La délégation a procédé à l'examen du rapport d'activité 2005-2006 portant, notamment, sur les familles monoparentales et les familles recomposées.
a présenté le rapport d'activité de la délégation, le sixième depuis la création de celle-ci, qui comporte deux parties : la première retrace les diverses activités de la délégation au cours de l'année parlementaire 2005-2006, tandis que la seconde rend compte des travaux sur les familles monoparentales et les familles recomposées.
Elle a d'abord rappelé qu'au début de cette année avait été achevé l'examen de deux textes dont la délégation avait été saisie l'année précédente : le projet de loi relatif à l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, et la proposition de loi, d'initiative sénatoriale, renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. A cette occasion, elle a informé la délégation qu'elle avait interrogé Mme Catherine Vautrin, ministre déléguée à la cohésion sociale et à la parité, sur les suites données aux recommandations formulées par la délégation dans son rapport sur la lutte contre les violences au sein des couples, et que la ministre lui avait fourni des réponses très précises et très complètes sur le suivi de chacune de ces recommandations, qui sont reproduites dans le rapport écrit. Elle a formé le voeu que le suivi des recommandations soit systématisé à l'avenir.
a également rappelé que la commission des lois avait saisi la délégation de dix propositions de loi relatives à la parité en politique, dont Mme Catherine Troendle a été nommée rapporteur. Elle a précisé que la délégation entendrait Mme Vautrin sur ce sujet le 27 juin prochain.
Elle a indiqué que le rapport retraçait également l'activité internationale de la délégation, qu'il s'agisse de la participation à des rencontres internationales ou de la réception de délégations ou de personnalités étrangères. Elle a rappelé qu'à son initiative, le Comité de coordination du Forum euroméditerranéen des femmes parlementaires s'était réuni sous sa présidence, au Sénat, le 23 septembre 2005, et qu'elle avait été invitée à la première réunion de la commission ad hoc sur les droits des femmes de l'Assemblée parlementaire euroméditerranéenne (APEM), tenue à Bruxelles le 28 mars 2006, afin de participer à un débat sur une éventuelle intégration du Forum au sein de l'APEM, qui avait été envisagée par le Comité de coordination du Forum au cours de sa réunion à Paris.
Elle a indiqué s'être rendue à Genève, en octobre 2005, puis à Nairobi, en mai dernier, pour participer aux travaux de l'assemblée de l'Union interparlementaire (UIP) et notamment de son Comité de coordination des femmes parlementaires. Elle a rappelé que Mmes Christiane Hummel et Bariza Khiari avaient également effectué un déplacement à Genève, le 20 octobre 2005, pour assister à un séminaire d'information sur l'application de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, dite CEDAW.
S'agissant de l'accueil des personnalités étrangères, elle a évoqué la réception d'une délégation de parlementaires libanais, le 11 octobre 2005, puis, en compagnie de Mmes Paulette Brisepierre et Christiane Kammermann, celle d'une délégation venant de Belgique, le 9 décembre 2005.
Elle a également fait observer qu'à l'occasion de la journée internationale de la femme, le 8 mars 2006, elle avait participé à la réception donnée par M. le Président du Sénat en l'honneur de Mme Ellen Johnson Sirleaf, présidente du Libéria. Elle a aussi rappelé que les trois délégations aux droits des femmes du Sénat, de l'Assemblée nationale et du Conseil économique et social avaient organisé conjointement, le 8 mars dernier, un colloque sur le thème : « Du mythe à la réalité : l'égalité des chances au féminin », tenu au Palais d'Iéna. Elle a ajouté qu'elle avait été auditionnée, le 22 mars 2006, par la délégation aux droits des femmes du Conseil économique et social, à l'invitation de sa présidente, Mme Françoise Vilain, qui avait été précédemment entendue au cours de la réunion du 11 octobre 2005.
a ensuite abordé le thème de réflexion choisi cette année par la délégation, celui des familles monoparentales et des familles recomposées, rappelant que la délégation lui avait consacré 15 réunions et qu'elle avait entendu 37 personnes au total, dont le ministre en charge de la famille, M. Philippe Bas. Elle a évoqué le déplacement sur le terrain, à Dunkerque, le 13 avril 2006, à l'initiative de Mme Sylvie Desmarescaux, qui a donné lieu à la visite de deux établissements accueillant des familles monoparentales en difficulté et à la rencontre de représentants d'associations locales.
a fait observer que ce déplacement de plusieurs membres de la délégation avait été très bien perçu par les différentes personnes rencontrées à Dunkerque.
a indiqué que, le rapport montrait d'abord une augmentation importante, et accélérée au cours des deux dernières décennies, du nombre des familles monoparentales et recomposées, remettant en cause la structure familiale traditionnelle et traduisant la diversification des formes familiales. Elle a fait observer que le modèle familial traditionnel demeurait très prégnant, le couple marié restant le cadre de vie prédominant, tandis que plus des trois quarts des enfants vivent avec leurs deux parents. Elle n'en a pas moins estimé que cette structure familiale traditionnelle était fortement ébranlée, en particulier par la distinction entre la conjugalité et la parentalité, qui constitue un des traits majeurs de l'évolution intervenue au cours des dernières décennies, le modèle dit « PME », père/mère/enfant, ne reflétant plus la complexité de la réalité de la société française actuelle.
Elle a noté que la monoparentalité et la recomposition familiale occupaient en effet une place croissante. Elle a rappelé que la famille monoparentale était définie par l'INSEE comme une famille composée d'un adulte vivant sans conjoint et avec son ou ses enfants de moins de 25 ans, et la famille recomposée comme un couple vivant avec au moins un enfant, dont un seul des conjoints est le parent. Elle a constaté que les seules données disponibles dataient de 1999, date du dernier recensement, et que l'absence de statistiques plus récentes constituait indéniablement une carence, d'autant plus importante que des chiffres actualisés mettraient très probablement en évidence la poursuite de l'augmentation du nombre de familles monoparentales et recomposées compte tenu des évolutions constatées antérieurement, considérant que cette question pourrait d'ailleurs faire l'objet d'une première recommandation.
Elle a noté que le nombre de familles monoparentales s'établissait à 1,5 million en 1999, soit une augmentation de 27,2 % par rapport à 1990, alors qu'il était de 680 000 en 1962 et avait donc plus que doublé en 37 ans.
Elle a fait remarquer que la croissance du nombre de familles monoparentales, qui s'est accélérée depuis le début des années 1980, avait essentiellement concerné les mères de familles monoparentales : après avoir représenté autour de 20 % des foyers monoparentaux dans les années 1960 et 1970, la proportion de pères parents isolés s'est stabilisée autour de 14 % depuis 1982. Elle a expliqué ce phénomène par la diminution constante du veuvage et par l'importance croissante des séparations, et a souligné que, dans 85 % des cas de divorce, la garde des enfants était confiée à la mère, les femmes séparées, surtout quand elles ont des enfants, se remettant de surcroît moins souvent en couple que les hommes. Enfin, elle a indiqué que la proportion d'enfants vivant au sein d'une famille monoparentale avait régulièrement augmenté : 9 % en 1982, 11 % en 1990 et 15 % en 1999, soit environ 2,4 millions d'enfants de moins de 25 ans à cette date.
S'agissant maintenant des familles recomposées, Mme Gisèle Gautier, présidente, a indiqué que la France en comptait 708 000 en 1999, soit 8 % de l'ensemble des familles ayant au moins un enfant de moins de 25 ans, ce qui représente une hausse de 9,6 % par rapport au précédent recensement de 1990. Elle a précisé que 1,58 million d'enfants étaient concernés, en 1999, par la recomposition familiale, soit 8,7 % des enfants, nombre en hausse de 10,8 % par rapport à 1990.
Elle a fait remarquer que les familles recomposées rendaient beaucoup plus complexes les relations entre adultes et enfants, la vie avec un beau-parent, dans le passé, étant généralement le résultat du veuvage et non, comme aujourd'hui, de la séparation conjugale. Elle a également mis en évidence la différence majeure entre hommes et femmes induite par la recomposition familiale, à savoir que les femmes vivent généralement avec leurs enfants, alors que les hommes vivent beaucoup plus fréquemment avec leurs beaux-enfants.
a ensuite indiqué que le rapport dressait, en deuxième lieu, le constat selon lequel les parents isolés sont plus touchés par la précarité que les couples, ce qui constitue un défi pour les politiques de lutte contre la pauvreté. Résumant d'un chiffre les statistiques, elle a fait observer que le taux de pauvreté des familles monoparentales était proche du double de celui de l'ensemble de la population.
Elle a fait part de son inquiétude face à l'aggravation de la paupérisation des familles monoparentales au cours des années récentes. Notant que la séparation provoquait presque toujours un appauvrissement mécanique, d'ailleurs souvent mal anticipé au moment de la rupture, elle a indiqué que les familles monoparentales ne représentaient que 7 % de l'ensemble des ménages, mais 20 % des ménages pauvres, et que cette pauvreté s'expliquait par des facteurs cumulatifs, les accidents de la vie et le chômage, ainsi que la montée du phénomène de « pauvreté au travail ». S'agissant des modes de vie des parents isolés et des conséquences de leur pauvreté, elle a relevé le poids très important des dépenses de logement, soit un tiers des dépenses des familles monoparentales, contre un quart pour les couples avec enfants.
Puis Mme Gisèle Gautier, présidente, a abordé la question des ressources des familles monoparentales, indiquant que, globalement, les revenus de transferts augmentaient de 20 % le niveau de vie des familles monoparentales. Elle a également noté que près du tiers des parents isolés bénéficiaient d'un minimum social et que la redistribution divisait par trois le nombre de parents isolés en dessous du seuil de pauvreté.
Elle a expliqué que l'allocation spécifique aux parents isolés, l'API, instaurée en 1976, avait été conçue comme un filet de sécurité transitoire, mais qu'elle était devenue au fil du temps une « antichambre du RMI », plus de la moitié des parents isolés allocataires percevant le RMI. Elle a fait le constat selon lequel, malgré la fixation de l'API à un montant plus élevé que celui du RMI, il pouvait être paradoxalement plus avantageux pour un parent isolé de bénéficier du RMI, en raison de l'importance des droits connexes attachés à celui-ci. Elle a alors évoqué la possibilité de présenter une recommandation tendant au rééquilibrage entre RMI et API à l'occasion d'un réexamen d'ensemble du système des minima sociaux.
La présidente a fait observer que les parents isolés rencontraient de nombreux obstacles pour accéder à l'emploi. Elle a d'abord constaté que l'impératif de la garde des enfants conduisait trop souvent les mères isolées à renoncer à une activité professionnelle, puis a regretté que le retour à l'emploi puisse par ailleurs sembler financièrement risqué aux parents isolés allocataires pris au piège de leur « statut » et de la complexité du système des minima sociaux. Dans ces conditions, elle a conclu qu'il apparaissait essentiel de renforcer l'attrait d'un retour à l'activité pour les parents isolés et de faciliter la garde de leurs enfants. Elle s'est demandé si la délégation ne pourrait pas recommander aux services sociaux de présenter aux parents isolés allocataires le nouveau dispositif de la toute récente loi du 23 mars 2006 rendant plus attractif le cumul entre salaires et minima sociaux, en s'attachant à leur démontrer et à leur garantir que le retour à l'emploi ne comporte aucun risque de perte ou de discontinuité de revenus.
Elle a également insisté, pour poursuivre le développement de l'offre de garde des enfants, sur la nécessité de réaliser les objectifs du quatrième « Plan crèches » et de mettre effectivement en oeuvre le nouveau dispositif d'accès privilégié aux crèches en faveur des allocataires de minima sociaux reprenant une activité. Enfin, elle a proposé de recommander que les horaires des crèches soient adaptés pour permettre l'accueil des enfants de mères isolées ayant des horaires de travail décalés.
a rappelé que les auditions de la délégation avaient montré l'insuffisance, voire l'absence, du dispositif d'insertion organisé en faveur des allocataires de l'API. Souhaitant que l'API permette de déboucher sur un emploi, et non plus sur le RMI, elle a suggéré de recommander l'inscription dans la loi du principe de l'offre d'un parcours d'insertion individualisé pour les allocataires de l'API.
S'inspirant de la réflexion de Mme Valérie Létard dans le cadre d'un avant-projet de proposition de réforme des minima sociaux, elle a préconisé, en pensant notamment aux parents isolés, de remplacer par une simple condition de ressources les conditions d'attribution des droits dits connexes, aujourd'hui principalement liées au statut d'allocataire du RMI. Elle a également jugé opportun d'aménager une sortie progressive, et non pas brutale, des droits connexes au fur et à mesure de l'augmentation des revenus de la personne. Enfin, pour encourager les parents isolés qui souhaitent tenter une expérience professionnelle, même de courte durée, elle a recommandé de supprimer les délais de carence qui existent aujourd'hui entre la fin d'une période de travail et le retour aux minima sociaux.
Puis Mme Gisèle Gautier, présidente, a indiqué que le rapport était consacré, en troisième lieu, à la question de l'adaptation d'un droit de la famille encore largement fondé sur le modèle familial traditionnel, en dépit d'une évolution dans le sens de l'égalité entre les femmes et les hommes au sein du couple.
Elle a rappelé que les auditions de la délégation avaient fait apparaître que l'exercice conjoint de l'autorité parentale après la séparation suscitait bien souvent des difficultés, d'autant plus sensibles que les relations entre les parents demeurent conflictuelles.
Elle a d'abord fait observer que la résidence alternée apparaissait comme un mode de garde contesté à encadrer plus strictement. Rappelant que la résidence alternée avait été instituée par la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale, elle a noté que ce mode de garde permettait une répartition équitable de la durée de garde de l'enfant entre la mère et le père en cas de séparation des parents, et que, sur le fondement de « l'intérêt de l'enfant », le juge pouvait désormais ordonner une résidence en alternance, à la demande des parents, mais aussi en cas de désaccord entre eux.
A ce sujet, Mme Sylvie Desmarescaux a fait état d'une décision de justice récente, aux termes de laquelle le juge aux affaires familiales avait fixé le lieu de scolarisation d'un enfant soumis à une résidence alternée à équidistance des domiciles des deux parents, éloignés de 20 kilomètres. Elle a considéré qu'une telle décision ne permettrait pas à cet enfant de s'intégrer dans son école dans des conditions satisfaisantes et s'est interrogée, dès lors, sur la prise en compte par le juge de l'intérêt de l'enfant.
a insisté pour qu'une résidence alternée ne soit décidée que si les domiciles des parents sont proches l'un de l'autre.
a regretté qu'il fût d'autant plus difficile de dresser un bilan de l'application de la résidence alternée que la Chancellerie ne disposait pas aujourd'hui de données statistiques actualisées et exhaustives sur sa mise en oeuvre. Elle a toutefois rappelé que les auditions de la délégation avaient mis en évidence les vives critiques soulevées par la garde alternée et a estimé que, pour satisfaisante qu'elle soit dans son principe, celle-ci ne pouvait à l'évidence constituer une solution généralisable à toutes les situations. Elle a notamment estimé que la résidence alternée n'apparaissait pas adaptée aux enfants en bas âge qui ont besoin de stabilité pour se sentir en sécurité et supportent souvent mal la séparation durable d'avec leur mère. Elle a donc proposé d'adopter une recommandation précisant que la résidence alternée ne devrait pas être décidée pour des enfants de moins de six ans, âge de l'obligation scolaire.
et Sylvie Desmarescaux se sont demandé si ce seuil ne devrait pas être fixé plus tôt, au début de la scolarisation.
a estimé que la résidence alternée n'apparaissait pas non plus adaptée à des situations de relations conflictuelles entre les parents, l'enfant ne devant pas devenir un enjeu de ce conflit, et a proposé que la délégation souligne que la résidence alternée ne devrait pas être ordonnée lorsque les relations entre les parents restent à l'évidence très conflictuelles, par exemple à la suite de violences conjugales. Enfin, elle a également recommandé de rappeler que la résidence alternée ne pouvait être mise en oeuvre dans des conditions satisfaisantes pour l'enfant que si les domiciles des deux parents étaient suffisamment proches pour permettre à l'enfant de fréquenter la même école.
Elle a ensuite attiré l'attention sur les problèmes posés par l'exercice du droit de visite et d'hébergement, par le père le plus souvent.
Elle a souligné les grandes difficultés pratiques rencontrées pour faire appliquer les sanctions pénales prévues en cas de non-représentation d'enfant et a proposé de recommander que le dépôt de plaintes pour non-représentation d'enfant ne soit pas découragé et qu'il y soit donné une suite effective. Elle a estimé que la création d'une nouvelle infraction pénale n'était pas nécessaire, mais que les sanctions déjà prévues devaient être appliquées et que le juge aux affaires familiales devait tirer les conséquences d'une éventuelle condamnation pénale lorsqu'il statue sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
Elle a également fait remarquer que certains pères s'abstenaient d'exercer leur droit de visite et d'hébergement et refusaient, parfois à l'improviste, d'accueillir leurs enfants à la date prévue. Tout en estimant que des sanctions pénales ne seraient pas adaptées au problème posé par la non-prise en charge de leurs enfants par ces pères, elle a proposé de recommander que le juge aux affaires familiales sanctionne ce type de comportement en décidant l'augmentation du montant de la pension alimentaire due par le parent défaillant, ou même dans certains cas, en appliquant les dispositions permettant, dans l'intérêt de l'enfant, de confier l'exercice de l'autorité parentale à un seul des deux parents.
Sur le problème particulier de l'exercice du droit de visite et d'hébergement après une séparation consécutive à des violences conjugales, elle s'est prononcée en faveur d'un renforcement des moyens accordés aux associations organisant des rencontres entre parents et enfants dans des lieux neutres, afin de développer ces espaces de rencontres permettant aux pères d'exercer leur droit de visite sans accéder au domicile de la mère.
a jugé non satisfaisante la situation actuelle concernant les pensions alimentaires. Elle a indiqué que le montant des pensions était souvent très modique, de l'ordre de 150 à 170 euros par mois, et qu'en l'absence de mode de calcul précis, les pratiques de fixation de ce montant variaient considérablement d'un juge à l'autre et selon les départements, ce qui laisse souvent un sentiment d'inéquité, voire d'arbitraire. Elle a donc proposé de recommander l'élaboration de barèmes indicatifs de calcul des pensions alimentaires fondés sur des critères objectifs.
a estimé que les décisions des juges en matière de pensions alimentaires pouvaient difficilement être qualifiées d'arbitraires, d'autant que la loi elle-même autorise une certaine souplesse dans la fixation de leur montant. Elle a également évoqué la possibilité de demander au juge de réactualiser le montant de la pension au-delà de l'indexation automatique, en recourant à l'aide juridictionnelle si nécessaire.
Sur la base d'exemples concrets, Mme Gisèle Gautier, présidente, a estimé que certaines décisions de justice conduisaient cependant à s'interroger sur l'application effective des critères de fixation des pensions alimentaires.
a indiqué qu'il convenait de distinguer le montant de la pension, d'une part, et les modalités de son actualisation, d'autre part, qui sont deux choses différentes.
a rappelé que le montant des pensions alimentaires devait être actualisé régulièrement, et a proposé qu'au-delà de la clause d'indexation généralement prévue par le juge, le montant de la pension soit régulièrement réexaminé en fonction de l'évolution des besoins de l'enfant, qui entraînent des frais plus importants au fur et à mesure que celui-ci grandit.
s'est interrogée sur la façon dont l'évolution des besoins de l'enfant pourrait être évaluée.
a fait observer que cette évaluation pourrait sans doute être liée au coût de la scolarité de l'enfant, qui est mesurable.
a insisté sur la nécessité d'actualiser le montant de la pension alimentaire en fonction de l'évolution du salaire du père.
a proposé que la délégation recommande également une amélioration des conditions du recouvrement des pensions alimentaires, qui est souvent difficile à obtenir malgré l'existence de procédures dérogatoires au droit commun.
Elle a également fait observer que la médiation familiale n'était aujourd'hui appliquée que de façon très marginale et a souhaité que les moyens qui y sont consacrés soient accrus pour permettre son application effective lorsque le juge aux affaires familiales l'estime utile à un apaisement des relations entre les parents.
Puis elle a noté que la multiplication des familles recomposées posait également le problème particulièrement délicat de la prise en compte de la place du beau-parent dans le droit de la famille, rappelant qu'au regard du code civil le beau-parent, n'ayant aucun lien de filiation avec l'enfant, était considéré comme un tiers qui n'a ni droits ni devoirs à l'égard de cet enfant, même s'il s'en occupait quotidiennement et apportait une contribution financière et matérielle à son entretien. Elle s'est déclarée hostile à l'institution d'un « statut » rigide et uniforme du beau-parent, pour au moins deux raisons : d'une part, elle risquerait de s'opérer au détriment du parent biologique non gardien de l'enfant ; d'autre part, les familles recomposées sont elles-mêmes sujettes à séparation et à recomposition, un enfant pouvant donc avoir plusieurs beaux-parents successifs.
a donc proposé d'envisager plutôt de faciliter le recours aux divers dispositifs prévus par le code civil permettant déjà de conférer des droits au beau-parent et, éventuellement, d'en assouplir les modalités. Elle a rappelé que le code civil prévoyait déjà des possibilités de délégation ou de partage de l'autorité parentale au profit du beau-parent, sous réserve de l'accord du ou des parents titulaires de l'autorité parentale et de l'appréciation par le juge aux affaires familiales des « besoins d'éducation de l'enfant ». Elle a malgré tout regretté que l'application de ce dispositif reste aujourd'hui très limitée, alors qu'il apparaît comme une bonne solution juridique pour permettre au beau-parent d'être investi de réels attributs de l'autorité parentale à l'égard de l'enfant. Elle a donc proposé que la délégation recommande la diffusion d'une meilleure information afin d'encourager et de faciliter son utilisation.
Elle a également expliqué que, pour faciliter le partage de l'exercice de l'autorité parentale pour ce qui concerne la vie quotidienne de l'enfant, il pourrait en outre être envisagé d'instituer un dispositif plus souple prenant la forme d'un mandat donné au beau-parent par le parent gardien. Elle a alors proposé qu'une réflexion soit engagée afin de permettre au parent de déléguer au beau-parent l'exercice de son autorité parentale pour ce qui concerne les actes usuels de la surveillance et de l'éducation de l'enfant, par un acte souscrit soit devant les services de l'état-civil, soit devant un notaire, ainsi que l'avait proposé Mme Françoise Dekeuwer-Défossez, professeur de droit, devant la délégation.
a ensuite fait observer que, dans certaines situations, lorsque les liens affectifs et matériels avec le bel-enfant sont forts, l'adoption simple pouvait en outre permettre à un beau-parent d'acquérir un lien de filiation à l'égard de l'enfant de son conjoint ou de son compagnon, sous réserve de l'appréciation par le juge de la conformité de l'adoption à « l'intérêt de l'enfant », tout en notant que, dans un couple qui n'est pas uni par les liens du mariage, le parent qui consent à l'adoption de son enfant par son compagnon perd l'autorité parentale dont se trouve seul investi le beau-parent. Elle a conclu que ce régime juridique constituait indiscutablement un frein à l'adoption par le beau-parent dans un couple non marié, rappelant que certaines personnes auditionnées par la délégation avaient proposé d'assouplir les conditions de l'adoption simple en permettant un exercice conjoint de l'autorité parentale par le parent biologique et le parent adoptant dans un couple non marié. Elle a toutefois estimé qu'il serait paradoxal de faciliter l'institution d'un lien de filiation entre le beau-parent et le bel-enfant alors qu'il n'existe pas de lien de droit entre le beau-parent et le parent. Du point de vue de l'intérêt de l'enfant, elle a donc considéré qu'il ne serait pas opportun de modifier les règles fondamentales de la filiation et le régime actuel de l'adoption, et n'a pas proposé de recommandation sur ce point.
Abordant enfin le problème de la conservation par le beau-parent de liens avec l'enfant après le décès du parent gardien si l'autre parent biologique est décédé, elle a rappelé que, dans le droit actuel, le parent survivant pouvait désigner par testament le beau-parent comme tuteur de son enfant, mais qu'à défaut, la tutelle de l'enfant était systématiquement confiée à l'ascendant du degré le plus proche, c'est-à-dire en général à un grand-parent. Afin de permettre à l'enfant, après le décès du dernier parent, de pouvoir demeurer avec le beau-parent qui s'occupait de lui quotidiennement, elle a proposé, en l'absence de testament, de permettre au juge de désigner le beau-parent comme tuteur si celui-ci le demande.
Un débat s'est ensuite instauré sur les propositions de recommandations présentées par la présidente.
a annoncé que les membres de la délégation représentant le groupe socialiste s'abstiendraient sur le vote de l'ensemble du rapport.
a rappelé que le cumul entre minima sociaux et revenus d'activité était prévu par la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux. Elle s'est ensuite interrogée sur la portée pratique d'une recommandation tendant à ce que ce dispositif soit présenté aux parents isolés allocataires en s'attachant à leur démontrer que le retour à l'emploi ne comporte aucun risque de perte ou de discontinuité de revenus. Elle a également précisé que non seulement les services sociaux, mais aussi les associations, devraient être amenés à informer les allocataires des incitations favorables à leur retour à l'emploi.
a estimé que, sur le terrain, la mise en place de structures de garde d'enfants à horaires atypiques impliquerait un énorme travail et un engagement intense des collectivités territoriales concernées.
a ajouté que le coût de fonctionnement de telles crèches serait extrêmement élevé, surtout s'il s'agissait de ne garder qu'un ou deux enfants. Se déclarant extrêmement favorable à une telle mesure sur le principe, elle s'est néanmoins interrogée sur l'opportunité de formuler des recommandations dont le financement serait aléatoire et qui pourraient susciter des demandes de réalisation immédiate de la part des citoyens.
a suggéré de nuancer la recommandation de la délégation en proposant d'introduire de la souplesse dans l'organisation des crèches.
a préconisé d'étendre cette recommandation à l'ensemble des modes de garde, Mme Brigitte Bout évoquant, à ce titre, le cas des assistantes maternelles.
Soulignant la nécessité d'accompagner les parents isolés sans emploi dans leur parcours d'insertion, Mme Brigitte Bout s'est interrogée sur la mise en oeuvre concrète d'un dispositif efficace pour les allocataires de l'allocation de parent isolé (API), qui ne relèvent pas du même régime d'insertion que les Rmistes.
a estimé souhaitable que les parents isolés fassent preuve d'une certaine volonté d'accès à l'emploi et soient soutenus dans cette démarche. Elle a suggéré de les considérer comme prioritaires pour bénéficier de formations professionnelles adaptées.
a déploré, à cet égard, l'amenuisement des contacts entre les élus et les travailleurs sociaux. Elle s'est demandé si les structures d'insertion mises en place pour les allocataires du RMI ne pourraient pas être mobilisées pour favoriser le retour à l'emploi des allocataires à l'API, tout en faisant observer que l'intitulé de l'API faisait référence à la notion d'isolement, et non pas à celle d'insertion.
a manifesté le souhait de limiter le nombre de recommandations émises par la délégation, en s'attachant à mieux les cibler sur des actions prioritaires. Elle a souligné que si les mères isolées pouvaient bénéficier d'une formation professionnelle adaptée et si les inégalités de salaire entre les sexes étaient moindres, les femmes pourraient plus aisément surmonter leurs difficultés en travaillant, plutôt que d'être contraintes à recourir aux minima sociaux. Elle a annoncé qu'elle s'abstiendrait lors du vote sur l'ensemble du rapport.
A propos du prononcé de la résidence alternée lorsque les relations entre les parents sont très conflictuelles, ou en cas de violence conjugale, Mme Sylvie Desmarescaux a estimé qu'il appartenait avant tout au juge d'évaluer le degré de conflictualité du couple. Elle a ensuite évoqué des cas précis où l'enfant peut exprimer le souhait de maintenir des relations avec son père, même si celui-ci a commis des faits de violence conjugale.
a cependant jugé préférable que la garde des très jeunes enfants soit confiée à la mère.
S'agissant de la définition éventuelle de sanctions applicables aux parents qui refusent de prendre en charge leurs enfants, notamment en fin de semaine, Mme Sylvie Desmarescaux et Mme Catherine Troendle ont estimé souhaitable de ne pas modifier les attributions du juge aux affaires familiales prévues par le droit en vigueur.
Par ailleurs, tout en se déclarant favorable au développement d'espaces de rencontre permettant notamment aux pères d'exercer leur droit de visite dans des lieux neutres sans accéder au domicile de la mère, Mme Gisèle Gautier, présidente, a signalé le coût élevé de la généralisation d'une telle mesure.
En ce qui concerne l'actualisation et le réexamen périodique du montant des pensions alimentaires au fur et à mesure de l'évolution des besoins de l'enfant, Mme Sylvie Desmarescaux a souligné la possibilité, déjà offerte par le droit en vigueur, de saisir le juge pour demander un tel réexamen.
s'est associée à ce propos, en précisant qu'une saisine spécifique du juge était possible pour faire face à des dépenses exceptionnelles nécessaires pour l'enfant et en rappelant que l'accès à l'aide juridictionnelle minimisait le coût de la procédure en cas d'insuffisance des ressources du demandeur.
Se déclarant favorable à la recherche d'un mécanisme permettant à un parent de donner mandat au beau-parent pour l'exercice des actes usuels de l'autorité parentale, Mme Sylvie Desmarescaux a cependant fait part de ses réserves sur l'idée d'impliquer les services de l'état civil dans la formalisation de ce mandat.
Au sujet de la proposition de recommandation tendant à permettre à l'enfant, après le décès du dernier parent, de demeurer avec le beau-parent qui lui apporte des soins quotidiens, Mme Catherine Troendle s'est demandé si aucun obstacle juridique ne s'opposait à ce que la loi permette d'interpréter la volonté du dernier parent dans ce sens, en l'absence de testament. Elle a ensuite évoqué la réforme en cours des tutelles et la possibilité d'intégrer, par voie d'amendement, une telle recommandation dans le dispositif du projet de loi.
a précisé que la désignation du tuteur serait laissée à l'appréciation du juge et qu'il s'agissait seulement de lui ouvrir la possibilité de désigner le beau-parent qui en ferait la demande.
Puis à l'issue d'un débat au cours duquel sont intervenues Mmes Christiane Kammermann, Brigitte Bout, Sylvie Desmarescaux, Catherine Troendle, Gisèle Printz, Hélène Luc, Yolande Boyer et Gisèle Gautier, présidente, la délégation a adopté l'ensemble du rapport d'activité et les 14 recommandations suivantes, les représentantes du groupe socialiste et du groupe communiste, républicain et citoyen s'étant abstenues :
1. Constatant que les données disponibles les plus récentes datent du dernier recensement de 1999, la délégation recommande l'actualisation rapide des statistiques relatives aux familles monoparentales et recomposées afin de pouvoir disposer d'informations plus fiables sur l'évolution des nouvelles formes de structures familiales.
Elle recommande également l'élaboration ou l'actualisation par le ministère de la justice de données statistiques précises permettant le suivi de l'application du droit de la famille.
2. La délégation a constaté que malgré la fixation de l'allocation de parent isolé (API) à un montant plus élevé que celui du revenu minimum d'insertion (RMI), il peut être paradoxalement plus avantageux, pour un parent isolé, de bénéficier du RMI, en raison de l'importance des droits connexes attachés à celui-ci. La délégation recommande donc un rééquilibrage entre RMI et API, à l'occasion d'un réexamen d'ensemble du système des minima sociaux.
3. La délégation se félicite que la loi du 23 mars 2006 relative au retour à l'emploi et sur les droits et les devoirs des bénéficiaires de minima sociaux rende plus attractif le cumul entre salaires et minima sociaux, tels que l'API ou le RMI, et recommande aux services sociaux et aux associations de présenter ce nouveau dispositif aux parents isolés allocataires en s'attachant à leur démontrer que le retour à l'emploi ne comporte aucun risque de perte ou de discontinuité de revenus.
4. Pour contribuer à faciliter l'accès à l'emploi des parents isolés, la délégation souhaite que les objectifs du quatrième « Plan crèches » soient réalisés et que soit effectivement mis en oeuvre le nouveau dispositif d'accès privilégié aux crèches et aux services d'accueil des jeunes enfants prévu par la loi du 23 mars 2006 en faveur des allocataires de minima sociaux reprenant une activité.
5. La délégation propose d'introduire de la souplesse dans l'organisation des modes de garde, pour permettre notamment l'accueil des enfants de mères isolées ayant des horaires de travail décalés.
6. La délégation recommande d'inscrire dans la loi le principe de l'offre d'un parcours d'insertion individualisé pour les allocataires de l'API, en les faisant bénéficier, le cas échéant, d'une formation professionnelle.
7. Pour favoriser le retour à l'emploi des parents isolés allocataires de minima sociaux, la délégation estime opportun d'aménager une sortie progressive des droits connexes au fur et à mesure de l'augmentation des revenus de la personne.
8. La délégation considère que la résidence alternée doit faire l'objet d'une évaluation actualisée et qu'elle doit être mieux encadrée car, si elle peut être une solution satisfaisante pour favoriser l'exercice de la coparentalité lorsque les parents ont gardé de bonnes relations, elle apparaît manifestement inadaptée dans certaines situations :
- la résidence alternée ne peut être mise en oeuvre dans des conditions satisfaisantes pour l'enfant que si les domiciles des deux parents sont suffisamment proches pour permettre à l'enfant de fréquenter la même école ;
- la résidence alternée ne convient pas aux enfants en dessous d'un certain âge, qui pourrait par exemple être fixé à six ans, âge de l'obligation scolaire.
9. La délégation souhaite que le dépôt de plaintes pour non-représentation d'enfant ne soit pas découragé et qu'il y soit donné une suite effective. Elle considère que les sanctions déjà prévues par le code pénal doivent être appliquées et que le juge aux affaires familiales doit tirer les conséquences d'une éventuelle condamnation pénale lorsqu'il statue sur les modalités d'exercice de l'autorité parentale.
10. La délégation recommande l'élaboration de barèmes indicatifs de calcul des pensions alimentaires fondés sur des critères objectifs, ce qui permettrait non seulement de faciliter et d'harmoniser la fixation du montant des pensions alimentaires, mais également de mieux prévoir les incidences financières de la séparation.
11. La délégation propose d'accroître les moyens qui sont consacrés à la médiation familiale pour permettre son application effective lorsque le juge aux affaires familiales l'estime utile à un apaisement des relations entre les parents.
12. Le recours à la délégation avec partage de l'autorité parentale décidée par le juge apparaît comme une bonne solution juridique pour permettre au « beau-parent » d'être investi de réels attributs de l'autorité parentale à l'égard de l'enfant si cela s'avère nécessaire à son intérêt. La délégation recommande donc la diffusion d'une meilleure information sur ce dispositif déjà prévu par le code civil afin d'encourager et de faciliter son utilisation.
13. La délégation propose qu'une réflexion soit engagée afin de permettre au parent de donner mandat au beau-parent pour exercer son autorité parentale en ce qui concerne les actes usuels de la surveillance et de l'éducation de l'enfant.
14. Pour permettre à l'enfant, après le décès du dernier parent, de pouvoir demeurer avec le beau-parent qui s'occupait de lui quotidiennement, la délégation propose, en l'absence de testament, de permettre au juge de désigner le beau-parent comme tuteur si celui-ci le demande.