Séance en hémicycle du 12 avril 2023 à 21h30

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

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La séance

Source

La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Vincent Delahaye.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour une mise au point au sujet d’un vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Monsieur le président, lors du scrutin public n° 270, ma collègue Elsa Schalck souhaitait s’abstenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Acte est donné de votre mise au point. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

L’ordre du jour appelle le débat, organisé à la demande de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst), sur la pollution lumineuse.

Dans le débat, la parole est tout d’abord à Mme Annick Jacquemet, au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Debut de section - Permalien
Annick Jacquem et

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mesdames, messieurs les sénateurs, le 26 janvier dernier, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques a adopté la note scientifique sur la pollution lumineuse dont il m’avait chargée et a souhaité que ce sujet fasse l’objet d’un débat public.

En effet, la pollution lumineuse est un phénomène massif, en pleine extension à l’échelle mondiale et qui contribue, au même titre que d’autres pressions anthropiques, au déclin de la biodiversité. En outre, la pollution lumineuse soulève de réelles préoccupations en matière de santé publique. Je vous renvoie à la note qui en détaille les caractéristiques ainsi que les effets.

Face à ce constat, seule une mobilisation collective, à la fois des pouvoirs publics – État et collectivités territoriales – et des acteurs privés, permettra de lutter contre le phénomène.

La France a développé une réglementation particulièrement ambitieuse pour limiter les nuisances lumineuses.

La temporalité de très nombreux éclairages est encadrée et restreinte, qu’il s’agisse des éclairages intérieurs de locaux à usage professionnel, des parcs et des jardins, des chantiers extérieurs, des parkings desservant une activité économique, des lumières éclairant le patrimoine, des éclairages de vitrines de magasin ou encore des publicités et enseignes lumineuses.

Par ailleurs, la réglementation fixe des prescriptions techniques qui visent à ne pas éclairer le ciel, à limiter l’éblouissement latéral et à réduire les températures de couleur.

Toutefois, plusieurs obstacles affaiblissent l’efficacité de ces mesures. D’abord, l’application de la législation reste limitée tant que tous les arrêtés ne sont pas pris. Ainsi, celui qui fixe les seuils maximaux de luminance des enseignes et des publicités lumineuses n’a toujours pas été publié, dans l’attente d’un arbitrage ministériel.

Je souhaiterais donc savoir, madame la secrétaire d’État, quand celui-ci sera publié et quelle version sera retenue puisque, selon mes informations, deux versions aux ambitions différentes vous ont été proposées.

J’ai également constaté que la réglementation actuelle restait incomplète. Ainsi, les événements extérieurs et les équipements sportifs font partie du champ d’application de l’arrêté du 27 décembre 2018, mais ils ne font l’objet d’aucune prescription de temporalité ou prescription technique.

Autre trou dans la raquette, les exigences en matière de lumière émise vers le ciel ne concernent que l’éclairage de la voirie et des parcs de stationnement, alors même que l’éclairage privé représente souvent une part importante des lumières émises.

À cet égard, un réel travail d’information des consommateurs est à mener. Les fabricants d’ampoules et de luminaires, mais également les enseignes de bricolage devraient s’assurer de l’innocuité des sources lumineuses qu’ils vendent et conseiller les consommateurs en encourageant une plus grande sobriété lumineuse, qui ne se limite pas à la sobriété énergétique.

En effet, si les light-emitting diodes (LED) ont un rendement lumineux très important et permettent de réaliser des économies d’énergie, leur faible consommation peut devenir un argument pour multiplier les points lumineux, alors que leur efficacité énergétique est inversement proportionnelle à leur impact sur la biodiversité en raison de leur forte proportion de bleu.

Par ailleurs, si des sanctions sont prévues en cas de non-respect de la réglementation visant à lutter contre la pollution lumineuse, dans les faits, elles ne sont jamais appliquées. Une étude récente de la direction interministérielle de la transformation publique a cherché à comprendre pourquoi la réglementation sur l’extinction nocturne des commerces était peu appliquée alors même qu’elle date de 2013. Cette étude fait les constats suivants : d’abord, les maires connaissent mal la réglementation ; ensuite, le contrôle de l’extinction nocturne est fastidieux, puisqu’il exige la mobilisation des services municipaux entre une heure et sept heures du matin.

Il s’agirait donc de sensibiliser les mairies sur la réglementation et sur leur rôle au travers d’un support d’information simple et facilement accessible, de fournir aux collectivités des outils pour communiquer avec les commerçants, tels que des guides pratiques et des courriers types, et de mettre en avant les bénéfices réputationnels qu’il y a à agir, dans la mesure où les Français sont très majoritairement favorables à l’extinction nocturne des commerces. En un mot, il faut simplifier la tâche des maires qui croulent déjà sous les obligations.

En ce qui concerne l’action à mener auprès des commerçants, il convient de leur rappeler la réglementation et les sanctions en cas de non-respect de celle-ci et de les sensibiliser à l’occasion de moments clés comme la création de nouveaux magasins ou encore lors de demandes d’aides.

Par ailleurs, il me paraît indispensable d’associer les fédérations de commerçants pour diffuser l’information sur la réglementation.

Le syndicat de l’éclairage doit également se mobiliser pour rappeler les règles d’extinction aux professionnels de l’éclairage et pour les inciter à mettre en place des solutions faciles permettant de gérer l’extinction non seulement des vitrines, mais également de tous les points lumineux dans les magasins, qu’il s’agisse des présentoirs ou encore des enseignes lumineuses à l’intérieur des vitrines, dont le développement est malheureusement en pleine explosion.

À l’échelon local, de nombreuses collectivités ne disposent pas toujours des outils juridiques nécessaires pour garantir la pérennité de leur action dans la lutte contre la pollution lumineuse. Je voudrais citer deux exemples.

Premièrement, un nombre croissant de communes éteignent l’éclairage des voiries au cours de la nuit. Pourtant, la responsabilité du maire peut être engagée en cas d’accident. Madame la secrétaire d’État, que proposez-vous pour protéger les maires ?

Deuxièmement, de nombreuses communes mettent en place des trames noires qui, à l’image des trames vertes et bleues, visent à recréer une continuité nocturne pour préserver la faune et la flore qui ont besoin de la nuit. Pourtant, les responsables municipaux ont pour la plupart estimé que le cadre réglementaire de ces trames noires restait précaire faute de leur mention dans le code de l’environnement. Madame la secrétaire d’État, partagez-vous cette analyse ? Comment rendre opposables les trames noires dans les documents d’urbanisme ?

Si la rénovation des éclairages publics a pour effet de supprimer des installations particulièrement énergivores, elle ne permettra de lutter efficacement contre la pollution lumineuse que si elle s’accompagne d’une réflexion préalable, menée avec les usagers, sur la finalité des éclairages et sur leur réelle utilité au regard des besoins avérés des habitants. Il s’agit donc de changer de paradigme en passant d’un éclairage systématique à une adaptation fine selon le contexte.

La pollution lumineuse a également des effets délétères sur la santé humaine qu’il convient de combattre. En effet, certaines sources lumineuses sont phototoxiques dans la mesure où elles échappent à la réglementation, qui impose que seules les lampes classées dans les groupes de risque photobiologique égal à 0 ou à 1, c’est-à-dire sans risque ou à risque faible, sont autorisées. Il s’agit notamment des lampes torches et des phares de voiture.

Par ailleurs, les valeurs limites d’exposition définies à l’échelle internationale datent de 2013 et ne prennent pas en compte la sensibilité particulière des enfants et des jeunes adultes. Le quatrième plan national santé environnement (PNSE) prévoit l’interdiction par la France des LED classées dans le groupe de risque supérieur à un, dans les articles à destination des enfants et dans les lampes frontales. Il précise également que la France portera au niveau européen une demande d’interdiction des phares automobiles à LED classées dans ce même groupe. Madame la secrétaire d’État, où en sont ces initiatives ?

Enfin, je voudrais insister sur les dangers de dérégulation du cycle circadien liés à l’exposition à la lumière artificielle bleue dégagée par les éclairages et les écrans en soirée et la nuit et sur la nécessité de mener régulièrement des campagnes de sensibilisation auprès de toute la population, en particulier des enfants et des adolescents.

Applaudissements sur les travées des groupes UC, Les Républicains, INDEP, SER et GEST.

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, 50 % ! C’est le taux d’augmentation des points lumineux en France depuis trente ans !

Or, comme les études le prouvent, nous savons que la pollution lumineuse à un effet négatif sur la biodiversité. Elle est aussi devenue un enjeu de santé publique, de sobriété énergétique et même de paysage nocturne, de plus en plus de nos concitoyens étant privés de la vue d’un ciel étoilé.

Je vous remercie donc, madame la rapporteure, ainsi que les membres de l’Opecst, à la fois pour votre travail étayé sur ce sujet stratégique et pour nous permettre de tenir ce débat.

Ce rapport s’inscrit dans la suite directe du travail réalisé en 2021 sur le déclin des insectes, problématique centrale de la protection de la biodiversité. Mais les enjeux dépassent de loin la simple question des insectes : environ un tiers des vertébrés et deux tiers des invertébrés sont nocturnes et dépendent directement de la nuit.

Pour les espèces diurnes, comme l’être humain, celle-ci est synonyme de repos et est essentielle à une bonne santé. Quant aux espèces nocturnes, les nuisances lumineuses font peser une menace directe sur leur activité.

Le développement urbain de ces dernières décennies a entraîné un recours quasi systématique à l’éclairage artificiel, à l’origine d’une pollution lumineuse inédite.

La lumière artificielle nuit à la physiologie et au métabolisme des espèces, ce qui perturbe leur bon développement. Cette pollution a aussi des effets encore plus directs et observables sur certaines espèces, à savoir la fragmentation de leur habitat.

Par exemple, une route éclairée peut constituer une barrière infranchissable pour des amphibiens en migration. À l’inverse, les papillons de nuit seront attirés par l’éclairage et tourneront indéfiniment autour de sa source jusqu’à épuisement. Sans parler des nombreuses espèces, notamment d’oiseaux et d’insectes, qui se servent du ciel étoilé pour se repérer et se déplacer.

On comprend donc aisément l’ampleur de cette pollution : elle emporte trop de conséquences négatives sur la biodiversité et elle est source de trop de gaspillage et d’énergie et d’argent.

Certes, l’éclairage de l’espace public est nécessaire pour se déplacer et pour certaines activités économiques. Cependant, compte tenu des développements technologiques et des attentes citoyennes en la matière, nous devons pouvoir concilier préservation de la biodiversité et aménagement de notre cadre de vie.

Il convient de faire de ce sujet une priorité et de l’intégrer dans la manière dont nous pensons la ville. L’objectif n’est pas de décroître, mais d’éviter tout surplus inutile.

Certains élus locaux précurseurs ont déjà évolué sur ce sujet. C’était avant tout par souci d’économie budgétaire que les communes en sont venues à réduire les éclairages. Désormais, nos concitoyens soutiennent cette stratégie pour d’autres raisons, notamment environnementales.

Votre rapport formule de nombreuses propositions, que j’ai étudiées avec beaucoup d’intérêt. Je souhaite que nous avancions ensemble sur ce sujet et j’ai moi-même des propositions à vous faire.

Concernant la publicité lumineuse, la réglementation existe. Nous avons déjà commencé à agir : ainsi, en octobre dernier, nous avons renforcé le cadre réglementaire en introduisant une obligation d’extinction nocturne sur tout le territoire, alors que seules les plus grandes agglomérations étaient jusqu’alors concernées.

Certes, la question de l’application de cette mesure, dont je vous confirme qu’elle est insuffisante, demeure.

Pourquoi ? Parce que le système de sanction nécessite de passer par un juge, ce qui le rend inopérant et ne pousse pas les maires à effectuer ces contrôles. Je vous propose donc que nous les facilitions en rendant possible la forfaitisation d’une amende.

Pour ce qui relève non pas de la publicité, mais de l’éclairage intérieur et extérieur non résidentiel, la réglementation mérite aussi d’être renforcée. Actuellement, l’éclairage des bâtiments non résidentiels doit être éteint d’une heure à sept heures du matin. Je souhaite aller plus loin et fixer l’extinction, par exemple, une heure après la fin de l’activité et jusqu’à une heure avant sa reprise.

Enfin, concernant les espaces naturels protégés, j’ai demandé à l’Office français de la biodiversité (OFB) de cibler les contrôles dans les espaces les plus sensibles. Nous pouvons aller plus loin dans la création de trames noires. Aujourd’hui, 15 % seulement de notre territoire sont indemnes de toute pollution lumineuse. Nous devons faire mieux, notamment en généralisant les trames noires dans les espaces protégés. Ce point sera intégré dans la stratégie nationale biodiversité 2030 qui sera annoncée prochainement.

Les opérateurs de transport ont également leur rôle à jouer. À cet égard, je tiens à souligner la signature d’une charte, le 27 mars dernier, qui conduit à mieux réguler la publicité lumineuse dans les gares, les stations et les aéroports, dans le cadre des plans de sobriété des secteurs concernés, portés par Agnès Pannier-Runacher et Clément Beaune. Avec cette charte, les opérateurs s’engagent à éteindre 100 % de leurs panneaux lumineux dès la fermeture des gares, des aéroports et des métros d’ici au 1er janvier 2024.

Ils s’engagent également à établir une stratégie de sobriété de la gestion de leur parc de panneaux lumineux. La RATP s’est engagée à réduire de 35 % sa consommation électrique d’ici à 2026, la SNCF de 45 % d’ici à 2031 et Aéroports de Paris de 50 % d’ici à 2030. Voilà qui est concret, réaliste et efficace !

Je suis maintenant prête à échanger avec vous, pour que nous imaginions ensemble de nouvelles mesures susceptibles de faire évoluer notre société vers plus de sobriété lumineuse, autant pour réduire notre consommation électrique que pour mieux protéger une biodiversité de plus en plus menacée.

Cela nécessitera, une nouvelle fois, un travail collectif avec vous, parlementaires, ainsi qu’avec les collectivités locales et tous les acteurs économiques concernés, car la protection du vivant est une mission qui nous concerne tous, chacun à notre niveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous allons maintenant procéder au débat interactif.

Je rappelle que chaque orateur dispose de deux minutes au maximum pour présenter sa question et son éventuelle réplique.

Le Gouvernement dispose pour répondre d’une durée équivalente. Il aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de répondre à la réplique pendant une minute supplémentaire. L’auteur de la question disposera alors à son tour du droit de répondre pendant une minute.

Dans le débat interactif, la parole est à Mme Annick Billon.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Billon

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le nombre de panneaux d’affichage traditionnels rétroéclairés augmente dans le domaine public. À Paris, par exemple, on en recense 1 700.

Ces affiches, qui fonctionnent généralement avec des néons alimentés par un petit moteur branché sur l’éclairage public, ne sont pas moins polluantes que les panneaux numériques à technologie LED.

De plus en plus de grandes villes françaises, telles que Colmar, Rouen, Nice, et Paris interdisent complètement le déploiement d’écrans numériques dans le domaine privé, aussi bien en cœur de ville qu’en périphérie. Ces interdictions sont justifiées au titre de la pollution visuelle et environnementale.

Cependant, en parallèle, la mairie de Paris installe 180 panneaux numériques dans l’espace public, et ce au titre de la sobriété énergétique !

Aussi, le Syndicat national de la publicité numérique (SNPN) s’apprête à déposer une plainte contre la France auprès de la Commission européenne pour entrave à la liberté du commerce et de l’industrie.

La jurisprudence et le droit européen reconnaissent l’application du principe de proportionnalité dans le cadre de la réglementation de la publicité extérieure, hors mobiliers urbains. Or ce principe n’est pas appliqué en France.

Madame la ministre, quelle est la position du Gouvernement ?

Le ministère de la transition écologique entend-il, dans le cadre d’une modification par décret, imposer aux règlements locaux de publicité le respect du principe de proportionnalité, comme cela se fait chez grand nombre de nos voisins européens ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Billon, le règlement national prévoit que la publicité est admise dans les agglomérations, mais qu’elle doit satisfaire à certains critères, notamment en matière d’emplacement, de densité, de surface, de hauteur, d’entretien et, pour ce qui concerne la publicité lumineuse, d’économie d’énergie et de prévention des nuisances lumineuses – ces derniers critères sont précisés par voie réglementaire.

Le règlement local de publicité permet de définir une ou plusieurs zones où s’applique une réglementation plus restrictive que les prescriptions minimales du règlement national.

En application de ce principe, les collectivités territoriales peuvent adapter la réglementation nationale en matière de publicité extérieure au regard des enjeux locaux et de la réalité des territoires. Il s’agit ainsi de trouver un équilibre entre des dispositifs ambitieux de préservation des paysages et du cadre de vie et des objectifs de développement économique des territoires.

Le principe de proportionnalité est donc naturellement un fondement sur lequel s’appuie la recherche de cet équilibre, sans qu’il soit besoin de le rappeler explicitement.

Plus généralement, tout encadrement par les collectivités d’une activité économique par voie réglementaire fait l’objet d’un examen par les services de l’État dans le cadre du contrôle de légalité et peut faire aussi l’objet d’un contrôle par les juridictions administratives afin de vérifier le bon équilibre entre les différents intérêts protégés. Il s’agit ainsi de concilier la qualité du paysage ou encore du cadre de vie avec l’activité économique.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Billon

Madame la secrétaire d’État, je vous remercie de ces éléments de réponse. Bien entendu, les collectivités et les services de l’État travaillent ensemble.

Je veux juste rappeler que Réseau de transport d’électricité (RTE) estimait, dans un rapport publié en 2021, que la réduction de l’utilisation des écrans publicitaires lumineux, sur une année somme toute normale, c’est-à-dire hors crise sanitaire et guerre en Ukraine, influerait seulement sur 0, 1 % du total de la consommation énergétique en France. Si nous reconnaissons tous qu’il est normal d’encadrer l’implantation et le fonctionnement des panneaux numériques, il convient de le faire de façon pragmatique. C’est bien le sens de votre réponse.

Debut de section - PermalienPhoto de Guylène PANTEL

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, dans un premier temps, je tiens à remercier l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques de la programmation de ce débat ô combien important.

J’ai l’honneur de m’exprimer au nom du groupe RDSE en tant que sénatrice et conseillère départementale de la Lozère, un territoire précurseur en matière de lutte contre la pollution lumineuse. En effet, le 13 août 2018, le parc national des Cévennes a obtenu le label « Réserve internationale de ciel étoilé » (RICE) – soit la plus vaste réserve d’Europe !

Vivant moi-même au cœur de la zone centrale de la réserve, où la noirceur naturelle est préservée au maximum, je peux témoigner du plaisir de pouvoir observer un ciel étoilé net et sans gêne extérieure, qui plus est lorsque l’on connaît les impacts positifs que cela peut engendrer sur la faune, la flore, la santé humaine et la baisse des dépenses énergétiques des petites communes.

Il me semble primordial de saluer le travail considérable réalisé par les acteurs impliqués comme les établissements publics, les syndicats d’électricité et, surtout, les collectivités locales en gestion directe.

Mon interrogation porte sur le calendrier d’entrée en vigueur des dispositions contenues dans l’arrêté du 27 décembre 2018 relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses.

En application de ce texte, les mises en conformité des installations existantes s’échelonnent jusqu’au 1er janvier 2025, avec des échéances intermédiaires. Or bon nombre de communes se sont engagées très tôt dans une démarche vertueuse pour une réduction drastique de la pollution lumineuse. Dès lors, madame la secrétaire d’État, avez-vous imaginé un système de bonus incitatif qui permettrait aux petites communes précurseurs d’obtenir un accompagnement technique et financier complémentaire ?

Par ailleurs, avez-vous mesuré les besoins en ingénierie des communes qui ne sont pas dans des périmètres de parcs naturels et qui peuvent être en difficulté pour appliquer cet arrêté ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Pantel, je vous remercie de prendre l’exemple des actions mises en place dans le parc national des Cévennes, un territoire que vous connaissez bien. C’est un très bel exemple d’initiatives qui pourraient être dupliquées dans d’autres espaces protégés.

Vous avez raison, il faut que les collectivités soient incitées financièrement à mener des plans ambitieux de lutte contre la pollution lumineuse. À défaut, le risque serait que ces actions restent isolées, sans connaître de généralisation, alors que c’est bien par cette mise à l’échelle que nous réduirons réellement l’impact de la pollution lumineuse sur la consommation d’énergie et la biodiversité.

Les efforts doivent donc être récompensés. Aujourd’hui, nous avons déjà un double bonus. Pourquoi ? L’économie d’énergie recherchée par les élus locaux quand ils rénovent leur parc d’éclairage est aussi une économie financière sur la facture. On voit bien que le signal-prix apporte un réel effet levier, au-delà de la seule économie d’énergie. À cet égard, je partage l’avis de Mme Billon.

Il faut ensuite prendre en compte les subventions obtenues dans le cadre du fonds vert. Cette incitation financière, c’est tout l’objectif de ce fonds, que nous avons officiellement lancé en janvier dernier et qui connaît un réel succès. Il permet de financer 40 % d’un projet et de déclencher ainsi des investissements de la part de collectivités qui ne se seraient peut-être pas engagées sans cet accompagnement.

Ces investissements seront source, à la fois, d’économies d’énergie et d’économies financières. C’est un cercle vertueux pour les collectivités. J’aurai sans doute l’occasion de vous présenter un bilan du fonds vert dans la suite de notre débat.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Anglars.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Anglars

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, l’émergence du problème public de la pollution lumineuse date de plus de cinquante ans. La prise de conscience de ses enjeux et de ses nombreuses conséquences, néfastes et variées, a toutefois été accélérée par l’augmentation du prix de l’énergie.

En quelques mois, de nombreuses collectivités territoriales – plusieurs milliers seraient concernées – ont ainsi fait le choix de réduire, voire de supprimer l’éclairage public la nuit. On peut se féliciter de la conciliation de la sobriété énergétique, des économies budgétaires et de la biodiversité.

Un constat ressort fortement de l’observation des cartes de la pollution lumineuse en France : il s’agit d’un phénomène avant tout urbain. Ce problème d’une France urbanisée est assez éloigné des préoccupations que nous retrouvons dans la plupart des départements les plus ruraux et des zones très peu denses. Une approche territoriale différenciée du sujet permettrait de mieux saisir des réalités distinctes et, éventuellement, d’adapter les solutions locales.

Le développement de cette réglementation pour limiter les nuisances lumineuses constitue aussi un nouvel enjeu pour le droit des collectivités territoriales et le cadre juridique des décisions des élus locaux, notamment des maires. Quid de la mise en cause de leur responsabilité en cas d’accidents ou de violences ?

Les nouvelles pratiques de l’éclairage public nécessitent ainsi, je le pense, la mise en place d’un cadre législatif et réglementaire, au-delà de la jurisprudence existante. Le droit doit évoluer avec la pratique, profondément transformée ces deux dernières années, afin de donner un cadre juridique clair aux élus locaux pour qu’ils puissent exercer leurs compétences.

Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement compte-t-il légiférer sur le sujet de la suppression ou de l’extinction de l’éclairage public ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Anglars, en effet, le maire est chargé de la sûreté et de la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement et l’éclairage.

Cependant, aucune disposition législative ou réglementaire n’impose aux collectivités territoriales une obligation d’éclairage de l’ensemble des voies de communication. Si le service public de l’éclairage extérieur revêt un caractère obligatoire, il n’implique pas pour autant un droit d’éclairage pour l’usager ou le riverain d’une voie publique. En revanche, le maire, chaque fois qu’il a conscience ou aurait dû avoir conscience d’un danger en vertu de son pouvoir de police, doit signaler aux usagers les risques qu’ils rencontrent.

De nuit, l’éclairage public est loin d’être la seule solution pour sécuriser un endroit dangereux. Des mesures de signalisation visibles de nuit, tels que des panneaux réfléchissants ou clignotants avertissant des dangers, ou encore les installations d’éclairage programmables ou pilotables à distance, peuvent parfaitement suppléer l’éclairage continu.

Dans les faits, on note qu’il y a davantage d’accidents ou d’agressions en plein jour ou dans des zones illuminées. Il y a, par exemple, plus de cambriolages en plein jour. Autre exemple concernant la sécurité routière : l’autoroute A15 n’est plus éclairée depuis 2010 et, pour autant, aucune augmentation d’accidents n’a été observée, bien qu’il y ait davantage de circulation sur cette voie. Le lien entre sécurité et éclairage ne se vérifie donc pas.

En tout cas, je peux vous confirmer que l’avis des maires est très important. Nous serons vigilants pour qu’ils ne soient pas en difficulté à cet égard.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les astronomes ne sont pas les seuls à subir la gêne de lumières trop fortes ou bien mal orientées. Les méfaits de la pollution lumineuse ne sont plus à démontrer, tant pour la faune et la flore que pour nos concitoyens.

Toutefois, en matière d’éclairage public, les intérêts doivent être conciliés. Bien qu’il s’agisse d’une source majeure de pollution lumineuse, l’éclairage constitue également l’une des composantes de la sécurité et du confort de nos concitoyens. Des rues bien éclairées sont souvent des rues plus sûres.

À ces intérêts s’ajoute la nécessité de réduire notre consommation d’énergie, en particulier celle de nos collectivités, dans un contexte de dérèglement climatique et de hausse des prix.

Désormais, le bon sens semble prévaloir. Nous voyons les commerçants éteindre leurs vitrines aux heures auxquelles personne ne circule pour faire ses emplettes dans des boutiques de toute façon fermées. Au-delà de la réglementation, la technologie doit aussi permettre de parvenir au bon équilibre. Une expérimentation d’un éclairage intelligent et autonome a été conduite à Bordeaux. De même, à Rambouillet, la ville du président Larcher, on teste un éclairage public bioluminescent.

Dans les deux cas, il s’agit de solutions développées par des sociétés françaises très innovantes. Sur la question de la gestion de son éclairage public, entre autres, il nous semble primordial que la France reste souveraine.

Madame la secrétaire d’État, des mesures sont-elles prises ou envisagées par le Gouvernement afin de soutenir ces activités et de faire en sorte que notre pays ne développe pas de dépendances à des technologies étrangères en matière d’éclairage public et de lutte contre la pollution lumineuse ? Quels leviers comptez-vous mobiliser à cet effet ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Menonville, les technologies d’avenir concernant l’éclairage public sont les LED. C’est sur ce secteur que l’industrie française doit consolider sa place prédominante non seulement en Europe, mais aussi dans le monde.

Les entreprises françaises ont fortement intérêt à se positionner sur le développement des technologies intelligentes comme le pilotage de l’éclairage public, en particulier au moyen de ce que l’on appelle la reconnaissance d’objets au passage, que ce soit des humains, un animal ou encore un véhicule. Le but est de passer du radar, qui ne fait que détecter un passage à proximité de l’éclairage public, à l’acquisition d’images non seulement pour savoir non seulement quel objet passe, mais également pour évaluer sa vitesse, afin de synchroniser l’allumage et l’extinction.

Si le passage à la LED permet de diviser par trois la consommation énergétique, ces nouvelles technologies aboutiraient, elles, à diviser la facture par six.

Notre industrie a également développé une compétence reconnue à l’international dans la conception quasiment clés en main d’un parc luminaire. Il s’agit de répondre à la recherche d’une signature visuelle typique de nos collectivités, mais également à une forte demande de « rétrofit », c’est-à-dire le passage de la lampe classique à la LED, sans modifier le design du luminaire.

Pour nos entreprises, l’intérêt réside dans la tête de la lampe électroluminescente, qui représente le composant le plus stratégique. En revanche, les plaques des LED, à faible valeur ajoutée, ne relèvent pas de l’innovation. En outre, le marché est déjà saturé.

Les industriels français ont aujourd’hui un vrai savoir-faire et une capacité à innover. Ils sont, par exemple, leaders mondiaux en éclairage solaire. C’est plutôt dans ce domaine que j’encouragerai les entreprises françaises à mener leurs projets.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. Joël Bigot applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Fernique

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la pollution lumineuse est encore très négligée en comparaison avec la lutte contre l’artificialisation.

Cette dernière est à raison bien engagée, mais elle touche 3 % des sols. La pollution lumineuse, elle, concerne 23 % de la surface terrestre et 85 % du territoire français. Est-ce une pollution négligeable ? Est-ce si grave que cela de ne pas pouvoir observer la Voie lactée ? Il y a une chanson enfantine qui le dit fort justement : « La nuit, c’est pas comme le jour, c’est pas vrai, tout est différent. »

D’abord, on ne voit pas. Ensuite, on réapprend l’obscurité, on tâtonne sous la voûte étoilée. C’est l’une des meilleures façons de se reconnecter à notre environnement, de profiter d’une appréhension sensorielle très riche du monde, et, comme le dit si bien la note de notre collègue Annick Jacquemet, de s’extraire d’une vision anthropocentrée.

« Insectes : s’ils disparaissent, nous disparaissons », titrait ce matin le journal Libération. Il faut savoir que la pollution lumineuse est responsable de la mort de milliers de milliards d’insectes.

Depuis le Grenelle de l’environnement, on a entamé la lutte. Progressivement les textes se complètent, mais pour quels résultats ?

L’éclairage public relève du volontarisme des collectivités. Est-ce suffisant, sachant que l’avènement de la technologie des LED réduit le gâchis énergétique, certes, mais aggrave la toxicité sur la biodiversité et la santé si elle n’est pas bien régulée ?

Il y a encore des manques. Ainsi, l’arrêté sur les seuils de luminance des publicités n’a toujours pas été publié, mais un décret sur l’extinction des publicités va entrer en vigueur. Avec le reste de nos mesures normatives, permettra-t-il de faire éteindre les dispositifs qui devraient légalement l’être ? On en est loin : le contrôle est très rare et les sanctions le sont plus encore.

Comment l’État compte-t-il assurer l’application de la loi ?

Sur la biodiversité, enfin, le cadre législatif et réglementaire reste très léger. Êtes-vous résolue, madame la secrétaire d’État, à consacrer et affermir la trame noire dans le code de l’environnement ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Fernique, vous avez raison, ce n’est pas une pollution anecdotique. Je vous remercie d’avoir rappelé un certain nombre de faits à cet égard. Le constat est évidemment alarmant pour la biodiversité, et particulièrement pour les insectes en France, comme s’en inquiète Libération.

Vous avez rappelé à juste titre que la publication des décrets a pris du retard. Nous sommes rattrapés par la patrouille et nous devrons nous montrer à la hauteur…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Le fait d’avoir ce débat ce soir, autour d’un constat partagé, notamment avec Mme la rapporteure, est important, parce qu’il me permet justement de mesurer tout ce qu’il nous reste à faire et de prendre des engagements auprès de vous. C’est d’ailleurs ce que je me suis efforcée de faire directement dans mon propos introductif.

Le rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) avait mis en avant le besoin de limiter l’utilisation des groupes de risque 2 et 3, c’est-à-dire des LED qui ont une forte teneur en couleur bleue. C’est vraiment problématique dans le spectre des couleurs ; il nous faut agir là-dessus.

L’obtention de certificats d’économie d’énergie sur les luminaires d’éclairage à modules LED impose déjà des groupes de risque 0 et 1 pour bénéficier de la certification CE. Les industriels ont d’ailleurs priorisé ces deux groupes pour le luminaire destiné à l’éclairage public. La révision de l’arrêté du 27 décembre 2018 pourra être l’occasion d’entériner cette exigence.

Par ailleurs, monsieur le sénateur, vous évoquez un paradoxe entre le gain énergétique et la protection de la biodiversité. À mon sens, ce n’en est pas un. Nous pouvons satisfaire les deux et en même temps.

Enfin, je vous rejoins sur la nécessité de créer des trames noires. Des expérimentations sont en cours et un certain nombre de dispositifs seront prévus dans la prochaine stratégie nationale biodiversité 2030.

J’ai pu noter des propositions intéressantes dans le cadre d’une discussion en commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale, le 29 mars dernier. Certains députés proposaient notamment que l’État puisse réglementer et restreindre les éclairages publics et privés en cœur de nuit par restriction de la puissance lumineuse ou l’extinction. Il a également été proposé que l’État mette en place des aires de protection de la faune nocturne et du ciel étoilé par la création de trames noires dans les espaces protégés, ce qui permettra donc à un certain nombre de Français de retrouver le plaisir de regarder un ciel étoilé.

Il me semble intéressant que nous travaillions autour de ces idées, qui relèvent non pas forcément de discussions législatives, mais plutôt du cadre réglementaire. Je pense que nous pouvons avancer sereinement et rapidement sur ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Nadège Havet

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, il est important que nous puissions débattre de la pollution lumineuse grâce à cette initiative de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

À la suite de vos travaux, madame la sénatrice Jacquemet, une note a été rédigée rappelant que plus de trois humains sur dix ne peuvent voir la Voie lactée la nuit. Cette proportion monte à six sur dix en Europe et à huit sur dix aux États-Unis.

En France, le nombre de points lumineux a augmenté de plus de 50 % en trente ans. Il s’agit d’un phénomène de très grande ampleur, directement imputable à l’activité humaine, mais dont on parle moins que d’autres. Il entraîne des nuisances sur les cycles de la faune et la flore, perturbés par cette illumination perpétuelle du ciel. Les oiseaux migrateurs, les insectes et les chauves-souris sont les espèces les plus touchées, alors qu’elles jouent un rôle central en matière de biodiversité.

En 2018, un arrêté relatif à la prévention, à la réduction et à la limitation des nuisances lumineuses est venu encadrer les installations d’éclairage public et privé pour réduire leurs incidences sur la biodiversité. Plus récemment, la COP 15 biodiversité de Montréal a abouti à un accord. Les cibles 2 et 7 qui y figurent traitent de la restauration des écosystèmes dégradés et de la réduction des pollutions à la source, notamment lumineuses.

Les trames noires ont été intégrées à la stratégie nationale biodiversité 2030. Ces corridors écologiques d’obscurité apportent une véritable respiration pour des écosystèmes fortement perturbés ces dernières décennies.

Madame la secrétaire d’État, quelle évaluation faites-vous de l’application de l’arrêté de 2018 et de ses effets ? Dans la stratégie nationale biodiversité (SNB), quelles sont les actions prévues dans le cadre du volet « incitation au développement des trames noires » ? Quels sont les objectifs en matière de lutte contre la pollution lumineuse ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Havet, l’arrêté du 27 décembre 2018 fixe des obligations techniques à respecter dans des délais contraints. Le contrôle est du ressort du maire, sauf pour les installations communales pour lesquelles l’État est expressément compétent.

Aujourd’hui, soyons très clairs, les contrôles portant sur le respect de cette réglementation sont insuffisants. J’ai déjà eu l’occasion de le souligner, mais je tiens à y insister : il faut que nous agissions.

Dans mon discours d’introduction, je vous ai annoncé vouloir travailler sur la mise en place d’une amende forfaitaire, de type carnet de souche, pour simplifier la prise de sanction sans avoir besoin d’en passer par le parquet et le juge.

Ensuite, nous souhaitons également que les contrôles sur la pollution lumineuse réalisés par l’OFB soient ciblés dans les zones les plus sensibles pour la biodiversité. Ce point figurera dans la stratégie nationale biodiversité.

Enfin, le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB) travaille sur une méthodologie simple et pratique pour permettre le contrôle de la partie technique de la réglementation. Il s’agit, par exemple, de la vérification de la température, de la couleur, de la part de lumière émise au-dessus de l’horizontale, de l’intensité lumineuse… Le temps me manque pour détailler ce qui sera prévu dans le second volet de la SNB. Je prendrai plus de temps pour vous répondre précisément à la faveur de questions ultérieures.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Bigot

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, aujourd’hui, un tiers de l’humanité ne peut plus distinguer la Voie lactée.

La faune, la flore, la fonge sont affectées par la pollution lumineuse. Les animaux diurnes et nocturnes voient leur cycle de prédation détérioré, au détriment de la chaîne alimentaire. Le suréclairage est la deuxième cause de mortalité des insectes après les pesticides. Le rythme circadien humain est également déstabilisé, entraînant de nombreux problèmes de santé pour l’homme. Le constat est alarmant !

Les progrès en matière de performance de l’éclairage sont assortis d’un effet rebond, qui conduit à un élargissement des zones éclairées, à hauteur de 2 % par an dans le monde. La technologie des LED est pourfendue par les associations, qui dénoncent l’augmentation de la lumière bleue, plus dangereuse pour la biodiversité, quand le rapport de l’Opecst relativise le bilan carbone.

De nombreuses solutions existent à droit constant. Il faut faire respecter l’arrêté du 27 décembre 2018, qui encadre l’éclairage privé, mais dont les associations relèvent la non-application de fait.

En Maine-et-Loire, France Nature Environnement et la Ligue de protection des oiseaux sont particulièrement actives. Elles recensent les lieux d’éclairage potentiellement illégaux et sensibilisent les acteurs privés, comme les collectivités.

Malgré un coût d’intervention du syndicat de l’énergie, des communes d’Anjou sont volontaires dans des politiques d’extinction. À Saumur, des rues sont équipées depuis huit ans de réverbères avec des cellules qui détectent les voitures et les piétons. Cela permet d’économiser près de 90 000 euros pour une commune de 27 000 habitants !

Dans ce même département, le Centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) Loire-Anjou accompagne les communes dans l’élaboration de trames noires, en identifiant des zones à enjeu pour la biodiversité, une bonne pratique identifiée dans le rapport de l’Opecst.

Madame la secrétaire d’État, quels engagements comptez-vous prendre pour accompagner ces initiatives locales concrètes et assurer, dans les politiques publiques de l’État et dans l’initiative réglementaire, la promotion de ces solutions partout en France pour retrouver la nuit ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Bigot, je partage votre constat sur les effets très importants de la pollution lumineuse sur la biodiversité. Vous savez que ce sujet me tient à cœur, d’autant plus que nous venons d’aboutir à un accord mondial lors de la COP 15, lequel sera repris dans la stratégie nationale biodiversité qui sera annoncée prochainement.

Les constats que vous faites et les questions que vous posez me permettent de détailler les actions que nous prévoyons d’intégrer dans la SNB pour lutter contre la pollution lumineuse et préserver notre biodiversité.

J’en préciserai quatre.

Nous prévoyons d’améliorer la connaissance des effets de cette pollution sur la biodiversité grâce à de nouveaux indicateurs et à l’enrichissement des bases de données, via notre observatoire ; d’éviter les impacts des équipements lumineux en améliorant le conseil des distributeurs auprès de leurs clients ; de développer les trames noires dans les territoires – je les ai évoquées précédemment, je n’y reviens pas – ; de mieux cibler une partie des contrôles sur les espaces les plus sensibles pour la biodiversité.

Comme vous, je salue ce que fait la ville de Saumur depuis maintenant plusieurs années, alors qu’on parlait assez peu de ce sujet jusqu’à présent. Le fonds vert accompagne les collectivités dans leurs prises d’initiatives. Cela fonctionne très bien. De nombreux projets portent sur l’éclairage public, tant mieux. Il faut évidemment continuer dans ce sens. Nous avons bon espoir, Christophe Béchu et moi, de pérenniser le fonds vert afin de pouvoir continuer d’accompagner les collectivités.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-François Longeot

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la pollution est multifacettes. Les déchets, le carbone et les transports polluent, mais la lumière aussi. Or la pollution lumineuse est l’une des grandes oubliées des politiques environnementales. Si vous me passez l’expression, nous ouvrons à peine les yeux sur ce sujet.

C’est pourquoi la note que vient de publier l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques sur ce phénomène est si précieuse. Je tiens en particulier à saluer le travail de ma collègue du Doubs, Annick Jacquemet, qui en est l’auteur. C’est la première fois que le Parlement s’intéresse à ce problème, qu’il en établit les caractéristiques, les effets, et qu’il avance des solutions pour y remédier.

Parmi les outils dont nous disposons aujourd’hui à l’échelle locale pour passer « d’un éclairage systématique à une adaptation fine de celui-ci selon le contexte », pour reprendre les termes de la note de l’Opecst, figure le fonds vert. Il a été officiellement ouvert au mois de janvier dernier sous forme d’un guichet unique pour les collectivités. Doté de 2 milliards d’euros, il a vocation à subventionner à hauteur de 40 % les projets de transition écologique des collectivités. Parmi ces projets de transition figure la rénovation des éclairages publics.

Une remise des prix des premiers lauréats a eu lieu la semaine dernière. Les résultats sont encourageants : au total, le coût des projets déposés depuis le mois de janvier a atteint l’enveloppe dédiée de 2 milliards d’euros de subventions.

D’après nos informations, et vous pourrez nous le confirmer, madame la secrétaire d’État, l’éligibilité des projets est en cours d’étude. Beaucoup d’entre eux porteraient sur l’éclairage public. Combien ? En quoi consistent ces projets ? Vont-ils servir à lutter contre la pollution lumineuse, objet du présent débat ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Longeot, annoncé par la Première ministre le 27 août dernier, le fonds vert doit permettre le déploiement d’actions territoriales de transition écologique. Il a été ouvert officiellement au mois de janvier, sous le pilotage des préfets et sous forme de guichet unique pour que la démarche des collectivités soit la plus simple possible.

Le succès est réel puisque, à l’heure où je vous parle, environ 7 000 dossiers ont été déposés et l’enveloppe dédiée de 2 milliards d’euros a été atteinte. Les dossiers sont en cours d’étude. Cela ne signifie pas que les 2 milliards d’euros ont été dépensés. J’y insiste, car cela signifie que vous pouvez continuer à inciter les territoires à déposer des projets.

Les projets de rénovation énergétique et d’éclairage public ont connu un succès rapide. C’est une bonne nouvelle pour le sujet qui nous occupe aujourd’hui. L’accélération de la rénovation des parcs de luminaires d’éclairage public est en effet un moyen de lutter contre la pollution lumineuse.

Le fonds vert s’applique à l’éclairage public extérieur sécurisant les cheminements des personnes. Il permet de financer des études comme un diagnostic territorial, une stratégie d’extinction en cours de nuit ou encore la création d’une trame noire.

Ces subventions permettent à la fois de financer de l’ingénierie et surtout des investissements de modernisation du parc de luminaires. L’objectif est de diminuer le nombre de points lumineux et leur puissance. Ces subventions sont un véritable levier pour accompagner les collectivités dans la dépollution lumineuse.

Aujourd’hui, 2 000 projets portent sur le renouvellement des parcs d’éclairage public. Ils représentent 28 % des projets déposés dans le cadre du fonds vert. Par ailleurs, je peux d’ores et déjà vous dire, compte tenu du nombre de dossiers qui ont été déposés, que nous atteindrons l’objectif que nous nous étions fixé de rénovation de 10 % du parc d’éclairage.

Je profite d’ailleurs de votre question pour vous rappeler que 150 millions d’euros du fonds vert sont destinés à la préservation de la biodiversité. Cette enveloppe, en revanche, n’est pas atteinte. Je vous encourage donc à communiquer au maximum sur cette possibilité de subvention auprès des collectivités que vous représentez.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à M. Guillaume Chevrollier.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, effondrement de la biodiversité, destruction des populations d’oiseaux et d’insectes, halo lumineux au-dessus des villes, altération du sommeil, augmentation des risques cardio-vasculaires et de cancer : on ne compte plus aujourd’hui les effets nocifs de la pollution lumineuse sur la santé du vivant et sur notre environnement, effets d’ailleurs très bien documentés dans de nombreuses études scientifiques.

La croissance démographique, doublée d’une forte urbanisation, a conduit à l’explosion des émissions lumineuses, notamment du fait de l’éclairage public. Non seulement cet éclairage artificiel nocturne participe au dérèglement climatique en perturbant les écosystèmes, mais il contribue au gaspillage énergétique. Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), l’éclairage public correspond à 41 % de la consommation d’électricité des communes et émet annuellement 670 000 tonnes de CO2.

Afin de lutter contre ces nuisances lumineuses, la France s’est dotée d’une réglementation « ambitieuse », selon le terme de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques dans une note datant de janvier 2023. Cette réglementation fait notamment du maire l’autorité compétente pour s’assurer du respect des dispositions de sobriété de l’éclairage public nocturne. Je redis ici combien l’action à l’échelle communale est importante pour agir efficacement contre la pollution lumineuse.

Dans mon département de la Mayenne, les élus sont conscients de ces enjeux et prennent des engagements forts. À titre d’exemple, la commune de La Bazouge-des-Alleux a reçu le label « Villes et villages étoilés », créé par l’Association nationale pour la protection du ciel et de l’environnement nocturnes et lutte activement pour la qualité de la nuit.

De nombreuses communes de mon territoire, à l’instar de Montjean, se lancent dans la révision de leur éclairage public, en partenariat avec le syndicat Territoire d’énergie Mayenne. D’ici à 2026, tous les luminaires qui éclairent totalement ou partiellement vers le ciel doivent être remplacés, mâts et câbles compris pour les plus anciens. Pour la Mayenne, le coût de l’opération s’élève à plusieurs millions d’euros.

À travers le fonds vert, l’État peut accompagner utilement un tel partenariat entre une commune et le syndicat d’énergie. Il est néanmoins nécessaire d’améliorer les critères d’éligibilité à ce financement et de rendre plus fluide la coordination entre les différentes parties prenantes.

Debut de section - PermalienPhoto de Guillaume Chevrollier

Je termine, monsieur le président.

Madame la secrétaire d’État, au regard de ces initiatives locales et d’une réglementation qui demeure incomplète, comment le Gouvernement compte-t-il accompagner encore plus nos territoires ruraux en matière de lutte contre la pollution lumineuse ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Chevrollier, je l’ai dit précédemment, nous souhaitons mieux accompagner les collectivités dans leur lutte contre les pollutions lumineuses, grâce au fonds vert pour le volet relatif au financement et à la forfaitisation de l’amende pour le volet relatif à la facilitation du contrôle.

Accompagner les collectivités, c’est aussi les soutenir dans leur ingénierie. L’information et la formation des élus seront un chantier que le ministère devra ouvrir avec la révision de l’arrêté du 27 décembre 2018. En complément, les professionnels de l’éclairage, les services de l’État et la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies pourront être des forces de proposition pour aider les collectivités à faire le bon choix technique.

Pour la mise en avant des collectivités vertueuses, je tiens à rappeler le soutien que le ministère accorde à l’Association nationale de protection du ciel et de l’environnement nocturnes, en particulier pour son concours Villes et villages étoilés, que vous avez cité, lequel a récemment été ouvert aux territoires. De même, le ministère, au travers des parcs nationaux et des parcs naturels régionaux, soutient les territoires et les aide à porter des projets de réserve internationale de ciel étoilé.

Debut de section - PermalienPhoto de Martine Filleul

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, les élus locaux se mobilisent déjà depuis plusieurs années contre la pollution lumineuse. Leurs approches sont multiples.

Dans mon département, Douai a mis en place une trame sombre. La lumière est réduite de 90 % la nuit et des détecteurs de présence ont été installés pour les humains.

Lille, afin de protéger ses corridors écologiques, remplace les anciennes LED à lumière blanche ou bleue, qui représentent une catastrophe pour la biodiversité, par de nouvelles LED ambrées, dont la longueur d’onde ne gêne plus les espèces animales. Les résultats sont systématiquement éloquents.

Les effets néfastes observés sur les espèces animales sont également largement documentés sur l’être humain.

Comme le souligne l’Opecst dans son rapport, ces effets incluent des altérations du sommeil, des troubles de la mémoire, de l’humeur, de l’attention, une augmentation des risques cardio-vasculaires, de cancer, de diabète ou d’obésité.

Œuvrer pour une adaptation de l’éclairage privé et public vers des LED de nouvelle génération, c’est agir pour la biodiversité et directement pour la santé de nos concitoyens.

Madame la secrétaire d’État, quelles orientations le Gouvernement entend-il prendre pour la santé de nos concitoyens ? Allez-vous compléter la législation pour lutter contre les risques de phototoxicité de certaines sources lumineuses ? L’État a-t-il répertorié les bonnes pratiques mises en place par les élus locaux dans les territoires ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Filleul, je vous remercie pour le partage des bonnes pratiques. Vous avez cité certaines communes qui participent à la dépollution lumineuse. Il est toujours très intéressant de pouvoir s’en inspirer.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire, des collectivités mettent en place un certain nombre de dispositifs. Il est très intéressant que l’équilibre des éclairages fasse l’objet d’une concertation avec les habitants de la ville, afin de prendre en compte au mieux leur usage de l’espace public.

Vous avez raison, nous devons aller plus loin concernant les mesures que nous demandons aux différents acteurs. À ce titre, je me réjouis de la signature, le 27 mars dernier, de la charte d’engagement des acteurs du transport avec le ministère de la transition énergétique et celui de la transition écologique et de la cohésion des territoires pour tendre vers plus de sobriété énergétique, grâce à des mesures d’extinction des panneaux lumineux.

Je l’ai dit également, je souhaite que nous allions plus loin en renforçant l’extinction des bâtiments non résidentiels. Actuellement, l’heure d’extinction s’étend d’une heure à sept heures du matin. Je souhaite étendre cette plage horaire, qui débuterait, par exemple, une heure après la fin de l’activité et irait jusqu’à une heure avant sa reprise.

Je souhaite aussi que nous réfléchissions à la diminution des nuisances lumineuses issues des serres et des verrières, telles que les serres agricoles. Les éclairages excessifs et non directifs de certaines serres ont des conséquences importantes sur la faune, les insectes, les oiseaux, les chauves-souris, mais aussi sur le paysage nocturne. On parle de ciel rouge et jaune.

Je pense que nous pouvons aussi travailler sur la diminution des puissances lumineuses des stades avant et après les événements sportifs.

Toutes ces mesures ne nécessitent pas encore un véhicule législatif. On peut agir assez rapidement par voie réglementaire.

Je n’oublie pas ce qu’a dit Mme la rapporteure, notamment sur la lumière bleue ; un rapport a été rendu sur son caractère néfaste pour les enfants. Nous pouvons mettre en œuvre ensemble un certain nombre de mesures. Réfléchissons-y en nous appuyant sur le rapport de l’Office, mais aussi sur les mesures que vous pourriez proposer, madame Filleul.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, je pose une question au nom de ma collègue Marta de Cidrac, à laquelle je m’associe.

On l’ignore, mais pour près de 60 % des Européens et 80 % des Américains, il est impossible d’observer la Voie lactée. Environ un tiers de l’humanité est victime de ce que l’on appelle la pollution lumineuse, qui affecte également la biodiversité sur près de 20 % des terres émergées.

De 1990 à 2010, les zones illuminées ont progressé de 6 % par an. Le rythme reste aujourd’hui soutenu, à peine tempéré par les récentes prises de conscience.

Inéluctablement, nos espaces de vie sont gagnés par la pollution lumineuse, générant stress, anxiété et perturbation du sommeil.

Ce phénomène exerce aussi une forte pression sur la biodiversité et a des conséquences multiples, dont certaines sont encore mal évaluées. Une telle perturbation du vivant ne sera pas, à terme, sans conséquence. Je pense notamment aux insectes, essentiels au bon maintien des réseaux trophiques.

Dans de nombreuses communes, notamment celles de mon territoire, des mesures ont été prises, comme l’extinction de l’éclairage public aux heures creuses de la nuit. À la maîtrise de la consommation énergétique préconisée dans le plan climat-air-énergie territorial (PCAET) s’ajoute donc la protection de la biodiversité.

Madame la secrétaire d’État, il nous faudra malgré tout aller plus loin pour atteindre un équilibre entre préservation de la biodiversité et progression des zones illuminées.

Quelle feuille de route le Gouvernement compte-t-il suivre pour y faire face et dans quels délais ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Richer, l’équilibre entre préservation de la biodiversité et progression des zones illuminées réside dans la multiplicité des solutions et dans le développement des technologies.

La lutte contre les nuisances lumineuses peut en effet prendre diverses formes, comme l’extinction totale en cœur de nuit, à l’instar de ce qui se fait dans l’intégralité des communes du parc naturel régional du Gâtinais français. Elle peut aussi passer par le pilotage intelligent de l’éclairage, qui a été testé à Paris, à Bordeaux ou à Toulouse. Les solutions doivent être étudiées au cas par cas, selon la volonté locale, que ce soit pour la création de trames noires ou la mise en œuvre de mesures de réduction du halo lumineux des grandes métropoles. Les solutions techniques existent et les LED ont l’avantage de permettre une modulation de leur puissance et de pouvoir être gérées à distance.

Aujourd’hui, les collectivités, qu’elles soient rurales ou urbaines, peuvent trouver une solution adaptée.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Marie-Pierre Richer, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Pierre Richer

Madame la secrétaire d’État, on disait autrefois avec admiration que New York était la ville qui ne dort jamais. Aujourd’hui, on doit tendre vers l’inverse. À cet égard, les maires sont des acteurs essentiels.

J’ai bien écouté les mesures que vous avez décrites. J’espère sincèrement qu’elles produiront leurs effets. La protection du vivant et notre qualité de vie sont à ce prix, pour les générations actuelles et à venir.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Madame la secrétaire d’État, vous avez évoqué la charte d’engagement des acteurs du transport. Cela m’a fait penser à un article de Stéphane Foucart paru dans le journal Le Monde, qui m’a beaucoup impressionné. Je pense qu’il ne vous a pas échappé.

Il dit que cette charte prévoit qu’il faut « équiper […] progressivement les dispositifs de publicités lumineuses […] afin que ceux-ci puissent être éteints. », qu’il faut « mettre en œuvre, lors de la fermeture des gares, stations ou aéroports […], l’extinction ou la mise en veille des publicités lumineuses équipées du dispositif le permettant. » Si le dispositif ne le permet pas, il ne se passe rien !

Enfin, cette charte contient un chef-d’œuvre, dont je félicite l’auteur, que vous connaissez peut-être, madame la secrétaire d’État. On y parle d’« établir une stratégie “sobriété” fondée sur des trajectoires de réduction des consommations électriques et d’émissions carbone du parc des publicités lumineuses en tenant compte des caractéristiques, usages et besoins des univers de transports selon leurs périmètres à la date de signature de la présente charte ». Tout cela n’est pas très clair ! Le moins que l’on puisse dire, c’est que c’est vague et flou.

Madame la secrétaire d’État, comptez-vous muscler un peu tout cela ? J’ai entendu ce que vous avez dit précédemment, mais il ne faut pas en rester au stade des intentions.

Enfin, que comptez-vous faire particulièrement pour les publicités situées à l’entrée des villes ? Les entrées de ville sont un gros problème urbanistique. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elles ne sont pas très urbaines. On a créé des catastrophes dans toutes nos agglomérations. Les publicités sont énormes, on ne voit qu’elles, toutes les heures de la soirée et même de la nuit. Que comptez-vous faire pour mettre fin à cette pollution totalement inutile et préjudiciable ?

Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST.

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Sueur, l’article du Monde sur la charte d’engagement des acteurs du transport, qui a été signée récemment et dont l’initiative revient à Agnès Pannier-Runacher et à Clément Beaune, ne m’a évidemment pas échappé.

Pour ma part, j’ai été très claire. J’ai rappelé que les opérateurs se sont engagés à éteindre 100 % de leurs panneaux lumineux dès la fermeture des gares, des aéroports et des métros d’ici au 1er janvier 2024. Ils s’engagent également à établir une stratégie de sobriété de la gestion de leur parc de panneaux lumineux. La RATP s’est ainsi engagée à réduire sa consommation électrique de 35 % d’ici à 2026, la SNCF de 45 % d’ici à 2031 et le groupe Aéroports de Paris de 50 % d’ici à 2030.

Au-delà des incitations ou même des obligations légales, il faut faire confiance à des opérateurs aussi importants en France, qui ont pris des engagements. De même, il faut faire confiance à la parole politique, que je viens confirmer ici, au Sénat, dans le cadre de ce débat. La parole politique peut avoir du poids.

On verra si ces engagements seront suivis d’effets. Je suis très curieuse de voir comment la RATP va réduire sa consommation électrique d’ici à 2026. On va suivre cela de près. Je le répète, il faut faire confiance à ces opérateurs importants, qui ont pignon sur rue, et avec qui nous avons des discussions de façon très régulière.

Vous m’avez enfin interrogée sur la publicité lumineuse dans les entrées de ville. Sachez que des évolutions réglementaires sont en cours d’élaboration. Ainsi, un arrêté fixera les normes techniques applicables aux publicités lumineuses. Un décret permettra de limiter le format des panneaux d’affichage extérieurs. Son objet est plus large que la seule publicité lumineuse, car il s’appliquera aussi à la publicité non lumineuse. Je vais faire en sorte qu’il soit publié rapidement.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Else Joseph

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est un cauchemar : je ne vois plus la Voie lactée et je ne peux plus méditer sous le ciel étoilé, comme le faisait Kant. La pollution lumineuse nous prive de certains trésors de la vue, qui sont en fait ceux de l’esprit.

La lumière artificielle nocturne s’est beaucoup répandue. Elle ne cesse par ailleurs d’augmenter dans le monde.

La lutte contre la pollution lumineuse est une nécessité pour la santé, mais aussi pour faire face à la hausse des coûts de l’énergie, aussi bien pour les collectivités que pour les individus. Cette pollution affecte nos écosystèmes ; elle perturbe les équilibres écologiques, en entraînant, par exemple, la perte d’orientation des oiseaux migrateurs.

Les nouvelles technologies ont apporté des solutions. Il existe désormais des éclairages intelligents, mais aussi, depuis quelques années, des luminaires qui illuminent non plus le ciel, mais la rue, sans avoir d’effet sur l’environnement naturel.

Beaucoup a été fait, mais beaucoup reste à faire. Ne tombons pas dans un autre extrême en passant de la pollution lumineuse à l’obscurité intégrale. La lumière, c’est la maîtrise par l’homme de son environnement.

La lutte contre la pollution lumineuse doit être un réel progrès collectif et non une énième démarche punitive, un combat au service de tous et non une futile initiative qui oppose les uns aux autres.

Madame la secrétaire d’État, beaucoup de questions ont été posées, le sujet de notre débat étant très large. Le combat contre la pollution lumineuse requiert de nombreuses actions et surtout un véritable pilotage.

Des expérimentations ont eu lieu dans certaines zones protégées. Quelles leçons peut-on en tirer ? Doit-on les généraliser ? Qu’en est-il de la cartographie de ces expérimentations ?

Que comptez-vous faire pour accompagner les collectivités locales dans la lutte contre la pollution lumineuse et les aider à choisir les techniques les plus efficaces ? Nos communes doivent être aidées en matière d’ingénierie et d’investissements. Elles doivent aussi bénéficier de réelles compensations.

Enfin, comment mieux protéger l’environnement nocturne ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Joseph, dans le temps qui m’est imparti pour vous répondre, je me focaliserai sur votre question concernant les expérimentations.

Les aires protégées sont d’excellents territoires pour expérimenter de nouvelles approches en matière d’éclairage. Ces espaces présentent souvent des enjeux de préservation de la biodiversité nocturne et bénéficient d’instances de concertation qui permettent d’avancer collectivement sur ces sujets.

On peut citer, par exemple, l’action des parcs nationaux, comme le parc national des Cévennes, évoqué par Mme la sénatrice Pantel voilà quelques instants. C’est un exemple de mobilisation d’acteurs multiples : des équipes du parc national, des élus, des habitants, des partenaires institutionnels, mais également des syndicats d’électricité de la Lozère et du Gard.

Les parcs naturels régionaux sont aussi des territoires actifs et précurseurs. Ils peuvent réduire l’éclairage public nocturne, comme l’a fait le parc naturel régional du Gâtinais français. Plusieurs actions axées sur la maîtrise de l’énergie ont conduit notamment à l’extinction de l’éclairage la nuit dans la majorité des communes du parc.

Les parcs peuvent également rénover le matériel vétuste d’éclairage public en finançant des projets innovants alliant sobriété énergétique, réduction de la pollution lumineuse et de ses conséquences sur la biodiversité. C’est ce qu’ont fait le parc naturel régional des Causses du Quercy et le parc naturel régional des Préalpes d’Azur. Je souhaite que nous généralisions cette démarche dans tous les parcs nationaux et régionaux. J’en ferai part à leurs responsables.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Je remercie tout d’abord l’Office parlementaire des choix scientifiques et technologiques et Mme la rapporteure d’avoir inscrit la question de la pollution lumineuse à l’ordre du jour de nos travaux. Ce débat est de qualité.

Beaucoup de sujets, qui nous intéressent tous, ont déjà été abordés, je n’y reviens pas. Je m’attarderai seulement sur le volet concernant les collectivités territoriales.

Mon département, les Ardennes, qui est également celui d’Else Joseph, compte 449 communes, dont beaucoup de villages et de bourgs. Beaucoup ont déjà mis en œuvre l’extinction nocturne de l’éclairage public, d’autres conservent l’éclairage toute la nuit, mais cela a un coût.

Vous avez évoqué le financement des mesures d’économies d’énergie, le rôle des fédérations départementales, des syndicats d’électrification. Les collectivités s’engagent et investissent pour réaliser des économies. C’est important.

Outre le fonds vert, il existe différents dispositifs de financement. Je pense notamment à la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et à la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL), mais il y en a d’autres. Comment ces dispositifs s’articulent-ils entre eux ?

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Monsieur le sénateur Laménie, je l’ai déjà dit, mais il faut le rappeler, le fonds vert constitue un accompagnement financier pertinent et efficace pour les collectivités territoriales.

Nous devons désormais réfléchir à la montée en puissance de ce type de dispositif pour accompagner encore plus les collectivités dans leur lutte contre la pollution lumineuse et pour la réalisation d’économies d’énergie.

Le nombre de dossiers déposés portant sur des projets de rénovation des parcs d’éclairage public atteste du besoin et de l’envie des collectivités en la matière. Le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires ne peut que s’en réjouir.

Pour cette raison, des réflexions sont en cours afin de pérenniser le fonds en 2024. Dans ce cadre, nous pourrions conditionner l’octroi d’aides au renouvellement du parc d’éclairage public à des critères spécifiques de préservation de la biodiversité. Par ailleurs, nous réfléchissons à orienter certains projets déposés dans le cadre du fonds vert vers d’autres enveloppes existantes, dont le plafond n’a pas encore été atteint.

L’objectif est bien de pouvoir financer d’autres projets via le fonds vert, probablement des projets de rénovation de l’éclairage public.

Debut de section - PermalienPhoto de Marc Laménie

Merci, madame la secrétaire d’État, de votre réponse.

Les élus de proximité rencontrent souvent des difficultés pour constituer les dossiers de financement. Ils comptent donc sur l’ensemble des services de l’État dans les départements respectifs pour les aider.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

M. le président. La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Muller-Bronn

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat nous donne l’occasion de revenir sur le sujet, essentiel pour les collectivités locales, de l’éclairage public, et sur l’importance des factures énergétiques dans leur budget global.

La conversion des parcs lumineux vers des systèmes innovants de LED est non seulement indispensable, mais encore urgente : aujourd’hui, 40 % des installations d’éclairage ont plus de vingt-cinq ans et sont particulièrement polluantes et énergivores.

C’est un gain immédiat pour les finances communales, puisqu’elles peuvent faire jusqu’à 80 % d’économies sur leurs factures énergétiques.

C’est aussi un gain pour l’environnement, pour la biodiversité et pour la santé humaine.

Contrairement à d’autres investissements de moyen et long termes, le gain énergétique et environnemental d’une conversion accélérée du parc sur le territoire serait immédiat.

Pourtant, ces projets ne représentent que 28 % des crédits alloués par le fonds vert, comme vous l’avez rappelé, madame la secrétaire d’État, et comme il ressort des chiffres communiqués la semaine dernière par la Première ministre et par vous-même. Certains s’en réjouissent, mais je pense que c’est trop peu.

Pourquoi, madame la secrétaire d’État, avoir choisi d’intégrer les subventions à l’éclairage public dans ce fonds vert, en concurrence avec d’autres projets ? Il y a urgence à éclairer mieux pour réduire les nuisances évoquées ce soir.

Ce potentiel immense de rénovation, dont les bénéfices sont immédiats, aurait dû être prioritaire : la rénovation serait déjà bien engagée à l’heure où nous avons ce débat…

Debut de section - Permalien
Bérangère Couillard

Madame la sénatrice Muller-Bronn, la phase d’instruction des dossiers déposés dans le cadre du fonds vert est en cours et l’un des critères imposés par l’État est l’impact écologique du projet. Autrement dit, les subventions seront octroyées à des projets qui ont une réelle efficacité dans la transition écologique. C’est un point d’attention majeur, qui fait toute la crédibilité du fonds vert, y compris dans la perspective de 2024.

À titre d’exemple, environ 20 % des dossiers déposés pour la rénovation énergétique des bâtiments publics locaux annoncent un gain énergétique inférieur à 30 %, qui est le minimum requis pour l’éligibilité, sachant que l’objectif national est de 40 % de gains. En dessous du seuil, il n’y a pas d’éligibilité au fonds vert, même si les dossiers peuvent avoir leur intérêt par ailleurs.

Pour l’éclairage public, l’objectif était de rénover plus de 10 % des parcs existants et de diminuer les consommations électriques. Cet objectif de 10 % est atteint par les dossiers déposés. Je m’en réjouis. Par ailleurs, les projets de rénovation du parc d’éclairage public pourraient totaliser 414 millions d’euros d’aides, pour 1 milliard d’euros d’investissements, si tous les dossiers sont financés. Cela représente tout de même près d’un quart de l’enveloppe globale.

Le fonds vert permettra de rénover 1 million de points lumineux sur les 4 millions déclarés par les collectivités territoriales comme devant être rénovés. Je crois pouvoir dire que c’est un succès, et je pense qu’on peut s’en réjouir !

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

La parole est à Mme Laurence Muller-Bronn, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Laurence Muller-Bronn

Ce nouveau fonds vert pour les collectivités territoriales est en réalité un recyclage des crédits du programme 362. On passe simplement d’une gestion centralisée à une gestion pseudodécentralisée. Un plan national ambitieux, avec un guichet unique pour l’accompagnement de l’ensemble des projets, aurait sans doute été plus efficace, plus rapide et son effet sur la prochaine facture d’électricité aurait été plus apprécié par les élus locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

En conclusion du débat, la parole est à Mme Annick Jacquemet, au nom de l’office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Annick Jacquemet

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, à l’issue de ce débat, je constate avec satisfaction qu’il se dégage un consensus au sein de notre assemblée pour lutter contre la pollution lumineuse.

J’ai entendu vos propositions, madame la secrétaire d’État, concernant la forfaitisation des sanctions sous forme d’amende, la réduction des périodes d’éclairage intérieur des bâtiments, la généralisation des trames noires dans les espaces protégés ou encore l’engagement volontaire des gares et des aéroports à limiter les publicités lumineuses.

Néanmoins, je n’ai pas obtenu toutes les réponses aux questions que je vous avais posées.

Ainsi, vous ne nous avez pas précisé quand l’arrêté fixant les seuils maximaux de luminance des enseignes et des publicités sera enfin publié ni, surtout, quelles seront ses grandes lignes.

Par ailleurs, vous avez soutenu l’extinction de l’éclairage au cœur de la nuit. Jean-Claude Anglars et moi-même avons souligné la responsabilité qui pèse sur le maire en cas d’accident. Vous avez dit qu’il n’y a pas d’obligation générale à l’éclairage. Toutefois, il semblerait que la jurisprudence fasse la distinction entre la situation où il n’y a jamais eu de lumière – dans ce cas, la responsabilité du maire n’est pas engagée – et le cas où il y avait éclairage et que le maire a décidé de l’éteindre – il semblerait qu’alors, sa responsabilité soit engagée.

J’y insiste donc : il faudrait changer cette règle afin de ne pas compromettre les initiatives des maires pour une plus grande sobriété lumineuse.

Au cours des auditions, on m’a fait remarquer que les trames noires ne figurent pas dans le code de l’environnement, ce qui les rendrait juridiquement fragiles. Faut-il donc les y mentionner ?

Enfin, vous n’avez pas répondu sur les engagements pris dans le quatrième plan national santé environnement, notamment en ce qui concerne les phares des voitures.

Comme vous l’avez souligné, des mesures de deux types doivent être prises.

Il faut d’abord compléter la réglementation et la faire respecter. Je souhaite faire une proposition de loi sur le sujet et ai bien noté votre intérêt pour cette question de la pollution lumineuse et votre volonté de travailler avec le Sénat. J’aurai donc plaisir à continuer à approfondir ce dossier avec vous.

Il faut également éduquer et sensibiliser nos concitoyens, et en particulier les plus jeunes. Au cours de mes auditions, j’ai été marquée par les propos des responsables de l’Association française d’astronomie, qui constataient que le ciel étoilé, avec l’émerveillement qu’il suscite, reste l’un des rares spectacles gratuits à la portée de nos concitoyens.

Pourtant, une grande partie d’entre eux en sont privés, comme cela a été souligné plusieurs fois ce soir, ce qui crée un risque de déconnexion croissante des individus et des sociétés de leur environnement. En effet, la nuit permet à l’homme de s’extraire de sa vision anthropocentrique de l’univers et de faire l’expérience du monde vivant non humain. Il est donc primordial de sauvegarder cet environnement nocturne.

Au niveau local, sa protection doit se faire de manière territorialisée, en tenant compte des besoins, mais également des appréhensions de nos concitoyens, qui varient selon le sexe et les zones habitées – qu’elles soient justifiées ou non scientifiquement. Plusieurs études ont montré que nos concitoyens étaient réellement favorables à une réduction de l’intensité lumineuse et du nombre de points lumineux.

Concrètement, il faut d’abord réfléchir à la finalité des éclairages et à leur réelle utilité, et utiliser des technologies ayant sur la biodiversité le moins d’impact possible. À cet égard, les collectivités territoriales peuvent bénéficier depuis janvier 2023, comme vous l’avez rappelé, des aides du fonds vert, qui visent justement à concilier rénovation des parcs de luminaires d’éclairage public, protection de la biodiversité et réduction de la pollution lumineuse.

Au-delà des pouvoirs publics, tous les acteurs privés participant à la pollution lumineuse doivent se mobiliser à travers une communication massive sur les règles à respecter et les bonnes pratiques en matière d’éclairage. Il s’agit des magasins de bricolage et des fabricants d’ampoules et de lampadaires, qui doivent informer et conseiller leurs clients dans le sens d’une optimisation de l’éclairage dans la durée et en quantité. Il s’agit des syndicats de l’éclairage ou encore des fédérations de commerçants, qui doivent sensibiliser leurs adhérents sur la législation en vigueur.

En conclusion, je voudrais insister sur l’efficacité et la simplicité des mesures à prendre pour lutter contre la pollution lumineuse. Contrairement à d’autres pollutions, comme la pollution chimique par exemple, la pollution lumineuse est très facilement réversible : il suffit d’éteindre la lumière pour protéger la biodiversité et nos écosystèmes – sans oublier les économies d’énergie que cela génère.

Je nous encourage donc tous à prendre notre bâton de pèlerin et à sensibiliser les communes, les acteurs économiques et les citoyens pour protéger notre environnement nocturne et garantir notre cohabitation avec le monde vivant non humain.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Nous en avons terminé avec le débat sur la pollution lumineuse.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Delahaye

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à demain, jeudi 13 avril 2023 :

À dix heures trente :

Vingt-huit questions orales.

À quatorze heures trente :

Conclusions de la commission mixte paritaire sur la proposition de loi portant fusion des filières à responsabilité élargie des producteurs d’emballages ménagers et des producteurs de papier (texte de la commission n° 486, 2022-2023) ;

Débat sur l’état de la justice dans les outre-mer.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-deux heures cinquante-cinq.