La commission a procédé à l'examen du rapport de M. François Zocchetto sur le projet de loi n° 333 rectifié (2006-2007) renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs.
a d'abord observé que le projet de loi prolongeait le processus engagé au cours de la précédente législature, en particulier à travers la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales et la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance. Il a souligné que le projet de loi traitait de la récidive légale qui répondait à des conditions juridiques très précises et couvrait un champ plus limité que la notion de réitération. Le rapporteur a observé que le taux de récidive s'élevait en 2005 à 2,6 % pour les crimes et 6,6 % pour les délits. En revanche, le taux de réitération des personnes condamnées en 2005 pour une infraction commise après une précédente infraction s'établissait pour les délits à 30 %.
Il a noté, s'agissant plus particulièrement des mineurs, que si le taux de récidive légale était très faible, le taux de réitération, selon une étude récente du ministère de la justice, s'élevait à 55 % (nombre de recondamnations sur cinq ans d'un échantillon de mineurs condamnés en 1999). Il a ajouté qu'il n'existait pas de lien évident entre le quantum de peine prononcé et le risque de commission d'une nouvelle infraction tout en soulignant que le taux de recondamnation était plus faible pour les condamnés ayant bénéficié d'une liberté conditionnelle.
Après avoir analysé les différents dispositifs mis en place récemment pour lutter contre les récidivistes, M. François Zocchetto, rapporteur, a observé que le projet de loi visait à instaurer des peines privatives de liberté minimales en préservant le principe d'individualisation de la peine. Il a noté que la France avait déjà mis en oeuvre, par le passé, le principe de seuil de peine et que de nombreux pays étrangers pratiquaient des peines minimales obligatoires. Il a observé en outre que si la personnalisation des peines était une exigence constitutionnelle elle devait se concilier avec la nécessité d'assurer une répression effective des infractions, comme le Conseil constitutionnel l'avait d'ailleurs rappelé à plusieurs reprises. Ainsi l'échelle minimale proposée par le projet de loi répondait au principe de proportionnalité et de nécessité de la sanction. Au regard du quantum moyen des peines d'emprisonnement actuellement prononcées pour les infractions en état de récidive, les peines minimales auraient sans doute, a estimé M. François Zocchetto, rapporteur, un effet limité en matière criminelle mais nettement plus significatif en matière délictuelle.
Abordant alors le volet du projet de loi consacré à la lutte contre la récidive des mineurs, le rapporteur, a noté que le texte élargissait les exceptions d'ores et déjà prévues par l'ordonnance de 1945 à l'atténuation des peines pour les mineurs de plus de seize ans. Il a souligné qu'aucune des dispositions proposées ne remettait en cause l'âge de la majorité pénale, maintenu à dix-huit ans, et les principes spécifiques de la justice des mineurs.
Enfin, M. François Zocchetto, rapporteur, a indiqué que le projet de loi comportait à la suite d'une lettre rectificative examinée en conseil des ministres le 27 juin 2007 des dispositions consacrées à l'injonction de soins qui tendaient à généraliser et à systématiser cette mesure pour les personnes encourant la peine de suivi socio-judiciaire. Tout en souhaitant que le projet de loi soit ainsi l'occasion de mobiliser des moyens aujourd'hui insuffisants, le rapporteur a estimé indispensable de renforcer la prise en charge médicale des personnes condamnées afin de favoriser leur réinsertion.
A la suite de l'exposé du rapporteur, M. Pierre-Yves Collombat a jugé paradoxal que la commission se prononce sur un projet de loi destiné à lutter contre la récidive alors même qu'elle ne disposait pas encore du rapport de la commission de suivi de la récidive présidée par M. Jacques-Henri Robert. Il a souligné en outre que les exemples étrangers semblaient démontrer que l'application de peines plancher n'avait aucun impact sur la délinquance.
a précisé que dans le cadre des auditions, ouvertes à l'ensemble des membres de la commission, qu'il avait menées pour préparer l'examen du projet de loi, M. Jacques-Henri Robert avait été entendu. Il a relevé par ailleurs que la notion de peines minimales telle que prévue par le projet de loi ne se confondait pas avec celle de peine plancher automatique. Il a estimé que si les dispositions du projet de loi ne résoudraient pas à elles seules le problème de la récidive, elles pourraient néanmoins exercer un effet dissuasif utile.
a vivement regretté que le législateur intervienne de nouveau sur la question de la récidive sans disposer d'aucune étude sur l'impact des textes récemment adoptés dans ce domaine. Elle a en outre critiqué l'application aux mineurs multirécidivistes de l'échelle des peines applicables aux majeurs, inversant ainsi les principes actuels du droit pénal des mineurs. Elle a souligné par ailleurs qu'une lutte efficace contre la récidive passait par une mobilisation de moyens humains et financiers aujourd'hui tout à fait insuffisants.
a regretté que, contrairement à l'engagement pris alors par le garde des sceaux, aucun parlementaire ne soit membre de la commission de suivi de la récidive.
a souligné que les dispositions du projet de loi n'auraient pas d'impact en matière criminelle puisque les peines actuellement prononcées par les cours d'assises étaient largement supérieures aux peines minimales prévues par le projet de loi.
a observé que le niveau des peines minimales choisi en matière correctionnelle conduirait sans doute à un relèvement des peines prononcées pour la récidive de délits dont certains peuvent être extrêmement graves.
a noté que les études comparatives montraient que plusieurs pays semblaient remettre en cause les dispositions introduisant des peines minimales d'emprisonnement compte tenu de leur inefficacité. Elle a souhaité savoir quels efforts seraient consacrés aux mesures alternatives pour les mineurs délinquants.
évoquant l'ouverture récente des deux premiers établissements pénitentiaires pour mineurs, a souligné que ces nouvelles structures marquaient un progrès considérable par rapport aux quartiers mineurs des établissements pénitentiaires et permettraient une prise en charge plus adaptée des mineurs délinquants.
s'est étonné des craintes exprimées par certains magistrats quant à une éventuelle mise en cause de leur responsabilité lorsqu'ils auront à appliquer les peines minimales prévues par le projet de loi. Il a noté en effet que les décisions en la matière seraient prises de manière collégiale.
a indiqué qu'en matière délictuelle, dans certains cas, les jugements étaient rendus par un juge unique.
s'est demandé si depuis la mise en oeuvre de la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales et de la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, une aggravation du phénomène de la récidive justifiait une nouvelle intervention du législateur. Il a relevé que les études les plus récentes sur le phénomène de la récidive portaient sur la période 2000-2005. Il a noté que les auteurs du projet de loi estimaient sans doute insuffisantes les peines prononcées par le juge en matière correctionnelle. Il a attiré l'attention sur les caractéristiques de la délinquance des mineurs en notant qu'elle se signalait pour un mineur de quatorze à seize ans par une « salve » d'actes délictueux pendant un temps limité et que le juge devait traiter les actes commis au cours d'une même période comme un ensemble et non pas de manière isolée.
a souhaité que des parlementaires soient membres de la commission de suivi de la récidive et que tous les ans une communication puisse être présentée par le gouvernement sur l'évolution du taux de récidive. Il a également demandé que le rapport de la commission de suivi de la récidive soit transmis à la commission des lois.
a attiré l'attention sur la situation très préoccupante de la maison d'arrêt de Tahiti qui accueillait des mineurs et des majeurs, s'interrogeant sur l'incidence éventuelle du projet de loi sur sa surpopulation.
a regretté que le volet consacré à l'injonction de soins systématise un dispositif qui, actuellement, est laissé à l'appréciation du juge de l'application des peines. Il a en outre souhaité connaître les raisons qui avaient conduit à supprimer le principe d'une double expertise préalable à l'injonction de soins.
a précisé que cette double expertise n'était aujourd'hui requise que pour certaines catégories d'infractions et qu'en tout état de cause, une contre-expertise pourrait toujours être demandée par l'intéressé.
La commission a ensuite procédé à l'examen des amendements présentés par le rapporteur.
Aux articles premier et 2 (détermination de peines minimales de privation de liberté), la commission a adopté deux amendements tendant à prévoir que la juridiction peut prononcer une peine inférieure aux peines minimales pour un multirécidiviste en prenant en compte à titre exceptionnel, non seulement les garanties d'insertion ou de réinsertion, mais aussi les circonstances de l'infraction et la personnalité de l'auteur.
a craint que l'élargissement des critères autorisant une dérogation aux peines minimales en cas de multirécidive ne conduise à faire de cette dérogation le principe et non l'exception dans l'hypothèse de la première récidive.
Outre un amendement de clarification, la commission a adopté, à l'article 2 un amendement rappelant expressément que le tribunal peut prononcer, en plus de l'emprisonnement, une amende ou une peine complémentaire.
La commission a adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 afin de prévoir que le ministère public ne prenne aucune réquisition tendant à retenir la circonstance aggravante de récidive s'il n'a préalablement requis la réalisation d'une enquête de personnalité propre à éclairer la juridiction de jugement sur la personnalité de l'intéressé et ses garanties d'insertion ou de réinsertion.
La commission a également adopté un amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 2 prévoyant que le président de la juridiction avertit le condamné des conséquences qu'entraînerait une condamnation pour une nouvelle infraction commise en état de récidive légale.
A l'article 8 (interdiction des réductions de peine pour certains condamnés refusant les soins en détention), la commission a adopté un amendement tendant à rétablir le pouvoir d'appréciation du juge de l'application des peines sur la suppression, motivée par un refus de soins, des réductions de peines supplémentaires dont peuvent bénéficier les personnes détenues. Elle a en outre adopté un amendement de précision.
A l'article 9 (renforcement des obligations liées au suivi médical dans le cadre de la libération conditionnelle), la commission a adopté un amendement de précision.
A l'article 10 (entrée en vigueur), la commission a adopté un amendement de clarification.
La commission a adopté le projet de loi ainsi modifié.