Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Réunion du 14 novembre 2013 : 1ère réunion

Résumé de la réunion

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La réunion

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La commission auditionne Mme Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication, sur le projet de loi de finances pour 2014.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous sommes heureux de vous accueillir, madame la ministre de la culture et de la communication, pour la présentation de votre budget.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

En 2014, ce budget sera de 7,26 milliards d'euros, en baisse de 2 %. Il est conforme à la programmation triennale votée par le Parlement en 2012 et s'inscrit dans l'effort de redressement des finances publiques. La baisse ne sera pas uniforme ; j'ai fait des choix et commencé un travail de restructuration en profondeur. Ainsi je préserverai les missions fondamentales du ministère en faveur de la création : spectacle vivant, arts plastiques, musique. De plus, l'effort portera en priorité sur les entreprises et les opérateurs les plus solides financièrement, disposant de financements propres ou ayant accès à des fonds de mécénat. Je pourrai ainsi conserver ou augmenter les crédits d'intervention en région et les actions qui garantissent l'emploi et l'activité des entreprises culturelles, par exemple celles qui s'occupent de restauration des monuments historiques. Il s'agit d'un budget sélectif et responsable.

Le financement des priorités arrêtées en 2012 est assuré. La première est de favoriser la jeunesse, en développant un projet national pour l'éducation artistique et culturelle, et en confortant les moyens de l'enseignement supérieur du ministère de la culture, qui forme 35 000 étudiants par an. Il s'agit aussi de maintenir l'effort national en faveur du patrimoine et de préserver les moyens d'intervention de l'État en région, particulièrement dans le domaine de la création. Enfin, à l'heure de la transition numérique, il est nécessaire d'instaurer une régulation adaptée de l'offre - lutte contre la contrefaçon commerciale et la piraterie, développement de l'offre légal, nouveaux outils de financement de la création. Le numérique est un outil non seulement de diffusion mais aussi de création. J'ai organisé l'Automne numérique, lors duquel les pratiques artistiques fondées sur l'utilisation des oeuvres et données publiques de nos établissements ont été encouragées. Un calculateur sera installé, indiquant la date d'entrée dans le domaine public des oeuvres. De même, en 2014, la loi sur la création comportera un volet numérique. Je présenterai également une loi sur les patrimoines l'an prochain.

Il convient de prendre en compte le poids économique de la culture. La presse s'est fait l'écho d'une étude commandée par la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem). J'avais pour ma part, avec Pierre Moscovici, demandé à l'inspection générale des affaires culturelles et à l'inspection générale des finances une étude pour évaluer cette dimension. La culture représente 59 milliards d'euros de valeur ajoutée, plus de 3 % du PIB, près de 5,5 % si l'on ajoute les retombées indirectes. Avec la mode, le luxe ou la gastronomie, on dépasse les 10 %... Cette étude montrera comment le développement d'équipements culturels peut générer de la richesse sur les territoires.

J'en viens aux politiques thématiques. J'ai présenté le 10 juillet dernier les principaux axes de la réforme des aides à la presse. J'ai réaffirmé à cette occasion la légitimité du soutien de l'État. Le système d'aides était très complexe et méritait d'être revu. Je me suis appuyée sur les préconisations du groupe d'experts animé par M. Roch-Olivier Maistre : accompagnement de la transition numérique pour les titres, garantie d'une distribution économiquement efficace. Le taux de TVA super-réduit de 2,1 % sera maintenu pour la presse imprimée. Nous assumons le choix de ne pas recentrer la TVA sur la seule presse d'information politique et générale, ciblage difficile à mettre en oeuvre sans s'immiscer dans les lignes éditoriales. Je souhaite que cette mesure s'applique à la presse en ligne en 2014. Nous sommes en discussion avec la Commission européenne sur ce sujet comme sur celui de la TVA du livre numérique. Les aides directes, notamment celles du Fonds stratégique pour le développement de la presse, seront rationalisées et réorientées en faveur de l'innovation.

De plus, l'État souhaite engager une réflexion sur la coexistence des canaux de diffusion - postage, portage, vente au numéro - car, en 2015, les accords liant la presse, la Poste et l'État arriveront à échéance. Le moratoire à la hausse tarifaire du transport postal, financé par l'État, cessera dès 2014. Le renchérissement des tarifs est étalé sur deux ans, pour faciliter l'anticipation des acteurs. Parallèlement, l'État augmentera de plus de 4 millions son aide en faveur de l'exonération de cotisations sociales des porteurs de presse. Le budget 2014 marque ainsi un positionnement stratégique de l'État en matière de distribution, ce qui est nouveau. Je ne méconnais pas les difficultés que la hausse des tarifs postaux peut engendrer pour certains titres, c'est pourquoi j'ai prévu une mesure d'atténuation pour la presse d'intérêt général. Je nommerai dans les prochains jours un médiateur, qui aura une mission d'expertise et réfléchira aux conditions de sortie du moratoire.

Je confirme nos engagements concernant le portage : 37 millions d'euros lui seront consacrés en 2014, autant qu'en 2013. Mais les critères de cette aide seront revus, afin de favoriser le portage multi-titres, des quotidiens comme des magazines. Outre l'aide exceptionnelle mise en place en 2013 pour les diffuseurs les plus touchés par les grèves chez Presstalis, le soutien aux marchands de journaux passera par un plan d'accompagnement à la modernisation des kiosques. J'ai aussi demandé au Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) de proposer des mesures structurantes pour améliorer la rémunération des diffuseurs de niveau 3, autrement dit les détaillants, qui est actuellement la plus faible d'Europe. Je souhaite aussi renforcer les pouvoirs de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP), afin d'accélérer les réformes.

L'audiovisuel public contribuera à l'effort national de redressement des finances publiques, avec une dotation publique totale en recul de 1 %. Les missions ne sont pas remises en cause. Le Gouvernement a choisi la voie du dialogue et un avenant au contrat d'objectifs et de moyens (COM) de France Télévisions, qui vous a été soumis, sera bientôt signé. À cela s'ajoute la finalisation d'un premier COM avec France Médias Monde.

À titre exceptionnel, nous avons aussi décidé de procéder à des prélèvements sur les fonds de roulement de certains établissements, notamment l'Institut national de l'audiovisuel (INA) à hauteur de 20 millions d'euros. L'institut a accumulé des réserves de 30 millions. Il avait un projet immobilier très ambitieux... auquel l'État aurait dû contribuer à hauteur de 55 millions d'euros. Cela n'est pas envisageable dans la période de contrainte forte des finances publiques que nous connaissons actuellement. J'ai demandé à l'INA de me soumettre un nouveau projet pour la protection des archives. La même question s'était posée pour les réserves du Louvre : un projet pharaonique avait été élaboré, mais non financé. Finalement les réserves seront implantées près de Lens.

Le prélèvement opéré sur Radio France est compatible avec le calendrier actualisé du chantier de la Maison de la Radio et ne remet pas en cause les conditions de son financement. Enfin, s'agissant d'Arte France, le prélèvement de 1 million n'affectera en rien le niveau des investissements dans la création audiovisuelle.

Ainsi, en 2014, les financements publics confortent la place du service public dans le secteur audiovisuel et en préservent les missions. Les crédits de France Médias Monde et de TV5 Monde sont même en augmentation.

La situation financière de France Télévisions est préoccupante. Les recettes publicitaires se dégradent. Sa participation à l'effort de redressement des finances publiques est modérée ; la dotation ne diminuera que de 1,7 % sur la période 2012 à 2015. La dégradation récente des recettes commerciales de l'entreprise n'est pas liée à la suppression de la publicité en soirée, qui existe depuis quatre ans, mais s'explique par le recul des audiences, en baisse de plus de 4 % entre 2010 et 2012 tandis que les recettes publicitaires chutaient de plus de 15 %. L'élaboration du projet d'avenant a révélé qu'une réforme en profondeur de l'offre régionale de télévision publique exigerait une reconfiguration du réseau : une vaste réflexion sera donc lancée sur l'offre de proximité et sur l'avenir de l'offre régionale de France 3. Une mission sera prochainement confiée à Anne Brucy, ancienne directrice du réseau France Bleu, qui associera des parlementaires, France Télévisions, les administrations concernées et des experts. Elle étudiera l'opportunité d'élargir les plages de diffusion d'émissions régionales et proposera des scénarios d'évolution.

Les crédits des politiques transversales, 10,48 millions d'euros, sont en baisse de deux millions. La subvention à la Hadopi diminue, mais son fonds de roulement lui permettra d'assurer la continuité de ses missions, dans l'attente d'une évolution du cadre législatif.

Les moyens consacrés à la politique en faveur du livre et de la lecture sont consolidés en 2014, y compris ceux du Centre National du Livre (CNL), qui a un nouveau directeur, M. Vincent Monadé. Nous cherchons à préserver la chaîne du livre dans sa diversité, avec une attention particulière pour les libraires indépendants, le maillon en danger. Vous avez voté la création d'une autorité administrative indépendante, le médiateur du livre, qui pourra s'appuyer sur les agents du ministère, lesquels seront assermentés pour contrôler le respect des lois sur le prix unique du livre de 1981 et de 2011. Le soutien au réseau des librairies indépendantes sera l'une des priorités du plan Livre en 2014, afin de favoriser le maintien d'un réseau dense et diversifié sur l'ensemble du territoire. Les services déconcentrés disposeront à cet effet de plus d'un million d'euros. Nous continuerons à soutenir la mise en place de contrats de filière, pour dynamiser le secteur du livre en région. Le fonds du CNL en faveur de la création et du développement des librairies sera doté de deux millions d'euros. Ces mesures s'ajoutent aux neuf millions d'euros du plan Livre. Le fonds d'avances destiné à consolider la trésorerie des librairies, soit cinq millions d'euros en 2014, sera géré par l'Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) ; et le fonds d'aide à la transmission des commerces (quatre millions d'euros), par l'association pour le développement de la librairie de création (Adelc). À quoi s'ajoutera une contribution volontaire des éditeurs en faveur des librairies indépendantes de sept millions d'euros. Enfin, en 2014, sera engagée une réflexion sur la hausse des coûts de transport, en coordination avec les autres ministères, afin de redéfinir le dispositif de soutien à la présence du livre en outre-mer. Le CNL continuera à apporter ses concours à des projets d'ouvrages de qualité. L'État, en région, maintiendra son soutien aux projets de publication et de développement des éditeurs locaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

J'invite maintenant nos rapporteurs pour la presse, les industries culturelles, l'audiovisuel et la politique du livre à intervenir.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

Je ne partage pas votre optimisme sur la presse. Ce secteur est déstabilisé, en très grande difficulté, en alarme maximum. Le soutenir est un impératif démocratique. Une très profonde mutation est à l'oeuvre, dont personne ne sait prédire l'issue. Des titres risquent de disparaître. Pourquoi ne pas baisser la TVA sur la presse numérique dès maintenant, puisque vous souhaitez un alignement ? Cette mesure aurait un effet minime pour le budget, mais elle est vitale pour la presse.

Les aides au pluralisme diminueront, en 2014, de 500 000 euros pour s'établir à 11,5 millions d'euros. Elles ne représentent que 3 % des aides directes à la presse mais sont les plus justifiées. Pourtant, les titres d'information politique et générale qui en bénéficient se trouvent dans une situation financière des plus dramatiques. Quelles dispositions envisagez-vous afin d'assurer la survie de ces titres, alors que la vente au numéro s'effondre ?

Le 1er juillet dernier, vous avez signé, avec quatre autres ministres, le contrat triennal d'entreprise liant La Poste à l'État. Trois jours plus tard était annoncée la fin du moratoire postal et le retour à l'application des accords Schwartz sur les tarifs postaux, entraînant une augmentation de charges de 60 millions d'euros pour les éditeurs. Pourquoi une telle précipitation, pourquoi cette absence de concertation ? Cette annonce a créé de vives tensions entre La Poste et les éditeurs, alors qu'une coopération entre eux est indispensable. Un médiateur sera nommé : avec quel mandat ? Envisage-t-on une refonte des modes de distribution ? Quel mécanisme équitable instaurer pour que La Poste y contribue également ?

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Madame la ministre, je salue votre combat pour préserver vos crédits. Bercy n'a pas pris pleinement conscience que la culture, en période de crise, ne représente pas seulement un supplément d'âme mais un élément essentiel du lien social et même du redressement productif. Dans une période de grand désarroi, elle maintient le vivre ensemble. Le budget de la culture représente une part infime du budget de l'État : il serait absurde de vouloir lui appliquer la toise.

Notre commission a discuté de l'avenant au contrat d'objectifs et de moyens de France Télévisions. Nous serons attentifs au plan de départs volontaires prévu chez France Télévisions afin d'éviter les effets pervers : son coût ne doit pas être excessif et surtout, il convient de s'assurer que la chaîne ne se vide pas de ses meilleurs éléments, dont on financerait le passage à la concurrence.

Je comprends votre explication concernant l'INA. Sa mission, toutefois, n'est pas secondaire ; la préservation des archives audiovisuelles est essentielle. Oui, le projet immobilier était pharaonique et l'État ne pouvait aligner les 55 millions demandés. Mais la ponction de 20 millions est-elle pour autant opportune ? Les archives sont stockées dans des conditions inquiétantes : au moindre incendie, ce sera la catastrophe ! Il est temps d'agir. L'INA peut supporter un prélèvement ponctuel sur son fonds de roulement, mais il ne faudrait pas qu'il se reproduise, sauf à compromettre l'accomplissement des missions qui lui sont confiées. Enfin, quand le rapport Vallet sera-t-il publié?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Votre prédécesseur s'était réjoui d'avoir préservé les crédits de son ministère. Nous partageons votre plaidoyer sur la place de la culture dans la société. J'observe toutefois que votre ministère participe désormais aux efforts de redressement des finances publiques, alors que ce secteur devrait être sanctuarisé.

La loi du 1er mars 2012 relative à l'exploitation numérique des livres indisponibles du XXe siècle, dont j'étais l'auteur et qui a fait l'objet d'un large consensus, aurait dû entrer pleinement en application, mais la phase de numérisation n'a pu encore débuter, faute de financements. La Bibliothèque nationale de France (BnF) a publié, le 21 mars dernier, une première liste de 60 000 titres, tandis que les droits d'exploitation numériques sont entrés en gestion collective le 21 septembre. Quelles solutions proposez-vous pour remédier aux blocages provenant, semble-t-il, des éditeurs d'une part, du Commissariat général à l'investissement d'autre part ? Il serait paradoxal que les oeuvres du XXe siècle ne soit pas accessibles à nos concitoyens, quand celles des siècles antérieurs le sont déjà.

La Hadopi avait été dotée de moyens importants pour lutter contre le piratage. En 2014, l'institution pourra, pour la dernière fois, puiser dans son fonds de roulement pour mener à bien ses missions. Celui-ci ayant alors atteint son seuil prudentiel, la dotation de la Hadopi devra mécaniquement augmenter en 2015. À moins que... Qu'envisagez-vous pour l'avenir de la Hadopi : la maintenir, avec un niveau de budget acceptable ou, comme le propose le rapport Lescure, transférer ses missions au Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) ? Pensez-vous que ce dernier représente l'instance la plus compétente pour intervenir dans le champ de l'Internet ?

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Je partage le point de vue de David Assouline sur l'INA. Il existe un vrai risque pour notre patrimoine audiovisuel. Le projet immobilier était démesuré, mais nous devons prévoir des lieux de stockage. L'implantation au coeur de Paris ne pouvait durer, un transfert en périphérie était inéluctable. De plus, la multiplication des sites n'était pas judicieuse. Aujourd'hui, il faut agir.

Il y a un an jour pour jour, vous dénonciez devant nous des aides trop peu sélectives. Or vous vous refusez aujourd'hui à désolidariser presse magazine et presse d'intérêt général.

Aujourd'hui, 35 000 journalistes possèdent une carte de presse : 30 000 sont réellement en activité, seuls 10 % à 15 % travaillent dans l'information politique et générale. Avec la hausse des tarifs postaux de 15 % au 1er janvier, d'autres quotidiens vont tomber, après France Soir ou La Tribune. La presse d'information appartient au secteur privé mais exerce une mission de service public. Avec l'Agence France-Presse (AFP), les grandes agences de presse, les grands quotidiens et quelques grandes chaînes de télévision constituent les lieux d'élaboration de l'information, reprise ensuite par tous les autres médias audiovisuels, radios et internet compris. L'information diffusée sur internet est toujours la même, démultipliée.

La baisse des aides pour les frais postaux m'inquiète : 37 millions contre 38 l'an dernier. Le soutien au portage n'est pas une compensation. Seule la Poste peut néanmoins assurer une diffusion d'un titre sur tout le territoire, y compris dans les zones peu denses. Avec la hausse des frais postaux, les quotidiens nationaux comme régionaux sont condamnés à voir leur zone de diffusion restreinte aux seules zones urbaines, avec un risque de monopole accru, localement, pour un titre de presse quotidienne régionale. Économiste des médias, je me méfie toujours de la justification économique de la culture : il ne faut pas négliger son utilité sociale et publique.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Le Scouarnec

Le budget 2014 confirme la baisse des crédits, déjà contraints, de la culture. Les libraires indépendants sont menacés. Quelles seront les modalités de l'aide de 18 millions ? La concurrence de la grande distribution est féroce. Les libraires indépendants ont aussi du mal à répondre aux appels d'offre des communes, pour équiper les bibliothèques et les médiathèques. Comment aménager la réglementation pour mieux les associer ? La survie des librairies de proximité n'est pas l'affaire des seuls libraires, elle nous concerne tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Michel Savin

Au lieu de reporter le projet de l'INA et de prélever 30 millions d'euros sur son fonds de roulement, pourquoi ne pas prévoir un projet moins ambitieux, réalisable rapidement, avec les fonds disponibles, afin de protéger les archives ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

Il existe une commission de contrôle des publications destinées à la jeunesse. J'y ai longtemps représenté le Sénat, avant que sa composition soit modifiée - les parlementaires n'y siègent plus. Notre réforme est-elle appliquée ? Comment fonctionne désormais la commission ?

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je m'associe aux inquiétudes exprimées à propos de l'INA. J'ai sollicité Bernard Cazeneuve à ce propos. Il y va de notre mémoire collective.

D'aucuns ont appelé de leurs voeux la création d'un comité de déontologie de la presse. Cela manque cruellement : TF1 a récemment modifié la bande son d'un reportage pour faire coïncider les sifflets adressés au chef de l'État, lors de son déplacement à Oyonnax, avec sa sortie de véhicule. Ce sont des méthodes de voyous. La chaîne ne relève pas du service public, mais elle utilise le bien commun qu'est la fréquence attribuée par le CSA. Madame la ministre, usez de tout votre pouvoir pour qu'une telle instance voie le jour.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre

Le CSA a été saisi de l'affaire. À l'occasion des Assises internationales du journalisme, la semaine dernière, j'ai annoncé le lancement d'une mission de réflexion sur la création d'une instance de déontologie de l'information, en étudiant les pratiques des pays voisins.

Les aides au pluralisme diminuent légèrement, en raison de la disparition de France Soir. Il n'était pas évident de maintenir ces 11 millions d'euros : j'y suis parvenue. Je me suis même opposée aux préconisations du rapport de Roch-Olivier Maistre qui préconisait de rassembler les aides dans un pot commun. J'ai tenu à maintenir la spécificité des aides au pluralisme. L'effort du gouvernement est remarquable sur ce point.

Si la TVA sur la presse en ligne n'a pas été abaissée en 2013, c'est que nous étions alors en contentieux avec la Commission européenne sur le livre. Nous discutons toujours de l'hypothèse d'une modification de la directive TVA. Quoiqu'il arrive, la TVA sur la presse en ligne sera réduite en 2014.

Nous souhaitons mieux cibler les aides de l'État sur l'accompagnement à la transition industrielle et numérique. Les interventions sont aujourd'hui nombreuses, dispersées ; et leurs effets parfois contradictoires. Nos choix reposent sur une aide transversale : la TVA à 2,1 % pour tous. Distinguer les taux de TVA selon la nature des titres n'était pas envisageable : voyez les suppléments et magazines du week-end, qui ne sont guère d'information politique et générale mais sont lancés par des titres relevant de cette catégorie.

L'évolution des technologies nous conduit aussi à rationaliser les aides : celle aux rotatives sera précédée d'une étude d'impact approfondie, afin de vérifier qu'il n'existe pas déjà alentour des surcapacités.

Les aides au postage seront supprimées pour éviter les effets d'aubaine. La presse doit faire sa transition économique et écologique. L'État ne peut être le recours systématique. La levée du moratoire sur les aides postales faisait partie des préconisations du rapport Maistre. En contrepartie, nous augmentons l'exonération de charges sociales pour les vendeurs-colporteurs de presse, y compris pour la presse magazine d'information politique et générale : c'est un choix fort. Le contrat qui lie La Poste à l'État peut évoluer. Un avenant a déjà été signé. Une mission travaillera sur la fin du moratoire et les relations entre l'État, la Poste et les éditeurs à horizon 2015, à l'échéance des accords Schwartz de 2009.

Les crédits du fonds stratégique ont été ciblés sur l'information politique et générale et les tarifs postaux modulés selon que les titres relevaient de l'information politique et générale ou non, et selon la part de ressources publiques reçues. Nous préparons le choc de 2015 : il est donc pertinent de lisser ces évolutions sur deux ans. La médiation sera conduite par l'inspection générale des affaires culturelles et l'inspection générale des finances. La fin du moratoire doit nous conduire à trouver un nouvel équilibre entre l'État, La Poste et les éditeurs.

Sur l'INA, je m'étonne que la trésorerie des établissements publics puisse être considérée comme leur propriété. Ils sont financés par l'argent public. En outre, pourquoi certains établissements accumulent-ils un tel fonds de roulement ? En temps de crise, la pratique est particulièrement contestable. Rien ne s'oppose à ce que l'État puise dans cette manne, du moment que cela ne remet pas en cause le fonctionnement de l'établissement. En l'occurrence, l'État n'a prélevé que 20 des 30 millions d'euros accumulés par l'INA, que celle-ci destinait au financement d'un projet, non de 80 mais de 120 millions d'euros - au départ... Les dérives de certains chantiers devraient nous faire réfléchir. On nous reproche de dépenser de l'argent pour achever la Philharmonie de Paris, mais on critique également mon refus de reproduire cette erreur ! Cela étant dit, je ne conteste pas qu'il faille des locaux adaptés à la conservation des archives : j'ai demandé une mise aux normes des bâtiments actuels. Le prochain contrat d'objectifs et de moyens pour 2015-2019, dont la négociation commencera au second semestre 2014, sera l'occasion de travailler à un autre projet. Je précise qu'il n'y a pas de recul de la dotation de l'INA, et que le point de départ pour établir les dotations futures sera le niveau de 90 millions d'euros inscrits en loi de programmation budgétaire, non les 69 millions de 2014.

Le rapport de Laurent Vallet me sera remis avant Noël. Il traitera notamment du pourcentage minimal de financement des oeuvres pour entrer dans la catégorie des coproductions, des mandats de commercialisation, etc.

Monsieur Legendre, sanctuariser un budget, souvent, signifie ne rien changer au fonctionnement présent. De plus, on peut sanctuariser un budget et tout modifier à l'intérieur, ou consacrer beaucoup de ressources à des dépenses inutiles.

Le financement de la numérisation des oeuvres indisponibles sera assuré par le Commissariat général à l'investissement, sur le programme des investissements d'avenir. Le CNL participera à cette opération à forte dimension patrimoniale. La numérisation sera effectuée par la BnF. La question de la participation patrimoniale est réglée, pas celle de la participation commerciale : néanmoins, que l'on ne compte pas sur l'État pour suppléer des partenaires privés réticents. J'ai reçu les éditeurs. J'ai fait une proposition, qui sera examinée par eux comme par le commissaire général à l'investissement.

Nous avons largement abordé la question de la Hadopi avec David Assouline ici-même. Nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi sur la création en 2014. La lutte contre la contrefaçon continue, comme en témoigne la condamnation prononcée mardi dernier à Thionville. Les 6 millions d'euros alloués à la Hadopi lui permettront d'exercer ses missions, sans compter qu'elle dispose de 5 à 6 millions d'euros de fonds de roulement. Nous travaillerons avec elle et le CSA pour cibler au mieux ses besoins pour l'année prochaine.

La Tribune n'est pas morte, elle a changé de modèle et le personnel semble très satisfait des nouvelles perspectives. Je n'ai en revanche pas de commentaires à faire sur la disparition de France Soir. Les titres vivent et meurent. Ce n'est pas à l'État de maintenir sous perfusion des quotidiens non viables.

Le poids économique de la culture, bien sûr, n'est pas le seul aspect à considérer. Cependant, il est légitime de s'interroger. Si les aides sont insuffisamment ciblées, ou contradictoires, elles deviennent contreproductives. Il était nécessaire de les réorienter afin d'accompagner la modernisation du secteur.

Je suis attentive au respect de la loi sur le prix unique du livre, et je veux éviter les contournements par le recours aux market places comme Amazon : certains vendeurs passent par ce canal pour vendre à prix d'occasion des livres neufs. Nous créons un médiateur du livre, et les agents du ministère seront assermentés pour constater les infractions à cette loi.

Monsieur Le Scouarnec, favoriser les libraires indépendants dans les appels d'offres des collectivités territoriales pour l'approvisionnement des bibliothèques nécessiterait de modifier le code des marchés publics, ce qui n'est pas facile et requiert la collaboration de Bercy.

Le nouveau système de contrôle des publications pour la jeunesse semble fonctionner correctement. Nous travaillons avec la Chancellerie et le ministère de l'Intérieur. Nous en dresserons un bilan en 2014.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Je donne la parole à M. Yann Gaillard, rapporteur spécial de la commission des finances, qui est en quelque sorte notre Bercy à nous...

Debut de section - PermalienPhoto de Yann Gaillard

Je suis très heureux d'assister à vos remarquables travaux. Je constate la grande compétence des membres de cette commission : je suis ici moins pour parler que pour apprendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous entamons la deuxième partie de cette réunion, relative à la création et à l'éducation artistique et culturelle.

Debut de section - PermalienPhoto de Maryvonne Blondin

Je salue les efforts de la ministre pour nous présenter un budget qui préserve le coeur de ses missions. L'éducation artistique et culturelle fait partie des priorités. Vous avez réussi, madame la ministre, à la mettre en place avec le ministère de l'éducation nationale, et nous vous en félicitons. Il y va de la richesse future de notre nation.

Les crédits dédiés à la création ont été moins épargnés. Les acteurs du secteur sont préoccupés par le gel de 7 % de ceux-ci. L'Opéra national de Paris a subi le gel d'une partie de son financement en cours d'année, susceptible de menacer des programmations qui s'étalent sur quatre ou cinq ans.

La culture est une source d'épanouissement individuel et collectif. Par les temps qui courent, nous avons plus que jamais besoin des valeurs qu'elle véhicule. Mais il faut aussi rappeler le poids économique du secteur, qui repose sur des emplois non délocalisables, et sur le dynamisme de nombreux jeunes.

À l'échelle européenne, le gouvernement affiche un certain volontarisme, comme en témoignent le document Promouvoir les secteurs de la culture et de la création pour la croissance et les emplois, ou, le programme d'ouverture à l'international dit Europe créative. Hélas le budget, en ce domaine, stagne.

Notre création est riche, mais la diffusion souffre de quelques faiblesses. L'introduction d'un nouvel indicateur de performance de diffusion va dans le bon sens.

Le projet de loi relatif à la création est très attendu. Nous avons en particulier besoin d'un observatoire national susceptible de recueillir des informations statistiques et de mieux prendre en compte les pratiques amateurs.

Ce budget laisse apparaître deux difficultés : d'une part, la baisse du plafond de la taxe affectée au Centre national de la chanson, des variétés et du jazz (CNV), qui passera de 27 à 24 millions d'euros, redistribués aux compagnies et aux jeunes artistes qui animent les festivals, ainsi qu'aux entreprises de l'audiovisuel à petit budget. D'autre part, les multiples taux de TVA suivant les secteurs et les intervenants. L'Assemblée nationale a voté le taux réduit sur les billets de cinéma et sur l'importation des oeuvres d'art. Il est maintenu sur les billets de spectacle vivant et les livres. Mais nous allons taxer plus fortement les auteurs d'oeuvres : comme ils ne peuvent répercuter la taxe, elle va peser sur leurs revenus.

La Philharmonie de Paris reste un motif d'inquiétude. Si les collectivités territoriales géraient leurs budgets et leurs chantiers de cette façon, elles seraient jugées gravement irresponsables !

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Nachbar

Le budget dédié aux établissements d'enseignement est contrasté. Les établissements d'enseignement supérieur qui font partie du ministère de la culture voient leurs crédits progresser de 9,5 % en autorisations d'engagement et de 7 % en crédits de paiement. Leur fonctionnement est ainsi protégé. Les établissements spécialisés en région, essentiellement les conservatoires, sont en revanche privés de 31 % de leurs ressources, après une baisse de 25 % l'an dernier. L'État entend-il se désengager complètement ? Quel rôle les collectivités territoriales joueraient-elles alors ?

Tous les acteurs s'inquiètent des orientations prises en matière d'éducation artistique et culturelle en milieu scolaire. L'éducation nationale semble réticente à s'engager dans cette voie, pourtant fondamentale pour promouvoir l'égalité des chances.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Je félicite Mme la ministre, dont le budget équilibré contribue au redressement des finances de l'État.

Quels engagements avez-vous pris sur le dégel des crédits du programme 131 « Création » ? L'administration est-elle disposée à mettre en oeuvre la mesure ?

Les crédits de la création artistique progressent de 4,5 millions d'euros, afin de renforcer les moyens des labels de scènes de musiques actuelles et de renouveler la direction des centres dramatiques nationaux et des centres chorégraphiques nationaux. Mais les marges des théâtres ont fondu ces dernières années, ce qui les oblige à diminuer leurs crédits artistiques, voire à annuler certaines productions. En Ile-de-France, région la mieux dotée en troupes et en institutions car la plus peuplée du pays, la précarité progresse.

La convergence des autorisations d'engagement et des crédits de paiement n'est pas mauvaise en soi mais elle freine le lancement de nouveaux projets, sans oublier les conséquences sur la maintenance des équipements. L'an prochain, il faudra revoir tout cela.

Je me félicite de la convention signée avec le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche pour la diffusion et le partage de la culture dans les établissements d'enseignement supérieur.

Enfin, je veux attirer votre attention sur l'importance du soutien à la création des artistes handicapés, qui s'épuisent, d'un ministère à un autre, à trouver des réponses à leurs questions. Ces artistes ont pourtant d'importantes capacités de dynamisation de la création.

Debut de section - PermalienPhoto de Françoise Cartron

Ce budget affiche un certain nombre de priorités, qui sont autant de moyens de surmonter la période difficile que nous traversons.

L'éducation artistique et culturelle, qui vous tient à coeur, est un chantier majeur, surtout dans l'enseignement du premier degré. Allez-vous enfin donner des instructions claires sur ce sujet ? Les créateurs, les établissements labellisés en région, auront-ils enfin la reconnaissance qu'ils méritent pour leur travail de terrain ? Il faut sensibiliser les enfants dès le plus jeune âge aux pratiques artistiques.

Dispose-t-on d'un inventaire des informations recueillies par les observatoires régionaux ? Peut-on les mettre en réseau, plutôt que de créer un observatoire national ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

En 2012, j'ai travaillé avec Cécile Cukierman sur les établissements publics de coopération culturelle (EPCC), créés par les communes et les conseils généraux : alors que prises séparément ces collectivités ne sont pas assujetties à la taxe sur les salaires, elles le sont lorsqu'elles se regroupent dans le cadre d'un EPCC. Tous les cabinets ministériels que j'ai contactés m'ont indiqué que la prochaine loi relative à la décentralisation serait l'occasion de clarifier le droit applicable. Y êtes-vous favorable ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Laurent

L'éducation artistique en milieu scolaire doit être intégrée dans la réforme des rythmes scolaires. Or la mise en oeuvre de celle-ci ne se passe pas exactement comme prévu. Non pas en raison de boycotts ou de postures inspirées par des motivations politiques mais parce que l'affaire n'a pas été suffisamment pensée. Faisons-le avant que la crise ne s'aggrave car nous allons au-devant de grandes difficultés.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre

L'enseignement artistique est une priorité : les crédits qui lui sont consacrés augmenteront de 33 % sur deux ans. Cela permettra de financer 1 000 projets supplémentaires par an. Ceux-ci ont vocation à s'inscrire dans la réforme des rythmes scolaires. Nous sommes favorables à la mise à disposition de professionnels de la culture pour en assurer le contenu. J'ai demandé aux directions régionales des affaires culturelles (DRAC) d'encourager la constitution de réseaux pour organiser ces parcours artistiques. Le ministère de la culture et les établissements culturels ne sont pas chefs de file sur cette politique, qui exige une forte implication des collectivités territoriales. Nous y travaillons au sein du Conseil des collectivités territoriales pour le développement culturel local. État et collectivités, nos actions sont complémentaires. Je suis une militante de ces sujets, car il y a là un moyen pour redonner confiance dans l'école.

Nous avons remporté une victoire contre la Commission européenne en matière de cinéma : Bruxelles plaidait pour la déterritorialisation des aides à la production cinématographique, mais le nouveau projet de communication cinéma présenté par le commissaire Almunia ce matin même nous donne gain de cause. Il faut remettre de la culture dans l'Europe et de l'Europe dans la culture. Vous êtes d'ailleurs invités au forum Europe et culture qu'organisera le ministère sur ce sujet les 11 et 12 avril prochains au théâtre national de Chaillot.

L'Opéra national de Paris a longtemps bénéficié d'un traitement de faveur en ne subissant aucun gel de crédits. Son fonds de roulement était important, l'établissement enregistrait même un fort excédent à la fin de 2012. Le gel de 4,5 millions d'euros de ses crédits était donc parfaitement absorbable et n'a pas altéré sa programmation artistique future.

Nous accordons la plus grande importance aux pratiques amateurs, qui feront l'objet de dispositions dans le prochain projet de loi création.

Le plafonnement de la taxe dont dispose l'Association de soutien au théâtre privé est abaissé à un niveau qui reste toutefois supérieur ou égal au rendement de celle-ci. Il est exact en revanche que pour le CNV, le nouveau plafond de la taxe est inférieur au rendement : 24 millions contre 24,3 millions de recettes. Je me battrai pour le relever. Je suis attachée à cette taxe, qui permet de soutenir l'économie du spectacle.

Je regrette le sort de la TVA sur les droits d'auteur. Toutefois, celle applicable aux billets de cinéma baissera, ainsi que celle sur l'importation d'oeuvres : c'est une victoire.

Les crédits dédiés à l'enseignement supérieur augmentent de façon importante. Je souhaite créer au sein du ministère un pôle chargé de l'enseignement culturel, sujet aujourd'hui éparpillé entre différents services. Je plaide également pour la création d'un conseil national de l'enseignement supérieur et de la culture, chargé d'étudier les questions transversales.

L'enseignement spécialisé a fait l'objet d'un transfert de compétences en 2004. Ce fut un choix politique. L'État ne finance plus ces établissements qu'à hauteur de 6 %. J'ai décidé de diminuer encore cette part, qui doit être compensée par les collectivités territoriales. En contrepartie, l'État réoriente ses moyens sur l'enseignement supérieur, l'éducation artistique et culturelle, et le soutien aux publics éloignés de la culture. Nous finançons également des bourses pour les étudiants qui se destinent à la professionnalisation, et soutenons les conservatoires rattachés à un pôle régional d'enseignement supérieur, à Toulouse, Strasbourg ou Aubervilliers. Le reste des crédits sera affecté aux DRAC en fonction du nombre d'élèves par établissement.

Madame Gillot, le dégel est totalement effectif sur le programme 131. Mais les DRAC ont un pouvoir d'appréciation, et ne sont donc pas tenues de maintenir au même niveau les crédits alloués à chaque bénéficiaire.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre

C'est ce que j'ai fait. Les DRAC doivent assumer leurs choix.

J'aurais aimé indexer les crédits de soutien à la création : c'est malheureusement impossible à ce stade.

Un article du projet de loi relatif à la création traitera la question des artistes handicapés. L'une de mes collaboratrices travaille spécifiquement sur ce sujet. De plus, nous soutenons entre autres le théâtre d'Emmanuelle Laborit et la Compagnie de l'oiseau mouche.

L'Ile-de-France ne connaît aucune baisse spécifique de ses crédits, c'est même le contraire. Nous avons sorti l'Orchestre national d'Ile-de-France de la crise qu'il traversait. La convention universités que nous venons de signer avec Geneviève Fioraso va également dans ce sens.

Je suis favorable à la constitution en réseau des observatoires régionaux existants. Nous pourrons le faire dans la loi sur la création. Il faut aussi valoriser les pôles d'observation, qui sont des outils stratégiques. Le bilan du spectacle vivant dressé dans le cadre de la modernisation de l'action publique fournit des chiffres intéressants sur les inégalités de crédits entre territoires. On y trouve la confirmation que l'Ile-de-France n'est nullement défavorisée.

Je suis également partisane d'une évolution du statut des EPCC. Nous poursuivons le travail en collaboration avec Mme Lebranchu.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

Nous en venons à la troisième partie de notre réunion, consacrée au patrimoine.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Eblé

Vous savez l'intérêt du Sénat pour les collectivités territoriales, qui participent aux côtés de l'État à notre politique du patrimoine, qu'il s'agisse du bâti, des archives, de la valorisation et de l'accessibilité du patrimoine.

Les petites collectivités sont toujours aussi démunies dans l'assistance à maîtrise d'ouvrage. Elles ne connaissent pas les possibilités offertes en la matière, il faut les guider. Le décret relatif à l'opérateur du patrimoine et des projets immobiliers de la culture (OPPIC) pourrait être modifié pour lui confier la mission de conseil gratuit aux collectivités territoriales, mais serait-ce compatible avec le droit européen ?

La diminution de la consommation des crédits de l'État en faveur du patrimoine monumental a un effet multiplicateur inversé, car avec la pratique des financements croisés, cela aboutit à des désengagements en cascade. Nous aurions besoin d'une nouvelle étude mesurant les dépenses culturelles de chaque catégorie de collectivités territoriales et évaluant les sommes destinées au petit patrimoine non protégé. La dernière du genre date de 2006 et les associations de collectivités disent ne pas avoir les moyens d'en réaliser de nouvelles.

Nous avons, je crois, la même définition du patrimoine, qui ne se réduit pas au critère chronologique. Il y a une actualité du patrimoine. L'architecture, art qui participe de notre cadre de vie, doit avoir toute son importance. Pouvez-vous nous préciser les crédits destinés au soutien à l'architecture innovante et dynamique ? La création de conseils d'architecture, d'urbanisme et d'environnement (CAUE), les Albums des jeunes architectes paysagistes ou la mission interministérielle sur la qualité des constructions publiques, sont autant d'initiatives qui vont dans le bon sens. Je veux aussi appeler votre attention sur l'importance du soutien à l'éducation dans ce domaine.

L'enjeu patrimonial touche même les nouvelles technologies. Les oeuvres de nature numérique ont des exigences de conservation propres. Un projet interministériel a été lancé et amorcé par 1,5 million d'euros de crédits. Sera-t-il pérennisé ?

Debut de section - PermalienPhoto de Corinne Bouchoux

Une remarque : il serait opportun de réfléchir au bien-être au travail des salariés de l'INA.

Un grand nombre de structures publiques exposent des oeuvres d'artistes vivants sans respecter leur droit de présentation publique. Certains responsables n'hésitent pas à affirmer que les artistes « devraient déjà être contents d'être invités à exposer ». Comment faire respecter le droit si les acteurs publics eux-mêmes s'en affranchissent ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jacques Legendre

Le dernier fabricant de piano français, Pleyel, est en faillite. Est-il encore envisageable de conserver en France cette marque historique ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre Bordier

Les crédits de l'État en faveur du patrimoine monumental ne sont pas sous-consommés, ils sont insuffisants. Je dresse un constat totalement inverse de celui de notre rapporteur. Dans mon département, nos actions sont engagées conjointement avec celles de l'État. Nous irions volontiers plus loin, mais nous sommes limités par le montant des crédits nationaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Marie-Christine Blandin

J'en profite pour saluer le rapport que vous avez rédigé avec Mme Cukierman sur les établissements publics de coopération culturelle (EPCC).

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre

Le rythme de consommation des crédits évolue en fonction des chantiers. Comme certains grands chantiers sont arrivés à terme, les crédits engagés baissent mécaniquement. Mais le rythme d'utilisation des crédits déconcentrés est conforme aux prévisions.

L'évaluation de l'assistance à la maîtrise d'ouvrage des collectivités territoriales a révélé des difficultés. Le retour à une gestion par l'OPPIC, établissement centralisé dépourvu d'antennes sur le territoire, ne me semble pas une bonne solution. Il faut que l'État mette à disposition des collectivités territoriales des ressources en ligne, guides, contrats-types. Il faut aussi renforcer les contrôles scientifiques et techniques en amont et être plus sélectifs. Le bilan de la modernisation de l'action publique comportera sans doute des éléments à ce sujet.

Monsieur Eblé, il est difficile d'évaluer les dépenses des collectivités territoriales consacrées au patrimoine. Nous ne disposons pas des outils adéquats. Seule la direction générale des collectivités locales serait capable de réaliser une étude exhaustive, en exploitant toutes les comptabilités locales... Mais on pourrait aussi procéder par sondages.

La loi sur la création comprendra des mesures de soutien à l'architecture : les écoles d'architecture verront leurs crédits augmenter, 75 postes équivalent temps plein seront créés dans le prolongement du rapport de M. Vincent Feltesse. En matière de valorisation du patrimoine, le rôle des CAUE sera valorisé, j'adresserai une circulaire aux préfets sur ce point. Une nouvelle campagne sera lancée pour mettre en valeur le label Patrimoine du XXe siècle.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre

On peut imaginer un centenaire glissant... Je suis attachée au développement des archives numériques. Le projet Vitam (Valeurs immatérielles transférées aux Archives pour mémoire) est important. Il est doté d'1,5 million d'euros. Madame Bouchoux, le droit de présentation est, en effet, insuffisamment respecté dans les établissements publics et les collectivités territoriales. Il faut développer les bonnes pratiques.

La souffrance au travail est un sujet qui me préoccupe. Mon cabinet a reçu les salariés de l'INA.

Le fabricant de pianos Pleyel fait l'objet d'un plan de sauvetage. Beaucoup de liquidités ont été injectées par le repreneur. Mais l'entreprise a perdu le marché des pianos d'études, désormais capté par les fabricants asiatiques et le positionnement haut de gamme n'a pas suffi à la sauver. L'État avait apporté sa contribution, après l'incendie des locaux à Saint-Denis. Mais la seule issue est de trouver un repreneur, sinon l'État ne pourra rien faire. Il conviendrait de saisir le ministre du redressement productif...