Au cours d'une première réunion tenue dans la matinée, la commission procède enfin à l'examen du rapport pour avis de M. André Reichardt sur le projet de loi de finances pour 2015 (programme « Développement des entreprises et du tourisme »).
Je souhaite d'abord rendre hommage à notre collègue Antoine Lefèvre, qui a été le premier titulaire de cet avis budgétaire en 2011, puisque notre commission n'examinait pas ce programme auparavant. Il a particulièrement approfondi la question de l'exercice des missions de protection des consommateurs par les services déconcentrés et les motifs du faible succès du régime de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée.
Le programme n° 134 « Développement des entreprises » recouvre une partie des crédits de la direction générale des entreprises, ainsi que l'intégralité des crédits de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et de l'Autorité de la concurrence. Il recouvre aussi une partie des crédits de la direction générale du Trésor, ainsi que les crédits de deux autorités de régulation sectorielles.
Dans ce programme, cinq actions intéressent plus particulièrement notre commission au titre de ses compétences en droit des affaires et droit de la consommation, ainsi que deux opérateurs associés à la mission, l'Institut national de la propriété industrielle et l'Agence pour la création d'entreprises.
Quelques mots d'abord sur l'évolution du programme et de ses crédits. Ce programme est l'un des trois programmes pérennes de la mission « Économie ».
Dans le projet de loi de finances pour 2015, les crédits diminuent de 10 % environ, tant en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement, par rapport à la loi de finances initiale pour 2014, avec respectivement 867 et 874 millions d'euros. Cette diminution s'impute pour moitié sur les crédits de fonctionnement, pour moitié sur les crédits d'intervention, tandis que les dépenses de personnel ne devraient diminuer que de moins de 3 millions, sur un total de plus de 410 millions. Ces évolutions résultent à la fois de changements significatifs de périmètre et de réductions de certaines dépenses de fonctionnement et d'intervention, ce qui rend difficile l'appréciation de l'évolution des crédits.
Je relève deux changements de périmètre importants : le transfert vers le ministère des affaires étrangères d'une subvention de 30 millions d'euros à Atout France, en raison de la nouvelle compétence de ce ministère en matière de tourisme, qui s'intègre dans la diplomatie économique chère au ministre, ainsi que le transfert du fonds de soutien aux collectivités ayant souscrit des emprunts toxiques, ce qui correspondait à une préconisation de notre collègue Antoine Lefèvre, car ceci n'avait rien à voir avec le développement des entreprises.
Il faut noter en particulier une réduction de 20 millions d'euros des crédits d'intervention sur les dispositifs d'aide aux entreprises en matière de commerce, ainsi qu'une diminution de 500 000 euros des crédits de l'Autorité de la concurrence, sur un total un peu supérieur à 20 millions. S'agissant des crédits de la DGCCRF, ils devraient connaître une progression de 2 % environ, pour atteindre un peu plus de 240 millions d'euros, constitués pour la grande majorité de dépenses de personnel. C'est une deuxième année de répit bienvenue pour une administration jusque-là fortement mise à contribution par l'effort budgétaire.
Pour conclure sur cette analyse des crédits, l'Assemblée nationale a majoré les crédits du programme de 8 millions d'euros, pour abonder le FISAC - on en a parlé en séance -, et en seconde délibération, le programme a connu un coup de rabot de 7,7 millions d'euros, comme beaucoup d'autres, pour « garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l'État ».
J'en viens à présent à mes observations sur l'activité et les perspectives des différentes administrations et organismes qui contribuent à la mise en oeuvre du programme.
La direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services a été réorganisée en octobre 2014, à périmètre constant, en direction générale des entreprises. C'est la principale direction d'administration centrale tournée vers les entreprises, qui pilote une partie des DIRECCTE au niveau régional. La contraction continue de ses crédits la conduit aujourd'hui à faire des choix structurels sur ses missions, par exemple la réforme du FISAC pour passer d'une logique de guichet à une logique d'appel à projet ou encore la réduction du soutien au fonctionnement des pôles de compétitivité, invitant les régions à les soutenir davantage.
La DGE contribue aussi à la politique de simplification de la vie des entreprises. Je veux citer un exemple précis : le portail internet « guichet entreprises ». Tout créateur peut réaliser en ligne l'ensemble des formalités de création de son entreprise, ainsi que les procédures supplémentaires spécifiques qui concernent 17 professions sur 105. L'ensemble de ces formalités supplémentaires doivent être prises en charge dans les prochains mois, de sorte que le guichet n'est pas aujourd'hui complètement fonctionnel. Seulement 7 600 entreprises ont été créées par ce moyen en 2013, après 11 500 en 2012.
Lors des dernières années, l'activité de la DGCCRF a été profondément affectée par deux facteurs : une forte mise à contribution budgétaire, avec une diminution de 10 % des effectifs en sept ans - on est un peu en dessous de 3000 emplois aujourd'hui - et une réorganisation drastique des services déconcentrés qui a coupé l'administration centrale de ses agents dans ses anciens services départementaux, rattachés au préfet dans le cadre des directions départementales interministérielles, les DDPP et DDCSPP. Ce sujet reste très sensible pour les agents, c'est un traumatisme qui n'est pas encore digéré. Le résultat, c'est une baisse continue des statistiques d'activité, qui se poursuit en 2014 malgré la stabilisation des effectifs. On m'a dit, ce qui est un peu étonnant, que les agents souffraient d'un défaut d'encadrement qui pénalisait leur activité. Cette diminution, de notoriété publique, n'est pas satisfaisante.
Dans ce contexte, il a y eu une nécessité de réagir au scandale de la viande de cheval, qui a été une fraude économique et non un problème sanitaire. On pourrait dire que, grâce à ce scandale, la DGCCRF a pu interrompre la baisse de ses effectifs : 15 postes créés en 2014 sur cette priorité et un effectif stable prévu pour 2015. La situation reste fragile, d'autant que la DGCCRF doit aussi contrôler les nouvelles dispositions issues de la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation.
Le président de l'Autorité de la concurrence m'a fait part de sa grande préoccupation quant à l'érosion régulière de ses crédits et de ses effectifs, alors que les missions de l'Autorité s'accroissent et génèrent des ressources importantes pour le budget de l'État, avec 350 millions d'euros d'amende en moyenne par an, à rapporter à son budget de 20 millions.
Il faut aussi savoir que l'extension de ses prérogatives outre-mer en 2012 s'est faite sans effectifs supplémentaires. Victime de son succès, l'Autorité est de plus en plus souvent sollicitée par le Gouvernement pour son expertise, comme sur les concessions autoroutières.
Les nouvelles missions annoncées pour l'Autorité dans le cadre du projet de loi relatif à la croissance vont accentuer cette fragilité budgétaire, alors qu'elles sont assez éloignées de son coeur de métier. Songeons qu'on pourrait lui confier le contrôle de l'installation et l'indemnisation des notaires... Il y a un vrai risque d'effet de ciseau ne lui permettant plus d'accomplir correctement des missions croissantes avec des moyens décroissants, au détriment de sa mission première de contrôle de la concurrence.
L'Institut national de la propriété industrielle est un établissement public de 750 personnes, qui vit de ses ressources propres que sont les redevances payées au titre de l'enregistrement des brevets, des marques, des dessins et modèles. La protection de l'innovation est un élément essentiel de la compétitivité des entreprises.
L'INPI devra bientôt gérer deux innovations récentes : l'enregistrement d'indications géographiques non alimentaires, pour protéger les savoir-faire industriels et artisanaux locaux, car les entreprises artisanales méritent d'être protégées, et le droit d'opposition sur les demandes de protection de marques dans le domaine des indications géographiques agricoles. Cela concerne les collectivités territoriales, lorsqu'une entreprise veut s'emparer de leur nom.
La dématérialisation de l'ensemble des procédures auprès de l'INPI doit être achevée en mars 2015, ce qui devrait permettre de réorienter une partie des emplois vers des missions d'amélioration du service aux entreprises, notamment plus de visites d'entreprise, comme le prévoit le contrat d'objectif avec l'État.
L'Agence pour la création d'entreprises a pour mission de promouvoir l'esprit d'entreprise et de diffuser de l'information sur la création d'entreprise, par l'intermédiaire notamment d'un site internet, qui atteint 10 millions de visiteurs cumulés par an. L'APCE a perdu en 2014 son statut d'opérateur de l'État, en raison de la décision prise de supprimer progressivement la subvention qui lui est attribuée, à la suite d'un rapport de la Cour des comptes en 2013 qui était assez vitriolesque... Une réorganisation a donc été engagée, avec un nouveau président et un plan de départ de près du quart des salariés.
La question de la pérennité de la structure s'est posée. À présent, il faut diversifier les ressources et rechercher d'autres partenaires : là encore, nous retrouvons les régions ! Le président de l'APCE n'a pas pu venir en audition car il faisait le tour des régions... L'État reste néanmoins au conseil d'administration, et les autres partenaires - réseaux consulaires, Caisse des dépôts, ordre des experts-comptables et conseil national des barreaux - souhaitent la pérennité de cette structure. Je trouve que beaucoup de personnes s'occupent de la création d'entreprises, l'APCE n'en est qu'une parmi d'autres, mais son expertise semble reconnue. Il faut toutefois qu'elle trouve un nouveau modèle économique.
Sous réserve de ces observations, qui appellent de notre part une certaine vigilance sur les points dont je vous ai parlé, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Développement des entreprises ». Je rappelle que la commission des finances a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Économie », au sein de laquelle se trouve ce programme.
La qualité de votre rapport montre que le manque de temps ne vous a pas empêché de procéder à un examen approfondi, rien ne vous a échappé. Nous suivons l'avis de notre rapporteur.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Développement des entreprises et du tourisme ».
Puis la commission procède à l'examen du rapport pour avis de M. Pierre-Yves Collombat sur le projet de loi de finances pour 2015 (mission « Administration générale et territoriale de l'État »).
La mission « Administration générale et territoriale de l'État » comprend trois programmes d'inégale importance.
- le programme 232, « Vie politique, cultuelle et associative » pour lequel je me limiterai à préciser que ses crédits sont affectés aux actions de « financement des partis » (58,3 M€) en baisse de 10% par rapport au précédent budget ; de financement des élections (236,4M€), en hausse compte tenu des échéances de mars et de décembre 2015 ; de financement de la vie associative et des cultes (quelque 2 millions d'euros). Au total 302,3 millions d'euros.
- le programme 216 « Conduite et pilotage des politiques de l'intérieur », dont les crédits représentent 719 millions d'euros, et sont affectés aux fonctions support du ministère de l'intérieur (ressources humaines et moyens informatiques, affaires immobilières notamment) et à la gestion des affaires juridiques et contentieuses.
- le programme 307, « Administration territoriale », 1,718 millions d'euros en autorisation d'engagement et 1,717 millions d'euros en crédits de paiement sur lequel je m'arrêterai plus longuement.
Ces chiffres représentent une baisse de 0,5 % en autorisations d'engagement et de 0,4 % en crédits de paiements par rapport à 2014 soit 3,8 millions d'euros de moins en crédits de fonctionnement et une perte de 180 ETP.
Si l'on passe de la considération brute de chiffres à leur mise en perspective, force est de constater que depuis 2008, changements de majorité ou pas, l'administration territoriale de l'État vit sous le signe de la réforme permanente. Sous des noms différents, « RéATE » pour le gouvernement précédent, « MAP» pour le gouvernement actuel, l'objectif est le même : réorganiser, mutualiser, réduire les effectifs. Pour ce qui les concerne, en 8 ans, les services préfectoraux ont perdu 10 % de leurs effectifs, passant de 30 228 EPTP en 2007 à 27 143 prévus pour 2015.
Les objectifs de cette politique sont doublement ambigus selon moi :
- première ambigüité : optimiser l'affectation des crédits disponibles, améliorer l'efficacité du service public, souci de tout gestionnaire qui se respecte et, en même temps donner la priorité à la réduction des dépenses publiques, ce qui renvoie à un choix politique particulier : bien dépenser versus moins dépenser ;
- deuxième ambigüité : améliorer l'efficacité de l'État gestionnaire de services à la population et assurer la présence, de l'État républicain, des symboles et marques d'une République « une et indivisible » sur l'ensemble du territoire : « manager » versus gouverner. Ce qui pose la question d'une éventuelle redistribution des sous-préfets sur l'ensemble du territoire et de ses conséquences en termes politiques, la question aussi de l'éventuel remplacement du corps des préfets par un cadre d'emploi fonctionnel, ce que souhaite la cour des comptes.
Je vous renvoie au rapport pour plus de détails à moins que vos questions ne m'amènent à développer l'un ou l'autre sujet.
Ces objectifs contradictoires, la rhétorique officielle les présente un peu vite comme toujours conciliables, pourvu qu'on stimule le sens du service public et l'imagination des fonctionnaires, ce que les faits ne vérifient pas. Ainsi, malgré l'évidente bonne volonté des personnels, malgré leur capacité à s'adapter et à innover, le principe selon lequel réduire les crédits c'est mieux les employer, moins de fonctionnaires c'est plus d'efficacité du service public, atteint aujourd'hui ses limites. D'où la suspicion que ne peut pas ne pas susciter chaque réforme nouvelle. Ainsi en va-t-il de la récente création des « maisons de l'État ». Mesure de réorganisation de la localisation des services et regroupement des moyens, de bon sens, comme on a pu le constater lors d'un déplacement à Castellane, elle nourrit aussi la crainte de préparer discrètement la disparition des sous-préfets en secteur rural, remplacés par des chefs de bureau moins coûteux.
Force est aussi de constater que l'amélioration de la gestion des services au public dont le Gouvernement peut, à juste titre se prévaloir, par exemple la réduction de la durée d'obtention de titres, est parfois obtenue au prix de la mobilisation des moyens sur cet objectif au détriment d'autres. Les indicateurs de performance les ignorent, tel le conseil aux élus, ou sont formulés en termes tels qu'ils ne permettent aucun contrôle réel. Que signifie un taux de contrôle des actes dits prioritaires des collectivités en l'absence d'une définition stricte de la frontière entre ces actes prioritaires et les autres.
De réforme en réforme, réalisée ou annoncée, comme celle de la carte des sous-préfectures, de réduction des effectifs en redéploiements, les agents des services déconcentrés, qui se sont adaptés comme ils ont pu, touchent le seuil de saturation. Leur constat est celui de l'inadéquation grandissante entre les moyens alloués à l'administration territoriale au regard de ses missions, nombreuses et diverses puisqu'elles vont de l'appui aux collectivités locales et du conseil aux élus, au contrôle de légalité, en passant par la délivrance des titres ou la coordination des services déconcentrés de l'État sur un territoire. D'une manière générale, ceux qui gèrent au quotidien l'administration déconcentrée souhaiteraient avoir une vision claire de l'avenir, pouvoir s'appuyer sur le cadre pérenne leur permettant de gérer leurs moyens et leurs missions au moins sur le moyen terme.
Or cette instabilité a vocation à perdurer voire à s'amplifier, avec le lancement dès 2015 d'une nouvelle réforme de l'État, prévoyant notamment le transfert de nouvelles missions vers les administrations déconcentrées.
Côté élus cette fois, on peine aussi à voir le lien entre la réorganisation territoriale version « Mapam » puis « NOTRe » et les réformes successives de l'administration déconcentrée alors qu'une bonne articulation entre les deux est essentielle à la réussite de chacune, plus essentielle, en tous cas, que la taille des collectivités. L'impression qui domine est celle de réformes parallèles conduites selon leurs logiques propres, quand ce ne sont pas des logiques changeantes comme on a pu le constater s'agissant de la réforme territoriale. Que les parallèles soient appelées à se rejoindre à l'infini n'est pas spécialement rassurant.
Si je n'étais pas rapporteur je donnerai un avis négatif sur les propositions budgétaires relatives au programme 307. Etant rapporteur et pour une fois prudent, je m'en remets à la sagesse de notre commission.
Je voudrais remercier Pierre-Yves Collombat pour son rapport, comme toujours extrêmement lucide, qui ne sombre jamais dans l'exhaustivité mais qui fait preuve de la rigueur intellectuelle que nous lui connaissons. Certains prétendent que l'administration de l'État doit disparaître au profit des collectivités territoriales, mais je ne suis pas de cet avis.
Nous avons besoin d'un État substantiel, pas d'un État fédéral. La décentralisation doit être prolongée par un État ayant toute sa force. Des réformes sont certes nécessaires, visant par exemple à regrouper des services trop petits, mais pour la gestion des missions de l'État, on ne doit pas se contenter d'un État minimaliste. Parmi les missions fondamentales de l'État, je pense en particulier à la solidarité : l'addition de mesures prises par chaque collectivité territoriale ne permet pas forcément de réaliser le bien commun ni d'assurer une juste répartition des ressources sur le territoire.
J'estime que l'administration territoriale a atteint un seuil de danger. L'État n'est plus du tout présent dans les départements. Parler de contrôle de légalité « prioritaire » revient en fait à renoncer à ce contrôle. La fonction de conseil n'existe plus car il faut des gens qualifiés et des compétences pour conseiller les collectivités territoriales. Au contraire, on assiste à des absurdités.
Je remarque que l'administration déconcentrée de l'État n'est forte que de 30 000 personnes ; c'est en administration centrale qu'il faudrait effectuer des ajustements. L'État s'en trouverait plus fort. En outre, on gagnerait du temps : on règlementerait moins.
Sans le dire, on veut supprimer les sous-préfets : c'est le but poursuivi, lorsqu'on remplace les sous-préfets par des attachés principaux. Les préfets sont, quant à eux, placés sous l'autorité hiérarchique de certains directeurs régionaux. Avec de grandes régions, cette tendance s'aggravera encore. Comme l'a dit Pierre-Yves Collombat, beaucoup de réformes sont menées de front, totalement injustes parfois, car politiciennes ; ainsi, certaines sous-préfectures, déjà en sous-effectifs, ont encore perdu des fonctionnaires, alors que des préfectures ont vu leurs effectifs augmenter sans justification. Nos brillants énarques finiront par ne plus choisir le corps préfectoral.
Je serai bref. Le débat actuel est difficile car on ne connaît pas les objectifs du Gouvernement. On a le sentiment qu'il refuse d'endosser l'idée qu'il diminue les moyens, alors même qu'il y a des difficultés sur le terrain. En conséquence, il rabote les dépenses dans les endroits les moins sensibles : ce n'est pas du tout une manière de réformer. C'est ce qui me dérange. Dans le passé, nous avions un système aveugle visant à supprimer un poste sur deux. Aujourd'hui, le système est en outre opaque.
Je partage ce qu'ont dit mes collègues. Je souhaiterais revenir sur l'expérimentation menée dans les deux départements d'Alsace et dans la Moselle visant à réorganiser le réseau de sous-préfectures. Les sous-préfets ont été remplacés par des fonctionnaires de catégorie A, voire B, dans l'incapacité d'être les interlocuteurs des acteurs des territoires, en particulier des maires, qui ont pourtant besoin de conseil. En conséquence, on assiste à une explosion du contentieux. J'ajoute que beaucoup de recours sont le fait de requérants systématiques ou d'opposants politiques qui utilisent des voies procédurales plutôt que politiques.
Dans l'exercice de missions relatives à l'ordre public, à la gestion des catastrophes ou au passage des gens du voyage, les collectivités ont besoin d'un représentant de l'État régalien, pas uniquement d'un officier de gendarmerie. On ne peut donc avaliser l'évolution actuelle. Autant il est possible de s'appuyer sur des agences techniques départementales et même sur des agences privées pour la réalisation de prestations techniques, autant l'État est irremplaçable dans l'exercice de ses missions régaliennes.
Aujourd'hui, on assiste à un renforcement des services techniques départementaux qui supplantent l'État régalien, alors que c'est ce dernier qui représente l'intérêt général et la coordination interministérielle. Il faut enrayer cette évolution !
Dans la suite de la table ronde d'hier avec des personnalités allemandes, je voudrais souligner qu'un système ne peut évoluer que selon sa logique. La France n'est pas un État fédéral mais une République, une et indivisible. C'est dans cette logique-là qu'il faut se situer, et non pas importer des méthodes alternatives. Comme l'a dit Jean-Pierre Sueur, il faut la présence de l'État sur les territoires, en tant qu'État.
Il faut également dire qu'une réforme doit être digérée avant d'en lancer une autre. Lors de notre déplacement, on a constaté par exemple que le personnel des sous-préfectures a le souci de bien accomplir ses missions. Cela gêne les agents de dire que cela ne va pas ; il faut vraiment insister pour qu'ils l'admettent. Ils ont l'impression de voir le métier se dévaluer avec l'irruption de tâches répétitives au détriment de leur fonction de conseil aux collectivités qui est une mission motivante. On retrouve cela à l'échelle des sous-préfets et des préfets. Transformer les préfets en directeurs généraux des services de l'État, tout en oubliant qu'ils représentent l'État, c'est confondre gouverner et « manager ».
Il existe un syndrome dans l'administration préfectorale : les préfets deviennent les porte-paroles de leurs services techniques, lesquels n'ayant plus le temps d'interpréter les règles et de consacrer l'expertise nécessaire à l'étude des projets développés par les initiatives locales, s'y opposent alors.
La commission émet un avis défavorable à l'adoption des crédits de la mission « Administration générale et territoriale de l'État ».
La commission procède ensuite à l'examen du rapport pour avis de M. François-Noël Buffet sur le projet de loi de finances pour 2015 (mission « Immigration, asile et intégration », crédits « Immigration »).
Je souhaiterais principalement évoquer deux points à l'occasion de l'examen du budget « Immigration » hors « Asile » : la gestion des centres de rétention administrative et la politique d'accueil et d'intégration des étrangers en situation régulière. Je ne traiterai pas des crédits de l'asile : en effet, ma collègue Esther Benbassa les a présentés hier.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, les crédits examinés se montent à 146,2 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 156,4 en crédits de paiement (CP). On constate une baisse de 2,5 millions d'euros en AE et de 3,9 millions d'euros en CP.
Comme en 2014, ce sont les mêmes principes qui ont guidé l'élaboration du budget pour l'année 2015 : une légère augmentation des crédits de l'asile compensée par une diminution des crédits dédiés à l'immigration et à l'intégration des étrangers primo-arrivants.
Toutefois, pour 2015, les crédits dédiés à l'immigration irrégulière feront l'objet d'une stabilisation alors qu'ils ont diminués de 10 % en 2014 par rapport à 2013, ce qui est une bonne chose.
La gestion des centres de rétention administrative (CRA) doit être encore rationalisée. Décidée en 2011, la reconstruction du CRA de Mayotte a notamment pris beaucoup de retard : l'échéance est désormais fixée au 4 juin 2015. Le CRA de Coquelles va faire l'objet d'une extension : nous en verrons les résultats l'an prochain.
La sous-occupation des CRA se maintient : le taux d'occupation était de 48 % en 2013, il est de 54,7 % au premier semestre 2014. Cela reste relativement faible.
Les salles d'audience délocalisées n'ont permis que des économies modestes : pour les 23 CRA et les 16 zones d'attente, il n'existe que 6 salles d'audience dont 3 sont en réalité utilisées : Coquelles, Marseille et Le Mesnil-Amelot.
Le deuxième point que je souhaite aborder a trait à l'accueil et à l'insertion des étrangers en situation régulière.
Tout d'abord, un état des lieux de l'immigration régulière : les tendances constatées depuis plusieurs années sont confirmées : le Maghreb et la Chine sont encore les principaux pays sources avec une montée en puissance plus récente de la Corée du Sud, du Sri Lanka et du Mali. Le Sénégal est le premier pays africain source, en huitième position, derrière le Brésil. L'immigration en provenance des États-Unis diminue fortement confirmant une tendance de 2011. L'immigration économique est significative en provenance des États-Unis, du Maroc, de Tunisie et d'Inde. L'immigration familiale demeure prédominante en provenance des trois pays du Maghreb. Les étudiants étrangers les plus nombreux sont originaires de Chine et du Maroc. On assiste enfin à une forte augmentation de l'immigration des Comoriens.
Globalement, le nombre de titres de séjour délivrés a augmenté de 13 %.
Le prochain projet de loi relatif au droit des étrangers déposé à l'Assemblée nationale prend en compte le caractère perfectible de la délivrance de titres de séjour puisque l'article 11 du texte institue un titre de séjour pluriannuel de quatre ans, l'étranger devant suivre « avec assiduité et sérieux » les objectifs du contrat d'accueil et d'intégration pour en bénéficier. Ce sera un point important du prochain texte.
Pour les demandes de naturalisation, les plateformes interdépartementales vont être expérimentées dans trois régions pour l'année 2014 : en Lorraine, en Franche-Comté et en Picardie.
Je souhaiterais revenir sur les conditions d'accueil et d'intégration, pour souligner le faible niveau d'exigence de langue en France. Je rappelle qu'il y a six niveaux de langue dans le cadre européen commun de référence pour les langues (CECR), élaboré dans le cadre du Conseil de l'Europe : A1 équivaut à un niveau de découverte, A2 permet une communication simple, B1 correspond à une communication plus élaborée, permettant notamment d'exprimer ses idées, B2 correspond au niveau d'un utilisateur indépendant ou avancé, C1 à celui d'un utilisateur autonome et C2 à un niveau de langue parfaitement maitrisé. Or le niveau actuellement exigé est A1.1, un seuil qui n'est même pas défini mais qui est inférieur au niveau A1, déjà très faible.
À propos de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), le Gouvernement veut lui donner des missions supplémentaires. À ce titre, je rappelle que le dispositif d'aide au retour a fait l'objet d'une forte baisse en 2014.
En outre, l'OFII assumera d'importantes missions en matière d'asile qui vont augmenter ses charges de personnels et ses dépenses. Or, ses crédits sont réduits pour l'année 2015, ce qui pose une question sur sa capacité à remplir ses missions. Sous ces réserves, je vous propose un avis favorable.
J'aurai une remarque concernant l'externalisation du recueil des données biométriques pour l'élaboration des visas. Je ne comprends pas pourquoi il appartient à l'État de financer les équipements mis à disposition des prestataires extérieurs. La plupart de nos partenaires européens ont fait le choix de faire payer ces équipements aux prestataires. J'attire votre attention sur le coût que cela représente - 5 millions d'euros, ce n'est pas négligeable -, mais aussi, et surtout, sur les conséquences que cela entraîne en termes d'attractivité de la France. Il résulte en effet de ce choix que nous limitons le déploiement de la délivrance des visas dans certains pays, ce qui a pour effet un déficit d'attractivité de notre pays.
S'agissant des centres de rétention administrative, je m'interroge sur l'indicateur relatif à leur taux d'occupation, qui est assez faible. Il me semble que ce qui importe, ce n'est pas tant ce taux d'occupation, mais le fait que les personnes qui y sont placées sont effectivement éloignables et que l'on n'y place pas de manière abusive des personnes dont la situation est peu claire.
Enfin, les documents budgétaires ne font pas apparaître le nombre de reconduites à la frontière de ressortissants communautaires, ce qui est dommage car cela est cher pour un résultat mitigé.
Pour répondre sur l'équipement de recueil des données biométriques, je suppose qu'il faut y voir la volonté de l'État de maîtriser le dispositif, qu'il s'agit d'une question de sécurité. Mais on peut interroger le Gouvernement plus avant sur ce point.
Quant au taux d'occupation des centres de rétention, qui est faible, vous l'avez rappelé, il me semble intéressant dans la mesure où il peut nous aider à envisager les redimensionnements nécessaires. Ainsi, à Nîmes, on a pu constater une sous-occupation, ce qui a conduit à une réduction de 50 % des capacités d'accueil du centre. Il ne faut pas rechercher de trop grandes, ou au contraire de trop petites structures. Il faut avoir une approche pragmatique et chercher à adapter la taille des centres aux véritables besoins.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « immigration, asile et intégration », hors crédits « asile ».
La commission procède ensuite à l'examen du rapport pour avis de M. Jean-Patrick Courtois sur le projet de loi de finances pour 2015 (mission « Sécurités »).
Je voudrais tout d'abord saluer le travail important effectué par mon prédécesseur, notre collègue Éliane Assassi, qui rapportait auparavant les crédits de la mission « Sécurités », hors sécurité civile. Je voudrais également rendre hommage aux forces de l'ordre dont certains des agents ont fait le sacrifice de leur vie pour assurer les missions qui leur étaient dévolues.
Le présent rapport pour avis est consacré à trois des quatre programmes que compte la mission « Sécurités » : les programmes 176 « Police nationale », 152 « Gendarmerie nationale » et 207 « Sécurité et éducation routières ». Le programme 161 « Sécurité civile » fait l'objet d'un rapport spécifique de notre collègue Catherine Troendlé.
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015, les crédits examinés se montent à 17,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et crédits de paiement sur un total de 18,2 milliards d'euros pour la mission, soit une stabilisation des crédits en euros courants par rapport aux crédits ouverts en loi de finances pour l'année 2014.
Je souhaiterais évoquer tout d'abord les difficultés liées aux moyens de fonctionnement des deux forces de police et de la gendarmerie nationales en ce qui concerne surtout le parc immobilier et le parc de véhicules.
Je présenterai ensuite les récentes opérations de mutualisation de moyens opérées entre les services de la police et de la gendarmerie, dans la continuité de ce qui a déjà été fait depuis le rattachement de la gendarmerie au ministère de l'intérieur. Je me suis également rendu à l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication, chargé notamment de lutter contre les infractions commises sur Internet. Le rôle de l'office est vraisemblablement appelé à monter en puissance dans les prochaines années, au regard de l'émergence de nouvelles menaces sur Internet, notamment terroristes.
Enfin, ce rapport est l'occasion de faire un bilan des zones de sécurité prioritaires (ZSP) et de présenter un bilan de la lutte contre les organisations criminelles en 2013.
Les difficultés liées aux moyens de fonctionnement de la gendarmerie et de la police nationales se concentrent sur deux sujets : le parc immobilier et le parc de véhicules.
Dans les deux forces, le parc immobilier est conséquent et soumis à un vieillissement accéléré du fait d'investissements et de crédits pour la maintenance insuffisants. Toutefois, pour la gendarmerie nationale, j'observe qu'un plan triennal de réhabilitation et d'investissement a été lancé à compter de cette année pour un montant total de 210 millions d'euros, soit environ 70 millions d'euros par an. Il convient de souligner que c'est un effort important.
Pour le parc automobile, les deux forces sont contraintes d'acheter environ 2000 véhicules par an pour le renouveler. Or, c'est moins le montant des crédits tout juste suffisants qui pose difficulté que les mesures de régulation budgétaire : en effet, gelés très tôt dans l'année, les crédits ne sont à nouveau disponibles qu'en fin d'année, ce qui déresponsabilise les acteurs et nuit à une bonne gestion : les achats doivent être lancés en urgence, ne laissant aucune marge de manoeuvre ou de négociation aux gestionnaires. Ainsi, il n'y a que quelques semaines que les appels d'offre ont pu être lancés pour l'achat de véhicules.
Face à ces contraintes sur les moyens de fonctionnement, il est nécessaire de réfléchir à d'autres sources de financement. En matière immobilière, le dispositif de l'article L. 1311-4-1 du code général des collectivités territoriales qui permettait aux collectivités territoriales de passer des conventions avec l'État, en échange d'une subvention et d'une compensation des dépenses éligibles au fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée pour construire des casernes de gendarmerie ou des commissariats n'est plus autorisé depuis le 31 décembre 2013. Toutefois, j'observe que ce même article a fait l'objet d'une modification à l'Assemblée nationale : l'article 59 septies prolonge en effet l'application de ce dispositif jusqu'en 2017, ce dont je me félicite. J'espère que cette disposition sera votée par le Sénat.
Pour les moyens de fonctionnement en général, j'observe que l'idée d'attribuer aux services une fraction du produit des avoirs criminels saisis a été évoquée par le ministre de l'intérieur, lors de son audition par la commission la semaine passée. Cela me semble être une bonne idée, qui s'inscrit dans la suite logique de la loi d'orientation de programmation pour la sécurité intérieure 2 qui avait permis aux forces de l'ordre d'utiliser les véhicules saisis.
Je souhaiterais maintenant évoquer la question des mutualisations entre les forces, plusieurs projets d'envergure ayant débuté en 2014.
En effet, ont été créés des secrétariats généraux pour l'administration du ministère de l'intérieur, dont la fonction est de mutualiser toutes les fonctions « support » de la police, de la gendarmerie, de la sécurité civile et, dans une certaine mesure, des préfectures, au niveau de la zone de défense. Il y aura donc sept secrétariats, après la création en 2016 d'un secrétariat général pour l'Ile de France.
Cette structure aura aussi une fonction prospective, suggérant les domaines pouvant être mutualisés.
Dans le même ordre d'idée, un service unique en charge des achats, de l'équipement et de la logistique est opérationnel depuis le 1er janvier 2014 afin de mutualiser les achats des trois directions générales de la gendarmerie nationale, de la police nationale et de la sécurité civile et de la gestion des crises. Ce service sera en lien étroit avec le secrétariat général pour l'administration du ministère de l'intérieur de chaque zone.
Je souhaiterais enfin revenir plus longuement sur l'Office central de lutte contre la criminalité liée aux technologies de l'information et de la communication que j'ai pu visiter dans le cadre de cet avis.
C'est un service interministériel, créé en 2000, composé de policiers et de gendarmes, placé depuis l'arrêté du 29 avril 2014 au sein de la sous-direction de la lutte contre la cybercriminalité créée à cette occasion, dont la mission est de prendre en compte les nouvelles formes de délinquances commises sur Internet. Cette sous-direction dépend de la direction centrale de la police judiciaire.
C'est un service opérationnel qui a pour objet de lutter directement contre la cybercriminalité, mais il peut procéder à tout acte d'enquête nécessaire comme par exemple accéder à des données chiffrées ou cachées sur un support informatique saisi. Enfin, l'office est le point d'entrée unique de la France vers les structures internationales sur les questions de cybercriminalité : Europol ou Interpol, par exemple.
Parmi ses missions, l'office administre et gère la plate-forme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (PHAROS) que j'ai pu voir fonctionner. PHAROS a reçu près de 120 000 signalements en 2013, dont 60 % relèvent d'escroqueries, 12 % d'atteintes aux mineurs et 10 % de discriminations ou racisme.
J'ajouterai que l'office est appelé à monter en puissance : les attaques informatiques ont augmenté de près de 91 % en 2013 par rapport à 2014. Les PME sont notamment les premières cibles des pirates, car leurs systèmes de défenses sont faibles ; les PME constituent ensuite un vecteur pour pirater des sociétés plus importantes.
En dernier lieu, le rapport présente un bilan du fonctionnement des zones de sécurité prioritaires ; celui-ci est satisfaisant, je vous renvoie aux chiffres détaillés du rapport. Je souhaiterais simplement dire que le principe d'une action sur un type particulier de délinquance, une sorte d'action « coup de poing » mais dans la durée, articulée avec les dispositifs locaux de prévention de la délinquance est particulièrement efficace.
Enfin, lors de son audition, le chef du Service d'information de renseignement et d'analyse stratégique sur la criminalité organisé a présenté les trois grandes tendances relatives à la délinquance organisée en France : la délinquance organisée traditionnelle, constituée de délinquants endurcis se livrant aux attaques de banques, de fourgons blindés, au trafic international de stupéfiants, à l'extorsion de fonds, opérant dans les grandes villes diminue. On observe une très forte montée en puissance de la délinquance au sein des cités sensibles structurée autour du trafic de stupéfiants, et l'implantation progressive d'organisations criminelles principalement originaires de l'Europe de l'Est, spécialisées dans la délinquance d'appropriation.
En conclusion, le budget pour la mission « Sécurités » pour 2015, stabilisé en euros courants, redonne quelques marges de manoeuvre pour financer les moyens de fonctionnement des forces et pour améliorer l'état du parc immobilier des deux forces, notamment le parc immobilier de la gendarmerie, même s'il apparaît encore insuffisant pour permettre un fonctionnement optimal des forces de l'ordre. Je souhaite souligner ici que cette situation pèse sur le moral des forces.
J'ai beaucoup hésité sur l'avis à donner sur le budget de la mission « Sécurité » hors sécurité civile pour 2015. Tout en étant favorable au vote de ces crédits, je crains les mesures de gel des crédits, qui auront un effet direct sur les dépenses de fonctionnement. Ce risque m'incitait à proposer un rejet des crédits de la mission.
J'aimerais connaître les effectifs de la Police et de la Gendarmerie nationales.
Pour revenir sur la conclusion de notre rapporteur, je rappelle que nous avons récemment débattu de textes et que nous avions trouvé un consensus sur le fait qu'on ne peut condamner quelqu'un pour des fautes virtuelles, seulement susceptibles d'être commises. Par analogie, dès lors que le budget appelle pour le rapporteur une appréciation favorable, il ne serait pas raisonnable de ne pas le voter, au motif qu'il serait susceptible de faire ultérieurement l'objet d'une exécution perfectible ! Il nous appartiendrait alors de nous y opposer mais on ne peut pas, à ce stade, en préjuger. En revanche, nous pouvons faire peser sur le Gouvernement une pression salutaire en séance.
Les fonctions régaliennes de l'État commencent à être affectées par les difficultés que traversent les finances publiques.
Il faut préserver un certain nombre de budgets : la sécurité, la justice. Notre commission suit la problématique des missions régaliennes de l'État et nous nous devons d'insister sur ces missions budgétaires : personne d'autre ne le fera.
C'est un budget sanctuarisé, mais rien n'est acquis. Pour notre part nous nous abstiendrons. C'est un appel à la vigilance pour que ce budget soit également sanctuarisé dans les années à venir, car au regard de la situation financière de notre pays, il existe des craintes sur son évolution.
Pour répondre à M. Pierre-Yves Collombat, les effectifs de la Police nationale sont de 145 197 ETP, en hausse de 243 ETP en 2015, ceux de la Gendarmerie nationale de 97 215 ETP, en hausse de 162 ETP pour 2015.
Je suis globalement satisfait du budget pour l'année 2015, mais l'expérience de l'année écoulée, avec un lancement d'appel d'offre pour l'achat de véhicules pour l'année 2014 au dernier moment, et donc sans aucune marge de négociation, pose la question de la gestion des crédits.
Je suis prêt à me rallier à la sagesse positive et à voter favorablement mais en attirant l'attention du ministre sur les dangers qu'il y aurait à reproduire l'année prochaine ce scénario.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « sécurités » hors sécurité civile.
Présidence de M. Jean-Pierre Sueur -
La commission procède ensuite à l'examen du rapport pour avis de Mme Catherine Troendlé sur le projet de loi de finances pour 2015 (programme « Sécurité civile »).
En 2013, huit sapeurs-pompiers sont morts, trois au moins, cette année, ont péri. Je voudrais saluer l'engagement des sapeurs-pompiers au service de la communauté et rendre hommage à leur courage et à leur civisme, et vous associer à cette démarche.
Le contexte budgétaire est contraint. Le présent budget s'inscrit dans le cadre tracé en 2014 et poursuit la réalisation des grands chantiers lancée par l'État.
Les moyens qui sont mis en oeuvre par l'État dépassent le montant des crédits inscrits dans le programme qui ne financent que les seules actions du ministère de l'intérieur, à l'exclusion de celles des autres administrations de l'État et surtout de l'intervention des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS).
Les dépenses supportées par les collectivités locales au titre de la sécurité civile (4,86 milliards €) représentent, je le dis chaque année, cinq fois l'effort de l'État dans ce secteur. Le budget global des SDIS - tout de même 4,86 milliards d'euros - augmente, en 2013, de 1,2 % en valeur brute, mais diminue légèrement de 0,8 % compte tenu de l'inflation.
Les dépenses de personnels constituent 80 % des dépenses de fonctionnement. Pour leur part, les dépenses d'investissement se répartissent principalement entre l'achat de matériel d'incendie (31 %), la construction de centres de secours (18 %), les autres dépenses d'équipement (32 %) et les dépenses financières (19 %). Le coût de ces dépenses s'élève à 81 euros par habitant.
Les dépenses d'investissement des SDIS chutent d'année en année : d'un montant global de 1 103 millions d'euros en 2006, elles étaient de 928 millions d'euros en 2010, 899 millions d'euros en 2011, 851 millions d'euros en 2012. Elles augmentent légèrement. Cette donnée semble participer davantage d'une stabilisation des dépenses que d'un nouveau cycle d'investissement.
S'agissant du fonds d'aide à l'investissement (FAI), l'an dernier, aucune autorisation d'engagement n'a été inscrite à ce titre pour subventionner des opérations nouvelles. L'enveloppe de 2,85 millions d'euros de crédits de paiement, inscrite en loi de finances initiale, était destinée au financement des investissements qui avaient bénéficié d'une subvention du FAI au cours des exercices précédents mais n'avaient pas encore été achevés. D'après les éléments transmis à votre rapporteur par la Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC), le montant final sera moindre compte tenu des annulations de crédits intervenues ; 2,24 millions d'euros leur avaient déjà été délégués à l'automne. Pour 2015, la dotation s'élève à 3,8 millions d'euros en crédits de paiement.
Les crédits finançant les actions de la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) sont inscrits au sein du programme Sécurité civile de la mission Sécurités. Elle distingue deux sortes de dépenses :
- les dépenses rigides (subvention à la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, contribution aux retraites des sapeurs-pompiers professionnels et le socle de maintenance des aéronefs) ;
- les dépenses liées à l'activité opérationnelle.
Le programme est subdivisé en quatre actions : prévention et gestion de crises ; préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux (y compris la réserve nationale) ; soutien aux acteurs de la sécurité civile (aides de l'État, INTP/Antarès, participation aux pensions, prestations rattachées et indemnités aux sapeurs-pompiers volontaires) ; fonctionnement, soutien et logistique (ce sont les dépenses d'état-major afférentes au siège de la DGSCGC situé à Asnières-sur-Seine).
Les crédits correspondants s'élèvent à 401,028 millions d'euros en AE (-1,86 % par rapport à 2014 et à 439,55 millions d'euros en CP), une enveloppe en légère augmentation (+ 0,60 %). En 2014, la forte croissance des AE était destinée à provisionner le lancement du nouveau marché de maintenance des avions de la sécurité civile.
Dans le droit fil des précédents exercices, quatre axes principaux sont fixés pour 2015 :
- développement des synergies entre les moyens nationaux pour une plus grande qualité de leurs interventions ;
- développement des partenariats avec les acteurs de la sécurité nationale dans une logique de mutualisation et de prestations de service (médicalisation des interventions héliportées, aérotransport en hélicoptère ou en avion des forces de sécurité...) ;
- montée en puissance de l'unité mobile de démantèlement des munitions identifiées ;
- développement de l'efficacité des moyens de soutien et de gestion par leur regroupement.
Parallèlement, la rationalisation des dépenses d'équipement passe par le rapprochement des flottes d'hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie nationale et la création, au 1er janvier 2014, du service de l'achat, des équipements et de la logistique de la sécurité intérieure, commun à la direction générale de la police nationale, à la direction générale de la gendarmerie nationale et à la DGSCGC.
Le coeur de métier des sapeurs-pompiers, le secours à personne, a connu, en 2013, un recul significatif : 281 900 interventions pour incendies, soit - 8 % par rapport à 2012. En revanche, le secours à victime et l'aide à personne constituent aujourd'hui près des quatre cinquièmes de leur activité en constante progression (+ 2 %).
Le nombre des interventions médicalisées par le service de santé et de secours médical des SDIS s'élève à 192 700, soit + 7 % pour l'année 2013, ce qui représente 6 % des interventions en matière de secours à personne et d'accidents de la circulation.
L'ensemble du référentiel commun SAMU/SDIS a fait l'objet d'une évaluation par les inspections générales de l'administration et des affaires sociales. Sur la base de leurs propositions, le comité de suivi et d'évaluation du référentiel commun a engagé une réflexion qui s'appuie notamment sur la clarification des missions et la coopération des acteurs, la complémentarité des moyens humains et matériels, tant terrestres que héliportés. Les travaux menés entre sapeurs-pompiers et SAMU devraient déboucher au début de l'année 2015. L'usage des hélicoptères « blancs » et « rouges » relève, lui, d'un autre groupe de travail, créé entre la DGSCGC et la direction de l'hospitalisation et de l'offre de soin (ministère de la santé). Lors de sa première réunion au mois de septembre dernier, le groupe a retenu plusieurs mesures dont le gel de toute nouvelle implantation sans concertation entre les deux ministères de l'intérieur et de la santé, l'établissement d'une doctrine d'emploi commune sur le secours primaire et le transport interhospitalier et la fixation d'indicateurs communs. Ce faisant, le groupe de travail a intégré les enseignements d'une expérience positive conduite dans la région Rhône-Alpes.
Parmi Les grands chantiers, je voudrais évoquer les retards apportés au calendrier de la mise en service du système d'alerte et d'information des populations (SAIP). Le budget du SAIP a été initialement estimé à 78 millions d'euros répartis entre deux volets : le déploiement, d'une part, du système (logiciel, sirènes, serveur de diffusion, assistance à maîtrise d'ouvrage) et, d'autre part, du vecteur de la téléphonie mobile, d'un montant estimatif de 32 millions d'euros. Ce chantier est, à ce jour, financé par une enveloppe de 44,7 millions d'euros en AE programmée par la loi du 17 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité, qui prévoyait l'achèvement du déploiement des sirènes de l'État fin 2015, mais on va plutôt vers 2019.
Ces crédits sont destinés à réaliser une première vague de déploiement : 2 830 sirènes des sites les plus exposés, dont 1 293 sirènes d'État à raccorder, 987 nouvelles et 550 sirènes communales. L'installation des sirènes sur les sites pilotes identifiés dans les deux départements du Rhône et des Bouches-du-Rhône a débuté en août 2013. Au 1er janvier 2014, 243 sirènes étaient en place. Cependant, l'achèvement du projet - sur la base des crédits inscrits pour le triennat 2015-2017 - est fixé à 2019.
Je souhaite également souligner la nécessité d'optimiser le fonctionnement d'ANTARES.
À la fin de l'année 2013, les trois quarts des SDIS étaient raccordés au réseau de radiocommunications numériques ANTARES ; 84 % devraient l'être fin 2014. Le taux d'admission est estimé à 89 % pour 2015.
L'État a achevé la mise en place de l'infrastructure en 2010. Ce service est aujourd'hui disponible dans toute la métropole. 95 % du territoire national est couvert. Aucun département n'est totalement exclu de la couverture ; en revanche, dans certaines zones en raison de leurs caractéristiques géographiques, la couverture est insatisfaisante, voire inexistante : il reste des zones blanches. La DGSCGC cible son extension à 97 % du territoire par l'effet de travaux complémentaires en cours de réalisation. L'État s'attache prioritairement à achever le développement du service et à améliorer son fonctionnement à la suite d'interruptions du service constatées lors de la survenance d'incidents climatiques. À compter de 2013, une enveloppe de 24,85 millions d'euros est programmée pour effectuer des travaux d'optimisation du réseau. En 2015 et 2016, l'État prévoit des travaux d'achèvement de la couverture sur l'ensemble du territoire national pour un montant respectif de 8,43 millions d'euros et 8,81 millions d'euros.
Le coût de fonctionnement d'ANTARES est partiellement mis à la charge des SDIS à hauteur de 12 millions d'euros par an, ce qui n'est pas négligeable, au prorata, pour chacun d'entre eux, de leur population au regard de la dotation globale de fonctionnement.
Selon les estimations de la DGSCGC, l'achèvement du réseau, en 2018, devrait correspondre à un montant total de 118,85 millions d'euros, conforme aux prévisions.
La réflexion en cours sur les solutions permettant d'équiper la flotte d'aéronefs de la sécurité civile d'un système de radio compatible avec le réseau, devrait parvenir à identifier une solution d'ici l'été prochain. Des tests sont en cours pour les hélicoptères comme pour les avions de la flotte. Le règlement de cette difficulté est impératif pour permettre une pleine efficacité du réseau ANTARES -dont le déploiement a mobilisé des crédits importants-.
Terminons par une note d'optimisme à propos des résultats prometteurs de la campagne feux de forêt 2013-2014. En 2013, les incendies ont ravagé 1 920 ha dans les départements méditerranéens, dont 990 ha en été. Ces données traduisent une baisse significative de cet aléa par rapport à 2012 qui, déjà, avait enregistré un affaiblissement du nombre des feux. Ces résultats très encourageants relèvent de plusieurs facteurs qui ne sont pas tous maîtrisables. Il s'agit tout d'abord des conditions climatiques. La DGSCGC a indiqué à votre rapporteur que, outre l'absence de vents violents, les premiers mois de l'année ont été frais et pluvieux jusqu'en juin ; la végétation est restée en conséquence « assez peu vulnérable au feu, l'assèchement des réserves en eau des sols restant d'une manière générale limité ».
Plus généralement, la diminution régulière du nombre des incendies depuis les années 80 résulte aussi d'une démarche volontaire grâce aux mesures mises en oeuvre avec les collectivités territoriales et l'Office national des forêts pour prévenir ce fléau : débroussaillage, patrouilles de surveillance des massifs forestiers, recherche de l'origine des incendies au sein de cellules pluridisciplinaires, politique du guet aérien armé qui permet de réduire les délais d'alerte et d'intervention, aménagement des massifs forestiers, maîtrise de l'occupation du sol, sensibilisation de la population.
Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme Sécurité civile de la mission Sécurités inscrits au projet de loi de finances pour 2015, car, bien que le budget alloué soit trop faible au regard des missions confiées, un progrès peut être constaté.
Concernant les feux de forêt, c'est une erreur de croire que le problème serait réglé ou qu'il y aurait eu une amélioration. Ce qui ne brûle pas une année brûle de toute façon les années suivantes, sauf à ce qu'il y ait un entretien qui de toute façon n'existe pas.
Non, il n'existe pas. Concernant ANTARES, je crois qu'il subsiste des problèmes importants de communication, puisque le fait qu'il faut communiquer avec des hélicoptères n'a pas été anticipé. Enfin, il faut souligner que les 4/5ème de l'activité des pompiers concernent le secours à personne. La progression sur ce point est vraiment très lente. Il faut une meilleure répartition des hélicoptères : la santé, par exemple, en achète et les met où elle veut, sans concertation. Sur la mutualisation des moyens entre SDIS et SAMU, je ne vois aucun progrès...
Des progrès ont été effectués, que ce soit sur la lutte contre les feux de forêt, les secours à la personne ou l'amélioration d'ANTARES, même si, Monsieur Collombat, je ne peux qu'aller dans votre sens : ces progrès ne sont pas suffisamment rapides. Le problème de l'embarquement d'ANTARES dans les hélicoptères est clairement identifié depuis des années : il y aurait eu semble-t-il une avancée récente sur la question.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités » du projet de loi de finances pour 2015.
La commission procède ensuite à l'examen du rapport pour avis de M. Alain Anziani sur le projet de loi de finances pour 2015 (programme « Coordination du travail gouvernemental » et budget annexe « Publications officielles et information administrative »).
Je voudrais en premier lieu saluer le travail effectué les années précédentes par Mme Sophie Joissains, rapporteur pour avis sur la modernisation de l'État, désormais intégrée au programme « Coordination du travail gouvernemental ». Le programme n° 129 « Coordination du travail gouvernemental » est l'un des trois programmes constituant la mission « Direction de l'action du Gouvernement », avec le programme n° 308 « Protection des droits et libertés », qui fait l'objet d'un avis par notre collègue Jean-Yves Leconte, et le programme n° 333 « Moyens mutualisés des administrations déconcentrées ».
Pour ce programme « Coordination du travail gouvernemental », on constate une progression des autorisations d'engagement de 4,32 %, pour un montant de 567 millions d'euros, et des crédits de paiements de 9,22 %, pour un montant de 603 millions d'euros. L'Assemblée nationale a augmenté à la marge le montant de ce programme, notamment pour accroître les crédits destinés au pilotage interministériel des systèmes d'information de l'État, mission de la direction interministérielle des systèmes d'information et de communication.
Ce programme assez multiple comporte huit actions, dont les crédits des cabinets du Premier ministre et de deux secrétaires d'État, les crédits du secrétariat général du Gouvernement, du secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale, du secrétariat général des affaires européennes, de la direction des services administratifs et financiers du Premier ministre, mais aussi les crédits des organismes de conseil et de prospective placés auprès du Premier ministre, les crédits de certains ordres, dont l'ordre de la Légion d'honneur, et enfin les crédits de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives.
Je vous propose de développer cinq points particuliers.
En premier lieu, je souhaite aborder la question des cabinets ministériels. Pour la troisième année consécutive, le projet de loi de finances comporte en effet une annexe particulièrement détaillée sur les effectifs et les rémunérations des cabinets ministériels.
On remarque une diminution très significative des effectifs et de la rémunération globale des cabinets ministériels en 2014 par rapport à 2013, avec une réduction de 565 à 461 personnes. Cette baisse est liée au resserrement de la structure gouvernementale : on comptait au 1er août 2014 un nombre de 16 ministres et 15 secrétaires d'État, contre respectivement 20 ministres et 17 ministres délégués au 1er août 2013. Néanmoins, si l'enveloppe globale de rémunération et les effectifs diminuent, la rémunération moyenne augmente, notamment en raison d'un recrutement à un niveau de plus en plus important. Je souligne également l'effort particulier du cabinet du Premier ministre, qui est passé d'un effectif de 60 à 70 personnes en moyenne entre 2007 et 2013, à un effectif de 55 seulement en 2014. Il y a là un souci d'exemplarité.
En second lieu, je souhaite m'intéresser au secrétariat général pour la modernisation de l'action publique, créé par un décret du 30 octobre 2012, et encore méconnu. Il a pris le relais des structures en charge de la révision générale des politiques publiques, avec un objectif d'abord qualitatif et pas quantitatif. Il est placé sous l'autorité du Premier ministre, ce qui est nouveau, et rattaché au secrétaire général du Gouvernement. Il est rattaché également au secrétaire d'État chargé des questions de modernisation et de simplification, M. Thierry Mandon.
Cette structure a notamment pour mission de superviser l'ensemble des systèmes d'information de l'État, sur lesquels on peut attendre des progès. Le SGMAP a également contribué à la mise en place du « marché public simplifié », qui permet à une entreprise qui soumissionne de ne donner que son numéro SIRET, les autres informations requises étant recherchées par l'administration auprès des organismes et autres administrations qui les détiennent. Un autre projet permet de calculer le montant des prestations sociales auxquelles on peut prétendre, sur un site internet dédié, ce qui permet à chacune de connaître ses droits.
Mon troisième point sera consacré au service d'information du Gouvernement. Doit-il gérer la totalité de la communication des ministères, ce qui se heurterait aux ministères, qui souhaitent garder la gestion de leurs crédits, ou simplement la coordonner ? Il n'y a pas de centralisation des crédits, mais une mutualisation de certaines fonctions a néanmoins été engagée, notamment concernant les revues de presse, la veille des médias ou des réseaux sociaux, l'achat des espaces publicitaires ou encore les études et les sondages, notamment sous forme de marchés mutualisés.
Après une forte diminution, il n'existe aujourd'hui par exemple qu'une trentaine de marchés d'études et de sondages dans les différents ministères. À titre personnel, je trouve que l'on va d'un excès à l'autre, même si le volume total des crédits n'est pas substantiel. S'il est nécessaire de baisser les crédits, le Gouvernement doit avoir ses propres canaux d'information. Nous sommes passés de 22 millions d'euros en 2010 à 11 millions d'euros en 2014 pour les crédits du SIG. Le nombre d'emplois suit la même évolution, avec une trentaine d'emplois en moins depuis 2011. Cette réduction, notamment concernant les campagnes d'information d'intérêt général, qui sont nécessaires, n'est pas toujours vertueuse.
Mon quatrième point portera sur le secrétariat général des affaires européennes, créé en 2005. Il pour mission de coordonner les positions interministérielles pour préparer les positions de la France dans les négociations européennes, sur tous les sujets à l'exception de la politique étrangère et de la politique monétaire. Il veille aussi à l'application du droit européen, notamment par le suivi de la transposition des directives. Il faut noter une innovation en 2014 : alors que le secrétaire général des affaires européennes était jusqu'à présent conseiller du Premier ministre pour les affaires européennes, depuis avril 2014, il est le conseiller du Président de la République pour les affaires européennes. Ce rattachement au Président de la République est censé fluidifier les choses.
Depuis 2011, la France fait figure de bon élève en matière de transposition des directives européennes. En novembre 2014, nous n'avons que sept directives de retard et la France se classe au cinquième rang européen en termes de performance dans la transposition des directives.
Enfin, mon dernier point concerne les publications officielles, gérées par la direction de l'information légale et administrative. La décision a été prise de supprimer le Journal officiel en version papier à compter du 1er janvier 2016, au profit d'un basculement complet vers le numérique. Les abonnés de la version papier, qui étaient de 70 000 en 2000, sont désormais 2 500 en 2014, alors que la version électronique compte actuellement 70 000 abonnés. Une solution doit être trouvée pour certaines décisions individuelles, en matière d'état civil. Cette suppression permet d'économiser un million d'euros de matières premières.
Enfin, une nouvelle forme de réponse au citoyen se développe, avec le dispositif « 39 39 », service téléphonique de renseignement administratif, qui permet de poser une question à un agent, qui peut éventuellement transférer l'appel à un deuxième référent spécialisé. Ce service est assuré par un centre d'appels de la DILA à Metz : 1,4 million d'appels ont été effectués en 2013.
Je vous propose d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Vous avez mentionné une amélioration quantitative pour la transposition française des directives. Néanmoins, je remarque que, sur le plan qualitatif, la France a tendance à « surtransposer », ce qui implique des rigidités sur le plan économique. Il est possible de faire des gains économiques significatifs en réduisant ces rigidités inutiles. En 2015, dans votre prochain avis budgétaire, pourriez-vous prendre en compte cet aspect qualitatif et étudier ce phénomène de « surtransposition » qui nuit à notre compétitivité par rapport aux autres entreprises européennes ?
Je tiens à souligner les efforts de M. Thierry Mandon, secrétaire d'État, pour mutualiser les marchés de conseil entre les ministères. Le Gouvernement pourrait aussi être inspiré de lire les rapports parlementaires, moins coûteux que les cabinets spécialisés. Je crois que la mutualisation est judicieuse.
En termes de simplification, je crois qu'on ne souligne pas assez l'effet d'une proposition de loi adoptée par le Sénat qui a permis la création du Conseil national d'évaluation des normes, présidé par Alain Lambert. Cette instance examine toutes les normes et fait des remarques très pertinentes. On pourrait envisager la création d'une instance qui examinerait en aval les normes applicables à l'État et éviteraient la « surtransposition »...
Concernant le SIG, je rejoins Alain Anziani : il ne faut pas basculer dans l'excès en tombant sous un certain seuil et en éliminant tous les sondages. Je rappelle qu'une proposition de loi adoptée par le Sénat sur ce sujet est en attente depuis maintenant quatre ans. Les sondages d'aujourd'hui sont mal faits et toujours régis par une loi obsolète de 1977.
Concernant la communication du Gouvernement, les ministères font leur propre communication et nous abreuvent de brochures souvent inutiles. Chacun d'entre nous reçoit chaque jour des tonnes de papier ; personne ne peut lire l'intégralité des publications du Gouvernement. J'appelle à une certaine retenue.
Il serait facile de compter sur un mois le pourcentage de ces publications qui vont directement à la poubelle. Les informations nous arrivent par courrier électronique puis sont doublées par papier.
Autant il ne fallait pas dématérialiser la propagande électorale, autant il y a des gisements d'économies dans les productions papier des administrations publiques. Tous les rapports sont aujourd'hui dématérialisés. Neuf destinataires sur dix ne lisent pas les rapports papier qu'ils reçoivent. On abat ainsi des arbres pour nous envoyer des rapports portant sur le développement durable !
L'Assemblée nationale comme le Sénat produisent aussi énormément de papier. Je trouve que l'impression des amendements est une dépense inconsidérée. Nous pourrions aussi dématérialiser.
Nous avons tous un crédit informatique et nous pourrions suivre l'adoption des amendements sur notre tablette.
Pour répondre à Jean-Pierre Vial, il y a en effet un problème de « surtransposition » en France. Le SGAE en est conscient et vient d'éditer un guide des bonnes pratiques pour éviter d'ajouter de la norme à la norme.
Concernant la gabegie de papier, elle n'existe pas que dans les ministères. Je rappelle qu'« un livre, c'est la mort d'un arbre », comme le disait Saint-John Perse. En qualité d'ancien questeur, je rappelle qu'il existe aujourd'hui au Sénat un programme de dématérialisation. Il faudrait un nouvel aménagement de l'hémicycle. Tous nos collègues ne sont cependant pas prêts à travailler sur tablette.
Avant, on ne pouvait pas recevoir la presse quotidienne régionale le jour même. Désormais, avec notre tablette, on peut voir l'information dès le matin. Cette dématérialisation est très utile.
La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Coordination du travail gouvernemental » et du budget annexe « Publications officielles et information administrative ».
Présidence de Philippe Bas, président -
La réunion est ouverte à 14 h 30