Notre ordre du jour appelle l'examen du rapport de notre collègue Jean-Pierre Moga sur la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, issue des travaux des délégations sénatoriales aux entreprises et aux collectivités territoriales. Neuf articles relatifs aux dispositions fiscales ont été délégués à la commission des finances, et je salue la présence de son rapporteur, Arnaud Bazin. La commission de la culture, de l'éducation et de la communication, représentée par son rapporteur Jean-Pierre Leleux formule un avis sur l'article 7, qui concerne les architectes des Bâtiments de France (ABF). Sont également présents les deux auteurs de la proposition de loi, très attendue par nos territoires : nos collègues Martial Bourquin, membre de notre commission, et Rémy Pointereau.
Merci, tout d'abord, de m'avoir désigné comme rapporteur sur cette proposition de loi qui est une initiative majeure du Sénat. Je mesure toute l'importance de cette mission: dans ces temps à la fois troublés et traversés d'une vague d'optimisme, nous lançons un signal très fort à une France qui se sent oubliée. Je rappellerai d'abord l'origine de cette initiative et le puissant courant de ralliement qu'elle suscite. En juillet 2017, nos deux délégations sénatoriales aux collectivités territoriales et aux entreprises ont décidé d'élaborer un programme national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs. Au départ, ce combat était très loin d'être gagné car notre pays vivait encore sur sa tendance lourde à surestimer et, une fois de plus, à surtransposer la contrainte européenne de liberté d'installation. Le résultat, avec cette barrière à la fois juridique et mentale, c'est une France, quasiment « championne du monde de la facilité de créer des grandes surfaces, surtout en périphérie. Dans le sillage de cette évolution, ou parallèlement, notre pays a trop souvent cédé à une culture du déménagement des services publics, des installations de santé - pour ne citer que ces exemples - en dehors des centres-villes.
Et pourtant, au final, le travail sénatorial intense et intercommission a débouché sur un succès inédit : un texte - j'allais dire une « boite à outils » - de 31 articles qui a anticipé le tournant de la jurisprudence européenne du 30 janvier 2018 (arrêt dit « Visser ») et surtout établi un record avec plus de 230 signataires. J'ajoute qu'immédiatement après sa publication, nombre de députés ont présenté, dans la discussion du projet de loi ELAN, des amendements calqués sur cette initiative. Une telle réussite s'explique d'abord par l'importance et le nombre des sujets traités avec, en particulier, le logement, l'animation commerciale, l'équilibre de nos territoires, le poids des contraintes sur les élus de terrain et les distorsions fiscales. Au-delà de ces analyses sectorielles et des intérêts qui s'affrontent, Rémy Pointereau et Martial Bourquin nous ont ralliés à l'idée que les centres-villes et centres-bourgs représentent encore plus que la somme des composantes que je viens d'énumérer : c'est un « enjeu de civilisation ». La meilleure mesure de cet enjeu, ce sont les effets dévastateurs du sentiment d'abandon et de la perte de lien qui résultent de la dévitalisation de nos centres-villes. Économiquement et socialement, le chiffrage précis de ces dégâts est très difficile - cela nous renvoie au vieux problème de l'évaluation du « Bonheur National Brut ». En revanche, les indicateurs électoraux envoient des signaux très clairs : la montée des extrêmes est très bien corrélée avec les « rideaux baissés » - je ne parle pas seulement des commerces - qui s'accompagnent d'une montée de l'insécurité et du découragement.
Confrontés à un tel défi, il faut rassembler toutes les bonnes volontés et affirmer notre volonté d'articuler les initiatives parlementaires et gouvernementales. Je rappelle que le Gouvernement a présenté en décembre 2017 un programme intitulé « Action Coeur de Ville ». Piloté par le ministre de la Cohésion des territoires, il concerne 222 villes ou binômes de villes sélectionnés le 26 mars 2018, sur proposition du ministre, par un comité national de pilotage. 5 milliards d'euros sur cinq ans seront mobilisés pour les études, l'ingénierie et la mise en oeuvre des projets. Ce plan est assorti d'un support juridique qui figure à l'article 54 du projet de loi dit ELAN : un contrat unique et global pour porter chaque Opération de Requalification des Territoires (ORT).
Bien au-delà du champ couvert par le plan gouvernemental, l'initiative sénatoriale vise à proposer des dispositifs pour la revitalisation des centres-villes et centres-bourgs : pour ces cibles de taille plus petite, il faut une approche particulière. Certes le Gouvernement pourra faire observer que rien n'empêche d'autres villes que les 222 sélectionnées de signer une convention ORT, mais l'intérêt sera très limité puisqu'elles seront en dehors du programme financier de 5 milliards d'euros. À l'évidence, le constat ainsi que les objectifs de ces deux démarches sont donc consensuels et complémentaires et il faut les rassembler sous une bannière commune : je vous suggérerai un amendement qui donne un socle législatif à l'exigence de préservation de la vitalité des centres-villes dans toutes ses dimensions.
J'ai entendu une cinquantaine d'intervenants, qui ont exprimé un enthousiasme quasi unanime sur la proposition de loi, surtout à l'égard de son volet non fiscal. Pour mémoire, les 31 articles du texte se répartissent en trois ensembles : un important bloc fiscal qui sera examiné mardi prochain par la commission des finances sur la base d'une délégation au fond de neuf articles, un volet normatif et institutionnel de seize articles et six articles mixtes sur lesquels les commissions des finances et de la culture émettent un avis.
Pour la plupart des représentants des collectivités territoriales, et tout particulièrement les maires ruraux, cette proposition de loi est une véritable « bouffée d'oxygène ». Les maires des petites communes se sentent aujourd'hui pris en étau entre « l'inertie et l'illégalité » au moment où il leur faut prendre en compte les transformations profondes des attentes et des modes de vie. Cela s'explique bien entendu par l'accumulation des normes et des procédures mais aussi par la tendance de certaines administrations ou de certains agents à les appliquer de façon maximaliste ou tatillonne. Au total, la vélocité de l'action publique locale a beaucoup diminué par rapport aux années 1990 où on pouvait agir plus simplement et plus vite : c'est un paramètre clef et un facteur de découragement pour les élus. L'initiative sénatoriale suscite donc un très grand espoir : elle séduit par sa transversalité mais les maires ruraux craignent que l'audace et le volontarisme de ce texte se heurte à des craintes et des oppositions.
Le bilan global des auditions est cependant plutôt rassurant à cet égard: il s'en dégage un consensus beaucoup plus large que prévu sur le volet non fiscal. Je crois que notre pays souhaite à présent inverser la montée de la complexité et de la paralysie. Bien entendu, je mets à part la question des nouveaux prélèvements : quelques dispositions sont vivement critiquées - comme la taxe sur les livraisons du e-commerce. Pour sa part, le Gouvernement sort son « joker » : il attend les conclusions du rapport commandé à l'Inspection générale des finances et souhaite reporter le débat à l'examen du projet de loi de finances sur la fiscalisation du commerce électronique et le rééquilibrage entre les différentes formes de distribution.
Pour la mise en oeuvre concrète de ce programme sénatorial de revitalisation des centres-villes, il convient de rappeler brièvement la hiérarchie des priorités ainsi que les principaux défis à relever. Je retiens des auditions plusieurs idées directrices. Comme le confirment les meilleurs praticiens, l'essentiel - peut-être plus encore que les financements - est d'abord de mettre la compétence et l'ingénierie à la disposition des territoires qui en ont le plus besoin. La question foncière est également vitale et on constate, dans ce domaine, de très grandes inégalités entre les territoires. Ceux qui sont dépourvus d'établissements publics fonciers (EPF) seront renvoyés à eux-mêmes et c'est pourquoi l'article 24 de la proposition de loi mobilise statutairement les établissements locaux et de l'État sur la question des centres-villes. La revitalisation dépendra aussi et surtout de la capacité à mobiliser des opérateurs privés dans le secteur du logement et du tertiaire : les dispositions relatives à l'attractivité fiscale et à la simplification des normes prennent ici tout leur sens. Pour donner aux petits centres-villes un avantage comparatif par rapport aux métropoles où la croissance se diffuse beaucoup plus facilement, il faudrait accorder aux territoires en difficulté une priorité pour des innovations majeures : par exemple, y déployer la 5 G en premier. Enfin, la présence des maisons de santé ou les hôpitaux en coeur de ville sont des éléments fondamentaux de choix résidentiel pour les familles avec des jeunes enfants ou les personnes âgées.
J'en viens à l'examen plus précis de l'ensemble des articles pour vous annoncer les modifications que je vous soumettrai. L'article 1er vise à créer une faculté de recours à des opérations de sauvegarde économique et de redynamisation « OSER » de certains centres-villes et centres-bourgs. Cet article fournit également des critères de délimitation du périmètre de ces interventions. C'est la pierre angulaire de cette proposition puisque qu'il détermine l'application de plusieurs régimes dérogatoires et de mesures exceptionnelles. Je vous suggèrerai plusieurs amendements pour étendre, compléter et préciser ce dispositif, sur la base de trois idées. Tout d'abord, donner un socle commun à l'ensemble des 31 articles de ce texte et à toutes les initiatives qui poursuivent un objectif similaires ; j'y reviendrai plus précisément lors de l'examen des amendements mais je vous précise ici qu'à mon sens, il est impératif de mentionner, comme condition essentielle de la revitalisation un effort particulier en matière de sécurité publique. Ensuite, je vous propose de mieux prendre en considération, dans les critères d'identification des centres-villes et centres-bourgs pouvant bénéficier d'une opération de sauvegarde, l'artisanat, l'animation culturelle et l'attractivité touristique. Enfin, il me semble utile d'étendre le périmètre des opérations de sauvegarde pour les villes de moins de 10 000 habitants tout en conservant, pour les autres, le plafond prévu à l'article 1er : « 4 % de la surface urbanisée de chaque commune concernée ».
L'article 2 propose deux mesures. La première est de créer une Agence nationale des centres-villes et centres-bourgs. Certains intervenants ont bien entendu, et ils n'ont pas tort, critiqué l' « agencification » de l'État et la multiplication des organismes plutôt que de recourir à l'existant. Cependant, sur le principe, le besoin d'ingénierie des petites communes est unanimement reconnu. Ne subsiste donc que la question des modalités et, sur ce point, la solution la plus logique serait de créer un département dédié aux centres-villes dans la future agence nationale de cohésion des territoires : comme celle-ci n'en est qu'au stade de la préfiguration, cet article propose une solution d'attente parfaitement cohérente. L'article 2 étend par ailleurs, aux centres-villes faisant l'objet d'une convention « OSER », le champ d'intervention de l'établissement public national pour l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (EPARECA), pour l'instant limité aux quartiers prioritaires de la politique de la ville. C'est une mesure de bon sens : a priori, la principale objection pourrait venir de Bercy car cette extension appelle un renforcement des effectifs et des moyens de l'EPARECA qui est une petite structure : pour vous donner un ordre de grandeur, 60 millions d'euros seraient nécessaires pour prendre en charge 30 centres-villes supplémentaires.
L'article 4 s'inspire d'expériences réussies pour repeupler et vivifier le centre-ville. Il prévoit de mettre fin aux baux commerciaux « tout immeuble », qui ont eu pour effet de vider les étages de leurs locataires. Il interdit également de condamner les issues aux étages, avec, à titre de sanction, la constatation automatique de l'abandon manifeste d'une partie d'immeuble et l'application de la taxe annuelle sur les logements vacants. Cet article apparait, sur le terrain, comme une nécessité d'intérêt général, mais, bien entendu, les élus feront tout leur possible pour accueillir dans les meilleures conditions les commerçants et artisans qui, comme les boulangers, ont souvent besoin d'un logement juste au-dessus de leur lieu de travail.
L'article 5 vise à favoriser le maintien des services publics en centre-ville avec un droit d'information des élus et une procédure pour que ceux-ci puissent exprimer leur opposition. Cet article s'attaque donc à une des principales causes de fragilité des centres-villes et je vous propose de le soutenir sans réserve. Je précise que sont également concernés la fermeture ou le déménagement des « organismes chargés d'une mission de service public », ce qui peut, en théorie, concerner les chambres consulaires qui auront alors la possibilité d'expliquer aux élus les motifs de leur décision.
L'article 6 propose une expérimentation visant à alléger le poids des normes dans les centres-villes et centres-bourgs intégrés à un périmètre OSER. C'est un article fondamental et parfaitement consensuel. Économiquement, on ne répètera jamais assez que la ruralité a absolument besoin d'un desserrement raisonné du carcan de normes. Je m'arrête un instant sur l'aspect juridique de cet article qui propose des dérogations dans un champ très large. On pourrait, dans un premier temps, craindre une éventuelle censure par le juge constitutionnel pour un motif très souvent utilisé : l'« incompétence négative », qui sanctionne l'imprécision d'un texte. C'est ici qu'il faut saluer la rédaction très bien bordée de cet article qui procède d'une analyse subtile de la jurisprudence du Conseil Constitutionnel. En effet, l'incompétence négative n'est invoquée que si l'imprécision du texte risque de porter atteinte à un droit protégé par une norme supra-législative. Or le texte écarte ce risque de non-conformité en excluant du champ de la dérogation toutes les règles - internationales ou constitutionnelles - qui s'imposent au législateur. Les normes de sécurité sont, par ailleurs, sanctuarisées : il faut s'en féliciter. Le représentant de la Fédération des pompiers de France a confirmé que l'habitat ancien de centre-ville nécessite une vigilance particulière. En l'absence de réglementation, la Fédération travaille sur une démarche au cas par cas pour prévenir les risques avec une labellisation des immeubles.
L'article 7 concerne les protections patrimoniales et le rôle de l'architecte des Bâtiments de France (ABF). À mon sens, plus un sujet est passionnel et plus le législateur doit l'examiner avec sagesse et réalisme. La proposition initiale comporte quatre principales idées : l'harmonisation des décisions des ABF, la prise en compte, par les ABF, des contraintes financières qui s'imposent aux centres-villes en difficulté, l'insertion précoce de leur action dans la délimitation du périmètre des opérations de revitalisation et enfin, si l'ABF n'a pas formulé ses prescriptions en amont, une possibilité de surmonter les blocages par une possibilité de recours à un avis simple. À la suite de discussions approfondies, nous sommes parvenus à un modus vivendi : faire confiance aux ABF pour qu'ils interviennent en amont, ce qui amène à renoncer à l'avis simple tout en préservant les idées d'harmonisation et de réalisme financier. Trois raisons militent en faveur de cette solution. D'abord, elle préserve l'équilibre de la législation en vigueur à laquelle notre commission de la Culture est très attachée. Ensuite, si vous acceptez d'introduire, à l'article 1er, une obligation nationale de préserver la vitalité des centres-villes, cette injonction du législateur s'adressera non seulement à l'ABF mais aussi au préfet de région qui prend la décision finale en cas de recours. Enfin, il convient de rappeler que les normes patrimoniales permettent de bénéficier des incitations fiscales dites « Malraux ». Nous avons, de ce point de vue, tout intérêt à en maintenir le principe dans les petits centres-villes et centres-bourg car cela ouvre la voie au redéploiement du dispositif Malraux sur les territoires qui disposent de moyens beaucoup plus faibles que les métropoles. J'ai pu vérifier la solidité de cette piste fiscale au cours des auditions.
L'article 8 débaptise le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac) et le recentre sur la revitalisation commerciale en centre-ville. La démarche apparaît logique, car le législateur a progressivement élargi les missions du Fisac, tandis que les crédits ont considérablement diminué pour atteindre une douzaine de millions d'euros. La proposition de loi déconcentre et décentralise la procédure d'attribution des aides. C'est un point fondamental, car à l'heure actuelle tous les dossiers remontent à Bercy : le temps, l'énergie et les sommes consacrées à l'élaboration des dossiers - qui atteignent parfois un peu moins du tiers de l'aide espérée - sont devenus inacceptables. Cet article 8 va cependant très loin en rendant éligibles aux aides les seules communes signataires d'une convention de sauvegarde. Je suggère de leur réserver une priorité plutôt qu'une exclusivité absolue, en préservant des possibilités d'aides aux villes et bourgs dépourvus de moyens. Les maires ruraux ont également raison de plaider pour la préservation du réseau des stations-service indépendantes car c'est souvent « pour faire le plein » de carburant que le consommateur va dans les grandes surfaces de périphérie : ils nous demandent de ne pas oublier que la fermeture d'une petite station-service est souvent le déclencheur de la dévitalisation.
L'article 10 prévoit de créer un fonds de garantie pour les loyers commerciaux impayés dans les centres-villes, essentiellement pour rassurer les propriétaires. L'idée semble aventureuse aux non-spécialistes mais elle séduit dans certains ministères et les experts de la Caisse des dépôts envisageraient de soutenir de tels projets en apportant une « garantie au fonds de garantie ». Je suggère donc d'approuver cette disposition, d'autant qu'elle s'appuiera logiquement sur une vérification des compétences et de la qualité du projet des commerçants qui pourraient en bénéficier.
L'article 11 propose un nouveau contrat de dynamisation liant un propriétaire à un exploitant commercial. Certains font observer qu'il soulève, de manière sous-jacente, toute la problématique du bail commercial. Certes, le rapport Rueff-Armand de 1960 sur « les obstacles à l'expansion économique » estimait que la législation française des baux commerciaux, qui permet le renouvellement indéfini du bail, est un frein important aux réaménagements de structures et à l'établissement des jeunes. Dans l'immédiat, nul ne songe à remettre en cause le bail commercial qui vient d'être rénové et qui protège les commerces rentables à long terme. Il s'agit plutôt de créer un cadre juridique facultatif et adapté à de nouvelles formes de commerces : « boutiques à l'essai », « boutique éphémères », « pop-up store ». Cet article témoigne de la volonté du Sénat de conjuguer revitalisation et innovation.
La proposition de loi comporte également un important volet relatif à l'urbanisme commercial, visant à corriger certains effets pervers de la législation ou des pratiques des instances chargées de délivrer les autorisations d'exploitation commerciale.
L'article 13 vise à modifier la composition des commissions départementales d'aménagement commercial (CDAC) pour mieux représenter le tissu économique et les élus locaux. À cette fin, d'une part, il intègre le maire d'une des communes limitrophes dans la composition de la CDAC. D'autre part, il réintroduit des acteurs économiques - représentants de la chambre de commerce, la chambre de métiers et la chambre d'agriculture - au sein de la CDAC, sans toutefois leur conférer de droit de vote. Je vous rappelle que la loi du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, dite LME, les avait fait disparaître en 2008 compte tenu des règles posées par la directive européenne « services » de 2006, et de la volonté de ne pas intégrer des membres qui seraient à la fois « juges et parties ». Sur le fond, la participation aux travaux des CDAC de personnes qui ont des connaissances sur l'environnement économique local est une bonne chose. Cependant, peut-on considérer que la présence des acteurs économiques comme membres de la CDAC n'encoure pas les mêmes critiques qu'en 2008, quand bien même ils n'ont pas de droit de vote ? Il y a là un potentiel risque juridique, mis en exergue au cours des auditions. Je vous proposerai, par un amendement, de ne pas faire rentrer ces représentants parmi les membres de la CDAC, mais en revanche d'exiger leur consultation avant que la CDAC ne délibère.
L'article 14 propose d'abaisser les seuils d'autorisation d'exploitation commerciale. Il vise, d'une part, à soumettre à autorisation de la CDAC les espaces de stockage principalement destinés au e-commerce et, d'autre part, à abaisser, hors du périmètre OSER, de 1 000 à 400 m2 le seuil d'autorisation d'exploitation commerciale. Ce seuil de 1 000 m2 serait donc maintenu dans le périmètre OSER, mais le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'EPCI pourrait l'abaisser de 1 000 à 400 m2. Ce dispositif, dont je partage la finalité, soulève quelques observations. D'abord, s'agissant de l'espace de stockage, je soutiens pleinement le principe d'une autorisation, mais il y aura en pratique certaines difficultés à déterminer si l'espace est « principalement » destiné à l'e-commerce, car de plus en plus, les enseignes font de la distribution « omni-canal » et utilisent les mêmes entrepôts. En outre, on sort quelque peu de l'épure du régime d'autorisation qui vise seulement les espaces de commerce. C'est néanmoins un signal fort, et pour cette raison, j'entends le conserver. Ensuite, on peut se poser la question de l'existence même d'un seuil dans le périmètre OSER. On peut noter que, par rapport au projet de loi ELAN, la position est plus restrictive (absence d'autorisation dans le périmètre ORT). Le choix procède néanmoins d'un équilibre que je n'entends pas remettre en cause à ce stade.
L'article 15 a pour ambition de rendre plus performante l'évaluation des projets d'implantation commerciale en prenant mieux en compte leurs effets sur les territoires. A cette fin, il propose, d'abord, d'instituer un lien de conformité (et non plus de compatibilité) entre le SCOT et la décision d'autorisation d'exploitation commerciale, ensuite, de renforcer la prise en compte de critères de revitalisation commerciale, de coûts supportés par la collectivité du fait de l'implantation notamment en termes d'infrastructures et de transports, en troisième lieu, d'imposer une étude d'impact démontrant les effets concrets du projet ainsi que l'absence de friches existantes en centre-ville susceptible d'accueillir le projet, et enfin d'interdire la délivrance ou cession d'une autorisation à des exploitants illégaux de commerce. Je suis très favorable à ces dispositions, qui imposeront aux CDAC de mieux prendre en compte l'effet des projets sur le commerce de centre-ville ou de centre-bourg.
L'article 16 vise à garantir le respect des décisions des CDAC et sanctionner les cas d'exploitation illicite. Cet article vise, par rapport à l'état du droit, trois objectifs : imposer la délivrance, par un organisme privé habilité par le représentant de l'État dans le département, d'un certificat attestant du respect des conditions de l'autorisation d'exploitation commerciale ; permettre aux agents municipaux de constater le non-respect, au même titre que la DGCCRF ; et enfin, instaurer une obligation (et non plus une faculté) pour le préfet de mettre en demeure l'exploitant illicite de fermer au public ou de modifier sa surface de vente pour respecter l'autorisation ; et de prendre, en cas de mise en demeure restée sans effet, un arrêté ordonnant la fermeture au public assortie d'une astreinte journalière. L'absence de contrôle du respect des autorisations est aujourd'hui l'une des principales difficultés d'application de la législation actuelle. Ces dispositions devraient y remédier.
L'article 17 prévoit de renforcer l'obligation de démantèlement et de remise en état des sites sur lesquels une exploitation commerciale a cessé. Il s'inspire à cet effet des mécanismes prévus pour les installations classées du code de l'environnement, en prévoyant, d'abord un contrôle du préfet sur les dispositions prévues par le propriétaire en vue du démantèlement ou de la remise en état du site. Il vise ensuite à instituer un mécanisme de mise en demeure obligatoire par le préfet, en l'absence de dispositions ou en cas de carence de ces dispositions, et, en cas de mise en demeure restée sans effet, de consignation auprès d'un comptable public de la somme correspondant au montant des travaux à effectuer. En l'absence de travaux dans un délai de trois ans, des travaux aux frais du propriétaire pourront être prescrits d'office. Enfin, cet article prévoit d'interdire la délivrance d'une nouvelle autorisation d'exploitation commerciale pour un propriétaire qui n'aurait pas respecté ses obligations de démantèlement et de remise en état. Je suis également favorable à ces dispositions, car trop de sites commerciaux sont laissés à l'abandon aujourd'hui. Une remarque cependant : l'interdiction de délivrance d'une nouvelle autorisation risque d'avoir peu d'impact en pratique : d'une part, la procédure d'autorisation est décentralisée, et il n'y a pas de « base centralisée » des décisions, sauf pour celles transmises à la CNAC ; d'autre part, au sein des groupes de la grande distribution, les propriétaires des sites sont souvent des personnes/sociétés différentes.
L'article 18 a pour objet de renforcer la portée des décisions des CDAC. Dans cette perspective. Il prévoit que la CNAC ne peut réformer qu'à l'unanimité de ses membres la décision d'une CDAC, lorsque celle-ci a refusé de délivrer une autorisation d'exploitation commerciale : dans cette hypothèse, la CDAC peut, à l'unanimité de ses membres, maintenir sa décision qui se substitue alors à celle de la CNAC. Cet article prévoit également l'audition d'un représentant de la CDAC, à sa demande, devant la CNAC avant que celle-ci ne statue. La CNAC étant une instance d'appel et d'harmonisation nationale des décisions des CDAC, il semble assez contestable de créer un mécanisme de substitution de sa décision par celle de la CNAC. L'obligation d'une décision à l'unanimité devrait, en pratique, rendre à elle seule plus difficile la réformation des décisions d'interdiction des CDAC. Cela peut sembler suffisant et, en conséquence, je vous proposerai donc un amendement supprimant cette substitution.
L'article 19 instaure un droit d'opposition du préfet à une autorisation d'exploitation commerciale pour assurer la cohérence avec l'intervention de la puissance publique. Il impose au préfet, en tant que président de la CDAC, d'une part, de donner un avis, rendu public, sur chaque projet présenté et, d'autre part, de s'opposer, par arrêté motivé, à une décision d'autorisation d'exploitation commerciale qui irait à l'encontre des objectifs poursuivis par l'État, via ses engagements financiers, dans la commune ou l'EPCI d'implantation. À nouveau, je partage tout à fait l'objectif : les décisions d'autorisation commerciale ne doivent pas remettre en question des politiques de revitalisation a fortiori appuyées par l'État. Cela dit, je m'interroge sur le dispositif. Le préfet est aujourd'hui président de la CDAC, mais sans droit de vote. Faut-il pour autant prévoir un droit d'opposition, d'autant que le préfet peut saisir la CNAC en appel ? En outre, le mécanisme de substitution de sa décision à celle de la CDAC est discutable sur le plan des principes, car la décision doit rester collégiale. Je vous proposerai un amendement visant à supprimer ce droit d'opposition et, en contrepartie, à donner un droit de vote au préfet dans la CDAC.
L'article 20 exonère d'autorisation d'exploitation commerciale en centre-ville certains types de commerces. Il étend la liste des dérogations actuelles : d'abord aux magasins de ventes de produits alimentaires en circuit court de moins de 1 500 m2, ensuite aux projets d'implantation sur des friches commerciales « en centre-ville », d'une surface de vente de moins de 1 500 m2, et enfin, dans le périmètre OSER, aux surfaces de ventes créées dans le cadre d'une opération immobilière « mixte » - commerce/logements - à condition que la surface de vente soit inférieure au quart de la surface de plancher des logements. Une observation : si la notion de friche commerciale est juridiquement définie par le code général des impôts, celle de centre-ville ne l'est ni par un texte en vigueur, ni par la présente proposition de loi. Déterminer quelle opération sera éligible ou non en pratique à cette exonération sera difficile... Mais la notion est déjà utilisée au même article pour les gares... Maintenons-là !
L'article 21 institue des moratoires locaux d'implantation de nouvelles activités commerciales dans des zones en difficulté. À cette fin, il donne au préfet le pouvoir de refuser l'enregistrement ou de suspendre l'examen d'une demande d'autorisation d'aménagement commercial en vue d'une implantation sur le territoire d'une commune ou d'un EPCI signataire d'une convention OSER, mais hors du périmètre OSER, pendant une durée d'un an, renouvelable dans la limite de la durée de la convention OSER. Saisi par une commune ou l'EPCI signataire de la convention OSER, il s'agirait d'une obligation pour le préfet. Le texte prévoit également la faculté, pour le préfet, d'étendre, à son initiative ou à celle d'un maire ou président d'EPCI « à d'autres communes du département », hors périmètre OSER, le refus d'enregistrement ou la suspension d'examen, si les projets concernés sont de nature à mettre en péril des conventions OSER.
La mise en place d'un moratoire est une mesure effectivement souhaitable, et un système de refus/suspension semblable est d'ailleurs également prévu dans le projet de loi ELAN. Le dispositif proposé suscite néanmoins une observation : il ne prévoit pas la consultation des communes/EPCI concernés, ce qui serait souhaitable afin que le préfet agisse en toute connaissance de cause. Je proposerai donc un amendement en ce sens.
L'article 22 propose de rendre le document d'aménagement artisanal et commercial (DAAC) obligatoire et prescriptif. Pour ce faire, il vise, d'une part, à rendre obligatoire, au sein du SCOT, la définition d'un DAAC, tout en étendant son objet aux impacts sur le commerce de centre-ville ; d'autre part, il prévoit d'imposer au DAAC de préciser, outre les conditions d'implantation des commerces, les types d'activité et les surfaces de vente. Je comprends la philosophie du dispositif et la partage pleinement. Mais la mesure proposée soulève deux observations : en premier lieu, alors que le SCOT est un document d'orientation, le DAAC - intégré au Document d'orientation et d'objectifs du SCOT - serait lui prescriptif. L'articulation au sein d'un même document d'urbanisme n'est pas forcément évidente ; en second lieu, définir les types d'activité et les surfaces de vente autorisées au sein du DAAC impliquera une grande dextérité juridique : il faudra ainsi à chaque fois justifier précisément, au regard de la récente jurisprudence de la CJUE, dans quelle mesure ses prescriptions sont justifiées et proportionnées au regard du motif impérieux d'intérêt général qu'est la préservation d'une activité commerciale de centre-ville. Pour éviter une censure, les collectivités devront donc être bien accompagnées juridiquement.
Enfin, les article 23, 24 et 25 sont consensuels et n'appellent pas de remarques particulières. Ils visent à spécifier l'impératif de la prise en compte des centres-villes et centres-bourgs par les programmes locaux de l'habitat (c'est l'article 23), par les Établissements Publics Fonciers locaux et de l'État (article 24) et par le fonds national des aides à la pierre (FNAP).
J'en ai terminé pour cette présentation des grandes lignes de mon rapport sur ce texte dont les auteurs méritent un hommage appuyé.
Je vous félicite, cher collègue, pour la grande qualité de votre premier rapport !
Je vous remercie, madame la présidente, de m'avoir convié à la réunion de votre commission. Je salue également le travail réalisé par le rapporteur. Ce texte fait l'objet d'une forte attente des territoires ; il est porteur d'un enjeu de société, ce qui explique le nombre considérable de signataires. Le précédent record sénatorial, atteint en 1997 par une proposition de loi agricole de notre ancien collègue Gérard César, s'établissait à 212 signataires. Notre initiative a, par ailleurs, reçu le soutien de l'Association des maires de France (AMF), de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), de l'Association des petites villes de France (APVF) et d'associations de commerçants.
Nous avons, avec Martial Bourquin, débuté nos travaux au mois de mai 2017, avant la nomination de Jacques Mézard au Gouvernement : notre proposition ne s'est en conséquence pas imposée en concurrence de la sienne, que porte l'article 54 du projet de loi ÉLAN. Le Sénat, représentant des collectivités et des territoires, l'a seulement anticipée. À la différence des opérations de requalification des territoires (ORT) ou des opérations de revitalisation, notre proposition de loi traite l'ensemble des problématiques, en particulier commerciales, des centres-villes et centres-bourgs, afin que les mêmes difficultés ne réapparaissent pas cinq ans après une opération qui s'avèrerait trop ciblée. À titre d'illustration, le e-commerce, dans la mesure où les géants du numérique bénéficient d'une fiscalité favorable, représente une concurrence déloyale pour les commerces de centres-villes. Or, ses effets, comme ceux de la multiplication des grandes surfaces en périphérie, ne sont pas traités dans le cadre des ORT. De plus, il convient de prendre en considération le poids des normes liées à l'urbanisme commercial et les inégalités de coûts entre commerces de centres-villes, en périphérie et e-commerce.
Quelles villes souhaitons-nous demain ? Des centres-villes vides, à l'américaine, ou commercialement, culturellement et socialement vivants ? La dévitalisation ne se limite pas aux 222 villes sélectionnées au sein du programme Action coeur de ville ; 700 cités pourraient être concernées sur le territoire national. Je n'ai aucun état d'âme à fiscaliser les géants du numérique - la proposition de loi prévoit d'ailleurs que seules les entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 50 millions d'euros seront concernées - pour financer la renaissance de nos territoires !
Trois articles, nous en sommes conscients, soulèvent davantage de difficultés, qui ont, en partie, été réglées par des discussions en amont de votre réunion. Ainsi, avec Jean-Pierre Leleux, nous avons trouvé un compromis sur l'article 7 relatif aux ABF. J'espère que nous ne le remettrons pas en cause car il convient de ne pas trop freiner les projets de rénovation. Il en va de même des dispositions relatives aux CDAC, sur lesquelles, avec Martial Bourquin, je suis ouvert à la discussion.
En conclusion, mes chers collègues, notre proposition de loi est un texte décentralisateur, a contrario du dispositif des ORT. Faisons confiance aux élus et à l'intelligence des territoires !
Avec Rémy Pointereau, nous avons travaillé sur ce texte pendant neuf mois. C'est un peu notre enfant... Je tiens à remercier notre rapporteur. Le Sénat est le représentant des territoires ; il doit relayer les attentes des élus. Soit on s'occupe uniquement de quelques métropoles, soit on s'occupe de tout le territoire... Notre ambition est que toutes les communes qui le souhaitent puissent se doter d'un périmètre OSER. Depuis des années prévaut une culture de la périphérie : les villes se sont étirées, dilatées, délitées. Il importe de redensifier, de rendre leur attractivité aux centres-villes, tout en respectant leur patrimoine. Les services publics doivent rester dans les centres mais l'État, malheureusement, dans ce domaine, ne montre pas l'exemple.
Selon certains, on ne pourrait rien faire. Nous disons à l'inverse qu'on peut agir si l'on s'attaque au coeur du problème : le renforcement des centralités. La question de la fiscalité est ici cruciale : investir en centre-ville coûte trop cher et cela s'ajoute au poids des normes, à l'absence de parkings, etc. Le centre-ville est ainsi défavorisé par rapport à la périphérie. Il faut donc donner la possibilité aux maires qui le souhaitent d'alléger la fiscalité dans leur centre-ville. Nous avons reçu les représentants des chaînes de grandes surfaces. Beaucoup disent qu'ils n'en construiront plus, en rappelant que leur chiffre d'affaires a baissé de 4 % cette année. Nos propositions les intéressent. Et comme l'a souligné le rapporteur, nous devons prendre les problèmes à bras-le-corps si l'on veut éviter la montée des extrêmes. Est-il audacieux de vouloir taxer les géants d'internet, les GAFA ? Nous devons avoir le courage de le faire. Enfin, tirant les leçons de ce qui s'est passé aux Pays-Bas, nous souhaitons taxer l'artificialisation des terres. Notre projet est donc équilibré et réaliste.
La commission des finances n'examinera le texte que le 5 juin. Elle n'est pas opposée à une taxation des GAFA. Au contraire, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2018, elle avait proposé, par exemple, de taxer les locaux de stockage du e-commerce et les drive. Sa proposition n'a pas été adoptée. Nous nous sommes aussi prononcés pour augmenter les prélèvements sur le commerce des données réalisé par les GAFA.
La commission de la culture a examiné l'article 7. Il vise à concilier deux objectifs louables qui s'opposent depuis maintenant soixante ans : d'une part, le souhait des maires de redynamiser leurs centres-villes en réalisant des opérations d'urbanisme, et, d'autre part, l'exigence de protection patrimoniale. Nous pensions avoir trouvé un bon équilibre avec la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, dite LCAP. L'article 7 de la proposition de loi, dans sa version initiale, prévoyait qu'une directive nationale élaborée conjointement par les ministres chargés du patrimoine et de l'urbanisme - c'est-à-dire deux ministères qui ont historiquement des difficultés à collaborer - permettrait de déroger, dans les périmètres OSER, aux règles patrimoniales. D'un point de vue juridique, j'observe qu'il ne paraît pas acceptable que des règles prises de manière unilatérale puissent se substituer à des documents de protection patrimoniale : le plan de sauvegarde et de mise en valeur (PSMV) et le plan de valorisation de l'architecture et du patrimoine (PVAP), qui sont élaborés dans le cadre d'une procédure transparente, font l'objet d'un accord entre les élus, l'État, les citoyens et les acteurs du patrimoine, après enquête d'utilité publique et constituent des documents opposables annexés au plan local d'urbanisme.
Je ne sous-estime pas les conflits entre les élus et les architectes des Bâtiments de France. La commission de la culture a plutôt souhaité faciliter le travail de concertation en amont de la définition du périmètre OSER. En amont, les ABF devront ainsi porter à la connaissance du maire ou de l'autorité compétente l'ensemble des servitudes opposables dans le périmètre prévu. L'ABF sera ainsi associé en amont. Dans ce cadre, nous maintenons son avis conforme. Depuis plusieurs années, il faut reconnaitre que les ABF sont de plus en plus conciliants. En supprimant leur avis conforme, on placerait d'ailleurs le maire en première ligne. Je connais des élus qui sont parfois contents de s'abriter derrière les avis de l'ABF...
L'article prévoit aussi que l'ABF devra prendre en compte les contraintes financières ou les besoins en logements dans son avis. Cela crée un risque de contentieux : il se trouvera toujours quelqu'un pour estimer qu'un ABF n'a pas assez tenu compte de ces dimensions. Il conviendrait de préciser la rédaction sur ce point. Je voulais enfin remercier les auteurs de la proposition de loi et le rapporteur de leur écoute. Il s'agit d'un texte de compromis.
Nous sommes unanimes à déplorer la disparition des activités dans les centres-villes et l'ensemble de la proposition est vitale à cet égard. Par ailleurs, Jean-Pierre Leleux a bien présenté l'article 7. Nous avions trouvé un équilibre dans le cadre de la loi LCAP de 2016 entre la protection du patrimoine et les exigences de l'économie et de l'urbanisme et ce texte a été adopté à la quasi-unanimité. Un des enjeux du texte est le rôle des ABF et le mot clef doit être celui de confiance. Les ABF ont un rôle de soutien et de conseil auprès des maires. Nous avons besoin de centres vivants. Je suis convaincue que le patrimoine permettra de conforter leur attractivité, de développer le tourisme, de donner envie, comme le chantait Johnny Halliday, d'y vivre ou de s'y s'arrêter.
L'état de délabrement de nos centres-villes et centres-bourgs représente un défi majeur pour la cohésion et le développement de nos territoires. Ce sujet qui nous concerne tous doit être placé au-dessus des clivages partisans. Plusieurs mesures vont dans le bon sens, comme la suppression de l'autorisation d'exploitation commerciale (AEC) dans les zones OSER, la réduction des normes pour les entrepreneurs ou la taxe contre l'artificialisation des terres. Je salue le travail réalisé par les auteurs de la proposition de loi et par notre rapporteur. Néanmoins, le groupe LaREM est opposé à ce texte. Le dispositif OSER entre en contradiction avec les opérations de revitalisation du territoire définies à l'article 54 de la loi ÉLAN. La signature du préfet est inévitable pour assurer la cohérence des projets ; c'est pourquoi le dispositif ORT nous paraît préférable. Le foisonnement de nouvelles taxes est contraire aux engagements du Président de la République. Concernant l'équité fiscale entre magasins physiques et commerces en ligne, une mission de l'Inspection générale des finances a été annoncée et il faut en attendre les résultats. Enfin, nous ne partageons pas l'intégralité du diagnostic. La création de centres commerciaux n'est pas l'unique facteur de la dévitalisation des centres-villes. N'oublions pas la démographie, le taux de chômage, l'inadéquation du parc immobilier, etc. Le projet de loi ÉLAN défend une approche pragmatique de la revitalisation des centres-villes et des centres-bourgs. Il est perfectible, et les députés ont déjà amélioré la rédaction pour assouplir l'obtention des AEC ou élargir le champ d'intervention de l'EPARECA aux ORT. Enfin, je vous rappelle que c'est à la demande du Sénat que la conférence de consensus a été mise en place. Soyons raisonnables. Plutôt que de multiplier les textes similaires, enrichissons celui du Gouvernement !
Je regrette la position du groupe LaREM : nos collègues semblent considérer que tout ce qui n'émane pas d'eux est inutile ou médiocre. À ce rythme, il faudrait supprimer le Sénat et l'Assemblée nationale et laisser En Marche décider seule...
Je propose plusieurs améliorations à ce texte. Tout d'abord, il faudrait supprimer l'avis conforme des ABF. Lorsque les ABF se comportent un peu comme des « ayatollahs », les maires ne peuvent plus faire avancer leurs projets. Il est également inadmissible que les ABF soient consultés lorsque l'on fait une demande pour obtenir une subvention au titre de la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Ils devraient être consultés après, uniquement sur les documents d'urbanisme.
Il n'est pas normal d'appliquer le même tarif pour la redevance d'archéologie préventive dans des villes de 500 habitants ou de 100 000 habitants, quels que soient l'emplacement du terrain et le prix du foncier. Pour des fouilles sur des surfaces de plus de 3 000 mètres carrés, le propriétaire doit payer une partie des fouilles et leur coût est le même selon que le prix du foncier est plus ou moins élevé : ce n'est pas normal.
Enfin, il faut laisser les élus locaux choisir leur destin : imposer de faire figurer le DAAC dans les SCOT ne va pas dans ce sens !
Je salue le travail des auteurs de ce texte et de notre rapporteur. Face à l'hypermétropolisation qui fragilise nos territoires et provoque l'abandon de certaines zones, il est essentiel de redonner aux élus locaux les moyens de se saisir de cette problématique des volets fermés et de développer leurs territoires. On doit faciliter l'action des élus pour réhabiliter les logements, faciliter le retour des commerces dans les centres et limiter leur développement en périphérie, même si l'essor des grandes surfaces a été accompagné par les élus pendant des décennies et n'est pas simplement le fait des grandes chaînes commerciales... Je soutiens les orientations de ce texte. Toutefois, il restera des différences entre les centres-villes des petites villes et ceux des petits villages ou des communes de montagne qui ne pourront être réglées uniquement par cette loi. Un débat de société est nécessaire pour déterminer ce que l'on attend de nos centres. Je connais des villages où tout le monde affirmait vouloir conserver la boulangerie. Mais une fois celle-ci sauvée, personne ne va y acheter son pain... Enfin, évitons les caricatures sur les ABF. Le patrimoine est évolutif. Même le patrimoine historique, dont nous héritons, a déjà été partout transformé. Il conviendrait de préciser avec les ABF que leur rôle est de préserver le patrimoine, d'éviter les dégradations, et non de figer le développement des territoires.
Je salue à mon tour le travail des auteurs de ce texte et de notre rapporteur. Nous nous efforçons de rattraper une situation provoquée par un certain mode de développement. Pourtant, depuis des années, la sonnette d'alarme a été tirée. Quel gâchis ! J'ai beaucoup apprécié les auditions du groupe de travail. J'ai, en particulier, été frappé par la richesse des réflexions exprimées lors de l'audition des aménageurs.
Comment a-t-on pu en arriver là ? Nous sommes entrainés dans un mode de développement débridé. Si nous ne le reconnaissons pas, nous continuerons à bricoler pour rattraper la situation. Il en va de même pour l'agriculture et l'alimentation où le débat est ouvert. Serons-nous capables de reconnaître le gâchis, et de prendre en compte la situation de nos agriculteurs ainsi que de nos filières ?
Notre modèle est perfectible mais reconnaissons qu'aujourd'hui, plus personne ne meurt de faim en Europe...
Veut-on continuer dans la voie de cette agriculture industrielle ? Un état des lieux s'impose. On ne pourra revitaliser les centres-villes et les centres-bourgs dans les territoires ruraux qu'en revenant à une agriculture paysanne, centrée sur les territoires avoisinants, et en favorisant les filières de proximité. De même, les voyants sont au rouge pour la présence des services publics dans les centres-villes, mais ceux-ci continuent à fermer en raison de l'austérité. Sur tous ces points, la situation appelle des mesures urgentes.
Notre rapporteur a su respecter la volonté des auteurs de la proposition de loi et ce texte est attendu dans les territoires. Les présidents de l'AMF et de l'AMRF ont d'ailleurs exprimé leur satisfaction. Cette initiative qui porte sur l'aménagement du territoire doit dépasser les clivages partisans. Je formulerai cependant deux remarques.
La règle des 4 % sur le périmètre des OSER me semble un petit peu rigide, car les situations sont très diverses. Il me semble par ailleurs compliqué de mettre en oeuvre la taxe sur les livraisons. Je rappelle qu'en 2008, lors de l'adoption de la loi de modernisation de l'économie, nous avions fortement augmenté la taxe sur les surfaces commerciales (Tascom) et fléché 100 millions d'euros vers le Fisac. La Tascom rapporte aujourd'hui plus de 730 millions d'euros et si on l'applique aussi au e-commerce, elle rapportera plus d'un milliard d'euros. Ne serait-il pas possible de flécher à nouveau une partie de ce montant vers le Fisac pour remplacer la taxe sur les livraisons ? Je voudrais juste une précision sur un point précis : le e-commerce inclut-il ce que l'on appelait autrefois la vente par correspondance (La Redoute, etc.) ? Enfin, un mot sur l'article 12 qui concerne la transmission des commerces et des entreprises. La proposition de loi visant à moderniser la transmission d'entreprise, présentée par MM. Claude Nougein et Michel Vaspart, que vous avez évoquée, sera examinée en séance la semaine prochaine. Nous espérons que la plupart de ses préconisations seront retenues.
Cette proposition de loi va dans le bon sens, mais je crains qu'elle ne suffise pas à inverser la tendance tant les dynamiques à l'oeuvre sont lourdes. Je me limiterai à trois remarques. Veillons, tout d'abord, avec l'article 2, qui institue une agence nationale pour les centres-villes et les centres-bourgs, à ne pas créer une nouvelle « usine à gaz ». Ensuite, ne rendons pas obligatoire l'intégration des DAAC dans les SCOT : chacun sait à quel point il est difficile d'élaborer et de modifier ces documents. Enfin, je suis favorable à un amendement tendant à assouplir l'article 19 relatif à l'opposition du préfet à une autorisation d'exploitation.
Je voudrais réagir à l'intervention du groupe LaREM. Effectivement, ce texte ne réglera pas tous les problèmes, mais il s'agit d'un acte politique majeur. J'attends avec impatience de connaitre les intentions du Gouvernement à l'égard de tous les territoires qui ne sont pas des métropoles. Nous avons besoin d'un pacte national de reconnaissance et de développement des ruralités qui traite de l'économie. Je suis, comme Joël Labbé, inquiet des conséquences de la future politique agricole commune sur nos territoires. Or ce qui fait la vie des territoires et conditionne leur revitalisation est la présence humaine et l'activité. Le projet de loi ÉLAN définit 222 coeurs de villes, mais des dizaines de milliers de bourgs ou de petites communes sont concernés par la problématique de la revitalisation du commerce dans leur centre. Je suis inquiet pour le financement de ces opérations et je rappelle que plus de 20 000 communes ont vu leurs dotations diminuer. Il aurait fallu introduire une péréquation pour tenir compte des capacités contributives des communes. Enfin, j'observe que le patrimoine historique n'est pas proportionnel à la taille des villes : certaines petites communes ont des patrimoines historiques considérables qu'il faut protéger.
En l'état actuel des discussions à l'Assemblée nationale, le projet de loi ÉLAN ne me parait pas être l'alpha et l'oméga des politiques d'aménagement du territoire. Il mérite d'être amendé et renforcé, sans idéologie ni dogmatisme. Les propositions de la conférence de consensus du logement n'ont, pour la plupart, d'ailleurs pas été reprises par le Gouvernement. Le seul article qui concerne la revitalisation des centres-villes est particulièrement succinct et il y a matière à l'enrichir. En ma qualité de rapporteur, je m'efforcerai de reprendre toutes les mesures pragmatiques figurant dans cette proposition de loi ou qui seront proposées lors des débats.
L'horizon de la discussion en séance publique ne cesse d'ailleurs de reculer...
Le Gouvernement cherche des éléments de langage pour parler de la ruralité et peine à en trouver. Il avait là pourtant un beau sujet, mais je crains qu'il ne passe à côté. Les ORT proposées dans la loi ÉLAN participent d'une autre démarche que les opérations OSER. Le Gouvernement a sorti de son chapeau 222 villes, dans une démarche centralisatrice et qui aboutit à hiérarchiser des territoires : ce n'est pas ainsi que l'on doit concevoir l'aménagement du territoire. À l'inverse, les périmètres OSER sont ouverts à tous, dans le cadre d'une démarche qui fait confiance aux élus : c'est un changement de paradigme. Je soutiens la création d'une agence nationale, car les élus auront besoin d'un soutien d'ingénierie et financier pour mettre en oeuvre leurs projets. Il faudra veiller toutefois à ce qu'elle ait les moyens de fonctionner. Enfin, parmi les signataires des conventions OSER, il conviendrait aussi d'associer la région. En Occitanie, la région nous accompagne dans nos démarches et joue son rôle de cofinanceur.
Je tiens à saluer le travail des auteurs de ce texte et de nos rapporteurs. Je partage une grande partie de leurs analyses, mais je soutiens la position du groupe LaREM, qui est différente. Nous devons faire preuve d'humilité. Ne sommes-nous pas responsables de la situation ? N'est-ce pas les élus qui président les commissions d'urbanisme et délivrent les permis de construire ? Nous sommes donc collectivement responsables. L'action du Gouvernement et cette proposition de loi me semblent complémentaires. C'est un premier pas, mais attention au risque de spéculation : j'imagine que certains vont commencer à acheter des friches dans les centres-villes avec l'espoir de revendre dans quelques années ces immeubles avec de juteux profits grâce aux opérations que nous aurons financées...
Cette proposition de loi, bien conçue et pragmatique, est importante même si elle ne pourra évidemment pas résoudre toutes les difficultés. Ne ratons pas ce rendez-vous ! Le DAAC doit-il être prescriptif ? Souvent, alors que les élus ont mené des opérations volontaristes pour rénover le centre ancien, on voit fleurir en périphérie une myriade de petits points - une station-service ici, un dépôt de pain là -, autant de lieux ponctuels qui contribuent à diluer la centralité. Les élus n'ont pas la possibilité de bloquer ces initiatives à cause de la liberté du commerce. Or le DAAC le permettrait. Je comprends les inquiétudes exprimées sur l'articulation du DAAC et du SCOT. En même temps, le DAAC constitue un outil précieux.
Je constate aussi, avec inquiétude, la schizophrénie du Gouvernement qui, d'un côté, met en avant les élus, veut augmenter leur pouvoir, revoir la composition de la CDAC, et, simultanément, donne un pouvoir arbitral exorbitant au préfet, qui présidera la CDAC avec droit de vote, et deviendra, de fait, juge et partie. Il faudra y réfléchir.
Madame Lamure, un de mes amendements répond à votre remarque en ce qu'il assouplit la règle des 4 % pour les communes de moins de 10 000 habitants. Par ailleurs, pour répondre à votre interrogation, le secteur de la vente par correspondance est inclus dans le e-commerce, ce qui est logique. Je comprends les interrogations sur le DAAC, mais ce document est très utile, car il permet de définir les zones de développement économique ou artisanal. Enfin, je propose d'enlever au préfet son pouvoir de veto contre une décision votée unanimement par la CDAC.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
Mon amendement COM-8 donne un socle législatif à la revitalisation des centres-villes.
Existe-t-il une définition du bourg ? Je vois bien ce qu'est une ville, mais jusqu'où descend-on dans le nombre d'habitants ? J'ai peur que quantité de communes ne soient exclues.
Vous avez raison ; j'étais maire d'une ville de 10 000 habitants ; un Parisien de passage m'a un jour félicité pour mon joli village, mais, pour un Aveyronnais en vacances, il s'agissait d'une ville !
Il ne faudrait pas que des communes soient exclues par une définition juridique.
En région Occitanie, un programme de revitalisation a ciblé les villes de plus de 1 500 habitants. Cela a exclu des communes comme la mienne, qui ne compte que 720 habitants l'hiver, mais qui constitue néanmoins un pôle de centralité, avec un médecin, une pharmacie, et bien plus d'habitants l'été. La région a élargi le programme aux anciens chefs-lieux de canton, mais cela ne suffit pas.
C'est tout ce que nous détestons au Sénat : des seuils qui excluent et ne permettent pas de tenir compte des spécificités locales. Mais rassurez-vous, dans ce texte, il n'y a pas de définition, donc pas d'exclusion.
L'amendement COM-8 est adopté.
Mon amendement COM-9 prend en compte explicitement l'artisanat.
L'amendement COM-9 est adopté.
Mon amendement COM-10, quant à lui, prend en compte l'artisanat commercial : boulangeries, charcuteries et pâtisseries...
L'amendement COM-10 est adopté.
Mon amendement COM-11 est celui qui pourrait répondre à la question d'Élisabeth Lamure concernant l'extension du périmètre OSER. Les petites communes ont souvent un habitat disséminé, avec un centre-bourg très petit. En gardant pour ces communes le principe de 4 % de la partie agglomérée, on risque d'obtenir la surface de l'école ou de l'église ! Je propose donc d'autoriser cette extension pour les communes de moins de 10 000 habitants ; mais je suis ouvert au débat : on peut imaginer un seuil à 5 000 habitants. Il est vrai qu'il existe aussi des villages-rues, avec un centre étalé.
Le seuil de 10 000 habitants dans l'objet de l'amendement me pose problème : dans bien des départements, c'est énorme !
Je salue les efforts du rapporteur, mais je serais plutôt favorable à laisser toute liberté aux élus pour définir le périmètre.
Comme ce périmètre entraîne le bénéfice de dispositifs fiscaux, nous devons le restreindre à de petits territoires, sinon, notre texte sera retoqué. Il faut éviter qu'un maire ne choisisse de faire entrer 70 % du territoire de sa commune dans le périmètre OSER.
Je suis d'accord avec Élisabeth Lamure. L'opération ne réussira que si le périmètre concerne bel et bien un espace de centralité ; c'est ce que dit le texte : la pharmacie, la boulangerie et quelques activités artisanales...
Mais si nous ne votons pas cet amendement, nous conservons 4 % pour toutes les communes.
Je propose que nous adoptions l'amendement en l'état, quitte à ce que le rapporteur améliore encore le dispositif en séance.
L'amendement COM-11 est adopté.
L'article semble un peu réducteur en ne prévoyant de signatures, pour les conventions OSER, que des communes, des EPCI et de l'empêcheur de tourner en rond - j'ai nommé le préfet ! L'amendement COM-3 ajoute les départements, mais on pourrait aussi ajouter les régions, qui apportent des financements.
Avec le transfert de compétences en matière économique, il faut certainement inclure les régions...
En tout cas, si vous intégrez les départements, il faut aussi inclure les régions.
Il faut les deux. Les départements sont les principaux financeurs des DETR, mais les régions sont chargées de l'action économique.
N'oublions pas que nous sommes en train de définir les Schémas régionaux d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET). Il faut intégrer les régions.
Le département accompagne financièrement les projets, mais c'est à la région qu'a été confié l'aménagement du territoire.
Nous pouvons donc modifier l'amendement en y intégrant la région : l'amendement remplacerait le mot « D' » par les mots « Les départements, les régions et ».
D'accord !
L'amendement COM-3, ainsi rectifié, est adopté, ainsi que l'amendement de conséquence COM-12.
L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 2
L'article 2 est adopté sans modification.
Article 3
L'article 3 a été délégué à la commission des finances.
L'examen de l'article est réservé.
Article 4
L'article 4 est adopté sans modification.
Article 5
Il faudrait le modifier par un sous-amendement de cohérence, incluant, là encore, la région, responsable de l'élaboration du SRADDET.
Je ne suis pas sûr que ce dernier soit bien nommé dans l'amendement : il me semble que la loi parle de « services au public », et non de « services publics ».
Nous votons donc sur un amendement modifié : « Ces informations sont également transmises au Département et à la Région » - cela résout aussi le problème soulevé par notre collègue Franck Montaugé.
Soit !
L'amendement COM-4, ainsi rectifié, est adopté.
L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 6
L'article 6 est adopté sans modification.
Article 7
L'amendement COM-2 de M. Leleux, au nom de la commission de la culture, a déjà suscité beaucoup de débats. J'y suis favorable et, par conséquent, je suis défavorable aux trois sous-amendements qui le concernent.
Le sous-amendement COM-5 n'est pas adopté, non plus que le sous-amendement COM-6 et le sous-amendement COM-7. L'amendement COM-2 est adopté.
L'article 7 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 8
L'amendement COM-13 élargit le Fisac, dont les 12 millions d'euros doivent financer la revitalisation, en autorisant les communes qui n'ont pas de périmètre OSER à en bénéficier.
C'est cela ; mais cela ne nous empêche pas de souhaiter qu'il augmente.
Lors de l'examen du dernier projet de loi de finances, le Sénat avait adopté à l'unanimité une augmentation du Fisac à hauteur de 200 millions d'euros ...
L'Assemblée nationale est revenue sur ce point, et il se retrouve à 12 millions d'euros...
L'amendement COM-13 est adopté.
L'article 8 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 9
L'article 8 a été délégué à la commission des finances.
L'examen de l'article est réservé.
Article 10
L'article 10 est adopté sans modification.
Article 11
L'article 11 est adopté sans modification.
Article 12
L'article 12 a été délégué à la commission des finances.
L'examen de l'article est réservé.
Article 13
Certaines villes ont des agences du commerce. Il serait intéressant que la CDAC puisse entendre leurs représentants, comme le prévoit l'amendement COM-14.
L'amendement COM-15 vise à supprimer la présence à la CDAC des membres désignés par la chambre de commerce et d'industrie, par la chambre de métiers et de l'artisanat et par la chambre d'agriculture. Cela n'empêchera nullement de les consulter.
Je ne suis pas d'accord : ils ne pourront pas voter et ne seront donc pas respectés. Or il existe bien des exemples récents où l'on est entendu sans être respecté...
Nous pourrions imaginer que les chambres consulaires soient représentées à la commission, mais sans droit de vote, si c'est cela qui pose problème du point de vue de la directive européenne.
Il faut au moins que les chambres de commerce et d'industrie soient présentes : ce sont tout de même elles qui représentent le commerce.
Il faut garder tous ces hommes et ces femmes qui font l'économie, sans distinction.
Ce qui a motivé mon amendement, c'est que le droit européen interdit d'être à la fois juge et partie : c'est ce qui explique qu'ils ne soient plus membres de la CDAC depuis 2008.
Si cela pose un problème juridique, qu'ils soient membres sans droit de vote ! Cela semble cohérent avec ce que l'on a dit des préfets.
Nous étions pour le retour des chambres consulaires, qui font preuve d'une connaissance extraordinaire des territoires. La directive Services de 2006 l'interdirait ? On nous avait aussi dit qu'une directive européenne nous forçait à plafonner à 1 000 mètres carrés, et nous apprenons finalement que nous aurions pu nous limiter à 500 mètres carrés !
Pour mettre tout le monde d'accord, je retire mon amendement.
L'amendement COM-15 est retiré.
L'article 13 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 14
L'article 14 est adopté sans modification.
Article 15
L'article 15 est adopté sans modification.
Article 16
L'article 16 est adopté sans modification.
Article 17
L'article 17 est adopté sans modification.
Article 18
Article 19
L'amendement COM-17 tend à supprimer le pouvoir d'opposition du préfet à une décision de la CDAC. En échange, on lui donnerait un droit de vote à la CDAC.
Dans certains territoires, on assiste à un glissement du préfet vers le gouverneur !
Je suis pour un État qui joue son rôle, qui défende l'intérêt général ; mais nous créons parfois dans la loi des bâtons pour nous faire battre dans nos territoires...
Enlevons le droit de vote.
L'amendement COM-17 est adopté, sous réserve de rectification.
L'article 19 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 20
L'amendement rédactionnel COM-18 est adopté.
L'article 20 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.
Article 21
L'amendement COM-20 prévoit de conditionner l'extension au-delà des communes ou EPCI signataires d'une convention OSER au recueil de l'avis des communes et des EPCI à fiscalité propre concernés.
Quel EPCI ne prendrait pas la mesure de l'impact de ses décisions sur ses voisins ? Nous passons notre temps à dire que la loi est trop bavarde et « en même temps », nous remettons systématiquement deux, cinq, dix couches... Supprimons plutôt l'article !
Article 22
L'article 22 rend obligatoires les DAAC dans les SCOT : cela prive les élus locaux de leurs prérogatives. Les SCOT sont élaborés en totalité par les élus, parmi lesquels les élus des villes peuvent avoir un poids suffisant pour imposer leur point de vue. Gardons le DAAC optionnel et supprimons l'article.
S'il n'y a pas de projet d'aménagement commercial, on continuera à faire trop souvent n'importe quoi. Ce projet est fait par les élus : il est normal qu'il s'impose à tous, une fois qu'il est voté. En Allemagne, lorsque les stratégies ont été fixées, il est impossible d'y déroger. Le DAAC doit devenir prescriptif.
Retravaillons cet article d'ici à la séance publique: je suis d'accord avec Martial Bourquin, mais on peut entendre les craintes de déséquilibre entre grandes communes, d'une part, et communes périurbaines et rurales, d'autre part. Ne soyons pas naïfs !
Je partage ce propos. N'affaiblissons pas le texte que nous sommes en train de voter.
Attention : tous les territoires n'ont pas de SCOT. Nous devons aussi intégrer ceux qui ont un Plan local d'urbanisme intercommunal (PLUI).
C'est un vrai problème : tout le monde n'a pas de SCOT. Mais il faut une vraie planification.
La CDAC peut ouvrir des grandes surfaces n'importe où !
L'article 22 est adopté sans modification.
Article 23
L'article 23 est adopté sans modification.
Article 24
L'article 24 est adopté sans modification.
Article 25
L'article 25 est adopté sans modification.
Articles 26 à 31
L'ensemble des autres articles ayant été délégués, nous les mettrons aux voix ainsi que l'ensemble de la proposition de loi lorsqu'ils auront été examinés par la commission des finances.
Le vote sur la proposition de loi est réservé.
Il y a deux ans, nous avons autorisé le Gouvernement à réformer par ordonnance Action Logement. C'est l'objet de la loi du 1er juin 2016 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures relevant du domaine de la loi pour simplifier et rationaliser l'organisation de la collecte de la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) et la distribution des emplois de cette participation. La ratification des deux ordonnances attendues étant inscrite à l'article 31 du projet de loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (ÉLAN), il nous semblait important d'examiner la mise en oeuvre de cette réforme préalablement.
La première ordonnance procède à la réorganisation d'Action Logement. Elle a été prise dans un délai de quatre mois et demi, alors que huit mois étaient prévus. Je rappelle que le délai moyen pris par le Gouvernement pour déposer une ordonnance dans ce délai d'habilitation est de 6,6 mois. Cette adoption rapide de l'ordonnance s'explique par la volonté des partenaires sociaux de voir la réforme entrer en vigueur le 1erjanvier 2017.
Cette ordonnance simplifie l'organisation d'Action Logement en remplaçant l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) et les 21 collecteurs interprofessionnels du logement (CIL) par trois entités : Action Logement Groupe, association loi 1901, dont les membres sont des représentants des employeurs et des salariés, structure faîtière chargée de conclure la convention quinquennale et de fixer les orientations stratégiques du groupe ; Action Logement Services (ALS), chargé d'assurer la collecte de la PEEC, de distribuer les emplois de la PEEC, de mener des concertations pour évaluer les besoins territoriaux - il est réputé agréé en qualité de société de financement - et Action Logement Immobilier (ALI) chargé de gérer les participations.
L'ordonnance précise les règles de fonctionnement de ces différentes entités et les principes qui leur sont applicables, notamment le respect du principe de non-discrimination entre les bailleurs sociaux. S'agissant de son organisation territoriale, Action Logement a mis en place douze comités régionaux (CRAL), répartis en fonction des nouvelles régions, et cinq comités territoriaux en outre-mer. Il convient de noter que ces CRAL n'ont pas d'existence sur le plan législatif, mais sont mentionnés dans la convention quinquennale État-Action Logement.
L'ordonnance prévoit la mise en place d'un comité des partenaires du logement social chargé d'émettre des avis sur les orientations applicables aux emplois de la PEEC en matière de construction, de réhabilitation et d'acquisition des logements sociaux et au suivi de la distribution de ces emplois. Ce comité doit comprendre des représentants du groupe Action Logement, des représentants des bailleurs sociaux et des collectivités territoriales. Or ce comité, censé jouer un rôle de vigie quant aux orientations et à la distribution de la PEEC entre les organismes et entre les territoires, n'a toujours pas été mis en place plus d'un an après la mise en oeuvre de la réforme, faute d'adoption des décrets relatifs à sa composition et à son fonctionnement.
Selon la Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP), les modalités de désignation des membres du comité doivent faire l'objet d'un décret simple et les autres mesures réglementaires d'un décret en Conseil d'État. Ces deux décrets ne pouvant être disjoints, il a été décidé d'insérer l'ensemble de ces dispositions dans le projet de décret en Conseil d'État. Ces dispositions auraient toutefois été concertées avec l'ensemble des parties prenantes fin 2017.
Selon Action Logement, le projet de décret prévoirait que le comité comprend trois collèges de cinq membres désignés pour trois ans : un pour Action Logement, un pour les collectivités territoriales et un pour les bailleurs sociaux. Le nombre de membres par collège a, semble-t-il, donné lieu à discussion et ce nombre pourrait être porté in fine à huit membres.
La seconde ordonnance du 19 janvier 2017 modifie les objets de l'Association pour l'accès aux garanties locatives (APAGL) et de l'Association Foncière Logement (AFL). Elle a été prise dans le délai de 7,5 mois. Ces deux entités n'ont pas été intégrées dans le groupe Action Logement, mais l'article 31 du projet de loi ÉLAN prévoit de procéder à ce rattachement.
Après cette présentation rapide, j'en viens maintenant aux premiers effets de la réforme. Celle-ci devait notamment mettre fin à une concurrence inutile et coûteuse entre les collecteurs, baisser les coûts de fonctionnement grâce à la centralisation de la collecte, permettre la mise en place d'un meilleur service aux entreprises et aux salariés et donner à Action Logement une meilleure visibilité dans les territoires.
S'agissant de la diminution des coûts de gestion, la convention quinquennale 2018-2022 fixe un objectif de réduction des frais de fonctionnement des entités d'Action Logement de 10 % sur la durée de la convention. La nouvelle organisation d'Action Logement a permis de diminuer le nombre d'emplois au sein du groupe, sans qu'il soit procédé à un plan social, en raison du reclassement de certains salariés dans les entreprises sociales pour l'habitat du groupe.
Néanmoins, la réforme induit dans un premier temps des coûts supplémentaires, résultant, par exemple, du recrutement de personnel qualifié pour assurer la mise en oeuvre des exigences réglementaires découlant de l'agrément d'Action Logement Services comme société de financement ou encore de la nécessité d'entretenir 21 systèmes de gestion informatique différents - qui correspondaient aux 21 CIL - le temps qu'un service unique soit mis en place. Toutes les rémunérations n'étaient pas du même niveau, et les harmonisations se font rarement à la baisse...
Lors des débats, les organismes d'HLM avaient fait part de plusieurs sujets d'inquiétude concernant la distribution de la PEEC aux bailleurs sociaux et la possibilité pour Action Logement d'utiliser la collecte de la PEEC pour acquérir des titres dans des organismes d'HLM.
Des règles spécifiques pour garantir l'absence de discrimination entre les filiales d'Action Logement et les autres organismes de logement social ont été édictées : le principe de non-discrimination a été inscrit dans le code de la construction et de l'habitation et des dispositifs de contrôle du respect de ce principe en amont et en aval de la décision de distribution des fonds ont été instaurés.
En amont, il revient à Action Logement Groupe de veiller à ce qu'Action Logement Services respecte ce principe de non-discrimination dans la distribution des emplois de la PEEC. Les commissaires du gouvernement peuvent exercer conjointement leur droit de veto sur une délibération qui ne respecterait pas ce principe. Peut-être aurait-on pu envisager un droit de veto individuel : obtenir un veto de tous les commissaires du gouvernement sera difficile. Enfin, le comité des partenaires dans lequel siègent des représentants des bailleurs sociaux est juridiquement chargé d'émettre un avis sur les orientations applicables au suivi de la distribution de ces emplois dans le respect du principe de non-discrimination. Je regrette que ce comité des partenaires n'ait pas encore été mis en oeuvre.
En aval de la décision, il reviendra à l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS) de contrôler la mise en oeuvre du principe de non-discrimination. Son rapport sur cette première année de fonctionnement ne sera disponible qu'à la fin de cette année.
Je me suis interrogée sur les conséquences de l'agrément d'Action Logement Services comme société de financement. En raison de son nouveau statut, il devra détenir des fonds propres, dont le montant sera fonction de son niveau de risque. Je ne vous cache pas mes craintes qu'ALS soit plus exigeant dans le choix des bailleurs bénéficiaires de la PEEC, alors même que ces derniers sont pour un certain nombre dans une situation financière difficile en raison de l'application de la réduction de loyer de solidarité (RLS). Il ne faudrait pas que ces nouvelles règles conduisent à ne pas distribuer entièrement la PEEC - il y a un risque : les exigences seront les mêmes que pour la Caisse des dépôts et consignations. Action Logement s'est voulu rassurant. Il nous faudra être extrêmement attentifs à l'impact de ces nouvelles règles, surtout dans le contexte actuel de restructuration du secteur social.
S'agissant de la possibilité d'utiliser la PEEC pour acquérir des titres dans des sociétés d'HLM, l'ordonnance a inscrit dans le code le principe de distribution maîtrisée des dotations en fonds propres et édicté des mesures permettant à l'État de contrôler la distribution des fonds.
En pratique, aucune acquisition de titres au cours de l'exercice de 2017 n'a eu lieu. Par ailleurs, dans le contexte de réorganisation du secteur social, Action Logement a rappelé qu'il « n'avait pas vocation à utiliser les fonds disponibles pour acquérir le patrimoine existant d'opérateurs de logements sociaux externes, ou dans lesquels il détient une participation très minoritaire ».
Nous nous étions longuement interrogés sur l'impact de la réforme d'Action Logement sur la redistribution territoriale de la PEEC. L'ordonnance pose le principe d'un déploiement territorial de l'action du groupe Action Logement.
Chaque région comprend un CRAL composé de vingt membres représentant à parité les organisations d'employeurs et de salariés, qui ne peuvent siéger dans les conseils d'administration d'Action Logement Groupe, d'ALS et d'ALI. Chaque CRAL se réunit au minimum six fois par an.
Le CRAL a notamment pour missions de représenter politiquement Action Logement au niveau territorial, de recueillir et faire la synthèse des besoins des entreprises et des salariés, de conclure des conventions-cadres de territoires pluriannuelles et de veiller à la distribution équitable des produits et services proposés par Action Logement.
Alors même qu'une centaine de conventions ont été conclues avec les collectivités territoriales, les CRAL n'en sont pas tous au même stade de mise en oeuvre de leur politique de partenariat avec les élus locaux. Les personnes que j'ai entendues ont regretté de ne pas être plus associées aux travaux des CRAL et que les discussions entre Action Logement et les acteurs du secteur social se fassent en « tuyaux d'orgue », sans débat conjoint ni regards croisés.
S'agissant de la distribution de la PEEC entre les territoires, les CRAL ont élaboré des plans régionaux d'orientation et d'action qui ont permis, sur la base de l'analyse du besoin des territoires, de proposer la répartition de l'enveloppe de la PEEC.
Chaque CRAL dispose de crédits d'ingénierie mobilisable pour accompagner les territoires dans l'identification de leurs besoins locaux, de poser des diagnostics ou encore d'étudier des projets. Trois millions d'euros par an y sont dédiés.
S'agissant des crédits de financement des opérations, le cadrage des enveloppes se fait au niveau régional sur proposition des CRAL, le contenu des enveloppes régionales faisant l'objet d'une validation par Action Logement Services. Les membres des CRAL attribuent les financements sur chaque opération dans le périmètre de leur région.
Ici encore, je ne peux que regretter que le comité des partenaires censé assurer le suivi de la distribution de la PEEC au niveau territorial ne soit pas mis en place. Je souhaite que l'ANCOLS se penche attentivement sur la répartition territoriale de la PEEC.
Merci de ce rapport précis, mais un peu effrayant : bien des choses traînent...
Tous les décrets qui permettent de fonctionner ont été pris. Le seul qui n'ait pas été pris, c'est celui qui donne un droit de regard aux élus...
Lors des débats en séance publique sur le contrôle annuel de l'application des lois le 5 juin, puis lors de l'examen du projet de loi ÉLAN, nous pourrons le signaler.
Je vous propose de donner acte de cette communication dont le contenu sera publié dans le rapport annuel sur le contrôle de l'application des lois, rédigé cette année par Valérie Létard.
Il en est ainsi décidé.
La réunion est close à 12 h 25.