Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées

Réunion du 21 octobre 2009 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • amiral
  • forissier
  • frégate
  • marine
  • maritime
  • mer

La réunion

Source

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

Lors d'une première séance tenue dans la matinée, la commission a entendu une communication de M. Josselin de Rohan, président, sur le contrôle de l'application des lois pour l'année parlementaire 2008-2009.

En préambule, M. Josselin de Rohan, président, a souligné que l'essentiel de l'activité législative de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées consistait en l'examen de projets de loi autorisant la ratification ou l'approbation de traités ou accords internationaux, mais que ces conventions et accords n'étaient pas pris en compte dans le contrôle de l'application des lois. A côté des conventions et accords, la commission a examiné au cours de la précédente année parlementaire, en tant que commission saisie au fond, deux projets de loi intéressant des questions de défense. Il s'agit de la loi n° 2009-928 relative à la programmation militaire pour les années 2009 à 2014 et portant diverses dispositions concernant la défense, et de la loi n° 2009-971 relative à la gendarmerie nationale.

a indiqué que ces deux lois appelaient des décrets d'application, mais qu'aucun n'avait été pris au 30 septembre 2009. Cependant, ces lois ayant été promulguées il y a deux mois, il est encore trop tôt pour établir un bilan positif ou négatif de leur application.

Concernant les lois antérieures, M. Josselin de Rohan, président, a rappelé que lors de l'année parlementaire 2007-2008, la commission avait été saisie au fond de deux projets de loi. Pour le premier texte, devenu la loi n° 2008-492 relative aux emplois réservés et portant dispositions diverses relatives à la défense, un décret unique a été pris le 5 juin 2009, couvrant l'ensemble des dispositions nécessaires à l'application de la loi. Cette loi est donc devenue totalement applicable un an après sa promulgation. La commission se félicite de ce résultat.

Pour le second texte, la loi n° 2008-493 ratifiant l'ordonnance n° 2005-883 du 2 août 2005 relative à la mise en place au sein des institutions de la défense d'un dispositif d'accompagnement à l'insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté et l'ordonnance n° 2007-465 du 29 mars 2007 relative au personnel militaire modifiant et complétant la partie législative du code de la défense et le code civil, et portant diverses dispositions relatives à la défense, deux dispositions n'ont toujours pas été prises, mais l'une devrait l'être prochainement comme indiqué dans un rapport sur la mise en application de la loi transmis au Sénat et à la commission le 21 septembre 2009. Cependant, à ce jour, soit un an et demi après la promulgation de cette loi, son taux d'application n'est que de 33 %.

En conclusion, M. Josselin de Rohan, président, s'est félicité de la publication de ces mesures d'application, tout en soulignant que la commission restera très vigilante et veillera à ce que les mesures prévues soient effectivement prises, particulièrement concernant les deux lois promulguées cette année.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

Puis la commission a procédé à l'audition de l'amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine, sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission Défense).

L'amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine, a indiqué en préambule qu'il n'avait pas de responsabilité budgétaire envers la marine nationale, à l'exception d'un modeste budget opérationnel de programme du programme 178, mais que néanmoins il était responsable de la cohérence d'ensemble des ressources budgétaires allouées à la marine nationale.

Il a tout d'abord indiqué que l'actualité correspondait à une période charnière marquée pour les armées, et pour la marine nationale en particulier, par la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie de sécurité nationale définie par le Livre blanc et par l'adoption de la loi de programmation militaire. Il s'agit d'une transformation majeure de l'outil de défense, conduite à un moment où les engagements opérationnels se multiplient, et à laquelle la marine prend toute sa part.

Il a rappelé, avant de commenter les perspectives qu'offre le projet de loi de finances pour 2010, la finalité de la marine au travers des activités opérationnelles de l'année 2009. En moyenne, chaque jour, trente bâtiments et huit aéronefs de la marine participent, en mer ou au-dessus de la mer, à des missions opérationnelles. Sur le plan des opérations militaires, la force océanique stratégique a continué d'assurer la permanence de la mission de dissuasion qui reste la priorité essentielle. Il a souligné le fait que la tenue de la posture de dissuasion était un des paramètres essentiels de l'organisation de la marine nationale.

Dans le nord de l'Océan indien, la marine poursuit son engagement dans la lutte contre le terrorisme en participant à l'opération Héraclès, qui constitue le volet maritime de l'opération interalliée Enduring Freedom. Dans ce cadre, le contrat opérationnel d'un bâtiment au sein de la force maritime internationale intitulée Task Force 150 a été maintenu et a contribué à la stabilisation préventive de la zone. Un amiral français a d'ailleurs assuré le commandement de cette force depuis le BCR Marne, du 9 avril au 20 juillet dernier.

Dans la zone sensible de la corne de l'Afrique soumise à de nombreux trafics, et même au large des Seychelles, la marine nationale a poursuivi son engagement au sein de l'opération EU NAVFOR Atalanta. L'amiral Pierre-François Forissier a fait remarquer que la marine a contribué avec efficacité aux opérations de lutte contre les actes de piraterie dans le Golfe d'Aden et au large de la Somalie, tout en assurant l'accompagnement des navires affrétés par le programme alimentaire mondial et l'AMISOM. Actuellement, deux frégates et un avion de patrouille maritime sont déployés en permanence dans cette zone et le resteront aussi longtemps que nécessaire. Cette opération, à laquelle la France prend une part active, constitue la première opération maritime de l'Union européenne. Il s'agit d'une réponse significative qui témoigne de la volonté des Etats membres, et de la France en particulier, d'apporter une solution durable aux causes profondes de la piraterie dans cette région.

Les unités françaises présentes dans cette zone restent sous le contrôle opérationnel et l'assistance logistique de l'amiral commandant la zone maritime de l'Océan indien. Toutefois, et selon le besoin opérationnel, ces unités peuvent être amenées à conduire des actions spécifiques. Ce fut notamment le cas avec l'opération de vive force menée pour la libération des otages du voilier Tanit en avril dernier, ainsi que pour rechercher les boîtes noires à la suite de l'écrasement de l'A310 de la compagnie Yemenia en juin. C'est aussi le cas pour la protection de la flotte de pêche au thon française qui est assurée dans le bassin somalien depuis le mois de juillet 2009 par des unités de la marine.

Sur la façade ouest du théâtre africain, la marine participe à l'opération Corymbe, destinée à prévenir les crises dans le golfe de Guinée et à participer à leur règlement. La présence française est assurée par un transport de chalands de débarquement (TCD) ou un aviso, parés à l'évacuation éventuelle de ressortissants.

L'amiral Pierre-François Forissier a rappelé que, cette année encore, la marine avait assuré une présence importante en Méditerranée dans le cadre de missions nationales, mais également au travers d'engagements communs liés aux besoins de sécurité et de sûreté maritimes, en coopération avec les marines riveraines. Dans le cadre de l'opération Impartial Behaviour de soutien de la force des Nations unies déployée au large du Liban (FINUL), un bâtiment a maintenu une présence dans la zone jusqu'en mars 2009 afin de surveiller les approches maritimes libanaises, tout en participant à une mission de surveillance nationale (opération Baliste).

Par ailleurs, de très importants moyens ont été mis en oeuvre pour rechercher les corps, les débris et les enregistreurs du vol AF 447 Rio-Paris. Du 1er juin au 16 juillet, le bâtiment de projection et de commandement (BPC) Mistral, la frégate Ventôse, le sous-marin nucléaire d'attaque (SNA) Emeraude ainsi qu'un avion de surveillance Falcon 50 et un Bréguet-Atlantique ATL2 ont été mobilisés pour cette opération. Enfin, en juillet dernier, le premier sous-marin malaisien Tunkul Abdul Rahman a été escorté jusqu'à Djibouti et a été remis solennellement à la Malaisie au début du mois de septembre.

La sauvegarde maritime constitue par ailleurs un volet important de la contribution de la marine à la sécurité des Français et occupe une part non négligeable de son activité opérationnelle. Depuis le 1er janvier 2009, 582 vies ont été sauvées grâce à l'intervention de moyens mis en oeuvre par la marine.

L'amiral Pierre-François Forissier a indiqué que, dans le domaine de la lutte contre le narcotrafic, la marine a participé à trois opérations aux Antilles et à deux opérations en Méditerranée occidentale qui ont permis de dérouter quatre navires et de saisir près de quatre tonnes de stupéfiants.

Concernant l'immigration clandestine, la marine a intercepté trente navires transportant des passagers clandestins au cours des patrouilles auxquelles elle a participé en mer Egée et en mer d'Alboran, à l'ouest de la Méditerranée. Depuis le 1er janvier 2009, 709 immigrants ont également pu être remis à la police aux frontières grecque.

Il a précisé que la marine luttait également contre la pêche illicite. Outre les surveillances de routine, la marine a contrôlé 867 navires et en a dérouté quatorze. Enfin, en termes de prévention des pollutions maritimes, les bâtiments de la marine ont détecté depuis le début de l'année quatorze pollutions accidentelles, une volontaire, et ont procédé au déroutement d'un navire.

L'amiral Pierre-François Forissier a fait remarquer que le renforcement de l'action de l'Etat en mer, souhaité par le Président de la République, et la création d'une nouvelle fonction « garde-côtes » représentent des avancées tout à fait significatives pour la marine. Malgré ce bilan relativement positif, la disponibilité fluctuante des moyens aéromaritimes affecte souvent l'efficacité de ces opérations et le respect du contrat opérationnel de la marine. Ainsi, le vieillissement des parcs d'hélicoptères obère l'aptitude de la marine à projeter ses frégates avec des aéronefs fiables et à tenir ses alertes pour le service public.

L'amiral Pierre-François Forissier a tenu à faire part à la commission de sa très grande inquiétude concernant les hélicoptères lourds en Bretagne demandés depuis cinq ans, mais qui n'arrivent pas. Il a néanmoins rendu hommage au travail remarquable de la direction générale de l'armement (DGA) pour trouver des solutions intérimaires. D'une façon plus générale, il a déclaré que la bataille de la disponibilité des moyens se poursuit. Le taux moyen de disponibilité technique des bâtiments se maintient au dessus de 70 % depuis plus de trois ans. Ce résultat est la conséquence de la réorganisation du maintien en condition opérationnelle (MCO) de ces dernières années qui a permis de progresser dans la mise en oeuvre d'une politique de contractualisation associant pluri-annualité, mise en concurrence et responsabilisation des titulaires quant aux résultats.

Alors que la première IPER (Indisponibilité périodique pour entretien et réparation) du porte-avions Charles-de-Gaulle s'était remarquablement déroulée, malgré la difficulté de l'opération et grâce à la mobilisation de l'ensemble des acteurs (équipage, services de soutien de la marine et industriels maîtres d'oeuvre), l'amiral Pierre-François Forissier a souligné que le porte-avions avait subi une avarie sur un accouplement entre les turbines et le réducteur qui avait provoqué l'interruption de son activité entre mars et septembre 2009. Après enquête, il s'est avéré que cette avarie résultait d'un sous-dimensionnement de ces pièces au moment de leur conception et d'une erreur de fabrication d'un rechange, il y a une dizaine d'années. C'est ce rechange, mis en place durant l'IPER, qui s'est détérioré au cours des essais du porte-avions. La détection rapide du début de la dégradation de l'accouplement a permis un arrêt à temps du bâtiment et, ainsi, la préservation de l'ensemble propulsif. Il n'en demeure pas moins que le porte-avions a été indisponible et que la requalification des pilotes a été interrompue.

D'un point de vue budgétaire, le plan de relance a apporté une bouffée d'oxygène appréciable en permettant à la marine de financer un troisième bâtiment de projection et de commandement, ainsi qu'un certain nombre d'actions peu visibles, mais d'un grand intérêt pour restaurer la disponibilité des équipements. La marine s'est vu allouer près de 48 millions d'euros en autorisations d'engagement et 24 millions d'euros en crédits de paiement pour la passation de commandes de rechanges supplémentaires, tant pour du matériel naval qu'aéronautique.

La préoccupation relative au taux de disponibilité des matériels de l'aéronautique navale reste forte, compte tenu de facteurs conjugués d'insuffisance de rechanges, de l'âge moyen du parc et d'une perte de compétences techniques. Pour autant, de nombreux chantiers pour remédier à cette situation sont ouverts. La mise en place d'un hélicoptère Caracal EC 725 de l'armée de l'air sur la base aéronavale de Lanvéoc est effective depuis février 2009. De plus, anticipant le retrait de service des hélicoptères Super-Frelon, la marine recherche, de manière provisoire, deux hélicoptères lourds supplémentaires pour assurer les missions de sauvetage dans les deux ans à venir. Quelle que soit l'option retenue, achat ou location, la marine ne conservera pas ces hélicoptères une fois que les NH 90 auront repris la mission SECMAR, dont l'échéance est prévue en novembre 2011.

Pour répondre à l'impératif de maintien des compétences techniques, la marine cherche à transformer les conditions d'exécution des opérations de maintenance qui se déroulent sur ses bases aéronavales, en transférant en 2011 les ateliers et une partie du personnel technique au service industriel de la maintenance aéronautique. La compétence des techniciens sera ainsi renforcée.

Alors que la marine était très préoccupée l'an dernier par l'augmentation des prix du pétrole, elle a profité de l'évolution favorable des prix constatée en début d'année 2009 pour procéder à des recomplètements importants des stocks de combustibles de navigation au cours du premier semestre 2009. De ce point de vue, l'activité des forces est ainsi assurée pour l'ensemble de l'année.

Pour les opérations d'infrastructure, le début de la gestion 2009 a été perturbé par les conditions de construction du budget 2009, qui faisaient largement appel à des ressources extrabudgétaires finalement absentes. L'amiral Pierre-François Forissier a reconnu que la marine avait été confrontée à des situations tendues affectant les installations techniques au début de l'été. Des dotations supplémentaires ont permis d'améliorer la situation. Néanmoins, la contractualisation d'un certain nombre d'opérations a pris du retard.

En 2009, le renouvellement de la flotte se poursuit. Ont ainsi été commandés un deuxième sous-marin Barracuda, les trois dernières frégates FREMM, dont deux de défense aérienne, neuf avions RAFALE, destinés à la marine, et cent cinquante missiles de croisière navale, dont cinquante destinés aux sous-marins. Compte tenu de la mise en place du plan de relance, la marine bénéficie des effets du soutien apporté aux chantiers de construction navale. La commande anticipée, en avril 2009, d'un troisième BPC, a été passée dans ces conditions, ainsi que celle de quatre engins de débarquement.

Les livraisons de deux avions Rafale et de cinquante nouvelles torpilles MU 90 sont en cours. Une difficulté est rencontrée sur la mise au point technique du système de combat des frégates Horizon, ce qui a amené l'amiral Pierre-François Forissier à retarder l'acceptation de la première frégate, le Forbin, puis de la deuxième, le Chevalier Paul. Cela n'est pas choquant compte tenu des percées technologiques spectaculaires que représentent ces navires et leurs systèmes d'armes. Ils seront admis au service à la mer et il est d'ores et déjà certain qu'ils répondent aux espoirs qui étaient placés en eux.

Les essais à la mer du quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) « Le Terrible » se déroulent selon le calendrier prévu et le dernier tir de maquette du missile, début octobre, s'est bien déroulé. Les programmes concernant la dissuasion océanique sont donc conformes aux prévisions.

L'année 2009 est remarquable sur le plan de l'organisation générale. L'amiral Pierre-François Forissier a déclaré que la marine avait changé d'ère. L'heure des réflexions est achevée. La réorganisation du ministère est engagée. La marine y prend tout sa part. L'expérimentation de la base de défense de Brest se déroule bien. Même si l'organisation très ramassée et mutualisée a facilité le démarrage de ce nouveau mode de soutien, le fonctionnement d'une telle base, avec des éléments de l'armée de l'air (radar de Loperhet) et la constitution d'antennes fort éloignées de Brest à Lanvéoc et à Landivisiau, a entraîné des réorganisations profondes des méthodes de soutien et des habitudes de travail des personnels de la marine. Ce concept constitue une révolution aussi bien pour la marine que pour les autres armées.

L'amiral Pierre-François Forissier a ensuite abordé le budget pour 2010. Les dotations budgétaires supportant l'activité de la marine et le renouvellement de ses moyens sont réparties sur plusieurs programmes face auxquels il a présenté ses attentes en tant que responsable de la cohérence de la marine.

Il a tout d'abord souligné que la distinction de budgets particuliers ou propres à chaque armée devient de plus en plus difficile. La nouvelle nomenclature budgétaire, associée au système comptable Chorus, et, surtout, la poursuite du rapprochement des organisations dans des structures interarmées favorisent la mise en commun des budgets orientés vers une même finalité. Ce mouvement, entamé sur les grands programmes d'armement, s'accentue avec l'élargissement du nombre de bases de défense, la montée en puissance de l'organisation interarmées du soutien et la création, au 1er janvier 2010, du service du commissariat des armées.

Le programme 178 « préparation et emploi des forces » concerne la quasi-totalité des unités en service de la marine, réunies au sein de l'action « préparation des forces navales ». Cette action rassemble 90 % du personnel de la marine, dont 15 % de civils, avec la masse salariale afférente.

Il a souligné que la marine contribuait aux efforts de réduction d'effectifs du ministère. Dans les huit prochaines années, de nouveaux modes de fonctionnement devront être trouvés, ainsi que de nouveaux processus de soutien qui permettront d'assurer l'activité des forces et le fonctionnement de la marine, tout en réduisant les effectifs de 12 %, pour atteindre en 2015, 44 000 marins (37 000 militaires et 7 000 civils). La manoeuvre à mener afin d'arriver à un rythme annuel moyen de décroissance de 850 personnes est délicate. Il est indispensable de maintenir l'équilibre de la balance « entrées-sorties » pour conserver les compétences opérationnelles dont la marine a besoin et maintenir des équipages opérationnels, donc jeunes.

Après les difficultés pour recruter en 2008, qui avaient entraîné un sous-effectif de près de 500 personnes, une campagne de recrutement a été lancée au début de l'année 2009. Il a également été décidé de rouvrir l'Ecole des mousses afin de favoriser l'insertion de jeunes qui ne sont pas à l'aise dans le système scolaire et de fidéliser dans la marine une grande partie d'entre eux. Ces efforts ont porté leurs fruits puisque le recrutement s'est redressé à partir de l'été. Parallèlement, les départs volontaires ont été moins importants que prévu, notamment dans la population des officiers, et l'année devrait se terminer en léger sureffectif. Pour autant, l'objectif demeure inchangé et l'observation de la déflation des effectifs doit se faire sur plusieurs années, pour dégager une tendance, au-delà de tout aléa conjoncturel. Il faudra, en 2010, accentuer les efforts d'incitation au départ et réguler le recrutement. Cela suppose d'augmenter les dotations pour le pécule de départ. Cet aiguillon, via la baisse des crédits du Titre 2, sera d'ailleurs incontournable. La dotation prévue pour 2010 diminue de 3,6 %. Elle s'explique en partie par la réduction d'effectifs prévue à hauteur de 822 postes au titre des mesures d'économies, et de 1 631 postes, liés à des transferts de personnel vers d'autres organismes du ministère, en particulier dans le domaine du soutien commun.

Plusieurs mesures de revalorisation salariales et catégorielles sont prévues au profit du personnel militaire et civil pour un montant de 10 millions d'euros, en particulier la poursuite de la revalorisation des parcours indiciaires du personnel militaire et la requalification de corps et ajustements salariaux pour le personnel civil. Afin d'accentuer les incitations au départ, les mesures d'accompagnement social des restructurations s'élèvent à près de dix-sept millions d'euros, dont près de neuf millions d'euros supplémentaires au titre des pécules des personnels militaires.

La part relative des dépenses liées aux produits pétroliers continue d'augmenter pour atteindre, en 2010, 28 % des crédits alloués au fonctionnement des forces. Cet effet est cependant à relativiser, car la dotation en valeur absolue a faiblement augmenté, elle est passée de 106 millions d'euros à 110 millions d'euros. Au cours actuel, la dotation permet d'assurer normalement l'activité des forces.

Outre la permanence de la contribution de la marine à la dissuasion, les grandes lignes de l'activité 2010 s'articulent autour :

- du retour dans le cycle opérationnel du porte-avions Charles-de-Gaulle, marqué principalement par deux déploiements ;

- de la poursuite de la lutte contre la piraterie au large des côtes somaliennes, notamment dans le cadre de la mission européenne Atalanta et la lutte contre le terrorisme en océan Indien (Héracles / Enduring freedom) ;

- des deux campagnes du groupe école d'application des officiers de marine, la première avec la Jeanne d'Arc, la seconde avec le Tonnerre. A cet égard, il a fait observer que cette campagne d'application interviendrait désormais non plus en quatrième année d'études, mais en troisième année, afin d'harmoniser la formation avec les autres écoles européennes, dans le cadre du programme Erasmus.

Pour ce qui concerne les crédits consacrés à la maintenance des équipements, la situation semble plus contrastée. L'enveloppe des autorisations d'engagement, à 1 632 millions d'euros, augmente de 20 %. Cette évolution permet la poursuite de la démarche de partage des risques entre l'Etat et les industriels par le biais d'engagements contractuels pour plusieurs années. C'est ainsi que la marine sera en mesure, comme le fait la DGA sur les programmes d'armement, d'obtenir des prix raisonnables et de préserver à la fois la disponibilité des forces et leur format défini dans le Livre blanc.

La dotation en crédits de paiement, qui s'élève à 1 040 millions d'euros, est, elle, beaucoup plus contrainte, malgré les efforts pour dégager des mesures d'économie qui se traduisent par la poursuite du retrait du service de petits bâtiments et la réduction d'activités adaptée à la stricte suffisance des contrats opérationnels.

Cela signifie que les marges de manoeuvre sont insuffisantes pour aller au-delà de ce que prévoient les contrats opérationnels : quand il faut aller ramasser les débris d'un avion, les activités dans d'autres domaines doivent nécessairement être réduites. Ces contraintes pèsent naturellement sur l'ensemble des moyens navals et aéronavals.

L'amiral Pierre-François Forissier a souligné que, pour l'aéronautique navale, il avait déjà présenté ses craintes face à l'envolée des prix du MCO, liée au coût d'utilisation des nouveaux aéronefs et à l'augmentation du coût des rechanges pour les aéronefs déjà en service. La situation reste critique, puisqu'il n'est déjà plus possible en 2009 de régénérer la totalité du potentiel consommé. La dotation pour 2010 ne permettra pas d'améliorer cette situation. Au contraire, elle pourrait entraîner une baisse de la disponibilité, car l'aéronavale est plus sensible que les autres armées aux aléas budgétaires, compte tenu de la taille de ses parcs d'aéronefs. Elle n'a pas de profondeur logistique. Il s'est défendu de vouloir apparaître négatif, mais a déclaré ne pouvoir travailler qu'avec les moyens qu'il a.

Enfin, il a espéré que les conditions économiques entraînent, à l'instar de l'évolution du PIB, une stabilisation sinon une baisse des prix des industriels. Il est vrai que le paysage industriel, insuffisamment mis en situation de concurrence, ne s'y prête guère. En parfaite intelligence avec les industriels et notamment DCNS, clients et fournisseurs doivent se diversifier mutuellement. Il semble important de mettre en valeur un avantage particulièrement intéressant pour les marines européennes : le fait que la marine française offre des chantiers navals à l'intérieur des enceintes protégées que constituent les bases navales, ce qui est rare. Cela constitue un avantage commercial qui a un prix. L'objectif est de faire partager les coûts fixes de notre outil industriel.

Le renouvellement des moyens de la marine se poursuit au sein du programme Equipement des forces (P-146). Il s'agit de la commande du troisième BPC, faite dans le cadre du plan de relance économique, et de l'admission au service actif du SNLE/NG « Le Terrible » avec une dotation de missiles M 51. Pour les autres programmes navals, il est prévu, après résolution des problèmes sur le système de combat, l'admission au service de la seconde frégate Horizon.

Pour ce qui concerne les programmes aéronautiques, la livraison de trois Rafale au standard F3 est prévue et la marine attend, avec une impatience non dissimulée, la livraison des quatre premiers hélicoptères NH 90.

A la différence de l'année dernière, le programme « soutien de la politique de défense » (P-212) disposera de dotations budgétaires mieux équilibrées pour soutenir les opérations d'infrastructure. Par ailleurs, les chances de réalisation des recettes extra-budgétaires apparaissent plus probables.

Il faut cependant reconnaître que les montants retenus pour des opérations intéressant la marine ne correspondent qu'à 80 % des besoins annuels moyens, soit une dotation de l'ordre de 170 millions d'euros pour un besoin de 200 millions d'euros, et cela sans prendre en compte un quelconque rattrapage du retard intervenu en 2009. Si la situation s'améliore par rapport à 2009, notamment parce que les commandes d'opérations pourront être lancées dès le début de la gestion, elle continuera à être tendue. Dans ces conditions, il paraît incontournable de réaliser les cessions immobilières prévues et d'obtenir ainsi des crédits supplémentaires.

La priorité sera donnée à la réfection des installations de l'Île Longue, les travaux devant encore s'y poursuivre à un rythme soutenu. Sont notamment prévues la poursuite de la refonte des installations électriques, dont l'achèvement est prévu en 2012, et la refonte de la station d'eau de mer de réfrigération. Les travaux dureront encore plusieurs années. Ce n'est pas parce que les travaux destinés au M51 ont été achevés qu'il faut baisser les bras.

Des travaux d'infrastructure sont également prévus dans les autres ports :

- l'accueil des sous-marins de type Barracuda va faire l'objet d'études pour l'adaptation de l'infrastructure portuaire ;

- l'adaptation de l'alimentation électrique et des postes d'amarrage sera réalisée dans les bases navales de Brest et de Toulon pour l'accueil des bâtiments futurs, dont les frégates FREMM.

En dehors des installations techniques, quelques travaux d'amélioration des conditions de vie sont également programmés dont la création d'une maison de l'enfance à Brest, qui devrait permettre aux jeunes mères de famille de concilier plus facilement leurs contraintes familiales et professionnelles.

L'amiral Pierre-François Forissier a tenu à rendre hommage à l'ensemble des personnels civils qui effectuent un travail formidable au sein de la marine, notamment pour saisir les données informatiques. Ils ont réalisé la bascule de la LOLF, ce qui dans bien des cas a multiplié par deux leur charge de travail.

Outre les aspects proprement budgétaires, cette gestion 2010 pourrait subir les aléas de nos réorganisations avec la création du service du commissariat des armées, la montée en puissance des bases de défense et, simultanément, la réorganisation des circuits de dépenses avec l'entrée en fonction du nouveau système d'information financière, Chorus. Les équipes travaillant dans ces domaines comptables ou budgétaires sont mobilisées pour la préparation des opérations de bascule financière. Mais le système Chorus va entraîner un bouleversement complet des méthodes de travail et de l'appréhension même de ces métiers. Il faudra relever ce défi, afin de limiter les à-coups dans le démarrage de la gestion et assurer, sans défection, le soutien des forces en opération.

L'amiral Pierre-François Forissier a souligné que, à l'heure où le Président de la République exprimait sa volonté de reconstruire une politique et une ambition maritimes pour la France, où la menace devenait plus diffuse, où la mondialisation ne faisait qu'accroître l'incertitude stratégique et souligner l'importance des espaces maritimes, la marine nationale continuait d'intervenir et d'assurer une présence vigilante et active sur l'ensemble des mers du globe, au plus loin, comme au plus près. Ses capacités demeuraient un formidable levier d'action et de puissance.

La rédaction du « Livre bleu » qui doit définir la nouvelle stratégie maritime française, mais aussi la réunion d'un Comité interministériel de la mer avant la fin de l'année sont autant d'opportunités à saisir, qui devraient être stratégiques pour la politique maritime de la France dans les années à venir.

Enfin, la mise en oeuvre de la nouvelle stratégie de sécurité nationale, définie par le Livre blanc, et l'adoption de la loi de programmation militaire confortent la marine dans ses missions. Il s'agit donc pour les marins de participer avec détermination à cette transformation majeure de l'outil de défense.

Debut de section - PermalienPhoto de André Dulait

a ensuite interrogé le chef d'état-major de la marine sur l'expérimentation des bases de défense dans la marine ainsi que sur le déficit en hélicoptères lourds de la marine nationale.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

L'amiral Pierre-François Forissier a répondu que, en 2009, onze bases de défense avaient été mises en place à titre expérimental, dont une, celle de Brest, concerne la marine au premier chef. Les autres ports basculeront progressivement dans cette nouvelle organisation : Cherbourg en 2010, Toulon et Lorient en 2011. Alors qu'une base de défense de taille moyenne rassemble environ 3 000 personnes, la base de Brest regroupe plus de 20 000 personnes, ce qui en fait une sphère d'expérimentation d'un volume considérable. Concernant les hélicoptères lourds, l'amiral a indiqué que la marine nationale tenait à ce que ses pilotes consomment tout leur potentiel d'heures de vol, afin qu'ils ne perdent ni en expérience ni en formation, et que, compte tenu des problèmes de remplacement des hélicoptères, l'ajustement se faisait par le nombre de pilotes formés. Il a reconnu qu'on pouvait s'accommoder de ce type d'ajustement dans la mesure où les pilotes de l'aéronavale sont également des marins et qu'il était facile, à défaut de les faire voler, d'utiliser leurs compétences pour d'autres missions au sein de la marine. Il a encore souligné l'expertise extraordinaire des pilotes d'hélicoptères de l'aéronavale qui sont capables, lors de missions SAR (Search And Rescue), de voler par tempête, en hiver et de nuit, dans le Golfe de Gascogne.

Le président Josselin de Rohan s'est associé à cet hommage et a tenu à ce que la commission souligne, dans ses travaux, les problèmes engendrés par la carence capacitaire affectant les hélicoptères lourds de la marine nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Boulaud

a interrogé le chef d'état-major de la marine sur le maintien en condition opérationnelle (MCO) du Rafale et, en particulier, sur les raisons de la cannibalisation des appareils les plus anciens afin de servir de réserves de pièces détachées pour les appareils les plus modernes. Est-ce parce que les pièces détachées n'ont pas été commandées à temps ? Il l'a ensuite interrogé sur l'état des négociations avec les autorités russes pour la vente d'un BPC. Enfin, il a demandé à connaître la participation de la marine nationale à l'Europe de la défense.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

L'amiral Pierre-François Forissier a tout d'abord indiqué que le MCO du Rafale était un sujet complexe. En effet, il y a quatre standards successifs déployés dans l'armée de l'air et trois dans la marine. Dans la marine, il y a neuf avions stockés plus un à la DGA qui sont encore au standard F1 et qui seront progressivement portés au standard F3. Ils ne peuvent plus voler dans des conditions satisfaisantes, car il s'agissait de prototypes et leurs pièces de rechange ne sont plus fabriquées. Tant que cette mise à niveau n'est pas effectuée, il faut effectivement jongler avec les pièces de rechange. En outre, le moteur de cet avion n'a pas encore effectué suffisamment d'heures de vol pour être considéré comme mature. Il s'agit d'un moteur modulaire ; quand un des modules tombe en panne, on change le module concerné et non pas l'ensemble du moteur. Certains modules ont une durée de vie très longue, d'autres très courte. Dans les deux cas, les durées de vie réelles sont assez différentes des durées de vie théorique calculées initialement. Dans ce contexte, le problème des pièces détachées ne vient pas du fait qu'elles auraient été commandées avec retard, mais bien plutôt que leur commande n'aurait pas été effectuée de façon cohérente. Initialement chaque partie des armées (l'armée de l'air, la marine, la DGA) effectuait ses commandes de façon séparée. Aujourd'hui, grâce à la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la défense (SIMMAD), il est possible d'avoir une vision d'ensemble plus cohérente. L'amiral a souligné que la maintenabilité à bord du porte-avions du Rafale était exceptionnelle comparée à celle de ses prédécesseurs. Il ne fallait que quatre heures en pleine mer pour changer un moteur et renvoyer l'avion en mission opérationnelle. Le taux de disponibilité est de ce fait hors du commun. Il faut donc se méfier des conclusions hâtives concernant le MCO. Même s'il ne cache pas que des difficultés ont été rencontrées par le moteur, le ministre de la défense a réagi en prenant les choses en main, et en établissant un plan de redressement. Il est donc confiant dans cet avion auquel il a reconnu des possibilités d'utilisation « fantastiques ».

Debut de section - Permalien
amiral Forissier

Concernant les négociations du BPC, l'amiral Forissier a déclaré que cela n'entrait pas dans sa sphère de responsabilité. La décision appartenait à un chantier privé, agissant en accord avec l'Etat. Il n'avait donc pas d'informations particulières à donner sur ce sujet. Enfin, s'agissant de l'Europe de la défense, l'amiral a indiqué que cela faisait plus de quinze ans que ce concept était devenu une réalité solidement ancrée dans les pratiques de la marine. Des officiers français sont formés en Allemagne et, inversement, des officiers allemands reçoivent l'intégralité de leur formation dans la marine nationale. Il a tenu à souligner les performances de ces jeunes officiers qui effectuent des études supérieures dans une langue qui n'est pas la leur et qui passent des concours de haut niveau, notamment des épreuves de français très difficiles. Il a également indiqué que l'école navale comportait des professeurs et des élèves d'autres nations européennes, notamment l'Italie, l'Espagne et le Royaume-Uni. En ce qui concerne les opérations, l'état-major de la force aéromaritime française de réaction rapide (FRMARFOR) inclut un grand nombre d'officiers européens et, inversement, des officiers français sont insérés dans d'autres armées européennes. Il a mentionné le fait que, par exemple, dans certaines réunions internationales il arrivait que le dossier de la marine allemande soit défendu par un officier français et, inversement, le dossier de la marine française par un officier allemand. Il a encore cité l'insertion d'officiers britanniques dans l'état-major et l'exemple de l'opération Atalanta qui n'aurait pas pu avoir lieu sans l'habitude d'un haut degré de coopération entre officiers de marine européens. Il a conclu sur ce point en indiquant que les principales limites à la coopération européenne en matière maritime étaient d'ordre juridique, les marines nationales européennes ne disposant pas des outils juridiques leur permettant de travailler ensemble de façon optimale. Tout fonctionne encore sur la base d'accords bilatéraux, susceptibles, dans certains cas, d'être étendus à trois ou quatre pays, comme en Méditerranée. Mais il n'existe pas de « Schengen » de la mer ni de règles juridiques européennes, ce qui rend l'objectif ambitieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Daniel Reiner

a interrogé l'amiral sur ce qui se passait pendant toute la période précédant la décision concernant le second porte-avions. Il l'a également interrogé sur le rythme de livraison des frégates FREMM, ainsi que sur les différences entre les frégates HORIZON et les frégates de défense aérienne (FREDA). Enfin, il lui a demandé de faire le point sur la déconstruction des navires.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

En réponse, l'amiral Pierre-François Forissier a déclaré que, de son point de vue, le besoin d'un second porte-avions était avéré, la question étant bien évidemment de savoir si la France disposait des ressources nécessaires pour satisfaire ce besoin. Le Président de la République avait rappelé que la décision lui appartenait et qu'elle interviendrait le moment venu. Dans l'intervalle, il est nécessaire de préparer des éléments de choix qu'il a qualifiés de « robustes ». Jusqu'à présent, le projet avait été étudié en coopération avec la marine britannique. Celle-ci avait décidé de lancer le projet sur les bases d'un calendrier différent. Certes, il n'est pas question de passer par pertes et profits les études qui ont été réalisées de concert avec les Britanniques. Cependant, la technologie a évolué et il semblerait possible que des pistes de réduction de coût, non envisageables auparavant, existent aujourd'hui. Par ailleurs, l'obligation d'une propulsion conventionnelle, qui s'imposait dans le cadre d'une collaboration avec les Britanniques, n'existe plus : ce qui, là-aussi, entraîne de possibles économies.

Debut de section - Permalien
amiral Forissier

S'agissant des FREMM l'amiral Forissier a rappelé que, lors de la renégociation du programme, dix-sept frégates étaient envisagées, huit devant être commandées de façon ferme et neuf devant être commandées selon des modalités et un calendrier qui n'avaient pas été définis. Pour rejoindre le format prévu par le Livre blanc, la commande avait été transformée : la marine avait renoncé à commander huit frégates, en contrepartie de quoi, les commandes fermes étaient passées de huit à onze, avec de surcroît une modification de la nature des équipements puisque la commande prévoyait désormais deux frégates anti-aériennes (FREDA). Néanmoins, les fondamentaux de l'équilibre financier du programme n'avaient pas changé et pour que celui soit réalisé, il fallait fabriquer dix-sept frégates en dix ans. Sur ces dix-sept unités, la France en ayant commandé onze, le Maroc en ayant acheté une, il en restait cinq à vendre à l'export, ce à quoi l'amiral Forissier a déclaré participer.

Concernant les différences entre les FREDA et les frégates de type Horizon, il a précisé que la défense aérienne les équipant serait identique. Les frégates Horizon possèdent des capacités fantastiques mais qui ont été spécifiées du temps de la guerre froide et qui apparaissent désormais surdimensionnées vu l'état actuel des menaces. La cible d'acquisition de ces frégates avait donc été réduite de quatre à deux et la défense anti-aérienne classique peut être assurée par des bateaux moins sophistiqués que les frégates HORIZON. Les FREDA iront remplacer les navires de la classe Jean Bart et Cassard tandis que les deux HORIZON remplaceront les « Suffren » et « Duquesne ». Il a précisé que la décision n'avait pas encore été prise de savoir si les FREDA auront une capacité de protection anti-balistique à l'instar de certaines frégates de la marine américaine. Il existe en effet deux volets dans la défense anti-missiles : l'intercepteur, qui serait le même quelle que soit la frégate, et le radar d'acquisition de la cible. Pour l'instant, seul le radar des frégates Horizon a la possibilité d'évoluer vers la défense anti-missile. Pour ce qui est du radar des FREDA, la décision n'a pas encore été prise. Mais, compte tenu de l'évolution du paysage mondial de la défense anti-missile, c'est le moment de se poser ce type de questions.

Concernant la déconstruction des navires militaires, l'amiral Forissier a déclaré que la marine nationale a gardé un mauvais souvenir de la déconstruction du porte-avions Clemenceau, actuellement en cours, et a reconnu que les difficultés avaient été sous-estimées. Le retour d'expérience de la marine nationale peut être mis à profit pour l'ensemble des industriels français. Il s'agit d'un problème de coûts. La marine estime que la déconstruction ne devrait rien coûter compte tenu de la valorisation des métaux opérée par les industriels. Mais, pour que cela soit le cas, encore faut-il qu'il existe une filière rentable économiquement. Actuellement, la marine nationale ne serait en mesure d'offrir qu'un plan de charge de dix-huit mois à un industriel. Or, cela n'est pas suffisant pour asseoir la rentabilité du projet, sur la base d'une non-facturation des déconstructions. Il faudrait, pour que cela soit rentable, que le même industriel puisse proposer ses services à la marine civile. Or, la plupart des bateaux français marchands ne sont pas déconstruits, mais revendus. Il faudrait donc promouvoir une filière européenne.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Gautier

a interrogé l'amiral Forissier sur la taille optimale des bases de défense, en général, et sur celle de Brest, en particulier, sur le problème du vieillissement des Etracos (embarcations rapides des fusiliers marins et commandos de la Marine nationale), sur la mise en place du logiciel Chorus et, enfin, sur la possible acquisition par l'Aéronavale de moteurs de Rafale du même type que ceux envisagés pour équiper les Emirats arabes unis.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vantomme

a interrogé l'amiral sur l'efficacité du cadre juridique applicable aux opérations en mer contre la piraterie maritime et lui a demandé si des modifications étaient souhaitables.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

a demandé des explications sur la nouvelle base d'Abou Dhabi et en quoi elle modifiait la stratégie du déploiement des forces françaises dans cette région.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

a demandé des précisions sur les modifications souhaitables à apporter au droit de la mer et sur l'avenir de l'hôtel de marine.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

En réponse, l'amiral Pierre-François Forissier a indiqué que la base de Brest était la plus grande base de défense envisagée. Avec une base de cette dimension, des marges de manoeuvre sont plus faciles à dégager. Néanmoins, le fait que cette base concerne essentiellement des marins limite la mutualisation des moyens. Selon lui, l'harmonisation et la simplification des processus vont permettre de réaliser des gains considérables. Concernant les Etracos, il a reconnu que le programme de remplacement de ces embarcations avait connu des problèmes et qu'il fallait le reprendre, ce qui occasionnait un retard dans ledit remplacement. A propos du logiciel Chorus qui sera applicable le 1er janvier 2010, il a précisé que le paramétrage du programme était en cours et que le système de comptabilité associé étant radicalement différent du précédent, les méthodes de travail allaient, elles aussi, changer de façon radicale. Il s'est déclaré non pas inquiet, mais vigilant. Enfin, s'agissant du Rafale, il a indiqué que cet avion avait été conçu dès le départ pour être évolutif et que le remplacement du moteur actuel par un moteur plus puissant était quelque chose de tout à fait envisageable. Néanmoins, il y aurait un arbitrage à faire entre les gains que procurerait indubitablement un moteur plus puissant et le coût engendré par le changement de tous les moteurs de Rafale. Il a en outre déclaré qu'il était extrêmement compliqué d'avoir à gérer un parc d'avions avec deux types de moteurs différents à bord d'un porte-avions.

S'agissant des modifications souhaitables à apporter au droit de la mer, il a déclaré que son voeu le plus cher était qu'on ne transpose pas en droit maritime des corpus juridiques appliqués à terre. La mer étant un espace juridique extrêmement diversifié les choses s'y passent, en effet, de façon radicalement différente qu'à terre. La terre est un espace de souveraineté où règne le déterminisme, la mer est au contraire un espace de non souveraineté où le probabilisme domine. La convention de Montego Bay était une étape nécessaire dans l'unification du droit de la mer, mais elle est insuffisante pour ce qui est de la sécurité en mer. Il a rappelé que, en mer, les marins d'Etat remplissaient toutes les missions dévolues, à terre, à des personnes ou à des corps différents. Le marin d'Etat est à la fois un soldat, un pompier, un administrateur, un policier, un diplomate, un formateur...

S'agissant de la base d'Abou Dhabi, il a indiqué qu'il s'agissait d'un choix stratégique et qu'il fallait s'efforcer d'en valoriser les effets positifs - c'est le centre des intérêts français dans le Golfe - et d'en minimiser les inconvénients militaires, en particulier l'effet de nasse, dû à la position de la base au fond du Golfe. Cette base devrait devenir une base opérationnelle et de soutien, mais non un arsenal. Il doit s'agir d'un lieu permettant de relever des équipages et leur permettre de se reposer, ainsi que de réparer les navires. Egalement un lieu d'escales technico-opérationnelles pour reconditionner les navires dans des délais brefs. A cet effet, la chaîne logistique va devoir être particulièrement étudiée afin de réduire les temps de reconditionnement.

Concernant l'avenir de l'hôtel de la marine, le chef d'état-major a rappelé que tous les états-majors français avaient rêvé d'un « Pentagone » de la défense en France et que les marins s'y ralliaient avec enthousiasme et volontarisme. Néanmoins, ils n'étaient pas indifférents aux deux siècles d'histoire qu'ils laisseraient derrière eux dans l'hôtel de la marine, c'est pourquoi la marine souhaitait faire des recommandations à l'Agence France Domaines afin de préserver cette mémoire et ce patrimoine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Berthou

a demandé au chef d'état-major de la marine d'exposer les consignes données aux équipages afin de neutraliser les pirates en mer.

Debut de section - Permalien
amiral Pierre-François Forissier, chef d'état-major de la marine

En réponse, l'amiral Pierre-François Forissier a indiqué que les règles d'engagement étaient variables dans le temps et dans l'espace. A la frontière entre l'action militaire et l'action de police, il faut être très attentif aux respects de ces règles, notamment en ce qui concerne la légitime défense et la proportionnalité de la réponse. On ne tirera pas sur un bateau sur la base d'une simple présomption de piraterie. Quand on tire, ce n'est qu'après avoir donné un coup de semonce et averti de la présence de militaires à bord. La réponse doit être opérée avec un feu de même niveau que celui essuyé. Le tir au but n'est tenté qu'en dernier ressort.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Chevènement

a interrogé l'amiral Forissier sur la protection de l'Ile Longue, en particulier contre les menaces aériennes. Il l'a également questionné sur l'action des forces françaises contre le trafic proliférant et, en particulier, sur l'affaire dite de l'Arctic sea.

Debut de section - Permalien
amiral Forissier

En réponse, l'amiral Forissier a reconnu que le risque zéro n'existait pas. Néanmoins, le site de l'Ile Longue est particulièrement bien protégé et la probabilité de pouvoir arriver au-dessus de l'Ile Longue par voie aérienne sans se faire intercepter est faible. Concernant l'Arctic sea, il a déclaré que le trafic proliférant n'était qu'un trafic parmi d'autres. Toutes les autorités marines redoutent la menace d'un « 11 septembre maritime ». Des initiatives ont été prises depuis plusieurs années pour conjurer cette menace, telles que la mise en place du code ISPS (International Ship and Port Security) destiné à permettre la traçabilité des conteneurs ou la CSI (Container Security Initiative). En France, il existe désormais une scannérisation presque systématique de tous les conteneurs entrant par le port du Havre. Pour les Jeux Olympiques de 2012 il faudra sécuriser le trafic trans-Manche. L'idéal serait d'arriver à assurer une surveillance mondiale du trafic maritime permettant de suivre une cargaison depuis son point de départ jusqu'à son point d'arrivée, à l'instar de ce qui existe en matière aérienne. L'objectif est ambitieux et nécessite un travail technique et juridique intense. Mais cet objectif est réaffirmé dans toutes les réunions internationales. L'utilisation des transpondeurs est beaucoup plus compliquée que dans le cadre aérien puisqu'elle suppose la coopération de tous les navires, ce qui n'est pas le cas actuellement. Il faudrait également un système satellitaire capable de suivre tout le monde, ce qui n'est pas encore non plus le cas.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

Lors d'une seconde séance tenue dans l'après-midi, la commission a procédé à l'audition de M. Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie, sur le projet de loi de finances pour 2010 (mission Aide publique au développement).

Debut de section - PermalienPhoto de Josselin de Rohan

a estimé en introduction que de nombreux éléments faisaient à nouveau de la relation Nord-Sud un sujet central des relations internationales. Il a souligné que de nombreux enjeux de la politique étrangère française étaient désormais liés à son action en faveur du développement :

- ceux de la paix et de la stabilité internationale ;

- ceux de la légitimité de la globalisation elle-même, qui ne saurait réussir sans inclure la majeure partie de la population de la planète ;

- ceux des causes communes de l'humanité tels que les changements climatiques ou la perte de biodiversité ;

- ceux de l'influence culturelle et politique, comme ceux des intérêts commerciaux, ou de stratégie économique française.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

s'est tout d'abord déclaré heureux de présenter cette année un budget en forte augmentation malgré un contexte particulièrement difficile. Il a ajouté qu'il tenait du Président de la République l'engagement de ne pas réduire l'effort d'aide publique au développement de la France confirmé par le Premier ministre lors de la réunion du comité interministériel de la coopération internationale et du développement (CICID), le 5 juin 2009. Il a ensuite rappelé que la France était le quatrième donateur mondial, gardant ainsi le cap ambitieux que le Président de la République avait fixé.

a précisé que, en 2009, le montant de l'aide publique au développement atteignait 8,46 milliards d'euros et que, en 2010, il se situerait entre 8,66 et 9,36 milliards d'euros en fonction des annulations de dettes, plaçant l'aide française au développement dans une fourchette allant de 0,44 à 0,48 % du revenu national brut.

Concernant les grandes orientations du programme 209 consacré à « la solidarité avec les pays en développement », le secrétaire d'Etat a indiqué que le budget prévu à ce titre augmentait et devrait permettre de tenir les engagements pris et de financer les priorités du Gouvernement dans ce domaine.

Il a souligné que, en 2009, un peu plus de deux milliards d'euros d'autorisations d'engagement avaient été inscrits sous ce programme contre 2,35 milliards d'euros en 2010, soit une augmentation de 16 % par rapport à l'exercice précédent. Les crédits de paiement, avec une hausse de 210 millions d'euros, soit une augmentation de 10 %, progresseront de 2,08 milliards d'euros en 2009 pour atteindre 2,29 milliards d'euros en 2010.

a précisé que cette évolution significative résultait du fait qu'une partie majoritaire des crédits du programme 209 transitait par les canaux multilatéraux et, en particulier, européens. La tranche annuelle des versements de la France au Fonds européen de développement (FED) représenterait 872 millions d'euros en 2010, passant de 24,5 % pour le 9ème FED à 19,5 % pour le 10ème FED, actuellement en cours d'exécution. Il a ajouté qu'il plaiderait avec force en 2010 lors des négociations relatives aux perspectives financières européennes 2014/2019 pour que, dans le prochain FED, le pourcentage de l'apport français soit ramené au niveau de la contribution française au budget de l'Union européenne. Il a rappelé que cette participation au FED traduisait un engagement marqué en direction des pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) et notamment de nos partenaires d'Afrique subsaharienne, principaux bénéficiaires de cet instrument financier, et qu'elle accompagnait, en les amplifiant, nos efforts bilatéraux en faveur de cette région.

Le secrétaire d'Etat a estimé que, de la même manière, la participation volontaire de la France au fonds SIDA (300 millions d'euros) répondait à un impératif : lutter le plus efficacement possible contre un fléau universel, et cela en réunissant le plus grand nombre de bailleurs possible. Il a souligné que, parallèlement, le Gouvernement entendait consacrer, en 2010, le tiers des crédits du programme 209, soit 615 millions d'euros d'autorisations de programme, à des opérations conduites directement, en particulier dans la zone de solidarité prioritaire et dans les pays les moins avancés. L'effort additionnel consenti profitera intégralement aux actions de coopération engagées puisque les frais de personnel seront, eux, en légère diminution.

a indiqué que ce budget répondait à une exigence de transparence, précisant que, à partir de 2010, et à la suite du vote de l'amendement proposé par M. Michel Charasse en 2008, le dividende de l'Agence française de développement serait budgétisé et qu'il entrerait dans les recettes de l'Etat. Pour 2010, il représentera 100 millions d'euros destinés, pour l'essentiel, à financer les contrats de désendettement et de développement (C2D) et, de façon complémentaire, à abonder l'enveloppe de dons de l'AFD (Agence française de développement).

a indiqué que le projet de loi de finances pour 2010 prévoyait la mise à disposition, à Paris, de la Maison de la francophonie au bénéfice de l'Organisation internationale de la francophonie (OIF) et que, à cette fin, 52 millions d'euros d'autorisations d'engagement correspondant à dix années de loyer étaient prévus. Cette opération permettra d'accueillir cette organisation à Paris dans des locaux dignes de sa mission. Il a tenu à rappeler le caractère prioritaire de la francophonie dans la politique extérieure de la France qui consacre 130 millions d'euros par an à la francophonie dont la moitié à TV5Monde. La participation de son ministère à cet effort représente une contribution de plus de 63 millions d'euros à l'OIF et aux autres opérateurs de la francophonie.

Puis, le secrétaire d'Etat a confirmé la concentration géographique de l'aide publique au développement, dans le prolongement des financements du FED, en direction de l'Afrique subsaharienne (60 % de l'aide budgétaire totale de l'Etat transitant par l'AFD) et des pays les moins avancés (PMA), conformément aux souhaits du Premier ministre lors de la dernière réunion du CICID, le 5 juin dernier. Il a précisé que cette concentration géographique se combinait à une concentration sectorielle dictée par les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) : santé, éducation et formation professionnelle, agriculture et sécurité alimentaire, développement durable, soutien à la croissance.

Enfin, M. Alain Joyandet a mis en avant la nécessité d'assurer le financement d'initiatives nouvelles pour renforcer la capacité d'action sur le terrain.

Il a cité en exemple le volontariat international, instrument de coopération moderne et souple, qui s'inscrit dans le cadre de la mobilisation citoyenne lancée à l'initiative du Président de la République. Plus de 20 millions d'euros y seront consacrés en 2010, qui correspondent à une augmentation substantielle (+ 13 %) par rapport à l'exercice 2009. Il a rappelé son souhait, exprimé en 2008, de tripler le nombre de jeunes volontaires à échéance de cinq ans.

Il a ajouté que la France devait conserver des moyens de réaction rapide pour assurer sa présence et dispenser son aide là où c'est nécessaire et que, pour ce faire, elle allait financer à hauteur de 20 millions d'euros des projets de développement en Afghanistan et, dans une moindre mesure, au Pakistan. Le secrétaire d'Etat a fait valoir que la nécessité de coopérations pour parvenir, avec d'autres bailleurs, à une masse critique et répondre aux défis globaux ne devait pas se faire au détriment des capacités d'intervention propres de la France.

En conclusion, M. Alain Joyandet, en sa qualité d'ancien sénateur, a déclaré vouloir associer, de façon plus étroite et régulière, les parlementaires aux décisions concernant l'aide publique au développement. Il a rappelé leur avoir fait parvenir, le 30 septembre 2009, le document stratégique de la France vis-à-vis de la Banque mondiale et les a informés du prochain envoi d'un document analogue concernant la stratégie de la France vis-à-vis du FED.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

a souhaité que les rapporteurs des crédits de l'aide au développement soient mieux associés tout au long de l'année à la politique menée dans ce domaine. Il a estimé que si les modifications du périmètre du budget correspondaient à la prise en compte des observations de la Cour des comptes et à un souci de bonne gestion, elles rendaient les comparaisons avec le budget précédent difficiles, et il a regretté que n'ait pas été communiqué un tableau de l'évolution des crédits à périmètre constant. Il a observé que la répartition des crédits entre l'aide multilatérale et bilatérale se faisait au détriment de cette dernière. Evoquant le rapport de Mme Henriette Martinez, députée, il a souligné que la visibilité de la contribution de la France à l'aide multilatérale n'était pas proportionnelle au montant considérable des crédits en jeu et a rappelé que la France était le quatrième contributeur à l'aide au développement et que les crédits alloués à des fonds multilatéraux ou communautaires s'élevaient à plusieurs centaines de millions d'euros. Il s'est interrogé en outre sur l'efficacité de l'aide multilatérale soulignant que les fonds internationaux ne disposaient pas toujours d'opérateurs performants pour mener à bien des projets sur le terrain. Il s'est ensuite inquiété de la diminution du nombre des assistants techniques français dont les effectifs sont passés de 20 000 il y a dix ans à 1 000 aujourd'hui.

Il a souhaité recueillir l'opinion du ministre sur les propositions du rapport de Mme Henriette Martinez qui tendent à :

- réserver 5 % des montants alloués au fonds SIDA à des projets menés par des ONG (organisations non gouvernementales) ou des opérateurs français ;

- renforcer les cofinancements entre l'AFD et la Banque mondiale ;

- affecter une partie des fonds multilatéraux à des opérateurs nationaux.

Evoquant l'objectif d'attribution de 0,7 % du revenu national brut à l'aide au développement, il s'est interrogé sur la capacité de la France, compte tenu de la situation de ses finances publiques, à atteindre cet objectif. Il s'est félicité de l'élaboration par le Gouvernement de documents cadres sur la stratégie de la France à l'égard de la Banque mondiale et du Fonds européen de développement. Il s'est interrogé sur la façon dont le ministre associerait les parlementaires à la rédaction du document concernant l'aide au développement européen. Il a observé que les projets de coopération décentralisée connaissaient un dynamisme important mais qu'il convenait sans doute de mieux coordonner l'action des collectivités territoriales. Il a enfin demandé au ministre de bien vouloir faire un point sur la situation politique à Madagascar.

Debut de section - PermalienPhoto de André Vantomme

a également souhaité une meilleure association des parlementaires à l'élaboration de la politique menée par le secrétariat d'Etat à la coopération et au développement. Evoquant l'évolution du budget, il a indiqué qu'il aurait été préférable de pouvoir disposer de données sur l'évolution des crédits à périmètre constant.

Il a souhaité avoir des précisions sur les initiatives prises au sein du G8 pour modifier les critères définissant l'aide au développement dans le cadre du comité d'aide au développement (CAD). Il s'est félicité de la diminution des frais d'écolage et des crédits destinés à l'accueil des réfugiés susceptibles d'être déclarés au CAD, estimant que ces crédits n'avaient pas le caractère d'aide au développement. Il s'est demandé si les initiatives visant à adopter une approche plus globale de l'aide au développement ne cachaient pas une tentative de masquer les difficultés qu'éprouvaient les pays occidentaux à atteindre les objectifs qu'ils s'étaient fixés, en modifiant ainsi l'indicateur pour y intégrer de nouvelles dépenses.

Il a noté l'évolution positive du budget inscrit dans le projet de loi de finances pour 2010 tout en soulignant que d'autres pays tels que l'Espagne et le Royaume-Uni consentaient des efforts plus importants. Il a estimé que, à ce rythme, la France risquait de ne pas atteindre l'objectif de 0,7 % du revenu national brut en 2012.

Il s'est félicité de l'élaboration de documents cadres définissant la stratégie de la France en matière d'aide au développement et a souhaité être associé à l'élaboration de celui concernant l'aide communautaire. Il a souhaité obtenir des précisions sur les projets concernant l'Afrique subsaharienne qui n'avaient pu être financés par le budget pour 2009. Il s'est interrogé sur la finalité des crédits alloués au programme 310 qui associe la problématique de développement et celle de l'immigration.

Il a souhaité savoir comment évoluaient les crédits destinés aux ONG. Evoquant l'augmentation de la part des prêts au détriment des subventions, il s'est inquiété de la situation des pays d'Afrique subsaharienne qui ne possédaient pas les capacités de remboursement leur permettant d'accéder aux crédits.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

En réponse, M. Alain Joyandet a apporté les précisions suivantes :

- la proportion entre les crédits alloués à l'aide multilatérale et à l'aide bilatérale restera désormais stable et l'aide bilatérale ne servira plus de variable d'ajustement ;

- accroître la visibilité de l'aide française aux fonds multilatéraux et l'efficacité de ces derniers fait partie des objectifs prioritaires du ministère des affaires étrangères ;

- dans certains domaines, comme la lutte contre le Sida, le recours à des instruments multilatéraux s'impose et constitue un gage d'efficacité indéniable. Dans d'autres domaines ou dans certaines régions, l'aide bilatérale française conserve tout son sens et toute son efficacité. Il conviendra à l'avenir de bien veiller à une meilleure articulation entre les deux niveaux et de favoriser, par exemple, les financements multilatéraux au profit d'opérateurs nationaux quand ceux-ci s'avèrent plus performants ;

- la diminution du nombre des assistants techniques est un phénomène ancien qui correspond à l'évolution des demandes adressées à la France par les pays en voie de développement. La diminution des effectifs des assistants techniques du ministère des affaires étrangères et européennes correspond également à leur transfert à l'Agence française de développement ;

- l'effort de la France en faveur du développement s'élève en 2008 à 0,39 % du revenu national brut et devrait s'élever à 0,44 ou 0,48 % en 2010 selon que les annulations de dettes en cours se réalisent ou non. La France peut atteindre l'objectif des 0,7 % du revenu national brut en 2012 si elle maintient son effort et si des modifications sont apportées au critère retenu par le cadre afin d'y intégrer notamment la taxe sur les billets d'avion ainsi que la taxe sur les transactions financières internationales actuellement à l'étude. Cette dernière pourrait voir le jour si un consensus international se dégageait et elle pourrait permettre de dégager 30 à 70 milliards d'euros par an au profit de l'aide au développement ;

- les pays en développement ont des besoins qui dépassent très largement les 0,7 % du revenu national brut des pays de l'OCDE qui ne suffiront pas à eux seuls pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ;

- la coopération décentralisée constitue désormais un élément important de la politique française d'aide au développement. Pour cette raison, le secrétariat d'État cherche à mieux coordonner cette aide au sein d'associations régionales. L'adhésion des collectivités territoriales à ces associations, dans le cadre de contrats d'objectifs, leur permettra de bénéficier de crédits supplémentaires au profit du projet qu'elles soutiennent ;

- la situation à Madagascar est complexe. Le groupe international de contact, auquel le secrétaire d'Etat a participé, a permis de nommer un Premier ministre de transition. Il reste aux parties prenantes à s'entendre sur la formation d'un gouvernement qui pourrait convoquer des élections au printemps 2010. La situation évolue quotidiennement et le ministère des affaires étrangères et européennes suit cette évolution avec attention. Il conviendra de veiller à ce que la communauté internationale laisse le temps aux pouvoirs publics malgaches de trouver une solution satisfaisante avant de prendre des sanctions qui ne manqueraient pas de pénaliser la population. S'agissant de la décharge de Tananarive, la France a alloué plus de 1,5 million d'euros pour son démantèlement avant cinq ans ;

- le budget à périmètre constant se traduit par une augmentation de près de 200 millions d'euros des crédits destinés à l'aide bilatérale. Le volume des prêts accordés par l'AFD a progressé de façon très significative puisqu'il passe de 3,7 milliards d'euros en 2008 à 5,2 milliards en 2009. Parallèlement, les subventions aux projets augmentent dans le projet de loi de finances pour 2010 ;

- il faut considérer les annulations de dettes comme des subventions. Ces annulations ne sont comptabilisées qu'une seule fois aussi bien au niveau de la loi de finances qu'au niveau de l'aide au développement déclarée au CAD. Il arrive cependant que des annulations de dettes soient prévues dans le projet de loi de finances et ne soient pas effectivement accordées au cours de l'exercice budgétaire quand les Etats concernés ne remplissent pas les conditions requises ;

- le secrétariat d'État souhaite augmenter de 50 % le pourcentage de l'aide au développement qui passe par les ONG au cours des quatre prochaines années ;

- l'Afrique subsaharienne recueillera 60 % des subventions et dons dans le projet de loi de finances pour 2010. Sont plus particulièrement concernés quatorze pays figurant sur la liste des pays ultra-prioritaires, liste qui pourrait évoluer avec le temps.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Cambon

a souligné être moins animé par le souci de voir des projets identifiés comme français que par celui de l'efficacité de l'aide bilatérale en contraste avec la lourdeur de certaines procédures internationales.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

a concédé que les institutions multilatérales avaient souvent un mode de fonctionnement lourd, complexe et peu réactif par rapport à l'urgence des besoins des pays en voie de développement. Il a indiqué que l'efficacité de l'aide multilatérale avait fait l'objet de nombreuses réflexions et que des progrès avaient déjà été enregistrés. Il a souhaité une meilleure articulation entre les niveaux nationaux, communautaires et multilatéraux et a appelé de ses voeux la mise en place de codes de conduite permettant de définir, dans certains secteurs ou dans certaines zones géographiques, des chefs de file qui puissent concevoir des projets avec des opérateurs nationaux à partir de fonds multilatéraux.

Debut de section - PermalienPhoto de Joëlle Garriaud-Maylam

Evoquant les nombreuses propositions de réformes figurant dans le rapport de Mme Henriette Martinez, Mme Joëlle Garriaud-Maylam a souhaité savoir si le Gouvernement allait soutenir son amendement tendant à réserver 5 % des crédits français affectés au fonds Sida à des opérateurs et des ONG français. Elle a regretté que la France ne dispose pas d'instruments adaptés pour soutenir des projets de taille modeste et mettre en place des microcrédits. Elle s'est inquiétée de la diminution du nombre d'assistants techniques français soulignant que, dans certains cas, l'absence de personnels qualifiés empêchait les opérateurs français de répondre à des appels d'offres internationaux. Elle s'est déclarée favorable au renforcement de la conditionnalité des annulations de dettes afin de favoriser des investissements publics structurants.

Observant que le tissu associatif français en matière d'aide au développement était beaucoup moins structuré que ne l'étaient les tissus associatifs anglo-saxons, elle s'est interrogée sur l'opportunité de créer un statut particulier pour les ONG.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

a indiqué que l'amendement relatif au fonds Sida sera examiné dans le cadre de la première partie de la loi de finances à l'Assemblée nationale. Il a souligné que la diminution du nombre d'assistants techniques pourrait être partiellement compensée par la mise en place du volontariat international. Il a observé que le conditionnement des annulations de dettes existait déjà.

Il a estimé que les ONG n'étaient sans doute pas favorables à la définition d'un statut et s'est en revanche déclaré favorable à un renforcement du tissu associatif français dans ce secteur et à l'amélioration de la capacité des ONG françaises à gérer les projets ambitieux. Il a fait remarquer que l'allocation de fonds multilatéraux à des ONG posait également la question de l'origine nationale des ONG concernées, les ONG les plus importantes étant dans l'ensemble anglo-saxonnes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean Faure

s'est également interrogé sur la capacité des pouvoirs publics à atteindre l'objectif de 0,7 % du revenu national brut alloué à l'aide au développement. Il a souligné le rôle des collectivités territoriales dans ce domaine avec la montée en puissance de la coopération décentralisée. Il a insisté sur la nécessité de maintenir les engagements de paiements à un niveau permettant la poursuite de projets pluriannuels. Evoquant ses entretiens avec une délégation malgache, dans le cadre du groupe d'amitié France-Madagascar, il a indiqué que la situation politique était loin d'être stabilisée. Il a attiré l'attention du secrétaire d'État sur la situation de seize villages du Laos dévastés par des inondations et pour lesquels les autorités françaises sur place ne semblaient pas disposer de crédits pour contribuer à aider les populations.

Debut de section - Permalien
Alain Joyandet, secrétaire d'Etat à la coopération et à la francophonie

a indiqué que le centre de crise du Quai d'Orsay s'était saisi de cette question. Il s'est associé aux propos du sénateur sur le rôle de la coopération décentralisée, précisant que cette dernière faisait bien l'objet d'une déclaration au titre de l'aide au développement à l'OCDE. Il a estimé qu'une solution à la crise malgache dépendrait du choix d'un consensus, unanime ou majoritaire, pour former un gouvernement de transition.