Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 20 décembre 2011 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • excellence
  • jury

La réunion

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Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous nous retrouvons demain à 15 heures pour l'examen du rapport pour avis de M. Claude Domeizel sur la proposition de loi n° 33 (2011-2012), adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives, dont la commission des lois est saisie au fond. Je vous donnerai aussi demain des nouvelles des groupes d'études sur lesquels notre bureau a progressé et qui diffèrent des groupes de travail. Ceux-ci mènent des investigations politiques et techniques sur des sujets extrêmement pointus, ceux-là relèvent davantage d'affinités pour un sujet, comme celui des métiers d'art, passion qui rassemble plusieurs parlementaires.

La commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois, présidée par notre collègue David Assouline, et qui comprend plusieurs membres de notre commission, sera souveraine pour choisir ses thèmes d'étude. Néanmoins, son président nous a fait savoir qu'elle se pencherait sur au moins un sujet relevant de notre commission. Nous en reparlerons demain, mais il m'a consulté et je lui ai cité la loi sur l'accueil des enfants en période de grève, la loi relative à l'audiovisuel public, et celle créant l'Hadopi. M. Legendre, membre de la commission de contrôle de l'application des lois, souhaite également proposer un autre sujet. Nous ferons le point demain, et cette commission choisira.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Je tiens à faire part de mes inquiétudes et de mes réserves. Il ne faudrait pas que cette nouvelle commission soit en quelque sorte une « commission bis des commissions », qui priverait les autres commissions du rôle qui est le leur. Le suivi de l'application des lois fait partie intégrante de nos missions. C'est pourquoi j'ai interrogé le ministre en séance sur le comité de suivi prévu par la loi sur l'audiovisuel public, que vous avez citée. Cela n'empêche pas qu'un travail approfondi soi mené au sein de cette commission ad hoc, mais quelle en sera la limite ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Il n'y a aucun membre de cette commission qui ne fasse partie d'une commission permanente. Chacun veillera à ne pas dessaisir les commissions. Dans votre rapport sur l'effet de la suppression de la publicité sur les recettes de France Télévisions, vous avez montré combien il restait à travailler sur le second volet de la réforme. Il y a deux regards, dans la commission présidée par David Assouline : le premier ; sur les lois, les décrets d'application qui sont sortis, etc. ; le second, sur les efforts réalisés sur le terrain pour appliquer la loi. A nous de demeurer vigilants et lorsqu'elle s'aventurera sur notre terrain, et de le dire !

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Il est vrai que j'ai été assez inquiet, lors de la première réunion de cette commission, lorsque M. Assouline a annoncé les trois sujets retenus à l'issue d'un colloque singulier entre vous et lui. Rappelons que le suivi des lois et de leur application fait partie des attributions de tous les sénateurs. Il est normal que nous débattions en commission, ou au moins au sein du bureau, de nos priorités pour le programme de travail de sa commission. Je me réjouis que vous évoquiez en commission cette délégation de pouvoirs détenus par chacun de nous. Il est bon qu'il y ait au moins un échange entre nous à ce sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous y reviendrons demain, mais poursuivons en attendant l'arrivée de M. Ricol.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Cette nouvelle commission qui se met en place est composée de membres issus de toutes les autres commissions permanentes du Sénat. J'y vois un intérêt : pouvoir confronter nos points de vue avec nos collègues de la commission des finances ou de la commission de l'économie, dont nous savons qu'ils n'ont pas la même approche des sujets culturels. Nous pourrons ainsi apprécier l'intérêt général de la loi et de son application sur le terrain, au regard de données économiques et financières que détiennent ceux qui ne partagent pas notre point de vue. J'y vois un grand intérêt.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Vous qui siégez dans cette commission, vous aurez un pouvoir d'arbitrage sur le choix qu'elle fera entre les diverses propositions que nous lui soumettons. Vous n'êtes pas obligés d'étudier une loi dans son ensemble, vous pouvez n'en prendre qu'un segment. Fin janvier, notre commission tiendra, comme elle le fait habituellement, une séance consacrée à l'évaluation de l'application des lois.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je m'interroge sur le champ de cette nouvelle commission, par rapport à l'antériorité des lois. Vous avez cité des lois récentes. Le suivi des décisions budgétaires et le contrôle des dépenses et des engagements du domaine culturel relèveront-ils de cette commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Non, cela relève de la commission des finances. J'ai choisi des textes que j'avais suivis. M. Legendre s'intéresse à une loi dont je n'ai pas eu à connaître.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

J'y insiste : le suivi des textes est le devoir de tous les sénateurs. En particulier, les rapporteurs doivent s'assurer que les décrets d'application sont sortis. Il me paraît intéressant de faire le point sur la loi relative à la langue française, qui avait suscité, il y a quelque temps, un vaste débat. Elle fait partie de ces textes dont l'on peut penser qu'ils sont diversement appliqués. Or, sur ce thème, la proposition de loi que j'avais présentée avec M. Marini et qui a été adoptée à l'unanimité par le Sénat n'a jamais été reprise par l'Assemblée nationale. Il ne serait pas inintéressant de regarder de plus près cette loi qui semblait nécessaire et n'a pas abouti.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Ce sujet et votre remarque de méthode seront pris en compte demain, ainsi que d'autres qui pourraient être proposés.

La commission auditionne M. René Ricol, commissaire général à l'investissement.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Notre commission étant en charge de la recherche, a suivi avec beaucoup d'intérêt le plan d'investissements d'avenir, qui concerne largement ce secteur. Aujourd'hui, nous avons eu de nombreux retours du terrain, qui varient, selon que les projets ont été retenus ou pas. Aussi serait-il utile que vous rappeliez, avant de répondre à nos questions, la méthode, le phasage, les sommes en jeu, ce qui a été retenu comme éligible, et la réalité des sommes versées.

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Sur le dernier point, c'est simple : pas encore grand-chose. Je suis venu avec M. Thierry Coulhon, directeur de programme, qui s'occupe notamment des initiatives d'excellence (IDEX), des équipements d'excellence (EQUIPEX) et des laboratoires d'excellence (LABEX), M. Florent Massou, directeur stratégique et financier, et Mme Sana de Courcelles, conseiller parlementaire du commissariat général à l'investissement, qui suit également la contractualisation.

La règle de base des investissements d'avenir, à quelques exceptions près qui vous concernent car elles concernent la culture, est qu'ils passent par des appels à projets et sont sélectionnées par des jurys internationaux. Nous respectons strictement les choix de ces jurys. Le comité de pilotage comprend différentes directions d'administration centrale. Une proposition complémentaire peut être faite au jury dans certains cas, mais nous nous en remettons ensuite à sa décision. Pour les IDEX, nous respectons strictement les choix du jury. Cette position, nous l'avons prise à la demande des universitaires et des scientifiques eux-mêmes. Peut-être y avait-il d'autres manières de faire, mais je suis profondément convaincu qu'ils avaient raison. Nous avons beaucoup entendu ceux qui sont heureux des décisions prises par les jurys. Pour les autres, les chercheurs et les universitaires ont fait preuve d'un fair-play que je tiens à saluer. Cette procédure nous met à l'abri des querelles de chapelles. Respecter scrupuleusement les choix du jury ne nous empêche pas de nous tordre de douleur quand des projets magnifiques ne sont pas retenus, ce qui est le cas. Il y a aussi des projets qui ne sont pas retenus dans un premier temps, qui sont ensuite repris et qui passent. Nous soutenons ces règles, avec leurs effets parfois injustes. S'il en était autrement, nous commettrions l'erreur d'entrer dans l'arbitraire, ce qui serait très mal reçu par la communauté scientifique.

Deux thèses s'affrontaient sur les investissements d'avenir. Selon la première, il fallait décider de tout en une seule vague, puisque préparer un projet prend beaucoup de temps, pendant lequel les chercheurs ne cherchent plus et les enseignants enseignent moins. Il a fallu l'arbitrage du Président de la République pour parvenir à la solution que je défendais et qui a été retenue. J'en avais fait une condition pour accepter cette mission : étant donné les montants en cause, nous risquerions davantage de commettre des erreurs graves et irréversibles si les sommes étaient attribuées d'un coup et il fallait donc procéder par vagues successives. Nous avons annoncé aujourd'hui les résultats de la deuxième vague des équipements d'excellence. C est une question d'équité, comme aux examens : il y a des gens qui ne passent pas du premier coup, mais qui peuvent très bien réussir la deuxième fois. Se priver de cette possibilité, ce serait détruire de la valeur et perdre de la chance. Plus personne ne critique désormais ce principe des vagues, même s'il ralentit le processus. Pour les équipements d'excellence, Thierry Coulhon peut en témoigner, nous avons eu une très belle première vague, mais la deuxième vague est vraiment exceptionnelle : tous les projets ont monté en qualité. Cela nous a pris du temps, mais nous avons tiré les leçons de la première vague. Les dossiers de la deuxième ont été beaucoup plus faciles à finaliser.

En effet, et c'est la troisième règle, une fois que les décisions sont prises, il faut contractualiser. Je viens du privé, je ne suis ni homme politique, ni fonctionnaire et j'ai découvert une institution : l'agent comptable du Trésor. Celui-ci nous demande, pour des projets dont on ne sait s'ils aboutiront d'ici trois à cinq ans, d'indiquer les dépenses de petit équipement pour les dix ans à venir ! Étant comptable, je veux éviter les fausses déclarations, aussi je me refuse à de telles spéculations.

Le temps de la contractualisation est assez long. L'opérateur, l'Agence nationale de la recherche (ANR), est surchargé de travail et ces projets sont plus importants que ceux qu'elle traite d'habitude. Nous avons eu une discussion, nous avons demandé au ministère plus d'emplois « équivalents temps plein » (ETP) et, pour pouvoir aller vite sur la contractualisation, nous avons obtenu une enveloppe spéciale pour les appels d'offres en cours, permettant de recruter des consultants de haut niveau pour écluser le retard. Nous travaillons sur des produits périssables, nous sommes dans la compétition internationale, un délai de six mois pour traiter un projet nous paraît normal, que l'on soit dans le public ou le prive. Au-delà de neuf mois, il faut s'inquiéter. Il fallait donc réagir. Il ne s'agit pas d'une critique de l'Agence, il faut reconnaitre que la quantité de travail est considérable. Il s'agit de trouver les moyens de faire face, de trouver des solutions correctrices pour contractualiser vite. Nous sommes en train de récupérer les retards, pour une quarantaine de projets sur un total de 51 de plus de neuf mois. Sur les LABEX, nous avançons tout de suite, pour que les gens commencent à travailler. Pour les instituts de recherche technologique (IRT) et les instituts hospitalo-universitaires, nous allons contractualiser dans des délais courts, d'ici la fin janvier au plus tard. Pour les trois IDEX qui ont été désignés, nous irons très vite. Il a fallu raboter les trois premiers projets, de 1,2 milliard environ à 700 à 750 millions d'euros par projet, puisque vous avez voté pour accorder à 10 IDEX un total de 7 à 7,2 milliards d'euros. Si une troisième vague paraissait nécessaire, nous la ferons. Sinon, nous repartirons le reste. La deuxième vague d'EQUIPEX vient de sortir ce matin. Nous aurons les résultats des autres vagues d'IDEX et de LABEX d'ici février-mars. Nous ne souhaitons pas aller au-delà du 15 mars, par respect de la démocratie, car nous serons alors en campagne présidentielle. Nous aurons ensuite tout le temps nécessaire pour contractualiser.

Nous avons eu en matière hospitalo-universitaire une très mauvaise surprise : aucun institut hospitalo-universitaire n'a été retenu pour le cancer. Sachant tout l'argent qui est mis par la France pour la recherche sur cette maladie qui concerne l'ensemble des Français, c'est inacceptable qu'il n'y ait pas, selon l'expression du président du jury, de rupture dans les recherches proposées. Ce n'est pas la faute des jurys, mais des porteurs de projets, que j'ai reçus pour le leur dire. Avec l'accord des présidents des commissions des finances des deux assemblées, un nouvel appel à projets spécifique sera lancé, qui n'était pas prévu par la loi. S'il n'y a pas de lauréat, il faudra s'interroger. Beaucoup de porteurs de projets se sont présentés de manière isolée. J'ai le plus grand respect pour le rapport Marescaux, sur l'unicité de lieu, mais la France est un petit pays, qui doit faire face à la concurrence. Quand des réseaux existent, il n'est pas absurde que plusieurs lieux se mettent ensemble.

Sur les IRT, nous sommes dans un bras de fer avec un ensemble d'industriels. Nous n'avons forcé personne à répondre aux appels à projets. Mais ceux qui l'ont fait sont responsables des engagements pris en répondant. Les IRT sont là pour dynamiser durablement un territoire. Cela suppose que la recherche et l'industrie, c'est-à-dire quelques grands groupes, mais aussi les PME/PMI, voire les start-up travaillent durablement ensemble. Chacun doit jouer le jeu. Il ne s'agit pas de mettre du personnel vieillissant à disposition en se faisant rembourser pour recruter des jeunes par ailleurs, ce qui est inacceptable. Il faut aussi, si vraiment nous voulons demain bâtir une industrie sur un territoire, que la propriété intellectuelle soit partagée entre le public et le privé. Cela n'empêche en rien de concéder une licence exclusive en raison de la compétition internationale. Sans redevance, comment créer un IRT durable ? C'est un point essentiel, non négociable de mon point de vue.

Tous ceux qui ne l'ont pas encore fait devront contractualiser avant fin janvier. Nous sortirons tous les IRT qui ne respectent pas les règles, et s'il le faut, nous lancerons un nouvel appel à projets qui aboutira après l'élection présidentielle. Ce n'est pas une question de politique industrielle, ni une question d'aménagement du territoire, je ne fais ni l'un ni l'autre. Pour autant, j'ai en permanence les yeux fixés sur deux cartes : celle de l'aménagement du territoire et celle des grandes filières, et je découvre avec stupéfaction que notre territoire commence à être couvert, mais pas forcement là où on l'attendait, et pas dans les industries que l'on attendait, à Pau, à Clermont-Ferrand, à Montpellier par exemple. Lorsque l'on finira de déterminer les investissements d'avenir, vers la fin 2013, il faudra s'interroger si l'on s'aperçoit que certains territoires et certaines filières ne sont pas couverts. Si nous inversions la mécanique, nous referions les erreurs passées. C'est un défi. Ainsi, tout le monde vante l'école d'économie de Toulouse, mais ce sont de jeunes talents de l'école d'économie de Paris qui sont sortis ! C'est une formidable remise en cause. Je suis très triste pour nos amis toulousains, d'autant que je ne suis pas partie prenante, en tant que Lyonnais, mais voir surgir de jeunes équipes là où on ne les attendait pas est une excellente nouvelle.

Combien avons-nous engagé jusqu'aujourd'hui ? Une quinzaine de milliards d'euros. D'ici à fin mars, nous aurons engagé entre 20 et 23 milliards d'euros. Combien avons-nous effectivement dépensé ? Environ 1,6 milliard d'euros, avec, dans certains cas, des effets de levier très importants, provenant, par ordre décroissant, des collectivités, qui accompagnent certains projets depuis le début, des entreprises et des industriels, mais aussi de l'ingénierie financière, puisque nous réussissons, pour des projets magnifiques, à obtenir des prêts participatifs d'Oseo dans de bonnes conditions.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Votre exposé m'a paru un peu abscons. Nous voyons passer des milliards dont nous n'imaginons pas qu'ils vont se poser là où on les attend. Vous avez dit que les décisions des jurys internationaux ont surpris. Des projets accompagnés par les collectivités territoriales et sur lesquels se fondaient beaucoup d'espoirs de développement des territoires ont été contestés, voire stigmatisés par leurs décisions. J'ai du mal à m'en réjouir, d'autant que l'on peut s'interroger sur la transparence de la procédure. Quels moyens mettez-vous en place pour garantir cette transparence, ainsi que la capacité des jurys à décider en toute indépendance ? Nous avons évoqué plusieurs fois ici le cas de l'Université de Lille, qui a été négligée et s'est sentie méprisée, mais elle n'est pas la seule.

Les décisions concernant les investissements d'avenir paraissent privilégier les sciences dites « dures », au détriment des sciences humaines, pourtant si importantes pour le développement économique et social. Quelles mesures comptez-vous mettre en oeuvre pour y remédier, au-delà de ce que vous avez dit sur les IRT ?

Dans un courrier accompagnant son rapport sur la mise en oeuvre du programme d'investissements d'avenir, le comité de surveillance du grand emprunt a encouragé « vivement le gouvernement et le commissariat général à l'investissement à maintenir les grandes orientations du programme d'investissements d'avenir, en particulier en évitant toute logique de saupoudrage et de substitution budgétaire, de manière à ce que les investissements d'avenir s'inscrivent bien en addition des politiques publiques courantes ». Avec un tel mélange de crédits budgétaires et extra-budgétaires, nous avons bien du mal à situer les obligations du gouvernement en matière de soutien à l'enseignement supérieur et à la recherche et ce qui relève de la stimulation liée au grand emprunt, apportant des moyens supplémentaires. Nous n'avons pas eu le temps de vérifier, mais nous avons toutes les raisons de vous faire confiance quant aux 22 milliards d'euros engagés que vous nous avez indiqués sur les 35 milliards prévus en tout, mais nous veillerons à ce qu'il ne s'agisse pas seulement d'un effet d'annonce qui ne se traduirait pas effectivement par la vitalisation du secteur universitaire et de la recherche, dont notre pays a tant besoin.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

M. Plancade, rapporteur pour avis de notre commission sur le budget de la recherche, souhaitait également vous interroger sur le caractère additionnel des sommes dévolues aux investissements d'avenir, par rapport aux financements classiques. Il se préoccupe également du risque que les équipes de recherche, mobilisées par la compétition sur les investissements d'avenir, n'aillent plus démarcher les guichets de l'Union européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Vous avez fait état des difficultés rencontrées par certaines équipes pour fournir les efforts nécessaires à la construction de certains projets en réponse aux appels d'offres. Pendant que les universitaires travaillent pour ces appels à projets, ils ne peuvent ni enseigner ni chercher, ce qui peut poser problème à certains d'entre eux. Les consultants que vous avez évoqués, recrutés pour faire face à la surcharge de travail, sont-ils vraiment de haut niveau ? Normalement, les meilleurs spécialistes ne se trouvent-ils pas au sein même de l'Université ? Le recours à des consultants extérieurs ne mène-t-il pas au formatage de projets sans lien avec l'innovation et la vie des projets ?

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

La communication est un art difficile ! Je ne parlais pas, pour les consultants, de l'Université, mais de l'ANR...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Il se peut que des universités aient recruté des consultants, mais il s'agit d'autre chose... Vous avez trouvé mon propos abscons : c'est ennuyeux, voire inquiétant... J'ai eu plusieurs échanges avec les universitaires et les scientifiques : c'est à la demande de la conférence des présidents d'université unanime que nous avons adopté les jurys internationaux. Comment s'assurer de leur impartialité ? Ils sont proposés par l'ANR et nous procédons à des vérifications de bon sens, en lien avec les services de l'État. Il y a bien sûr des diligences à faire pour s'assurer que leurs membres ne soient pas contrôlés par des lobbies.

Des universités sont déçues, d'autres sont enthousiastes, c'est évident. A Lille, un Labex dans le domaine du diabète a reçu un montant considérable, qui lui confèrera une capacité mondiale. Je vous le dis, non en termes politiques, car ce n'est pas ma matière, mais en termes de gestion, car c'est la mienne : ce qui en train d'émerger est formidable ! Nous voyons se dessiner sous nos yeux une carte insoupçonnée, exceptionnelle. Des lieux qui passent leur temps à s'auto-flageller émergent, ils sont formidables et ce ne sont pas ceux que l'on aurait attendus, et pourtant ils ouvrent des perspectives, un potentiel inouïs.

L'enjeu du numérique, lui aussi, est formidable ! On est venu nous voir avec un projet de satellite : après examen, il a été décidé de ne pas mettre un sou dessus. Puis les promoteurs de ce projet sont revenus avec un autre programme, portant sur de la recherche et développement sur un satellite de télécommunications plus performant. S'il marche, il permettra de mieux couvrir les portions du territoire qui ne sont actuellement pas couverts par le numérique et, subsidiairement, nous pourrons l'exporter ! C'est ainsi que les choses se passent ! Autre exemple : les meilleurs scientifiques du secteur viennent nous voir avec un projet consistant à transformer la paille en bio-éthanol. Petit-fils de paysan, je connais la valeur de la paille : quand on n'en fait plus pendant deux ans, il n'y a plus de terreau, en période de sécheresse, elle vaut beaucoup d'argent... Quand j'ai demandé où était l'équilibre financier du projet, subitement, il n'y en avait pas ! Eh bien, les mêmes sont revenus avec un projet magnifique de production verte de bio-kérosène. Nous avons des équipes dont la France peut être fière, dont les territoires peuvent être fiers et qui demain produiront des emplois durables. Si je n'y croyais pas, je quitterais sur le champ ces fonctions bénévoles, dont je me félicite chaque jour.

Y a-t-il un décalage affectant les sciences humaines et sociales ? Il y a des projets magnifiques qui les concernent, je ne sais si l'on peut les chiffrer à 14 %, la sélection d'aujourd'hui en apporte une nouvelle preuve. Nous n'avons donné aucune consigne aux jurys. Ce sont les meilleurs projets qui gagnent. Peut-être que les porteurs de projets en ce domaine ont mis un peu plus de temps à les préparer, amis les résultats sont, là aussi, spectaculaires. Il n'y a aucun ostracisme.

D'autres approches sont possibles, par territoire ou par filière, comme le défendaient fortement les directions d'administration centrale. Nous nous sommes battus pour faire remonter les beaux projets du terrain. A Lille, le CHU avait proposé un projet magnifique, qui n'a pas été retenu par le jury, lequel a accordé à un seul laboratoire lillois le même montant que ce à quoi le CHU aurait pu prétendre.

Nous avons vu remonter de nombreux projets de très bonne qualité. Lorsque nous ferons le bilan, nous nous rendrons compte que nous avons des lieux exceptionnels. Il faut les soutenir, les aider à se développer. Les présidents de régions sont souvent assez proches de nos analyses. J'ai exercé deux fonctions d'intérêt général. J'ai sauvé beaucoup d'entreprises, lorsque j'étais médiateur du crédit, environ les deux tiers, soit 200 000 emplois, mais je pensais toujours à celles que je n'avais pas pu sauver. Je vais reprendre du service comme coordinateur du soutien aux entreprises. Ce que nous faisons donne des résultats et nous permet d'avancer. Pardonnez-moi de vous répondre avec le coeur et la passion qui m'animent !

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Les procédures du grand emprunt permettent d'irriguer, non pas l'ensemble du territoire, mais une certaine partie de celui-ci, des pôles d'excellence de taille variable, où l'effort important de la puissance publique rejoint celui d'autres pôles, y compris les centres universitaires. C'est moins le cas pour les IDEX : il n'y en a que dix. J'y suis très attentif, en particulier dans la région de Lyon-Saint-Etienne. J'ai bien compris qu'un critère majeur de sélection, outre la qualité scientifique et l'orientation des équipes, tient à la gouvernance et concrètement au rassemblement, à la mutualisation et à la fédéralisation des forces sur un grand territoire. Certains candidats peuvent annoncer qu'ils vont fusionner en 2018. C'est un processus difficile, comme pour les fusions de communes !

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

C'est pire !

Debut de section - PermalienPhoto de Maurice Vincent

Cette échelle de temps paraît être un critère de choix important des lauréats. Ce volontarisme en faveur d'une gouvernance fédéralisée est-il bien un élément fondamental ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Chiron

Ma première question est similaire. Je suis Grenoblois ; nous avons les mêmes problématiques. Ne pas retenir des projets à dix ou quinze ans, parce qu'une décision n'a pas été prise à trois mois, ce serait pénalisant !

Dans l'Isère, nous sommes très sensibles à la filière photovoltaïque. Pendant dix ans, on nous a encouragés, nationalement, à développer la filière. L'État, mais aussi certaines collectivités, ont investi fortement, à Grenoble, à Chambéry aussi. Or cette filière n'a pas été portée par les entreprises nationales qui devaient y investir : EDF, Saint-Gobain, Total et d'autres... qui, en revanche, ont investi hors d'Europe. Aujourd'hui, à l'exception de Photowatt, tous les acteurs sont des PME-PMI. Un projet rassemble le Laboratoire d'innovation pour les technologies des énergies nouvelles (LITEN) de Grenoble et l'Institut national de l'énergie solaire (INES) de Chambéry, pour aller vers un pôle d'excellence. Certains investissements qui ont été réalisés ces dix dernières années peuvent disparaître et nous nous retrouverons avec un Photowatt chinois, américain ou canadien. Des entreprises comme EDF achètent surtout du solaire chinois. Je m'interroge sur l'arrêt de ces recherches créatrices d'emplois d'avenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Brigitte Gonthier-Maurin

Ce débat me laisse perplexe. La mise en place d'une agence nationale de financement sur projets est en train de s'imposer, qui transforme profondément la façon dont s'organisait jusqu'à présent la recherche dans notre pays, sous couvert d'excellence. J'y vois deux difficultés majeures. Vous avez relevé le goulet d'étranglement qui est ainsi créé, l'écrémage, sans consultation des conseils d'administration et des conseils scientifiques, sauf à la marge. On inscrit la recherche dans la compétitivité internationale, plus que dans la réponse aux défis de notre société. Autre conséquence, que vous n'avez pas abordée : le développement des emplois précaires, qui sont contraires au développement de toute politique scientifique, puisqu'ils ne peuvent, par définition, coïncider avec le temps long de la recherche. Avez-vous, là-dessus, des éléments à nous donner ? Du terrain remontent bien des inquiétudes et des appels au secours. Nous ne sommes pas les seuls à mener une telle politique, concertée au niveau européen.

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Vous pouvez venir me voir quand vous voulez, je vous montrerai tout ce que nous avons. Nous sommes très sensibles à l'impératif de ne manquer aucun fonds européen. Mais la Commission de Bruxelles ne nous facilite pas la tâche, tant il faut à chaque fois mener avec elle de complexes négociations. Sur la substitution du budget d'investissement au budget de fonctionnement, pour l'instant je ne suis pas inquiet : cela ne représente pas plus d'un milliard d'euros sur 35 milliards, ce qui est assez faible. C'est néanmoins un point à surveiller. Nous sommes transparents. S'il y a de la substitution, je serai tout à fait clair sur le sujet. Pour l'instant, rien qui vaille la peine d'être signalé, mais nous ne manquerons pas d'en faire rapport et analyse, si cela se produit.

Ce qui se passe dans les universités est intéressant. Les représentants de nombreux labos nous disent : même si l'on perd, on a déjà gagné, parce que l'on s'est parlé ! Je n'ai pas l'obsession de la fusion, ce sont les jurys qui l'ont. Quand on arrive devant un jury avec un projet qui a été présélectionné, si l'on ne tient pas la route en audition sur ce projet, on n'est pas retenu. Une période de quatre ans est ouverte, pour les IDEX, pour respecter les engagements. Grenoble n'a pas été sélectionnée en première vague des IDEX, cela me touche, car je suis Lyonnais, cela me reste en travers de la gorge : quand on arrive devant un jury et qu'on dit qu'on ne se parlera jamais, alors que le jury international a étudié votre projet pendant des heures, que peut-on espérer ?

Le photovoltaïque est un grand sujet. Reprenant du service pour coordonner tous les dispositifs d'aide aux entreprises, je vais avoir à m'en occuper, dès demain et pendant toutes les vacances de Noël s'il le faut. Des investissements incroyables ont été faits par le CEA dans ce domaine. J'ai pris la responsabilité, la Cour des comptes dût-elle me le reprocher, de ne pas passer à côté de cette technique nouvelle, l'hétérojonction. Nous sommes dans une période critique pour prendre de l'avance dans cette technologie. Dans le même temps, à Grenoble, Photowatt a été reprise par une entreprise canadienne qui appartient à un hedge fund. C'est une faute capitale ! Des centaines d'emplois sont en jeu. Mais je m'y emploie ! Je ne ménagerai pas mes efforts pour trouver une solution de reprise. Il n'est pas facile aujourd'hui de faire en même temps de la recherche et de la gestion complexe. C'est un fait. Les gens qui ont un compte d'exploitation achètent moins cher ! Il nous faut trouver un repreneur. Ne pas y arriver serait contraire aux intérêts du pays. On n'a pas le droit de ne pas traiter ce problème, car sans Photowatt, il n'y aurait plus de filière photovoltaïque française. Il est vrai que si l'on avait été voir des gens dont la gestion est le métier, avant de se faire acheter par un hedge fund, cela aurait aidé ! Une fois l'entreprise sauvée, il faudra se poser des questions, afin que cela ne se reproduise pas !

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Le goulet d'étranglement s'est produit à l'ANR. L'emploi précaire n'est pas de ma compétence. Je peux vous apporter un élément de réponse sur les investissements d'avenir : nous refusons d'entrer dans un système où les IRT ne recrutent pas de personnel durable, où les laboratoires et les entreprises ne recrutent pas de bons chercheurs dans le cadre de contrats de recherche à durée indéterminée.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

En matière de numérique, quels sont les projets que vous examinez ?

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Bailly

L'aménagement du territoire n'est pas votre premier critère. Mais où sont localisés les projets sur le territoire national ? J'ai du mal à le savoir...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

La carte des équipements d'excellence est sortie ce matin. La voici ! Je la fais circuler. Elle est sur le site. Nous aurions pu faire de l'aménagement du territoire a priori, en saupoudrant : c'est le contraire de ce qu'il faut faire. Nous aurions pu faire de la politique industrielle, en s'obligeant à investir dans des lieux où il n'y a pas d'excellence. En procédant comme nous l'avons fait, nous constatons que la carte de France se remplit peu à peu. Il y avait un manque inquiétant en vallée de la Seine, mais il vient d'être comblé ce matin...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

A la fin 2012, il faudra vérifier si les politiques industrielles prioritaires sont bien couvertes et si les territoires ont tous des chances de développer des lieux d'excellence. Nous ne l'avons pas fait dès le début, car nous nous sommes concentrés sur la remontée des projets. Sans cela, l'IDEX de Pau n'aurait eu aucune chance de voir le jour ! Nous sortons des coteries, des amitiés, des liens traditionnels...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

des laboratoires historiques reconnus de tout temps et je pourrais le dire de manière moins modérée. Bref, les investissements d'avenir sonnent la fin de certains mandarinats et c'est une chance !

Pour le numérique, nous avons deux procédures. L'une relève des grands projets, elle est très lourde et concerne l'informatique en nuages, que beaucoup s'obstinent à appeler cloud computing...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

C'est beaucoup plus élégant ! Ce projet d'info-nuage concerne trois acteurs majeurs du secteur en France, d'autres auraient pu être associés à cette initiative. Ce type de projet est très complexe à monter et nous n'avons pas perdu espoir de faire quelque chose de très ambitieux dans les mois qui viennent.

Il y a des projets magnifiques dans tous les domaines, en provenance de sociétés de toutes tailles. Pour donner leurs chances aux petits projets, nous avons créé, avec les grands opérateurs, deux fonds de 200 à 300 millions d'euros, qui permettront de traiter très vite leurs demandes.

J'ai vu Frédéric Mitterrand. Nous avançons avec le ministère de la culture, vers la numérisation des films, des bibliothèques, de très nombreux fonds. Nous interviendrons dans ce domaine, conformément aux règles que j'ai rappelées, en investisseurs avisés. Le projet de la BnF est très intéressant, mais il n'aurait aucune chance de s'achever un jour s'il devait uniquement reposer sur des subventions. Avec le modèle que nous avons mis en place, nous faisons venir au capital les gens qui exploitent les ressources de la BnF, qui, en quinze ans, sera complètement numérisée. Je suis sidéré : y compris dans le monde de la culture, que je connais peu, lorsque l'on discute sérieusement avec les acteurs, on trouve des solutions bien plus efficaces et durables que les subventions. Celles-ci ne durent qu'un temps, que fait-on ensuite ? Il s'agit de créer un écosystème intelligent et durable. Ainsi pour la numérisation des films, on peut demander une contribution au spectateur en salles d'un euro par film.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Quid des livres introuvables du XXe siècle ? Nous avons travaillé sur ce sujet en menant un débat très serein, qui s'est conclu par un vote à l'unanimité. Il y a des complexités de mise en oeuvre...

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Oui.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

La BnF détient les fonds. Une société se charge de la numérisation, une autre société de la gestion et de la répartition des droits. On nous a dit qu'un modèle économique « de grande traîne » permettrait d'organiser cela. En combien de temps parviendra-t-il à l'équilibre, sachant qu'il faut numériser de 600 000 à 700 000 livres ? La BnF nous dit qu'elle peut commencer avec 15 000 à 20 000 ouvrages. Le schéma intellectuel est éblouissant, mais quand on revient au pragmatisme, on se heurte à davantage de complexité.

La mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale sur les investissements d'avenir a estimé que les fonds réellement mis à disposition représentent 10 % des engagements. A ce rythme, comment le projet peut-il devenir opérationnel et ne pas décevoir les espoirs fondés sur l'enthousiasme que vous savez communiquer ? Le modèle économique échappant au dialogue avec les élus et les collectivités territoriales, quid de sa mise en oeuvre concrète et de son efficacité par rapport au retour sur investissement espéré ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je passe la parole à l'auteur de la proposition de loi sur le sujet.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Nous sommes tous désireux de concrétiser la numérisation des livres du XXe siècle. Je suis convaincu par ce projet, mais je ne souhaitais pas intervenir sur ce point.

Du poste d'observation et d'action extraordinaire qui est le vôtre, allez-vous, à un moment donné, établir un rapport d'étape des points forts que vous constatez, mais aussi des manques dans les investissements répartis sur le territoire, afin que nous puissions, dans le respect de nos analyses, en tirer le maximum d'enseignements sur ce que peut faire la France et sur les endroits où il faudrait faire des efforts particuliers. Je rejoins ce qu'a dit M. Bailly : nous manquons de documents clairs retraçant les apports des investissements que vous contribuez à mettre en place.

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

La numérisation de ces livres est un investissement de long terme, qui durera probablement quinze ans. Je ne pense pas que nous puissions terminer avant : c'est tout l'intérêt de ce que nous faisons.

Ma conviction ? On m'a demandé un rapport sur la crise financière, que j'ai rédigé avec 150 personnes, qui concluait au retour du politique. Lorsque j'étais médiateur du crédit, j'ai pointé des erreurs stratégiques incommensurables, commises par les dirigeants des banques. J'ai travaillé, avec beaucoup de gens, pour sauver des entreprises et, je le répète, avec fierté, 200 000 emplois. Nous avons refondu des stratégies, changé des dirigeants, construit des solidarités entre tous les acteurs concernés. Avec les régions, les collectivités, l'État, nous avons travaillé pour dynamiser les entreprises technologiques. C'est dire ma passion pour les investissements d'avenir. Aujourd'hui, je reprends mon bâton de pèlerin, pour coordonner les soutiens apportés à 130 entreprises en difficulté. Grâce aux investissements d'avenir, nous pouvons mobiliser les acteurs autour des technologies nouvelles.

Pour être précis, ce programme s'élève à 35 milliards d'euros dont 40 % sont dits non consomptibles, c'est-à-dire que seuls les intérêts sont perçus, et ce pour une durée de dix ans avec une rémunération annuelle de 3,4 %. Ce mode de financement explique un rythme de dépenses plus lent, qui diffère ainsi profondément du plan de relance même si, sur la période, l'on aboutit à un financement d'un ordre de grandeur proche de ce dernier, soit 25 milliards d'euros. Dans le cas des initiatives d'excellence le capital est définitivement acquis après quatre ans. C'est un système bien meilleur que celui qui donne 700 millions à gérer à un président d'université, et qui incite ce dernier à placer l'argent à des conditions mirifiques. Pour au bout du compte ne plus rien avoir. Je forme donc le souhait qu'un conseil financier soit apporté à ces structures. Ne confondez pas plan de relance et plan d'avenir !

Je vous ferai parvenir prochainement les rapports que nous avons rédigés sur la gestion de ces moyens au cours de l'année 2010, et pour une partie de l'année 2011, mais au-delà nous sommes à votre entière disposition pour vous recevoir au 32 rue de Babylone afin de vous présenter en détail les procédures mises en place et le déroulement du processus.

Tout cela est intéressant à découvrir et riche d'enseignements. Personnellement, l'une des grandes leçons que j'en tire est que l'un des apports du travail de nos jurys est d'inviter parfois à l'humilité telle université ou tel centre de recherches, tentés de s'estimer excellents dans un domaine particulier.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je vous remercie pour votre intervention qui a été très intéressante, notamment en ce qui concerne le lien entre le financement de la recherche et le développement des filières industrielles, lien qui intéresse beaucoup note commission.

J'ai été particulièrement étonnée de vous entendre évoquer l'éclatement de la recherche hospitalo-universitaire, alors que la directeur général de l'INSERM nous vantait il y a peu les alliances constituées entre les acteurs du secteur.

Plus précisément, à propos des appels à projets sur le cancer, j'attire votre attention sur la nécessité de soutenir en priorité les recherches sur les causes de cette maladie qui présentent un enjeu d'avenir pour l'ensemble de la société.

Debut de section - Permalien
René Ricol, commissaire général à l'investissement

Vous avez raison, il y a beaucoup à faire en matière de recherche sur le cancer. La raison principale des dysfonctionnements me semble être la pression des laboratoires pharmaceutiques, toujours soucieux de mettre au point une nouvelle molécule miracle, un blockbuster. Or, si des progrès dans le traitement sont encore possibles comme le prouve l'exemple d'un vaccin développé par Bio-Mérieux et l'Institut Pasteur, nous savons que l'émergence de ces nouveaux médicaments, souhaitée par l'industrie, n'est plus vraiment possible.

Je puis vous assurer que nos jurys sont extrêmement vigilants sur ce sujet et n'hésitent pas à rejeter les projets jugés trop conformistes, car c'est, au contraire, de nouvelles pistes que viendront peut-être les progrès que nous espérons. Nous essayons de casser les murs.