Commission des affaires économiques

Réunion du 11 mai 2021 à 14h35

Résumé de la réunion

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  • artificialisation
  • filière
  • rénovation
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La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Nous avons le plaisir d'accueillir Mme Barbara Pompili pour échanger sur le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dit « Climat et Résilience ».

En préambule, je rappelle que notre commission considère la lutte contre le réchauffement climatique comme un enjeu essentiel pour notre pays, pour l'Europe et pour le monde. C'est la raison pour laquelle nous donnerons toujours la priorité, lors de l'examen de ce texte, à l'efficience réelle et mesurée des dispositifs législatifs proposés, à leur impact quantitatif sur nos émissions, à un haut niveau d'ambition, mais également à leur soutenabilité économique et sociale. C'est ce prisme - ambition, efficience, soutenabilité - qui nous guidera.

Ainsi, la décarbonation de notre économie est une priorité bien identifiée par notre commission : en juin 2020, nous avions proposé avant et, à l'époque, contre le Gouvernement, un ambitieux plan pour relancer notre économie en accélérant sa décarbonation, sans tarder et sans attendre le grand soir. C'est donc avec un très grand intérêt que nous vous accueillons, la moitié des dispositions de ce projet de loi relevant des compétences de notre commission, sur des sujets très variés tels que la consommation, l'agriculture et la forêt, l'urbanisme, le logement et la rénovation énergétique, les énergies renouvelables et les mines. Nous serons ainsi saisis au fond sur 86 articles et nous prendrons un avis sur 46 autres.

Comme vous le savez, à la différence du choix opéré à l'Assemblée nationale de créer une commission spéciale, le Sénat a préféré s'appuyer sur l'expertise et sur la mémoire des commissions permanentes. Nous avons donc confié ces articles à quatre rapporteurs spécialistes de leur secteur : Mme Anne-Catherine Loisier, sur les sujets concernant la consommation, l'alimentation et l'agriculture, dans le prolongement des travaux menés sur la loi pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Égalim) qu'elle a rapportée ; Mme Dominique Estrosi Sassone, sur les questions de logement, qui a notamment été rapporteur de la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN) ; M. Daniel Gremillet, sur les questions d'énergie, dans la continuité de ses travaux sur la loi relative à l'énergie et au climat ; et M. Jean-Baptiste Blanc, sur l'objectif de zéro artificialisation nette, dans le prolongement du groupe de travail du même nom qu'il pilote. J'excuse l'absence de ce dernier, élu du Vaucluse, qui se trouve aux cérémonies en cours à Avignon.

Ce texte accélère des évolutions nécessaires, car la transition écologique n'est pas une option, mais une nécessité et offre des opportunités ; il comporte également des dispositions qui nous paraissent moins utiles, sauf en matière de communication ; il contient enfin des éléments plus ambivalents : certaines dispositions semblent déjà exister, d'autres laissent augurer des difficultés réelles quant à leur application, d'autres, en revanche, sont absentes.

Ce projet de loi n'intervient pas dans un contexte nouveau. À la suite du travail de notre commission, le Sénat a adopté la loi relative à l'énergie et au climat d'un commun d'accord avec l'Assemblée nationale, fin 2019. Il s'agissait d'un texte ambitieux, qui a placé la France sur le chemin de la neutralité carbone, mais dont l'application fait encore défaut : 30 % des textes sont attendus et 20 % des ordonnances ont été abandonnées. En outre, 20 % de ses dispositions s'apprêtent à être modifiées par le présent projet de loi. Madame la ministre, ne pensez-vous pas que l'inflation et l'instabilité normatives sont préjudiciables à la transition écologique qui nécessite de vastes et très lourds investissements du secteur public comme du secteur privé et par conséquent de la visibilité à long terme ? Nos citoyens comprennent-ils ce que nous faisons quand nous modifions des règles qui ont à peine eu le temps d'être appliquées ? La crise des « gilets jaunes » a montré le retard que des décisions à la fois imposées et fluctuantes pouvaient nous faire prendre. Les acteurs économiques et nos concitoyens sur le terrain nous disent qu'ils ont besoin d'un cap clair pour engager la transformation de notre modèle économique. Cela ne signifie pas qu'il faudrait ne rien changer, mais il faut le faire à un rythme compatible avec les capacités d'amortissement des investissements pour les entreprises, mais aussi pour les citoyens.

Le projet de loi tel qu'il ressort des travaux de l'Assemblée nationale n'est pas exempt d'ambiguïtés. L'examen d'un projet de loi au Parlement est l'occasion d'évaluer, d'une part, la cohérence entre les objectifs poursuivis et les dispositifs proposés, d'autre part, les inévitables effets de bord des textes qui nous sont soumis, de sorte que nous puissions mettre en balance les avantages et les inconvénients de ces nouveaux dispositifs législatifs et, éventuellement, les calibrer par rapport au but recherché. Sur le plan de la cohérence, ce texte manque d'un cap stratégique. Nombre de dispositifs importants adoptés en séance publique à l'Assemblée nationale n'ont fait l'objet d'aucune évaluation ni d'aucune concertation préalables. Je vous indique que nous nous en tiendrons autant que possible à la recommandation du Haut Conseil pour le climat (HCC) de signaler l'impact des mesures quant à l'objectif de neutralité carbone. D'autres dispositifs nous semblent être à contre-courant, au regard de la crise économique que nous traversons. On voit mal l'urgence qu'il y aurait à rigidifier le tissu commercial ou à interdire les terrasses chauffées, alors que la crise de la covid-19 fait encore sentir ses effets.

Enfin, le projet de loi présente plusieurs angles morts : il ne dit rien de l'énergie nucléaire et pas beaucoup plus de l'hydroélectricité, notre première source d'énergie renouvelable. Sur ces deux sujets essentiels pour atteindre l'objectif de neutralité carbone à l'horizon 2050, le Sénat a été plus actif que le Gouvernement puisqu'il vient d'adopter une proposition de résolution sur l'énergie nucléaire et une proposition de loi sur l'hydroélectricité. Sur la forêt, nous aurons aussi des propositions.

Madame la ministre, vous pouvez compter sur nous pour être force de proposition. Êtes-vous prête à accueillir positivement ces initiatives sénatoriales qui ne manqueront pas d'animer nos débats ?

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre de la transition écologique

Ce texte important nous offre une opportunité historique d'engager définitivement la France dans ce nouveau siècle, de répondre à l'appel de la jeunesse, des citoyens, du pays tout entier pour associer écologie, démocratie et développement économique et agréger toutes les volontés afin de relever l'immense défi de notre génération.

L'Amazonie émet dorénavant davantage de carbone qu'elle n'en capture, par la faute des hommes ; il y a urgence à inventer un autre avenir que celui des sombres prévisions scientifiques, à sortir d'un modèle dépassé qui ne promet que le malheur aux futures générations, à tourner le dos à un système qui ravage la planète, le climat et la biodiversité, qui prépare déjà les canicules de cet été et les pandémies de demain ; il y a urgence à atteindre l'âge de raison, celui où l'humanité prend conscience de son poids et des liens entre les différentes composantes du vivant, l'âge de transformer nos modes de vie. C'est aujourd'hui possible, la société est mûre, les décideurs sont conscients et les Français attendent. Je vois partout, sur le terrain, des patrons, des maires, tout un tissu économique et social se mettre en mouvement, avec la certitude que l'écologie n'est pas une contrainte, mais le gage des réussites de demain. Saisissons cette opportunité, nous avons tout à y gagner !

Avant vous, parlementaires, 150 citoyens tirés au sort s'y sont essayés. Ils venaient de partout, ils étaient artisans, pilotes de ligne, lycéens, retraités, médecins, sans emploi, ils ont travaillé neuf mois durant et leur travail porte le retour en force du beau mot de « citoyenneté » : se confronter aux problèmes, sortir des postures, chercher les solutions qui marchent, c'est cela qui fonde notre République. À présent, un autre temps s'ouvre, le vôtre, celui du Parlement. C'est à vous qu'il incombe de reprendre ce fil et de le tisser un peu plus avant. Beaucoup diront que l'on ne va pas assez vite, d'autres que l'on va trop vite, mais à mon sens, le grand soir de l'écologie, cela n'existe pas. Je crois aux transformations incrémentales, à une écologie de bon sens, réaliste et concrète, loin du tout ou rien qui fait trop souvent florès dans notre pays, une écologie qui ne renie rien, mais qui se fait avec les 67 millions de Français et pour eux.

La transformation sans précédent que nous sommes en train d'opérer impose de prévoir des accompagnements pour chacun. Nous sommes la première génération à être à ce point consciente de la crise écologique et peut-être la dernière à pouvoir l'enrayer ; notre siècle sera celui de cette crise et nous devons y préparer les futurs citoyens. Cela commence à l'école de la République, c'est pourquoi cette loi fera entrer l'écologie dans les salles de classe, pour former les écocitoyens de demain ; pour ceux d'aujourd'hui, ces mesures leur permettront de devenir acteurs des changements au quotidien en favorisant une autre manière de consommer. Tel est le sens du titre Ier.

Cette transition est une chance pour l'économie. Avec ce texte, nous allons porter l'écologie au coeur des entreprises, nous allons intégrer des clauses environnementales dans les marchés publics afin d'en faire des vecteurs du verdissement de notre économie, nous allons réformer le code minier pour une exploitation minière responsable qui ne détruise pas l'environnement tout en produisant les matériaux nécessaires à la transition énergétique. C'est l'ambition du titre II.

Nous allons plus loin, pour protéger la santé des Français, qui respirent un air pollué qui tue chaque année 40 000 de nos concitoyens. Ainsi, nous créons des zones à faibles émissions dans toutes nos grandes villes, auxquelles s'ajoute, après la première lecture à l'Assemblée nationale, une prime à la conversion permettant d'acquérir un vélo électrique ou un vélo cargo ; nous interdisons les trajets en avion vers des destinations qui peuvent être atteintes en train en moins de deux heures trente. Telles sont les avancées concrètes du titre III.

Certains pourraient dire que c'est trop, mais c'est seulement le retour du bon sens, qui nous dit de préférer le train à l'avion, le vélo à la voiture, qui nous dit que nous ne pouvons plus continuer à croire que le monde est infini, à étendre nos villes. C'est pourquoi nous allons diviser par deux le rythme d'artificialisation des sols. Le bon sens, c'est aussi de regarder en face la réalité des deux millions de foyers qui vivent dans des passoires thermiques. Ceux-ci souffrent du froid, de la chaleur et le payent cher, tout en émettant du carbone dans l'atmosphère. À cette fin, le premier axe sera d'interdire progressivement la mise en location des biens concernés pour inciter les propriétaires à réaliser les travaux nécessaires, selon un calendrier clair et précis, depuis la classe G, en 2025, jusqu'à la classe E, en 2034. Il s'agit donc d'un cadre clair et prévisible, qui laisse à chacun le temps de s'organiser.

Nous souhaitons accompagner l'ensemble des propriétaires dans la durée. Pour cela, nous inscrivons dans la loi un principe d'engagement financier de l'État, garantissant un reste à charge faible, et nous créons des « accompagnateurs rénovation » agréés par l'État. C'est là une grande avancée : demain, les propriétaires disposeront d'un soutien, un allié de terrain, de la conception de leur projet jusqu'au dernier coup de marteau.

Ces rénovations, je le rappelle, représentent des milliers d'emplois dans nos territoires, des emplois locaux, durables et non délocalisables.

Le titre V porte encore davantage de possibilités pour nos territoires, au travers de la transformation de notre modèle agricole et alimentaire, avec une agroécologie pour et par les territoires, une lutte renforcée contre la déforestation, une alimentation plus saine et plus équilibrée.

Avec le titre VI, nous mettrons fin à l'impunité des pollueurs. Demain, ils seront poursuivis et sévèrement punis.

Enfin, l'insertion d'un titre VII lors de la première lecture à l'Assemblée nationale nous prouve que le temps du travail parlementaire, tel que nous le prenons ensemble, est le gage des vraies lois, de celles qui marquent, durent et transforment. Ce titre ancre les effets de cette loi dans le temps long. L'évaluation annuelle de sa mise en oeuvre sera un excellent moyen de maintenir nos efforts, notre exigence et nos ambitions.

Ce projet de loi est une nouvelle étape dans la construction d'une République écologique qu'il est de notre devoir de construire. Il fait suite à des décisions courageuses d'abandon de grands projets datés et se combine à un plan de relance historique, à l'adoption récente d'autres lois fondant l'avenir et à la mobilisation de la France au niveau international pour pousser sans relâche l'agenda pour le climat et la biodiversité.

Il vous revient désormais de poursuivre ce travail.

Nous cherchons, non pas à rigidifier, mais à donner des perspectives, et je partage votre point de vue, Madame la présidente : il faut maintenant des règles claires, qui puissent être appliquées dans le temps et apporter de la visibilité. Il faut aussi que nous ayons à coeur d'embarquer tout le monde ; on ne peut laisser personne au bord de la route, comme l'a rappelé la crise des « gilets jaunes » - d'où les dispositifs d'accompagnement prévus dans ce texte. Nous avons systématiquement veillé à l'application concrète de la loi et à son acceptabilité. La transition écologique n'est pas pour quelques-uns ; elle est pour tout le monde !

Debut de section - PermalienPhoto de Anne-Catherine Loisier

L'article 1er tend à revenir sur certaines mesures concernant l'affichage environnemental de la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC), votée voilà quelques mois. Pourquoi ne pas avoir choisi d'attendre les résultats des expérimentations prévues dans le cadre de cette loi ? Comment vous assurer que la France ne fera pas cavalier seul sur ce sujet au niveau européen ?

À l'article 6, pourquoi organiser le retrait de l'État en matière de police de la publicité extérieure, alors que les communes n'en ont pas fait la demande et n'auront pas forcément les moyens d'assurer ces responsabilités ?

Le fait que le critère prévu à l'article 11 pour le vrac repose sur le nombre de références ne risque-t-il pas de placer, encore une fois, les marques distributeurs aux premières places, ce qui viendrait contrecarrer les objectifs de la loi Égalim ?

L'article 56 concerne les aires protégées. J'ai déjà eu l'occasion de vous interroger sur votre définition de l'aire protégée « stricte » ou « forte ». Comme vous ne m'avez pas vraiment répondu, je réitère ma question. Qu'en est-il de la compatibilité de cette mesure avec d'autres dispositifs législatifs, comme la réglementation environnementale (RE2020) ? Combien de forêts pourraient passer sous aire protégée « forte » ?

S'agissant de la lutte contre la déforestation, si le dispositif proposé dans le projet de loi est remarquable, nous sommes tous conscients de son impact limité, et ce d'autant que l'Union européenne ne s'est pas encore positionnée. Pourquoi ne pas attendre juillet et le projet de règlement européen ?

Avez-vous mesuré l'impact du déploiement des repas végétariens ? À ce jour, seulement 30 % des fruits et légumes proviennent de France ou d'Europe dans la restauration collective. Ce déploiement pourrait donc entraîner une explosion des importations.

Enfin, une observation en lien avec la question de l'artificialisation des sols. Vous rappelez souvent que le secteur de la construction est responsable d'environ 20 % des émissions de gaz à effet de serre. Mais les objectifs affichés en termes de réduction de l'artificialisation des sols pourraient aboutir à un manque à construire de 100 000 logements nouveaux chaque année. L'étude d'impact ne mentionne rien de ces conséquences. Un travail a-t-il été mené sur la question ? Pourquoi avoir retenu la cible de 50 %, qui peut paraître trop arbitraire et uniforme ? Ne risque-t-on pas de réduire à néant les efforts réalisés depuis plusieurs années pour résorber la crise du logement en France ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Estrosi Sassone

Avant d'évoquer le titre IV sur le logement, j'observe que bon nombre de professionnels, d'élus, d'associations, d'acteurs m'ont dit à quel point ce projet de loi leur paraissait important. Mais, tel qu'issu des travaux de l'Assemblée nationale, celui-ci présente déjà à leurs yeux des difficultés d'application, une certaine complexité et un manque de lisibilité. Nous aurons donc à coeur ici, au Sénat, de clarifier et simplifier certaines mesures.

En matière de trajectoire de rénovation, le projet de loi tend à déclarer « indécents » les logements de catégorie F, E et D et à interdire leur location. Le Gouvernement mobilisera-t-il les financements nécessaires à la rénovation de ces logements ? La trajectoire est-elle réaliste ? Accepteriez-vous d'introduire des souplesses, en particulier pour les logements en copropriété ? En effet, doit-on pénaliser un propriétaire de bonne foi qui n'aura pas pu se mettre en règle, faute de réalisation des travaux collectifs ? Ne serait-il pas pertinent d'aller au-delà de l'échéance de 2034, prévue pour les logements de catégorie D, et traiter les logements de catégorie C, dans la perspective de 100 % de bâtiments bas carbone en 2050 ?

Par ailleurs, le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale introduit trois définitions différentes - la rénovation performante, la rénovation globale et la rénovation complète -, rendant ainsi le dispositif peu lisible. Plusieurs acteurs du secteur observent qu'une rénovation permettant d'obtenir l'étiquette C serait « performante et globale », alors qu'elle ne permettrait pas d'atteindre l'objectif BBC en 2050, ce qui traduit un recul de l'ambition initiale. Quelle est votre position sur le sujet ?

S'agissant des dispositifs de soutien à la rénovation énergétique, le projet de loi pose la question de l'universalité des aides, en conditionnant celles-ci à la notion de rénovation performante ou au recours à des accompagnateurs. Quelle est l'intention du Gouvernement ? Est aussi posée la question de l'autonomie des collectivités territoriales, l'article 43 prévoyant un strict encadrement par l'État du service public de la performance énergétique de l'habitat. Quelles sont les perspectives sur ce sujet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Gremillet

Comment justifier les nombreux recours à la législation par ordonnance dans le texte, notamment pour la réforme du code minier, pourtant attendue par les acteurs économiques et les associations de protection de l'environnement depuis très longtemps ? Je pense également à la lutte contre la fraude aux certificats d'économies d'énergie (CEE), dont les modifications ponctuelles mériteraient une inscription en « dur » dans la loi.

La transposition du « paquet d'hiver » de la Commission européenne fait l'objet de critiques de la part des acteurs de terrain, car elle présente un risque de sur-réglementation. Comment garantir que la ratification des ordonnances prévues par le projet de loi ne pénalisera ni les professionnels du secteur des énergies renouvelables, ni les collectivités territoriales en tant qu'autorités organisatrices de la distribution d'électricité ?

Le Sénat a récemment adopté à l'unanimité une proposition de loi sur l'hydroélectricité, une énergie à la fois renouvelable, stockable et territoriale - s'il est une énergie non délocalisable, c'est bien celle-là, et les turbines sont françaises ! Ma question est simple : soutenez-vous les dispositions votées par le Sénat sur cette question ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Je vous donne lecture des questions de Jean-Baptiste Blanc.

Les mesures proposées dans le cadre du projet de loi, censées traduire les propositions de la Convention citoyenne pour le climat, s'en éloignent un peu. Ainsi, l'objectif « zéro artificialisation nette » a été fixé par le Gouvernement, et non défendu par la Convention. Celle-ci a retenu comme échelon pertinent pour la lutte contre l'artificialisation les schémas de cohérence territoriale (SCoT) et les plans locaux d'urbanisme (PLU) ou plans locaux d'urbanisme intercommunaux (PLUi), alors que le projet de loi donne au schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (Sraddet), document récent et encore non éprouvé, un pouvoir prescriptif. Troisième exemple, tous les projets commerciaux artificialisant des sols sont soumis à moratoire alors que la Convention ne visait que les nouvelles zones d'activité en entrées de ville.

L'esprit de votre texte relève davantage de contraintes et n'offre que peu de moyens dédiés à la sobriété foncière, alors que les coûts supplémentaires de « désartificialisation » et de « ville sur la ville » peuvent représenter jusqu'à quatre fois le coût d'une opération normale. Vous imposez des bilans chiffrés obligatoires aux maires, mais un outil de mesure n'arrivera qu'en 2023 au mieux, et la production de données est renvoyée à des décrets. Les besoins en ingénierie ne sont pas traités, alors même que vous demandez la révision de tous les documents d'urbanisme de France. Les collectivités sont prêtes à agir, mais l'État sera-t-il au rendez-vous des moyens et de l'accompagnement, dans un contexte de fiscalité locale déjà tendu ? Dans mon département, par exemple, nous venons de terminer des PLUi, très longs et très chers, et dont la mise en oeuvre pose un problème de moyens.

Qui plus est, cette approche coercitive est extrêmement centralisée. Mieux vaudrait respecter la décentralisation plutôt que de confier aux Sraddet la tâche de fixer un objectif chiffré dont le niveau est défini par l'État. Nous considérons qu'il faut respecter la différence des territoires, et le choix d'imposer une réduction uniforme de l'artificialisation de 50 %, dans toutes les régions de France, quels que soient les enjeux et les efforts déjà réalisés, nous semble discutable.

Enfin, je ne suis pas convaincu de la pertinence du ciblage des mesures ni de leur caractère opérationnel. Pour le gel de l'implantation de nouveaux centres commerciaux, vous retenez comme critère la surface de vente - cela n'a rien à voir avec l'impact environnemental - plutôt que l'emprise au sol. Cela pénalisera les projets vertueux réalisés en élévation.

Autre exemple, la définition même de l'artificialisation n'est pas aboutie. Elle a été modifiée à chaque stade des travaux sur ce texte, lors de la concertation, de l'avant-projet, de la discussion en commission et de l'examen en séance à l'Assemblée nationale. Elle n'est toujours pas opérationnelle, ni pour les maires, ni pour les particuliers, ni pour les constructeurs.

Enfin, nous devons être attentifs aux injonctions contradictoires faites aux élus. Par exemple, en zone tendue, le PLU devrait être renforcé pour imposer des quotas de surface non artificialisée sur chaque terrain, ce qui reviendrait presque à refaire un plan d'occupation des sols (POS), alors que celui-ci avait été supprimé par Mme Duflot. Il faudrait en parallèle élargir les dérogations de droit au PLU. La loi ÉLAN, en 2018, voulait produire « plus de logement et plus vite » ; la loi Climat, en 2021, veut réduire par deux la construction nouvelle. Il convient, également, de ne pas oublier de limiter la hausse des prix des terrains. L'équation est difficile. Madame la ministre, comprenez que personne ne s'y retrouve...

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Madame Loisier, en ce qui concerne l'affichage environnemental, des mesures ont déjà été lancées et nous souhaitons nous inscrire dans leur continuité. Il ne s'agit pas de réécrire la loi AGEC, mais d'améliorer et de faire converger les expérimentations qui ont été déployées dans ce cadre. Certaines sont en cours, notamment dans le secteur de l'habillement, avec l'entreprise Decathlon, par exemple. Il nous faut privilégier un affichage uniformisé qui permettra aux consommateurs d'y voir clair.

C'est la raison pour laquelle nous avons inscrit dans la loi que les expérimentations pourront donner lieu à une obligation d'affichage, en fixant une date butoir de cinq ans. Une fois que certaines expérimentations auront produit leurs effets, nous pourrons avancer plus rapidement.

Vous avez également mentionné celles qui s'inscrivent au niveau européen. Nous participons aux différents groupes de travail sur l'affichage qui ont lieu dans ce cadre. Cependant, du retard a été pris, et nous ne pouvons plus nous permettre d'attendre. Nous avançons donc, au niveau national, en tentant de maintenir une cohérence avec le niveau européen, et nous procéderons à des ajustements, si nécessaire. L'affichage environnemental existe déjà dans certains secteurs, comme l'automobile ou le bâtiment.

Nous avons fait le choix politique de donner la possibilité aux maires de réglementer la publicité dans leurs territoires. Ils sont le plus à même de le faire. La loi prévoit toutefois des garde-fous, puisque le maire peut notamment déléguer sa compétence à l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI). Certains craignent que ce choix n'ait pour conséquence de tuer le commerce dans les centres-villes. Qui connaît les maires sait bien qu'ils veilleront à travailler en lien avec les commerçants des centres-villes ! D'autres redoutent, à l'inverse, que les commerçants n'exercent trop de pression sur les maires, ce qui aboutira à défigurer les centres-villes. Or les maires sont en relation constante avec la population.

J'ai rencontré la maire d'une petite commune, au sud de Lyon, composée pour une petite partie d'un coeur de village et pour le reste d'une zone commerciale. Elle a adapté la réglementation de la publicité aux particularités de sa ville, en définissant une zone réservée dans la partie basse de la ville, et en veillant à conserver une certaine harmonie visuelle dans le dispositif. Le résultat est très réussi. Ce genre d'initiative ne peut intervenir qu'au niveau local. Faisons confiance aux maires !

L'article 11 sur le vrac a donné lieu à des débats nourris à l'Assemblée nationale. Ceux-ci ont permis de clarifier le texte, et vous pourrez encore l'améliorer. Les commerces de vente au détail d'une surface supérieure ou égale à 400 mètres carrés devront consacrer 20 % de leur surface de vente à des produits en vrac. Un décret précisera les objectifs à atteindre et les exigences sanitaires à respecter.

À l'Assemblée nationale, nous avons ciblé les produits pour lesquels il existe un potentiel de vente sans emballage. Le décret prévu à l'article L. 441-4 du code de commerce limite la quantité de produits concernés. Les articles de bricolage, les meubles et les vêtements ne sont pas concernés, mais les produits d'entretien le sont. Nous avons inclus d'autres produits, comme ceux vendus à la découpe assistée en magasin.

Nous avons également assoupli la manière de calculer l'objectif de 20 % de la surface de vente, en autorisant notamment des équivalences en part de produits référencés par le commerce ou en pourcentage de chiffre d'affaires.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Nous prévoyons une adaptation par voie réglementaire pour tenir compte de la spécificité de certains commerces où il sera plus difficile d'instaurer la vente en vrac, par exemple ceux qui vendent des produits de beauté. Nous procèderons commerce par commerce.

L'objectif que nous visons, c'est la fin du suremballage et du tout plastique. Nous consommons chaque année jusqu'à 1,2 million de tonnes de plastique pour les emballages ménagers, et le vrac ne représente que 0,8 % de la part de marché des produits de grande consommation. Or la vente en vrac a réalisé un chiffre d'affaires en augmentation de 41 % en 2019 et de 8 % en 2020, malgré la crise de la Covid. La loi doit servir à mieux encadrer, à faciliter et à accélérer la lutte contre le plastique.

Dans la Stratégie nationale pour les aires protégées, une aire sous protection forte se définit comme « un espace naturel dans lequel les pressions engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques de cet espace sont supprimées ou significativement limitées de manière pérenne ».

La réglementation environnementale RE 2020 a été conçue pour s'appliquer de manière progressive, selon une trajectoire permettant de concilier les objectifs. La filière du bois français est encore en cours de développement. Nous devons éviter d'importer du bois pour la construction.

Concernant les repas végétariens, il faut préciser que l'importation des produits pour la restauration collective ne se limite pas aux fruits et légumes. Julien Denormandie a rappelé que nous importions jusqu'à 90 % des volailles que nous consommions en France, et les importations de viande de boeuf sont également élevées. La marge de progrès possible est significative.

Nous avons généralisé le champ d'application de la loi Égalim, en prévoyant notamment un menu végétarien par semaine dans toutes les cantines. Les conséquences d'une telle mesure sont connues, car l'expérimentation s'exerce depuis déjà deux ans. Les retours sont globalement positifs. Le gaspillage ne s'est pas accru et les coûts sont tenables.

Pour limiter les importations, nous avons choisi de privilégier les concertations locales et les projets alimentaires territoriaux, et de favoriser ainsi les circuits courts. Nous proposerons jusqu'à 60 % de viande de qualité, labellisée et produite par des agriculteurs français dans les cantines.

Madame Estrosi Sassone, nous devons effectivement clarifier la manière dont la rénovation des logements interviendra. Nous avons détaillé les trajectoires, G en 2025, F en 2028 et E en 2034. Il conviendra de mieux aider les particuliers qui souhaitent mettre en oeuvre cette rénovation, d'où les initiatives que nous avons lancées, comme l'assistance à la rénovation, l'accompagnateur Rénov', ou le prêt avance mutation pour le reste à charge.

Nous devons aussi développer une filière structurée, capable de se mettre en ordre de marche. À cette fin, un article programmatique a été ajouté à l'Assemblée nationale : l'État continuera de financer les aides pendant dix ans. Ce délai est suffisamment long, d'une part pour que les entreprises se forment, d'autre part pour que les filières d'éco-matériaux se développent. Ainsi, les particuliers disposeront d'un meilleur logement. Ils réduiront à la fois leurs factures d'énergie et leurs émissions de gaz à effet de serre.

La définition des rénovations est un véritable sujet. Elle a fait l'objet de longs débats en séance à l'Assemblée nationale. Le présent texte introduit désormais les notions de rénovation performante, de rénovation globale et de rénovation complète afin d'orienter une partie des aides financières vers des chantiers plus ambitieux. Par le passé, on a dépensé beaucoup d'argent à ce titre sans atteindre les objectifs de réduction d'émissions de gaz à effet de serre : les rénovations restaient trop partielles. Ces définitions reposent sur les notions suivantes : le nombre et le type de gestes ; la temporalité selon laquelle les travaux se déroulent ; et surtout le gain énergétique attendu. Pour mon ministère, le but est clairement d'encourager les rénovations à fort impact écologique et social. On doit mettre en oeuvre ce devoir collectif en continuant de financer les rénovations par gestes et en orientant l'essentiel des travaux vers les rénovations performantes.

Le débat n'est pas terminé et je serai attentive aux améliorations que vous proposerez. Pour ma part, je suis très pragmatique. Le système issu des travaux de l'Assemblée nationale permet déjà certaines clarifications, mais je suis tout à fait ouverte à poursuivre le travail, à condition que l'on garde en tête l'objectif fixé.

L'article 43 a pour objet le service public de l'efficacité énergétique (SPEE). Ce dernier est déjà actif dans certaines régions, notamment la mienne, à l'instar du réseau Éco habitat, qui accompagne de A à Z des personnes économiquement très fragiles en assurant une forme de maîtrise d'ouvrage. Ce travail de fourmi est absolument extraordinaire. À présent, il convient de couvrir l'ensemble du territoire français : tous nos concitoyens doivent bénéficier de ce service.

Bien sûr, on agira en lien avec les collectivités territoriales. Le principe sera l'agrément des différentes structures à même d'assurer ce service. Les conseillers « Faire » accomplissent un très bon travail, mais ils ne sont pas assez nombreux pour massifier la rénovation. Les demandeurs doivent pouvoir disposer d'un interlocuteur physique en passant un simple appel téléphonique. Ils ne sauraient se contenter d'une interface informatique.

Monsieur Gremillet, vous vous inquiétez du nombre d'ordonnances auxquelles le texte renvoie. Mais, sans les ordonnances, certaines réformes hautement nécessaires risqueraient de ne pas être achevées avant la fin du quinquennat : ainsi de la réforme du code minier ou des mesures relatives au trait de côte. Il s'agit de mettre un terme à divers contentieux, portant notamment sur la Montagne d'or : il faut adapter très vite le code minier pour sortir de l'imbroglio et limiter la facture.

Ce travail est très lourd : c'est pourquoi nous avons opté pour les ordonnances. Un certain nombre de dispositions structurantes, comme les mesures d'après-mine, seront dans le dur du projet de loi. D'autres sont techniquement très pointues, mais peu intéressantes d'un point de vue politique - ainsi du toilettage d'un certain nombre de codes. Évitons d'alourdir les débats. Toutefois, si vous souhaitez que certaines dispositions d'ordre plus politique figurent dans le projet de loi, je serai ouverte à la discussion. Il faut examiner ces questions au cas par cas.

Je soutiens pleinement l'hydroélectricité, première source d'énergie renouvelable en France. Si nous n'obtenons pas de solution à Bruxelles, les contentieux gelés le temps de la discussion seront rouverts et nous serons obligés de remettre en concession nos centrales hydroélectriques. Je souhaite que les discussions aboutissent pour qu'EDF continue de les gérer.

Je n'oublie pas non plus la petite hydroélectricité. Les moulins ont fait l'objet d'importants débats à l'Assemblée nationale, mais la rédaction retenue est insatisfaisante, car elle opère une grave régression en matière de biodiversité. Si un propriétaire veut procéder à un effacement, il n'en a plus la possibilité. Il faut donc retrouver une rédaction acceptable pour tout le monde.

La petite hydroélectricité peut être une solution dans certains territoires ; mais, à grande échelle, elle ne nous permettra pas seule d'atteindre nos objectifs. En la matière également, il faut être très pragmatique en raisonnant territoire par territoire.

Monsieur Blanc, le « zéro artificialisation nette » est un objectif à l'horizon de 2050. Ce que propose ce texte, c'est une division par deux du rythme d'artificialisation d'ici à dix ans.

Sur ce sujet, prenons garde aux idées reçues. Au total, 3,5 millions d'hectares sont artificialisés en France, soit 6,5 % du territoire national ; mais, à population égale, nous totalisons 15 % d'artificialisation de plus que l'Allemagne, 57 % de plus que le Royaume-Uni ou l'Espagne. En France, l'artificialisation augmente presque quatre fois plus vite que la population : depuis 1981, elle a bondi de 70 %, alors que le nombre d'habitants a, lui, progressé de 19 %. Surtout, certains territoires perdent des habitants cependant que leur taux d'artificialisation augmente. Contrairement à ce que l'on peut penser de prime abord, les deux phénomènes ne sont pas liés. Ce constat m'a surpris moi-même.

Chaque région sera chargée d'atteindre cet objectif de division par deux, en le traduisant dans les Sraddet et en le déclinant dans les territoires. Nous avons inscrit dans le texte un certain nombre de mesures ménageant le temps d'agir en ce sens en évitant des effets de bord : il ne faudrait pas que des collectivités ayant accompli de grands efforts pour contenir l'étalement urbain soient, en quelque sorte, punies, et qu'elles ne puissent plus artificialiser en cas de besoin. Les vertueux ne doivent pas être pénalisés.

Le principe, c'est de changer d'état d'esprit : dans tel territoire, un lieu se prête-t-il particulièrement à tel projet commercial, à telle construction de logements ? J'en ai parlé avec beaucoup de maires. Un grand nombre d'entre eux m'ont affirmé que ces préoccupations n'existaient pas il y a dix ou quinze ans. D'autres sont assez démunis, car la réhabilitation des friches coûte plus cher que la construction sur des terrains agricoles.

Dans le cadre du plan de relance, nous avons mis en place un fonds « Friches » de 300 millions d'euros. Ce dispositif fonctionne très bien : c'est la preuve qu'il répond à une demande. En outre, nous avons créé une aide destinée aux maires densificateurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mais l'aide aux maires bâtisseurs a été supprimée en 2007 !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Je vous assure que cette aide est l'une des lignes du plan de relance : nous l'avons recréée.

Ces dispositifs permettront d'accompagner notre action. D'autres mesures relèveront des documents d'urbanisme. Bien sûr, il ne s'agit pas de refaire tous les PLU et les PLUi : ces documents complexes ont demandé beaucoup de travail. Il s'agit simplement de les modifier de manière ponctuelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Laurent

Élu d'un département conchylicole, je m'interroge sur la juxtaposition de deux droits de préemption, qui inquiète la profession : elle pourrait affaiblir la loi pour la protection foncière des activités agricoles et des cultures marines, votée en 2019, et complexifier les procédures. Un amendement visant à permettre aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) de poursuivre leurs missions dans les territoires littoraux en préservant les espaces et les activités agricoles du littoral a été rejeté, au motif qu'il n'est pas possible d'accorder un droit de préemption de premier rang à la fois aux collectivités et aux Safer. Quelles assurances pouvez-vous apporter à la profession ?

Le réseau agricole des îles atlantiques a attiré notre attention sur les difficultés d'accès au foncier et aux infrastructures agricoles dans ces territoires, en raison de l'empilement réglementaire, de l'absence d'espace rétrolittoral et d'une forte pression immobilière. Or le maintien d'activités agricoles est indispensable pour répondre aux enjeux de préservation des paysages, d'autonomie alimentaire et d'emploi à l'année. Qu'en pensez-vous ?

Vous venez d'évoquer l'objectif de limitation de l'artificialisation des sols. Président du groupe d'études Vigne et vin du Sénat, je prendrai l'exemple des régions viticoles. Pour suivre la demande des marchés, la filière est appelée à construire des bâtiments industriels en dehors des zones urbaines ou périurbaines. Sans de tels bâtiments, il est impossible de répondre aux enjeux de qualité et à la demande des clients : les pertes de parts de marchés remettraient en cause un pan entier de l'économie locale. Vos explications et, surtout, l'application de la future loi dans nos territoires m'inquiètent.

En outre, pour ce qui concerne la consigne, le secteur souhaite que le caractère volontaire du bilan économique et social soit pris en compte. Pour le vrac, confirmez-vous que le secteur des boissons alcoolisées sera exclu ? Je ne vois pas servir le cognac à la tirette !

Enfin, l'article 57 bis A exempte du droit de préemption des Safer les donations « au profit d'une personne morale reconnue d'utilité publique dont l'objet principal est la protection de l'environnement et de la biodiversité ». Cette disposition n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact et la définition des bénéficiaires est très large : ne conviendrait-il pas d'en rester au droit existant ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Moga

Je souhaite vous interroger sur notre retard dans le solaire. En 2020, la filière a passé le cap des 10 gigawatts de capacités installées, quand la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) impose un doublement des capacités d'ici à 2023 et un quadruplement d'ici à 2028. Or de nombreux projets sont actuellement à l'arrêt ou ralentis. Dans mon département, un projet de ferme photovoltaïque d'une puissance de plus d'1 gigawatt ne parvient pas à voir le jour. Comment expliquer un tel paradoxe ? De manière plus générale, comment expliquer les contraintes qui freinent le développement bienvenu de l'agrivoltaïsme ?

Le projet de loi prévoit des mesures visant à promouvoir les alternatives à la voiture et à améliorer le transport routier de marchandises. S'agissant de ce dernier, nous savons que le dernier kilomètre est le talon d'Achille de la logistique.

Vous avez défendu à l'Assemblée nationale un amendement visant à élargir la prime à la conversion à l'acquisition de vélos cargos. Comptez-vous élargir encore ce dispositif à d'autres solutions, comme les remorques électriques intelligentes, qui peuvent être tractées manuellement ou par des vélos ? Il s'agit d'une innovation française qui pourrait permettre de résoudre de nombreux problèmes, notamment lorsque l'accès est difficile.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Je n'ai, pour ma part, aucun doute quant à votre sincérité et à votre détermination, madame la ministre.

L'article 65 du projet de loi précise que les objectifs de différentes stratégies nationales doivent être compatibles avec ceux de la politique agricole commune (PAC). Ainsi, nous ne pourrons atteindre ni les objectifs du plan Ambition bio ni ceux de la stratégie « Farm to Fork ».

Selon les premières informations qui nous ont été communiquées, le projet de plan stratégique national (PSN) de la PAC prévoirait une diminution de 66 % des aides aux exploitations bio sur le volet maintien. Concernant la conversion, si la directrice générale de la performance économique et environnementale des entreprises nous a annoncé que les enveloppes devraient augmenter, elle n'a pas précisé de montant. Ces éléments montrent hélas ! un manque d'ambition criant en matière d'agriculture biologique. Quelle est votre position quant à l'article 65 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

Dans un sondage récent, 70 % de Français se sont déclarés opposés à un référendum leur proposant de « garantir » la protection de l'environnement dans la Constitution. Contrairement à ce que vous avez indiqué, il ne me paraît pas évident que la totalité des Français comprend la gravité de la situation.

Je relève plusieurs paradoxes dans ce projet de loi. Par exemple, quand la loi Égalim prévoyait un repas végétarien par semaine, vous en prévoyez un tous les jours. Ce faisant, nous ouvrons un peu plus grande la porte des importations de produits qui ne respectent pas nos normes. Dans mon rapport sur le sésame, j'ai prouvé qu'à force d'interdire sans contrôler, nous finissons par manger ce que nous avons interdit, après avoir tué des filières entières.

Au travers de ce projet de loi, vous condamnez l'agriculture française à davantage d'écologie punitive : que ce soit en matière d'irrigation et de drainage ou de taxe azote, cela se traduira pour les agriculteurs français par un accroissement des charges, alors qu'ils sont en concurrence avec d'autres agriculteurs européens soumis à des normes moins contraignantes. Pourtant, s'agissant de l'azote, de nombreux efforts ont été réalisés, tels que le fractionnement, la mesure des reliquats en fin d'hiver ou l'incorporation de l'azote au plus près de la plante et au meilleur moment de manière à limiter les pertes.

Au lieu de nous préoccuper de ce que nous devrions continuer de faire, pourquoi ne pas nous préoccuper de ce que nous devrions faire tout de suite ? Par exemple, nous attendons toujours le décret, annoncé il y a déjà plusieurs mois, qui doit porter le seuil du guichet ouvert à 500 kilowatts crête pour le photovoltaïque, une énergie verte et renouvelable qui permettrait d'améliorer les résultats des entreprises dans de nombreux secteurs.

De même, nous ne savons toujours pas quels assouplissements seront apportés à la RE 2020. Ainsi, les élus qui souhaitent construire des logements, qu'ils soient individuels ou collectifs, ne savent toujours pas s'ils peuvent prévoir de les chauffer au gaz.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

L'Assemblée nationale a adopté des amendements visant à interdire le polystyrène. Êtes-vous en accord avec cette interdiction ? Vise-t-elle toutes les productions ou uniquement le vrac ? La portée économique d'une telle interdiction a-t-elle été examinée, le polystyrène étant le matériau utilisé prioritairement par les fabricants de produits laitiers frais ?

Certains éleveurs baissent les bras du fait des massacres de leurs troupeaux d'ovins, de caprins et à présent de bovins. Des mesures fortes visant à lutter contre la présence du loup trop près des maisons et des troupeaux sont nécessaires. Affichez-vous un soutien clair au pastoralisme, et si oui, de quelle façon envisagez-vous de lui venir en aide ?

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Le projet de loi prévoit la mise en place d'une redevance sur les engrais azotés minéraux si les objectifs annuels de réduction des émissions d'ammoniac et de protoxyde d'azote ne sont pas atteints. Cette perspective inquiète nos agriculteurs, car cela risque d'engendrer des charges supplémentaires, de créer une distorsion de concurrence, notamment au sein de l'Europe, et donc, de peser sur le revenu des agriculteurs. Pouvez-vous préciser la trajectoire de baisse des émissions ainsi que l'assiette éventuelle de cette taxe ?

Par ailleurs, une taxe doit être assortie de solutions alternatives et d'incitations. Or une étude a récemment indiqué que le gisement de matières fertilisantes d'origine organique ne permettra pas de couvrir l'ensemble des besoins. Plus qu'une nouvelle taxe, il paraît donc nécessaire de promouvoir les avancées technologiques telles que le fractionnement de l'azote et l'agriculture de conservation qui contribue au stockage du carbone dans le sol.

Debut de section - PermalienPhoto de Viviane Artigalas

Si le projet de loi prévoit d'interdire la location de logements considérés comme des passoires thermiques, seuls un audit et un chiffrage des travaux de rénovation sont prévus dans le cas d'une vente. Ne faudrait-il pas prévoir un dispositif plus contraignant ?

Par ailleurs, ne conviendrait-il pas de prévoir un délai plus long que ceux de douze mois pour une rénovation globale et dix-huit mois pour une rénovation complète retenus dans le texte afin de mieux s'adapter à la capacité financière des ménages ?

Debut de section - PermalienPhoto de Serge Babary

L'article 30 du projet de loi risque de fausser davantage la concurrence en matière de transport de marchandises avec des pays voisins comme l'Allemagne ou l'Espagne, aggravant les difficultés d'une filière déjà très fragilisée. Où en sont les discussions européennes sur ce sujet ?

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Alors que notre pays a connu l'une des plus fortes désindustrialisations d'Europe, un effort particulier doit être mené pour réimplanter des activités industrielles dans nos territoires, dans les zones urbaines, mais aussi dans des territoires moins denses. Comment concilier ce besoin de revitalisation économique avec les fortes restrictions qui pèsent sur les constructions nouvelles ? Les territoires aujourd'hui peu industrialisés sont-ils condamnés à ne pas accueillir de nouvelles entreprises faute de terrains disponibles ?

La transition énergétique de notre économie nécessite une accélération du déploiement des énergies renouvelables sur le territoire français. Pourtant, les méthaniseurs rencontrent des difficultés à mobiliser du foncier, y compris du foncier déjà artificialisé. Les objectifs de lutte contre l'artificialisation s'appliqueront-ils aux dépens de la réindustrialisation et de la transition énergétique ? Comment entendez-vous améliorer le projet de loi pour articuler ces impératifs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Franck Montaugé m'a prié de poser deux questions en son nom.

L'État va engager un programme de diminution de l'impact climatique de nos territoires avec les collectivités locales, notamment les régions, pour un montant de 40 millions d'euros. Les actions de ce programme alimenteront les futurs contrats de plan État-région (CPER). Comment envisagez-vous de gérer ce processus ? Prévoyez-vous de contractualiser ces objectifs locaux en rapport avec la stratégie nationale bas-carbone (SNBC) ? Comment allez-vous effectuer le suivi des résultats ? Les évaluations donneront-elles lieu à une actualisation des CPER si nécessaire ? Quels outils envisagez-vous de mettre à la disposition des collectivités pour mesurer les niveaux de résilience et de transition énergétique de leur territoire ?

Je vous poserai, pour ma part, une question relative à la réforme du code minier. Vous faites le choix d'effectuer cette réforme attendue depuis de nombreuses années par voie d'ordonnances. Ce faisant, vous évitez la concertation avec les acteurs concernés et le débat au Parlement. L'Association des communes minières de France (ACOM) s'est fortement étonnée de cette décision. Quels objectifs poursuivez-vous au travers de cette réforme, en particulier pour la gestion de l'après-mine ? Tous les territoires miniers étant concernés par cette question difficile, je souhaite avoir une réponse précise.

Debut de section - PermalienPhoto de Henri Cabanel

L'Assemblée nationale a approuvé la création d'un délit d'écocide ; la Convention citoyenne avait proposé d'en faire un crime. On discute de ce concept depuis une dizaine d'années et le Parlement européen a adopté en janvier dernier une résolution appelant à en faire l'un des crimes dont pourrait être saisie la Cour pénale internationale, à l'instar du génocide. Le Gouvernement durcit certes le cadre légal, mais faire de l'écocide un simple délit et échoue à donner leur pleine mesure aux ambitions écologiques des citoyens et de l'Europe.

J'approuve l'objectif de diminution de l'artificialisation des sols, mais à l'heure où les dispositions de la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) concernant l'offre de logements ne sont toujours pas appliquées par certaines communes, comment ce texte peut-il, en l'état, favoriser le renouvellement urbain ? Un problème de surcoût se pose. Nos collectivités s'adaptent sans cesse aux moyens et aux objectifs changeants de l'action publique. Pour éviter des efforts contradictoires, comment établir une culture des enjeux qui soit commune à l'administration et aux élus locaux, afin de mieux coordonner les initiatives de tous les acteurs ?

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Salmon

Vous avez invoqué une « écologie de bon sens », mais bon sens ne rime pas toujours avec science ! Le réchauffement climatique coûte déjà cher et il coûtera toujours plus cher ; il faut donc agir tout de suite. Ce texte va dans le bon sens, mais on est au milieu du gué.

Un rapport de France Stratégie publié en février dernier met en évidence les nombreux impacts négatifs des entrepôts de e-commerce, parmi lesquels l'artificialisation de nombreux hectares. Quand pensez-vous les faire rentrer dans le droit commun des surfaces commerciales ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marc Boyer

L'interdiction à compter de 2025 du polystyrène pour les emballages à usage unique ne prend pas en compte l'ouverture en France, dès 2023, d'une unité de recyclage de ces déchets, technologie de rupture développée par le groupe Michelin. L'Assemblée nationale a même avancé cette interdiction à 2021, contre l'avis du Gouvernement. Pensez-vous faire entendre raison à votre majorité parlementaire pour que cette interdiction n'entre pas en vigueur avant 2023 ?

Le transport aérien est crucial pour l'aménagement du territoire et le développement économique de nos régions. Le numérique émettra bientôt plus de CO2 que ce secteur : envisagez-vous de réduire la prolifération de tablettes, de téléphones et d'ordinateurs portables ? La reprise de la construction de lignes TGV a été annoncée par le Premier ministre, alors que Toulouse est aujourd'hui plus près de Paris que Clermont-Ferrand ! Le maintien de lignes aériennes essentielles pour la desserte des régions situées à plus de deux heures et demie de Paris en train, en particulier l'Auvergne, est-il garanti ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylviane Noël

Nous partageons l'objectif d'accélération de la lutte contre l'artificialisation des sols et l'étalement urbain. En Haute-Savoie, nous avons déjà divisé par deux et demi la consommation foncière en dix ans, en dépit de notre croissance démographique. La mise en oeuvre d'un tel dispositif ne peut se faire n'importe comment : je m'étonne que la définition de l'artificialisation nette et les modalités de compensation afférentes soient renvoyées à de futurs décrets et ordonnances. Le Parlement ne peut constamment faire des chèques en blanc au Gouvernement !

Les élus locaux sont inquiets des effets collatéraux de ces mesures. On peut redouter que les territoires ruraux et périurbains ne servent de caution environnementale au développement des grandes métropoles. Dans des zones déjà tendues et soumises à des contraintes réglementaires spécifiques, en montagne ou sur le littoral, on risque une nouvelle inflation des prix du foncier. Tout cela risque de remettre le feu aux poudres, peu après la crise des « Gilets jaunes ».

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Bouloux

Depuis quelques années, on multiplie les obligations d'information du consommateur sur les produits mis en vente. Cela ne risque-t-il pas de générer du suremballage ?

Debut de section - PermalienPhoto de Patricia Schillinger

Ce texte très dense se situe sur une ligne de crête entre la prise en compte de l'urgence climatique et un pragmatisme visant à ne laisser personne au bord du chemin. Son article 38 demande aux compagnies aériennes d'utiliser des crédits carbone pour soutenir des projets d'absorption situés de préférence sur le territoire français. Certains parlent de greenwashing ; d'autres nous alertent sur une trop forte pénalisation des constructeurs d'avions. Pouvez-vous nous rassurer quant à la cohérence de cette mesure ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Noëlle Lienemann

Comment favoriser l'innovation et le développement d'activités propices à la lutte contre le changement climatique ? Je veux vous signaler la situation de l'entreprise HACE, spécialisée dans l'énergie houlomotrice et la production d'hydrogène vert. Lauréats de plusieurs concours européens, ils ont demandé à l'État 2 millions d'euros d'aide au titre du soutien à l'innovation, afin de passer à la production d'un prototype, mais on leur répond que cette technologie n'est pas encore assez mature. C'est typique : nos hauts fonctionnaires croient savoir où l'innovation est possible et où elle ne l'est pas ! Pouvez-vous examiner ce dossier ? Plus largement, comment nous montrer plus ouverts à une innovation qui n'entre pas dans un encadrement préétabli ?

La volonté de faire figurer des clauses environnementales dans les marchés publics me semble encore très floue. Surtout, il faut intégrer les intrants dans le bilan carbone des entreprises ; cela permettrait de prioriser des entreprises locales.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Rietmann

Nous avons été plusieurs à être choqués par vos propos sur la viande servie dans les cantines françaises. Vous avez affirmé que la viande labellisée serait meilleure pour les enfants français. Tous les éleveurs français, que leur viande soit bio, labellisée, raisonnée, ou conventionnelle, produisent une viande de très haute qualité ! Prétendre qu'il y a une différence notable de qualité entre viandes françaises est une insulte faite à nos éleveurs. Demandez plutôt à ce qu'on serve dans nos cantines de la viande française !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Monsieur Laurent, concernant les droits de préemption relatifs au trait de côte, celui des collectivités affectées sera bien prioritaire sur celui des Safer, mais la réforme concernera bien tous les acteurs. Les Safer garderont des droits, mais il fallait donner aux collectivités les moyens d'agir en la matière.

Quant au foncier agricole sur les îles, si nous voulons des circuits courts et de la production localisée, nous devons à l'évidence préserver du foncier pour l'agriculture sur tous les territoires. Cela dit, des règles spécifiques sont nécessaires, d'autant que les îles sont différentes entre elles.

Beaucoup de questions m'ont été posées sur l'artificialisation. Vous évoquez les bâtiments nécessaires pour pérenniser l'activité viticole. Le principe n'est pas d'arrêter toute construction, mais de déterminer où il y a des besoins réels et où l'on peut ralentir le rythme de l'artificialisation. Le besoin de bâtiments viticoles peut tout à fait être entendu. Par ailleurs, il ne faudrait pas défavoriser les territoires qui ont déjà fait des efforts. Nous ne voulons pas non plus encourager une métropolisation qui se ferait au détriment des territoires plus ruraux, qui doivent se développer. Les territoires déjà plus développés ont en général plus de friches, qu'il convient de réutiliser.

Le principe en matière de consigne est de faire son bilan environnemental produit par produit, dans la suite de la loi AGEC. Aujourd'hui, on rajoute la possibilité de consigner le verre, mais il faut le faire de manière intelligente et pragmatique. Il serait absurde de soumettre à consigne des contenants pour lequel ce serait inadapté, comme les flacons de parfum ou certaines boissons surtout vendues à l'étranger. Il faut s'en tenir aux cas où la consigne a un réel intérêt, au terme d'études spécifiques. Quant aux contenants en verre non alimentaires, ils ne représentent que 1 % de tous les contenants : la mise en place de tout un système de consigne spécifique est-elle bien nécessaire ? En revanche, il faut aller le plus loin possible quand c'est nécessaire. Pour sortir du tout jetable, il faut recycler ou, mieux encore, réutiliser, ce qui demande beaucoup moins d'énergie et de technologies. Pour autant, la réutilisation n'est pas toujours la solution la plus efficace. Mettons-la en place là où elle est utile !

Monsieur Moga, la filière photovoltaïque a montré sa résilience en 2020 : 973 mégawatts ont été raccordés, contre 962 en 2019, malgré la crise sanitaire. Certains chantiers ont été affectés, des retards ont été pris dans l'instruction des dossiers, mais on devrait revenir à la normale cette année. Plusieurs mesures qui seront finalisées en 2021 permettront d'accélérer le développement de cette filière. Les nouveaux cahiers des charges des appels d'offres de mon ministère vont offrir un cadre renouvelé, avec des volumes en hausse : près de 3 gigawatts seront ouverts chaque année pour les projets au sol, sur bâtiments innovants et en autoconsommation. Le projet d'arrêté tarifaire évoqué par M. Duplomb est en phase de prénotification à la Commission européenne ; nous avons pour objectif de le publier cet été. Nous allons le plus vite possible, mais nous ne maîtrisons pas tous les délais : il faut attendre la réponse de la Commission.

Les gros projets menés en dehors des dispositifs de soutien sont soumis au droit commun de l'urbanisme et de l'environnement : on considère leur impact sur la biodiversité et les sols, on essaie de concilier tout cela. Ce texte soumet les nouveaux bâtiments commerciaux et ceux qui subissent une rénovation lourde à une obligation de mise en place de panneaux solaires, dès 500 mètres carrés. On sent une évolution sur ces sujets dans les territoires, de plus en plus de projets sont lancés, car chacun y trouve son compte. L'État soutient ces initiatives très inventives.

Concernant la prime à la conversion, l'Assemblée nationale en a élargi le bénéfice aux vélos cargos. Pour les véhicules utilitaires légers, le système actuel n'était pas assez intéressant pour les entreprises ; les modifications apportées seront notamment utiles pour mettre en place les zones à faibles émissions sans empêcher la mobilité de nos artisans. Les vélos-cargos comptent parmi les solutions qu'on leur propose. Mon ministère a été saisi du cas des remorques électriques : pourront-elles rentrer dans le cadre des aides à l'achat de vélos-cargos ? Réglementairement, ces remorques ne sont pas considérées comme des cycles, alors qu'elles ont la même fonction et s'attellent à des vélos. Mes services étudient les solutions juridiques qui permettraient de les aider au même titre que les vélos-cargos. Il faut y parvenir, car c'est une innovation qui va dans le bon sens !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Monsieur Labbé, je suis évidemment très attentive aux négociations sur la future PAC et au projet de PSN afférent. On discute encore entre ministères du niveau des enveloppes, mais une chose est sûre : il faut une ambition écologique accrue dans les deux piliers. Nous avons insisté pour que le bio soit bien soutenu ; les mesures en sa faveur seront meilleures qu'auparavant. L'obligation de compatibilité du PSN et de la PAC avec nos ambitions écologiques édictée à l'article 65 ne paye pas de mine, mais forcera l'État à se montrer vigilant en la matière : toute incompatibilité pourra être attaquée ! Par ailleurs, au cours du onzième programme des agences de l'eau, celles-ci prévoient d'engager 521 millions d'euros en faveur du développement de l'agriculture biologique, dont 461 millions d'aides individuelles ; en comparaison, pendant le dixième programme, elles n'avaient engagé que 284 millions d'euros à cette fin.

Monsieur Duplomb, je vous avoue mon agacement face à l'expression « écologie punitive ». J'ai pu constater que ceux qui l'emploient - je ne vous compte pas parmi eux ! - sont en général ceux qui veulent que rien ne bouge. La vraie écologie punitive, c'est ce qu'ont vécu les habitants de la vallée de la Roya, c'est ce que l'on vit dans ma région, où les maisons se craquellent sous l'effet des sécheresses.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurent Duplomb

Les catastrophes naturelles ne sont pas toutes dues à l'homme !

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Mieux vaut ne pas entrer dans ce débat, si l'on veut clore cette réunion avant minuit !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Les catastrophes que j'ai évoquées sont dues au changement climatique. Je vous invite à lire les travaux du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec), ainsi que ceux de la plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), instructifs sur les liens entre la déforestation, les trafics d'espèces et l'apparition de zoonoses et de pandémies. Ce qui se passe ailleurs a un impact ici !

En matière de menus végétariens, ce qui a été voté, c'est la généralisation de l'offre d'un menu végétarien par semaine dans toutes les cantines. Par ailleurs, un choix végétarien a été ajouté dans les cantines gérées par l'État, dont celles des universités. Il est important d'avoir le choix et de le donner à tous ceux qui fréquentent ces cantines : c'est normal et c'est sain. Dans un menu végétarien, on ne remplace pas simplement la viande par des fruits et des légumes. Pour qu'il soit équilibré, il faut remplacer les protéines de la viande par d'autres types de protéines.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Ce n'est pas le choix qui a été fait en France, car ce n'est pas vraiment dans notre culture ! On trouvera plutôt ces protéines dans des légumineuses, ou encore dans une omelette aux pommes de terre. Il ne s'agit pas simplement de retirer la viande de l'assiette ! Le ministre de l'agriculture a par ailleurs annoncé un plan protéines végétales qui vise à améliorer notre autonomie alimentaire en la matière.

Concernant la taxe sur les engrais azotés, la mesure proposée vise à accompagner les agriculteurs dans une trajectoire de réduction des émissions d'ammoniaque. Celle-ci nous est imposée par une directive européenne, à hauteur de 13 % à l'horizon 2030. C'est aussi un enjeu de qualité de l'air et de santé publique : il faut prendre les décisions qui s'imposent pour la santé de nos enfants. Or les émissions d'ammoniaque proviennent essentiellement du secteur agricole, au travers de la gestion des déjections bovines et de l'épandage de fertilisants minéraux et organiques. Les incitations sont importantes, mais elles ne sont pas toujours suffisantes : depuis 2000, ces émissions ont très faiblement diminué. Si le travail d'accompagnement que nous comptons mener auprès des agriculteurs ne permet pas à lui seul de respecter la trajectoire imposée, pendant deux années consécutives, et qu'une mesure équivalente n'a pas été déjà mise en place à l'échelle européenne, alors seulement une redevance sera mise en place afin de modifier les comportements d'achat d'engrais azotés minéraux au profit de formes moins émettrices d'ammoniaque. S'il faut en fin de compte instaurer cette redevance, il est essentiel que son produit soit redistribué au monde agricole : il ne s'agit pas de punir les agriculteurs, mais de les motiver. Un meilleur usage des engrais permettra en outre de diminuer les émissions de protoxyde d'azote, gaz à effet de serre 260 fois plus puissant que le CO2.

Madame Berthet, l'interdiction du polystyrène n'était pas prévue dans la version initiale de ce texte, mais a été rajoutée par l'Assemblée nationale. Ce qui me pose problème dans cette interdiction, c'est qu'elle ne tient pas compte du recyclage. La loi AGEC prévoit de tendre vers 100 % de plastiques recyclés d'ici au 1er janvier 2025, ce qui suppose que les résines employées soient recyclables et qu'une filière de recyclage soit opérationnelle. Une telle filière n'existe pas encore en France pour le polystyrène, mais il peut être recyclé en Espagne. Plusieurs projets de recyclage chimique ont été annoncés ou sont à l'état pilote en France. Aucune interdiction générale n'est prévue par la directive européenne sur les plastiques à usage unique. De telles interdictions de principe ne sont pas une bonne solution, car elles seraient contraires au droit européen : seuls les emballages non valorisables peuvent être interdits. Toute interdiction serait vue comme une restriction à l'importation, ce qui est prohibé par le droit européen. En revanche, la France a joué un rôle moteur pour inscrire dans le droit européen la possibilité de mettre en place des incitations économiques à l'écoconception des emballages, sous la forme de bonus-malus fixés dans le cadre des filières à responsabilité élargie du producteur (filières REP). Une pénalité est applicable aux emballages qui ne peuvent intégrer une filière de recyclage. C'est ainsi qu'on pourra favoriser les emballages écoconçus. Un bonus est aussi offert pour l'incorporation de plastique recyclé dans le polystyrène comme dans d'autres résines. Par ailleurs, la toxicité du polystyrène a été soulevée lors des débats à l'Assemblée nationale : de fait, ce n'est pas lui, mais un monomère de ce polymère, qui est toxique : c'est donc lors de sa production qu'il faut prendre des précautions pour protéger les travailleurs. Il n'y a en revanche pas de risque de dégradation du polymère qui mettrait en danger le consommateur. Le Gouvernement travaille avec la filière de l'emballage pour avancer sur toutes ces questions ; on pourra avoir ce débat en séance, mais il me semble qu'une interdiction sèche telle que celle qu'a adoptée l'Assemblée nationale pose problème.

Quant au pastoralisme, rappelons qu'une de mes premières sorties en tant que ministre de la transition écologique a été pour aller dans les Hautes-Alpes à la rencontre des éleveurs durement touchés par des attaques de loups. J'ai voulu leur dire que j'étais à leurs côtés et que le Gouvernement souhaite protéger et encourager le pastoralisme. L'écologie, c'est aussi l'entretien des espaces et des paysages. Grâce au pastoralisme, non seulement on mange de bons produits, mais on préserve aussi des prairies très riches en biodiversité. Je suis aussi obligée de protéger le loup. On a réfléchi à des solutions qui permettraient aux éleveurs de mieux se protéger, jusqu'aux prélèvements. Il faut aussi qu'ils soient indemnisés ; en 2016, lors de mon arrivée au ministère, ces indemnités étaient versées avec des retards de plusieurs années ! Ce n'est heureusement plus le cas. On ne pourra pas avancer en opposant les uns aux autres, il faut travailler ensemble. Le loup est revenu sur notre territoire ; on ne peut pas avoir une politique de protection des grands prédateurs à l'étranger et ne pas l'appliquer chez nous. Ce n'est pas facile, mais il faut continuer le travail.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Berthet

Je vous invite à venir dans le massif des Aravis, où de jeunes femmes éleveurs pourront vous expliquer comment elles doivent protéger leur troupeau chaque nuit contre des loups qui viennent narguer leurs chiens. Elles veulent bien discuter, mais quel accord est possible ? Il n'y a pas de compatibilité entre loup et pastoralisme ! Nous tenons tous à protéger l'environnement et nos espaces de montagne ; les enclos mènent au surpâturage et à la destruction de la flore, les chiens s'en prennent à la petite faune ; c'est contre-productif en matière de biodiversité.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Je connais les situations difficiles que rencontrent ces exploitations familiales, mais je ne serai pas la ministre qui dira qu'il faut éradiquer les loups pour sauver le pastoralisme. Cela n'aurait pas de sens et irait à l'encontre de nos engagements internationaux : on ne peut pas décider de la vie et de la mort d'une espèce ! Il faut faire en sorte que tout se passe bien. Des mesures existent déjà quand des loups sont dangereux, on doit pouvoir trouver celles qui sont les plus appropriées. Il y a des pays européens où la question ne se pose même pas. L'usage des chiens a suscité des problèmes, notamment avec les promeneurs, mais on observe une amélioration significative de la situation.

Madame Artigalas, le délai de dix-huit mois pour une rénovation complète me paraît adapté : c'est un gage de performance réelle des travaux réalisés. L'allonger augmenterait le nombre d'étapes de la rénovation ; il y aurait des phases intermédiaires, pendant des hivers successifs. Cela risque de conduire à une rénovation peu performante à terme, car on risque de faire l'impasse sur les interfaces et les interactions entre les différents postes des travaux. Des travaux supplémentaires souvent complexes sont alors requis, ce qui alourdit d'autant le coût pour les ménages. Une étude récente a montré qu'il était généralement possible d'atteindre le niveau de performance « BBC rénovation » en une ou deux étapes ; la consommation moyenne du parc augmente en revanche de 30 % lorsque les travaux sont réalisés en trois ou quatre étapes. À l'inverse, un délai rabaissé à douze mois serait trop court pour la mise en place de toute une rénovation.

Monsieur Babary, nous voulons que les discussions européennes sur le transport routier aboutissent pendant la présidence française de l'UE, au premier semestre de 2022.

Monsieur Redon-Sarrazy, concernant l'artificialisation, il faudra examiner la situation territoire par territoire : l'idée n'est pas d'empêcher toute artificialisation, mais de faire preuve de bon sens et d'aller d'abord chercher des terrains déjà artificialisés qu'on pourrait réutiliser. Ce réflexe à lui seul permettrait d'économiser énormément de béton.

Je vérifierai ce qu'il en est précisément des méthaniseurs. Nous voulons développer cette technologie, tout en mettant en place des garde-fous sur les cultures dédiées ; ils peuvent évidemment être améliorés. Cette filière se développe, ce qui engendre forcément de petites difficultés. On étudie les retours de terrain sur les emprises, les rejets, ou encore la concertation avec le public : dans tous ces domaines, nous entendons bientôt préciser la réglementation. Il va falloir faire comprendre à tous que la méthanisation a un double intérêt : elle offre un revenu complémentaire aux agriculteurs et permet une baisse de consommation de gaz naturel au profit d'un gaz issu d'une source renouvelable.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Faisons attention aux changements de destination des sols !

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Tout à fait, comme pour les agrocarburants. À force d'incitations, on a pu rencontrer des problèmes de cet ordre. Nos terres agricoles ne sont pas infinies ; c'est une autre raison de stopper l'artificialisation.

Monsieur Tissot, nous débattrons en séance de la réforme du code minier, mais sachez déjà que nous avons tenu à faire figurer tout ce qui concerne l'après-mine dans le dur de la loi. Dans bien des territoires de France métropolitaine, il faut gérer les conséquences d'une exploitation minière passée. Issue moi-même du bassin minier, je suis très attentive à ces questions.

Monsieur Cabanel, le crime d'écocide doit bien être envisagé à l'échelle internationale : on ne peut pas convoquer M. Bolsonaro devant un tribunal français pour son action en Amazonie ! En revanche, les atteintes locales à l'environnement, notamment les pollutions durables de rivières, qui affectent des écosystèmes entiers, sont une forme d'écocide qui ne relève pas, à l'évidence, du crime, mais peut être définie comme un délit. L'un n'empêche pas l'autre !

Monsieur Salmon, les entrepôts de e-commerce ne sont pas traités de la même manière que les zones commerciales parce que la procédure pour ces dernières est construite autour de la surface de vente et de l'accessibilité du lieu à la clientèle. Cela dit, je conviens évidemment qu'il y a un besoin de planification sur ce sujet. C'est pourquoi les députés ont proposé d'inscrire ce principe dans les SCoT, à travers le document d'aménagement commercial et logistique. On s'est peu posé jusqu'à présent la question de l'impact environnemental de la logistique. Une mission vient de rendre ses conclusions ; on étudiera ses recommandations en lien avec les professionnels. Le constat est clair : les entrepôts liés au e-commerce contribuent aujourd'hui au flux d'artificialisation annuel à hauteur de 0,5 % ; cette contribution existe, mais elle est faible. Les préfets auront désormais la possibilité de mieux encadrer un projet d'entrepôt au regard des risques d'artificialisation des sols qu'il présente. Les entrepôts peuvent aussi être source d'émissions de gaz à effet de serre. Il faut développer un e-commerce plus durable ; on ne peut pas demander aux gens d'arrêter de commander en ligne ! L'enjeu crucial se joue autour de la livraison, au dernier kilomètre ; c'est pourquoi le Gouvernement a lancé une mission sur la logistique urbaine durable et mis en place des aides en la matière, notamment en faveur des livraisons à vélos.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Cela ne peut marcher que dans les villes. Pour transporter les produits sur de plus longues distances, il faudra d'autres solutions.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Certes, il faut penser aux zones rurales, mais on ne peut pas non plus oublier le milieu urbain, où vit la majorité de la population. Les deux sont importants ! Nous avons confié à Anne-Marie Idrac une mission de concertation avec les acteurs pour faire émerger des filières logistiques plus responsables et formaliser des engagements en la matière.

Monsieur Boyer, concernant le transport aérien, nous avons décidé de limiter à un temps de trajet ferroviaire de 2 heures 30 les interdictions de lignes aériennes nationales, parce que certains territoires ont besoin de ces liaisons pour leur désenclavement. Quant à la part de l'aviation dans les émissions de gaz à effet de serre par rapport au numérique, vous avez raison, l'empreinte du numérique va croissant ; elle provient notamment de la fabrication des terminaux. Nous avons donc mis en place avec Cédric O une feuille de route visant à faire baisser cet impact environnemental, non pas en interdisant les nouveaux téléphones, mais en développant les filières de reconditionnement et en incitant à d'autres comportements : ne pas changer son téléphone dès la sortie d'un nouveau modèle, décourager les offres à un euro.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

On ne gagne que les batailles qu'on mène !

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Le débat pourrait encore être long sur ce sujet. Rappelons que le Sénat a adopté la proposition de loi visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, qui sera soumise à l'Assemblée nationale.

Debut de section - Permalien
Barbara Pompili, ministre

Madame Noël, bravo pour les résultats de votre département ! Il faut que les autres en fassent de même, sans territoires perdants.

Monsieur Bouloux, je ne vois pas de lien entre les mesures que nous mettons en place et un risque accru de suremballage.

Madame Schillinger, concernant l'impact économique de la compensation prévue des émissions de carbone pour les vols effectués à l'intérieur du territoire national, le montant dû pour un aller-retour international depuis Nice via Paris Charles-de-Gaulle serait de 0,8 euro seulement dans l'hypothèse d'une valorisation de 5 euros par tonne de CO2 et de 4 euros dans l'hypothèse d'une valorisation à 30 euros. Il ne faut évidemment pas entraver la compétitivité du hub de Paris Charles-de-Gaulle ni affecter la pérennité de certaines liaisons long-courrier. Il s'agit d'émissions bien réelles et comptabilisables grâce aux critères d'éligibilité qui seront définis par voie réglementaire, notamment le critère d'additionnalité des réductions d'émissions des projets de compensation permettant de s'assurer que ces gains n'auraient pas lieu en l'absence du projet. Le critère limitant le double compte permet en outre de s'assurer que les réductions ne sont comptabilisées qu'une fois.

Madame Lienemann, je partage votre point de vue : il ne faut pas restreindre les innovations. Je vais regarder le dossier de l'énergie houlomotrice, mais je connais d'autres exemples d'initiatives qui sont intéressantes, même si elles ne sont pas mûres, et méritent d'être fouillées. Il convient peut-être simplement d'orienter les demandes d'aides vers les bons fonds : le plan de relance se concentre sur les filières matures, de manière à ce que l'industrialisation soit lancée cette année ou l'année prochaine.

Monsieur Rietmann, vous êtes scandalisé par ma position sur les viandes labellisées. Je me refuse à rentrer dans les débats sans fin qui opposeraient défenseurs de la viande et défenseurs du veganisme ou de je ne sais quoi. Pour ma part, je défends l'environnement, le bien-être et la bonne bouffe ! J'adore la viande et je ne me prive pas d'en manger ! Simplement, manger trop de viande n'a pas un grand intérêt, d'autant que cela implique souvent que c'est une viande de moins bonne qualité : c'est mauvais pour la santé et pour l'environnement ; on sait que l'élevage bovin, en particulier, a un impact très fort sur l'environnement. On peut se voiler la face, ou essayer de trouver la meilleure solution. En France, la filière d'élevage est diversifiée et nous offre des viandes de qualité : pourquoi nous en priverions-nous ? On devrait se réjouir du choix que l'on offre à tout le monde dans ce texte, entre menus carnés et végétariens. Nous favorisons dans tous les cas la production locale, qu'il s'agisse de viande ou de légumes. Il existe des viandes de terroir succulentes ! Vous ne ferez donc pas de moi une ennemie de quiconque. Je veux à l'inverse que tout le monde s'y retrouve : les éleveurs, les citoyens et nos enfants.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Merci pour vos réponses, madame la ministre. Concernant l'étiquetage environnemental, vous nous dites prendre de l'avance sur les décisions européennes. Je vous signale que le Sénat a adopté une proposition de loi en la matière il y a dix-huit mois en anticipation de ces décisions, mais on attend toujours les décrets. Par ailleurs, on nous avait reproché d'anticiper les décisions européennes en matière d'empreinte du numérique : deux poids, deux mesures ! Enfin, à propos de la réforme du code minier, je vous ferai remarquer que les ordonnances ne vont pas plus vite que les lois, bien au contraire ; le risque de sortie du champ de l'habilitation est en outre réel, comme votre collègue Julien Denormandie peut en attester.

La réunion est close à 17 h 25.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.