Mes chers collègues, nous auditionnons aujourd'hui Mme Isabelle Lonvis-Rome, ministre déléguée chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances.
Madame la Ministre, je vous souhaite la bienvenue à la délégation aux droits des femmes du Sénat, qui vous entend pour la première fois depuis la formation du gouvernement d'Élisabeth Borne.
Votre nomination au Gouvernement a suscité au sein de notre délégation beaucoup d'enthousiasme : je ne doute pas que nous trouverons en vous une interlocutrice engagée et disponible pour défendre à nos côtés les droits des femmes. Votre parcours et vos engagements passés sont en effet la preuve de votre dévouement ancien à cette cause, notamment en tant que magistrate très investie dans la lutte contre les violences faites aux femmes, et en tant que haute fonctionnaire chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes au sein du ministère de la justice.
Vous aviez d'ailleurs été nommée, dans le cadre du Grenelle des violences conjugales, par la garde des Sceaux de l'époque, Nicole Belloubet, pilote des actions de lutte contre les violences faites aux femmes et êtes à l'origine de nombreuses propositions prônant une approche et un traitement particuliers de ces violences.
Sans constituer à proprement parler une présentation de votre « feuille de route » officielle puisqu'elle est toujours en cours d'élaboration, notre audition d'aujourd'hui doit être l'occasion pour vous de nous présenter les grands axes et les priorités de votre action de ministre chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes.
En matière de lutte contre les féminicides notamment, quel bilan tirez-vous, près de trois ans après les annonces gouvernementales, de l'application des mesures du Grenelle de lutte contre les violences faites aux femmes ?
Le nombre de féminicides recensés en 2021 était de 113, contre 103 en 2020. Le décompte au 16 juillet 2022, réalisé par les associations, fait état de 59 femmes tuées par leur compagnon ou ex-compagnon.
Si des mesures concrètes ont été mises en oeuvre (distribution de téléphones grave danger et de bracelets anti-rapprochement, ordonnances de protection, places d'hébergement pour les femmes victimes...), les statistiques concernant le nombre de femmes tuées dans le cadre de violences conjugales ne faiblissent malheureusement pas. Doit-on y voir un échec de ces mesures ? Un défaut d'ambition dans leur conception et leur application ?
On pense bien évidemment à l'exemple espagnol que vous citez d'ailleurs, Madame la Ministre, dans votre livre intitulé Liberté, égalité, survie, publié en 2020. L'Espagne a pris ce phénomène à bras le corps et a fait de la lutte contre les violences faites aux femmes une priorité politique et budgétaire. Comme vous l'indiquez dans votre ouvrage : « L'Espagne a bâti une politique ambitieuse de lutte contre les violences de genre, objet depuis 2017, d'un pacte d'État, voté à l'unanimité par les deux assemblées parlementaires, avec plus de 200 mesures à décliner pendant 5 ans. »
Comment la France pourrait-elle s'inspirer du modèle espagnol selon vous ?
La situation des enfants exposés aux violences intrafamiliales, eux-mêmes victimes directes ou indirectes, nous préoccupe également particulièrement au sein de la délégation : comment les protéger plus efficacement ? Comment les prendre en charge lorsqu'ils ont été témoins de l'irréparable ? Comment reconnaître pleinement leur statut de victimes de violences conjugales ? Il faut, une fois pour toutes et quelles que soient les circonstances, placer l'intérêt de l'enfant au-dessus du principe de coparentalité, de l'exercice de l'autorité parentale et des droits de visite et d'hébergement par le parent violent.
Une proposition de loi en ce sens avait été déposée par nos collègues députés sous la précédente législature : quel avenir pourra lui être réservé sous la présente mandature ?
Autre sujet d'actualité : le droit à l'IVG et son éventuelle inscription dans la Constitution. Madame la Ministre, vous avez récemment déclaré : « Nous savons que la Cour Suprême des États-Unis a privé le droit à l'avortement de cette protection constitutionnelle. (...) Il faut vraiment que nous mettions le verrou de la Constitution pour garantir le droit fondamental des femmes à disposer de leur corps. »
Concrètement, le Gouvernement est-il prêt à déposer un projet de loi constitutionnelle en ce sens ? Soutenez-vous la demande du Parlement européen d'inscription de l'IVG dans la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ?
Enfin, permettez-moi de vous exposer brièvement les sujets d'actualité de notre délégation qui vous feront peut-être réagir.
Nous avons beaucoup travaillé sur la situation des femmes dans les territoires ruraux et avons présenté en début de session un rapport intitulé Femmes et ruralités : en finir avec les zones blanches de l'égalité, dont vous avez pu prendre connaissance. Ce travail de plusieurs mois, mené en commun par huit co-rapporteurs représentant tous les groupes politiques du Sénat, a permis de montrer que les inégalités entre les femmes et les hommes sont décuplées dans les territoires ruraux et se cumulent avec les inégalités territoriales.
Nous avons également consacré nos travaux cette année à l'industrie de la pornographie et présenterons notre rapport sur ce thème fin septembre. Notre constat sur les violences envers les femmes générées par cette industrie est alarmant et nous oblige à imposer dans le débat public la question de la lutte contre les violences pornographiques.
Enfin, nous avons également publié un rapport sur le bilan d'application des dix ans de la loi Sauvadet imposant des obligations paritaires dans la haute fonction publique.
Madame la Ministre, je vous laisse la parole, et proposerai ensuite à mes collègues d'intervenir.
ministre déléguée auprès de la Première ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes, de la diversité et de l'égalité des chances. - Madame la Présidente, chère Annick, Mesdames les Sénatrices, Messieurs les Sénateurs, je me réjouis de m'exprimer face à vous aujourd'hui pour la première fois - comme vous l'avez souligné Madame la Présidente - depuis ma prise de fonction à ce ministère que j'aime bien qualifier de « ministère de combat », tant les droits des femmes ne sont jamais acquis, tant ils demeurent fragiles et méritent toute notre vigilance, toute notre attention et toutes nos forces.
J'avais déjà pu l'observer lors de mes précédentes fonctions de magistrate et de haute fonctionnaire à l'égalité du ministère de la justice : je connais l'importance et la qualité des travaux de votre délégation.
Si, comme vous l'avez rappelé, ma feuille de route n'est pas encore totalement arrêtée, cette première rencontre est l'occasion à la fois de vous écouter et de nouer un premier dialogue.
À travers mes propos liminaires, je reviendrai sur le bilan de ces cinq dernières années et vous présenterai ma méthode ainsi que les grands axes sur lesquels je compte travailler avec vous.
Vous l'avez rappelé, Madame la Présidente, dans votre introduction : bien qu'il enregistre une tendance baissière depuis 2020, le nombre de féminicides reste à un niveau trop élevé.
Ce chiffre reste morbide et doit chuter, c'est l'objet de tout notre combat.
Trop longtemps ignorées, les violences faites aux femmes viennent de loin et demeurent encore la face sombre de notre société. Néanmoins au cours de ces cinq dernières années, un véritable décillement et une révolution culturelle se sont opérés.
Il faut rappeler la forte mobilisation sociale et sociétale autour des violences faites aux femmes et des violences conjugales, qui a provoqué aussi une forte mobilisation politique avec l'organisation du Grenelle des violences conjugales en 2019, des lois nouvelles, des dispositifs nouveaux. On voit bien que, comme souvent dans l'Histoire, des droits des femmes notamment, la prise de conscience sociétale précède la prise de conscience politique et, ensuite, viennent toutes les mesures qui en découlent.
En toile de fond, c'est une révolution culturelle qui s'accomplit sous nos yeux, y compris dans les pratiques des différents professionnels qui doivent mettre en place ces mesures. Il me semble aussi que les victimes parlent davantage et que la société les écoute enfin.
Mais le chemin vers l'éradication de ces violences reste encore long. Nous sommes cependant, je le crois, devenus intolérants face à cet intolérable. Ce combat contre les violences faites aux femmes est un combat éminemment républicain ; il nécessite une exigence de tous les instants et transcende les clivages partisans.
Il me semble que le bilan du Gouvernement et de la majorité parlementaire en la matière est solide.
Du Grenelle des violences conjugales que vous avez évoqué, ont découlé quatre lois et 54 mesures, dont 46 ont été mises en oeuvre à ce jour. Au sein de ces 54 mesures sont incluses les huit mesures qui ont été ajoutées à la suite du féminicide de Mérignac en juillet 2021, et qui mettent donc un peu plus de temps à être mises en oeuvre.
Un enjeu érigé en priorité par le Président de la République et qui, dans la pratique, a mobilisé - comme vous le savez - tous les ministères puisqu'il touche tous les domaines de la vie quotidienne. Je précise que j'ai réuni, le 11 juillet dernier, un comité de suivi des mesures du Grenelle des violences conjugales avec l'ensemble des directions représentant les différents ministères pour vérifier l'état d'avancement des mesures. Je me propose, si vous en êtes d'accord, de vous en faire une restitution détaillée quasiment mesure par mesure au mois de septembre, sous le format qui vous conviendra.
Mieux protéger les victimes, c'est d'abord mieux accueillir leur parole.
157 000 policiers et gendarmes ont ainsi reçu une formation pour un meilleur accueil et accompagnement des victimes. Lors de leur formation initiale, 100 % des élèves policiers et gendarmes ont été formés à cette question.
En parallèle, depuis le Grenelle, 417 intervenants sociaux en commissariats et gendarmeries ont été recrutés, dont quarante dans les territoires ultramarins.
Il s'agit désormais d'une priorité pour nos forces de l'ordre.
Comme l'a indiqué le ministre de l'intérieur le 1er août 2021, les plaintes pour violences conjugales doivent être traitées en priorité et avec toute la spécificité que requiert ce type de délit ou crime.
Il s'agit d'un véritable changement culturel et d'une nécessité absolue pour favoriser à la fois la libération de la parole des victimes et la sanction des auteurs.
Par ailleurs, le contrôle de la détention et de l'acquisition des armes a également été renforcé dans le cadre du projet de loi responsabilité pénale et sécurité intérieure.
Dans ce sillon, la France a été, en 2018, le premier pays au monde à verbaliser le harcèlement de rue en créant l'infraction d'« outrage sexiste ».
Conformément aux engagements pris par le Président de la République à Nice le 10 janvier dernier, nous veillerons, avec le ministre de l'intérieur, à doubler la présence policière dans les transports en commun, ainsi qu'à tripler l'amende pour harcèlement de rue.
Mieux protéger les victimes, c'est aussi déployer les dispositifs assurant leur sécurité.
Sous l'impulsion du garde des Sceaux, nous avons vu un véritable essor de tous les dispositifs de protection. J'évoquerai ainsi l'ordonnance de protection, cette mesure civile que peut prendre un juge aux affaires familiales, qui permet de prononcer l'éloignement du conjoint violent et, dans le même temps, d'organiser la vie de la famille.
3 554 ordonnances de protection ont été délivrées en 2021 (contre 1 308 en 2017). Il est intéressant de constater que le taux d'acceptation des demandes augmente, ce qui démontre une plus grande maîtrise de ce dispositif par les différents professionnels, tant les juges aux affaires familiales que les barreaux et les associations. Les requêtes sont sans doute mieux formulées et donnent lieu à davantage de réponses positives. En 2021, le taux d'acceptation atteignait 67,8 %. À date, il est de 71,7 %.
S'agissant des téléphones grave danger (TGD) - un dispositif qui a fait ses preuves - il y a eu en 2021 plus de 1 600 interventions des forces de l'ordre, ce qui correspond à autant d'agressions évitées. Le nombre de téléphones a explosé depuis 2017 puisqu'aujourd'hui 4 076 téléphones sont déployés et disponibles sur l'ensemble du territoire, dont 3 211 attribués. Je rappelle qu'en 2019, avant le début du Grenelle, nous avions 300 téléphones attribués. L'objectif est d'atteindre le déploiement de 5 000 TGD d'ici la fin 2022.
Protéger la victime, c'est aussi prévenir la récidive des auteurs. Il est donc indispensable de prendre en charge cette violence : il n'y a pas de protection efficace des victimes sans prévention de la récidive et prévenir la récidive, c'est prendre en charge la violence des auteurs. Présidente de cour d'assises, j'ai vu de trop nombreux accusés comparaître avec des casiers judiciaires qui comportaient déjà des condamnations pour des violences sur des compagnes précédentes, ce qui démontre qu'il existe un problème de violence intrinsèque à ces personnes dangereuses. Il faut donc traiter cette violence.
C'est dans cet esprit qu'ont été mis en place depuis 2020 trente centres de prise en charge des auteurs de violences sur tout le territoire - dans l'Hexagone et en outre-mer - afin de lutter contre la récidive et de prévenir le passage à l'acte. 6 016 personnes ont été reçues dans ces centres de prise en charge.
Notre arsenal législatif s'est également renforcé grâce au concours du Parlement.
Je pense notamment à la proposition de loi que vous avez portée, Madame la Présidente, qui s'est traduite par un allongement du délai de prescription des crimes sexuels sur mineurs, passé de vingt à trente ans, ainsi que par l'instauration d'une présomption de non-consentement pour les mineurs de moins de 15 ans.
À la suite de l'engagement du Président de la République au cours de la campagne présidentielle, avec le garde des Sceaux, nous travaillerons au développement d'une justice spécialisée dans le traitement des violences intrafamiliales.
Mieux protéger les victimes, c'est aussi les mettre à l'abri, parfois dans l'urgence absolue.
Afin de mettre à l'abri les victimes de violences, le Gouvernement a ouvert 1 000 places d'hébergement d'urgence dédiées en 2020 et 1 000 supplémentaires en 2021, avec une revalorisation de 30 % du coût des places en 2021 pour permettre un meilleur accompagnement. En effet, il avait souvent été souligné que les femmes se retrouvaient parfois dans des foyers mixtes où pouvaient être présents des hommes peu fréquentables. C'est pourquoi un effort a été accompli afin d'éviter cela, afin d'accueillir plus souvent les enfants de ces femmes et de mieux les accompagner sur le plan social et psychologique.
2 000 places seront à nouveau créées cette année. Le parc total, doté de 9 038 places aujourd'hui, a ainsi augmenté de 80 % depuis 2017. Il s'agit d'une hausse sans précédent.
Avec le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, je travaillerai à renforcer la répartition territoriale de ces places dans l'Hexagone - j'ai conscience que la répartition n'est pas encore équitable en métropole - et en outre-mer.
Je travaillerai aussi à mieux coordonner les acteurs qui oeuvrent pour prendre en charge les femmes qui ont quitté leur domicile afin qu'elles puissent reprendre une « vie normale ». Je souhaite vraiment ouvrir ce chantier et y travailler. Lorsqu'une femme obtient une mesure de protection, il est nécessaire que la vie lui soit facilitée, que son autonomie soit favorisée par un accompagnement plus resserré sur le plan social.
Mieux protéger les victimes, c'est également leur offrir des structures d'accueil dédiées. À l'instar de La Maison des femmes de Saint-Denis, de nombreuses structures travaillant de manière holistique ont vu le jour ces dernières années. Sous un même toit, elles permettent aux victimes de bénéficier de l'expertise d'une palette de professionnels qui les accompagnent du soin physique et psychologique à la réinsertion professionnelle. C'est encore un chantier important. Avec le ministre de la santé et de la prévention, nous travaillerons à en renforcer le maillage territorial. Cette prise en charge sanitaire, psychologique et sociale des victimes est absolument capitale.
Mieux protéger les victimes, c'est aussi démultiplier les espaces de libération de la parole. La possibilité de prise de plainte à l'hôpital ainsi que le recueil de preuves sans dépôt de plainte préalable constituent dès lors des avancées à la fois extrêmement concrètes et significatives. Ainsi, 3 363 examens ont été réalisés au cours du 1er semestre 2022 dans le cadre du recueil sans plainte, soit une augmentation de 40 % par rapport à l'an dernier sur la même période. C'est très important car nous savons toutes et tous que, parfois, les victimes consultent un médecin et effectuent un prélèvement, mais ne sont pas encore prêtes à déposer plainte. Or, ne pas garder ce prélèvement revient à faire disparaître la preuve et donc, à ne pas faire reconnaître le statut de victime ni la culpabilité de l'agresseur.
En d'autres termes, comme vous le savez, ce combat contre les violences - premier pilier de la Grande cause du quinquennat - mobilise l'ensemble du Gouvernement.
Car les violences s'immiscent dans toutes les sphères de notre société et ignorent les frontières géographiques, sociales ou culturelles. Pour reprendre le titre de votre rapport sur les femmes en ruralité, il ne doit y avoir en la matière aucune « zone blanche ».
Comme vous l'avez signalé, Madame la Présidente, et c'est pour moi un sujet très important sur lequel je souhaite m'investir avec la plus grande des sincérités et le plus grand engagement, vous avez consacré à l'industrie de la pornographie des travaux que je sais très approfondis dont j'attends les résultats avec impatience. Je tiens d'ores et déjà à saluer ce courage que vous avez eu de prendre ce sujet à bras le corps, car il constitue un angle mort sur lequel nous devons mettre la lumière.
Vous pourrez compter sur moi pour avancer sur ce sujet important.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, l'égalité entre les femmes et les hommes ne se réduit pas à la lutte contre les violences. Les questions de santé des femmes ont également été au coeur de l'agenda du Gouvernement et de la majorité.
Je pense par exemple aux moyens inédits déployés pour lutter contre la précarité menstruelle ainsi qu'à la Stratégie nationale de lutte contre l'endométriose lancée par le Président de la République.
Je pense aussi à l'allongement de douze à quatorze semaines du délai de recours à l'IVG, une liberté fondamentale que vous avez évoquée dans votre introduction, Madame la Présidente, et qu'il convient de sécuriser juridiquement. En effet, nous l'avons observé avec effroi récemment aux États-Unis : le vent du conservatisme souffle fort et érode des acquis que nous pensions, peut-être naïvement, définitivement inamovibles.
C'est pourquoi, avec la Première ministre, nous soutenons résolument la constitutionnalisation de l'accès à l'interruption volontaire de grossesse. Je me réjouis que le Parlement s'en soit saisi, signe que notre pays ne cèdera aucun millimètre face à la régression qui s'opère au-delà de nos frontières.
Par ailleurs, avec le ministre de la santé et de la prévention, nous travaillerons à lancer le bilan de fertilité préventif pour tous dès l'âge de 29 ans ainsi qu'à instaurer la possibilité pour toutes les femmes de recourir à une consultation pré-ménopause prise en charge intégralement par la Sécurité sociale.
L'égalité professionnelle, clé de l'émancipation des femmes, constitue aussi une priorité. Beaucoup a été accompli par le Gouvernement et la majorité parlementaire lors du précédent quinquennat.
Je pense bien entendu à la création en 2018 de l'Index de l'égalité professionnelle, un outil de transparence pour résorber les inégalités salariales et qui a déjà fait les preuves de son efficacité.
Je pense aussi à la loi du 24 décembre 2021 visant à accélérer l'égalité économique et professionnelle, dont je veillerai très attentivement aux effets concrets.
Je pense enfin à l'allongement du congé paternité de quatorze à vingt-huit jours, en vigueur depuis le 1er juillet 2021.
Cet enjeu d'équilibre entre vies personnelle et professionnelle doit être encore renforcé.
Avec mes collègues ministres des solidarités et du travail, nous travaillerons à renforcer les dispositifs concernant la garde d'enfant ainsi que les besoins spécifiques des familles monoparentales, majoritairement dirigées par des femmes.
En lien avec mes collègues du Gouvernement ainsi qu'avec vous, je veux également travailler sur la mixité des filières professionnelles. Il faut élargir le cercle des femmes susceptibles de pouvoir accéder à des postes de responsabilité dans les domaines scientifiques, notamment celui du numérique. Nous savons que si les jeunes filles et les femmes n'accèdent pas à ces métiers d'avenir, cela signifie de facto qu'elles seront exclues de ces postes à responsabilité dans quelques années. L'enjeu est donc particulièrement fort, nous ne devrons pas rater ce train vers l'émancipation économique pour toutes les femmes.
Avec le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, nous avons parfaitement conscience que les inégalités femmes-hommes s'enracinent dès l'enfance. C'est pour moi un chantier très important que j'ai d'ores et déjà ouvert. Si vous le souhaitez, j'aimerais pouvoir vous associer à ce travail parce que travailler sur l'égalité filles-garçons, lutter contre les stéréotypes, mettre en oeuvre l'éducation à la vie affective et sexuelle sont des enjeux sociétaux. Je pense qu'il doit être pris avec le plus grand des sérieux et mérite une concertation à laquelle je souhaite vous associer, si vous en êtes d'accord.
Il est indispensable de lutter très tôt contre les stéréotypes, car c'est une manière de prévenir à terme les violences faites aux femmes.
L'enjeu de la parité ne s'arrête bien entendu pas aux frontières du secteur privé. La fonction publique doit être exemplaire en la matière. Permettez-moi de saluer l'important travail d'évaluation que vous avez mené sur les dix ans de la loi Sauvadet. Comme je l'ai dit hier soir, je suis tout à fait preneuse d'un compte rendu que vous accepteriez de me faire sur ce rapport, car je pourrais le porter auprès de mon collègue ministre de la fonction publique. Nous pourrons organiser une rencontre en ce sens.
Mesdames les Sénatrices et Messieurs les Sénateurs, le combat pour l'égalité est une longue bataille, qui doit engager toute notre société.
Notre responsabilité, en tant qu'acteurs politiques, est immense. Je la mesure pleinement. Pour réussir, nous avons absolument besoin les uns des autres. Nous devons travailler en confiance et en synergie. Nous avons une obligation de résultats, à la fois individuelle et collective.
Je dirai aussi que les droits des femmes ne sont ni sécables ni aliénables. Fragiles, ils doivent être constamment protégés. Ils ne doivent céder le pas ni à la fatalité, synonyme de résignation, ni aux dogmes quels qu'ils soient, antagonismes de la liberté. C'est ensemble que nous ferons avancer l'égalité entre les femmes et les hommes.
Permettez-moi d'employer deux termes qui me sont chers, sans doute pas politiquement corrects mais régulièrement employés. C'est avec vous en sororité, Mesdames les Sénatrices et avec vous en fraternité, Messieurs les Sénateurs, que nous pourrons avancer.
Je sais que je peux compter sur vous car je connais déjà la qualité de vos travaux. Vous pouvez aussi compter sur moi.
Je me tiens à votre disposition pour toutes les questions que vous voudrez me poser.
Merci Madame la Ministre. À l'écoute de vos propos je ne doute pas que nous travaillerons ensemble comme nous l'avons fait avec votre prédécesseure Élisabeth Moreno et l'équipe qui vous entoure, que je salue. Bien évidemment, nous souhaitons comme vous que ce travail soit mené de concert, pour les femmes, pour lutter contre les violences qui leur sont faites et avancer sur l'IVG notamment, ainsi que sur tous les sujets de préoccupation que vous avez largement évoqués. S'il n'y a pas d'actualité immédiate sur l'IVG, il y en a en réalité toujours sur ce sujet, dans tous les pays, y compris en France. À chaque fois que le débat s'ouvre sur ce sujet, nous constatons de nombreuses crispations. Nous devons donc rester mobilisés.
Merci également pour vos propos très bien étayés par des chiffres car nous avons pu rencontrer au cours des années précédentes des difficultés à en obtenir.
Sans plus tarder, je passe la parole à mes collègues.
Merci Madame la Ministre pour vos propos très constructifs et positifs. Je me rendrai évidemment disponible pour le rendez-vous que vous voudrez bien nous accorder avec ma collègue Dominique Vérien pour la présentation de notre rapport dressant le bilan d'application de la loi Sauvadet dix ans après son adoption.
Le premier sujet que je souhaite évoquer a trait à l'éducation comme mode de prévention, non seulement des violences mais aussi des inégalités de manière générale entre les femmes et les hommes. Vous y avez fait référence dans votre propos introductif, comme souvent aussi dans les interviews que vous accordez. J'aimerais que vous nous en disiez un peu plus sur le travail que vous nous réservez sur le sujet.
Le deuxième sujet concerne les inégalités de salaires entre les hommes et les femmes. Il y a beaucoup à dire sur l'Index Pénicaud, dont je pense qu'il a le mérite d'exister, mais qui doit évoluer, en particulier en introduisant d'autres critères tels que celui du congé de paternité par exemple. J'aimerais connaître votre point de vue à ce propos et également savoir si vous seriez favorable à l'introduction d'un Index Pénicaud dans la fonction publique. C'est un sujet que nous avons évoqué hier avec le ministre de la transformation et de la fonction publiques car des efforts sont à engager pour lutter contre les inégalités de salaire dans la fonction publique, qui, en théorie, se devrait d'être exemplaire, mais qui ne l'est pas toujours.
En troisième lieu, la question de la parité en politique m'est très chère. Nous avons accompli de nombreux progrès dans ce domaine, en particulier grâce au dispositif des quotas. Il nous reste encore un pas à franchir dans les communes de moins de 1 000 habitants, où les femmes sont encore trop peu présentes, et dans les intercommunalités. Pensez-vous que nous pourrions aborder ce sujet ensemble, et qu'il mériterait d'être traduit de façon législative ?
J'ai une première question sur l'Index Pénicaud. Avez-vous des chiffres, sans citer les entreprises, de pénalités qu'elles ont eu à payer pour ne pas avoir respecté la loi ?
Je suis d'accord avec Martine Filleul sur la prise en compte des nouveaux congés maternité et paternité. Nous avions commencé à travailler sur la retraite des femmes. Je ne sais pas si le Gouvernement s'emparera de ce sujet dans les mois qui viennent, mais nous serons également attentives à ce que le travail sur le parcours salarial soit corrélé avec l'injuste montant de retraite de beaucoup de femmes.
Sur le rapport sur la pornographie dont beaucoup de mes collègues ont suivi les auditions organisées par la délégation, j'ai été très ébranlée par l'accès encore possible des mineurs aux vidéos pornographiques. Nous en parlons depuis des années, car il suffit de cliquer sur « J'ai plus de 18 ans » pour avoir accès à énormément de vidéos. Nous en avons parlé avec l'Arcom. Comment faire, même au niveau européen, pour régler ce problème définitivement ? Nous avons entendu des témoignages tout à fait poignants de psychologues et d'avocats sur le fait que la perception par ces jeunes de la sexualité et de la vie affective est totalement déformée par le visionnage de vidéos pornographiques.
Merci Madame la Ministre pour la façon dont vous avez partagé avec nous vos intentions et ambitions pour votre ministère, où je vous souhaite la plus grande réussite. J'éviterai de vous poser des questions trop précises qui supposeraient d'y répondre aujourd'hui, car nombre d'entre elles sont de pilotage interministériel. J'attirerai donc votre attention à leur sujet pour les semaines et les mois à venir.
De 2004 à 2019, cinq plans de lutte interministériels ont été menés contre les violentes faites aux femmes, ce qui a été le signe d'une continuité et d'un approfondissement du travail. En effet, chaque plan de lutte a donné lieu à une évaluation du précédent et a identifié des sujets nouveaux à traiter.
Je regrette qu'en 2019, le Grenelle ait été l'occasion de mettre fin à cette continuité. Avez-vous l'intention de reprendre le fil qui montre une volonté de l'État, une volonté interministérielle, en présentant aussi l'avantage de la lisibilité ?
La deuxième remarque concerne l'action de la justice. Ainsi que nous pouvons l'observer, la mobilisation des parquets et de la justice pénale apparaît aujourd'hui qualitativement différente de ce que nous avons connu par le passé sur la question des violences faites aux femmes. En revanche, je crois qu'un problème persiste avec la justice civile. Une partie des violences faites aux femmes se noue d'abord dans le cabinet du juge aux affaires familiales.
Vous connaissez mon obsession pour le sujet de la justice civile. J'entends que vous travaillez, Madame la Ministre, à la mise en place d'une justice spécialisée. Pour ma part, je plaide pour une justice familiale, civile et pénale dans une justice spécialisée. En effet, ce n'est pas seulement une partie du parquet ou des tribunaux de la justice pénale qui doivent se spécialiser. C'est la question de l'interaction entre justice civile et pénale. L'Espagne n'est pas allée jusque-là puisqu'elle n'a pas totalement fusionné justice familiale et justice pénale dans sa justice spécialisée. J'ajoute aussi que la justice pour enfants représente parfois un moyen de pression sur les mères dans les violences psychologiques.
Concernant les ordonnances de protection, que pensez-vous de permettre au parquet de les prononcer puisque, actuellement, seul le JAF dispose de cette faculté ? Ma religion n'est pas totalement faite, de sorte que je serais curieuse de connaître la vôtre sur le sujet.
Sur le complément du libre choix de mode de garde (CMG) pour les familles monoparentales, l'allocation est versée par la caisse d'allocation familiales jusqu'aux six ans de l'enfant. Une demande vise à l'étendre jusqu'à l'âge de 12 ans, ce qui a fait l'objet d'une promesse du Président de la République. Votre collègue ministre des solidarités entend-il l'inclure dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023 ?
Nous n'avançons pas depuis quarante ans sur la part des femmes dans les écoles d'ingénieurs, alors que les campagnes se succèdent depuis celle d'Yvette Roudy (Les métiers n'ont pas de sexe). Or depuis quarante ans, la situation n'évolue pas. Dans les écoles d'ingénieurs, les femmes sont concentrées sur la biologie et la chimie. Le plafond des 15 à 17 % dans les autres spécialités semble infranchissable. Je ne crois plus à la pédagogie ni à la bonne volonté des directeurs. Il faut tirer les leçons de notre échec collectif et de société en réfléchissant à des mesures plus coercitives telles que les quotas, car nous avons fait le tour des mesures incitatives en la matière.
Enfin, Madame la Ministre, je vous adresse la même demande que celle que j'ai transmise à votre collègue ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse : que vous puissiez, dans deux ans, nous dire que les cours d'éducation à la vie affective et sexuelle sont dispensés dans tous les établissements scolaires. Je vous propose un bel objectif pour vos deux ministères : que 95 % des élèves aient eu accès à l'éducation à la vie affective et sexuelle, car c'est là où se joue une partie de l'éducation au consentement et à la lutte contre les violences..
Merci beaucoup, chère collègue. Il est vrai que si notre religion n'est pas tout à fait faite sur certains sujets, elle l'est totalement, au sein de notre délégation, sur l'application de la loi sur l'éducation et les cours d'éducation à la vie affective et sexuelle dans les établissements scolaires. Nous avons en effet constaté, en visitant un collège du département de notre collègue Laurence Cohen, les inégalités qui peuvent exister entre établissements scolaires en la matière.
Merci Madame la Ministre pour vos propos introductifs qui sont de nature à nous réjouir, puisque vous avez plusieurs fois manifesté le désir de mener avec nous un travail collaboratif. C'est appréciable dès lors que nous menons les mêmes luttes et visons les mêmes buts.
Concernant les violences faites aux femmes, je souhaiterais davantage de précisions concernant votre positionnement sur les tribunaux spécialisés, auxquels de nombreuses associations féministes sont favorables sur le modèle espagnol. Il m'a semblé que vous étiez davantage favorable à une justice spécialisée. Je souhaite donc avoir votre éclairage. Il me semble que l'important réside dans le fait que des moyens soient donnés à la justice, qui en manque singulièrement. Je parle de moyens humains et de moyens en termes de formation initiale et continue. Il est également important de coordonner les actions afin d'endiguer les violences faites aux femmes.
J'ai entendu aussi que vous comptiez continuer à développer les filières d'urgence dans le traitement judiciaire, ce qui est appréciable. Si un certain nombre de tribunaux disposent déjà de ces filières d'urgence - j'ai noté environ 120 tribunaux sur 160 -, il serait intéressant d'avoir plus de précisions sur les projets du Gouvernement en la matière.
Nous avons beaucoup travaillé, au sein de la délégation aux droits des femmes, sur les personnes qui sont prostituées et que l'on prostitue. Nous avons fait partie de celles et ceux qui se sont battus pour que la loi de 2016 soit votée, ce qui n'a pas été sans mal. Aujourd'hui, force est de constater qu'il n'existe pas de véritable volonté - à tout le moins affichée - que cette loi soit dotée de moyens pour aider les personnes à sortir de cet état de prostitution. Que comptez-vous faire pour appuyer cette loi essentielle, dans la mesure où la prostitution est une violence terrible faite aux femmes ?
Nous sommes en 2022 sans que l'égalité salariale réelle ait été acquise. Vous n'êtes pas sans savoir que l'Index Pénicaud est remis en cause par bon nombre de syndicats, si ce n'est par la totalité d'entre eux. À chaque fois que, dans l'hémicycle, nous avons proposé, avec mon groupe, de renforcer les pénalités pesant sur les entreprises, nous n'avons pas été entendus. Peu d'entreprises sont poursuivies pour ne pas avoir appliqué la loi. Or il me semble que quand la loi existe, elle doit être appliquée sans dérogation. Avez-vous l'intention de passer à la vitesse supérieure pour instaurer une vraie égalité salariale, et donc un cheminement important vers l'égalité professionnelle ?
Lorsque nous avons travaillé sur la loi de bioéthique, nous avons voté en faveur de l'accès à la PMA pour toutes. En même temps, nous avions pressenti que des difficultés surviendraient. Des retours dont nous disposons, il ressort que les délais d'attente restent très longs, faute notamment de centres en nombre suffisants et également, de gamètes. Disposez-vous d'éléments à nous fournir qui permettraient de réduire les délais d'attente ?
Nous avons également évoqué l'établissement de la filiation pour les couples ayant entamé un parcours de PMA à l'étranger avant la loi et dont l'enfant est né après la loi. Dans ce cas de figure, la deuxième mère doit recourir à l'adoption comme avant la loi, ce qui signifie qu'elle ne bénéficie pas du dispositif voté. Le garde des Sceaux a été saisi mais ne semble pas souhaiter modifier les choses. Or nous constatons qu'une discrimination est créée entre les couples de femmes selon la date de conception. Que pourriez-vous faire pour que certains couples ne se trouvent pas « hors la loi » et bénéficient de ce dispositif qui est plutôt positif ?
Enfin, concernant le budget de votre ministère, sans nous rappeler qu'il est transversal, savez-vous s'il restera toujours le plus petit budget de l'État ? Avez-vous l'espoir qu'il soit renforcé ? Dans tous les cas, nous conjuguerons nos efforts aux vôtres pour qu'il en soit ainsi.
Merci pour vos propos introductifs qui se sont inscrits dans le sens que nous souhaitons. J'attire votre attention sur la situation des femmes des différents territoires d'outre-mer, qui doivent venir dans l'Hexagone pour beaucoup de formations promotionnelles (cheffes d'établissement en milieu scolaire, cadres de santé, etc...). Il s'agit de difficultés importantes tant du point de vue écologique que du coût des billets d'avion. De plus, les familles avec enfants sont séparées pendant le temps de ces formations. Par conséquent, pour permettre aux femmes d'être promues car elles disposent des compétences nécessaires, il est important que des regroupements ponctuels puissent être autorisés, mais également que les formations puissent être effectuées par visioconférence. De même, le déplacement du formateur serait une solution intéressante en termes de maîtrise de dépenses et accorderait la priorité à la famille.
Votre prédécesseure, Élisabeth Moreno, s'est déplacée en outre-mer, notamment en Guadeloupe. À cette occasion, elle a rencontré de nombreuses associations, suscitant beaucoup d'espoir chez celles-ci car elles ont apprécié les dispositifs proposés. En particulier, elle a rencontré la présidente de l'association Amalgame Humani's qui gère la ligne d'écoute Arc-en-ciel et favorise les appels des personnes victimes d'homophobie. Les difficultés et discriminations rencontrées par ces personnes dans ces territoires, dont la Guadeloupe, sont récurrentes. Je souhaiterais donc qu'un accent particulier soit mis sur cette problématique de l'homophobie, qui concerne de nombreuses personnes. Malheureusement certaines victimes d'homophobie passent à l'acte et se suicident.
Les associations ont aussi besoin d'un accompagnement particulier. Vous disposez de l'ensemble des éléments à cet égard.
Concernant l'orientation des filles et leur affectation, des efforts sont à mener au niveau de l'Éducation nationale pour une meilleure formation des personnels des services académiques d'orientation et d'information. Très souvent, les fiches métier ne sont pas mises à jour.
Le problème du cyberharcèlement a donné lieu à un travail remarquable de nos collègues du Sénat. Une proposition de loi a été élaborée, mais il est encore nécessaire de porter une attention particulière en matière de prévention dans les établissements scolaires, en particulier dans les collèges.
Madame la Ministre, je dirai simplement ma conviction de la nécessité de trouver un dispositif de protection, y compris matérielle, des enfants orphelins à la suite de violences conjugales. J'espère que le Gouvernement s'investira sur ce sujet et que nous pourrons mener une réflexion en commun.
Je rejoins tout ce qui a été dit depuis le début de cette audition. Malheureusement, ces problèmes sociétaux existent aussi à 20 000 kilomètres d'ici. Les compétences en matière sociale et d'éducation sont celles de la collectivité Polynésie, tandis que l'État n'intervient qu'en matière de justice. Or tous les sujets se rejoignent. Il est vrai que le Président de la République a instauré comme priorité du quinquennat précédent les violences intrafamiliales, ce dont je le remercie à travers vous. Je le remercie également de la subvention accordée à l'association qui défend les droits des femmes en Polynésie, pour les aider à construire un bâtiment plus spacieux, avec des places dédiées aux femmes subissant les violences dans leur foyer.
Pourquoi ne pas mettre en place un tribunal spécialisé dans les violences intrafamiliales, sur le modèle de celui instauré pour le foncier ? Le président actuel, Édouard Friche, à l'époque où il était député, avait présenté la demande et obtenu cette mise en place, en Polynésie, d'un tribunal dédié au foncier. Dans notre territoire si vaste, les problèmes sont d'autant plus complexes qu'ils sont accrus par l'éloignement entre les îles et les archipels. Tous les mois d'août et septembre sont ceux de la session des Assises au tribunal de Papeete, ce qui est l'occasion de traiter tous les types d'affaires criminelles. En tant que parlementaire, je suis donc attachée à ce qu'un tribunal soit dédié spécifiquement aux violences faites aux femmes et aux enfants.
L'aspect culturel et la religion priment aussi beaucoup dans nos collectivités. Depuis la nuit des temps, la place des femmes est secondaire dans la société même si la parité politique a fait l'objet d'une loi votée depuis l'Hexagone. Cette parité est déjà applicable dans les communes et collectivités de Polynésie, sauf dans celles de moins de 1 000 habitants.
Le dernier sujet est celui de la promotion des femmes dans le corps préfectoral. Dans toute ma vie, je n'ai rencontré qu'une seule préfète officiant en Polynésie française. Depuis lors, seuls des préfets et hauts commissaires sont présents. Il serait donc bon d'oeuvrer en faveur de la promotion des femmes dans le corps préfectoral.
Madame la Ministre, comme vous le savez, j'ai été rapporteure d'un rapport de la délégation sur la thématique « Femmes et ruralités ». Sur la totalité des féminicides commis en France, 50 % ont lieu en zone rurale alors que seulement un tiers des femmes y vivent. C'est dire si le sujet est crucial et si le travail à mener est vaste.
Nous avons élaboré soixante-dix recommandations, dont une me tient particulièrement à coeur. Ce sont souvent les élus des petites communes qui sont sollicités sur ces sujets. Il serait intéressant d'instaurer un référent Égalité au sein des intercommunalités, qui pourrait justement gérer ces problèmes de droits des femmes et des violences faites aux femmes. J'avais tenté de porter un amendement qui n'est pas passé, mais en discutant avec votre prédécesseure, il a semblé que le sujet serait plutôt d'ordre réglementaire et qu'un décret suffirait.
Par ailleurs, les aides que vous octroyez aux associations sont la plupart du temps issues d'appels à projets, alors qu'il est très difficile pour les petites associations implantées en ruralité de candidater. Même si elles accomplissent un travail remarquable, elles n'ont pas la taille pour porter ces dossiers et les construire.
Toutes ces questions et interventions variées montrent notre intérêt pour les sujets liés aux droits des femmes, à l'égalité salariale et aux luttes contre les violences faites aux femmes. Merci chers collègues pour cette diversité.
Merci à toutes pour vos questions qui montrent votre excellente connaissance du sujet et votre implication dans tous les domaines. Ne m'en veuillez pas si je ne peux pas répondre de manière exhaustive à toutes vos questions aujourd'hui, mais je pourrai toujours mentionner l'intérêt de certains sujets et revenir ensuite vers vous.
Madame la Sénatrice Martine Filleul, vous avez rappelé votre rapport sur l'application des règles paritaires dans la haute fonction publique. Mon cabinet m'indique que vous recevrez dès demain un mail avec des propositions de dates pour un rendez-vous.
S'agissant de l'éducation comme mode de prévention, il est un peu délicat de vous en dire plus car ma feuille de route n'est pas encore totalement actée. De plus, ce chantier se veut ouvert, à la fois avec le ministère de l'éducation nationale mais aussi avec les différents partenaires et les parlementaires dont vous faites partie.
Il est certain, cependant, que j'aimerais voir appliquer quelques grands principes. Je tiens à ce qu'une ossature soit présente. Selon moi, la sensibilisation doit avoir lieu tôt et à différents âges. Comme je vous l'ai dit, je n'ai pas de certitudes et je n'aime pas les discours péremptoires. Il est difficile de dire à quel âge précisément, d'où l'intérêt de concerter, de consulter et de s'entourer de spécialistes de sciences de l'éducation. Un âge compris entre six et huit ans pourrait être retenu pour une transmission de la base sur l'égalité entre les filles et les garçons et la lutte contre les stéréotypes. Je pense qu'il faudra ensuite prévoir un autre moment de sensibilisation au collège, où d'autres questions sont abordées. Cela pourrait d'ailleurs se rapprocher davantage d'une prévention contre les violences sexuelles et sexistes. Par exemple, le sujet du consentement pourrait aussi être abordé à cette occasion. J'en profite pour répondre à Laurence Rossignol sur le rapport de l'Inspection générale de l'éducation nationale (IGEN) sur l'éducation à la vie sexuelle et affective : je vais me rapprocher du ministre de l'éducation nationale pour que ce rapport vous soit transmis.
Je pense qu'il faut intégrer cet enseignement, tout en s'inscrivant dans la concertation. Il faut avoir conscience que ce sujet provoque beaucoup de résistance. Si nous voulons réussir - car seule compte la réussite sans contrainte, qui conduirait au rejet - il faut emporter l'adhésion à ce programme. Un certain nombre de familles peuvent parfois être réticentes à ce que cet enseignement soit fait. Par exemple, elles enlèvent leurs enfants de l'école lorsqu'elles savent qu'il sera dispensé. Il importe donc de consulter largement pour être le plus consensuel possible. En effet, il s'agit d'un sujet sociétal concernant aussi la formation de la société de demain, que nous voulons plus fraternelle et respectueuse de l'égalité entre les femmes et les hommes. C'est aussi un terreau propice à l'émancipation des filles et au choix des carrières. Une telle sensibilisation couvre donc différents domaines.
Je ne connais pas encore le calendrier à vous proposer, mais nous avons déjà commencé à travailler. Avec le ministre de l'éducation nationale, nous pourrons proposer un calendrier au mois de septembre pour avancer sur ce sujet fondamental, que nous ne devons pas « gâcher » en allant trop vite.
Vous avez pointé l'inégalité des salaires et avez fait référence à l'Index Pénicaud, considérant qu'il devrait évoluer. Il est sans doute trop tôt pour apporter une réponse précise sur ce point. Une évaluation approfondie de l'index devra être menée avant d'envisager toute évolution de l'outil.
Je tiens aussi à vous indiquer que depuis mon arrivée au ministère, j'ai pris contact et je rencontre un certain nombre de réseaux professionnels, notamment de réseaux féminins mais pas uniquement. Je consulte aussi les grandes entreprises sur l'index pour comprendre l'usage qu'elles en font et connaître les axes d'amélioration éventuels. Sur ce point, je pense qu'il faut poursuivre ce travail de co-construction.
Je vous communique quelques chiffres sur l'Index Pénicaud : 504 mises en demeure ont été adressées, pour 32 pénalités financières prononcées et 32 460 opérations de contrôle menées.
Sur la parité en politique dans les communes de moins de 1 000 habitants, le point pourra être examiné même si je ne peux vous répondre aujourd'hui.
Au deuxième semestre 2022, sera lancé un baromètre de l'égalité professionnelle dans la fonction publique, sur le modèle de l'Index Pénicaud. Ce baromètre permettra de lutter efficacement pour réduire les écarts de rémunération, qui sont inadmissibles dans la fonction publique.
Nous pouvons aussi évoquer la mise en place de Talentueuses, qui est un programme de coaching pour les femmes dirigeantes dans la fonction publique. Ce programme inédit d'accompagnement et de formation destiné à cinquante femmes de la haute fonction publique s'inscrit aussi dans la volonté du Gouvernement de consolider les forces vives féminines pour former la génération de dirigeantes de la fonction publique de demain. La première promotion a été lancée en septembre 2021.
Madame la Sénatrice Laure Darcos, vous avez aussi attiré mon attention sur les retraites des femmes, dont nous savons qu'elles sont d'environ 40 % inférieures à celles des hommes. Comme sur de nombreux sujets, il faudra actionner différents leviers. Bien sûr, une vigilance particulière devra être de mise si le sujet des retraites revient dans le débat politique. Je pense aussi qu'il ne faut pas oublier, pour avoir été haute fonctionnaire à l'égalité femmes hommes du ministère de la justice et pour avoir travaillé sur les cohortes et les différences salariales, que les temps partiels sont encore trop souvent occupés par des femmes. À cela s'ajoutent les interruptions de carrière qui se répercutent sur les retraites. Lorsque les femmes sont encore activité, nous devons réfléchir aux moyens de leur éviter de prendre un temps partiel, notamment en améliorant l'équilibre entre vie privée et vie professionnelle. Finalement, toutes les actions doivent se conjuguer pour aller dans le même sens : celui d'une plus grande égalité entre les femmes et les hommes.
J'ai dit combien je trouvais courageux que le Sénat se soit emparé du sujet de la pornographie. Je ne vais donc pas vous répondre puisque j'attends justement votre rapport ainsi que les conclusions et les pistes que vous pourrez dégager.
Je vous donne d'ores et déjà rendez-vous pour la restitution de ce rapport. Je suis sûre, connaissant vos qualités, que vos pistes seront très intéressantes et qu'elles devront être creusées avec mes collègues, que j'interpellerai pour pouvoir avancer.
Laurence Rossignol, vous avez évoqué les cinq plans successifs sur les violences faites aux femmes et l'idée de reprendre le fil. La volonté interministérielle existe dans le Grenelle des violences conjugales puisque le travail est mené par au moins une douzaine de ministères. Néanmoins, j'entends aussi le sens de la question, dans la mesure où le Grenelle se focalise sur les violences conjugales, ce qui ne recouvre pas tout le champ des violences faites aux femmes. En particulier, les violences sexuelles commises hors de la sphère familiale ne sont pas traitées. Cela fait partie des pistes sur lesquelles je souhaite travailler pour réintroduire davantage d'interministérialité. Je ne peux malheureusement pas vous en dire plus aujourd'hui, mais je pense que courant septembre je disposerai de davantage d'éléments pour répondre plus précisément.
Vous êtes revenue sur cette notion de justice spécialisée de la justice pénale et civile. Sans vouloir défendre à tout prix le monde judiciaire dont je suis issue, je pense qu'une appropriation des mesures est constatée au civil. Je vous ai communiqué le taux d'acceptation des ordonnances de protection, qui est aujourd'hui de plus de 71 %. Il existe par conséquent une sensibilisation. Pour autant, la matière n'est pas uniquement le fait des magistrats car il est nécessaire, pour que ces ordonnances soient prononcées, que les requêtes soient bien formulées et comportent les éléments appropriés. L'ensemble des acteurs doivent donc être formés pour aboutir à des résultats intéressants.
Je pense néanmoins qu'il faut travailler sur cette interaction entre le civil et le pénal. Madame la Sénatrice Laurence Cohen, vous avez également évoqué le sujet de la justice spécialisée. Le terme employé par le Président de la République, qui figure dans son programme, est celui de « pôle juridictionnel spécialisé ». L'objet n'est pas encore défini car une telle réforme suppose un travail préparatoire de fond. Nous savons qu'un travail complexe devra être mené et nous aurons aussi besoin de vous pour avancer. Il n'est pas possible d'avoir exactement le même dispositif à Créteil et à Tulle par exemple. Le système doit donc s'adapter à la taille des juridictions.
Madame la Sénatrice Lana Tetuanui, vous avez aussi évoqué les juridictions spécialisées en Polynésie. Les juridictions devront donc être les plus adaptables possibles à la taille des territoires et des villes. C'est très complexe. Comme sur l'éducation, il y a de vrais enjeux. Nous ne devons pas les saborder par trop de hâte. Nous disposons de cinq ans. Nous devons certes travailler vite, mais surtout travailler bien.
En définitive, la réflexion sur l'ordonnance de protection peut être intégrée à la réflexion sur la justice spécialisée.
S'agissant des familles monoparentales, je ne rappelle pas toutes les mesures déjà prises mais seulement les éléments du programme : la création d'un droit opposable à la garde d'enfant, l'extension du versement du complément de libre choix du mode de garde des six aux douze ans de l'enfant pour les parents célibataires, une hausse de l'allocation de soutien familial de 116 à 174 euros.
Ce n'est pas dans le programme mais je note la suggestion.
Sur l'intégration des filles dans les filières scientifiques, vous suggérez d'avoir recours à des mesures plus coercitives. Je ne pense pas opter pour cette voie à l'heure actuelle. Au cours du précédent quinquennat, tout de même, l'Index Pénicaud et la loi de décembre 2021 avaient constitué des mesures en ce sens, tout comme la loi Copé-Zimmermann il y a une dizaine d'années.
En revanche, nous devons travailler sur une multitude de leviers de manière simultanée. Nous devons aboutir à un « vivier », c'est-à-dire des cercles élargis de femmes accédant aux filières scientifiques. La coercition ne me paraît pas être la solution. Pour en avoir parlé avec la ministre de l'enseignement supérieur, la difficulté tient au fait que les femmes ne sont pas là. Dans la loi de décembre 2021, le fait d'imposer 30 % de femmes dans les jurys d'admission dans les cycles supérieurs est certes une mesure incitative, mais encore faut-il que ces femmes soient présentes. Je ne suis fermée à rien mais il nous faudra progresser sur l'orientation et ce, à tous les âges et niveaux.
Sur l'éducation à la vie sexuelle et affective, je pense vous avoir répondu, de même que sur les tribunaux spécialisés.
Sur les filières d'urgence, vous connaissez bien les chiffres. Cela m'ennuie de détailler car je suis ministre de l'égalité entre les femmes et les hommes. Néanmoins, je peux vous en dire quelques mots. Il s'agit d'un traitement judiciaire spécifique des violences, à chaque bout de la chaîne. Quatre grandes thématiques ont été identifiées : le début de la procédure avec le dépôt de plainte, la manière de juger les affaires, les outils de protection mis à disposition des victimes, les dispositifs de suivi des auteurs. Un aspect concerne davantage les comités de pilotage au sein des juridictions.
Lorsque les juridictions répondent à deux items dans chacune des quatre grandes thématiques, il est considéré qu'une filière d'urgence existe.
C'est donc une avancée importante, montrant une prise en compte par l'institution judiciaire, et une volonté politique réaffirmée par le garde des Sceaux. On peut penser que les pôles de juridictions spécialisées permettraient d'apporter une réponse réellement adaptée à ces violences, qui sont spécifiques. Je ne cesserai jamais d'affirmer que donner une claque à sa femme n'est pas équivalent à voler un CD dans un grand magasin. Bien sûr, ce vol est répréhensible mais n'interroge pas de la même manière le comportement et le psychisme de l'auteur.
Vous avez évoqué la loi de 2016 sur la prostitution. J'ai plusieurs choses à vous dire. Comme vous le savez, une commission départementale doit être mise en place au sein des préfectures sur la lutte contre la prostitution. À ce jour, 87 commissions départementales ont été installées dont 51 avec parcours de sortie, qui permettent un meilleur accompagnement des femmes sur le terrain pour leur sortie de la prostitution. Au 1er janvier 2022, une centaine d'associations ont été agréées pour la mise en oeuvre du parcours de sortie de la prostitution. 446 parcours de sortie ont été autorisés par décision préfectorale. Depuis 2017, 790 personnes ont bénéficié d'un parcours de sortie de la prostitution.
L'allocation financière d'insertion sociale et professionnelle (AFIS) est d'un montant de 330 euros par mois pour une personne seule. Elle est destinée aux personnes qui ne peuvent bénéficier d'aucun minimum social, en particulier lorsqu'elles ont été déboutées d'une demande de droit d'asile. Il faut noter que l'enveloppe allouée a augmenté pour la première fois depuis sa création, pour un montant de 1,5 million d'euros dans la programmation budgétaire 2022.
De même, un montant de 2,6 millions d'euros a été dégagé des avoirs de l'Agence de recouvrement des amendes pour soutenir des projets innovants de prévention de la prostitution et d'information contre le proxénétisme et la traite des êtres humains, ainsi que pour l'accompagnement des personnes en situation de prostitution et/ou victimes d'exploitation sexuelle.
Enfin, le Gouvernement a lancé en novembre 2021 un plan interministériel doté de 14 millions d'euros pour lutter contre la prostitution des mineurs, qui concerne entre 7 000 et 10 000 jeunes en France.
Rappelons que la France affiche une position très forte en matière de lutte contre la prostitution car elle est le seul pays à avoir adopté ce système abolitionniste.
Sur l'accès à la PMA pour toutes et la longueur du délai, il faut rappeler l'investissement de 8 millions d'euros échelonné jusqu'en 2023 pour renforcer les équipements et les moyens des Centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme humains (CECOS). Une première aide de 3,3 millions d'euros a été consentie dès le premier semestre 2021. Le Gouvernement a bien conscience que l'une des difficultés principales rencontrées par l'écosystème est celle de la pénurie de dons de gamètes qui, en France, sont gracieux. En outre, la levée partielle de l'anonymat des donneurs peut faire craindre un effet dissuasif.
Toutefois, en Angleterre dans une situation similaire, les dons ont d'abord baissé avant de remonter un an et demi plus tard avec un profil de donneurs différent.
Pour améliorer cette situation, une campagne de sensibilisation autour du don de gamètes a été lancée par l'Agence de Biomédecine le 21 octobre 2021. Cette campagne se divise en deux volets, l'un à destination des donneurs potentiels, le second sur le droit d'accès aux origines.
En mai 2022, une campagne de sensibilisation « Merci d'en parler » a été lancée pour donner la parole à toutes les personnes concernées par le don de gamètes.
Sur la PMA avant la loi sur la bioéthique, la loi du 21 février 2022 simplifie l'adoption. Elle prévoit des garanties contre les cas spécifiques que vous avez évoqués, pour permettre d'adopter rapidement, même en cas de séparation d'avec la femme qui a porté l'enfant.
Finalement, un certain nombre de mesures correctrices ont été apportées par la loi sur l'adoption du 21 février 2022.
Sur le budget, il est toujours délicat de dire que le budget cumulé des ministères atteint plus de 1,3 milliard d'euros, mais c'est tout de même une réalité. Mon ministère a une vocation interministérielle. Il est délégué auprès de la Première ministre précisément car il participe à une politique transversale et gouvernementale. Je suis optimiste quant à l'obtention d'une augmentation budgétaire malgré la rigueur, mais je souhaiterais surtout améliorer la visibilité de tous les engagements des ministères sur cette politique transversale. Les documents sont assez difficiles à manier, à renseigner, et nous pouvons encore progresser. En définitive, le chiffre de 1,3 milliard d'euros est plutôt sous-estimé par rapport à la réalité des fonds injectés par l'ensemble des ministères.
J'ai bien noté, Madame la Sénatrice Victoire Jasmin, les difficultés des formations des femmes. Nous savons aussi que ce sont les femmes qui acceptent le moins le célibat géographique, surtout quand il s'agit d'un célibat géographique entre l'outre-mer et la métropole. Je pense que ce point est très important. Je le note pour en parler aussi bien au ministre de la fonction publique qu'à celui de l'éducation nationale, car nous devrons travailler quasiment sur mesure pour les territoires d'outre-mer dans ce domaine de la formation.
Vous avez aussi évoqué l'association Amalgame Humani's. J'en ai entendu beaucoup de bien au sein de mon cabinet. Je travaillerai bien sûr avec plaisir avec cette association et je souhaite, avant la fin de l'année, effectuer un déplacement outre-mer pour faire un point des différentes problématiques. Je suis consciente que chaque territoire comporte sa propre spécificité.
Le sujet des enfants exposés aux violences au sein du couple est l'un des sujets ayant émergé lors du Grenelle des violences conjugales. Il a donné lieu à différentes modifications législatives, que je ne reprendrai pas en intégralité : la suspension de plein droit de l'exercice de l'autorité parentale en cas de poursuites ou tentative d'homicide d'un parent contre l'autre, la possibilité donnée au juge pénal de statuer sur l'exercice de l'autorité parentale...
Le décret du 23 novembre 2021 reconnaît à l'enfant exposé à des violences au sein du couple le statut de victime. C'est une avancée importante.
Une circulaire du garde des Sceaux de février 2022 tend à généraliser le dispositif de prise en charge des enfants présents lors d'un féminicide. C'est la généralisation du protocole Féminicide mis en place en Seine-Saint-Denis, afin de prendre soin de ces enfants en les hospitalisant le cas échéant et en les accompagnant dans un moment particulièrement douloureux pour eux.
Madame la Sénatrice de Polynésie Lana Tetuanui, j'ai bien entendu votre préoccupation d'une justice menée au sein d'un tribunal dédié. Cela revient au sujet des pôles de juridictions spécialisées. Vous avez aussi évoqué la promotion des femmes dans le corps préfectoral, dont je parlerai au ministre chargé des outre-mer et au ministre de la transformation et de la fonction publiques. Le sujet n'est pas simple car vos territoires sont lointains. Vos différentes interventions montrent qu'un travail doit être mené.
Madame la Sénatrice Monier, votre rapport Femmes et ruralités est très riche. Je vous propose un échange avec les différents co-rapporteurs, dans la circonscription de l'un d'entre eux plutôt qu'à mon ministère. Il s'agirait ainsi d'un signal donné à la ruralité. Par la même occasion, nous évoquerons le sujet de la désignation d'un référent Égalité dans les communes et intercommunalités. Nous explorerons ensemble les pistes qui peuvent se dégager.
J'ai noté votre petite réserve sur les appels à projets. L'un d'entre eux lancé récemment portait sur une somme d'un million d'euros. Nous annoncerons les lauréats dans les jours à venir. J'entends néanmoins votre réserve. Même si les appels à projets sont très pertinents, nous serons vigilants sur la nécessité de discuter davantage les subventions avec les départements et les régions, notamment via nos déléguées régionales aux droits des femmes.
Je vous remercie de votre écoute et de votre bienveillance. Nous avons déjà pris date d'un certain nombre de rendez-vous.
Madame la Ministre, je vous remercie car l'exercice n'était pas simple en raison du nombre important de questions. Nous comprenons bien que, les arbitrages n'étant pas encore effectués, vous ne puissiez pas répondre à la totalité d'entre elles. Les sénatrices et sénateurs vous adresseront aussi des demandes individuelles car nous connaissons en partie votre équipe, dont nous savons qu'elle est très réactive.
Je vous remercie de la part de Marie-Pierre Monier qui nous écoute toujours, pour les réponses que vous lui avez apportées.
Nous avons déjà acté trois, voire quatre rendez-vous avec vous :
· le rendez-vous avec les rapporteures sur l'industrie de la pornographie avec Laurence Rossignol, Laurence Cohen, Alexandra BorchioFontimp et moi-même ;
· le rendez-vous que nous allons caler avec les deux rapporteures Martine Filleul et Dominique Vérien sur la parité dans la haute fonction publique et le bilan de la loi Sauvadet.
Nous viendrons vous présenter nos douze propositions après une trêve estivale.
Sur Femmes et ruralité, huit rapporteurs issus de tous les groupes politiques étaient représentés. Nous viendrons à la rentrée vous présenter nos travaux.
Bien entendu, en tant que présidente, je vous invite fortement à venir dans le département de la Vendée pour présenter ce rapport.
Finalement, nous avons eu trois interventions des territoires ultramarins. Nous sortons d'une période électorale compliquée, ayant donné lieu aussi à une vie parlementaire différente. Nous avons vu le vote dans ces territoires et avons au Sénat des sénatrices et sénateurs très engagés. Nous devrons donc démontrer sur place notre engagement sur l'ensemble des sujets.
Je vous souhaite, au nom de la délégation, pleine réussite dans vos missions. Nous avons compris au travers de vos réponses que vous étiez vous aussi totalement engagée. Vous avez la volonté de faire avancer des sujets qui nous tiennent à coeur sur la lutte pour l'égalité, la mixité, contre les violences intrafamiliales. Je vous souhaite surtout, Madame la Ministre, de gagner tous les arbitrages interministériels pour réussir à mettre en place toutes les avancées que vous appelez de vos voeux.
Merci pour cette feuille de route en partie décidée. Vous nous trouverez, à la délégation aux droits des femmes, mobilisés à vos côtés pour avancer sur ces sujets. La difficulté sera d'obtenir les moyens nécessaires, donc de défendre les dossiers auprès des financiers du Gouvernement.