La séance est ouverte à onze heures cinq.
Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.
Il n'y a pas d'observation ?...
Le procès-verbal est adopté sous les réserves d'usage.
J'ai le très profond regret de vous faire part du décès de notre collègue Daniel Bernardet, survenu hier, le 21 novembre 2007.
Il était sénateur de l'Indre depuis 1989.
Je prononcerai son éloge funèbre ultérieurement, mais je tiens d'ores et déjà à saluer sa mémoire.
Au nom du Sénat, je souhaite exprimer notre sympathie et notre profonde compassion à sa famille, à ses proches et au groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
Je vous propose d'observer un instant de recueillement.
Mme et M. les ministres, Mmes et MM. les sénateurs se lèvent et observent une minute de silence.
J'ai reçu, transmis par M. le Premier ministre, un projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale.
Le projet de loi sera imprimé sous le n° 90, distribué et renvoyé au fond à la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation, et, pour avis, sur leur demande, aux autres commissions permanentes.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de finances pour 2008, adopté par l'Assemblée nationale (nos 90 et 91).
Madame la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi, monsieur le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, nous commençons aujourd'hui l'examen du projet de loi de finances pour 2008, un an presque jour pour jour après l'ouverture de l'examen du précédent projet de budget.
Je vous remercie, madame la ministre de l'économie, d'être parmi nous en ce moment solennel d'ouverture de la discussion budgétaire, de même que, vous, monsieur le ministre des comptes, dont nous avons déjà pu apprécier, lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale, la disponibilité, la capacité d'écoute et la compréhension à l'égard du Parlement.
La période pionnière de l'inauguration de la LOLF est désormais révolue. Cependant, si la rénovation de la discussion budgétaire promue par notre « constitution financière » a déjà, par deux fois, fait ses preuves, c'est à nous de « transformer l'essai » pour ce troisième budget « lolfien ».
C'est bien la formule consacrée, monsieur le président de la commission des finances ?
Cette journée n'en reste pas moins particulière, car il s'agit du premier projet de budget de cette XIIIe législature, marquée sur le plan des finances publiques, qui nous intéresse aujourd'hui, par la « Révision générale des politiques publiques », comme l'a souligné M. le rapporteur général à l'occasion du débat d'orientation budgétaire pour 2008, en juillet dernier. Beau et vaste programme !
Comme l'année dernière, je renouvelle ma confiance à tous, commission des finances, commissions saisies pour avis, groupes politiques de la majorité comme de l'opposition, pour faire vivre les règles que nous avons adoptées en 2001, et dont la vocation est de renforcer la portée de l'autorisation budgétaire dans une logique de résultat.
Je voudrais insister une nouvelle fois sur l'importance déterminante qui s'attache au respect par chacun de son temps de parole. Il s'agit là d'une condition essentielle du bon déroulement de nos débats.
Ne l'oublions pas - je me tourne vers le banc du Gouvernement -, il appartient aussi aux ministres de ne pas dépasser les temps de parole qui, comme chaque année, ont été arrêtés en conférence des présidents, cela avec l'accord de M. le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, qui, depuis longtemps, connaît bien nos contraintes.
Je vous rappelle enfin que, comme l'année dernière, la conférence des présidents a prévu, sur proposition de la commission des finances, l'organisation de quatre débats dans le cadre de l'examen des articles de la première partie.
Le débat sur les collectivités territoriales, qui aura lieu le mardi 27 novembre à seize heures, revêt une importance particulière au Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales dont le renouvellement pour un tiers aura lieu en septembre prochain.
Le débat sur le « prélèvement européen », à l'occasion de la discussion de l'article 31, se tiendra le mercredi 28 novembre.
À l'occasion du vote sur l'article d'équilibre, le mercredi 28 novembre, auront lieu le débat sur les effectifs de la fonction publique et le débat sur l'évolution de la dette de l'État, sujets éminemment d'actualité.
Enfin, le mardi 11 décembre, nous procéderons au scrutin public à la tribune sur l'ensemble du projet de loi de finances pour 2008, à une heure que je souhaite raisonnable.
Avec l'effort de chacun, je suis sûr que c'est un débat fructueux qui s'ouvre aujourd'hui, et que les vingt jours à venir feront honneur à notre assemblée, soucieuse comme toujours d'assumer pleinement ses prérogatives budgétaires, lesquelles relèvent de notre double fonction législative et surtout de contrôle. Je me plais à dire que cette dernière fonction est la seconde nature de notre institution !
Maintenant, place au débat !
Dans la discussion générale, la parole est à M. le ministre.
Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, se projeter dans l'avenir en faisant face aux problèmes du présent, tel est bien évidemment le sens du projet de loi de finances pour 2008, que j'ai l'honneur de vous présenter avec Mme Christine Lagarde.
Notre ambition, c'est de mettre fin au déficit d'avenir dont souffre notre pays. Notre politique pour y parvenir, c'est de lutter contre les déficits présents et d'investir dans la croissance de demain. Ces deux objectifs sont parfaitement cohérents entre eux. Ils sont conciliables, complémentaires ; ils s'aident l'un l'autre.
Qui prétendra que c'est en asphyxiant la croissance qu'on réduira la dette ? Nous voulons rétablir les conditions d'une croissance forte et durable en France.
Notre logique, c'est une logique d'investissement : nous investissons aujourd'hui dans la croissance pour en tirer profit dans les années à venir. Nous investissons dans la recherche et l'enseignement supérieur. Nous investissons dans la baisse des prélèvements et la revalorisation du travail. Cela crée les conditions d'une croissance durablement forte et d'une baisse rapide des déficits durant le mandat du président de la République.
L'objectif de réduction du déficit de l'État est plus que jamais la priorité.
Le déficit était à 42 milliards d'euros en loi de finances initiale pour 2007, à 41, 7 milliards d'euros dans le projet de loi de finances que nous avons déposé et à 41, 8 milliards d'euros à la sortie de l'Assemblée nationale. Votre Assemblée aura peut-être à coeur de revenir au chiffre initial, voire - pourquoi pas ? - en deçà à l'issue de ces débats !
Le déficit de l'ensemble des administrations publiques sera, quant à lui, ramené à 2, 3 % du PIB, après 2, 4 % cette année.
Ces objectifs seront tenus, parce que notre prévision de croissance est raisonnable, parce que nous avons fait des prévisions de recettes volontairement prudentes, comme l'a noté votre rapporteur général, M. Philippe Marini, et parce que nous faisons un effort sans précédent pour maîtriser la dépense. Nous disposons d'ailleurs, avec la LOLF, d'un outil efficace, la réserve de précaution, que nous allons utiliser à plein et que nous vous proposons de renforcer dans ce projet de loi de finances.
Pour muscler la croissance, nous nous attaquons aux déficits de travail et de compétitivité de notre pays. Nous y procédons en prenant trois séries de mesures : nous revalorisons le travail et le pouvoir d'achat, nous renforçons les leviers de croissance et nous consolidons le tissu des entreprises.
Le projet de loi de finances pour 2008 vise tout d'abord à financer la baisse massive de prélèvements inscrite dans le projet de loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat, présenté par Mme Christine Lagarde en juillet dernier. Il poursuit ainsi la démarche que nous avons engagée pour revaloriser le travail et les rémunérations, qui sont évidemment au coeur de l'actualité dans notre pays.
Vous remarquerez que les mesures de cette loi sont d'autant plus justifiées aujourd'hui que nous faisons face à une conjoncture internationale moins porteuse. En baissant les prélèvements obligatoires, qui seront ramenés de 44, 2 % à 43, 7 % du PIB, nous renforçons l'attractivité et la compétitivité de notre pays.
Je rappelle, en outre, que la démarche de valorisation du travail est complétée par un encouragement de l'emploi des seniors, grâce à différentes dispositions présentées dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.
Voilà pour les leviers de la croissance au présent : le travail et le pouvoir d'achat.
Venons-en aux leviers de la croissance à venir.
Dans l'économie de la connaissance, ces leviers sont la recherche et l'innovation. J'imagine que vous tous, mesdames, messieurs les sénateurs, êtes d'accord sur ce diagnostic. Le projet de loi de finances pour 2008 fait des choix clairs et volontaristes en ce sens, avec plusieurs mesures phare.
Dans le domaine fiscal - Mme Christine Lagarde y reviendra de façon plus approfondie -, nous renforçons l'ensemble des maillons de la chaîne de la recherche. Je rappelle, notamment, l'amplification très forte du crédit d'impôt recherche, qui profitera aux entreprises en 2009, en fonction des efforts de recherche et de développement qu'elles feront en 2008.
Par ailleurs, dès l'année prochaine, nous augmenterons de 1, 8 milliard d'euros les moyens de l'enseignement supérieur et de la recherche pour accompagner, notamment, la réforme des universités adoptée cet été. Si l'on y ajoute les dépenses d'investissement, les dépenses qui fondent notre avenir progressent de 6 % dans ce budget, soit près de quatre fois plus vite que l'ensemble des dépenses de l'État, alors que l'on entend toujours dire que les dépenses de fonctionnement progressent au détriment des dépenses d'investissement.
Ces « dépenses d'avenir » atteignent 39 milliards d'euros, soit un niveau proche du déficit budgétaire. Si l'on ne peut pas, bien sûr, se satisfaire de ce déficit, on doit néanmoins constater - et c'est nouveau - qu'il est de plus en plus lié à des dépenses d'investissement et non pas seulement aux dépenses de fonctionnement courant.
Enfin, troisième axe de la dynamisation de notre économie, nous consolidons le tissu des entreprises par quatre mesures.
Tout d'abord, la baisse de la taxe professionnelle, que vous avez votée voilà deux ans
Mme Nicole Bricq s'exclame.
Ensuite, la simplification et l'harmonisation des règles relatives aux pactes d'actionnaires favoriseront la pérennité des entreprises, notamment des PME, qui sont souvent fragilisées au moment de leur transmission.
De même, nous modernisons la fiscalité des dividendes, afin de dynamiser l'épargne en l'orientant davantage vers le financement des entreprises. Sur ce sujet, les débats à l'Assemblée nationale ont permis de trouver une solution consensuelle.
Nous étendons la retenue à la source aux revenus des actions, mais nous portons le taux de ce prélèvement de 16 % à 18 % pour l'ensemble des revenus concernés, qu'il s'agisse de produits de taux ou de dividendes.
L'objectif initial est ainsi respecté. Les investissements risqués, c'est-à-dire les actions, ne seront plus pénalisés par rapport aux produits qui sont moins risqués, comme les obligations ou les SICAV à court terme.
En outre, cette réforme, qui apporte des recettes supplémentaires pour 2008, n'aura aucun coût les années suivantes. C'est un débat que nous avons eu à l'Assemblée nationale.
Enfin, nous avons supprimé, à compter de 2009, l'impôt sur les opérations de bourse, l'IOB, afin de renforcer la compétitivité de la place de Paris et d'éviter toute délocalisation des transactions. Cette suppression a été gagée en portant à 18 % le taux de la taxation sur les plus-values mobilières.
J'ai bien noté que la commission des finances du Sénat propose de supprimer l'IOB dès 2008 et qu'elle a gagé cette mesure. Nous aurons donc l'occasion de revenir sur ce sujet dans les jours à venir.
L'investissement que nous faisons en faveur de la croissance est crédible parce qu'il s'inscrit dans un cadre maîtrisé pour les finances publiques.
Concrètement, les dépenses de l'État seront stabilisées en volume, c'est-à-dire qu'elles ne progresseront pas plus vite que l'inflation. Compte tenu de la croissance, le poids de la dépense publique dans le PIB sera ainsi ramené, sur deux ans, de 53, 4 % en 2006 à 52, 6 % en 2008.
L'innovation dans ce projet de loi de finances pour 2008, c'est que cette stabilisation s'appliquera, pour la première fois, à un périmètre élargi de dépenses, qui inclut les prélèvements sur recettes destinés à l'Union européenne et aux collectivités locales. Dans ce périmètre très large, qui représente 335 milliards d'euros en 2007, les dépenses n'augmenteront donc que de 5, 5 milliards d'euros.
Nous bénéficierons certes d'une évolution favorable du prélèvement sur recettes au profit de l'Union européenne ; mais ne nous trompons pas de débat ! L'élargissement de la norme représente bien une réforme profonde de gouvernance et non un avantage conjoncturel, réforme que les commissions des finances du Sénat et de l'Assemblée nationale appelaient depuis longtemps de leurs voeux.
Avec cette norme élargie, il est clair que nous amplifions les efforts antérieurs, puisque, dans ce nouveau périmètre, les dépenses ont augmenté en moyenne de 1, 1 % en volume entre 1999 et 2006 et de 0, 2 % en 2007.
Cette maîtrise renforcée s'inscrira dans la durée. Notre objectif, je le rappelle, est de diviser par deux le rythme de croissance de la dépense publique, qu'il s'agisse de l'État, de la sécurité sociale ou des collectivités locales, pendant les cinq prochaines années. Nous ramènerons sa progression à un peu plus de 1 % en volume, alors qu'elle était supérieure à 2 % par an au cours de ces dix dernières années.
Contrairement à ce que j'ai pu lire, et qui m'a parfois étonné, l'élargissement de la norme n'a pas rendu l'élaboration du budget plus facile, d'autant que cette stabilisation est soumise à de fortes contraintes, que nous nous sommes d'ailleurs imposées à nous-mêmes.
La hausse des taux d'intérêt renchérit de 1, 6 milliard d'euros la charge de la dette, fruit du passé.
L'accélération des départs en retraite augmente les versements consacrés aux pensions de 2 milliards d'euros.
Les dotations aux collectivités territoriales sous contrat, ...
... sujet éminemment sensible à l'Assemblée nationale, mais surtout, ici, au Sénat - j'y intègre également le FCTVA, le fonds de compensation pour la TVA -, sont toujours dynamiques, puisqu'elles progressent de 600 millions d'euros. En tenant également compte des dégrèvements d'impôts locaux, l'effort de l'État en faveur des collectivités territoriales est en réalité en progression de près de 4 % entre 2007 et 2008.
J'ai toutefois bien noté que l'indexation sur les prix des dotations concernées par le contrat de stabilité impose un ajustement fort des dotations hors dotation globale de fonctionnement. Mesdames, messieurs les sénateurs, je suis prêt à améliorer les modalités de cet ajustement au Sénat, comme j'ai commencé à le faire à l'Assemblée nationale.
Enfin, je le souligne, nous faisons un effort accru de sincérité et de clarté budgétaires. Comme je l'ai dit lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, il n'est pas normal que, chaque année, on sous-estime dans le projet de loi de finances initial le montant des dispositifs gérés par les organismes sociaux, mais financés par l'État. Je pense notamment aux minima sociaux ou encore aux aides au logement. Dans le projet de loi de finances pour 2008, nous remettons à niveau leurs dotations en leur affectant 1, 2 milliard d'euros supplémentaires.
Au total, avec 1, 6 milliard d'euros pour la charge de la dette, 2 milliards d'euros destinés aux retraites et 1, 2 milliard d'euros consacrés à la remise à niveau des minima sociaux, nous aurons quasiment consommé l'enveloppe calculée en fonction de la règle « zéro volume ».
Le budget de l'aide médicale d'État inscrit en projet de loi de finances initial passe ainsi de 233 millions d'euros à 413 millions d'euros, et la dotation destinée au financement du fonds de solidarité progresse de 600 millions d'euros, ce qui, je pense, mérite d'être noté.
Par ailleurs, tous les amendements adoptés par l'Assemblée nationale qui affectent les dépenses ont été financés sans dégrader le solde. Je pense notamment à la réforme des exonérations pour les organismes d'intérêt général dans les zones de revitalisation rurale.
Il est vrai que la remise à niveau de certaines sous-dotations chroniques n'est peut-être pas encore parfaite. La commission des finances a relevé à juste titre un certain nombre de points, dont certains me semblent cependant contestables. Je suis bien évidemment prêt à en discuter, en apportant, comme je l'ai toujours fait, tous les éclaircissements nécessaires pour lever tout doute sur ce sujet.
En ce qui concerne les crédits affectés aux opérations extérieures et aux opérations de maintien de la paix, que la commission des finances a examinés à juste titre de façon très précise, des efforts de réalisme ont été entrepris depuis plusieurs années et sont poursuivis dans ce projet de loi de finances.
Je vais même accentuer cet effort, monsieur le président de la commission des finances, en déposant, au cours de la discussion, des amendements permettant d'accroître d'environ 100 millions d'euros chacune de ces deux dotations.
M. Éric Woerth, ministre. Ces amendements seront, bien sûr, gagés.
M. le président de la commission des finances applaudit.
Comment faisons-nous, mesdames, messieurs les sénateurs, pour tenir à la fois l'objectif de relance de la croissance et celui de la maîtrise raisonnée de la dépense ? Nous faisons un effort de réduction des effectifs de l'État, un effort de clarification de ses engagements et un effort de rationalisation de l'ensemble des politiques publiques. Notre objectif, c'est que la dépense publique soit plus réactive, mieux assumée une fois engagée et plus productive.
Nous avons réalisé un effort sans précédent sur les effectifs, qui seront réduits dans des proportions très supérieures à ce qui avait été fait au cours des exercices précédents : 22 900 départs à la retraite ne seront pas remplacés en 2008, soit un départ à la retraite sur trois, pour une économie en année pleine de 716 millions d'euros. Ces non-remplacements se feront sans report de charges vers les opérateurs de l'État, puisque les effectifs seront stabilisés.
Vous pourrez le constater dans le document budgétaire « jaune ». En outre, j'ai donné consigne à mes représentants de veiller à ce que ces niveaux d'emploi soient des plafonds, et que toutes les créations d'emploi soient motivées ; ce travail devra être réalisé avec les conseils d'administration de chaque opérateur.
À l'effort de redéploiement s'ajoute un effort de clarification et de sincérité dans les comptes. J'ai déjà parlé de la remise à niveau des dispositifs sociaux. Il ne sert à rien - et je suis particulièrement sensible à cet aspect en tant que ministre des comptes publics, c'est-à-dire ministre de l'ensemble des comptes - d'améliorer une situation A pour dégrader une situation B.
Nous avons aussi effectué, le 5 octobre dernier, le remboursement de la totalité de la dette de l'État à la sécurité sociale au 31 décembre 2006, soit 5, 1 milliards d'euros. Ce sujet envenimait, à juste titre d'ailleurs, les rapports entre l'État et la sécurité sociale ; il était donc nécessaire de clarifier la situation.
Nous avons également assuré la compensation intégrale à la sécurité sociale des exonérations de cotisations sociales pour les bas salaires et les heures supplémentaires. Pour l'année 2007, cette compensation, je le précise, est inscrite dans le projet de loi de finances rectificative, qui a été présenté hier en conseil des ministres.
Par ailleurs, le Gouvernement vous proposera un amendement ajustant le montant des transferts de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, la TIPP, et de la taxe sur le chiffre d'affaires aux régions et aux départements afin de tenir compte du coût réel des transferts des personnels techniciens, ouvriers et de services - ou TOS - de l'éducation nationale et des directions départementales de l'équipement.
Cet ajustement sera défini sur la base des choix que ces personnels ont eu la possibilité d'exprimer jusqu'au 31 août dernier et qui ne pouvaient donc être pris en compte dans la construction initiale du projet de loi de finances pour 2008,
Enfin, mesdames, messieurs les sénateurs, tous les ministères se sont engagés dans un effort de rationalisation de leurs interventions.
Avec la révision générale des politiques publiques lancée en juin dernier, à laquelle M. Philippe Marini participe activement, nous allons franchir une étape supplémentaire dans les années à venir en matière d'efficacité de la dépense publique.
Les décisions de réforme qui en découleront seront mises en oeuvre, pour la première fois, dans le cadre d'une programmation budgétaire pluriannuelle, qui couvrira les années 2009-2012. Cette recherche permanente d'une plus grande efficacité dans les dépenses doit nous permettre, comme je l'ai dit au début de mon propos, de restaurer l'équilibre des finances publiques en 2012 au plus tard, tout en continuant, bien évidemment, de répondre aux attentes de nos concitoyens dans le domaine de la qualité des services publics.
Enfin, cet effort de rationalisation de la dépense publique passe par un renforcement de la lutte contre la fraude fiscale et sociale
Dans ce domaine, conformément à la demande du Président de la République et du Premier ministre, je veux que nous changions d'échelle, tant en termes d'outils juridiques que de moyens généraux consacrés à cette lutte.
Mesdames, messieurs les sénateurs, chacun mesure l'ampleur de l'effort qu'il nous reste à accomplir - et il y a trop d'experts parmi vous pour ne pas en être conscients - afin de redresser durablement nos finances publiques. Cet effort, le Gouvernement ne peut le conduire seul.
Nous avons besoin d'une implication très forte des parlementaires, en particulier de vous-mêmes, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le plan de la législation dans son ensemble, ainsi que sur celui du contrôle de l'action du Gouvernement.
C'est pourquoi nous vous avons associés, par l'intermédiaire de votre rapporteur général, M. Philippe Marini, comme je l'ai indiqué, à l'exercice de révision générale des politiques publiques.
C'est pourquoi aussi nous rénovons la procédure budgétaire afin de donner plus de poids à la loi portant règlement définitif du budget.
Ce rééquilibrage permettra de nous concentrer autant sur les résultats des politiques publiques que sur les moyens engagés.
Sous l'impulsion du Président de la République, le Gouvernement a fait le choix de l'avenir en pariant sur la croissance.
C'est un pari audacieux, mais c'est aussi un pari calculé, car nous mettons tous les atouts favorables de notre côté, et un pari maîtrisé, car nous disposons, avec les réformes que nous engageons, des cartes nécessaires au redressement durable des comptes publics.
C'est ce pari raisonné et responsable que je vous invite, mesdames, messieurs les sénateurs, à partager avec nous. Après les améliorations apportées par l'Assemblée nationale, je suis convaincu que nos débats permettront, sans modifier l'équilibre, et peut-être même en l'améliorant, de perfectionner encore ce projet de loi, et je vous en remercie à l'avance.
Applaudissements sur les travées de l'UMP et sur certaines travées de l'UC-UDF.
Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les sénateurs, M. Eric Woerth vient de vous présenter les efforts que l'État va entreprendre pour maîtriser les dépenses publiques, rétablir l'équilibre budgétaire et, il l'a dit et répété, gagner en efficacité.
Il me revient de vous exposer les réformes structurelles contenues dans le présent projet de loi de finances et destinées à dynamiser notre économie. Car la gestion rigoureuse des finances publiques, à laquelle M. Eric Woerth faisait référence, doit s'accompagner d'une croissance vigoureuse.
Notre pays a les moyens, dans les prochaines années, de gagner un point de croissance supplémentaire. Le Gouvernement s'est fixé cet objectif, sous la conduite du Président de la République et du Premier ministre.
Vous savez déjà - nous en avons débattu cet été devant votre assemblée - ce que nous avons entrepris pour le pouvoir d'achat : d'un côté, en permettant l'augmentation des rémunérations fondée sur le travail supplémentaire, grâce à la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat du 21 août 2007, qui lui consacre une partie très importante de l'ensemble de son financement ; de l'autre, en faisant baisser les prix par un renforcement des règles de la concurrence et un meilleur équilibre entre les acteurs, ce qui est tout l'enjeu du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Par ailleurs, dans le cadre de ce budget, nous vous proposons de doubler le taux du crédit d'impôt sur les intérêts d'emprunt pour le porter de 20 % à 40 % en première année. À titre d'exemple, pour un couple avec deux enfants empruntant 200 000 euros sur vingt ans au taux de 4 %, l'avantage fiscal pourrait ainsi atteindre 3 400 euros la première année, ce qui ferait diminuer le coût total du crédit de près de 10 %.
Vous savez déjà ce que nous avons prévu d'entreprendre pour réformer le service public de l'emploi : je serai en mesure de vous présenter, avant la fin de l'année, un projet de loi sur la fusion entre l'Agence nationale pour l'emploi, l'ANPE, et l'Union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, ou UNEDIC, et entre l'ANPE et les associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce, les ASSEDIC.
Je suis également très attachée à développer davantage pour nos jeunes les possibilités de formation en alternance comme l'apprentissage.
Mme Christine Lagarde, ministre. Quand on sait que, d'un côté, le nombre de chômeurs doit diminuer de 900 000 pour nous permettre d'atteindre le taux de chômage considéré comme résiduel en situation de plein-emploi,
M. Jean-Louis Carrère s'exclame.
C'est pourquoi, par rapport à la loi de finances pour 2007, ce budget revoit à la hausse les dispositifs d'alternance pour les jeunes, avec 285 000 contrats d'apprentissage, soit 10 000 de plus et 140 000 contrats de professionnalisation, soit 5 000 de plus.
S'il est vrai que les emplois aidés dans le secteur non marchand sont en réduction dans le budget pour 2008 par rapport au budget pour 2007, puisqu'ils diminuent d'environ 12 % - ce qui ne paraît pas déraisonnable compte tenu de la diminution constante du chômage -, en revanche, permettez-moi de souligner que, s'agissant des contrats d'apprentissage et des contrats de professionnalisation, nous prévoyons un effort plus important en 2008 qu'en 2007.
Avant d'évoquer nos prévisions en termes de croissance, je voudrais m'attarder quelques instants sur une réforme fondamentale, celle du crédit d'impôt recherche.
La réforme du crédit d'impôt recherche reflète notre priorité centrale qui est d'améliorer la compétitivité de l'économie française.
Nous le savons, dans des pays développés tels que la France, la compétitivité passe nécessairement par l'innovation, le progrès technologique.
Le crédit d'impôt recherche encourage nos entreprises à investir dans la recherche et permet à l'État de se mettre à leurs côtés pour cet effort concernant l'avenir de l'économie française.
De même, - et je peux vous l'assurer pour l'avoir expérimenté auprès d'investisseurs internationaux -, il incite les investisseurs étrangers à venir s'installer en France ou à éviter de délocaliser ailleurs des centres de recherche et développement implantés en France.
Je veux insister auprès de vous, mesdames, messieurs les sénateurs, sur les mérites de la recherche et du développement, comme je l'ai déjà fait lors du forum des pôles de compétitivité, qui s'est tenu récemment à Nice, sous la direction de votre collègue Pierre Laffitte, dont je tiens à saluer tout le mérite pour soutenir la recherche et le développement.
Vous connaissez le contexte international : dans une économie globalisée, une économie de la connaissance, ce sont tout simplement les meilleures idées qui font la différence.
Vous connaissez l'étendue du champ de la recherche et du développement, qui ne s'arrête pas aux procédés liés à la haute technologie, mais comprend aussi des procédés techniques, des savoir-faire, des brevets de médicament, des logiciels informatiques. C'est véritablement le terreau de la croissance.
Vous connaissez aussi les chiffres, hélas ! La stratégie de Lisbonne a fixé comme objectif pour les économies européennes de consacrer 3 % de leur produit intérieur brut à l'investissement dans la recherche développement.
Où en sommes-nous en France, ce pays développé, qui considère traditionnellement que le domaine de la recherche et du développement est important ? Nous en sommes à 2, 13 % !
Du point de vue de la répartition, force est de constater que l'investissement public en recherche et développement est en ligne avec les prévisions, tandis que l'investissement privé en recherche et développement est encore loin du compte !
Pourquoi ? Parce que l'attractivité du territoire français doit être améliorée !
À cet égard, vous serez heureux de constater que la réforme que nous envisageons place la France au premier rang des pays européens pour l'investissement en recherche et développement sur les plans législatif et fiscal.
Le crédit d'impôt recherche, ou CIR, a déjà fait la preuve de son efficacité : les études de mes services montrent qu'il s'ajoute à la dépense privée de recherche et développement sans s'y substituer. Un euro économisé au titre du CIR, c'est un euro qui est généralement réinvesti dans la recherche et le développement.
Nous avons donc toutes les raisons d'amplifier ce dispositif.
Tout d'abord, nous proposons, dans un souci de simplicité, de supprimer ce qui s'appelait autrefois la part en accroissement, obligation aux termes de laquelle, pour bénéficier du crédit d'impôt recherche, l'entreprise devait accroître d'une année sur l'autre son budget de recherche et de développement.
Ensuite, nous triplons le taux du crédit d'impôt sur la part en volume, qui sera porté de 10 % à 30 % jusqu'à 100 millions d'euros de dépenses en recherche et développement, et 5 % au-delà de ce seuil.
Enfin, lorsqu'une entreprise décidera de profiter du crédit d'impôt recherche, elle bénéficiera d'un taux à 50 % la première année et à 40 % la deuxième année, à la suite d'un amendement introduit par l'Assemblée nationale. Cet amendement me paraissait justifié, dans le souci que nous avons d'encourager vivement les entreprises qui n'y songeaient pas ou qui y étaient quelque peu récalcitrantes, à entrer dans des programmes de recherche et de développement à long terme.
Je dirai un mot au sujet des petites et moyennes entreprises, dont le sort nous tient à tous particulièrement à coeur, car nous savons que c'est dans ce secteur d'activité que nous trouverons les gisements non seulement d'emplois, mais aussi de créativité.
À l'heure actuelle, les PME réalisent, à elles seules, un quart des dépenses de recherche et de développement, et représentent quatre cinquièmes des entreprises bénéficiant du crédit d'impôt recherche. Par conséquent, il est inexact de dire, comme nous l'entendons, que seules les grandes entreprises bénéficient du crédit d'impôt recherche.
Aujourd'hui, une PME innovante reçoit en moyenne 100 000 euros de crédits d'impôt recherche. Demain, grâce à l'effet de la réforme qui vous est proposée dans ce projet de loi de finances, elle recevra 150 000 euros à ce titre.
À l'aune des grands budgets, ce montant ne paraît peut-être pas très élevé. Mais, pour une PME dont le chiffre d'affaires moyen représente 1, 6 million d'euros, un gain de 50 000 euros, c'est beaucoup !
En intégrant l'effet de l'amendement adopté par l'Assemblée nationale, le coût supplémentaire de cette réforme est évalué à 1, 3 milliard d'euros en régime de croisière.
Nous ne le regretterons pas, car c'est un investissement de la France d'aujourd'hui dans la France de demain. Il s'agit d'un partenariat établi entre l'État français et les entreprises.
Permettez-moi de mentionner brièvement trois autres mesures destinées à favoriser l'innovation.
Premièrement, les inventeurs qui apportent un brevet à une entreprise seront totalement exonérés d'impôt sur la plus-value au bout de huit ans.
Deuxièmement, les cessions de brevets bénéficieront du même taux réduit à 15 % que les concessions de brevets.
Enfin, troisièmement, la création du statut de jeune entreprise universitaire permettra aux étudiants ou aux chercheurs qui montent leur entreprise de bénéficier des mêmes avantages fiscaux et sociaux que ceux qui sont applicables aux jeunes entreprises innovantes.
Améliorer notre compétitivité - tel est bien notre objectif principal dans une économie mondialisée - implique de développer constamment l'attractivité de notre territoire.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. La TVA sociale ?
Sourires
Je me réjouis, à ce titre, que le Sénat et l'Assemblée nationale, ensemble, aient déposé des amendements pour supprimer l'impôt sur les opérations de bourse, comme je l'avais moi-même suggéré, le 5 juillet dernier, à l'occasion de la Conférence Europlace.
Aujourd'hui, il n'y a plus à hésiter : la directive Marché des instruments financiers, entrée en vigueur depuis le 1er novembre, vise à renforcer la concurrence entre toutes les places européennes, en mettant le bénéficiaire de l'exécution de l'ordre au coeur du dispositif. Si nous ne voulons pas que nos investisseurs passent par Londres ou par Francfort pour faire des économies et proposer la meilleure exécution, cette réforme s'impose dans les meilleurs délais.
Cette suppression de l'impôt sur les opérations de bourse contribuera au développement de la finance, secteur d'excellence et d'avenir au sein duquel sont proposées les meilleures formations. Ainsi, c'est en France que sont fournies les meilleures prestations d'ingénierie en mathématique financière. Certains jeunes Français et de nombreux jeunes étrangers formés dans notre pays partent ensuite pour l'étranger afin de faire bénéficier de leurs connaissances les places internationales telles que Londres et New York.
Il nous appartient de renverser ce courant et d'attirer sur la place de Paris la finance internationale. Aujourd'hui, plus d'un million de personnes très qualifiées y travaillent. Fixons-nous l'objectif d'accroître cet effectif.
Et elles participent à hauteur de 5 % à la richesse nationale.
La compétitivité, quant à elle, doit servir de moteur à la croissance et à l'emploi dans notre pays. Je vais donc vous présenter les prévisions de croissance sur lesquelles nous nous sommes fondés pour l'élaboration de ce projet de loi de finances pour 2008.
Nous avons estimé prudent de tabler sur une croissance comprise 2 % et 2, 5 %, avec un point médian à 2, 25%. Cette prévision est compatible avec celles qu'ont établies différents économistes, qui varient entre 1, 5 % et 2, 6 %. Ce dernier chiffre est celui de l'Office français des conjonctures économiques, l'OFCE, organisme souvent cité par l'opposition dans les débats. Son optimisme tient précisément à l'effet de relance de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.
Mouvements sur les travées du groupe socialiste.
Je me réjouis que l'OFCE prenne en compte un certain nombre de réalités !
Pour 2007, je n'ai pas de raison de modifier l'objectif de croissance du Gouvernement qui est de 2 % environ. À la fin du mois d'août, beaucoup annonçaient - pas nécessairement au sein de cet hémicycle - que la croissance serait de 1, 6 % ou de 1, 7 % en 2007. Aujourd'hui, les mêmes avancent 1, 8 % ou 1, 9 %. Peut-être en serons-nous à presque 2 % dans un mois ? C'est en tout cas ce que je crois.
Les derniers indicateurs économiques sur la croissance, le chômage et l'emploi ne font que confirmer les hypothèses que je formule depuis maintenant deux mois : la croissance a atteint 0, 7 % au troisième trimestre de cette année, deux fois plus qu'au cours du deuxième trimestre. Évidemment, les pessimistes, qui sont légion, prétendent qu'à un bon troisième trimestre succédera un mauvais quatrième trimestre. C'est à voir. Pour ma part, je considère que le quatrième trimestre ne sera pas si mauvais que cela.
Tous les moteurs de la croissance sont opérationnels. Au troisième trimestre, la consommation des ménages a progressé de 0, 8 % et l'investissement des entreprises de 1 %, tandis que le commerce extérieur contribue positivement à la croissance. Je m'en réjouis plutôt que je m'en navre.
Par ailleurs, la situation du marché de l'emploi est aujourd'hui très bien orientée : en trois trimestres, l'économie française a créé plus d'emplois que durant toute l'année 2006. Au cours du troisième trimestre ont été enregistrées 38 200 créations d'emplois, soit un total de 210 000 emplois créés depuis le début de l'année. Le taux de chômage est tombé à 8, 1 % de la population active. De cela aussi je me réjouis, en espérant que cette situation durera.
Si la croissance ne dépend pas seulement de facteurs exogènes, elle en dépend néanmoins partiellement. J'évoquerai maintenant la situation internationale.
Nous devons tenir compte avec discernement, sans optimisme ni catastrophisme excessifs, mais avec une extrême attention, de quatre facteurs sensibles. Il s'agit d'hypothèses de réalité.
Premier facteur, le pétrole. Comme chacun a pu s'en rendre compte, les prix mondiaux de l'énergie ont beaucoup augmenté. Au cours des cinq dernières années, ils ont augmenté de façon erratique et, à deux reprises, dans des proportions très fortes.
Le Gouvernement n'est pas resté inactif : outre une renégociation avec les producteurs de pétrole permettant le lissage sur quatre semaines des augmentations de prix et la répercussion immédiate des baisses, nous avons doublé la « prime à la cuve » pour les personnes non imposées et les ménages les plus modestes, qui passera de 75 à 150 euros.
Deuxième facteur auquel nous devons rester très attentifs, le regain d'inflation. Raymond Barre disait que l'inflation n'est pas la hausse des prix. Un certain nombre de facteurs nous donnent à penser que le risque d'une hausse des prix est réel.
Ce regain inflationniste est lié à l'augmentation des prix du pétrole et d'un certain nombre de matières premières, notamment alimentaires. Cependant, l'inflation demeure en France nettement inférieure à ce qu'elle est chez nos partenaires européens et nous prévoyons qu'il en ira de même en 2008. Cela doit nous encourager à mettre en oeuvre des réformes « pro-concurrentielles », qui sont l'un des moyens majeurs de lutte contre les hausses de prix, lesquelles sont parfois liées à des situations de rentes. Tel est notamment l'objet du projet de loi pour le développement de la concurrence au service des consommateurs, que M. Luc Chatel et moi-même avons présenté hier devant l'Assemblée nationale.
Troisième facteur auquel nous devons rester très attentifs, la situation des marchés financiers. Je ne pense pas que les tensions qu'ils ont connues dernièrement hypothèquent sérieusement la croissance française en 2008. Ces tensions, liées à des dysfonctionnements des marchés financier et immobilier américains, ont entraîné une crise de confiance et une crise de liquidités qui s'est étendue à l'ensemble des marchés des pays développés et, curieusement dans une moindre mesure, à ceux des pays émergents. Ces turbulences n'ont pas fini de faire sentir leurs effets, notamment sur le marché américain.
Nous devons rester très attentifs. En revanche, la solvabilité des banques françaises et l'excellent travail de régulation mené par nos organismes de contrôle, notamment la Commission bancaire, sont de nature à mieux nous protéger que bien d'autres pays contre les effets indirects de ces turbulences sur les marchés financiers, comme l'ont montré les événements de l'été.
Quatrième facteur, la hausse de l'euro. Elle a pour effet positif de nous permettre de lutter contre l'inflation importée, mais pour effet négatif de grever la compétitivité de nos entreprises.
La France n'a cessé de s'émouvoir de cette situation et de rappeler, au sein de l'Eurogroupe, du G7 et du G20, que les taux de change doivent refléter les fondamentaux économiques et que la zone euro ne peut porter à elle seule tout le poids des déséquilibres mondiaux, qu'ils concernent le dollar, le yen ou le yuan. Ce discours est de plus en plus entendu par les banques centrales et les gouvernements de nos partenaires du G7 et du G20. Nous continuerons à soutenir sans relâche cette politique de réalité, qui vise à ce qu'une monnaie reflète véritablement les fondamentaux économiques des pays où elle a cours et à ce que toutes les grandes zones monétaires bénéficient - ou, a contrario, en subissent les conséquences - d'une situation d'équilibre entre les grandes monnaies que sont l'euro, le dollar, le yen et le yuan.
Sur tous ces sujets, il est essentiel que nous anticipions au plus juste afin de ne pas être pris au dépourvu. Telle est la conception que M. Éric Woerth et moi-même nous faisons d'un État responsable et efficace.
Responsabilité et efficacité sont, mesdames, messieurs les sénateurs, les maîtres mots de ce budget.
Responsabilité pour le passé, puisqu'une gestion rigoureuse des finances publiques nous permet de nous attaquer, certes modestement, au problème de la dette, que nous ramenons dès l'année prochaine de 64, 2 % à 64 % du PIB. Il nous faudra faire mieux l'année suivante et mieux encore l'année d'après.
Responsabilité pour le présent, puisqu'en 2008 le taux des prélèvements obligatoires devrait reculer de 0, 3 point, pour s'établir à 43, 7 % du PIB.
Responsabilité pour l'avenir, enfin, car si vous ne deviez retenir qu'un seul élément de cette présentation, c'est évidemment le crédit impôt recherche, dont la réforme vise à encourager fortement l'innovation dans nos entreprises, l'innovation au service de la compétitivité de notre pays dans l'intérêt des entreprises de France et dans l'intérêt de tous les Français.
Applaudissements sur les travées de l'UMP, ainsi que sur certaines travées de l'UC-UDF et du RDSE.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Monsieur le président, madame le ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet de loi de finances pour 2008, premier budget de la législature, pose un singulier défi.
D'une part, et il ne peut en aller autrement, ce budget est nécessairement abordé en termes de continuité.
Attendez la suite, mes chers collègues ! Je n'en suis qu'au début de mon introduction !
D'autre part, ce budget est établi dans un contexte délicat dont les contraintes sont nombreuses. D'une certaine manière, nous assistons à une montée de périls qu'il nous faut ensemble conjurer.
Ainsi, s'agissant des méthodes, ce projet de loi de finances se situe dans le prolongement du budget pour 2007. C'est une bonne chose. Madame le ministre, monsieur le ministre, vous reprenez un objectif de norme de dépense et chacun sait que la gouvernance budgétaire repose d'abord sur la maîtrise de la dépense.
Les données de l'équilibre laissent apparaître que 2008 s'établirait sur un palier de déficit par rapport à 2007. Cette situation manifeste de transition appelle deux remarques.
Premièrement, faisons en sorte, mes chers collègues, qu'au terme de son examen par notre assemblée le budget de l'État pour 2008 ne soit pas plus élevé d'un centime d'euro qu'il ne l'est à ce jour.
Tâchons de faire mieux encore : faisons en sorte que ce déficit retrouve au maximum le niveau qui était le sien dans la version initiale du projet de loi de finances présentée par le Gouvernement.
Deuxièmement, si nous voulons retrouver l'équilibre en 2012, il nous faudra aller bien au-delà de ce palier 2007-2008. C'est mécanique.
Le contexte actuel pose de nombreux défis. Les événements survenus sur les marchés financier et immobilier américains ont été à l'origine d'anticipations ingrates, voire négatives, pour toute une série de compartiments de l'économie européenne.
Les dispositions que nous avons prises ensemble cet été dans le cadre de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat ont, d'une certaine façon, marqué une rupture ou ont à tout le moins procédé d'un esprit de rupture. Elles créent mécaniquement une contrainte supplémentaire sur les recettes de l'État.
Cette contrainte est évaluée à 7, 5 milliards d'euros sur l'ensemble de l'année 2008.
En outre, comme l'a rappelé M. le ministre, la tension actuelle sur les taux d'intérêt a entraîné une hausse significative de 1, 6 milliard d'euros des charges financières, alors même que le déficit est sur un palier.
Mes chers collègues, tout cela forme un tableau complexe.
Tâchons néanmoins de raisonner en termes de gouvernance budgétaire, laquelle nous incite à mettre en avant la notion de performance. Comment juger de la performance budgétaire ?
Tout d'abord, reconnaissons ensemble, mes chers collègues, que la norme de dépense élargie est prometteuse. En effet, il est cohérent de raisonner à partir des recettes brutes de l'État, fiscales et non fiscales, et d'en déduire ce qui est attribué à l'Union européenne, aux collectivités territoriales et, permettez-moi de l'ajouter pour demain ou après-demain, à la sécurité sociale.
Nous aurions un système complètement clair et lisible si nous établissions les recettes nettes après prélèvements en faveur de l'Union européenne, des collectivités territoriales et de la sécurité sociale.
Donc, monsieur le ministre du budget, dans l'état actuel des choses, vouloir faire porter la norme de dépense sur l'agrégat « Dépenses de l'État et prélèvements en faveur de l'Union européenne et des collectivités territoriales », c'est une bonne démarche, une démarche qui est réellement prometteuse pour l'avenir.
Son application instantanée à l'année 2008 peut donner le sentiment que la règle répond aussi à une opportunité pour l'État, qui peut faire progresser ces crédits de 1, 9 %, c'est-à-dire de 0, 3 % de plus que l'inflation prévisionnelle, mais dont une grande partie, nous le reconnaissons, résulte de contraintes très lourdes.
Vous le savez, au sein de cette assemblée, légitimement très attentive aux questions concernant les budgets locaux, communaux, intercommunaux, départementaux, voire régionaux, nous avons noté qu'un effet de pincement se produit et que les ressources des collectivités territoriales comportent deux grands sous-ensembles. Puisque nous y reviendrons dans le débat thématique, je me borne à citer les principaux éléments.
L'enveloppe normée, c'est-à-dire le sous-ensemble le plus important, évolue au rythme de l'inflation, « zéro volume ». À l'intérieur - j'allais dire « Dieu merci ! » -, la dotation globale de fonctionnement, la DGF, continue de respecter les engagements antérieurs, soit le maintien en volume plus l'intéressement à la croissance, intéressement à concurrence de la moitié du taux de croissance prévisionnel de l'économie.
Cet effet de pincement se situe donc au niveau des dotations d'ajustement. Le ministre du budget nous a semblé manifester une certaine bonne volonté pour trouver les solutions appropriées en ce domaine. Monsieur le ministre, il faut évidemment y parvenir, car l'application brute des règles arithmétiques risque de poser des problèmes tout à fait substantiels à deux catégories de collectivités : d'une part, les communes bénéficiaires de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, et, d'autre part, les départements, en particulier les plus ruraux, qui bénéficient de la dotation de compensation des exonérations de la taxe sur le foncier non bâti.
Donc, mes chers collègues, l'un de nos défis, en tant qu'assemblée représentative des collectivités territoriales de France, est d'atténuer les conséquences de ces ajustements.
Vous le savez, monsieur le ministre, nous souhaitons que l'État fasse preuve de bonne volonté et aille un peu au-delà de l'enveloppe qui est actuellement prévue pour l'ensemble des collectivités territoriales.
Pour autant, la commission des finances ne saurait sous-estimer vos efforts ni, a fortiori, vos contraintes, car, malgré les décisions courageuses et volontaristes qui commencent à être prises en matière d'effectifs publics, il n'en reste pas moins que ce que l'on gagne sur les rémunérations d'activité est largement compensé par l'augmentation des pensions. Je me suis efforcé de le montrer dans le rapport que j'ai présenté à la commission, l'agrégat « Main-d'oeuvre », y compris les retraités, augmente, et sensiblement. De même, l'agrégat « Dette » augmente, et je renvoie, pour des propos plus détaillés que Paul Girod et certains de nos collègues ne manqueront pas de tenir, au débat thématique sur le plafond de la dette.
La vigilance est évidemment indispensable. Nous savons que des marges de progression sont encore disponibles pour améliorer la sincérité budgétaire, même si des efforts de « rebasage » ont été faits - vous en avez cité certains - dans le domaine des interventions sociales.
Il est encore une distance à parcourir, et vous avez bien voulu, monsieur le ministre, le reconnaître tout à l'heure de manière très transparente en nous disant que, sur le sujet emblématique et bien connu des opérations extérieures, les OPEX, il allait falloir doter un peu plus la prévision pour 2008.
Nous savons aussi que le budget que vous avez préparé peut paraître prudent, et ce à deux titres.
D'une part, le coefficient d'élasticité, qui permet de définir la prévision de recettes, s'inscrit en baisse par rapport à celui de l'an dernier et utilise donc une certaine marge de prudence par rapport aux évolutions possibles de la conjoncture. C'est une bonne chose.
D'autre part, vous visez une réserve de précaution de 7 milliards d'euros, et vous avez veillé, monsieur le ministre, à ce que les crédits inscrits dans ce cadre soient vraiment mobilisables, et pas seulement indiqués pour la forme, et à ce qu'ils puissent être, le cas échéant, complètement débloqués au début de l'année. Vous avez fait en sorte, avec vos différents collègues - tous les dépensiers du Gouvernement...
Sourires
Mais n'oublions pas que, par rapport à ces 7 milliards d'euros, il y a toutes sortes d'aléas, et que la marge de progression pour les dépenses de l'État, qui ne reflète que le taux d'inflation prévisionnel, se situe à 5, 5 milliards d'euros.
Tout dépend de la dynamique de l'économie et des recettes fiscales et, nous le verrons d'ici à la fin de cette année 2007, je pense que nous arriverons au rendez-vous des objectifs que vous avez prévus, peut-être, comme d'habitude, grâce à telle ou telle mesure d'imputation sur l'exercice finissant.
Nous le savons, le moment de vérité est celui du solde de l'impôt sur les sociétés, et je rejoins le propos de Mme Lagarde en ce qui concerne la compétitivité de l'économie et la pugnacité de nos entreprises.
En effet, mes chers collègues, il ne faut pas oublier que ce solde, qui dépend en fin d'année, budgétairement, arithmétiquement, de la part des plus grandes entreprises, reflète très majoritairement des résultats acquis hors de notre territoire. N'ayons garde de l'oublier, ces impôts que nous recouvrons, à partir des résultats des très grandes entreprises et des grands groupes, proviennent pour une bonne part des zones du monde où la croissance est la plus élevée.
N'oublions pas non plus le défi qui s'impose à nous et qui est d'abord d'être un pays accueillant, un pays attractif pour les plus grandes entreprises, pour les grands groupes, pour les centres de décision économique susceptibles de raisonner, de concevoir une stratégie à l'échelle du monde. C'est cela qui, en définitive, peut équilibrer nos comptes.
Mes chers collègues, il ne faut pas sous-estimer cet aspect des choses ni la vulnérabilité qui est la nôtre. Nous la constatons en observant les conditions de détermination des taux d'intérêt. L'Agence France Trésor, grâce à son professionnalisme, fait au mieux pour financer l'État au niveau requis par le tableau de financement.
Si je ne me trompe, le tableau de financement pour 2008 nécessite un appel au marché pour un montant qui est de l'ordre de 110 milliards d'euros, et la somme sur laquelle nous allons voter avant l'article d'équilibre n'en représente qu'une petite partie, soit moins de 20 milliards d'euros. Pourquoi ? Parce que les refinancements d'emprunts qui arrivent à échéance sont assurés, pour une très grande part, à court terme sur le marché, aux meilleures conditions du marché.
C'est bien la « soutenabilité » de nos finances publiques, permettez-moi d'utiliser ce terme, qui fonde notre crédit, et donc le coût de nos emprunts. Tout se tient. Un pays crédible, c'est un pays qui sait se mettre sur le sentier de l'équilibre, c'est un pays qui sait être attractif. Un pays crédible, c'est un pays qui se finance à bon compte et, dans le contexte mondial qui est le nôtre, risqué et agité, c'est absolument essentiel. J'aurais même tendance à dire que cela devient de plus en plus essentiel chaque jour.
En termes de gouvernance budgétaire, quels progrès peut-on faire pour l'avenir ? La commission des finances vous proposera, dans le respect de l'esprit de la loi organique relative aux lois de finances, de bien vouloir progresser sur un certain nombre de points de méthode.
En premier lieu, il est important de mieux appréhender le plafond de variation de la dette, et donc de mieux le déduire du tableau de financement et de moins confondre la trésorerie et le financement. C'est une question de clarté ; c'est absolument indispensable pour apprécier la situation économique du pays, ses risques et ses marges de manoeuvre.
En second lieu, concernant la politique fiscale, et plus précisément la dépense fiscale, il convient de mieux chiffrer les niches fiscales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je me suis permis, dans le rapport écrit, de les qualifier de « mauvaises herbes fiscales ».
Sourires
M. Philippe Marini, rapporteur général. C'est qu'elles prolifèrent et, chaque fois qu'on en arrache d'un côté, il en pousse de l'autre !
Nouveaux sourires.
C'est donc l'image qui me vient à l'esprit.
Un effort est fait cette année dans le chiffrage de ces niches fiscales, madame, monsieur le ministre, mais on est encore loin du compte, et des progrès sont possibles et tout à fait nécessaires.
Il est un grand nombre de niches non chiffrées, non évaluées ou dont les évaluations ne sont pas remises en cause comme il conviendrait. Nous savons bien que c'est un travail très lourd, mais ce chantier est essentiel, car, au bout du compte, vous le savez, mes chers collègues, un euro de dépense fiscale est égal à un euro de crédit budgétaire.
Bien entendu, la règle vers laquelle il faudrait tendre, si l'on savait procéder aux évaluations de façon plus précise, serait de placer la dépense fiscale sous le plafond de la norme de dépense, quelle que soit, au demeurant, l'expression de cette norme.
Je suis sûr que M. le ministre du budget en rêve. §Les sénatrices et les sénateurs peuvent aussi en rêver, car, pour assurer la sincérité et la transparence de nos débats, domaine par domaine, il est évident que l'examen de la dépense fiscale doit se faire concomitamment à celui des dépenses budgétaires et nous offrir les mêmes capacités d'action, les mêmes capacités d'initiative, les mêmes assurances de maîtrise des finances publiques. La loi organique doit pouvoir progresser, nous ferons des propositions en ce sens.
Il est une initiative pédagogique, en quelque sorte, que nous pourrions prendre, si vous le voulez bien, dès la deuxième partie du présent projet de loi de finances. Elle consisterait à distinguer, dans les régimes préférentiels ou niches fiscales, deux catégories.
Les dispositifs horizontaux, non discriminants, font partie intégrante du mode de calcul de l'impôt, tel le quotient familial pour l'impôt sur le revenu, le crédit d'impôt recherche pour l'impôt sur les sociétés ou le régime de l'intégration fiscale. Ces éléments de politique économique, voire de politique familiale ou sociale, correspondent à une volonté de l'État qui a vocation à s'exprimer sur la durée et peuvent donc être pérennes. Ce sont des dispositifs à durée indéterminée.
À l'inverse, les dispositifs verticaux, catégoriels, voire corporatifs ou reposant sur des zonages, sont, certes, légitimes, mais devront, à terme déterminé et au vu d'évaluations, être réexaminés en fonction de l'efficience de la dépense publique ainsi engagée.
Il vous sera donc proposé des NDI et des NDD, c'est-à-dire des niches à durée indéterminée et des niches à durée déterminée
Sourires
Le ministre a évoqué un troisième progrès, ce dont je le remercie : la prise en compte, dans le plafond des emplois, des postes des opérateurs de l'État. Cette question sera vitale dans l'avenir. En effet, comme nous le montre l'exemple de la Suède, la réforme de l'État telle qu'elle va être formulée, notamment dans le cadre de la révision générale des politiques publiques, conduira logiquement à identifier des tâches précises remises entre les mains d'agences de l'État.
Cette démarche est d'ailleurs déjà bien engagée. Songeons, mais ce n'est qu'un exemple, à l'Agence des titres sécurisés pour le ministère de l'intérieur. Les ministères deviendront de plus en plus des instances d'impulsion, d'orientation, de stratégie, et ces structures devront en conséquence être très allégées par rapport à ce qu'elles sont aujourd'hui. Les politiques devront être mises en oeuvre par des agences qui auront des objectifs et entretiendront un dialogue clair avec l'État stratège : État stratège d'un côté, État gérant de l'autre, dans le cadre de politiques bien identifiées.
Ce modèle peut être décliné pour presque tous les domaines de l'action publique.
Il sera donc vital que les effectifs de ces agences soient bien sous plafond et qu'ils soient votés avec l'article d'équilibre.
J'en viens à la comptabilité patrimoniale, acquis essentiel de la loi organique relative aux lois de finances, à condition du moins que l'on en tire toutes les conséquences.
Permettez-moi de prendre un exemple.
Mme Lagarde a fort opportunément évoqué la réforme qui va amplifier et rendre plus efficace le crédit d'impôt recherche.
Pour l'entreprise, ce crédit est une créance qui va pouvoir être mobilisée, rendue liquide. Mais ce qui est créance d'un côté, pour l'entreprise, est dette de l'autre côté, pour l'État. Or l'État établit-il un bilan dans lequel il inscrit au passif la valeur de ces dettes ? Il y a, ce mécanisme le montre, des progrès importants à réaliser en termes de comptabilité patrimoniale de l'État afin de disposer d'une situation qui soit sincère et fidèle.
Je me limite à cet exemple, mais bien d'autres peuvent naturellement venir à l'esprit.
Quelles initiatives allons-nous prendre et pouvons-nous prendre au cours de l'examen de ce projet de loi de finances ? Pour ma part, je ne saurais trop conseiller deux axes : la compétitivité, d'une part, et la rigueur, d'autre part, une rigueur au sens d'une approche rigoureuse de la réalité, sans se faire d'illusions et en évitant de diffuser des illusions autour de soi.
La compétitivité est la condition de tout. Je me réjouis, madame le ministre, que les deux assemblées valorisent enfin l'industrie financière. Vous avez à juste titre insisté sur ce point, car c'est une variable clé en termes de compétitivité.
Si l'on veut que notre pays, qui a des atouts, puisse voir croître son industrie financière et prélever une petite partie de ce qui fait le succès de la Grande-Bretagne, certaines conditions concrètes doivent être remplies ; la suppression de l'impôt de bourse en est une. De la même façon, une politique fiscale de l'épargne claire, différenciant les produits selon leur utilité pour l'économie et le niveau de risques, est une autre de ces conditions nécessaires. M. Alain Lambert avait défini les principes, qui restent parfaitement actuels, d'une hiérarchisation du régime fiscal des différents produits d'épargne. Je ne puis que souhaiter que l'on adopte une attitude aussi claire, lisible et cohérente sur le plan économique.
Nous savons aussi que la certitude, pour un contribuable, de ne pas subir un prélèvement spoliateur est un élément important de la nouvelle législature. Il pourrait en résulter une confiance accrue, une meilleure visibilité de la réalité économique et financière française. C'est dans cet esprit que la majorité de la commission des finances propose l'auto-liquidation du bouclier fiscal. Nous y reviendrons sans doute dans le cours de la discussion.
Enfin, dans le souci de défendre nos centres de décisions, nous estimons qu'il serait opportun de créer un régime de résident fiscal temporaire, sur agrément, pour les hautes compétences susceptibles de venir de l'étranger s'investir dans les quartiers généraux ou dans les centres de recherche. J'ai bien dit « sur agrément », dans un cadre bien déterminé, afin de créer une assiette fiscale supplémentaire.
Comme l'a fait Mme Lagarde voilà un instant, je suis enclin à faire rimer « rigueur » et « vigueur ». En effet, et cette conviction est largement partagée au sein de la commission des finances, faute de consentir des efforts considérables, nous ne parviendrons pas à nous placer sur le sentier de l'équilibre pour 2012.
Monsieur le ministre du budget, j'observe avec un très grand intérêt la richesse des analyses réalisées par le comité de suivi de la revue générale des politiques publiques. Tous les secteurs sont examinés avec le plus grand professionnalisme, sans tabou mais en même temps, je le crois, avec réalisme et imagination.
La rigueur, oui, mais pas une rigueur punitive, une rigueur qui fasse appel à l'imagination. Il faut innover, trouver des solutions nouvelles. Ainsi, si nous parvenons, avec imagination, à prendre appui sur le nouveau principe de l'autonomie des universités, une compétitivité beaucoup plus réelle, beaucoup plus grande de notre appareil de recherche peut naître. C'est tout l'enjeu d'une telle réforme. Mais il ne doit y avoir aucune contradiction dans la définition des moyens qui sont nécessaires à la poursuite des tâches - mais au sein d'un système d'État mis sous tension, dont les énergies sont entièrement mobilisées vers les objectifs - il ne doit donc y avoir aucune contradiction entre cette approche rigoureuse et l'imagination, la compétitivité, le progrès et une vision sans complexe de l'avenir.
En conclusion, mes chers collègues, la commission des finances sera bien entendu très attentive, très exigeante, aussi, un peu raide, parfois, sur certains des aspects de ce projet de loi de finances. Nous allons discuter, en insistant non seulement sur les collectivités territoriales, mais aussi sur certains dispositifs et articles importants, avec le souci d'apporter au Gouvernement un appui d'autant plus solide et sincère que nous aurons la certitude que nos analyses et nos convictions seront entendues.
Cette maison, le Sénat, est riche de convictions. Sa commission des finances n'a pas improvisé les commentaires qu'elle vous livre cette année, madame, monsieur le ministre. Ses observations résultent, je me permets de le dire, de tout un patrimoine que nous avons acquis en commun au contact des gouvernements qui se sont succédé depuis de nombreuses années.
Nous sommes persuadés que cette vision peut et doit rejoindre celle du gouvernement de François Fillon, sous cette nouvelle présidence qui, nous l'espérons, sera celle de la rigueur, de la vigueur et de l'imagination !
Applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UC-UDF, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
M. le président. Monsieur le rapporteur général, le Gouvernement vous a écouté avec une grande attention et, j'en suis persuadé, il ne manquera pas de prendre en considération vos suggestions, en particulier celles qui concernent les collectivités territoriales et plus particulièrement encore les départements !
Sourires
Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, nouvelle présidence, nouvelle législature... Nous voici donc aujourd'hui réunis pour examiner le premier projet de loi de finances présenté par le gouvernement de M. François Fillon.
C'est un exercice délicat, une épreuve de vérité désormais encadrée par l'exigence de sincérité. Je salue, madame, monsieur le ministre, votre écoute puisque vous allez déposer un amendement tendant à parfaire encore la sincérité de votre budget.
En ce début de législature, l'attente de rupture est sans doute à son plus haut niveau. Force est de constater que l'absence de marges de manoeuvre condamne trop souvent le budget à transcrire tout le poids des gestions antérieures.
Il est donc temps de prendre conscience que toutes les facilités, toutes les commodités, toutes les astuces de présentation sont épuisées. Convenons, en effet, que les vraies réformes, celles qui opèrent une rupture, sont souvent coûteuses lors de leur phase de mise en oeuvre, ce qui ne doit pas, bien au contraire, nous faire renoncer à les entreprendre. Ce n'est qu'au fil des années que leurs bienfaits se manifestent dans les budgets.
Le temps de l'affichage immédiat est donc révolu au profit, je l'espère, de la détermination calme et résolue.
Osons renoncer aux tentations de la gesticulation et ouvrons les yeux sur la réalité, au risque de nous priver d'éphémères enchantements.
Je veux, dans cet esprit, évoquer le contexte dans lequel s'inscrit ce budget, avant de tenter de répondre à la question de savoir si le projet de loi de finances initiale pour 2008 amorce la trajectoire du redressement.
Sur la forme, vous m'autoriserez à rompre avec quelques conventions de langage.
Au moment où de vives inquiétudes s'expriment à propos du pouvoir d'achat, des risques d'inflation, du déséquilibre de la balance commerciale, de la dette publique, de la délocalisation des emplois, de la hausse du baril de pétrole, du gaz et des matières premières, de la dépréciation du dollar, nous avons le devoir de mieux appréhender les enjeux de la mondialisation.
Acceptons donc de rompre avec nos discours anesthésiants, faussement rassurants.
Parmi les thèmes stimulants du moment, j'attire un instant votre attention sur le volume désormais massif et le rôle des « surliquidités mondiales » : 4 000 milliards de dollars et peut-être même 5 000 milliards de dollars ! Prenons conscience du pouvoir financier et économique dont disposent aujourd'hui les pays qui nous approvisionnent en énergie - gaz, pétrole - et en biens de consommation.
On voit émerger le concept de fonds souverains. Comme le soulignait Alain Lambert ce matin en commission des finances, si ces pays ont des fonds souverains, au moins avons-nous, nous, la dette souveraine !
Sourires
Ce phénomène, mes chers collègues, est révélateur de nos insuffisances. Pourtant, nos colloques, nos messages institutionnels « politiquement corrects », nous invitent à considérer comme flatteur qu'autant de capitaux s'investissent en France, et ce « tous azimuts » : immeubles de haut standing, titres de sociétés cotées en bourse, bons du Trésor, petites et moyennes entreprises dynamiques de nos provinces... J'arrête ici la liste.
Ces investissements sont effectués soit directement, soit par l'intermédiaire de « fonds souverains » dont la force de frappe financière n'a désormais d'égale que l'opacité. Nous devrions donc nous demander s'ils nous renforcent ou si, au contraire, ils nous affaiblissent.
Mon opinion est qu'ils stimulent l'inflation des actifs, qu'il s'agisse des biens immobiliers ou des actions des sociétés cotées en bourse, sans toutefois renforcer notre potentiel de production.
Pis, quand ils concernent des PME, ces investissements donnent bien souvent lieu, dans nos territoires, à la délocalisation des activités et des emplois.
Nous mesurons au surplus que, si la mondialisation a pu contribuer un temps à la baisse des prix des biens de consommation, la tendance est en train de s'inverser. Notre indépendance est en jeu : veillons à ne pas subir les effets de stratégies dont la définition et la conduite nous échappent largement, sinon totalement !
Or, s'il est un élément dont nous avons le contrôle, c'est bien la loi de finances. À cet égard, le projet de loi de finances initiale pour 2008 est indéniablement un budget de transition.
C'est un budget de transition, qui ne peut donc traduire les effets positifs de réformes qui, pour beaucoup, sont encore à mettre en oeuvre.
Ainsi, et vous l'avez rappelé, madame le ministre, l'insuffisance de la croissance - ce fameux point de croissance qui nous manque et qu'il nous faut à tout prix débusquer - met cruellement en évidence nos problèmes de compétitivité : le déficit de compétitivité dont souffre notre pays, notamment par rapport à l'Allemagne, est patent et se concrétise malheureusement, chaque mois, dans nos performances commerciales, qui sont plus qu'inquiétantes.
De même, faute de réformes structurelles, il ne nous a pas encore été possible de rendre la sphère publique plus performante ou moins onéreuse - même s'il nous faut garder à l'esprit qu'il n'existe pas de formule miracle : je l'ai dit, les bonnes réformes sont coûteuses dans un premier temps.
C'est aussi un budget de transition qui révèle nos contraintes dans leur cruelle vérité. Je n'en donnerai que deux exemples, qui préemptent déjà les deux tiers du budget.
La seule dette de l'État - 919 milliards d'euros à la fin décembre 2007 - représente, avec ses 40, 8 milliards d'euros de charge nette annuelle, les deux tiers du produit de l'impôt sur le revenu, alors que la perspective de hausse durable des taux d'intérêt ne pourra qu'en alourdir le fardeau. Tout aussi pesantes, les charges de personnel et de pension, quant à elles, s'élèveront en 2008 à 120 milliards d'euros, soit 330 millions d'euros à acquitter chaque jour !
C'est encore un budget de transition qui, heureusement, grâce à l'usage qui est fait de la LOLF, tend vers la sincérité, même s'il reste exposé à quelques critiques résiduelles ; il est probable que notre discussion contribuera à en éliminer quelques-unes.
Demeurent en effet, madame, monsieur le ministre, quelques « poches de sous-budgétisation » concernant certains crédits, pour environ 1, 3 milliard, peut-être 1, 5 milliard d'euros. Des progrès ont d'ores et déjà été réalisés, et l'annonce que vient de faire M. Éric Woerth donne à penser que les trois prochaines semaines nous permettront de poursuivre dans cette voie.
La tentation de contourner la « case déficit » est encore trop présente lorsqu'il s'agit pour l'État de reprendre les dettes accumulées par des organismes extérieurs, notamment au sein de la sphère sociale : 5, 1 milliards d'euros viennent d'être entérinés, pour la sécurité sociale, dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, et nous avons encore en mémoire le projet de loi de finances rectificative pour 2005, qui avait « épongé » 2, 5 milliards d'euros de dettes du Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles, le FFIPSA. Je m'en étonne d'autant plus que ces dettes ne sont que l'accumulation de déficits passés : ceux-ci n'auront donc jamais été transcrits comme tels...
Il s'agit là d'une bien curieuse alchimie budgétaire, et il nous faudra y renoncer si nous voulons faire oeuvre de pédagogie : nous n'avons pas d'autre choix. Nos convictions sont fortes, nous pouvons les faire partager si nous prenons appui sur un message de vérité.
Enfin, ce budget procède à un « habillage » de la norme de progression des dépenses de l'État dite « zéro volume ». Comme le rapporteur général l'a fort bien démontré, l'élargissement de cette norme revient en réalité à faire prendre en charge une partie de la dérive des dépenses de l'État par les collectivités territoriales ou par le prélèvement européen.
À l'évidence, il appartiendra à nos discussions des semaines à venir d'éclaircir ces zones encore un peu grises du budget.
Je comprends bien la volonté du Gouvernement de ne pas modifier les critères d'évolution de la dotation globale de fonctionnement. Le rythme soutenu de sa progression - 2, 08 % pour une dotation correspondant à plus de 80 % du montant de l'enveloppe globale, dont la progression plafonne pour sa part à 1, 6 % - nécessite que l'on recoure à des variables d'ajustement ; toutefois, le choix de la dotation de compensation de la taxe professionnelle, la DCTP, et de la compensation des exonérations de la taxe foncière sur les propriétés non bâties donne lieu à des ajustements brutaux et contestables, de l'ordre d'au moins 25 %. Nous avons le devoir, mes chers collègues, de les corriger, d'en atténuer les effets, et je ne doute pas, madame, monsieur le ministre, que vous nous y aiderez, car c'est une question d'équité.
Aussi, qu'il me soit permis de formuler pour l'avenir une suggestion afin de compléter les efforts de sincérité mis en oeuvre. Puisque, d'un point de vue économique et budgétaire, les dépenses fiscales présentent le même effet que les dépenses « classiques », ainsi que l'a rappelé le rapporteur général, ne serait-il pas possible de les intégrer dans cette norme élargie de progression de la dépense ? Rien ne me semble s'y opposer, et nous disposerions ainsi, grâce à vous, d'un instrument plus complet pour mesurer la véritable place de l'État dans l'économie.
C'est enfin un budget de transition qui survient après la loi TEPA de juillet dernier. Il aurait pu cependant faire l'économie de certaines dépenses fiscales, tel le doublement du crédit d'impôt pour les intérêts d'emprunts immobiliers contractés au titre de l'acquisition de la résidence principale. Cette disposition, mes chers collègues, coûtera 220 millions d'euros en 2008 ; elle représentera, madame, monsieur le ministre, 800 millions d'euros en année pleine.
Pour ce qui me concerne, je continue de m'interroger sur la « soutenabilité » d'une telle disposition eu égard à l'état de nos finances publiques, et vous comprendrez qu'à titre personnel je ne puisse pas, dans ces conditions, voter une telle mesure.
Au total, le projet de loi de finances pour 2008 traduit bien la gravité de la situation tant économique que financière et constitue une base pédagogique pour aider à faire comprendre l'ampleur, l'urgence et la nécessité des réformes que nous devrons conduire.
Par sa sincérité, ce projet de loi de finances met en évidence l'extrême tension de la situation financière de l'État.
Le déficit prévisionnel de fonctionnement - je parle bien de fonctionnement, mes chers collègues - est évalué à 21, 220 milliards d'euros. Si nous y ajoutons les 8, 8 milliards de la sécurité sociale et les 2, 7 milliards du FFIPSA, ce sont près de 33 milliards d'euros de dépenses courantes qui seront financés par le recours à l'emprunt !
Et nous qui devions nous interdire de financer des dépenses récurrentes, des dépenses de fonctionnement par le recours à l'emprunt...Nous en sommes bien loin !
Cette indication alarmante est à intégrer dans les enseignements révélés par la première publication de la situation patrimoniale de l'État : au 31 décembre 2006, les valeurs d'actif s'élevaient à 538 milliards d'euros et le passif à 1 131 milliards d'euros, dont 893 milliards d'euros de dettes financières, soit une situation nette négative de 593 milliards d'euros.
Or les dettes, le « passif », ne tiennent pas compte des provisions qu'il conviendrait d'enregistrer pour refléter le poids des engagements de l'État employeur au titre des pensions de retraite. Les engagements hors bilan sont à ce titre de 941 milliards d'euros, soit 53 % du produit intérieur brut.
C'est dire si nous attendons avec impatience les décisions résultant de la révision générale des politiques publiques ! Placée sous la responsabilité directe du Président de la République, celle-ci a vocation, à mes yeux, à s'inscrire pleinement dans la démarche réformatrice exceptionnelle qui fut par exemple, en 1959, celle du comité Rueff-Armand. C'est à ce prix que nous doterons la France d'une administration performante.
Si la réforme de l'État ne peut plus attendre, nous savons aussi que le redressement est impossible sans le retour de la croissance. Nos handicaps se mesurent en termes de compétitivité. À cet égard, je voudrais réaffirmer que nos prélèvements obligatoires, notamment le mode de financement des branches « santé » et « famille », altèrent nos chances de créer des emplois et de dynamiser la croissance dans une économie désormais mondialisée.
Il nous faudra donc, mes chers collègues, avoir le courage de briser certains tabous, notamment les tabous relatifs à l'impôt sur la consommation, la TVA.
Nous avons eu un débat riche et éclairant, à propos des prélèvements obligatoires il y a quelques jours. Nos discussions ont été à la hauteur des enjeux, notamment grâce à la contribution de la commission des affaires sociales. Croyez bien que je m'en félicite tout particulièrement.
On parle beaucoup de compétitivité. On s'interroge également sur le pouvoir d'achat. Il y a, à mon sens, un bon pouvoir d'achat, celui qui est la contrepartie du travail ou de la production. C'est en ce sens que l'on peut, en effet, augmenter la masse salariale lorsqu'il y a un surcroît de production. En revanche, il y a un pouvoir d'achat artificiel, celui qui résulte de dotations publiques.
J'entends dire que l'on pourrait augmenter la prime pour l'emploi.
Mes chers collègues, sommes-nous bien conscients que la prime pour l'emploi, si elle améliore, en effet, le pouvoir d'achat, se transforme assez rapidement en importations supplémentaires ?
J'ai personnellement la conviction que la prime pour l'emploi, compte tenu de nos lois, de nos réglementations, de nos pratiques, crée infiniment plus d'emplois hors de France que sur notre territoire national.
Marques d'approbation sur les travées de l'UMP.
...et accepter de travailler plus suivant des modalités moins compliquées que celles qui résultent de la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.
Nous entendons remonter un certain nombre de critiques ; nous observons des hésitations liées à des conventions collectives ou, au contraire, à l'absence de conventions collectives ; nous constatons des réticences liées à des plafonds réglementaires, bref, de quoi faire perdre une grande partie des effets attendus de la loi TEPA.
Mes chers collègues, il faudra donc aller jusqu'au bout de nos convictions si nous voulons durablement sortir de cette situation.
C'est parce que le monde a changé que nos réformes ne peuvent plus attendre. La globalisation a rendu obsolètes des pans entiers de nos législations, de nos réglementations, de nos pratiques. Éclairons donc la réalité et les enjeux, chassons les faux-semblants et les gesticulations !
La discussion budgétaire est un rendez-vous avec la réalité.
Cessons donc de penser qu'en politique la réalité est toujours dans l'opposition !
C'est ce que nous allons tenter de démontrer pendant toute la discussion du projet de loi de finances pour 2008, avec exigence, avec confiance, avec vigueur et avec rigueur, pour vous aider, madame, monsieur le ministre.
Applaudissements sur les travées de l'UC-UDF et de l'UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président de la commission des finances, je crois savoir que vous avez une communication à faire.
En effet, monsieur le président. Je dois indiquer à mes collègues de la commission des finances qu'une motion tendant à opposer la question préalable au projet de loi de finances pour 2008 vient d'être déposée par le groupe communiste républicain et citoyen et que la commission des finances se réunira à quatorze heures quarante-cinq pour l'examiner.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quinze heures.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue à douze heures cinquante, est reprise à quinze heures cinq.