Déposé le 18 novembre 2022 par : MM. Klinger, Retailleau, Babary, Bacci, Bansard, Bascher, Bazin, Belin, Mmes Belrhiti, Berthet, MM. Étienne Blanc, Bonhomme, Bonnus, Mme Borchio Fontimp, MM. Bouchet, Bouloux, Mme Valérie Boyer, MM. Brisson, Burgoa, Cadec, Cambon, Cardoux, Mme Chain-Larché, MM. Charon, Chatillon, Mme Chauvin, M. Chevrollier, Mme de Cidrac, MM. Courtial, Cuypers, Mme Laure Darcos, M. Daubresse, Mmes Demas, Deroche, Di Folco, Drexler, Dumas, Estrosi Sassone, Eustache-Brinio, MM. Favreau, Bernard Fournier, Mmes Garriaud-Maylam, Frédérique Gerbaud, Gosselin, Goy-Chavent, Gruny, M. Hugonet, Mmes Imbert, Jacques, Joseph, MM. Karoutchi, Laménie, Mme Lassarade, M. Daniel Laurent, Mme Lavarde, MM. Lefèvre, Longuet, de Legge, Le Gleut, Le Rudulier, Mme Lopez, MM. Mandelli, Meignen, Mmes Marie Mercier, Micouleau, M. Mouiller, Mme Noël, MM. Nougein, Paccaud, Panunzi, Paul, Pellevat, Perrin, Piednoir, Mme Pluchet, M. Pointereau, Mmes Primas, Puissat, Raimond-Pavero, MM. Rapin, Reichardt, Mmes Renaud-Garabedian, Richer, MM. Rietmann, Savary, Sido, Sol, Tabarot, Mme Thomas, MM. Cédric Vial, Jean Pierre Vogel.
Après l’article 5
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article 269 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Après le a sexies du 1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« a septies) Pour les livraisons de bien par un assujetti, réputé avoir acquis et livré les biens conformément aux a et b du 2° du V de l’article 256, à un non assujetti, au moment de la livraison du bien ; »
2° Au premier alinéa du a du 2, après le mot : les mots : « et les achats mentionnés aux a et a sexies » sont remplacés par les mots : « mentionnés aux a, a sexies et a septies ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ierdu livre III du code des impositions sur les biens et services.
L'article 30 (I-8°) de la loi de finances pour 2022 a prévu qu’« en cas de versement préalable d’un acompte, la taxe devient exigible au moment de son encaissement à concurrence du montant encaissé » (nouvel article 269, 2° a du code général des impôts).
La rédaction actuelle de l’article précité va induire d’importantes difficultés de trésorerie pour des milliers de magasins dont l’activité est caractérisée par un important décalage temporel entre l’encaissement de l’acompte (sur lequel il faudra en janvier 2023 prélever la TVA) concomitant de la commande par le consommateur et, plusieurs mois après, la livraison et la facturation.
Ces professionnels réalisent, au regard de la TVA, des opérations complexes (livraison de biens et prestations de services) qui suivent dans leur ensemble le régime des livraisons de biens. Leur activité est principalement à destination des particuliers. Par conséquent, ces entreprises sollicitent auprès de leurs clients non assujettis le versement d’un acompte sans application de la TVA, celle-ci n’étant due qu’au moment du fait générateur, c’est-à-dire, de la livraison chez le client. Ces derniers, non assujettis, ne sont pas impactés par la réforme dans la mesure où ils ne récupèrent pas la TVA facturée lors de la livraison. Le principe de neutralité de la TVA que la réforme a pour but de garantir dès l’encaissement d’un acompte sur une prestation de livraison de biens ne joue donc que pour autant que l’on se situe en présence d’assujettis soumis à la TVA, ce qui n’est pas le cas des particuliers.
Ce dispositif a des conséquences particulièrement négatives, par exemple dans les secteurs de l’ameublement qui livrent un produit assorti d’une prestation de service.
Cette rédaction entraîne également plusieurs autres inconvénients majeurs :
- Une concomitance préjudiciable entre l’entrée en vigueur de cette nouvelle obligation en janvier 2023 et l’échéance de remboursement des PGE pour les TPE.
- Une augmentation sensible des frais de gestion des magasins par doublement ou triplement de leur volume annuel de facturation (acompte initial + acompte intermédiaire + solde final).
- Une complexité de mise en place d’une exigibilité de la TVA dès l’étape de l’acompte pour des opérations fiscalement complexes car mixant des livraisons de biens à taux réduit (meubles posés à 10%) et à taux normal (électroménager à 20%), ainsi que des prestations de livraison et pose dont l’exécution est décalée de plusieurs mois. Cette complexité sera inévitablement source de contentieux avec les services de vérification.
En conséquence, le présent amendement propose une dérogation au régime de taxation à la TVA des acomptes visant les non-assujettis à la TVA (autrement dit les particuliers qui ne collectent ni ne déduisent la TVA).
Cette dérogation est parfaitement envisageable dans le cadre de la directive communautaire 2006/112/CE du 28 novembre 2006 dont l’article 66 permet de déroger au principe de droit commun prévu à l’article 65 (exigibilité de la TVA lors des acomptes) afin que la TVA soit exigible lors de l’émission de la facture ou au plus tard lors du fait générateur. Cela permettrait d’éviter les multiples inconvénients précités, sans aucune incidence sur le montant des recettes de TVA perçues par l’Etat.
Concernant la compatibilité avec le droit européen, les auteurs du présent amendement tiennent à rappeler que :
L'article 30 de la loi de finances pour 2020 a été adopté afin de rendre compatible le régime de TVA applicable aux acomptes perçus, suite à l’arrêt de la cour administrative d’appel de Nantes du 28 mai 2021 jugeant que l’article 269, 2-a du CGI dans sa rédaction actuelle est incompatible avec les objectifs fixés par l’article 65 de la directive n°2006/112/CE (directive TVA).
La directive TVA prévoit les règles suivantes :
1. Par principe, la TVA sur les livraisons de biens est exigible lorsque la livraison est effectuée (article 63).
2. Par exception, en cas de versements d’acomptes avant que la livraison de biens ou la prestation de services ne soit effectuée, la taxe devient exigible au moment de l’encaissement, à concurrence du montant encaissé (article 65).
3. Enfin, une exception globale visant tant les livraisons de biens que les prestations de services est prévue par l’article 66 de la directive et permet aux États membres de déroger à ces règles, à condition de prévoir une exigibilité de la TVA :
- au plus tard lors de l’émission de la facture ;
- au plus tard lors de l’encaissement du prix ;
- en cas d’absence d’émission ou d’émission tardive de la facture, dans un délai déterminé à compter de la date du fait générateur.
4. Il ressort de l’analyse de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union Européenne (CJUE, 2 mai 2019, affaire C224/18 ; CJUE, 16 mai 2013, affaire C169/12) que le législateur polonais a fait usage de cette exception en matière de prestations de services en prévoyant que, en l’absence d’émission ou d’émission tardive de facture, la TVA devient exigible à l’expiration d’un délai de 30 jours après que la prestation de services a été effectuée.
En France, une réponse ministérielle (publiée au JO le 2 avril 2019, page : 3019) a clairement reconnu que « la directive autorise les États membres à prévoir que la taxe devient exigible pour certaines opérations ou certaines catégories d’assujettis, soit au plus tard, lors de l’émission de la facture, soit au moment de l’encaissement du prix (article 66) ». Par ailleurs, le Ministère de l’économie, des finances et de la relance lui-même a soutenu, à l’occasion de l’arrêt de la CAA de Nantes du 28 mai 2021, que l’article 66 de la directive TVA autorise les États membres à déroger à la règle posée à l’article 65 relative aux acomptes.
Par conséquent, il est tout à fait acceptable qu’un État membre instaure une dérogation à la règle posée par l’article 63 de la directive TVA tant que celle-ci respecte les conditions prévues par l’article 66 de la même directive. Dans ce cadre, une dérogation au régime de taxation à la TVA des acomptes visant les non-assujettis à la TVA (autrement dit les particuliers qui ne collectent ni ne déduisent la TVA) est parfaitement envisageable dans le cadre de l’article 66 de la directive.
NB:La présente rectification porte sur la liste des signataires.
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