaux gérés en régie avec autonomie financière. Il me semble que, lors de l'examen du quatrième projet de loi de finances rectificative pour 2020, le rapporteur général de l'Assemblée nationale s'était engagé à trouver une solution dans le cadre de la loi de finances pour 2021. Je souhaiterais donc savoir ce qu'il en adviendra.
Par ailleurs, le Sénat s'est mobilisé pour permettre la contemporanéisation du FCTVA, si souvent évoquée. Permettre le remboursement dès l'année n, ce ne serait que justice pour le bloc communal.
Enfin, j'invite à rester attentif sur la question des crédits de l'enseignement agricole.
Concernant la péréquation des ressources des régions, le président Raynal et notre collègue Charles Guené ont présenté un amendement corrigeant les dispositions introduites par le député Jean-René Cazeneuve à l'article 58. Il semble qu'un accord convenu initialement avec Matignon serait remis en cause et il me paraît nécessaire de parvenir à une synthèse.
M. Éric Woerth, député, président. C'est effectivement ce que disent les régions.
Je remercie les sénateurs pour l'amendement relatif à la journée de carence dans la fonction publique dont j'avais moi-même, à l'Assemblée nationale, proposé la suspension pour mettre fin à l'injustice flagrante entre les cas contact et les personnes en arrêt maladie qui n'en bénéficient pas.
La contemporanéisation du FCTVA n'est qu'une mesure de trésorerie pour l'État mais, après vérification, je vous confirme que lorsqu'elle a été mise en oeuvre dans le plan de relance du président Sarkozy en 2009, il s'est agi d'une bouffée d'oxygène pour relancer l'investissement dans les territoires. En première lecture à l'Assemblée nationale, le rapporteur général m'avait indiqué que la mesure n'avait pas eu beaucoup d'effet : l'effet a, au contraire, été considérable dans de nombreux territoires.
Je ne serais pas objectif si je disais que cela n'avait pas été efficace...
Les échanges, avec le rapporteur général de l'Assemblée nationale, toujours confiants et constructifs, ne débouchent pas vraiment, pour le moment, malgré une écoute bienveillante, sur un accord pour reprendre d'importantes mesures portées par le Sénat, en particulier concernant les compensations à apporter aux collectivités territoriales. De nombreux sénateurs l'ont relevé.
Je le redis avec gravité : le pays est dans un état suffisamment incandescent pour que nous ne sous-estimions pas ce qui est en train de se jouer. Les communes, seules ou en groupement, sont aux côtés de l'État pour faire face aux difficultés sociales mais également en première ligne sur bien des aspects sanitaires.
Les dispositifs de compensation que l'on vous propose de maintenir en 2021 sont les mêmes que ceux qui ont été mis en place pour 2020, et proposés par le Gouvernement. Si, comme le Gouvernement semble l'indiquer, les pertes sont moins importantes que ce que l'on aurait pu estimer, rien ne s'oppose donc à adresser un signe positif aux collectivités, aux élus locaux, aux habitants... Il ne s'agit pas d'un cadeau de Noël mais d'une juste reconnaissance. C'est un point de vue largement partagé par les sénateurs, y compris, parfois, par certains sénateurs proches de la majorité gouvernementale.
Enfin je souhaite dissiper tout malentendu au sujet de la qualification de budget « vert pâle » au Sénat. Nous n'avons supprimé aucun crédit relevant de l'écologie et avons essayé de faire preuve de pragmatisme. L'article 40 de la Constitution contraint cependant notre initiative et nous oblige à prévoir des gages, y compris sur la mission Plan de relance.
Sur le sujet du bloc communal, le président Woerth, le président Raynal, M. Husson et moi-même avons participé la semaine dernière à une visioconférence réunissant par ailleurs Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et M. Olivier Dussopt, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargé des comptes publics, ainsi que l'ensemble des associations d'élus concernés. Notre échange m'a semblé de bonne facture, même si nous ne sommes pas toujours d'accord sur les chiffres précis de perte de recettes - c'est aussi le jeu.
Je n'ai pas tout à fait ressenti la nécessité immédiate d'apporter une solution de compensation dans le projet de loi de finances, qui n'a pas la même signification qu'un projet de loi de finances rectificative.
Si de telles pertes devaient être compensées par l'État en 2021 de la même façon que la troisième loi de finances rectificative pour 2020 l'a prévu au titre de cette année, alors l'État devra agir et je n'ai jamais dit le contraire.
Je ne veux pas dire que l'on s'habitue à vivre au rythme de projets de loi de finances rectificative successifs mais, sans grand suspense, il y en aura sans doute en 2021, qui donneront une occasion plus propice de répondre précisément aux pertes de recettes du bloc communal, avec davantage de recul. C'est vrai à la fois sur ce que l'on appelle désormais communément le « filet de sécurité » et sur la CVAE.
S'agissant de la MGP, je suis tout à fait conscient du problème évoqué par Mme Lavarde mais je tiens à rappeler simplement qu'un amendement de la majorité à l'Assemblée nationale a permis aux établissements publics territoriaux (EPT) de conserver leurs outils fiscaux.
Notre différend porte à ce stade sur la dynamique de la contribution foncière des entreprises (CFE) en 2021. J'ai considéré que, dans une logique de maintien des compétences actuelles de la MGP et des EPT - qui ne satisfont personne -, nous devions trouver un équilibre financier, de façon exceptionnelle.
J'ai vu, comme vous, les données relatives aux pertes de CVAE pour la MGP, mais j'ai aussi vu une autre situation insatisfaisante, à savoir l'absence de participation de la Ville de Paris. Pour ces raisons, je pourrais présenter par voie d'amendement des solutions qui permettraient peut-être d'atténuer la remontée de dynamique de CFE - par cohérence - et de prévoir la participation de la Ville de Paris. Cela ira dans le sens de ce que vous dites, mais peut-être pas aussi loin que ce que vous proposez, parce que je tiens à garder ce juste équilibre entre les différentes strates institutionnelles de la MGP.
Les députés de la majorité ont déposé une proposition de loi visant à transformer les EPT en EPCI à fiscalité propre. Nous pourrions nous retrouver sur cette ambition-là.
Concernant la filière automobile, je suis en désaccord avec Mme Dalloz. Le point d'équilibre entre la protection de la filière et le mieux-disant environnemental a été trouvé en première lecture à l'Assemblée nationale après un long débat. J'avais milité pour un lissage de la hausse du malus sur trois ans au lieu de deux ; les sénateurs proposent cinq ans : je pense que cela créerait un déséquilibre par rapport à la politique verte, franchement verte, que nous assumons.
Sur les régies, soyez rassurés : nous avançons par voie réglementaire et Mme Pires Beaune pourrait en témoigner, notamment sur les régies thermales. J'ai appuyé une demande en faveur de l'égalité de traitement entre services publics locaux.
Je confirme que je proposerai en nouvelle lecture le maintien de la suspension de l'application du jour de carence pour les fonctionnaires.
Vous m'excuserez de ne pas rejouer le match sur le FCTVA. Nous n'avons pas la même appréciation de l'efficacité de sa contemporéanisation, au regard notamment des travaux de la Cour des comptes ou des retours de certains territoires, pour inciter les collectivités territoriales à investir. Je pense que la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) offre une voie plus directe et plus concrète.