La séance, suspendue à vingt heures quarante-cinq, est reprise à vingt-deux heures cinquante, sous la présidence de M. Roger Romani.
La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle la discussion de la question orale avec débat n° 6 de Mme Nathalie Goulet à M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire sur la contractualisation dans le secteur agricole.
Cette question est ainsi libellée :
« Mme Nathalie Goulet interroge M. le ministre de l’agriculture, de l’alimentation, de la pêche, de la ruralité et de l’aménagement du territoire sur la contractualisation dans le secteur agricole.
« Les contrats entre producteurs et premiers acheteurs, obligatoires dans la filière des fruits et légumes depuis mars, et dans la filière laitière depuis le mois d’avril, constituent une mesure phare de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, adoptée en juillet 2010.
« Face à des cours agricoles fortement volatils et à la fin annoncée des quotas laitiers en 2015, la généralisation de ces contrats vise à offrir aux producteurs une visibilité sur les débouchés de leur production, pour des volumes déterminés et une période déterminée. Si les modalités de fixation du prix sont intégrées au contrat, le prix en revanche n’y est pas garanti.
« En outre, si les contrats semblent adaptés dans une filière où les volumes peuvent être facilement prévus sur le moyen terme, et notamment dans la filière laitière, ils semblent moins l’être dans la filière des fruits et légumes. Les aléas climatiques impactant les volumes de nombreuses récoltes rendent en effet difficile pour ces exploitations un engagement contractuel sur trois ans. De surcroît, ce type de contrat ne semble pas adapté aux marchés physiques des fruits et légumes, notamment les marchés d’intérêt nationaux.
« À l’heure où le ministre souhaite étendre les contrats à l’alimentation animale, elle souhaiterait savoir, au vu de la mise en œuvre des premiers contrats, quels ajustements sont envisageables, pour permettre à ces instruments de jouer leur rôle de sécurisation du revenu des agriculteurs, tout en prenant en compte les réalités et les aléas du monde agricole. »
Mes chers collègues, compte tenu de l’heure à laquelle nous abordons ce débat, dont la durée prévue est d’environ deux heures, je demanderai à chacun des intervenants de bien vouloir respecter scrupuleusement son temps de parole, car je serais fort marri de devoir faire des rappels à l’ordre.
Sourires
Monsieur le président, monsieur le ministre de l’agriculture, mes chers collègues, je regrette également que cette question orale vienne en discussion à une heure aussi tardive.
Quand, voilà un peu moins d’un an, j’ai voté la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, ce fut certes avec quelques réserves, mais les débats que nous avions eus laissaient espérer une meilleure appréhension de l’agriculture, et notamment de ses enjeux stratégiques.
Certains avaient alors marqué à l’égard de la contractualisation des suspicions qui, aujourd’hui, s’avèrent plus que légitimes. Je dirai même que la situation résultant des premiers mois de contractualisation est dramatique pour le secteur laitier et me fait pratiquement regretter d’avoir voté ces dispositions.
Monsieur le ministre, vous avez fait le pari que la contractualisation était un moyen de régulation. Or, à ce stade, on peut considérer que ce pari est perdu.
Je vous ai écrit au sujet des difficultés rencontrées par les producteurs, des clauses abusives et des pressions qu’ils subissaient. Avant le mois d’avril, je vous ai demandé un report des délais pour la mise en place de la contractualisation.
On légifère sur des principes, et leur application met en lumière certains décalages avec les réalités et les attentes des producteurs sur le terrain.
Errare humanum est, persevare diabolicum… Aujourd'hui, nous en sommes là !
Puisque rien n’est obligatoire avant l’élaboration d’une réglementation européenne en 2015, pourquoi tant de hâte ?
Monsieur le ministre, au cours des débats, vous nous aviez expliqué que vous souhaitiez que la France soit en tête de la politique de contractualisation et entraîne derrière elle les autres pays européens.
Un étudiant médiocre de première année de droit vous dirait que le contrat est fondé sur le consentement libre et éclairé et sur la détermination de la chose et du prix, pour peu que celui-ci soit au moins déterminable.
Le consentement, pièce maîtresse de notre droit des contrats, est violé en permanence par des clauses abusives dans les contrats proposés aux producteurs de lait et par la disparité entre les cocontractants. Des contrats types contiennent de multiples clauses abusives.
Certes, l’interprofession a publié un guide des bonnes pratiques contractuelles, dont la finalité est de « faciliter l’écriture des propositions de contrat », et va mettre en place une commission interprofessionnelle des pratiques qui donnera des avis sur toutes les questions relatives au contrat. Toutefois, ces structures n’ont pas une réactivité suffisante et, tout comme le médiateur institué par vos services, ne disposent d’aucun pouvoir de police.
En effet, les premiers retours du terrain relatifs à la contractualisation, un peu plus d’un mois après l’entrée en vigueur de l’obligation dont elle fait l’objet, me laissent peu enthousiaste. J’ai reçu nombre de témoignages d’agriculteurs dans le doute, soumis à la pression de coopératives, redoutant la dépendance économique vis-à-vis des entreprises laitières, d’autant que le contrat ne peut garantir le prix.
Le site de l’APLI, l’Association des producteurs de lait indépendants, recense de multiples exemples de clauses abusives. Ainsi, à l’occasion de la campagne 2010-2011, les producteurs appliquent le double quota, qui constitue un véritable scandale. De quoi s’agit-il ?
Une partie du lait – volume B – est payée en fonction des cours du beurre et de la poudre, produits industriels échangés sur le marché mondial. L’autre partie – volume A –continue d’être rémunérée selon les indicateurs des accords interprofessionnels des mois de juin 2009 et d’août 2010, dont fait partie l’indicateur de flexibilité, qui est le reflet de la stratégie de l’entreprise au regard des produits industriels. Avec un renforcement de l’alignement des prix A et B sur le marché mondial, les producteurs perdent de plus en plus de visibilité sur leur revenu et sur l’orientation de leur système de production.
De plus, comment être sûr que des entreprises ne s’autoriseront pas à « ajuster » le prix du volume B à la baisse en cas de progression des cours mondiaux ?
Nous devons exiger une maîtrise publique et collective des volumes pour garantir stabilité et pérennité des systèmes de production laitière en Europe.
Il faut aussi empêcher que la filière laitière devienne une filière intégrée, dans laquelle le producteur n’aurait plus le choix de son collecteur. À cette fin, il convient de porter une attention particulière aux clauses qui pourraient représenter une forme d’intégration, faisant des éleveurs les salariés pauvres d’une industrie riche, alors même que c’est d’eux que dépend la qualité du lait.
La coopérative ne saurait, par ailleurs, être reconnue comme une organisation de producteurs.
Prenons l’exemple d’un grand industriel du lait. Pour lui, le contrat constitue un enjeu de pouvoir. Les producteurs sont invités à se rassembler au sein de groupements de producteurs, héritiers des actuels groupements de livreurs, et à signer un contrat. Ces groupements de producteurs réfléchissent à une fusion à l’échelle de l’Ouest pour évoluer vers une organisation de producteurs. Cette dernière sera garante du contrat collectif passé entre les producteurs et l’entreprise, contrat qui sera validé dans les prochains mois.
L’industriel dissuade les éleveurs de se rassembler en organisation de producteurs à vocation commerciale. Un leader européen du fromage ne cache pas son intention, si un tel cas de figure se présentait, de se montrer implacable dans les négociations commerciales et de fermer le robinet des achats de lait quand bon lui semble.
Il s’agit bien, monsieur le ministre, d’un abus de position dominante !
Comme un certain nombre de mes collègues, je formulerai des propositions, tendant par exemple à prévoir une clause de résiliation et de non-renouvellement des contrats. À cet égard, nous suggérerons d’instaurer notamment une « dissymétrie » en faveur du plus faible, le respect de la liberté d’initiative du producteur de s’associer ou de sortir d’une association, de transmettre son exploitation ou d’en changer la nature juridique.
La capacité de celui qui s’engage aujourd’hui est aussi importante.
La branche laitière de la FNSEA – fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles – prône une organisation collective et économique des producteurs au motif que la massification de l’offre est un élément stratégique du rééquilibrage du rapport de force entre les producteurs et les transformateurs. En effet, aujourd'hui on compte en France 85 000 producteurs de lait pour 540 entreprises de collecte.
Seulement, il se trouve que l’obligation de contractualisation a précédé, dans le calendrier, les dispositions réglementaires relatives aux organisations de producteurs. Or les producteurs de lait se voient fortement incités, voire contraints à signer des contrats avec des coopératives alors même que les organisations de producteurs ne sont pas encore concrétisées.
Nous avons mis, monsieur le ministre, la charrue avant les bœufs !
Inutile de vous décrire les chantages ou les pressions exercés par les coopératives, qui ne voient pas d’un bon œil se regrouper les producteurs !
Ce décalage est d’autant plus préjudiciable que la durée des contrats, qui n’est pas négligeable – cinq ans –, lie le producteur et l’empêche d’adhérer à une organisation de producteurs concurrente.
Il existe donc un problème manifeste de calendrier dans la mise en œuvre de ces contrats qui rend plus compliqué la tâche de l’interprofession pour mener ces deux actions de structuration de front.
Il faut laisser le temps aux producteurs de s’organiser avant de contracter. Toutes les organisations doivent être consultées : l’APLI, la Confédération paysanne, la Coordination rurale...
J’espère, monsieur le ministre, que vous saurez être vigilant et vous montrer ferme à l’égard des acheteurs qui exercent des pressions pour que les producteurs signent des contrats qui sont manifestement déséquilibrés. Il convient de protéger ces professionnels.
De même, j’espère que vous entendrez l’appel des nombreux représentants des producteurs qui appellent à ne pas signer individuellement des contrats avant que la sécurité juridique – car c’est bien de cela qu’il s’agit – et l’équité des relations soient établies.
Vous le savez, la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur dès que l’on est convenu de la chose et du prix. Or, dans les contrats actuels, ni le prix ni les volumes ne sont garantis.
La jurisprudence et la loi n’ont cessé de prôner la défense du plus faible des cocontractants ; aujourd'hui, ce n’est pas le cas.
La question du prix, parce que celui-ci détermine la rémunération du producteur, reste un élément central du contrat. Là encore, sur le papier, l’intention est bonne, mais, dans la réalité, l’effet de la contractualisation sur les prix est plus modéré : à partir du moment où le contrat est obligatoire, les laiteries conservent une position dominante dans les relations contractuelles et sont donc mieux armées pour fixer le prix d’achat du lait.
Aujourd'hui, la problématique à laquelle sont confrontés les producteurs concerne la défense du niveau du prix du lait. Je suis sûre que de nombreux autres orateurs évoqueront ce sujet.
Il est nécessaire que le prix du lait ne soit pas seulement aligné sur des cours ou déterminé en fonction des quotas, mais qu’il soit aussi fixé en fonction du prix de revient.
Hier, les producteurs recevaient 50 % du prix du lait le mois de la traite et, ensuite, le reste. Aujourd’hui, rien ne leur est remis le mois de la traite et le montant qui leur est versé l’est en deux fois le mois suivant ! Combien de temps les agriculteurs vont-ils continuer à être les banquiers des transformateurs ?
Le texte en vigueur conduit à ce que le niveau du prix dépende de la capacité des producteurs de lait à s’organiser. Or, à ce jour, ils ne sont pas organisés.
Le contrat n’apporte de garantie ni sur les volumes ni sur les prix.
Un système dans lequel les producteurs gèrent la production avant la transformation : là est la solution. Or nous en sommes loin ! Je sais, monsieur le ministre, que vous n’approuvez pas un tel mécanisme. C’est pourtant celui qui, comme j’ai pu le constater sur le terrain, correspond aux souhaits formulés.
Notamment, mais pas seulement !
Je n’ai pas de liens privilégiés avec l’APLI, monsieur le ministre ! Il y a des producteurs de lait dans mon département, comme il y en a dans le vôtre ! Tous ont besoin d’explications et je ne crois pas qu’il faille fermer la porte à la discussion avec les uns ou les autres. Mieux vaut tenter de trouver la solution la meilleure pour permettre à la France de garder une stratégie en matière de production laitière.
Effectivement, il y a besoin de beaucoup d’explications !
Sans doute, monsieur le ministre, et c’est la raison pour laquelle j’ai sollicité ce débat dans le cadre de la politique de contrôle parlementaire que nous menons dans cette assemblée. Je crois qu’il est bon, en effet, de pouvoir expliciter les dispositions légales quelques mois après qu’elles ont été votées.
J’en ai pratiquement fini avec l’exposé de ma question. Vous le voyez, monsieur le président, j’ai été aussi brève que possible, pour permettre à chacun de s’exprimer et pour laisser au ministre le temps de nous donner les explications que nous attendons.
Je voudrais précisément vous entendre, monsieur le ministre, à propos de la sécheresse puisque, cet après-midi même, vous vous êtes longuement exprimé sur cette question à l’Assemblée nationale et que vous avez rencontré les professionnels à ce sujet.
Je tiens à attirer votre attention sur le problème de l’interdiction du broyage des céréales, qui devient absolument crucial dans nos départements.
En tout cas, j’aimerais que, à l’issue de ce débat, vous puissiez rassurer les producteurs de lait qui souhaitent temporiser en ce qui concerne la conclusion des contrats.
Comment comptez-vous renforcer le niveau du revenu des producteurs pour assurer une répartition équitable du prix final du lait ?
Quelles adaptations réglementaires pensez-vous apporter, au vu des difficultés d’application qui commencent à émerger, quelques semaines seulement après la publication du décret ?
Surtout, monsieur le ministre, comment entendez-vous sanctionner les clauses abusives et dans quels délais ? L’enjeu est la préservation d’une production laitière dont la France est fière et le maintien de producteurs de lait qui, dans les deux régions normandes comme ailleurs dans notre pays, sont fiers de leur métier ?
MM. Gérard Le Cam et Martial Bourquin applaudissent
« Rien n’étonne plus les hommes que le bon sens », écrivait Ralph Waldo Emerson. Il semblerait néanmoins, monsieur le ministre, que vous ayez choisi ce bon sens comme socle des nouvelles relations entre les producteurs et les acheteurs.
En réponse à la crise sans précédent de 2009, vous avez conçu la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la LMAP, comme une boîte à outils répondant aux besoins de l’agriculture et des agriculteurs pour tendre vers l’efficacité, le pragmatisme et l’équité. L’un de ses outils principaux est le contrat entre les producteurs et les acheteurs.
La question de Mme Goulet permet au Parlement d’exercer pleinement son contrôle en vous interrogeant sur le bilan des premiers contrats entrés en vigueur pour la filière des fruits et légumes et pour la filière laitière.
La garantie de revenus stables et décents aux agriculteurs par le biais de la contractualisation, bien qu’elle relève du simple bon sens, constitue une révolution dans la réorganisation de l’agriculture française.
Quels enseignements peut-on tirer des contrats conclus dans la filière des fruits et légumes depuis le 1er mars et dans la filière laitière depuis le 1er avril ? Certains contrats ont été qualifiés d’inacceptables par les producteurs et par vous-même. Les industriels ont-ils révisé leurs positions ou campent-ils sur celles-ci, alors qu’elles ont été rejetées par les autres protagonistes ?
Où en est la contractualisation prévue entre éleveurs et céréaliers pour l’alimentation animale ? Qu’en est-il du secteur ovin ? Quels seront les ajustements pour les autres filières ?
Vous avez voulu des contrats révisables, sous l’autorité des pouvoirs publics et du médiateur des contrats. Quel est le bilan de l’activité du médiateur à ce jour ?
Vous l’avez souligné, les producteurs ne peuvent plus attendre encore. Il faut donc avancer rapidement dans toutes les filières. Ainsi, vous avez commandé un audit des abattoirs, dont les premiers résultats devraient être connus en juillet. Quelles autres mesures avez-vous mises en place ? Quel est leur calendrier ?
Si les investissements des agriculteurs s’amortissent sur douze ans en moyenne, on peut néanmoins considérer comme une première avancée le fait que les contrats prévoient une durée allant jusqu’à cinq ans. Ainsi, se trouvent assurées une meilleure lisibilité et plus grande pérennité, dans la relation entre les parties, des modalités de détermination des prix par la définition des conditions d’évolution et d’adaptation des prix et de la périodicité.
Êtes-vous favorable à la généralisation de la contractualisation de tous les maillons d’une filière, en la rendant optionnelle pour les agriculteurs, comme ceux-ci le demandent avec insistance, et obligatoire pour les industriels ?
La contractualisation, outil sécurisant pour le producteur et pour la filière, ne règle toutefois pas le problème central de la volatilité des prix. La libéralisation totale de l’agriculture constitue une erreur majeure, une erreur stratégique, selon vos propres termes. Une régulation des marchés agricoles eux-mêmes est donc indispensable.
Pour que les contrats soient équitables, des indicateurs de tendance de marchés nationaux et internationaux sont indispensables. L’Observatoire des prix et des marges, installé en novembre, a déjà rendu ses travaux préliminaires sur la viande bovine. Il en est ressorti que les éleveurs étaient les seuls à ne pas pouvoir répercuter sur leurs prix la hausse de leurs coûts de production. Quelles mesures allez-vous prendre en conséquence ? L’Observatoire a-t-il formulé des remarques concernant d’autres filières ?
La gestion des risques est un facteur essentiel de sécurité des revenus. La contractualisation doit mentionner les volumes et les caractéristiques des produits fournis. Elle offre ainsi au producteur une meilleure visibilité sur ses débouchés, mais elle peut aussi le fragiliser, les aléas climatiques n’étant pas susceptibles d’être contractualisés.
C’est pourquoi le groupe du RDSE a toujours plaidé pour la mise en place d’une assurance récolte obligatoire, interrégionale et interfilières.
Rendre cette assurance obligatoire en ferait baisser le coût en mutualisant les risques et constituerait donc une forme de péréquation. On peut espérer que le dispositif retenu par la LMAP permettra de tendre vers une amélioration de la situation.
Quels sont, à ce jour, les taux de pénétration dans les différentes filières ? Où en est-on du rapport que le Gouvernement devait remettre avant la fin du mois de janvier sur les conditions et modalités de mise en œuvre d’une réassurance publique ?
Faute de cette réassurance, il n’y aura pas de lancement d’une assurance fourrages ni de développement fort de l’assurance multirisque climatique actuelle pour les grandes cultures et la viticulture.
La sécheresse qui s’installe dans nos zones céréalières et herbagères ne fera qu’aggraver la situation et livrer à la spéculation le marché des denrées alimentaires.
Vous défendez les producteurs, qui sont souvent de petits producteurs. Vous avez été entendu par la Commission européenne et avez obtenu la modification du redoutable autant qu’obscur droit européen de la concurrence afin de permettre aux producteurs de se regrouper en organisations de producteurs. Ce sera le moyen d’agir dans un environnement agricole international concurrentiel et faussé, car spéculatif, et donc dévastateur pour les exploitations familiales.
Une proposition de règlement de la Commission européenne visant à rééquilibrer les relations entre producteurs et acheteurs est actuellement en discussion au Parlement européen et au Conseil. Elle reprend plusieurs recommandations du groupe d’experts de haut niveau constitué en octobre 2009 pour réfléchir à l’avenir du secteur laitier et préparer la suppression des quotas.
Cette proposition tend à autoriser la conclusion de contrats en laissant les États membres libres de décider de leur caractère obligatoire. Elle vise aussi à permettre aux producteurs de se regrouper sur une base plus large, par exception au droit de la concurrence. On y reconnaît votre engagement, monsieur le ministre.
Vous êtes reconnu comme un défenseur de la compétitivité de notre agriculture. En conséquence, vous devrez convaincre nos partenaires, et souvent concurrents, au prochain sommet du G20, d’agir en amont sur l’instabilité des prix agricoles.
Les agriculteurs sont inquiets, car ils ne sont pas en mesure d’amortir les coups de boutoir du marché qui soumettent leurs revenus à trop d’aléas. Ils veulent que les pouvoirs publics français et européens trouvent un équilibre entre péréquation, mutualisation, solidarité, d’une part, et liberté d’entreprendre, d’autre part. Le contrat apparaît comme la meilleure réponse à leurs aspirations. Nous comptons sur vous, monsieur le ministre, pour sa généralisation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mesure phare de la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, la contractualisation méritait un débat parlementaire au moment où sa mise en œuvre devient effective. Aussi je tiens à remercier notre collègue Nathalie Goulet, sénatrice de l’Orne, d’avoir pris cette initiative.
La contractualisation nous a été présentée comme une réponse aux conséquences de l’ouverture des marchés. Nous pensons que c’est une mauvaise réponse. En effet, la contractualisation mise en place par la loi de modernisation agricole ne parviendra ni à juguler les dérives du système capitaliste et les crises qu’il entraîne ni à sécuriser les relations commerciales, car elle s’inscrit dans un système malade sans en changer les règles du jeu !
C’est pourquoi le principe d’une contractualisation obligatoire ne sera pas à même de remplacer les mesures de régulation nécessaires pour le secteur agricole, mesures qui relèvent de la responsabilité des États. C’est ce que nous nous efforcerons de montrer dans un premier temps.
Ensuite, le mode contractuel est l’expression même d’un rapport de forces. Il confirme la volonté du Gouvernement de s’engager dans une gestion purement privée des relations commerciales agricoles. Cependant, le contrat n’est pas suffisant pour équilibrer les relations entre les différents acteurs.
En conséquence, même si la politique agricole était orientée, comme nous le souhaitons, vers une juste rémunération du travail, une régulation des stocks, un bannissement de la spéculation, une régulation des prix, la relation contractuelle pourrait encore se traduire par un déséquilibre dans les relations commerciales entre producteurs et acheteurs.
Lors des débats sur la loi de modernisation agricole, les sénateurs de l’opposition et de la majorité ont tous constaté, ainsi que vous-même, monsieur le ministre, l’ampleur de la gravité de la crise du secteur agricole qui a touché l’ensemble des agriculteurs et l’ensemble des secteurs.
Rappelons quelques chiffres mentionnés dans le rapport du Sénat sur la LMAP : après une baisse de 23 % en 2008, le revenu net par actif non salarié des exploitations professionnelles a chuté, toutes productions confondues, de 32 % en 2009. Les producteurs de céréales, oléagineux et protéagineux ont enregistré une baisse du revenu atteignant près de 50 %. Pour les producteurs de fruits et légumes, la baisse est de 53 % en arboriculture fruitière et de 34 % en horticulture.
Si le revenu agricole a augmenté en 2010, il reste inférieur de 15 % à la moyenne des revenus français. L’alimentation représente 15 % du budget des ménages, mais seulement 4 % des bénéfices reviennent aux producteurs. Vous avez expliqué cette hausse du revenu agricole, monsieur le ministre, par des facteurs conjoncturels, comme l’embargo russe sur les céréales, qui a fait remonter le cours du blé, et par l’action du Gouvernement, notamment auprès de la Commission européenne, pour « l’obliger à intervenir sur les marchés ».
Cette analyse montre à quel point le secteur agricole livré au libéralisme est fragilisé. Il est soumis sans garde-fous à la volatilité des marchés, qui s’explique, comme le notait l’étude d’impact sur la LMAP, par diverses causes : les aléas climatiques et sanitaires, le décalage entre l’évolution de la demande et la réponse de l’offre, le caractère périssable d’un grand nombre de produits, la non-mobilité des actifs matériels ou encore le lien de la production agricole avec le sol.
La sécheresse qui sévit dans le pays depuis plusieurs semaines va encore créer de nouvelles difficultés pour un nombre important d’exploitants, les plus touchés étant pour le moment les éleveurs, car la sécheresse a déjà des conséquences dramatiques sur les fourrages.
Depuis le début du mois, les premières coupes de foin montrent des rendements en baisse de 30 % à 40 % selon les zones. Et, au-delà de ses conséquences physiques, la sécheresse ne manquera pas d’entraîner des appétits spéculatifs sur les matières premières agricoles.
Monsieur le ministre, vous avez proposé la mise à disposition des jachères. Cet après-midi, vous avez suggéré que le Fonds de garantie des calamités agricoles, qui est doté d’une centaine de millions d’euros, soit réuni fin juin ; c’est un bon début. Cette situation de crise montre à quel point il est vital que l’État soutienne ses agriculteurs. Cela s’impose d’autant plus que la LMAP a prévu de supprimer le Fonds national de garantie contre les calamités agricoles, fondé sur la solidarité, au profit du Fonds national de gestion de risques en agriculture, qui privilégie l’assurance individuelle.
Dans ce cas précis, quels bénéfices les producteurs peuvent-ils tirer de la contractualisation pour faire face à la crise ? Ils doivent, dans tous les cas, assumer la forte augmentation des prix des intrants et les pertes financières liées aux phénomènes climatiques. Ils supportent seuls les risques d’une filière qui s’enrichit dans ses derniers maillons. C’est pourquoi nous n’étions pas d’accord avec vous quand vous avez déclaré en octobre dernier, monsieur le ministre, que « disposer de contrats signés constitue la meilleure garantie de revenu si le marché se retourne ».
Dans ce contexte économique de plus en plus tendu, avec la multiplication des crises sanitaires, énergétiques ou d’origine climatique, il est nécessaire, à l’échelon européen, de promouvoir une politique agricole commune qui n’abandonne pas le principe d’une régulation horizontale, par exemple au niveau de la production et de l’offre ; une politique plus juste qui favorise la diversité des productions et les petites exploitations en gérant les volumes, en limitant les importations abusives, en favorisant les exportations dans un cadre équilibré.
La contractualisation seule n’empêche pas la concurrence entre producteurs ou entre bassins de production. Elle n’empêche pas le dumping social et environnemental. Certains économistes considèrent qu’elle aura des conséquences sur le comportement des transformateurs et des collecteurs, qui se demanderont avant d’investir dans telle ou telle région : « Qui sera le plus compétitif, demain, pour produire des céréales de bonne qualité ou du lait à une saison où j’en ai besoin ? » Ils considèrent que cela renforcera les écarts entre ceux qui sont aptes à remplir le cahier des charges et à en tirer une valeur ajoutée et ceux qui ont plus de difficultés et qui voyaient leur revenu garanti par la politique agricole commune.
Ensuite, quelle portée peut avoir la contractualisation quand on sait que, face à sept centrales d’achats et 11 500 entreprises agroalimentaires, il existe 507 000 exploitations agricoles, dont 326 000 exploitations professionnelles ? Sans doute la même que la charte de bonne conduite que Nicolas Sarkozy avait signée avec la grande distribution…
Le président de la section laitière de la fédération régionale des syndicats d’exploitants agricoles de l’Ouest remarquait récemment à propos des contrats laitiers : « Tout ce que j’ai lu jusqu’à présent me donne plutôt le sentiment que les entreprises cherchent à imposer leurs conditions aux éleveurs et à se défaire au maximum de leurs obligations envers eux. » En bref, on ne règle rien !
De plus, l’ensemble des syndicats de la profession se montrent très critiques sur le contenu même des contrats et sur les pratiques abusives auxquelles ils pourraient donner lieu.
S’il est fait état d’une référence de prix, celle-ci ne constitue en aucun cas un prix fixe : il ne s’agit que d’une modalité de calcul. De plus, les clauses de sauvegarde se multiplient afin de permettre aux entreprises de déroger à l’application des indices interprofessionnels. S’agissant du lait, ont été relevées plusieurs clauses visant à imposer des volumes à produire avec une obligation de régularité ou permettant aux entreprises de se dégager de leurs obligations de collecte en cas d’intempéries. Ces dispositions ne sont pas acceptables et nous ne pouvons que les dénoncer ici. De quelles armes disposera le producteur pour se défendre contre de telles pratiques ? La concentration de la production a paru constituer une solution séduisante mais, ne nous y trompons pas, elle laissera au contraire des agriculteurs sur le bord de la route.
La question de la cession du contrat en même temps que la cession de l’exploitation qui pourrait être refusée par l’entreprise est une aberration !
Enfin, il est profondément choquant que certaines clauses constituent des entraves à la liberté syndicale, principe à valeur constitutionnelle. Ce fut le cas pour les contrats Lactalis que vous avez pointés du doigt, monsieur le ministre : la clause imposée par l’entreprise stipulait que les contrats seraient annulés si les producteurs cessaient de livrer leur lait ou se mettaient à manifester.
M. Gérard César. Il s’agit là d’un droit de vie ou de mort qu’elle s’accorde sur les exploitations. C’est intolérable dans un État de droit !
Applaudissements sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, montée des risques climatiques, prise en compte des impératifs environnementaux, volatilité accrue des prix agricoles, réduction des soutiens publics et démantèlement des instruments d’intervention sur les marchés : notre agriculture vit depuis quelques années un véritable bouleversement.
La LMAP, votée voilà près d’un an, avait pour objectif de permettre à la « ferme France » de faire face au nouveau contexte en favorisant la structuration des filières et en permettant à l’agriculteur de mieux gérer ses risques.
Avec le renforcement des interprofessions, lié à l’obligation du regroupement des producteurs, la contractualisation est l’un des moyens proposés pour mieux structurer les filières agricoles et agro-alimentaires.
L’enjeu n’est pas mince. Pour les acteurs de la filière laitière, avec la fin des quotas européens en 2015, produire ne suffira plus : il faudra savoir vendre et s’assurer des débouchés.
Anticiper la réforme de la PAC était nécessaire, et le groupe de travail sénatorial présidé par Jean-Paul Emorine et coprésidé notamment par Jean Bizet est à la manœuvre pour vous aider, monsieur le ministre, dans cette affaire délicate.
Bien entendu, la France se bat pour une PAC forte après 2014, qui donnerait plus de place à la régulation. Mais nous ne reviendrons pas au système semi-administré d’hier. Une majorité d’États membres reste fondamentalement attachée à l’orientation de la PAC vers le marché.
En ma qualité de rapporteur de la LMAP, j’ai donc soutenu la mise en place de la contractualisation, en lui apportant quelques adaptations.
En premier lieu, nous avons tenu, avec votre accord, monsieur le ministre, à ce que la contractualisation soit d’abord l’affaire des interprofessions. Ainsi, la loi prévoit que le cadre contractuel fixé par accord interprofessionnel remplacera celui qui est fixé par l’État. Ce dernier définit donc simplement un régime par défaut. Il appartient aux acteurs du monde agricole de se mettre d’accord pour déroger à ce cadre.
En second lieu, par souci d’équité, j’ai veillé à ce que les coopératives soient soumises à la même obligation de contractualisation avec leurs adhérents que les autres opérateurs. Ce qui me paraît aller de soi, c’est que le coopérateur apporte l’intégralité de sa production à sa coopérative.
La loi a fixé en juillet 2010 le cadre de la contractualisation. Il restait à donner à cette contractualisation une consistance.
Aucun accord interprofessionnel n’étant intervenu, ce sont deux décrets qui ont défini par défaut le régime contractuel.
Dans le secteur du lait, les acheteurs ont l’obligation de proposer un contrat aux producteurs depuis le 1er avril. Dans celui des fruits et légumes, les contrats sont obligatoires depuis le 1er mars.
Si la contractualisation est et demeure, je le répète, un excellent principe, sa mise en œuvre suscite plusieurs interrogations.
Tout d’abord, la relation reste déséquilibrée entre les producteurs et les industriels qui leur achètent leur production. Les regroupements en organisations de producteurs puissantes n’ont pas encore eu lieu, ce qui ne met pas les producteurs en position de force dans la négociation, mais cet état de fait est de leur responsabilité.
En ce qui concerne le secteur du lait, je n’ai pas l’impression que les industriels aient proposé des contrats d’intégration, ce qui était la crainte initiale des producteurs. Cependant, ce déséquilibre a une traduction concrète : les clauses des contrats sont rédigées de manière plus favorable à l’acheteur qu’au producteur de lait. Certains contrats prévoient que le prix sera fixé non pas en fonction d’indices de tendance mais « de manière à conserver la compétitivité » du secteur d’activité, ce qui ouvre la voie à une renégociation permanente.
En conséquence, peu de contrats ont été signés à ce jour. Une grande méfiance prévaut et nous attendons avec impatience le rapport du médiateur des contrats, qui doit contribuer à rapprocher les points de vue.
Quelles mesures pourraient être envisagées pour que la contractualisation soit plus équilibrée dans le secteur du lait, entre producteurs et industriels ? C’est à cette question qu’il faut s’atteler pour réussir la contractualisation dans cette filière.
Ensuite, dans le secteur des fruits et légumes, la conclusion de contrats pour trois ans paraît difficilement compatible avec l’activité de vente sur les marchés de carreau. Sur ces marchés, on trouve le plus souvent de petits producteurs et des produits dont la disponibilité dépend fortement des conditions météorologiques, et la marchandise n’étant pas stockable, elle doit être vendue. Bref, la logique économique de ces marchés est plutôt celle d’achats d’opportunité.
Or l’amende due par les acheteurs qui n’ont pas proposé de contrat ou qui ont proposé des contrats non conformes au décret est très dissuasive, si bien que des petits acheteurs, notamment des supermarchés de taille moyenne, préfèrent s’insérer dans des gros circuits d’approvisionnement plutôt que de gérer leurs relations avec une multitude de producteurs locaux.
Il serait donc souhaitable de simplifier la contractualisation pour ce type d’activité et de ne pas pénaliser les petits producteurs, qui risquent de se retrouver avec leur marchandise invendue, faute de cadre juridique adapté.
En conclusion, monsieur le ministre, comme je m’interroge sur les perspectives pour la contractualisation, je vous poserai trois questions.
Premièrement, peut-on étendre le principe de la contractualisation au secteur de la viande bovine ?
Deuxièmement, la contractualisation peut-elle être étendue tout au long de chaque filière, faute de quoi le milieu de filière sera pénalisé ? Pour ma part, j’estime que les distributeurs doivent, eux aussi, pouvoir être responsabilisés.
Troisièmement, pour amortir les variations des prix de l’alimentation animale, une contractualisation interfilières est-elle envisagée ? Monsieur le ministre, vous avez été à la manœuvre pour obtenir un accord le 3 mai dernier, mais il s’agit davantage d’un engagement moral que d’un dispositif contraignant pour les parties.
Telles sont les remarques que je souhaitais formuler sur la contractualisation, mesure phare de la LMA.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je remercie ma collègue Nathalie Goulet de nous donner l’occasion de débattre de la contractualisation dans le secteur agricole.
Mon intervention sera complémentaire de la sienne puisque je n’évoquerai que la filière des fruits et légumes, pour laquelle l’application de l’obligation de contractualisation n’est pas facile.
Monsieur le ministre, permettez-moi tout d’abord de rappeler mon soutien au principe de la contractualisation, qui doit aboutir à une meilleure transparence des transactions et à une amélioration de la régulation des marchés.
Pour les fruits et légumes, nous constatons deux secteurs bien distincts : grande distribution et marché traditionnel.
Les ventes à la grande distribution représentent 90 % de la production de fruits et légumes frais. La contractualisation ne semble pas poser de problèmes à la production. Par ailleurs, en ce qui concerne les grandes surfaces, elles souhaitaient, me semble-t-il, ce type d’organisation. C’est sûrement très utile pour adapter l’offre à la demande, sécuriser et réguler ainsi l’approvisionnement de la grande distribution.
Est-ce à dire qu’il n’y aura plus de problèmes de régulation de marchés ? Pour avoir lu avec intérêt les contrats de plusieurs centrales, je pense, monsieur le ministre, qu’il reste encore beaucoup à faire à cet égard pour satisfaire les producteurs et limiter les crises.
Nous souhaitons vivement que, pour perfectionner ces contrats, vous puissiez vous appuyer sur une interprofession bien structurée et forte et que les secteurs professionnels et interprofessionnels prennent bien en compte les problèmes de tous les acteurs.
À côté de la grande distribution existent les ventes au marché traditionnel.
Les ventes sur les carreaux, dans les marchés d’intérêt national ou dans les marchés de gros – 19 marchés d’intérêt national et environ 40 marchés de gros – ainsi que sur les marchés de gré à gré sont souvent liées à une ou plusieurs productions locales. D’une manière générale, il s’agit de l’ensemble des lieux où se rencontrent producteurs et acheteurs. Tous ceux qui produisent les marchandises visées sont concernés, car même ceux qui vendent au détail directement aux consommateurs écoulent presque toujours une partie de leur marchandise sur les marchés de gros.
Aujourd’hui, l’ensemble des 19 marchés d’intérêt national représentent à eux seuls 2 280 opérateurs permanents, 26 000 emplois permanents, 4 150 producteurs réguliers, 62 500 acheteurs. Il convient d’ajouter les marchés de gros et les marchés de producteurs. Ce n’est donc pas négligeable.
Qu’apportent ces marchés ? Quel type de produits y trouve-t-on ?
Ces marchés apportent des produits de saison, extra frais, qui sont cueillis au bon moment, ont du goût, de la saveur et sont très variés. Les restaurateurs recherchent ces produits : leurs achats sont souvent spontanés et relèvent fréquemment du coup de cœur.
La France est reconnue à l’UNESCO pour sa gastronomie. Nous avons besoin, pour notre cuisine renommée, de produits de qualité, de la production variée de nos terroirs.
Alors que la grande distribution supprime tous les ans des références de petites productions, et ce sont autant de fruits ou de légumes qui, à court terme, vont disparaître, il faut laisser faire cette mise en marché spontanée, qui nous permet de maintenir de très anciennes variétés de fruits et de légumes. Ces produits, très goûteux, représentent nos terroirs.
Pour les producteurs qui pratiquent la vente directe de ce type de produits, ce marché ne suffit pas : ils ne peuvent y être présents tous les jours pour écouler toute leur production. Ils ont besoin des grossistes, de leur savoir-faire ainsi que de leur clientèle.
Or, aujourd’hui, les producteurs et les grossistes ne peuvent pas appliquer la contractualisation telle qu’elle est proposée.
Monsieur le ministre, vous avez indiqué par courrier à mon collègue député Jean Dionis du Séjour que l’application du décret concernant la contractualisation peut à tout moment être suspendue si un accord interprofessionnel est conclu et que vous envisagiez d’assouplir les règles de mise en œuvre de la contractualisation des ventes au carreau. Pouvez-vous nous indiquer ce que vous comptez faire ?
Je tiens à redire que la contractualisation sur ce type de marché traditionnel, qui rassemble à un moment précis producteurs, acheteurs et marchandises, est, par sa nature même, très difficile à réformer. Il s’agit d’acheter de gré à gré, en toute liberté, souvent de petites quantités provenant de petits producteurs habitués à défendre le prix des denrées déposées sur le carreau. Après cette rencontre physique, chacun se sépare, sans autre engagement que celui de livrer la marchandise.
Ces productions sont difficilement programmables compte tenu des aléas climatiques et sanitaires, mais aussi des contraintes d’exploitation, de main-d’œuvre, etc. Seule cette commercialisation de gré à gré constitue un marché libre qui pourra donner quelques indications de tendances de prix, le reste étant pour une grande part contractualisé.
Quelle solution peut apporter le Gouvernement ?
Monsieur le ministre, en de nombreuses occasions, vous nous avez démontré votre attachement à notre agriculture. Une fois de plus, nous faisons appel à vous pour que soit prise en considération la situation particulière de nos marchés traditionnels.
Sur ces marchés, les opérations de vente et de transmission de la marchandise à l’acheteur étant simultanées, les acteurs vous proposent de prendre en compte, à titre de contrat, le bon de livraison ou, éventuellement, la facture. Le bon de livraison rédigé sur le marché est en fait le seul contrat précis qui peut être réalisé, le seul qui donnera aux pouvoirs publics tous les éléments souhaités.
Faut-il absolument garder ces marchés professionnels ?
Monsieur le ministre, l’importance de ces marchés est bien supérieure aux 7 % à 10 % de produits qu’ils traitent. Ils sont précieux pour nos territoires, en termes de proximité, d’économie, d’emploi. Ils sont indispensables pour la conservation de nos productions régionales. Ils nous permettent d’identifier et d’animer nos territoires.
Je ne veux pas tomber dans le catastrophisme, mais je crains que, si le marché traditionnel ne conserve pas sa liberté, nous n’ouvrions toutes grandes les portes de l’importation !
En effet, les grossistes, qui détiennent 20 % du marché des fruits et légumes, ne vont pas rester les bras croisés et se laisser mourir sur place. Ils préparent déjà leur reconversion à l’importation : c’est plus facile et plus simple ! Chez nous, dans le Sud-Ouest, leurs yeux sont déjà tournés vers Perpignan, qui est la base d’échanges avec l’Espagne.
Monsieur le ministre, à quel avenir pouvons-nous nous attendre pour ce secteur ? Nous ne pouvons nous résoudre à voir disparaître ces marchés, car ils constituent une authentique richesse pour notre pays, sans même parler de tous ceux qu’ils font vivre. Nous comptons sur votre compétence et votre détermination pour clarifier et simplifier cette procédure, afin de rendre plus acceptable par tous ce mode de commercialisation.
Applaudissements sur les travées de l ’ Union centriste et de l ’ UMP, ainsi que sur certaines travées du RDSE.
Souffrez, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, qu’une Finistérienne remplace une Morbihannaise. En effet, Odette Herviaux, qui s’était beaucoup impliquée dans la discussion de la LMAP, n’avait pas prévu le report du présent débat.
Les producteurs laitiers ont reçu les propositions de contrat au cours des mois de mars et d’avril 2011. Il s’agissait, je vous le rappelle, de la mesure emblématique de la LMAP ; certains la qualifiaient même de « potion magique » pour remédier aux crises structurelles et conjoncturelles qui frappaient durement les agriculteurs. La filière laitière était alors le symbole de ce monde agricole en crise.
Mais que cette potion est dure à avaler pour les producteurs !
Même si certains contrats prennent en considération les préconisations du guide interprofessionnel des bonnes pratiques contractuelles, diffusé par l’interprofession du lait le 1er mars dernier, il ressort des premières analyses menées par les professionnels et les organisations syndicales que l’emprise des industriels a tendance à se renforcer. Ce terrible constat plonge les producteurs dans un désarroi bien compréhensible, alors que la loi était censée rééquilibrer les rapports de force économiques à leur profit.
En réalité, les industriels proposent de nombreuses clauses parfaitement inacceptables, qui dégradent la position des agriculteurs, les ravalant au rang de sous-traitants dociles et silencieux. Cette mise sous tutelle est inacceptable. Elle conduit d’ailleurs de nombreux responsables syndicaux à conseiller très fortement d’attendre avant de signer ces contrats.
L’analyse détaillée des orientations concrètes mises sur la table par les transformateurs ne laisse pas de surprendre. À titre d’exemples, je citerai : l’instauration de clauses de sauvegarde remettant en cause le suivi des indices interprofessionnels pour la fixation du prix ; l’imposition d’un volume à produire aux producteurs après quotas, avec une obligation de régularité des livraisons ; de nouveaux critères de qualité du lait, hors accord interprofessionnel ; le conditionnement de la collecte à des critères d’accès à l’exploitation fixés par l’entreprise ; le dégagement des obligations de collecte des entreprises en cas d’intempéries ; des clauses de subordination à l’entreprise sur la cessibilité ou les évolutions d’exploitations… Mais il y a encore p1us révélateur de l’état d’esprit de certains industriels : des entraves à l’exercice du droit syndical, voire son interdiction unilatérale.
Il apparaît donc clairement que, pour un grand nombre de transformateurs, ces contrats ne sont qu’un prétexte pour concrétiser leur projet d’intégration des producteurs, rendant ces derniers entièrement dépendants du bon vouloir de quelques actionnaires, de surcroît peu préoccupés par la dignité humaine, économique et financière de ceux qui rendent possible leur commerce.
J’ai cru comprendre, monsieur le ministre, que vous aviez vous-même dénoncé les premiers contrats proposés par les laiteries. Alors, pourquoi ne pas nous avoir écoutés ? Dès l’examen de votre projet de loi, nous vous avions alerté sur les dangers d’une détermination librement consentie du prix, sans garantie par la puissance publique d’un prix plancher couvrant au moins les coûts de production, seule à même de rééquilibrer des relations commerciales largement défavorables aux agriculteurs, et plus fondamentalement d’assurer la pérennité de leurs exploitations.
La méthode que vous avez adoptée a même aggravé ces difficultés : la préparation du projet de loi s’est faite en moins de six mois ; le choix de la procédure accélérée par le Gouvernement a réduit à trois semaines le temps d’examen des sénateurs et des députés ; la mise en place de la contractualisation a été décidée par décret, à marche forcée, sans accord formel des syndicats agricoles et des interprofessions concernées, qui demandaient plus de temps.
Pourquoi n’avez-vous pas voulu prendre en considération les positions transpartisanes en faveur d’une contractualisation négociée dans le cadre des interprofessions ? Nous n’avons cessé de rappeler que les principes d’un régime contractuel agricole étaient déjà présents dans les accords interprofessionnels agricoles à long terme. Ces contrats, véritablement collectifs, sont en effet conclus entre les représentants de la profession agricole et ceux des industries agroalimentaires, voire de la distribution. Visant à organiser la commercialisation des produits agricoles, ils peuvent être étendus, de façon obligatoire, à tous les acteurs de la filière, après enquête publique.
D’une façon générale, est-il besoin ici de l’indiquer, un contrat doit être équilibré et reprendre les droits et engagements des deux parties, dans le cadre d’une véritable négociation collective.
Face à ces mauvaises intentions, qui ne sauraient être considérées comme des erreurs ou des cafouillages techniques, la puissance publique doit assumer ses responsabilités, notamment en encourageant et en soutenant le regroupement des producteurs.
Pouvez-vous nous communiquer le contenu et le délai de parution du décret relatif à l’organisation des producteurs ? Votre réponse est cruciale, car les producteurs ne pourront rien négocier seuls face à l’entreprise agro-alimentaire ou le distributeur.
Pouvez-vous également nous garantir que le rapport, prévu pour la fin juin, du médiateur de la contractualisation laitière, dont nous ne mettons pas l’impartialité en doute, servira à corriger les graves dysfonctionnements que nous observons ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, grâce à l’adoption de la fameuse LMAP, l’année 2010 fut une année charnière pour l’agriculture. Cependant, avec la menace de la sécheresse qui se précise, cette année 2011 s’annonce tout aussi cruciale.
Près de la moitié des départements subissent des restrictions d’usage de l’eau. À l’heure actuelle, les assureurs ont déjà anticipé les pertes, en évaluant en moyenne à 15 % la baisse de rendement pour les céréales à paille et le colza.
Si la menace persiste, les déséquilibres entre production et demande vont aller s’accentuant, ouvrant la porte, à nouveau, à la spéculation sur ces matières premières agricoles.
Plus généralement, l’évolution générale de l’offre et de la demande de grains et singulièrement de blé, de maïs et d’oléagineux laisse augurer d’une situation d’approvisionnement plus serrée au cours des prochaines années, dont les conséquences peuvent être préoccupantes pour les pays importateurs et, en France, pour l’élevage utilisateur de grains.
La première réponse à apporter est, bien sûr, une augmentation de la production de grains, de fait abandonnée depuis la première réforme de la PAC en 1992, qui a entraîné l’installation du système des jachères. Il nous faut: produire plus et produire mieux, c’est-à-dire mettre en place une croissance durable.
Parallèlement, pour maîtriser au mieux la régulation de cours, il faut encourager l’installation de stocks physiques, qu’ils soient publics ou privés. La profession propose d’ailleurs un plan silos de 5 millions de tonnes.
La contractualisation, autre pilier de cette régulation souhaitée par tous, a été prévue dans la LMAP, mais n’est pas encore totalement entrée dans les faits, il s’en faut. Certains secteurs, comme le lait et les fruits et légumes, sont à ce jour couverts cette obligation qui leur a, hélas ! été imposée par voie réglementaire, à défaut d’avoir été véritablement négociée.
Vous avez d’ailleurs, monsieur le ministre, nommé il y a quelques semaines un médiateur de la contractualisation laitière pour veiller aux bonnes relations entre producteurs et acheteurs lors de la conclusion ou de l’exécution desdits contrats, afin de prévenir tout litige.
Néanmoins, pour ce qui concerne le lait, je ne peux que noter la réticence d’une partie des éleveurs laitiers, qui contestent le fait de ne pouvoir s’organiser en tant que producteurs alors que, dans le cadre de cette régulation, l’Europe et vous-même, monsieur le ministre, aviez bien rappelé la nécessité de renforcer le pouvoir de négociation des producteurs en leur permettant de se regrouper en organisations.
Qu’en est-il donc de ce « mini-paquet européen » censé autoriser l’organisation des producteurs par rapport à la répression des fraudes, mais qui n’est toujours pas entré dans les faits ?
Dans le domaine des fruits et légumes, la LMAP a certes constitué une véritable avancée pour sécuriser les transactions commerciales pour les groupements de producteurs, mais force est de constater que les variations climatiques ont des répercussions sur les productions soit à la hausse, soit à la baisse. Un engagement à hauteur de 100 % des achats sur une période de trois ans paraît donc peu en phase avec la réalité de certains marchés, notamment les marchés de gré à gré. Ne faudrait-il pas adapter cette mesure à ce cas particulier, comme l’a déjà souligné notre collègue Nathalie Goulet ?
Plus largement, il apparaît que ces contrats devraient être étendus à l’ensemble de la chaîne et pas simplement entre le producteur et son premier acheteur. Si ce dernier ne peut rien répercuter sur l’aval, il ne pourra pas tenir.
La grande distribution doit être impliquée dans ces contrats. Il est temps, monsieur le ministre, que ce verrou saute !
Enfin, en tant que représentant d’une région non seulement céréalière mais aussi d’élevage, je souhaite revenir sur le projet de contractualisation entre ces deux filières. Celles-ci travaillent sur un projet d’accord de contractualisation volontaire « céréaliers-éleveurs », en phase finale de discussion entre les partenaires situés en amont de la filière. Cette négociation regroupe des producteurs de céréales et d’oléo-protéagineux, des éleveurs, des organismes coopératifs collecteurs de céréales et des fabricants et négociants d’aliments du bétail. Nous ne pouvons que nous féliciter de cette initiative.
À l’heure où les éleveurs souffrent d’ores et déjà de la sécheresse, où certains d’entre eux, vu l’état des pâturages, doivent abattre des bêtes avant l’heure pour dégager des liquidités et ainsi acheter du fourrage pour nourrir le reste du troupeau, il est indispensable de créer les conditions d’une meilleure visibilité pour ces professionnels.
Or il ne peut y avoir d’avantages pour les éleveurs que si la démarche de contractualisation est adoptée tout au long de la filière, du producteur de grain au distributeur de produit fini. Il convient donc de prévoir un enchaînement de trois contrats types, connectés entre eux. Puis, pour que l’approche précédente porte ses fruits, une contractualisation « en aval », entre les éleveurs et leurs groupements, les abattoirs, les ateliers de découpe et la grande distribution est indispensable pour permettre la répercussion de l’évolution du coût des matières premières sur le produit final.
À défaut, la démarche entreprise au niveau de l’amont verrait ses effets immédiatement accaparés par la distribution, sans aucun bénéfice pour les éleveurs.
Par ailleurs, l’Observatoire des prix et des marges doit être sollicité, et un comité de suivi au niveau ministériel nécessairement installé.
Il s’agit d’une préoccupation partagée par toutes les filières.
En outre, l’inscription, par la présidence française, de la volatilité des prix des matières premières agricoles à l’ordre du jour du G20 est une initiative majeure.
Enfin, un consensus s’est fait jour, partagé par les organisations internationales associées, sur la pertinence du sujet, la nécessité de travailler ensemble et d’améliorer la connaissance du fonctionnement de ces marchés, préalable indispensable à un début de coordination internationale visant à prévenir les risques et à y répondre. C’est ce volet de régulation des prix qui a fait l’objet de propositions de la France dans le cadre du G20 agricole, tenu ces derniers jours à Buenos Aires.
Je vous remercie donc, monsieur le ministre, des éclaircissements que vous voudrez bien nous apporter sur les différents éléments de ce dossier de la contractualisation.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, plusieurs d’entre nous ont évoqué l’actualité, notamment la sécheresse. En regard de cette urgence climatique, la contractualisation, dont nous débattons ce soir, semble un sujet moins prioritaire pour le monde agricole et les agriculteurs, quelles que soient les filières.
Cette sécheresse qu’on annonce dramatique va avoir des répercussions très fortes dans les départements. Vous avez pris des initiatives, monsieur le ministre. Nous attendons d’en voir les résultats.
Nous tenons cependant à réaffirmer que cette sécheresse doit recevoir une réponse en termes de solidarité nationale, faute de quoi la situation économique des exploitations agricoles de notre pays se trouvera très dégradée.
Je reviens à présent au thème de la question orale.
Il y a un an, nous discutions ici même du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche. Le groupe socialiste avait voté contre l’ensemble du texte. Cette position était cohérente non seulement avec les propositions que nous avions défendues au cours du débat, mais également avec les ambitions que nous portons pour l’agriculture de notre pays. §Mais oui, monsieur Emorine !
Certaines des dispositions inscrites dans ce projet de loi semblaient pourtant aller dans le bon sens, et nous n’avions pas manqué de le souligner. Je pense notamment à l’article 1er, qui tentait de définir une politique de l’alimentation de la nation – c’était une première ! –, mais également à l’article 4, qui modifiait le code de commerce pour mieux encadrer certaines pratiques commerciales.
Je note également que plusieurs des propositions que nous avions présentées au cours du débat avaient reçu des soutiens sur l’ensemble des travées de cet hémicycle, mais pas celui du Gouvernement...
En revanche, nous nous sommes résolument opposés à l’article 3 de la LMAP, qui constituait le cœur de ce texte, sa « tête de gondole » en quelque sorte, puisqu’il instituait le principe de la contractualisation dans le secteur agricole. Non que nous soyons opposés à l’émergence d’un cadre contractuel ! Bien au contraire, pour nous, la contractualisation doit être un élément essentiel dans les échanges économiques concernant les produits de l’agriculture, étant entendu qu’elle doit être accompagnée d’une régulation au niveau européen.
Monsieur le ministre, permettez-moi de vous rappeler que l’un de vos prédécesseurs avait mis en place les contrats territoriaux d’exploitation, les CTE, …
…tant décriés à l’époque par certains. Après que de nombreux contrats de ce type avaient été signés, tout le monde, y compris leurs détracteurs, s’était aperçu qu’il s’agissait d’un bon dispositif, …
… propre à assurer le redéploiement de l’agriculture et la valorisation de la multifonctionnalité.
Il faut permettre à chacun de nos agriculteurs de vivre de son travail et non d’aides ou de subventions, qui, si elles peuvent se révéler nécessaires, ne doivent pas être une fin en soi. C’est l’enjeu économique de l’agriculture ; il y va tout bonnement de son avenir.
Si nous avions voté contre ce fameux article 3, c’est parce que la contractualisation telle que vous la conceviez ne nous paraissait pas de nature à remplir le rôle de moteur économique que vous vouliez lui donner.
À notre sens, il convenait de respecter deux exigences absolues pour réussir le pari de la contractualisation : d’une part, mieux associer les interprofessions, comme l’ont dit nombre d’orateurs avant moi ; d’autre part, garantir des prix rémunérateurs aux producteurs, afin de rééquilibrer les relations commerciales amont-aval qui leur sont largement défavorables.
La question orale posée par notre collègue présente un intérêt majeur : elle nous permet de faire le point sur la contractualisation prévue par la LMAP un an après l’adoption de celle-ci.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, dans la minute qu’il me reste, j’évoquerai la situation du secteur des fruits et légumes.
La contractualisation devait y apporter de la sérénité, l’ambition étant de sécuriser les revenus des producteurs. Or force est de constater aujourd'hui qu’elle n’a en rien eu de tels effets : depuis son entrée en vigueur, elle s’est malheureusement opérée à marche forcée, sans que l’interprofession soit toujours associée, et, pour l’instant, peu de contrats ont été signés.
Je veux le souligner à mon tour, dans tous les départements, la contractualisation pose un vrai problème sur les marchés d’intérêt national et sur les marchés de gré à gré. Or il est absolument exclu qu’elle puisse empêcher, dans le cadre des circuits courts, la poursuite des ventes directes.
À notre sens, la contractualisation doit porter sur une durée suffisamment longue pour aboutir à un partenariat « gagnant-gagnant » entre acheteurs et vendeurs. Lorsque le Gouvernement annonce, par la voix de son secrétaire d'État chargé du commerce, qu’il veut réduire la durée de contractualisation à moins d’un an, il prend l’orientation inverse de celle qui est souhaitable.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, la contractualisation devrait tout simplement avoir pour objectif de permettre aux agriculteurs de vivre de leur métier ; c’est ce que nous souhaitons tous !
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, cela a été rappelé, la contractualisation est désormais obligatoire entre les acheteurs et les producteurs de lait, de fruits et légumes et d’agneaux de moins de douze mois, les producteurs étant cependant libres de refuser les contrats.
Il s’agit aujourd’hui d’un outil indispensable pour conforter l’agriculture française et consolider son avenir, malgré un contexte national et européen contraint et une situation internationale plus que difficile.
En soutenant la contractualisation et son extension, d’abord, prochainement, comme je l’espère, à la filière bovine, puis, à terme, à toutes les autres filières, nous pensons agir en faveur tant de l’agriculteur que du consommateur, lequel doit rester au cœur de nos préoccupations.
J’ai déjà abordé le sujet lors de précédents débats, mais je tiens à rappeler cet exemple : depuis le début des années quatre-vingt-dix, le prix de la viande bovine payé au producteur a baissé de près de 10 %, alors que celui qui est supporté par le consommateur a crû de 50 %.
Sur la même période, les agriculteurs ont connu une hausse du cours des céréales et du lait, pour ne citer que ces deux productions, hausse qui a été immédiatement répercutée sur les produits transformés, mais, par la suite, ces mêmes cours ont nettement baissé sans que, pour autant, le consommateur voie le moindre changement sur les prix des denrées alimentaires pratiqués par la grande distribution.
La contractualisation permet également de replacer au centre des débats et des politiques les interprofessions, qui voient désormais renforcée leur capacité à agir. Une interprofession réussie favorise un partage plus équitable des marges entre producteurs, transformateurs, distributeurs, et donc des prix acceptables pour les producteurs comme pour les consommateurs.
Au niveau européen, monsieur le ministre, vous défendez la régulation et la transparence des marchés agricoles, ce qui va de pair avec la contractualisation. Nous ne pouvons que vous soutenir dans votre démarche et vous assurer de notre volonté de poursuivre à vos côtés dans cette voie. Je me réjouis également de voir les mesures contenues dans la loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche reprises à ce même niveau européen. Vous avez su remettre l’agriculture française à sa place de leader européen, et nous vous en remercions.
Votre travail permet au monde agricole de saisir la chance qui lui est offerte de mieux reprendre en main son avenir et d’avoir ainsi une meilleure visibilité sur ses débouchés, et surtout sur ses revenus.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Mes chers collègues, lorsqu’elle a fixé l'ordre du jour de nos travaux, la conférence des présidents n’avait pas envisagé que la séance d’aujourd'hui puisse se poursuivre au-delà de minuit. Or il paraît souhaitable, à mes yeux, d’achever le débat en cours.
Je vous propose donc de poursuivre la séance au-delà de minuit.
Il n’y a pas d’opposition ?...
Il en est ainsi décidé.
Dans la suite du débat, la parole est à Mme Renée Nicoux.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens pour ma part à aborder la situation du secteur de la viande, qui traverse une crise sans précédent depuis de nombreuses années sans percevoir le moindre signe d’amélioration. Éleveurs porcins, ovins, bovins : c’est toute une profession qui est actuellement en plein désarroi.
Crise du revenu depuis quatre ans, augmentation du prix de l’alimentation pour le bétail, envolée brutale des cours des céréales l’été dernier, blocage des abattoirs à la fin de l’année dernière, tout démontre que le secteur va mal et que le système actuel est en train de péricliter.
La hausse continue des coûts de production, conjuguée à la stagnation des prix de vente et à la concurrence internationale des pays émergents, met fortement en péril la pérennité du secteur de l’élevage français. Privés de perspectives d’avenir, de nombreux éleveurs sont amenés à abandonner la profession, tandis que les jeunes s’en détournent.
Certains n’hésitent plus à dire que la filière de l’élevage est en train de mourir ; et ce constat amer, je ne peux que le partager. Si rien ne se passe à très brève échéance, nous serons témoins de nombreux drames.
La priorité absolue est, bien évidemment, d’assurer un revenu décent aux éleveurs. C’est en vertu de cet objectif que la contractualisation a été proposée comme solution dans le cadre de la LMAP.
De ce point de vue, que pourrait apporter la contractualisation au secteur de l’élevage ? Et surtout, comment tirer les leçons des premiers écueils qu’a connus l’instauration d’une contractualisation obligatoire dans les autres secteurs ?
Monsieur le ministre, vous avez annoncé la publication du décret sur la contractualisation obligatoire pour l’élevage en juillet prochain. Est-ce à dire qu’un seul décret sera pris pour l’ensemble des filières ?
Il faut absolument veiller à ne pas fondre dans un même moule des élevages et des productions très différentes, ni à se limiter, comme pour le lait ou les fruits et légumes, à la seule relation commerciale entre l’agriculteur et son premier acheteur.
Dans le secteur de l’élevage, encore plus que dans les autres, il convient d’aborder les choses plus en amont, d’encadrer tous les types de relations commerciales ayant une influence sur le secteur, tant entre fabricants d’aliments pour animaux et éleveurs qu’entre éleveurs, transformateurs et distributeurs. Il est nécessaire d’apporter à chaque maillon de la filière des outils de gestion des prix.
Comme pour tout autre secteur, il convient d’élaborer une négociation collective, passant par un renforcement des interprofessions, et des indicateurs de prix, pour rééquilibrer le pouvoir de négociation de chaque acteur, ce qui n’a été le cas ni pour le lait ni pour les fruits et légumes.
Des outils permettant de lutter contre la volatilité extrême des cours des céréales, ou tout du moins de la gérer au mieux, doivent être mis en place. Il importe en effet d’avoir à l’esprit que les coûts alimentaires représentent 60 % à 70 % du coût de revient des élevages monogastriques – porcs et volailles. C’est donc une problématique centrale pour les éleveurs.
L’accord volontaire « d’engagement de prise en compte des variations excessives des prix de l’alimentation animale dans les négociations commerciales », signé le 3 mai dernier, est censé apporter des réponses à cette situation de crise. Ce document a le mérite de démontrer la nécessité de l’intervention de l’État pour réguler le système, apporter des garanties aux agriculteurs et rééquilibrer les relations commerciales.
Cependant, il soulève un certain nombre d’interrogations. Tout d’abord, la mise en place de cet accord semble une bien maigre solution face à l’ampleur de la crise traversée par les agriculteurs. Ensuite, nous ignorons tout des bases sur lesquelles se feront les négociations. Enfin, si ces négociations venaient à aboutir, nous craignons que leurs résultats ne soient synonymes d’une revalorisation en bout de chaîne, et donc d’une augmentation du prix de la viande pour le consommateur. Si tel est le cas, un problème en remplacera un autre !
Une logique de marge doit primer sur une logique de prix, et le partage de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de production faire l’objet d’une extrême vigilance.
De ce point de vue, nous attendions beaucoup du premier rapport de l’Observatoire des prix et des marges. Or ses conclusions ont suscité de nombreuses polémiques, révélant qu’aucun maillon de la filière ne s’enrichissait vraiment et que les marges restaient faibles. L’augmentation des prix en grande distribution depuis une dizaine d’années serait liée à des charges nouvelles chez les transformateurs, notamment des charges d’ordre sanitaire. Les producteurs, qui, eux aussi, ont dû faire face à des normes plus contraignantes, ont été les seuls à ne pas avoir pu répercuter leurs coûts de production sur les prix.
Tout cela reflète bien le rapport de forces totalement déséquilibré dans les relations commerciales, et ce au détriment des éleveurs.
Les conclusions de l’Observatoire des prix et des marges sont d’autant moins satisfaisantes que de nombreuses études, émanant notamment de l’UFC-Que Choisir, montrent une augmentation des prix à la consommation de la viande sur la période 2000-2010 pouvant aller de 40 % à 50 %. À titre d’exemple, le kilo de bœuf coûte en moyenne 3, 07 euros à la production et 11, 61 euros à la consommation.
Il revient donc à l’Observatoire des prix et des marges de faire un énorme travail de recherche complémentaire pour collecter des données objectives, car il est difficilement imaginable que personne ne s’enrichisse dans cette chaîne de production alors que les prix à la consommation augmentent.
Et la situation déjà difficile des éleveurs ne risque pas de s’améliorer avec la sécheresse actuelle, qui entraîne des problèmes d’approvisionnement en fourrage ! Il est d’ailleurs clair que la sécheresse, sur laquelle je conclurai mon intervention, va avoir des répercussions dramatiques, en particulier pour les éleveurs, mais aussi pour le monde agricole en général.
Face à des aléas climatiques récurrents, il apparaît nécessaire de mettre en place de nouveaux systèmes de solidarité entre les filières, de manière à éviter les pénuries. Pourraient ainsi être envisagés des contrats interfilières assurant une gestion de l’offre et de la demande en paille et fourrages et s’appuyant sur une plateforme d’échanges entre bassins allaitants et bassins céréaliers.
Monsieur le ministre, dans la mesure où vous êtes vous-même favorable au développement de relations contractuelles entre les filières céréalières et d’élevage, pourriez-vous nous préciser vos propositions en la matière ?
Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – Mme Nathalie Goulet applaudit également.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est en réponse aux conséquences de l’ouverture des marchés que le Gouvernement, via la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche, a notamment mis en place une contractualisation obligatoire entre producteurs et acheteurs. Cette voie de régulation des marchés, faut-il le rappeler, avait été fortement souhaitée par la profession agricole, plus particulièrement par les producteurs de lait.
La formalisation écrite des relations commerciales entre les producteurs et leurs premiers acheteurs devient donc la règle. Elle a pour objectif de donner plus de visibilité, aux agriculteurs, d’abord, dans un but de protection, mais aussi aux transformateurs et aux distributeurs, avec l’objectif de maîtriser, pour les premiers, leurs débouchés sur de longues périodes, et, pour les seconds, leurs approvisionnements.
Cette obligation de contrat écrit, couplée à l’interdiction, depuis le 28 janvier dernier, des remises, rabais et ristournes pour les transactions de fruits et légumes frais, constitue une réelle avancée en faveur de la stabilisation des revenus des producteurs français, avancée qu’il nous faut saluer.
Cependant, même s’il semble encore un peu tôt pour dresser un bilan objectif de la mise en œuvre des premiers contrats passés entre producteurs et acheteurs, certaines interrogations sur les modalités de ces contrats, relayées par les représentants du monde agricole, méritent dès à présent d’être prises en considération ; des réponses doivent y être apportées rapidement.
Trois points me paraissent devoir être relevés.
Tout d’abord, d’un point de vue général, les exploitants agricoles français sont actuellement soumis à d’importantes contraintes issues, d’une part, de l’hypervolatilité des cours des matières premières et, d’autre part, de la hausse importante du coût des intrants, notamment la facture énergétique.
Monsieur le ministre, afin de garantir un revenu final correct aux agriculteurs, il me semble nécessaire, en ce qui concerne les modalités de détermination du prix d’achat, de travailler à l’intégration d’une variable prenant en compte les coûts de production supportés par le producteur.
Par ailleurs, l’obligation de contrat ne porte que sur le premier acheteur. Dans ce cadre, les coopératives sont considérées comme premier acheteur et les centrales d’achat qui se fournissent auprès de ces coopératives n’ont pas d’obligation de contractualisation. Dans un contexte particulièrement tendu entre les producteurs et la distribution, il semble important de réfléchir aux modalités de généralisation de cette obligation aux centrales d’achat des grandes et moyennes surfaces, même si elles n’interviennent pas en tant que premier acheteur.
Dans le secteur des fruits et légumes, plus particulièrement, le choix d’une durée minimale de contractualisation de trois ans vise, par l’effet de lissage ainsi produit, à contribuer à restaurer la stabilité des prix des produits. Ce dispositif semble toutefois encore peu adapté à la volatilité, en termes de volume, ainsi qu’à la diversité des productions concernées. Les aléas climatiques – la sécheresse que notre pays rencontre à l’heure actuelle en constitue un exemple frappant – peuvent notamment affecter de manière totalement imprévisible les quantités de productions livrables.
Une attention toute particulière doit donc être apportée, dans la rédaction des contrats, aux modalités de révision du contrat, qui constituent déjà une mention obligatoire, afin de permettre une souplesse et une réactivité accrues en cas d’aléas climatiques.
N’oublions cependant pas qu’il existe, par ailleurs, d’autres problèmes qui ne pourront pas être réglés par la contractualisation : il s’agit notamment de ceux qui sont liés aux différences importantes de coûts de main-d’œuvre entre les pays de l’Union européenne. C’est un poste important de charges dans le secteur des fruits et légumes. Les régions frontalières, comme l’Alsace, souffrent particulièrement du manque d’harmonisation en la matière des politiques sociales et fiscales nationales.
Dans le secteur laitier, enfin, si le choix d’une contractualisation minimale de cinq années va dans le sens d’une stabilité à moyen terme des revenus pour les producteurs, il faut toutefois veiller à ce que la collecte du lait soit égale pour tous, qu’ils se trouvent en montagne, proches ou éloignés d’une usine. Le lait doit continuer à être collecté sur l’ensemble du territoire national. Or, à ce jour, les coopératives laitières ne représentent que 20 % de la collecte nationale, alors qu’aux Pays-Bas ou au Danemark on n’est pas loin des 100 %. Cela perturbe la distribution, qui a la possibilité de s’alimenter ailleurs que dans l’Hexagone. Des efforts sur la structuration du secteur laitier sont donc encore à mener.
En conclusion, je dirai que, si tout ne peut pas être réglé grâce à la contractualisation, il faut travailler autant que faire se peut à améliorer le dialogue entre producteurs et distributeurs et, pour que cela fonctionne, il est nécessaire d’avoir une organisation économique des producteurs et des interprofessions forte et solide, de manière à pouvoir répondre aux attentes des distributeurs et des consommateurs.
Monsieur le ministre, les enjeux liés à la réforme de la PAC, maintenant proche, doivent tous nous inciter à travailler au renforcement de l’organisation et de la structuration des grandes filières agricoles nationales.
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, on reproche parfois au Sénat d’agir avec lenteur. Cette fois, il faut reconnaître qu’il se hâte avec lenteur !
Les contrats ont été institués le 1er avril dernier pour le lait – c’est à cette date qu’est paru le décret concernant ce secteur – et le 1er mars dernier pour les fruits et légumes. §Nous dressons donc le bilan de mesures qui sont en vigueur depuis seulement deux mois, voire à peine un mois pour certaines. Quant aux coopératives, elles n’ont pas encore adopté les dispositions nécessaires à la mise en place de ces contrats, puisqu’elles ont jusqu’au 1er juillet prochain pour le faire.
Par conséquent, mesdames, messieurs les sénateurs, vous me permettrez d’être un peu plus prudent que vous dans l’appréciation que je porte sur la mise en œuvre de ces dispositifs. Comme le disait un Président de la République, que je respecte d’ailleurs, comme je le fais de tous les titulaires passés, présents ou futurs de cette fonction, il faut savoir « laisser du temps au temps ».
Sourires
Seconde remarque générale, je crois en la contractualisation. Je l’ai défendue à l’occasion de l’examen du projet de loi de modernisation de l’agriculture et de la pêche, et je continue à y croire. Je suis convaincu que l’avenir nous donnera raison, comme à tous ceux qui ont soutenu cette démarche. La contractualisation est, à mes yeux, le seul moyen de gagner en visibilité, donc en prévisibilité, au profit de l’ensemble des agriculteurs de France.
J’en viens au fond du sujet, et j’évoquerai tout d’abord le réquisitoire que Mme Goulet a prononcé contre les contrats.
Comme c’est votre anniversaire aujourd'hui, madame Goulet
Sourires
Nouveaux sourires.
… à quelques minutes près, en effet, je n’aurai pas la discourtoisie de critiquer trop violemment votre dénonciation de ce bébé âgé d’un mois et demi à peine que sont les contrats laitiers.
Toutefois, permettez-moi de relever quelques inexactitudes dans vos propos.
Vous critiquez les contrats dans les coopératives, en soulignant qu’ils sont une source d’inquiétude. Or ils n’existent pas encore ! Je le répète, les coopératives ont jusqu’au 1er juillet prochain pour régulariser leur situation. À partir du moment où elles disposent d’un volume global apporté par les producteurs qui en sont membres et qui sont associés à leur capital, elles sont appelées à définir, dans ce cadre collectif qui leur est propre, la façon dont elles mettent en place le contrat.
Vous déplorez le problème spécifique né de la distinction, au sein des quotas, entre les volumes A et B, ces derniers étant, selon vous, rémunérés à des tarifs absolument scandaleux et inacceptables dans le cadre des contrats. Je vous rappelle que, aujourd'hui, les volumes B non seulement ne sont pas payés, mais font en outre l’objet de pénalités de la part de la Commission européenne pour cause de surproduction, laquelle n’est pas acceptable dans le cadre des quotas.
Par ailleurs, vous affirmez qu’il faudrait attendre que les organisations de producteurs existent pour mettre en place les contrats. Néanmoins, ces organisations existent déjà, madame Goulet ! C’est bien parce que la Commission européenne a constaté que nous avions mis en place les contrats que nous nous orientons, en toute logique, vers un renforcement des organisations de producteurs. Si nous n’avions pas institué les contrats – je reviendrai sur cette éventualité –, nous ne renforcerions pas les organisations de producteurs.
Enfin, vous me dites que les producteurs sont pieds et poings liés à cause de ces contrats. Dois-je vous rappeler, madame Goulet, que personne ne force les producteurs à les signer ? §Les contrats sont obligatoires pour les industriels, et uniquement pour eux, comme cela a très bien été expliqué tout à l’heure. Les producteurs sont libres, s’ils le souhaitent, d’en rester au dispositif antérieur.
M. Bruno Le Maire, ministre. Ces quelques remarques préliminaires étant faites, je veux vous souhaiter, de nouveau, un très joyeux anniversaire !
Applaudissements
Mesdames, messieurs les sénateurs, gouverner, c’est prévoir.
Il serait irresponsable de la part du Gouvernement de ne pas anticiper la fin des quotas prévue en 2015. On peut être favorable ou hostile à leur disparition : cela se discute, je le reconnais bien volontiers.
Néanmoins, nous faisons partie d’une communauté européenne dont les règles s’imposent à tous. Dès le premier jour de mes fonctions, il m’est apparu que la position française consistant à défendre les quotas était vouée à l’échec au sein de l’Union européenne. Elle ne nous aurait pas permis d’engager ce qui me tient le plus à cœur, c'est-à-dire la régulation des marchés. Pour obtenir cette dernière, il fallait cesser d’illusionner les producteurs au sujet des quotas ! §Nous devions reconnaître que notre position n’était plus tenable en Europe, qu’elle isolait la France et qu’elle nous empêchait de prendre le leadership pour la réforme de la politique agricole commune après 2012.
Prévoir, c’est également assumer la concurrence de nos voisins et se défendre contre elle. L’Allemagne, en particulier, qui est devenue depuis quelques années un grand producteur agricole, récupère nos propres quotas pour vendre, avec des prix inférieurs aux nôtres, le lait que nous devrions, nous, produire en France. Nous ne pouvons ignorer cette réalité.
Prévoir, c’est aussi faire en sorte que notre production de lait ne soit pas chaque année inférieure à nos quotas, comme c’est le cas depuis près de dix ans maintenant. Dois-je rappeler aux sénatrices et aux sénateurs présents ce soir – je les remercie d’ailleurs d’être restés si tard en séance pour débattre de ce sujet, qui nous tient tous à cœur – que, depuis plus de dix ans, la France sous-réalise de 8 % à 10 % de ses quotas laitiers ? Cela signifie que notre pays offre le revenu de ses propres agriculteurs aux producteurs de lait allemands, parce qu’il n’est pas capable de réaliser ses quotas.
Prévoir, c’est également sortir les producteurs de l’instabilité chronique qu’ils subissent depuis des années.
En effet, de deux choses l’une : soit la situation qui existait précédemment dans le secteur était parfaite et tous les producteurs de lait en France vivaient royalement grâce aux revenus considérables garantis par des prix de production à la tonne extrêmement élevés, personne ne pleurant donc sur leur sort ; soit, au contraire, comme je le crois profondément, la situation des producteurs de lait dans notre pays était intenable, les prix étant souvent trop bas, avec de trop fortes variations, ce qui obligeait le ministre de l’agriculture en fonctions à intervenir, à la marge de la légalité – reconnaissons-le –, pour imposer des prix à des industriels qui n’étaient plus disposés à les accepter.
À l’évidence, je le répète, la situation était intenable. Il fallait changer le système et passer à autre chose. C’est exactement ce que nous avons fait avec les contrats laitiers.
Pour autant, je ne prétends pas que le mois et demi qui s’est écoulé depuis la publication du décret m’a laissé béat de satisfaction et que j’ai été totalement ravi de l’attitude des industriels. Au contraire, j’ai moi-même dénoncé cette dernière.
Je le répète de nouveau à cette tribune, devant la représentation nationale : je regrette profondément l’attitude qu’ont eue certains industriels, parmi les plus importants du secteur, lors de la mise en place de ces contrats. Ils auraient pu – disons-le clairement – jouer davantage le jeu. C’était leur intérêt, celui des producteurs et, tout simplement, celui du pays. Cet épisode a achevé de me convaincre que, en France, hélas, les représentants de la nation et de l’État restent les seuls garants de l’intérêt général.
En revanche, nous voyons progressivement se conclure sur certains points du territoire des contrats tout à fait convenables. Certains industriels, que je ne peux pas citer nommément dans cet hémicycle, ont bien joué le jeu. Ils ont accepté de récompenser leurs producteurs. Ils ont offert à ces derniers des contrats, courant sur plusieurs années, dont les conditions, en termes d’indicateurs de prix, de volumes, de dispositifs de révisions et de clauses de cession – les producteurs y sont très attachés – sont tout à fait satisfaisantes et conformes au guide de bonnes pratiques édicté par l’interprofession.
Quant aux autres industriels, je leur demande de respecter les règles qui ont été fixées. Nous avons mis en place un médiateur, qui devra s’assurer du caractère équitable des contrats proposés, et je veillerai à ce que cet impératif soit respecté.
Je n’accepterai pas que certains contrats, comme cela a pu être le cas, remettent en cause les droits syndicaux des producteurs ou laissent entendre que ces derniers ne peuvent ou ne doivent s’organiser pour négocier les prix avec les industriels. Il me revient de rappeler la règle de droit et de faire en sorte que la relation entre producteurs et industriels soit équitable.
Naturellement, nous voulons améliorer encore l’organisation des producteurs. L’interprofession a joué le jeu. Elle a élaboré un guide de bonnes pratiques et même mis en place, dans plusieurs départements, des systèmes d’appui pour les producteurs et des points d’aides à la signature des contrats. Je tiens à les en féliciter. Ces documents seront signés dans les semaines et les mois à venir – je n’ai aucun doute à cet égard –, puis leurs dispositions seront mises en œuvre.
Par ailleurs, quand le paquet « lait », dont je rappelle qu’il a été porté par la France – il a été mis sur la table du Conseil de l’Union européenne par le ministre français de l’agriculture –, aura été définitivement adopté, comme je le souhaite, nous pourrons obtenir une modification du droit de la concurrence, afin que les producteurs aient la possibilité de s’organiser de façon encore plus collective, pour négocier leurs contrats avec les industriels en étant encore davantage en position de force.
Dans le cas de la France, les producteurs seront autorisés à se rassembler jusqu’à un seuil fixé à 3, 5 % de la production laitière communautaire et à un tiers de la production nationale. Cela signifie, par exemple, que tous les producteurs de lait de Bretagne auront la possibilité, s’ils le souhaitent, de se regrouper au sein d’une organisation unique pour négocier le prix et la quantité du lait vendu aux industriels. Le paquet « lait » introduira donc un changement en profondeur pour tous les producteurs.
Dès lors, me direz-vous, pourquoi n’a-t-on pas attendu d’avoir ce paquet « lait » et cette modification du droit de la concurrence européen pour mettre en place les contrats ? La raison est très simple : la Commission observe de près ce que nous faisons, afin de déterminer si nous croyons aux contrats et les mettons vraiment en place.
La France, je le rappelle, est la seule à porter l’idée de la modification du droit de la concurrence européen, la seule à réclamer une meilleure organisation des producteurs, la seule à avoir souligné la nécessité d’une relation plus équitable entre agriculteurs et industriels. Si jamais elle renonce et faillit sur la question des contrats, c’est la modification du droit de la concurrence et le paquet « lait » qui seront remis en cause à la fin de l’année !
Si je tiens tellement à ce que nous ne perdions pas une minute pour mettre en place les contrats, c’est parce que je souhaite que, d’ici à la fin de l’année, nous adoptions le paquet « lait » avec tout ce qui l’accompagne, à savoir la modification du droit de la concurrence ainsi que le renforcement et le regroupement des producteurs.
Par ailleurs, mesdames, messieurs les sénateurs, vous m’avez tous interrogé sur la filière viande. Je souhaite, dès à présent, vous répondre au sujet de ce secteur, avant d’évoquer celui des fruits et légumes.
Dans la filière viande, également, les contrats sont indispensables. Et je me contente d’observer les faits !
On nous disait, voilà quelques années, que la filière agneau était condamnée en France. On nous expliquait, et c’était vrai, que la Nouvelle-Zélande inondait le marché avec des agneaux qui étaient en fait des sous-produits de la filière laine et dont la valeur était nulle, en les vendant à des prix bien trop compétitifs pour que nous puissions lutter. Par conséquent, il valait mieux, selon certains, que les agriculteurs français abandonnent cette production.
Or, force est de le constater, une nouvelle organisation du secteur, en l’occurrence le regroupement des producteurs, ainsi que la mise en place de contrats de premier et de deuxième niveaux passés entre les agriculteurs et les industriels – auxquels, je l’espère, la grande distribution s’associera demain ... –, a permis de sauver la filière agneau française. Vous reconnaîtrez aussi que le bilan de santé de la PAC, qui a permis de redistribuer 120 millions d’euros en faveur de la filière, a également contribué à ce sauvetage.
Sans ces contrats, c’en était fini de la filière agneau française !
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous le dis avec beaucoup de gravité : si la filière bovine, à laquelle je suis viscéralement attaché, comme vous tous ici, car elle est une partie de l’identité de la France et de nos territoires, ne prend pas, prochainement, un certain nombre de décisions, sur lesquelles nous travaillons depuis plusieurs mois, elle connaîtra des difficultés dont elle ne se relèvera pas.
Si elle ne met pas en place le GIE, ou groupement d’intérêt économique, pour l’exportation, elle ne parviendra pas à gagner des parts de marché à l’étranger. Si l’audit de l’ensemble des abattoirs français n’est pas mené à son terme, elle ne rattrapera pas son retard de compétitivité par rapport à l’Allemagne. Si les interprofessions ne se regroupent pas davantage, nous ne réussirons pas à mieux valoriser la viande bovine française. Enfin, si nous ne définissons pas davantage d’indications géographiques protégées, de labels de qualité ou d’autres dispositifs du même ordre, le prix de nos races à viande continuera d’être aligné sur celui de la vache de réforme, ce qui ne manquera pas, bien sûr, de pénaliser les revenus des producteurs. Il est urgent que cette filière se réforme !
Mesdames, messieurs les sénateurs, vous vous êtes également battus en faveur de la mise en place de dispositifs d’assurance au sein de cette filière ; j’y suis tout à fait favorable.
La sècheresse dramatique qui plonge actuellement des dizaines de milliers de producteurs dans une détresse terrible, sur l’ensemble du territoire français, nous montre qu’il est indispensable de prévoir un dispositif de réassurance publique, qui permettra d’offrir des sécurités financières à nos éleveurs.
À défaut, nous serons encore contraints d’activer le Fonds national de garantie des calamités agricoles, comme ce sera le cas dans quelques semaines, sur ma demande, et de faire payer par l’État ce que les agriculteurs n’auront pas pu vendre, soit, pour les seuls éleveurs, la totalité de leur production. C’est infiniment regrettable !
J’en viens aux contrats interfilières, pour lesquels je plaide depuis des mois. Je regrette que nécessité fasse loi en la matière et qu’il ait fallu une sècheresse pour que se mette en place un tel dispositif.
Pourquoi ces contrats ne sont-ils pas disponibles dès maintenant ? Pourquoi a-t-on tant tardé ? Pourquoi certains dirigeants agricoles n’ont-ils pas su prendre en main le destin des filières dont ils ont la responsabilité ?
Le calendrier s’accélère aujourd’hui, et je m’en réjouis. Les contrats entre les filières de l’élevage et celles des grandes productions seront signés, au plus tard, dans trois semaines ou un mois, car l’urgence s’en fait sentir. Il est dommage que ces documents n’aient pas été prêts un peu plus tôt ; cela aurait sans doute permis de prévenir les difficultés actuelles en termes de mise à disposition de fourrage et de paille.
Je tiens à rassurer Aymeri de Montesquiou, qui a plaidé pour la mise en place de ce dispositif : nous irons plus vite que prévu, et j’espère que les premiers contrats entre céréaliers et éleveurs pourront être signés avant le 1er juillet prochain, en vue de garantir les prix ainsi que des quantités suffisantes de fourrage pour nourrir les bêtes. Celles-ci en ont bien besoin en cette période de sècheresse !
En ce qui concerne maintenant les fruits et légumes, le décret relatif à ce secteur est entré en vigueur le 1er mars 2011. Nous avons privilégié la voie réglementaire pour une raison très simple : il y avait urgence à agir, et l’interprofession m’avait fait savoir, très clairement, qu’elle n’était pas prête à signer un accord.
S’il y a bien une filière qui doit faire évoluer ses relations commerciales, c’est celle des fruits et légumes ! La contractualisation écrite a été mise en place dans ce secteur afin d’en modifier les pratiques, qui sont loin d’être excellentes, et de contribuer à changer les mentalités.
Qu’on ne me dise pas que le texte de ce décret n’a pas été discuté ! Il a fait l’objet d’une longue négociation avec les organisations professionnelles agricoles, qui l’ont majoritairement approuvé.
Tel qu’il est rédigé, ce décret est tout à fait applicable. Certains me disent que trois ans, c’est trop long. D’autres estiment que des durées plus courtes seraient de nature à nuire aux intérêts des producteurs. Ces derniers ont raison : si nous voulons inscrire nos relations commerciales dans la durée, il faut leur donner du temps. Cela n’empêche nullement de réviser les prix et les quantités, bien sûr ; d’ailleurs, le contrat le prévoit. Cela n’interdit pas non plus aux producteurs qui le souhaitent de contractualiser seulement une partie de leur production.
En effet, c’est l’acheteur qui doit commercialiser et contractualiser 100 % des volumes achetés. Pour ma part, je comprendrais tout à fait qu’un producteur ne s’engage que pour une partie de sa production, afin de s’assurer un revenu minimum et de garantir la stabilité d’une partie de ses ressources.
Si une disposition de ce décret mérite éventuellement d’être révisée, c’est celle qui est relative aux carreaux des producteurs des marchés de gros.
J’ai écouté attentivement ce que disait Daniel Soulage sur ce sujet sensible, dont m’ont également saisi plusieurs producteurs ; enfin, j’ai appris ce qui s’était passé à Agen, dans ce département que je connais bien. Nous aménagerons donc le décret afin de tenir compte des spécificités des carreaux de producteurs.
Une fois encore, je ne suis pas un garçon buté ! Comme je l’ai dit lors du débat sur la politique forestière et le développement de la filière bois, je suis le premier à reconnaître les erreurs qui ont été commises et à vouloir les corriger. S’agissant du cas particulier des carreaux, nous modifierons donc le dispositif.
Je retiens la proposition de Daniel Soulage visant à ce que les factures et bons de livraison tiennent lieu, dans ce cas précis, de contrats. Je ferai expertiser cette mesure ; si elle est juridiquement possible, nous la mettrons en œuvre.
Dans ce secteur des fruits et légumes, nous nous heurtons à des résistances qui tiennent tant aux principes qu’à l’organisation et de la filière. Celle-ci doit évoluer afin de laisser davantage de place à l’organisation et à la mutualisation des intérêts des producteurs. En cas d’échec, ces derniers connaîtront, là encore, des difficultés très importantes. Or j’ai pour souci premier et constant de défendre les intérêts de tous les producteurs agricoles de ce pays.
Pour conclure, je tiens à rappeler que le dispositif de contractualisation constitue non pas une solution miracle, mais un outil au sein d’une réflexion plus large, qui s’articule autour de trois piliers indispensables.
Le premier est la meilleure organisation des producteurs.
Ce qui ruine l’agriculture française, c’est le défaut d’organisation des producteurs. Ce qui rend si difficile la vie des agriculteurs français, c’est l’insuffisante solidarité entre les filières professionnelles, la non-organisation entre producteurs, industriels et distributeurs, enfin l’absence de coopération et de dialogue, pourtant indispensables, à l’intérieur d’une seule et même filière.
Voilà désormais deux ans que j’assume les fonctions de ministre de l’agriculture. Lors des réunions entre les professionnels que j’anime au rythme de trois ou quatre par semaine, j’assiste aux divisions, aux querelles, aux affrontements pricocholins. Je regrette profondément ces conflits car, au bout du compte, ce sont toujours les producteurs, ceux qui sont sur le terrain, qui en paient le prix.
Si nous voulons que les filières s’en sortent dans le monde et l’Europe d’aujourd’hui, il faut que les producteurs s’organisent davantage.
Le deuxième pilier indispensable est la régulation européenne des marchés.
Il n’est pas possible de mettre en place une libéralisation totale des marchés agricoles. Je veux le répéter avec force : les produits agricoles ne sont pas des produits comme les autres. Le temps de la production agricole n’est pas celui de la production industrielle ou de services. Ce secteur est en effet soumis à une irréversibilité qui n’existe dans aucune autre forme de production.
La production agricole, c’est la vie, et l’on ne peut pas tout changer, dans ce domaine, du jour au lendemain. On ne peut pas demander à une vache de cesser de fournir du lait dans les deux jours ou les trois prochaines semaines ! On ne peut ni interrompre une production de fruits et légumes en quelques jours ou quelques semaines, ni la calibrer au kilogramme près, alors que l’on ne sait rien des conditions météorologiques à venir. De même, on ne saurait maîtriser le rendement d’une parcelle de blé ou de colza. Il faut impérativement tenir compte de cette réalité, afin de s’orienter vers une régulation des marchés.
Réguler les marchés, c’est sauver l’agriculture européenne ! Ce combat mérite d’être mené.
Enfin, le troisième pilier indispensable est celui de la lutte contre la volatilité des prix agricoles à l’échelle mondiale.
Il serait temps que les responsables des pays les plus puissants de la planète, qui s’occuperont – pour une fois ! – d’agriculture, à la demande du Président de la République, lors de la prochaine réunion du G20, comprennent que le blé, le maïs, le riz et l’élevage sont aussi importants que le pétrole.
Il n’y a aucune raison de s’être autant battu pour mieux organiser les marchés pétroliers et énergétiques mondiaux, certes stratégiques pour la bonne marche du monde, et d’avoir délaissé à ce point l’agriculture, les matières premières agricoles, le blé et le riz.
Ces questions, également, sont stratégiques pour la planète ! En effet, lorsqu’un peuple n’est pas nourri, il se révolte, et l’instabilité qui en résulte est tout aussi dangereuse que celle qui naît de la pénurie de pétrole, de gaz ou des autres matières premières énergétiques. J’espère que les États membres participant à la réunion du G20 à Paris, les 22 et 23 juin prochains, auront compris, à la suite des négociations intenses que j’ai conduites durant un an à travers le monde, qu’il en va de leur intérêt de s’entendre sur la régulation des marchés agricoles, sur la lutte contre la volatilité des cours et sur une meilleure gouvernance agricole mondiale. Tel est mon vœu pour ce G20 organisé par la France !
Applaudissements sur les travées de l ’ UMP et de l ’ Union centriste. – Mmes Renée Nicoux et Maryvonne Blondin applaudissent également.
Mes chers collègues, nous en avons terminé avec cette question orale avec débat sur la contractualisation dans le secteur agricole.
Monsieur le président, lors du scrutin n° 218 du jeudi 19 mai 2011 sur l’ensemble du projet de loi sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, Mme Jacqueline Gourault souhaitait s’abstenir.
Je vous remercie par avance, monsieur le président, de bien vouloir faire procéder à cette rectification au Journal officiel.
Acte vous est donné de cette mise au point, ma chère collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, mercredi 25 mai 2011, à quatorze heures trente :
1. Débat sur l’état de la recherche en matière d’obésité.
2. Débat : « Quelle ambition pour la petite enfance dans notre pays ? ».
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le mercredi 25 mai 2011, à zéro heure trente.